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Patrons spatiaux d'une épidémie de la tordeuse des bourgeons de l'épinette sur la Côte-Nord : une approche de télédétection

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Academic year: 2021

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Patrons spatiaux d’une épidémie de la

tordeuse des bourgeons de l’épinette sur la

Côte-Nord : une approche de télédétection

Mémoire

Hugues Dorion

Maîtrise en sciences géographiques

Maître en sciences géographiques (M. Sc. Géogr.)

Québec, Canada

© Hugues Dorion, 2016

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Patrons spatiaux d’une épidémie de la

tordeuse des bourgeons de l’épinette sur la

Côte-Nord : une approche de télédétection

Mémoire

Hugues Dorion

Sous la direction de :

Martin Simard, directeur directrice de recherche

Sylvie Daniel, codirectrice de recherche

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RÉSUMÉ

La tordeuse des bourgeons de l’épinette (Choristoneura fumiferana, TBE) est l’insecte ravageur le plus important de la forêt boréale de l’est de l’Amérique du Nord. Depuis 2006, la région de la Côte-Nord est affectée par une épidémie de TBE et les superficies forestières infestées doublent annuellement. Des images satellitaires Landsat ont été utilisées pour cartographier la sévérité de l’épidémie avec une approche de détection de changements, en utilisant une image pré-épidémie (2004) et une image prise pendant l’épidémie (2013). Des relevés terrains de la défoliation par la TBE ont été utilisés pour développer (R2 = 0,50) une cartographie fiable (R2 de validation = 0,64) et non biaisée

de la sévérité des infestations de la TBE sur une échelle continue de sévérité (0-100%) pour la région d’étude. Une analyse des facteurs environnementaux affectant la sévérité des infestations (extraite de la carte de défoliation) a démontré l’importance de la composition forestière en sapin baumier tant à l’échelle locale qu’à l’échelle du paysage. De plus, une analyse de contexte spatial montre que dans les sites peu défoliés (défoliation cumulée < 50%), l’abondance locale (< 50 m de distance) du sapin baumier est le meilleur prédicteur de la sévérité locale de la défoliation, alors que dans les sites fortement défoliés (défoliation cumulée > 50%), le meilleur prédicteur est plutôt son abondance à l’échelle du paysage (distance > 500 m). Ces résultats suggèrent une interaction entre les échelles spatiales et temporelles lors des épidémies de TBE.

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TABLE DES MATIÈRES

RÉSUMÉ ...III TABLE DES MATIÈRES ... IV LISTE DES TABLEAUX ... V LISTE DES FIGURES ... VI REMERCIEMENTS ... VII AVANT-PROPOS ... VIII 1. INTRODUCTION ...1 2. RÉGION D’ÉTUDE ...6 3. MÉTHODES ...8 3.1ÉCHANTILLONNAGE ...8

3.2ANALYSE DES DONNÉES ...9

3.2.1 Images satellitaires ...9

3.2.2 Détection des changements ... 11

ÉQUATION 1... 12

3.2.3 Développement de la carte de défoliation ... 12

ÉQUATION 2... 12

3.3ANALYSE SPATIALE ... 13

3.3.1 Échelle spatiale locale ... 14

3.3.2 Échelle spatiale du paysage (contexte spatial) ... 15

4. RÉSULTATS ... 18

4.1CARTE DE DÉFOLIATION ... 18

4.2ANALYSE À L’ÉCHELLE LOCALE ... 21

4.3ANALYSE À L'ÉCHELLE DU PAYSAGE ... 22

5. DISCUSSION ... 24

5.1CARTOGRAPHIE DE LA DÉFOLIATION PAR LA TBE BASÉE SUR UNE L’UTILISATION D’IMAGES SATELLITAIRES ... 24

5.2INFLUENCE DES FACTEURS ENVIRONNEMENTAUX SUR LA SÉVÉRITÉ DE LA DÉFOLIATION ... 26

5.3INTERACTION ENTRE ÉCHELLES SPATIALES ET TEMPORELLES (« CROSS-SCALE INTERACTION ») . 27 6. CONCLUSION ... 30

BIBLIOGRAPHIE : ... 31

ANNEXE 1 ... 36

ANNEXE 2 ... 37

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LISTE DES TABLEAUX

Tableau 1: Informations sur les images utilisées. ... 10 Tableau 2: Indices de végétation calculés sur les images satellitaires Landsat. ... 11 Tableau 3: Liste des variables explicatives testées à l'échelle du site et à l'échelle du payage. ... 15 Tableau 4: Statistiques des modèles de régression entre les indices de changement (dNBR, dNDMI, dMSI, dNBR-2) et la défoliation observée. RMSE = Root mean square error (erreur quadratique moyenne). Les valeurs de P calculées pour l'ordonnée a l'origine ainsi que pour la pente testaient l’hypothèse que les coefficients n’étaient pas différents de 0 et 1 respectivement. ... 20 Tableau 5: Modèles candidats décrivant l’effet des variables de site (échelle locale) sur la sévérité de la défoliation cumulée observée. epn = épinette noire; epb = épinette blanche; sab = sapin baumier. Les signes « + » et « - » indiquent le sens de la relation. Exposition - 1 = nord-est et 1 = sud-ouest. ... 21

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LISTE DES FIGURES

Figure 1: Localisation de la région d'études. ... 7 Figure 2: Représentation graphique du modèle sigmoïdal utilisé pour développer la carte de défoliation. ... 13 Figure 3: Le contexte spatial, i.e. les caractéristiques du paysage (notamment la composition forestière) entourant spatialement un peuplement d’intérêt, (ellipses), peut influencer les processus à l’échelle du peuplement (carrés). Source : (Simard et al., 2012). ... 16 Figure 4: Carte de la sévérité de la défoliation cumulée par la TBE sur une échelle continue de sévérité entre 2004 et 2013. Les nuages, les ombres de nuages, les peuplements feuillus et les cours d’eau ont été masqués. ... 19 Figure 5: Résultat du modèle de prédiction de la défoliation cumulée (gauche) et de sa validation croisée (droite) pour l’indice de végétation du dNBR. Tous les sites (n = 54) sont représentés sur les deux graphiques mais la validation croisée a été effectuée à l’aide de 10 000 itérations où 2/3 des points étaient sélectionnés afin d’ajuster le modèle et 1/3 pour le valider. ... 20 Figure 6: Résultats de l'analyse du contexte spatial testant l'effet de la composition forestière dans le paysage sur la défoliation dans un peuplement donné. Chaque symbole représente la moyenne de 150 peuplements. Les cercles pleins et vides indiquent si les relations sont significatives ou non, respectivement. Le sapin baumier et l’épinette blanche ont une influence positive sur la sévérité de la défoliation alors que l’épinette noire et les feuillus ont une influence négative sur la sévérité de la défoliation par la TBE. ... 22

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REMERCIEMENTS

Tout d’abord, je tiens à adresser des remerciements à Martin Simard pour son grand soutien et sa confiance depuis le début de notre collaboration, à la fin de mon baccalauréat. Son grand intérêt pour la recherche scientifique ainsi que son humour (notamment) ont permis de susciter mon intérêt personnel vis-à-vis de la recherche en écologie. Plus particulièrement, son dévouement à vulgariser la science tout en la pratiquant de façon rigoureuse m’ont permis de me raccrocher au grand domaine de la recherche et d’y entrevoir une avenue d’avancement pour l’avenir.

Je tiens aussi à remercier Sylvie Daniel qui m’a d’abord enseignée durant le baccalauréat et qui a éveillé mon intérêt pour le grand domaine de la télédétection. Notamment, ses précieux conseils techniques en lien avec l’utilisation de l’imagerie satellitaire ont été déterminants en vue de mener à terme mon projet de maîtrise. Je tiens à souligner sa grande disponibilité tout au long de ce projet de recherche ainsi que sa rapidité à donner des rétroactions sur le travail accompli. Sa rigueur scientifique a constitué une importante source de motivation au cours de ce processus.

Je tiens à remercier spécialement Deepa Pureswaran et Louis De Grandpré, tous deux chercheurs au Centre de Foresterie des Laurentides, ainsi que Daniel Kneeshaw, professeur au département des sciences biologiques de l’UQAM, pour leur soutien financier et logistique lors des travaux terrain. J’aimerais particulièrement remercier Stéphane Bourassa ainsi que David Gervais du Centre de Foresterie des Laurentides pour leur aide logistique et technique inestimable, particulièrement lors de la campagne d’échantillonnage terrain, mais aussi tout au long du déroulement de mon projet de recherche. Pour ses conseils liés à la télédétection en milieu forestier, je tiens à remercier Luc Guindon du Centre de Foresterie des Laurentides.

Je remercie aussi Gabriel Joyal pour ses conseils techniques et nos discussions interminables à propos de « R », Maude Durette pour m’avoir inculqué les rudiments de la dendrochronologie et Anne Cotton-Gagnon pour les nombreuses révisions. Finalement, je tiens à souligner le support de mes parents, de mon frère Olivier, ainsi que l’ensemble de mes acolytes de maîtrise du local 3186 : Gabriel, Maude, Antoine, Étienne, Lady et Anne, qui m’ont grandement supporté et sans qui, le temps passé à la maîtrise n’aurait sans doute pas été aussi bon.

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AVANT-PROPOS

Ce mémoire est composé d’un chapitre, sous forme d’article, dans le but d’être publié. Je suis l’auteur principal du manuscrit. Les co-auteurs sont Martin Simard (directeur de recherche, U. Laval) et Sylvie Daniel (co-directrice de recherche, U. Laval). Cet article présente les principaux résultats des recherches effectuées lors de mes travaux de maîtrise et est rédigé en français. Une version ultérieure sera soumise pour publication dans une revue internationale ; Remote sensing of environment. Étant donné l’originalité et la pertinence de mes résultats, la publication de cette recherche, une fois traduite, permettra de partager mes résultats auprès de la communauté scientifique internationale. De plus, la publication me donnera l’opportunité de faire évaluer mes travaux par un comité de lecture expert dans le domaine.

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1. INTRODUCTION

Les épidémies d’insectes ravageurs ont un impact considérable sur les écosystèmes forestiers des régions tempérées et boréales (Mattson et Addy, 1975). Ces perturbations naturelles affectent plusieurs processus au sein des écosystèmes forestiers par leurs impacts sur la productivité primaire, le cycle des nutriments, les activités forestières et la biodiversité (Kurz et al., 2008; Schowalter et al., 1986).

La tordeuse des bourgeons de l'épinette (TBE; Choristoneura fumiferana (Clem.)) est l’insecte ravageur le plus important de la forêt boréale de l’est de l’Amérique du Nord (MacLean, 1984; Saucier et al., 2009; Volney et Fleming, 2000). En période épidémique, la TBE peut causer une défoliation sévère chez plusieurs espèces de conifères dont le sapin baumier (Abies balsamea (L.) Mill.), son hôte principal, mais également l'épinette blanche (Picea glauca (Moench) Voss) et l'épinette noire (Picea mariana). Toutefois, comparativement aux autres espèces hôtes, le sapin est généralement l’espèce la plus sévèrement défoliée, à cause de la synchronicité entre la phénologie de l’ouverture de ses bourgeons (débourrement) avec celle de l’émergence printanière de la TBE (Greenbank, 1963).

Plusieurs facteurs de sites (échelle du peuplement) ont été identifiés afin d'expliquer localement les infestations. Les plus importants sont la composition forestière, l'âge des peuplements et les conditions de drainage. La présence de sapin baumier dans un peuplement est l’un des principaux facteurs expliquant la présence (Blais, 1983; Pothier et al., 2012) ainsi que la sévérité (Hennigar et al., 2008; Nealis et Régnière, 2004) des infestations de TBE. De manière générale, le sapin baumier subit une plus grande défoliation que les autres espèces et sa présence au sein d'un peuplement peut augmenter la sévérité de la défoliation d'autres espèces hôtes (Hennigar et al., 2008). La présence d'espèces feuillues influence également la sévérité de la défoliation du sapin baumier par la TBE. Dans les peuplements mélangés (feuillus et conifères) à prédominance de sapin baumier, le taux de défoliation du sapin baumier causé par la TBE serait inversement proportionnel au pourcentage de feuillus présents dans le peuplement (Su et al.,1996). L'âge des peuplements est également un facteur important pour expliquer la sévérité de la défoliation. Les peuplements immatures (35-40 ans) sont moins sévèrement défoliés par la TBE que les peuplements matures (65-70 ans) (MacLean, 1980). Enfin, des conditions de drainage déficientes ou excessives, reliées à

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des dépôts de surface très fins ou grossiers, augmenteraient la vulnérabilité des peuplements aux infestations de la TBE, en influençant les conditions de croissances des arbres (Archambault et al., 1990; Dupont et al., 1991; Hix et al., 1987; Lynch et Witter, 1985). Toutefois, il existe une grande variabilité dans l'intensité des infestations dans des sites similaires en terme de composition forestière, d'âge et de drainage (MacLean, 1980), ce qui suggère qu'en plus des facteurs de sites, certains facteurs agissant à un ordre spatial plus élevé (par exemple : échelle du paysage) pourraient influencer la présence et la sévérité des infestations de la TBE (Bergeron et al., 1995). Ainsi, dans un peuplement, l’impact de la TBE pourrait être influencé par le contexte spatial, c'est-à-dire les caractéristiques du paysage entourant le peuplement affecté et plus particulièrement, la composition forestière entourant ce peuplement (par exemple la quantité de sapinières pures à proximité du peuplement d'intérêt). Notamment, l'abondance d'espèces feuillues dans le paysage (dans un rayon de plus d’1 km) entourant les peuplements affectés par la TBE diminuerait la défoliation causée au sapin baumier (Campbell et al., 1998). Toutefois, dans un site donné lors d’une épidémie de la TBE, l'influence de l'abondance du sapin baumier, de l’épinette noire ou des feuillus dans le paysage sur la défoliation est moins bien connue.

Afin d’améliorer la compréhension de la dynamique spatiale des infestations, il est nécessaire de connaître la sévérité de la défoliation des peuplements à l’échelle du paysage. Traditionnellement, le suivi des aires défoliées annuellement par la TBE est exécuté par relevé aérien. Par contre, ces relevés ont plusieurs limitations : 1) le territoire susceptible aux infestations de la TBE n’est pas survolé en totalité, 2) les relevés ne sont effectués que lorsque l’infestation atteint une certaine sévérité, 3) la résolution spatiale est très variable (polygones de 0,1 à > 2000 hectares) et 4) la sévérité de la défoliation est estimée en quelques classes seulement (habituellement 3). Ainsi, ces limitations impliquent un potentiel d’omission de zones affectées par la TBE, en plus de masquer la dynamique fine des infestations de la TBE, dû à la difficulté à classifier visuellement l’effet diffus et continu de la sévérité de la défoliation dans l’espace (MacLean et MacKinnon, 1996).

L'utilisation de la télédétection à l'aide de la famille de satellite Landsat (notamment 5, 7 et 8) permettrait de remédier à ces lacunes. Les satellites Landsat acquièrent des images offrant une large couverture spatiale (images de 185 km x 185 km) tout en

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proposant une résolution spatiale fine (pixels de 30 m x 30 m) et constante (toujours la même taille de pixel) dans une large plage spectrale (visible, infrarouge proche et infrarouge moyen). Ceci permet la détection de certains symptômes de défoliation avant qu'ils ne soient apparents visuellement, tout en offrant une grille d’analyse fine qui permet de tenir compte de l’hétérogénéité spatiale de la composition forestière des peuplements susceptibles à la TBE. Bien qu'une telle application de la télédétection soit actuellement employée dans le cas d'autres épidémies d'insectes (Eisenhart et Veblen, 2000; Franklin et al., 2008; Rullán-Silva et al., 2015; Townsend et al., 2012; Wulder et al., 2006), aucune étude n'a utilisé la télédétection afin de quantifier les dommages causés par les infestations de la TBE.

Depuis 2006, une épidémie de la TBE affecte plusieurs régions du Québec et chaque année, les superficies infestées doublent (MFFP, 2013). Historiquement, les épidémies de la TBE se concentraient principalement dans la zone bioclimatique de la sapinière à bouleau blanc, alors que l'épidémie actuelle se déplace plus au nord dans le domaine bioclimatique de la pessière noire à mousse. La majorité des études sur la TBE ont porté sur son hôte principal, le sapin baumier, et bien que certaines études aient documenté l'impact de la composition forestière sur l'intensité des épidémies (Campbell et al., 2008; Hennigar et al., 2008; Nealis et Régnière, 2004), on connaît peu l'impact de la TBE sur l'épinette noire, et plus particulièrement, dans le domaine bioclimatique de la pessière noire à mousse (Tremblay et al., 2011). On y connaît donc moins bien l'impact réel des épidémies de la TBE et les facteurs qui en contrôlent la progression spatiale. Ce projet a pour objectif global de déterminer quels sont les facteurs environnementaux qui influencent les patrons spatiaux des infestations de la TBE. Cet objectif global s’articule ainsi autour de trois objectifs secondaires. Le premier objectif vise à cartographier l'étendue et la sévérité des infestations de la TBE dans la région de la Côte-Nord entre 2004 et 2013 (défoliation cumulée) sur une échelle continue de sévérité (0-100%) à l’aide d’images satellitaires Landsat. Le second objectif vise à déterminer les facteurs locaux (échelle du peuplement) qui influencent la sévérité des infestations de la TBE. Le troisième objectif vise à déterminer l’effet de la composition forestière du paysage environnant (1 – 300 km2) sur la sévérité de la défoliation dans un peuplement

donné en considérant notamment l’effet de la composition forestière pour des peuplements légèrement et sévèrement défoliés. Pour cette dernière analyse, la sévérité

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de la défoliation sera utilisée à titre de proxy pour départager les peuplements en début d’infestation (défoliation légère) des peuplements où l’infestation est avancée (défoliation sévère), puisqu’on reconnaît généralement que la mortalité d’un peuplement survient après 5 à 7 ans de défoliation annuelle sévère (MacLean, 1980).

Pour les objectifs 2 et 3, nous posons l'hypothèse que les facteurs de paysages seraient aussi importants que les facteurs de sites pour expliquer la dynamique spatiale des infestations de la TBE à l'échelle du paysage. Plus spécifiquement, à faible densité de TBE (début d'épidémie), les facteurs de sites (drainage, altitude, composition forestière dans le peuplement) auraient une influence importante sur l'intensité des infestations (Bergeron et al., 1995). Toutefois, à mesure que la densité de TBE augmente, certains facteurs de paysage (composition de la mosaïque forestière) permettraient de mieux expliquer la présence et l'intensité accrues d’infestations dans un lieu donné.

La dynamique spatiale des infestations de la TBE serait influencée en début d'épidémie (faible densité de TBE et légère défoliation) par la composition forestière du peuplement (prédominance de sapin baumier à l’échelle spatiale locale), qui permettrait ainsi à la TBE de franchir le seuil éruptif propre à cette échelle spatiale, comme il a été démontré pour d'autres insectes ravageurs (Raffa et al., 2008). Toutefois, à mesure que l'épidémie s'intensifie (haute densité de TBE et forte défoliation), les facteurs de paysages pourraient avoir une importance égale ou supérieure aux facteurs de sites, puisque les facteurs locaux n'agissent normalement que sur une courte échelle spatiale et temporelle et ne permettent pas d'expliquer adéquatement à eux seuls les causes de la synchronie et de la diffusion des infestations à l'échelle du paysage (Peters et al., 2004; Raffa et al., 2008). Parmi les facteurs de paysages pouvant affecter la défoliation, on pourrait s'attendre à ce que (A) la proportion de sapinières pures entourant un peuplement d'espèces-hôtes de la TBE y influence la défoliation par la continuité spatiale de peuplements fortement vulnérables aux infestations de la TBE. On pourrait également s'attendre à ce que (B) l'abondance d'espèces feuillues entourant un peuplement d'intérêt pourrait y diminuer l'intensité des infestations.

Par conséquent, nous prédisons (A) qu’à l’échelle du peuplement, la sévérité de la défoliation sera principalement reliée à la présence de sapinières pures d'âge mature dans les sites où les conditions de drainage sont déficientes ou excessives et (B) que la sévérité de la défoliation dans les stades avancés de l'épidémie sera proportionnelle à la

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quantité de sapinières pures dans le paysage (continuité spatiale) alors qu'elle sera réduite avec une augmentation de la proportion de peuplements d'épinette noire ou de peuplements feuillus.

Pour le premier objectif, la détection de la sévérité des infestations sera réalisée par une approche de détection des changements entre 2004 et 2013, basée sur le calcul d’indices de végétation réalisés sur les images pré-perturbation (2004) et pendant la perturbation (2013). Pour les objectifs 2 et 3, nous utiliserons une approche de sélection de modèles sur des analyses de régression multiples où la sévérité de la défoliation par la TBE extraite de la carte de défoliation (variable réponse) sera comparée à des facteurs de sites (objectif 2) et à des facteurs de paysage (objectif 3).

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2. RÉGION D’ÉTUDE

La région d’étude (48°30’ – 51°00’N; 67°00’ – 70°00’W) est située dans le nord-est du Québec (Canada), sur la rive nord de l’estuaire du fleuve St-Laurent (Fig. 1). L’aire d’étude se situe plus précisément entre la ville de Baie-Comeau et le réservoir Manicouagan au sein de la région physiographique du Bouclier canadien (province géologique de Grenville). Cette région est caractérisée par un relief accidenté composé de hautes collines et de massifs montagneux érodés. Un réseau hydrographique développé s’incise dans le fond des vallées dans une orientation sud-nord (Robitaille et Saucier, 1998). On retrouve principalement des tills minces (<1 m) sur un socle rocheux qui présente de nombreux affleurements. Le fond des vallées est principalement recouvert d’épais dépôts fluvioglaciaires et l’altitude maximale est d’approximativement 500 m. Le climat, de type maritime, y est relativement frais et est caractérisé par une température moyenne annuelle de 1.7°C (Station Baie-Comeau ; moyenne de juillet = 15.6°C ; moyenne de janvier = -14.3°C ; 1981-2010). Les précipitations moyennes annuelles sont de 1001 mm, dont 34% tombent sous forme de neige (Environment Canada, 2010).

Ce territoire est situé à l’interface de deux domaines bioclimatiques : au sud se trouve la sapinière à bouleau blanc et au nord se trouve la pessière noire à mousse. La forêt boréale continue de cette région se caractérise par une codominance du sapin baumier (Abies balsamea [L.] Mill.) et de l’épinette noire (Picea mariana [Mill.] B.S.P.). Les sites mésiques sont normalement dominés par le sapin baumier en compagnie du bouleau à papier (Betula papyrifera Marsh) et du peuplier faux-tremble (Populus tremuloides Michx.) (Robitaille et Saucier, 1998). L‘abondance de l’épinette noire augmente dans un gradient latitudinal, partant de la zone littorale au sud vers l’intérieur des terres au nord (De Grandpré et al., 2008). Le régime de perturbations est principalement constitué des feux, des épidémies d’insectes et des chablis (dynamique de trouées). Puisque l’intervalle de retour des feux est relativement long (~270 ans; (Bouchard et al., 2008), ce sont plutôt les épidémies d’insectes défoliateurs qui sont responsables de la dynamique des grandes trouées (De Grandpré et al., 2008). Plus précisément, ce sont la TBE et l’arpenteuse de la pruche (Lambdina fiscellaria) qui causent les plus grands dommages à la forêt résineuse du Québec (Jobin, 1973; Jobin et Desaulniers, 1981; MacLean, 1984; Otvos et al., 1979; Saucier et al., 2009). La sévérité des épidémies d’insectes est particulièrement élevée dans le domaine bioclimatique de la sapinière à

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bouleau blanc, qui a été largement affectée par des infestations de la TBE d’un point de vue historique (Boulanger et al., 2012).

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3. MÉTHODES

Des relevés terrains ont été effectués à l'été 2013 au sein du territoire d’étude afin d'évaluer la sévérité de la défoliation par la TBE et de quantifier des facteurs environnementaux permettant d'expliquer la sévérité des infestations de la TBE. Ces relevés terrains ont ensuite été mis en relation avec des images satellitaires afin de dresser la première cartographie à fine résolution spatiale de la sévérité de la défoliation par la TBE sur une échelle continue de sévérité. Cette carte a ensuite été mise en relation avec des données complémentaires récoltées lors de l'échantillonnage terrain afin de mieux comprendre les facteurs qui affectent la sévérité des infestations tant à l'échelle du peuplement qu'à l'échelle du paysage.

3.1 Échantillonnage

L'échantillonnage a été concentré dans des peuplements susceptibles à la TBE (peuplement à dominance de sapin baumier, d’épinette blanche ou d’épinette noire; (MacLean et MacKinnon, 1997) où les impacts de la défoliation étaient apparents. La carte écoforestière du Québec du 4e inventaire (MFFP, 2014) a été utilisée en conjonction avec les relevés aériens de la défoliation annuelle pour l’année 2012 (MFFP, 2013) afin de localiser les peuplements susceptibles (sapinières, pessières) affectés par la TBE à différents degrés de défoliation. Les peuplements sélectionnés devaient être homogènes en structure et en composition sur une superficie d'au moins 1 hectare afin de réduire l’erreur et le décalage spatial entre les levées terrains et les images satellitaires. Au cours de la période d'échantillonnage de 2013 (début juin à fin août), 77 sites d'une superficie de 235 m² chacun ont été échantillonnés sur la Côte-Nord. Dans chacun des sites, 3 sous-placettes circulaires de 5 m de rayon ont été établis selon un patron triangulaire (triangle équilatéral de 30 m de côté). L’endroit où le point central du site était établi dans chacun des peuplements préalablement sélectionnés a été alétatoirement sélectionné. Le point central de chaque site a été géolocalisé à l’aide d’un récepteur GPS de haute précision Trimble GeoXT 6000 (300-750 enregistrements par site, 92% des sites avaient une précision horizontale de moins de 1,5 m (min = 0,5 m; max = 3,3 m) après correction différentielle). L’exposition et la pente du site ont été notées pour chacun des sites. Puisque la défoliation par la TBE se termine généralement autour de la mi-juillet, les relevés terrains de la défoliation ont été réalisés à partir du mois d’août 2013. Pour chacun des arbres sur pied de plus de 1,3 m

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de hauteur se trouvant dans les sous-placettes, les paramètres suivants ont été notés : l’espèce, le diamètre à hauteur de poitrine, le statut (vivant ou mort) et le niveau de défoliation cumulée basé sur la biomasse foliaire de chaque arbre. On fait la distinction entre la perte naturelle des aiguilles qui survient près du tronc (la perte naturelle des aiguilles n’est pas comptée dans la sévérité de la défoliation), de la défoliation par la TBE qu’on observe plutôt à l’extrémité des branches. Pour chacun des individus de sapin baumier, d’épinette noire et d’épinette blanche, la défoliation cumulée a été estimée en 7 classes : 0 - 5%, 5 - 15%, 15 – 25%, 25 – 50%, 50 – 75%, 75 – 95% et 95 – 100%.

L’âge du peuplement a été estimé en prélevant une carotte sur les trois plus gros arbres du peuplement appartenant à des espèces de début de succession après feu (épinette noire, épinette blanche, pin gris (Pinus banksiana) ou peuplier faux-tremble dans un rayon de 50 m à partir du centre du site. Chacune des carottes a été prélevée à 30 cm du sol afin de pouvoir estimer l’âge du peuplement. Les échantillons ont ensuite été datés en utilisant les méthodes standards de dendrochronologie (Stokes, 1996). L’exposition a été transformée en « southwestness index » en calculant le cosinus de la différence entre l’exposition mesurée sur le terrain et l’azimut de 225° (Beers et al., 1966). Cet indice qui varie de -1 (nord-est) à 1 (sud-ouest) représente le contraste d’exposition au soleil. La sévérité de la défoliation pour chacun des sites a été calculée en deux étapes. D’abord, pour chaque arbre susceptible à la TBE dans un site, la médiane de la classe de défoliation observée était pondérée par leur surface terrière respective. Ensuite, le cumul de la défoliation des arbres en unité de surface terrière était rapporté sur la surface terrière totale d’un site pour les arbres susceptibles à la TBE, puis converti en défoliation relative sur une échelle de 0 à 100%.

3.2 Analyse des données

3.2.1 Images satellitaires

Les images satellitaires pré-épidémie (2004) et pendant l'épidémie (2013), respectivement Landsat TM 5 et Landsat OLI 8, ont été acquises à partir des données d'archives Landsat du United States Geological Survey (USGS, 2015a) (Tableau 1). Des images de niveau de correction L1T, corrigées pour la topographie, ont été utilisées. Les comptes numériques contenus dans chacune de ces images ont été convertis en réflectance au sommet de l'atmosphère (TOAR, Top of Atmosphere reflectance) à l'aide

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des équations standards fournies par le United State Geological Survey (USGS, 2011, 2015b) et du logiciel GRASS GIS (GRASS, 2015). Les images corrigées en réflectance de surface n'ont pas été utilisées dû à la présence d'artéfacts de nuages dans les images Landsat OLI 8 (USGS, 2015c). La région d’étude est couverte en totalité par 2 images Landsat (trajectoire 12, rangées 25-26) dans la même trajectoire, par conséquent acquises à quelques minutes d’intervalle dans des conditions atmosphériques similaires, favorisant ainsi le mosaïquage des images. Les images mosaïquées seront dorénavant appelées « l’image ». Les images de type Landsat présentent de nombreux avantages pour la détection des épidémies de TBE liés à leur résolution spatiale, spectrale et temporelle. Chaque image couvre une étendue spatiale de 185 km x 185 km, soit une étendue comparable à celle des infestations régionales de la TBE. Les images ont une résolution spatiale (taille du pixel) de 30 m x 30 m, qui offre un niveau d'abstraction du couvert forestier optimal en vue d'étudier les perturbations naturelles en milieu forestier dont l'impact est spatialement diffus, telle que la défoliation par la TBE. De plus, la résolution spectrale de chacune des images couvre une étendue de longueurs d’ondes du visible à l’infrarouge moyen ce qui favorise la quantification de la santé des milieux forestiers. La sensibilité de la bande Landsat infrarouge proche permet de détecter la biomasse alors que les bandes Landsat des infrarouges moyens sont plus sensibles au contenu en eau des surfaces couvertes de végétation par rapport aux surfaces sans végétation (USGS, 2013). Une image de la fin septembre 2004 (niveau endémique de TBE dans le paysage) a été utilisée comme image de base pour être ensuite comparée à une image du début d’octobre 2013 (fortes infestations de la TBE) acquise pendant l’épidémie (Tableau 1). Le choix de ces dates réside dans le fait que (1) l’épidémie de la TBE a commencé vers 2006 sur la Côte-Nord, (2) la défoliation par la TBE se termine généralement autour de la mi-juillet et (3) le succès de la détection de changements interannuels en milieu forestier est favorisé par des images acquises à des dates anniversaires (concordance phénologique).

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11 3.2.2 Détection des changements

La détection des changements a été réalisée selon une approche pixel à pixel basée sur la comparaison des niveaux de réflectance au sommet de l'atmosphère de chacune des images. Aucune correction atmosphérique n’a été appliquée aux images puisque les zones couvertes de nuages ou d'ombres nuageuses ont été masquées, que seulement des images de deux dates différentes (2004 et 2013) mais acquises à la même période dans l’année (conditions atmosphériques similaires) ont été utilisées et que la détection des changements est basée sur l'utilisation d'indices de végétation normalisés ou faisant intervenir un rapport d'images (Song et al., 2001; Tableau 2). Les indices de végétation « MSI », « NDMI », « NBR » et « NBR2 » ont été calculés sur chacune des images (2004 et 2013) afin de rehausser les différences entre la végétation saine (incluant celle non affectée par la TBE; Tableau 2) et la végétation dépérissante ou morte (incluant celle affectée par la TBE).

Tableau 2: Indices de végétation calculés sur les images satellitaires Landsat.

Chacun des indices de végétation choisis fait intervenir les bandes spectrales de l’infrarouge proche et/ou de l’infrarouge moyen puisque ces indices se sont montrés plus performants pour faire la détection des épidémies d’insectes en milieux forestiers que les indices faisant intervenir les bandes spectrales du visible (De Beurs et Townsend, 2008). Une image de différence (image d’indice de changement) a ensuite été calculée en soustrayant l’image acquise pendant l’épidémie (2013; Landsat OLI 8) à l’image pré-épidémie (2004, Landsat TM 5) et ce, pour chacun des indices de végétation choisis :

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Équation 1

∆𝑉𝐼 = 𝐼𝑉 (𝑝𝑟é − é𝑝𝑖𝑑é𝑚𝑖𝑒) − 𝐼𝑉(𝑝𝑒𝑛𝑑𝑎𝑛𝑡 𝑙′é𝑝𝑖𝑑é𝑚𝑖𝑒) (1)

où ∆VI représente la différence entre l'indice de végétation pré-épidémie (VIpré-épidémie) et

l'indice de végétation pendant l'épidémie (VIpendant l'épidémie). L'image de différence (∆VI)

associée à chacun des indices de végétation sera dorénavant appelé « indice de changement ». Chacun des indices de changement a ensuite été rééchantillonné à 60 m en utilisant un algorithme d’interpolation bilinéaire afin de diminuer la variabilité interpixel tout en améliorant la relation avec les relevés terrains. Les images rééchantillonnées ont ensuite été utilisées pour développer des modèles de régression reliant les valeurs d'indices de changement aux données de défoliation cumulée observées lors des relevés terrains de 2013.

3.2.3 Développement de la carte de défoliation

La défoliation cumulée estimée sur le terrain a été mise en relation avec chacune des images de changement à l’aide d’un modèle de régression non-linéaire de type sigmoïdal afin de contraindre la prédiction des valeurs de défoliation entre 0 et 100% de sévérité (Townsend et al., 2012):

𝐷é𝑓𝑜𝑙𝑖𝑎𝑡𝑖𝑜𝑛 𝑜𝑏𝑠𝑒𝑟𝑣é𝑒 = (𝑏 − 𝑎)

1 + exp [−(𝑐 + 𝑑 ∗ ∆𝐼𝑉)] (2)

Équation 2

où les paramètres a et b représentent respectivement les asymptotes inférieure et supérieure de la courbe (a = 0% - minimum de défoliation possible et b = 100% - maximum de défoliation possible), c et d représentent des paramètres déterminant la forme de la courbe sigmoïdale (Figure 2), et ΔVI représente l’ensemble des valeurs possibles que peut prendre l’indice de changement calculé à partir de chacun des quatre indices de végétation (Townsend et al., 2012). Pour chacun des indices de changement (∆MSI, ∆NDMI, ∆NBR, ∆NBR2), un masque de nuage et d'ombrage a été appliqué. Ces masques ont été généré à partir du logiciel « Fmask » (Zhu et al., 2015; Zhu et Woodcock, 2012). Ceci a mené à l'élimination de 23 sites, laissant ainsi 54 observations terrains en vue d'établir la relation entre la défoliation observée et chacun des quatre

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indices de changement. À l’aide du logiciel R (R Core Team, 2014) et suivant un processus itératif, 2/3 des observations ont été sélectionnées aléatoirement pour servir à l’ajustement du modèle. L’autre tiers a servi à valider le modèle et ce, pour 10 000 itérations. Ceci a été fait afin d’avoir la certitude que le résultat obtenu était totalement indépendant des sous-échantillons choisis pour l’ajustement et la validation. L’équation de la régression la plus significative a été appliquée à l’image de changement associée afin de générer une carte des impacts cumulés de la TBE pour l’année 2013. Cette carte servira pour les analyses subséquentes.

Figure 2: Représentation graphique du modèle sigmoïdal utilisé pour développer la carte de défoliation.

3.3 Analyse spatiale

Les données récoltées lors de l'échantillonnage de 2013 ont été utilisées afin de déterminer les facteurs qui influencent la sévérité de la défoliation par la TBE à l’échelle du site et à l’échelle du paysage (1 - 300 km2) en deux analyses distinctes. Pour ces

analyses, la variable réponse (défoliation observée rapportée en pourcentage de la surface terrière totale du peuplement échantillonné) a été mise en relation avec les variables explicatives correspondantes (tableau 3) au cours d'un processus de sélection de modèle exécutée à l’aide du logiciel R et du package « AICcmodavg » (Mazerolle, 2011).

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14 3.3.1 Échelle spatiale locale

Puisque dans l’analyse à l’échelle du site la variable réponse est la défoliation observée lors des relevés terrain, l’ensemble des observations a été utilisé en régression (n = 77). Les variables explicatives (Tableau 3) du milieu physique comprenaient la pente, l’exposition (southwestness index), l’altitude, la classe de drainage et le nombre de degrés-jours, interpolés pour chaque site à l’aide du logiciel BioSIM10 (Régnière et al., 2013). Les six variables explicatives de composition forestière utilisées à l’échelle du site sont 1) la proportion de sapin baumier, 2) la proportion d’épinette noire, 3) la proportion cumulée de sapin baumier et d’épinette blanche (%SBSE; les deux espèces sont souvent confondues en photo-interprétation pour les cartes écoforestières, donc ce groupe d’essences peut représenter un meilleur comparateur que le sapin baumier à lui seul pour les analyses subséquentes), 4) le pourcentage d’arbres feuillus (ensemble des espèces feuillues dans un peuplement), 5) le pourcentage d’espèces hôtes de la TBE (sapin baumier + épinette blanche + épinette noire) et 6) le pourcentage d’espèces non-hôtes de la TBE (arbres feuillus [majoritairement bouleau blanc et peuplier faux-tremble] + espèces conifériennes non susceptibles à la TBE [majoritairement le pin gris et le mélèze laricin (Larix laricina)]). Finalement, l’âge de chacun des sites correspond à l’âge de la plus vieille carotte prélevée dans un site donné. La sélection de modèles a été précédée d’une analyse de corrélation entres les variables explicatives de composition forestière afin de tester les variables fortement corrélées (R > 0,5) dans des modèles distincts afin de ne pas gonfler le pouvoir explicatif de l’un ou l’autre des modèles candidats à l’analyse. Les variables de proportion de sapin baumier, d’épinette noire, de sapin baumier et d’épinette blanche, d’espèces hôtes et enfin d'espèces non hôtes ont été testées séparément. Les modèles candidats étaient d’abord classés en fonction de leur valeur AICc (plus la valeur de AICc est basse plus le modèle est susceptible d'expliquer la variabilité de la variable réponse), puis seuls les modèles où chacune des variables était significative au seuil de 15% étaient conservés dans l’analyse. Les cinq meilleurs modèles étaient dès lors comparés entre eux et leur AICc et R2ajusté respectif

étaient calculés afin de mieux pouvoir les comparer. L'utilisation d'un seuil de 15% pour la valeur de P est basée sur l'assomption que les données écologiques utilisées sont des données bruitées et que l'utilisation d'un seuil inférieur à cette valeur mènerait nécessairement vers le rejet de la grande majorité des modèles potentiels.

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Tableau 3: Liste des variables explicatives testées à l'échelle du site et à l'échelle du payage. Échelle locale Variables physiques - Pente - Exposition - Altitude - Classe de drainage

- Degrés jours au 1er août 2013

Composition forestière et structure des peuplements - % sapin baumier

- % épinette noire

- % sapin baumier + épinette blanche - % feuillu - % espèces hôtes - % espèces non-hôtes - âge du peuplement Échelle du paysage Composition forestière

- % de sapin baumier et d'épinette blanche dans un rayon de x km autour du point d'intérêt

- % d'épinette noire dans un rayon de x km autour du point d'intérêt

- % de peuplements feuillus dans un rayon de x km autour du point d'intérêt

3.3.2 Échelle spatiale du paysage (contexte spatial)

Pour l’analyse à l’échelle du paysage, des points ont été sélectionnés aléatoirement dans la carte de défoliation cumulée développée à l’objectif 1, et la sévérité de la défoliation du pixel correspondant a été extraite pour servir de variable réponse dans le processus de sélection de modèles subséquents. Cet échantillonnage devrait être plus représentatif du territoire en entier puisque l’échantillonnage terrain était limité par l’accès aux sites (les routes principales courent le long des vallées et par conséquent l’ensemble du gradient altitudinal n’a pu être couvert). Un jeu aléatoire de 300 points couvrant l’ensemble de la région d’étude a été généré parmi les peuplements à

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dominance de sapin baumier ou d’épinette noire. La moitié de ces points (n = 150) a été placée dans des peuplements où la sévérité de la défoliation cumulée était inférieure à 50% alors que l’autre moitié des points a été placée dans des peuplements où la sévérité de la défoliation cumulée dépassait 50%. Pour chacun des points, 20 zones tampons concentriques avec un rayon croissant de 500 m à 10 000 m, ont été générées pour ensuite être intersectées avec la carte écoforestière du 4e inventaire (MFFP, 2014).

Une zone tampon de 30 m de rayon (30 m : empreinte spatiale de chacun des sites d'échantillonnage terrain établis à l'été 2013), également centrée sur chacun des points, a été ajoutée à cette analyse afin de faire le lien entre l'effet du contexte spatial local (~ 1 km2) et du contexte spatial à l'échelle du paysage (Figure 3). Pour chacune des

zones tampons intersectées avec la carte écoforestière, la proportion de chaque espèce forestière a été calculée à partir du champ « groupement d’essence » permettant ainsi de connaître la composition forestière environnante pour chacun des points à chacune des échelles spatiales d’intérêt (30 m à 10 km).

Figure 3: Le contexte spatial, i.e. les caractéristiques du paysage (notamment la composition forestière) entourant spatialement un peuplement d’intérêt, (ellipses), peut influencer les processus à l’échelle du peuplement (carrés). Source : (Simard et al., 2012).

Puisque le sapin baumier et l’épinette blanche sont souvent confondus lors de la photo-interprétation à la base des cartes écoforestières, la variable de composition forestière sapin baumier + épinette blanche (« SBSE ») a été calculée (Tableau 3) en additionnant la proportion de sapin baumier (« SB ») et d’épinette blanche (« EB ») au groupe

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d’essence « SE », soit un groupe d’essence associé aux peuplements de sapin baumier et d’épinette blanche indifférenciés (MFFP, 2014). Toutefois, bien que le sapin baumier et l’épinette blanche soient mis en commun, le sapin baumier est tout de même l’essence forestière dominante dans ce groupe d’essence. La variable « % feuillus » a été calculé de la même façon que pour l’analyse menée à l’échelle locale (Tableau 3). Dans cette analyse, l’effet de la composition forestière environnante d’un peuplement donné a été testé indépendamment pour les peuplements où la sévérité de la défoliation était inférieure à 50% et pour les peuplements défoliés à plus de 50%. La sévérité de la défoliation servira de proxy pour départager les sites en début d’épidémie des sites affectés où les infestations sont plus avancées. Pour chacun des peuplements sélectionnés, la composition forestière à chacune des 21 échelles spatiales autour d’un peuplement donné a été mise en relation avec la sévérité de la défoliation par l’entremise de régressions linéaires simples afin d’évaluer à quelle échelle spatiale la composition forestière avait un effet sur la sévérité de la défoliation.

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4. RÉSULTATS

4.1 Carte de défoliation

La carte de défoliation présentée dans cette étude montre la sévérité cumulée de la défoliation par la TBE entre 2004 et 2013 sur une échelle continue de sévérité (0-100%) à une résolution spatiale de 60 m (Figure 4). L’ensemble des nuages, des cours d’eau et des peuplements non-résineux a été masqué. Tous les indices de végétation montrent une forte relation entre la sévérité de la défoliation et l’indice de changement (pseudo-R2

0,40 à 0,50; P < 0,0001; Tableau 4). Le dNBR-2 montre plutôt une absence de relation avec la sévérité de la défoliation (pseudo-R2 -0,70; P < 0,01) et sa validation est de loin

la plus faible (R2aj = 0,35 comparativement à 0,60-0,64 pour les autres). C’est l’indice

dNBR qui montre à la fois la plus forte relation avec la sévérité de la défoliation (pseudo-R2 = 0,50; P < 0,0001; Figure 5) et la meilleure validation. La validation montre que le

modèle a un fort pouvoir prédictif (R2aj = 0,64; P = 0,003) et qu’il est non biaisé, avec

une ordonnée à l’origine (0,14) n’étant pas significativement différente de 0 (P = 0,46) et une pente (1,01) n’étant pas significativement différente de 1 (P = 0,39). L’erreur quadratique moyenne (« RMSE ») entre les valeurs prédites et les valeurs observées de défoliation est de 11,85% (Tableau 4).

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Figure 4: Carte de la sévérité de la défoliation cumulée par la TBE sur une échelle continue de sévérité entre 2004 et 2013. Les nuages, les ombres de nuages, les peuplements feuillus et les cours d’eau ont été masqués.

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Tableau 4: Statistiques des modèles de régression entre les indices de changement (dNBR, dNDMI, dMSI, dNBR-2) et la défoliation observée. RMSE = Root mean square error (erreur quadratique moyenne). Les valeurs de P calculées pour l'ordonnée a l'origine ainsi que pour la pente testaient l’hypothèse que les coefficients n’étaient pas différents de 0 et 1 respectivement.

Indice de végétation

Ajustement Validation

AICc pseudo- P ajusté F P Ordonnés à l'origine (coeff., P) Pente (coeff. P) RMSE dNBR 285,64 0,50 <0,0001 0,64 42,28 0,0029 0,14 (0,46) 1,01 (0,39) 11,85 NDMI 288,98 0,44 <0,0001 0,61 35,70 0,0034 0,46 (0,44) 1,00 (0,38) 12,41 MSI 289,32 0,41 <0,0001 0,60 36,62 0,0053 -0,38 (0,42) 1,02 (0,36) 12,50 dNBR-2 309,14 -0,70 <0,01 0,35 12,87 0,0395 -1,33 (0,44) 1,07 (0,35) 16,40

Figure 5: Résultat du modèle de prédiction de la défoliation cumulée (gauche) et de sa validation croisée (droite) pour l’indice de végétation du dNBR. Tous les sites (n = 54) sont représentés sur les deux graphiques mais la validation croisée a été effectuée à l’aide de 10 000 itérations où 2/3 des points étaient sélectionnés afin d’ajuster le modèle et 1/3 pour le valider.

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4.2 Analyse à l’échelle locale

Seul les cinq meilleurs modèles issus de la sélection préalablement réalisée ont été retenu pour cette analyse (Tableau 5). Deux modèles comprenant chacun la proportion d'épinette noire et l'âge du peuplement ont présenté une grande probabilité d'expliquer la sévérité de la défoliation par la TBE (Modèle 1 : AICw = 0,58; Modèle 2 : AICw = 0,42; Tableau 5). Le premier modèle montre que la sévérité de la défoliation diminue avec la proportion d'épinette noire, d'épinette blanche et d’arbres feuillus dans un peuplement et qu'elle augmente avec l'augmentation de l'âge du peuplement (R2

aj = 0,30).

Tableau 5 : Modèles candidats décrivant l’effet des variables de site (échelle locale) sur la sévérité de la défoliation cumulée observée. epn = épinette noire; epb = épinette blanche; sab = sapin baumier. Les signes « + » et « - » indiquent le sens de la relation. Exposition - 1 = nord-est et 1 = sud-ouest.

Statistiques du modèle Variables explicatives

AICc ΔAIC AICw R² ajusté P Source T P

637,29 0 0,58 0,30 <0,0001 - epn -5,465 <0,0001 - epb -2,042 0,045 - feuillus -1,549 0,126 + âge 1,525 0,132 637,95 0,66 0,42 0,27 <0,0001 - epn -5,127 <0,0001 + âge 1,700 0,094 649,05 11,76 0,0016 0,32 <0,0001 + sab 6,005 <0,0001 649,08 11,78 0,0016 0,33 <0,0001 + sab 6,214 <0,0001 + exposition 1,465 0,147 649,17 11,88 0,0015 0,34 <0,0001 + sab 6,243 <0,0001 - epb -1,453 0,150 + exposition 1,566 0,122

Le second modèle comprend la proportion d'épinette noire et l'âge du peuplement et ces variables ont le même effet sur la sévérité de la défoliation que pour le modèle précédent (R2

aj = 0,27). Les trois modèles suivants ne présentent qu'une infime

probabilité d'expliquer la sévérité de la défoliation (Modèles 3 à 5 : AICw < 0,01) lorsqu'on les compare aux deux modèles précédents. Toutefois, ces trois modèles

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montrent tous qu’une augmentation de la proportion de sapin baumier dans le peuplement cause une augmentation de la sévérité de la défoliation par la TBE. Pour les modèles 4 et 5, la sévérité de la défoliation est plus importante pour les sites exposés vers le sud-ouest. Pour le modèle 5, la proportion d'épinette blanche dans le peuplement s'ajoute à la proportion de sapin baumier ainsi que l'exposition du peuplement et son augmentation a un effet inverse sur la sévérité de la défoliation. Toutefois, cette variable reste marginalement significative dans le modèle (P = 0,150).

4.3 Analyse à l'échelle du paysage

Pour les peuplements légèrement à modérément affectés par la TBE (début d’infestation, sévérité de la défoliation < 50%) la proportion de sapin baumier et d'épinette blanche à très courte distance (30 m) a un effet positif sur la défoliation beaucoup plus important (R² = 0,14; P < 0,0001) qu’à plus grande distance (500 m à 10 km; R² = 0,03 à 0,07; Figure 6).

Figure 6: Résultats de l'analyse du contexte spatial testant l'effet de la composition forestière dans le paysage sur la défoliation dans un peuplement donné. Chaque symbole représente la moyenne de 150 peuplements. Les cercles pleins et vides indiquent si les relations sont significatives ou non, respectivement. Le sapin baumier et l’épinette blanche ont une influence positive sur la sévérité de la défoliation alors que l’épinette noire et les feuillus ont une influence négative sur la sévérité de la défoliation par la TBE.

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Le même résultat apparaît pour la proportion d'épinette noire dont l'effet négatif sur la sévérité de la défoliation dans un peuplement donné est 6 fois plus élevé à courte distance (30 m; R² = 0,12) qu’à plus longue distance (500 m à 10 km; R² = 0,001 à 0,02). La composition de 6,5 km à 10 km en épinette noire a un effet marginal sur la sévérité de la défoliation (R² = 0,016 à 0,024; P = 0,06 à 0,13). La proportion de peuplements feuillus a un effet négatif significatif mais faible sur la sévérité de la défoliation à des distances intermédiaires (3,5 km à 9 km; R² = 0,02 à 0,03; P = 0,05 à 0,14) (Annexe 3).

Les tendances sont complètement différentes pour les peuplements sévèrement affectés par la TBE (sévérité de la défoliation > 50% ; n = 150), où l'influence positive de la proportion de sapin baumier et d'épinette blanche n'est pas significative à 30 m mais augmente substantiellement dans les deux premiers kilomètres (R² = 0,01 à 0,10; P = 0,22 à < 0,001). La proportion d'épinette noire n’a pas d’effet significatif sur la sévérité de la défoliation, excepté à des distances de 500 m à 1,5 km (R² = 0,01 à 0,02), où la relation est significative (P = 0,08 à 0,14). Cette analyse n'a montré aucune relation significative entre la proportion de feuillus et la sévérité de la défoliation par la TBE (P > 0,58), et ce, pour l'ensemble des tailles de zone tampon utilisées (Annexe 3).

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5. DISCUSSION

Cette étude présente l’une des premières cartes de sévérité de la défoliation par la tordeuse des bourgeons de l’épinette. Cette carte est un outil qui peut permettre de mieux comprendre les facteurs à l’échelle locale et à l’échelle du paysage qui influencent la sévérité des infestations par la TBE.

5.1 Cartographie de la défoliation par la TBE basée sur une l’utilisation

d’images satellitaires

La carte de sévérité de la défoliation par la TBE présentée dans cette étude est l’une des premières cartes à présenter une détection des infestations par la TBE à partir d’une méthode de détection des changements basée sur des images satellitaires (Figure 4). La robustesse de la carte (RMSE = 11,85%) est particulièrement forte compte tenu du caractère diffus, partiel (MacLean et MacKinnon, 1996) et prolongé (jusqu’à 5-6 ans à l’échelle de l’arbre; (Morris, 1963) de la défoliation par la TBE qui en rend la détection difficile comparativement à d’autres perturbations naturelles sévères et relativement rapides telles que les feux de forêt, la coupe forestière et certaines épidémies d’insectes comme le dendroctone du pin ponderosa, (Dendroctonus ponderosae), la livrée des forêts, (Malacosoma disstria) et l’arpenteuse de la pruche. La détection des feux et la cartographie de leur sévérité sont facilitées par les effets drastiques de cette perturbation naturelle sur la forêt : combustion des arbres, des plantes de sous-bois, de la litière et du sol (Hall et al., 2008; Kane et al., 2014; Key et Benson, 2006; Picotte et al., 2016). La détection de la sévérité d’épidémies d’insectes défoliateurs des espèces feuillues telle que la spongieuse (Lymantria dispar dispar) a aussi été réalisée par l’entremise d’images satellitaires Landsat (Townsend et al., 2012). Le caractère caduc des arbres feuillus permet entre autres de circonscrire la sévérité de la défoliation à la défoliation annuelle évitant ainsi toute confusion possible entre la défoliation annuelle et cumulée, ce qui n’est pas le cas pour des insectes défoliateurs chez les espèces conifériennes qui ont un feuillage sempervirent. D’autres insectes occasionneront quant à eux une mort rapide de leur hôte (mortalité en 1 à 2 années) qui cause le rougissement des aiguilles dans la cime des arbres, comme pour le dendroctone du pin ponderosa (Wulder et al., 2006), ou causeront une défoliation très intense accompagnée d'un rougissement des fragments d’aiguilles partiellement consommées, comme pour l'arpenteuse de la pruche (Franklin, 1989). Dans le contexte

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des infestations de la TBE, le caractère sempervirent des arbres hôtes peut rendre difficile la détection de la sévérité annuelle de la défoliation. Malgré ces réserves quant à la détection de la sévérité des infestations par la TBE, l’erreur de 11,85% sur la validation de la carte de défoliation (Tableau 4) est inférieure à l’étendue de sévérité visé par les méthodes d’interventions hâtives (conserver la sévérité de la défoliation à un seuil inférieur à 10-20%; Régnière et al., 2001) et permet ainsi de faire une détection rapide des premiers signes d’infestations. Cependant, le bruit entre les images (variation radiométrique d’un même pixel entre deux images) pourrait se mêler à la détection de la sévérité de la défoliation par la TBE pour les zones très faiblement affectés par la TBE (< 10% de défoliation cumulée) par le fait que la marge d’erreur de la carte de sévérité dépasse l’amplitude de ce niveau de défoliation.

Les indices de végétation faisant intervenir les bandes de l’infrarouge proche et de l’infrarouge moyen sont couramment utilisés en vue de faire la détection des infestations d’insectes (De Beurs et Townsend, 2008; Fraser et Latifovic, 2005; Townsend et al., 2012). Dans cette étude, différents indices faisant intervenir ces longueurs d’ondes ont été utilisés mais c’est le « dNBR » qui a permis de mieux détecter la sévérité de la défoliation par la TBE. Bien que cet indice soit destiné principalement à la détection des feux, son utilisation est de plus en plus généralisée à la détection d’autres perturbations naturelles (« LandTrendr »; Kennedy et al., 2010). Le rapport entre les bandes de l’infrarouge moyen et de l’infrarouge proche montre une grande sensibilité aux variations du niveau de santé de la forêt et il offre donc un grand intérêt en vue de faire la détection des changements en milieu forestier pour des perturbations dont l’impact peut être subtil telle que la défoliation par la TBE.

L’utilisation d’une méthode de détection des infestations de la TBE par l’entremise d’images satellitaires de type Landsat vient complémenter les méthodes existantes permettant d’évaluer la sévérité de la défoliation par la TBE, notamment les relevés aériens. L’apport de l’imagerie satellitaire dans le cadre de la cartographie des impacts de la TBE amène de l’information sur la sévérité de la défoliation à une échelle spatiale beaucoup plus fine et constante que les méthodes actuellement utilisées. De plus, cette méthode se distingue des produits cartographiques issus des relevés aériens puisqu’elle nous permet d’évaluer la défoliation sur une échelle continue de sévérité (0-100%) plutôt qu’en quelques classes de sévérité. Ces atouts représentent ainsi un grand intérêt, tant

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d’un point de vue opérationnel, afin d’appliquer des mesures de mitigation de l’impact de la TBE, que pour les besoins de la recherche sur la dynamique spatiale et temporelle des épidémies.

5.2 Influence des facteurs environnementaux sur la sévérité de la

défoliation

Les résultats de cette étude montrent que la composition forestière affecte la sévérité de la défoliation par la TBE. Cette sévérité varie en fonction de l’échelle spatiale considérée. De plus, pour l’analyse des facteurs influençant la sévérité des infestations, l’utilisation de données de sources différentes (données empiriques vs données extraites des cartes écoforestières) converge vers des tendances semblables, indiquant la comparabilité des données utilisées.

À l’échelle du site, bien que le modèle le plus parcimonieux soit celui comprenant l’épinette noire, l’épinette blanche, les feuillus et l’âge du peuplement, il n’en reste pas moins que dans les 5 meilleurs modèles, l’abondance du sapin baumier à elle seule possède un plus grand pouvoir explicatif de la sévérité de la défoliation (Tableau 5). Le sapin baumier est l’hôte principal de la TBE et une augmentation de la sévérité de sa défoliation dans un peuplement augmente la sévérité de la défoliation chez les autres espèces hôtes (épinettes blanche, rouge et noire; (Hennigar et al., 2008). Puisque le cumul de la proportion d’épinette noire, d’épinette blanche et de feuillus est fortement et inversement corrélé à la proportion de sapin baumier (r = -0.97), il est fort probable que la préséance du modèle contenant un effet négatif de l’épinette noire, de l’épinette blanche et des feuillus ne soit qu’un artéfact statistique causé par l'effet positif de l'abondance de sapin baumier sur la défoliation. On constate le même effet pour l’analyse de paysage réalisée à partir des cartes écoforestières : pour la zone tampon de 30 m de rayon, la proportion d’épinette noire influence négativement la sévérité de la défoliation par la TBE et elle est fortement et inversement corrélée à la proportion de sapin baumier et d’épinette blanche dans le peuplement (r = -0.91). Pour cette même échelle spatiale (30 m), on constate que l’effet du sapin baumier et de l’épinette blanche (%SBSE) sur la défoliation est tout aussi significatif que celui du sapin baumier pour l’analyse réalisée à l’échelle du site (Figure 6), tout en étant de moins grande magnitude. La convergence des résultats de ces deux analyses supporte l’importance

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de l’abondance du sapin baumier dans un peuplement en regard de la sévérité de la défoliation.

Conformément à la littérature sur ce sujet (MacLean, 1980), l’accroissement de l’âge du peuplement augmente généralement sa vulnérabilité à la TBE, donc la sévérité de sa défoliation. Les peuplements ayant une exposition sud-ouest étaient plus fortement défoliés, sans doute à cause de l’accumulation plus rapide de degrés jours à cette exposition, qui influencent à leur tour la rapidité du développement larvaire et la santé des larves (Régnière et You, 1991). Cependant, contrairement à ce qui était attendu, le type de dépôt de surface, le niveau de drainage du peuplement (Archambault et al., 1990; Dupont et al., 1991; Hix et al., 1987) et l’altitude du site (Bouchard et Auger, 2014) n’ont pas semblé avoir d’effet sur la sévérité de la défoliation dans les analyses menées dans cette étude. L’absence de relations entre ces variables et la sévérité de la défoliation pourrait être expliquée par une absence de variabilité parmi les sites d’échantillonnage, qui étaient localisés en majorité sur des sites mésiques, où le dépôt de surface était principalement constitué de tills minces sur affleurements rocheux.

5.3 Interaction entre échelles spatiales et temporelles (« cross-scale

interaction »)

Dans cette analyse, la séparation des peuplements en deux classes de sévérité (< 50% et > 50%) a été utilisée comme substitut pour le moment durant le cours de l’épidémie (début vs. pic) puisque la défoliation à l’échelle du peuplement est typiquement légère dans les premières années d’infestation et très sévère après plusieurs années d’infestation (MacLean, 1984). L’effet spatial de la composition forestière du paysage sur la sévérité de la défoliation variait grandement selon qu’il était testé sur des peuplements légèrement défoliés ou sur des peuplements sévèrement défoliés : les peuplements légèrement défoliés étaient plus fortement affectés par la proportion de sapin baumier dans le contexte spatial local (30 m) alors que les peuplements sévèrement défoliés étaient plutôt influencés par la proportion de sapin baumier dans le paysage (> 0,5 km; Figure 6). De tels résultats suggèrent une interaction entre les échelles spatiales et temporelles comme il a déjà été observé pour d’autres phénomènes contagieux (Eveleigh et al., 2007; Peters et al., 2004; Raffa et al., 2008).

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Ces résultats supportent ainsi l’hypothèse selon laquelle en début d’épidémie (défoliation cumulée légère) des facteurs locaux réguleraient la sévérité d’une infestation alors qu’avec son intensification (défoliation cumulée sévère), ce serait plutôt des facteurs de paysage qui influenceraient la sévérité des infestations. À faible pression épidémique (défoliation légère), l’abondance du sapin baumier et de l’épinette blanche à l’intérieur d’un peuplement d’intérêt (Figure 6 ; zone tampon de 30 m) surpasse l’effet de l'abondance de ces espèces dans le paysage environnant (>= 0.5 km). À pression épidémique plus élevée (défoliation sévère), l’effet inverse se présente et la composition en sapin baumier et en épinette blanche dans le paysage influencent davantage la sévérité de la défoliation que la composition forestière du peuplement lui-même (Figure 6).

L’interaction entre les échelles spatiales et temporelles résulterait de l’importance relative de deux mécanismes écologiques. En début d’infestation, la dominance d’un effet de la composition forestière locale sur la composition forestière du paysage en sapin baumier découlerait de la force des mécanismes densité-dépendants agissant à l’échelle de l’arbre et de l’insecte (Royama, 1984; Speight et al., 1999). La présence de sapin baumier dans un peuplement représente une nourriture de qualité in situ pour la TBE, ce qui diminue la nécessité pour les populations locales de TBE de migrer pour se nourrir. La dynamique de la TBE est alors régulée par des mécanismes locaux de densité-dépendance, où la TBE exerce une pression sur ses hôtes qui se dégradent éventuellement avec l’augmentation de la défoliation, diminuant ainsi la quantité de nourriture disponible. En retour, l’augmentation en densité de la TBE est généralement accompagnée d’une augmentation de la pression sur la TBE par ses ennemis naturels (Nealis et Régnière, 2004; Régnière et Nealis, 2007). La combinaison de ces interactions « top-down » (ennemis naturels) et « bottom-up » (végétation) permet de conserver une densité d’équilibre chez les populations locales de TBE (Speight et al., 1999).

Ce seuil de densité d’équilibre est outrepassé lorsque la sévérité cumulée des infestations augmente et les résultats de cette étude montrent que l’effet de la composition forestière du paysage surpasse alors l’effet de la composition du peuplement. Ceci suggère qu’une relation « puit – source » s’établit entre l’échelle spatiale locale, où le taux de mortalité des insectes est supérieur à leur taux de natalité

Figure

Figure 1: Localisation de la région d'études.
Tableau 1: Informations sur les images utilisées.
Tableau 2: Indices de végétation calculés sur les images satellitaires Landsat.
Figure 2: Représentation graphique du modèle sigmoïdal utilisé pour développer  la carte de défoliation
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