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Compte-rendu de l'ouvrage de Danièle Dehouve, La géopolitique des indiens du Mexique. Du local au global

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Academic year: 2021

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Texte intégral

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HAL Id: halshs-00463264

https://halshs.archives-ouvertes.fr/halshs-00463264

Submitted on 11 Mar 2010

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Compte-rendu de l’ouvrage de Danièle Dehouve, La

géopolitique des indiens du Mexique. Du local au global

Odile Hoffmann

To cite this version:

Odile Hoffmann. Compte-rendu de l’ouvrage de Danièle Dehouve, La géopolitique des indiens du Mexique. Du local au global. Autrepart - revue de sciences sociales au Sud, Presses de Sciences Po (PFNSP), 2003, pp.181-182. �halshs-00463264�

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Publié:

HOFFMANN, O. (2003) Compte-rendu de l’ouvrage de Danièle Dehouve, La géopolitique des indiens du Mexique. Du local au global. Autrepart (28), pp181-182.

Odile Hoffmann, géographe IRD, 1 juin 2003

Lecture du livre de Dehouve, Danièle. La géopolitique des Indiens du Mexique. Du local au global. CNRS Editions, 2003, 238p.

« La législation politico-administrative constitue l’axe de la vie politique et religieuse locale » (p 31). C’est à partir de cette hypothèse, minutieusement confirmée tout au long de l’ouvrage, que s’organise l’interprétation que fait Danièle Dehouve des dynamiques territoriales et politiques des communautés indiennes au Mexique. Contrairement à ce qu’indique le titre, on aurait donc affaire à un cheminement du global vers le local : les appareils d’État, au cours de l’histoire, auraient importé des modèles et des normes que les groupes ou « communautés indiennes » auraient subis, adoptés, transformés et qu’ils se seraient finalement appropriés à des fins qui leur seraient propres. Pour comprendre « la communauté » - thème qui est finalement au cœur de l’ouvrage -, il faut d’abord connaître le champ de forces dans lequel elle s‘inscrit, et qui lui imprime des contours changeants et négociables. D’où cette autre formulation de l’hypothèse centrale : « La communauté ne serait pas une unité stable et fermée, mais le résultat de l’appropriation de la législation de l’État national par des groupes et des intérêts locaux » (p26). L’autre hypothèse, qui justifie le titre – Géopolitique - et lui donne un contenu nouveau en anthropologie, consiste à poser la relation à l’espace et au territoire en termes de négociation permanente entre les différents niveaux de la vie nationale, du gouvernement central aux états – le Mexique est une fédération -, en passant par les municipalités et finalement les groupes villageois. Le « territoire » d’une « communauté » n’est pas donné, ni même hérité, surtout pas achevé. Il se construit dans le quotidien des relations politiques certes localisées mais insérées dans des logiques de conflits, rivalités, oppositions ou alliances entre groupes d’habitants qui exploitent leurs savoirs et leurs pouvoirs acquis dans des sphères lointaines ou dépassant le « territoire » en question.

Avant de nous inviter à la suivre dans sa démonstration, Danièle Dehouve rappelle les enjeux du débat politique et académique qui se noue autour de la définition de « la communauté indienne », ses fausses évidences et ses pièges qui ont mené nombre d’anthropologues, de mesures politiques et de projets de développement à l’impasse. À elle seule, l’introduction constitue un apport de synthèse sur ce thème classique en anthropologie, mais ici rénové par son articulation complexe à l’espace et au territoire d’une part, par sa dimension proprement politique d’autre part.

À partir de là, l’auteur nous emmène en terres tlapanèques, dans l’état de Guerrero au sud du Mexique. Et c’est là où le sous-titre – du local au global - trouve toute sa pertinence. Car s’il est vrai que la législation oriente et parfois détermine, ce sont bien les pratiques locales qui donnent du sens aux jeux de pouvoir et aux multiples transformations des « communautés indiennes » contemporaines.

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En entrant dans le récit des hommes, des femmes, des lieux et des dieux qui peuplent et organisent l’espace tlapanèque, Danièle Dehouve déconstruit de prétendues évidences et propose des interprétations qui peuvent légitimement se rapporter à l’ensemble des « indiens du Mexique », ou en tous cas du sud du Mexique. Loin de la monographie, elle analyse des processus de scission, de partage, de hiérarchisation liée au prestige et au pouvoir, dans un ensemble de domaines couverts au long de six chapitres : la politique et la religion, l’inégalité territoriale, les symboles de la rivalité, les tactiques de lutte, les moyens disponibles (le nerf de la guerre), les groupes de coopération.

Dans les deux derniers chapitres, l’auteur aborde une rétrospective historique (de 1850 à nos jours) qui l’amène à penser que l’enjeu agraire, qui fut au centre des luttes territoriales et politiques de la seconde moitié du XXème siècle, est désormais dépassé par l’enjeu financier. Elle rejoint en cela les analyses de politologues et sociologues qui, par d’autres voies, soulignent la rupture radicale des années 1990. Avec la fin de la répartition agraire et du contrôle de l’État sur la distribution des terres (modification de l’article 27 de la constitution, en 1992), avec surtout le démembrement des institutions gouvernementales d’encadrement des activités agricoles, avec enfin la crise économique qui affecte la plupart des secteurs désormais en concurrence sur le marché international (avec l’Accord de libre échange , signé en 1994 avec les États-Unis et le Canada), la production agricole cesse de structurer la vie économique des villages. Celle-ci se nourrit maintenant des flux financiers extérieurs, constitués des envois d’argent des migrants – trop peu mentionnés dans le livre - ou des ONG, et surtout de la réorientation des flux budgétaires gouvernementaux vers les municipalités, dans le cadre de la décentralisation fiscale et administrative. Le débat sur les entités territoriales susceptibles de recevoir et gérer ce véritable « pactole » à l’échelle locale ravive les conflits entre villages centraux et dépendants, suscite les partitions, favorise l’entrée en scène de nouveaux acteurs, bref réactive une géopolitique qui en fait, n’a cessé d’organiser la vie des villages et des régions indiennes depuis des siècles.

Finalement, le fil rouge de ce texte ne serait-il pas l’autonomie, notion qui rôde d’un bout à l’autre de l’ouvrage sans dire son nom tant il est vrai que le débat paraît aujourd’hui biaisé par les polémiques d’ordre politique, mais qui pourrait constituer le thème essentiel des négociations auxquelles se sont livrées, depuis la conquête et souvent bien avant, de nombreuses « collectivités locales » du territoire mexicain ? . Il ne s’agirait pas d’une autonomie accordée par des textes constitutionnels à des « entités indiennes » - qui restent à construire -, mais de la capacité de chacun à gérer son espace et ses ressources, face aux voisins au moins autant que face au gouvernement. Le niveau local est ici le plus pertinent, même s’il laisse pour l’instant dans l’ombre la question de la gestion politique de l’autonomie au niveau régional.

Ce n’est pas tomber dans de l’historicisme benoît que de rappeler combien, insérées au cœur de la modernité contemporaine, les « communautés indiennes » exploitent un capital politique construit de longue date et réactualisé de façon permanente. D’ailleurs, un ouvrage récent1, tout aussi excellent, souligne les réitérations qui ponctuent l’histoire mexicaine depuis deux siècles, chaque fin de siècle apportant sa moisson de rébellions suivies d’explosions violentes : les guerres d’Indépendance de 1810, la révolution de 1910.

1 Crisis, Reforma y Revolución. México: historias de fin de siglo. Leticia Reina et Elisa Servin (coord.), México: CONACULTA-INAH, 2002, 483p.

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En conclusion, le livre de D. Dehouve fera référence car il présente, cas concrets à l’appui, une analyse détaillée des processus de changement politique et territorial, qui en font un véritable petit traité d’économie politique et de géopolitique..

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