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Les marchés agroalimentaires : objets et questions de recherche

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Les marchés agroalimentaires : objets et questions de

recherche

Jean-Louis Rastoin

To cite this version:

Jean-Louis Rastoin. Les marchés agroalimentaires : objets et questions de recherche. GDR Economie and Sociologie “ les Marchés Agroalimentaires ”, Mar 2006, Montpellier, France. �hal-02750919�

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Les marchés agroalimentaires : objets et

questions de recherche

Agrofood Markets: focus and Research Questions

Rastoin, Jean-Louis (1)

(1) AgroM-UMR Moisa (Marchés, Organisations et Stratégies d’Acteurs), 2

place Viala, 34 060 Montpellier Cedex 1, France,

rastoin@supagro.inra.fr

Mots-clés : systèmes alimentaires, marchés agroalimentaires, mondialisation des marchés, consommation alimentaire.

Key-words : food systems, agri-food markets, international trade, food consumption.

Introduction

En préambule, je tiens à remercier François Vatin, Université de Nanterre et directeur du GDR-CNRS « Economie et Sociologie », ainsi que Fabrice Dreyfus de AgroM, pour avoir pris l’initiative de ces Journées d’Etude. Celles-ci associent les UMR Innovation et Moisa, et à travers elles, leurs partenaires AgroM1, Ciheam-Iamm2, Cirad3, Inra4, Ird5, ainsi qu’un

important réseau d’institutions scientifiques dont les trois universités de Montpellier constituent la proximité immédiate. Je me plais également à souligner le rôle essentiel joué par les collègues de l’UMR Innovation dans l’organisation de cette manifestation.

Pour de multiples raisons que je vais évoquer de suite, le thème choisi pour ces journées me paraît répondre à un appel pressant, à la fois de la société civile et de la communauté scientifique. Réunir autant de collègues de disciplines trop souvent « ghettoïsées », quoique très proches, me paraît une performance à saluer.

Mes trois entrées seront les suivantes :

1 Antérieurement « Ensam » (Ecole Nationale Supérieure d’Agronomie de Montpellier), devenu aujourd’hui

« Sup’Agro » : http://www.supagro.fr/

2 Institut Agronomique Méditerranéen de Montpellier-IAM, un des quatre instituts du Centre International des Hautes

Etudes Agronomiques Méditerranéennes-CIHEAM : http://www.iamm.fr/

3 Centre de coopération internationale en recherche agronomique pour le développement : http://www.cirad.fr

4 Institut national de la recherche agronomique : http://www.inra.fr/;

Inra Centre de Montpellier : http://www.montpellier.inra.fr/

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- l’objet de recherche (les Marchés Agroalimentaires) ;

- les questions de recherche émergentes et les pistes scientifiques ; - la méthode de travail originale adoptée pour ces journées.

1. L’objet de recherche identifié

Cet objet concerne le Marché Agroalimentaire, ou mieux, comme indiqué dans la bande-annonce de ces Journées d’Etude, les Marchés Agroalimentaires (MAA). Ces marchés se caractérisent par leur complexité, leurs spécificités (au pluriel) et leur historicité.

La complexité des Marchés Alimentaires (MA) contemporains est extrême, du fait de leur

taille considérable et de leur structure hautement diversifiée. Dans l’esprit des organisateurs des Journées d’Etude, et cela apparaît bien dans les communications présentées, il s’agit de traiter non pas des seuls MAA qui sont définis par les spécialistes de l’économie agroalimentaire comme les marchés des produits transformés, mais bien de la vaste sphère des Produits Alimentaires (PA), qui se compose :

- de matières premières agricoles, souvent qualifiées de commodités (blé, riz, maïs, soja, lait, carcasses de viande, fèves de café ou de cacao, etc.) ;

- de produits ayant subi un process de fabrication artisanale ou industrielle, pouvant se traduire en gammes de 1 à 5 ;

- entre les deux stades, de PAI (Produits Alimentaires Intermédiaires).

Il est très difficile d’estimer la taille de ces marchés, du fait d’une autoconsommation alimentaire qui reste importante dans les pays à faible revenu. On peut toutefois affirmer que les MA demeurent de loin les premiers en termes de Chiffre d’Affaire, en 2006 au niveau mondial. Au plan des échanges internationaux, les Produits Alimentaires dépassaient 620 milliards $ en 2004. Ils ne représentaient cependant plus que 7% des exportations mondiales de marchandises contre 45% en 1950, car la croissance des produits minéraux et fossiles et surtout manufacturés a été très rapide dans les 50 dernières années. En moyenne, sur cette période, le commerce international de PA a progressé deux fois plus vite que la production, ce qui vient confirmer le mouvement de mondialisation des marchés.

Les nomenclatures internationales de produits montrent, avec plusieurs milliers de positions, la complexité des MA. La sophistication et l’hyper segmentation des MA dans les Pays à Haut Revenu (PHR), est avérée par le nombre très élevé de références présentes dans la Grande Distribution : environ 15 000 pour un hypermarché en France.

Enfin, la multiplicité des acteurs de marché vient encore compliquer la tâche des analystes et des opérateurs. Par exemple, le système alimentaire français compte plus d’un million d’entreprises et, par définition, 61 millions de consommateurs domestiques et l’équivalent de 15 millions de clients à l’étranger.

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Déjà à ce stade de caractérisation des MA, on pressent les limites des seuls outils de la micro-économie néo-classique pour appréhender leur fonctionnement.

Les spécificités des Marchés Agroalimentaires tiennent à la nature des produits et des acteurs

les composant. Les PA se situent à la fois dans le domaine rationnel de la biologie et affectif de la psychologie et vont singulariser les perceptions et les attitudes des consommateurs, des producteurs et des commerçants, par rapport à des produits ne s’ingérant pas.

La nature cyclique de la production, son caractère aléatoire soumis aux caprices du climat et à la volatilité des marchés, la périssabilité des denrées, induisent des modèles physiques et économiques de production et de distribution très particuliers et fortement contraints.

L’historicité des Marchés Agroalimentaires enfin, se situe sur la très longue période. Ces

marchés apparaissent probablement les premiers dans le contexte de l’émergence des grandes civilisations du Bassin Méditerranéen, de Chine et d’Amérique du Sud, voici 5 à 6 000 ans. Tous les ingrédients sont donc réunis pour constituer un objet de recherche appelant une approche pluridisciplinaire à travers l’ensemble des sciences humaines, autour des quelques questions de recherche esquissées ci-après.

2. Trois questions de recherche

La libéralisation commerciale internationale, c’est à dire l’extension aux produits agricoles

et agroalimentaires du régime appliqué aux produits manufacturés, en est évidemment la première. Soixante ans de négociations diplomatiques dans le cadre du GATT puis de l’OMC, ont abouti à un démantèlement presque complet des protections tarifaires aux frontières pour les produits industriels. Une très abondante littérature traite de la question de la libéralisation. Les modèles d’équilibre général calculable des économistes, montrent pour une majorité de pays dans le monde, l’existence d’une corrélation positive entre ouverture commerciale extérieure et croissance économique. Cependant, le niveau des gains estimés diminue au fur et à mesure que les modèles se perfectionnent. Par ailleurs, les approches néo-institutionnalistes mettent en évidence le rôle décisif du cadre institutionnel dans l’amélioration du bien-être (au sens néo-classique) et insistent, avec certains sociologues, sur la nécessité de choisir de nouveaux indicateurs de développement tels que l’Indice de Développement Humain (IDH) du PNUD. Enfin, les sciences de gestion font le constat de l’impossibilité – sauf exceptions rares – de rentabiliser une activité agricole en l’absence d’un soutien public, du fait de l’intensité capitalistique requise et des distorsions dans les structures de marché. Un ouvrage récent de J.M. Boussard, F. Gérard et M.G. Piketty (Boussard, Gérard, Piketty, 2005) donne des arguments solides en faveur d’une « exception agricole » dans les négociations multilatérales.

Le comportement du consommateur en est la seconde. La théorie des choix formulée par

Lancaster, a mis en évidence la multiplicité des déterminants de l’acte d’achat en fonction des attributs du produit. Or il semble bien que dans le contexte d’une société de consommation qui

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se diversifie et qui se globalise, les dépenses d’alimentation deviennent une variable d’ajustement au sein du budget des ménages, tendant ainsi à renforcer le rôle primordial du prix au détriment de la qualité nutritionnelle ou parfois de la praticité du produit. Cette question a notamment été traitée par Regmi (Regmi, 2001), dans une optique micro-économique. Elle interpelle également la macro-économie (fiscalité et redistribution), les sciences de gestion (marketing) et la sociologie comportementale.

Le modèle de production-transformation-distribution ou mieux, le système alimentaire,

pose la troisième question. Comme nous l’avons montré à la suite des travaux de Louis Malassis (Malassis, 1997), ce modèle est passé en moins d’un siècle d’une organisation quasi-autarcique fondée sur une unité de lieu de production-consommation, l’exploitation agricole polyvalente, à une organisation multi-firmes marquée par une spécialisation poussée de chacun des acteurs, une concentration croissante en amont et en aval des filières, un élargissement des marchés et une financiarisation croissante du mode de gouvernance. Ce modèle est qualifié d’agro-tertiaire pour indiquer la suprématie des services dans la création et le partage de la valeur. Il est économiquement performant, sur le critère du prix des biens élaborés et de la sécurité alimentaire. Toutefois, ce système produit des externalités négatives aussi bien sur le consommateur (Maladies Alimentaires non Transmissibles-MANT), que sur l’environnement et certains acteurs dominés des filières. Il peut par ailleurs être menacé par la crise énergétique à venir.

Un travail de prospective est donc nécessaire pour imaginer des scénarios alternatifs à ce modèle. La prospective est par essence pluridisciplinaire. Dans ce cas, elle devrait associer sciences sociales et sciences bio-techniques.

L’évocation de la prospective m’amène à convoquer l’histoire6 qui constitue le socle

indispensable de ce genre d’exercice. En effet, selon F. Braudel : « …le passé, par ses règles,

ses différences et ses ressemblances, [est] la clef indispensable pour toute compréhension sérieuse du temps présent » (F. Braudel, 1979), et l’on peut ajouter avec B. de Jouvenel : pour

préparer les « futurs possibles ».

En effet, il y a débat sur « l’invention du marché » selon l’excellente formule de Ph. Norel (Norel, 2004) et la discussion est importante pour aider à la compréhension et à la décision. Le marché il en quelque sorte un « constituant mental » de l’homme et de la société ou bien est-il une création émanant du Prince ou de l’Etat, ou bien encore est-est-il, comme le suggère Polanyi (Polanyi, 1944), une modernité issue de la révolution industrielle du XVIIIème siècle ?

Les deux premières hypothèses conduiraient à apporter une légitimité et une pertinence aux tenants du libre-échange dans le premier cas et dans le second cas aux régulationnistes, en identifiant un « sens de l’histoire ». La troisième hypothèse signifierait une réversibilité potentielle en fonction des mutations technologiques des sociétés humaines. Ou bien encore,

6 Avec les encouragements de K. Marx et F. Engels : « Nous ne connaissons qu’une seule science, la science de

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une évolution en « spirale » selon l’expression d’A. Caillé (Caillé, 2006), envisageable par le jeu des forces politiques et sociales. Cependant, l’élargissement massif des domaines de la « marchandisation » rend désormais les inflexions de trajectoire difficiles.

3. Structuration des deux Journées d’Etude

Cette structuration me semble propice à un éclairage des questions qui viennent d’être évoquées et sans doute à beaucoup d’autres interrogations ou approfondissements empiriques et théoriques. Cette structuration prendra la forme suivante :

- deux conférences introductives analysent les MA sous l’angle de la sociologie économique et des conventions de qualité ;

- la session 1 s’intéresse aux valeurs émergentes permettant de mieux relier consommateurs et producteurs ;

- la session 2 est relative aux mécanismes d’encastrement de l’économie dans les pratiques sociales, à travers l’exemple du marché du vin ;

- la session 3 traite de la catégorisation des marchés alimentaires par les jeux d’acteurs ; - la session 4 enfin, aborde le thème de la construction identitaire des marchés par des

dimensions culturelles et techniques ancrées dans les territoires ;

- les conclusions de ces Journées d’Etude sont tirées par Philippe Lacombe de la Direction Scientifique du Secteur « Société, Economie & Décision » de l’INRA.

Chacune des communications est commentée par un discutant, en croisant les disciplines académiques respectives des intervenants.

Il me reste à souhaiter que les apports croisés des sciences sociales permettront, aux regards des économistes, des sociologues et des gestionnaires ici présents, de se rencontrer.

Références bibliographiques

Boussard J.-M, Gérard F., Piketty M.-G., 2005. Libéraliser l’agriculture mondiale ? Théories,

modèles et réalités., Montpellier, Cirad, 135 p.

Braudel F., 1979. Civilisation matérielle. Economie et capitalisme, Paris, A. Colin, 606 p. Caillé A., 2006. L’histoire économique avance en spirale, Alternatives économiques. Hors série 67, janvier-mars, p.61-62.

Malassis L., 1997. Les trois âges de l’alimentaire. Essai sur une histoire sociale de

l’alimentation et de l’agriculture. Tome 2. L’âge agro-industriel, Paris, Editions Cujas, 367 p.

Norel P., 2004. L’invention du marché, une histoire économique de la mondialisation, Paris, Seuil, 577 p.

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Polanyi K., 1944. La grande transformation : aux origines politiques et économiques de notre

temps, Paris, Gallimard (édition 1983), 448 p.

Regmi A.( ed.), 2001. Changing structure of global food consumption and trade, Washington, ERS- USDA, 111 p.

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