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Academic year: 2022

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Correspondances en Onco-Urologie - Vol. VIII - n° 4 - octobre-novembre-décembre 2017 154

Quels sont les critères de qualité de vie à prendre en compte dans les essais ?

What are the quality of life’s criteria to be considered in trials?

M.J. Paillard 1, 2 , F. Bonnetain 1, 3

1 Unité de méthodologie et qualité de vie en cancérologie, CHU de Besançon.

2 Service d’oncologie, CHU de Besançon.

3 Inserm, UMR 1098, Besançon.

U

n critère de jugement est défini comme un indicateur permettant de conclure quant à l’efficacité d’un traitement ou d’une stra- tégie thérapeutique. Il sert à définir les objectifs et à en évaluer l’atteinte.

En cancérologie, il existe 2 types de critères de juge- ment : les critères cliniques centrés sur le patient, com- prenant principalement la survie globale, et les critères fondés sur l’évaluation tumorale, comme la survie sans progression ou le taux de réponse (1, 2).

Le critère de jugement de référence pour évaluer l’efficacité d’un traitement dans un essai de phase III est la survie globale. Toutefois, l’avènement des nouvelles thérapies efficaces a entraîné la nécessité d’inclure un plus grand nombre de patients dans les essais ainsi que de prévoir une période d’observation plus longue, afin d’obtenir des données suffisantes pour atteindre la puissance statistique requise. Les critères cliniques centrés sur la tumeur, tels que la survie sans progres- sion et la survie sans maladie, sont ainsi très souvent utilisés puisqu’ils peuvent être évalués plus précoce- ment. Cependant, ils n’ont pas été systématiquement validés comme critères de substitution pour la survie globale (3) . De fait, le bénéfice clinique d’un traitement n’améliorant, par exemple, que la survie sans progres- sion reste discutable.

Défi nition

La qualité de vie

Selon l’Organisation mondiale de la santé, la qualité de vie est définie comme “la perception qu’a un indi- vidu de sa place dans l’existence, dans le contexte de la culture et du système de valeurs dans lesquels il vit, en relation avec ses objectifs, ses attentes, ses normes et ses inquiétudes. Il s’agit d’un large champ conceptuel, englobant de manière complexe la santé physique de la personne, son état psychologique, son niveau d’indépendance, ses relations sociales, ses croyances personnelles et sa relation avec les spécificités de son environnement” (4) .

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»

Selon l’OMS, “La qualité de vie est la perception qu’a un individu de sa place dans l’existence, dans le contexte de la culture et du système de valeurs dans lesquels il vit, en relation avec ses objectifs, ses attentes, ses normes et ses inquiétudes.”

»

La qualité de vie liée à la santé peut être comprise comme la per- ception par le patient de son propre état de santé et de ses consé- quences sur sa vie quotidienne.

»

En cancérologie, la qualité de vie relative à la santé est reconnue comme second critère de jugement principal par l’ASCO ® et la FDA en l’absence d’eff et d’une action ou d’un traitement sur la survie globale.

Mots-clés : Critères de jugement – Échelles – Qualité de vie – Pronostic – Méthodologie.

According to the World Health Organization, the defi nition of Quality of Life is the individuals’ perception of their position in life in the context of the culture and value systems in which they live and in relation to their goals, expectations, standards and concerns.

Health-related quality of life (HRQOL) includes individuals’ physical and mental health perceptions and their consequences on daily life. The most accepted defi nition refers to a multi dimensional concept including at least 3 main areas corresponding to “the subjective individual’s perception of their physical, emotional and social condition after considering the eff ects of the disease and its treatment”.

In oncology, HRQOL is recognized as secondary primary endpoint by the American Society of Clinical Oncology (ASCO) and the Food and Drug Administration (FDA) when there is no eff ect of an action or a treatment on the overall survival.

HRQOL is a prognostic factor for overall survival in many cancers such as breast cancer, glioblastoma, meta static colorectal cancer, prostatic cancer, pancreatic cancer, lung cancer and hepatocellular carcinoma.

Keywords: Endpoint – Scale – Quality of life – Prognosis – Methodology.

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Correspondances en Onco-Urologie - Vol. VIII - n° 4 - octobre-novembre-décembre 2017 155 et social et la satisfaction du patient avec son niveau

de fonctionnement, le contrôle de sa maladie et des symptômes reliés à son traitement.” Ces aspects en font un concept multidimensionnel reposant sur des items objectifs (conditions de vie, santé fonctionnelle) et subjectifs (satisfaction, bonheur, bien-être), intégrant les nombreux intervenants et événements de la vie. La qualité de vie est liée à la personne dans sa globalité, et à son évolution dans son environnement (5) . Patient Reported Outcome Measure

La qualité de vie peut être mesurée par le patient. Les mesures faites par le patient de ses résultats (Patient- Reported Outcome Measure [PROM] ) sont définies, selon le National Health Service (NHS), comme des mesures de l’état de santé du patient ou de sa qualité de vie liée à la santé. Ces mesures sont généralement courtes, auto-administrées et concernent l’évalua- tion de la qualité de vie à un moment donné dans le temps (6) . Les PROM fournissent un moyen d’avoir un aperçu de la manière dont le patient perçoit sa santé et l’impact qu’ont les traitements ou modifications de son hygiène de vie sur sa qualité de vie (7) . Il existe de nombreux PROM en dehors de la qualité de vie, tels que la fatigue (échelle MFI20), la douleur (échelle BPISF) ou l’anxiété-dépression (échelle HADS). Très récem- ment, une version des scores de toxicités éditée par le National Cancer Institute (NCI), renseignés jusqu’alors exclusivement par les médecins, a été développée à l’intention des patients (PRO-CTCAE) afin de permettre une évaluation des symptômes et toxicités subjectives directement par le patient lors des essais cliniques (8).

Une version en français est en cours de validation.

La qualité de vie pour démontrer le bénéfi ce clinique

Dans les essais cliniques en cancérologie, la qualité de vie relative à la santé est reconnue comme second critère de jugement principal par la Société américaine en oncologie clinique (ASCO ® ) et la Food and Drug Administration (FDA) en l’absence d’effet d’une action ou d’un traitement sur la survie globale (9) . Dans la pratique clinique, évaluer la qualité de vie du patient est bénéfique et permet d’optimiser l’adhésion aux straté- gies thérapeutiques proposées par le médecin (10, 11) .

en tant que critère de jugement sont nombreuses :

✓ un bénéfice tumoral sans gain de survie globale et/ou de qualité de vie n’est pas suffisant car le sens clinique est incertain ;

✓ les critères cliniques standard ne tiennent pas compte des aspects physiques, psychologiques, sociaux et environnementaux dans l’évaluation d’un traitement ;

✓ les nouvelles molécules développées ne permettent pas forcément un gain de survie, mais peuvent amé- liorer la qualité de vie du patient ;

✓ la qualité de vie est utilisée dans le cadre des ana- lyses médicoéconomiques de type coût/utilité.

Par conséquent, la qualité de vie comme critère ou cocritère de jugement principal s’impose d’évidence dans un contexte tel que la cancérologie, où les possibilités thérapeutiques sont parfois limitées et où les symptômes peuvent être extrêmement invalidants, et dans un contexte économique global de remboursement plus contrôlé.

Les outils de mesure de la qualité de vie

De nombreux instruments ont été développés et sont maintenant disponibles. Leur caractéristique commune est qu’ils font appel à l’évaluation subjective, de préférence par le patient.

On distingue 2 types d’approche :

L’entretien psychologique ou entretien structuré est un entretien au cours duquel la personne en charge de l’évaluation interroge le patient sur l’ensemble de sa vie. C’est l’évaluateur qui dirige la conversation, mais il laisse le patient parler. Si ce type d’évaluation permet, d’un point de vue clinique, d’évaluer la qualité de vie du patient dans son ensemble, les données récoltées sont, quant à elles, plus difficilement utili- sables et transformables en mesure, parce qu’il s’agit de “réponses-discours”, donc non standardisées. Il pose ainsi des difficultés logistiques, de standardisation et donc d’utilisation dans des études comparatives.

Les outils psychométriques , constitués d’échelles ou de questionnaires, permettent une évaluation plus restrictive de la qualité de vie, mais standardisée, et sont plus faciles à utiliser. Ils nécessitent des instruments appropriés, fiables, validés et faciles à remplir. Parmi ces

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outils, on distingue les instruments hétéro-évaluatifs et auto-évaluatifs :

l’hétéro-évaluation : un hétéro-questionnaire est un questionnaire dans lequel la qualité de vie du patient est évaluée par une autre personne que le patient lui-même. La mesure par un professionnel ne peut pas être considérée comme un gold standard, car celui-ci a une moins bonne connaissance de la façon dont le patient perçoit sa qualité de vie et sa santé ;

l’auto-évaluation : ce mode d’administration du ques- tionnaire par le patient lui-même doit être privilégié afi n de capter toute la quintessence de l’évaluation de la qualité de vie. En eff et, qui mieux que le patient peut indiquer dans quelle mesure des diffi cultés, qu’elles soient physiques, psychologiques ou sociales, aff ectent son bien-être, et avec quelle intensité ?

Par ailleurs, on peut distinguer 2 grands types d’outils de mesure de la qualité de vie : les échelles génériques, conçues pour mesurer la qualité de vie chez des indi- vidus présentant ou non une pathologie, c’est-à-dire quel que soit leur état de santé ; les échelles spécifiques, qui se focalisent sur l’impact d’une pathologie et de ses traitements sur la qualité de vie. Ces instruments peuvent être spécifiques d’une localisation d’un cancer, d’une population de patients, de certaines fonctionna- lités ou de certains symptômes.

Les qualités des instruments de mesure

La validation d’un instrument de mesure doit permettre de répondre à 2 questions : quel est le concept mesuré par l’instrument et quelle est la qualité de la mesure ? Le choix d’un instrument doit être guidé par ce pré- requis en fonction des objectifs et des patients ciblés de l’étude (15) .

✓ La validité : la validité d’un instrument de mesure réfère au degré auquel l’instrument mesure ce qu’il est supposé mesurer. On distingue la validité d’apparence , qui vise à déterminer si l’instrument semble mesurer ce qu’il prétend mesurer, de la validité de contenu, qui

réfère à la représentation adéquate de l’échantillon d’items utilisés pour mesurer un comportement ou une caractéristique.

✓ La fiabilité : un instrument de mesure fiable donne de façon consistante les mêmes résultats lorsqu’il n’y a pas eu de changements réels. La fidélité d’un instrument est essentielle afin de distinguer le “vrai” changement de l’erreur de mesure. Elle est influencée par l’échelle de mesure, le mode d’administration, la clarté des concepts à mesurer et la consistance de l’évaluation.

Quatre grands types de fiabilité peuvent être explorés : la répétabilité , la fidélité intra-juges, la fidélité inter-juges et la consistance interne .

✓ La sensibilité au changement : c’est la capacité d’un instrument à détecter un changement dont l’impor- tance est significative et observable d’un point de vue clinique. L’évaluation de la sensibilité au changement est très souvent mesurée en comparant l’amplitude du changement avec l’écart-type de la mesure initiale.

✓ La “responsiveness” : il s’agit de la capacité d’un instru- ment à mesurer un changement ayant un sens clinique pour le patient.

Les outils utilisés en cancérologie et les principales dimensions à prendre en compte

Parmi les échelles spécifiques au cancer, on note la pré- dominance de 2 grands groupes de questionnaires : le QLQ-C30 de l’EORTC et le FACT-G ( Functional Assessment of Cancer Therapy-General) . Tous deux se présentent sous la forme d’un questionnaire générique accompagné de nombreux modules spécifiques qui correspondent, pour la plupart, à une localisation cancéreuse ou à une situation spécifique (par exemple, la fatigue, la neurotoxicité, etc.) [tableau] (16, 17) .

L’évaluation de la qualité de vie des patients atteints d’un cancer repose, en général, sur 3 domaines princi- paux : les domaines physique (qui recouvre le fonction- nement et les symptômes), psychologique et social.

Tableau. Questionnaires spécifi ques à la cancérologie.

Questionnaires Nombre d’items Dimensions explorées

EORTC QLQ-C30 + modules spécifi ques

28 + 2

Entre 13 et 38 Dimensions physique, sociale, cognitive, fonctionnement personnel et psychologique, état de santé global, fatigue, nausées, vomissements, douleurs, dyspnée, insomnies, perte d’appétit, constipation, diarrhée, problèmes fi nanciers

FACT-G

+ modules spécifi ques

29 + 5

Entre 7 et 20 Dimensions physique, familiale-sociale, rapport avec le médecin, bien-être psychologique, bien-être émotionnel

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Correspondances en Onco-Urologie - Vol. VIII - n° 4 - octobre-novembre-décembre 2017 157 diennes, fatigue, sommeil et repos, douleur, perte

d’appétit, nausées/vomissements, dyspnée, santé physique globale.

Bien-être psychologique : anxiété, dépression, plaisir, attention, détresse psychologique, peur.

Bien-être social : détresse familiale, rôle et relation avec les autres, affection, isolement, communication.

Prenons pour exemple les conséquences du cancer sur la qualité de vie de patientes atteintes d’un cancer du sein.

Conséquences physiques, liées en particulier à la chirur- gie mammaire et aux gestes axillaires : à la phase aiguë postopératoire, on retrouve fréquemment la douleur, l’œdème, les problèmes lymphatiques, les hématomes et les troubles neurologiques ; à la phase plus tardive, il peut persister une rougeur de la cicatrice, des séquelles fonctionnelles et une fatigue résiduelle.

Conséquences psychologiques, liées à l’image du cancer, souvent synonyme de souffrance et de mort, et également à l’image du sein, dont la symbolique est prédominante (féminité, sexualité et maternité) : l’anxiété et la dépression sont 2 symptômes très souvent rencontrés chez les patientes, que ce soit au cours d’un examen de dépistage ou d’une procédure diagnostique ou thérapeutique.

Conséquences familiales : lorsque, dans une famille, une personne est atteinte d’un cancer, c’est tout le sys- tème familial qui s’en trouve altéré. Il est démontré que l’implication émotionnelle des maris ou compagnons des femmes atteintes d’un cancer du sein est toujours une réalité. La majorité d’entre eux présentent des troubles psychologiques variés en réponse à la maladie de leur partenaire (troubles du sommeil, troubles ali- mentaires, problèmes concernant leurs responsabilités professionnelles, symptômes d’anxiété et de dépres- sion, difficultés sexuelles après l’intervention chirurgi- cale de leur épouse). Les enfants peuvent également présenter des troubles d’adaptation et des difficultés psychologiques.

Conséquences professionnelles : alors que la plupart des femmes travaillaient au moment du diagnostic du cancer du sein, la majorité d’entre elles disent avoir connu des changements dans leur vie professionnelle à la suite de la maladie. Ces changements sont carac- térisés soit par un arrêt total de travail ou une diminu- tion du temps de travail, soit par de longues absences

Planifi cation et analyse d’un essai intégrant des données de qualité de vie

Les paramètres intervenant dans la méthodologie des essais concernant l’analyse statistique de la qualité de vie sont bien spécifiques (19) .

La première étape est, à partir de la littérature, la déter- mination des dimensions de qualité de vie cibles et la différence minimale cliniquement importante (DMCI).

La DMCI représente le plus petit changement de score qui est cliniquement pertinent. Elle est déterminée par des études spécifiques par localisation et situation thérapeutiques faisant appel à des méthodes psycho- métriques (“anchor-based method”) ou statistiques ( “effect size” et règle de Cohen) [20] .

Parallèlement, des méthodes d’ajustement du risque d’erreur alpha doivent être mises en œuvre.

D’une part, les dimensions de qualité de vie mesurées sont très souvent multiples et, d’autre part, les mesures répétées (appelées aussi mesures longitu- dinales) donnent lieu à de nombreuses comparaisons statistiques conduisant à une multiplicité des tests, augmentant ainsi le risque d’erreur de type I (risque de faux positifs). Il faut donc cibler des dimensions et émettre des règles décisionnelles pour conclure, a priori, quant aux résultats de qualité de vie.

Concernant la population d’étude, l’analyse en intention de traiter (ITT) est la méthode préférable pour prévenir les biais et permettre de comparer différentes études.

Toutefois, très souvent, l’évaluation de la qualité de vie n’est pas réalisée pour la totalité des patients. Il est donc primordial de définir une sous-population utilisée pour l’ITT (appelée ITT modifiée), à savoir tous les patients pour qui l’on dispose des données de qualité de vie à l’inclusion, par exemple.

Malgré l’existence de techniques statistiques permet- tant de traiter les données manquantes, il est préférable d’avoir une action préventive pour éviter l’absence de données à chacune des étapes de la mise en place de l’étude. Dans le cas contraire, des méthodes statis- tiques, telles que les modèles de “pattern mixture” et les imputations simples ou multiples, sont mises en œuvre pour pallier ce manque de données. Toutes ces méthodes permettront une analyse de sensibilité en ITT.

Dans le cadre de la qualité de vie, 2 méthodes d’analyse statistique sont privilégiées : les modèles d’analyse de variance pour mesures répétées (modèles mixtes et

(5)

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growth curve model ). Depuis peu, la méthode d’ana- lyse du temps jusqu’à détérioration est également employée (21, 22) .

Les modèles à mesures répétées

On entend par “données répétées” des données telles que, pour chaque individu considéré, on dispose d’observations à différents instants, autrement dit répétées dans le temps. La difficulté majeure dans le traitement statistique de ces données provient du fait qu’il est impossible de supposer que les observations réalisées sur un même individu, au cours du temps, sont indépendantes. Il est donc nécessaire d’introduire une structure de covariance pour les variables aléatoires associées à chaque individu, afin de tenir compte de cette situation particulière. Ces modèles permettent d’estimer l’effet du temps (c’est-à-dire les changements de score au cours du temps), l’effet groupe (c’est-à-dire les différences de scores entre les bras de traitement à l’inclusion) et une interaction entre le bras de traite- ment et le temps (reflétant une évolution différente du score de qualité de vie selon le bras de traitement au cours du temps comparativement au bras de référence).

Ils contiennent des effets fixes, comme le traitement, et des effets aléatoires, comme l’effet patient, prenant en compte la corrélation entre les mesures faites pour un même patient à différents moments. L’approche par modèles linéaires sur mesures répétées présente l’avan- tage d’être bien établie, mais nécessite que les scores aient une distribution normale, ce qui est rarement vérifié. Par ailleurs, ils sont souvent d’interprétation difficile pour les cliniciens.

La modélisation des courbes de croissance L’objectif de cette méthode est de décrire l’évolution des mesures de qualité de vie aux différents temps par une courbe permettant de relier les données. Ces modèles sont utilisés de préférence lorsqu’une grande variabilité individuelle de la temporalité de l’évaluation est observée et quand les temps de mesure sont nom- breux. Là encore, comme il s’agit de données répétées pour chaque patient, les données de qualité de vie sont corrélées. Ainsi, il est requis, pour modéliser la structure de covariance, d’utiliser un modèle mixte.

Temps jusqu’à détérioration de la qualité de vie

Ce type d’approche s’apparente aux données de survie, habituellement utilisées et maîtrisées par les cliniciens.

En utilisant une modélisation de type survie à l’aide de la méthode de Kaplan-Meier, il est possible de produire des courbes de survie pour décrire longitudinalement

la qualité de vie. La définition de l’événement doit être le prérequis. L’événement, dans ce contexte, est l’apparition d’une détérioration.

La détérioration peut être définie comme : la première apparition de la DMCI entre une évaluation et le score obtenu lors de la première éva luation (avant rando- misation), une différence de 10 ou 5 points entre le meilleur score obtenu et les scores suivants, ou encore l’absence d’augmentation constatée après la DMCI observée (on parle de détérioration définitive).

Une comparaison entre les 2 bras de traitement peut être réalisée selon le test du log-rank et un modèle de Cox multivarié afin d’estimer la taille de l’effet traitement (HR). Cette méthode aurait une puissance statistique inférieure à celle des modèles mixtes mais présente l’avantage d’être d’interprétation plus aisée et de faciliter le calcul du nombre de patients nécessaires pour la planification des futurs essais (23) .

Conclusion et perspectives

Il apparaît aujourd’hui, très clairement, que l’évaluation de la qualité de vie chez les patients atteints d’un cancer s’impose, à la fois dans une optique de recherche, avec la réalisation d’essais cliniques, et dans une optique d’individualisation des thérapeutiques et de prise en charge. Or, actuellement, en France, les cliniciens ont un besoin réel d’instruments de mesure fiables et validés, facilement utilisables et facilement interprétables.

La qualité de vie est reconnue par les instances comme un critère de jugement pour l’autorisation de mise sur le marché des traitements en oncologie. Par ailleurs, la qualité de vie pourrait être associée à d’autres critères de jugement comme la survie sans progression en tant que cocritères de jugement principaux, mais l’utilisation des cocritères de jugement est une nouvelle approche dans les essais cliniques en oncologie et nécessite des recherches méthodologiques pour promouvoir de tels schémas d’étude. En cancérologie, de nombreuses études ont souligné la valeur pronostique des données issues d’évaluations de la qualité de vie, principalement en situation métastatique (24-30) .

Il paraît aujourd’hui difficilement concevable, sur le plan éthique, de ne pas intégrer les données de qualité de vie dans nos pratiques quotidiennes et au sein de la

recherche clinique. ■

M.J. Paillard déclare ne pas avoir de liens d’intérêts.

F. Bonnetain déclare avoir des liens d’intérêts avec Roche, Novartis, Amgen, Ipsen, Nestlé, Merck Serono.

R é f é r e n c e s

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