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Prévention du diabète : les estrogènes ont leur mot à dire !

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(1)

d o s s i e r

Prévention du diabète : les estrogènes ont leur mot à dire !

Prevention of diabetes: let’s consider the role of estrogens!

Pierre Gourdy

*,**

, Aurélie Fabre

**

, Élodie Riant

**

, Maeva Guillaume

**

, Jean-François Arnal

**

* Service de diabétologie, maladies métaboliques et nutrition, institut CARDIOMET, CHU de Toulouse.

** INSERM UMR 1048, institut des maladies métaboliques et cardio­

vasculaires, Toulouse.

Poin ts for ts Highligh ts

» L’implication métabolique de la voie des estrogènes connaît depuis quelques années un intérêt croissant car de nombreuses données cliniques et expérimentales ont démontré le rôle clé de ces hormones stéroïdes sexuelles dans le maintien de l’homéostasie glucidique.

» L’administration d’estrogènes réduit de façon très significative l’incidence du diabète de type 2 en limitant l’accumulation de masse grasse et en préservant la sensibilité à l’insuline au niveau des tissus périphériques, mais également en exerçant des effets protecteurs directs sur le pancréas endocrine avec une amélioration de la fonction et de la survie des cellules β.

» Ces actions bénéfiques des estrogènes impliquent le récepteur alpha des estrogènes (ERα), qui représente donc une cible thérapeutique pertinente.

» Le développement de modulateurs sélectifs du ERα mimant ces actions protectrices vis-à-vis de la sensibilité à l’insuline et de l’insulinosécrétion, tout en étant dénués d’effets prolifératifs sur les cibles utérines et mammaires, permettrait d’ouvrir de nouvelles perspectives thérapeutiques pour la prévention et le traitement du diabète de type 2.

Mots-clés : Diabète – Estrogènes – Récepteur des estrogènes – Sensibilité à l’insuline – Cellule β pancréatique.

The estrogen pathway is now considered as an important metabolic modulator and both experimental and clinical data clearly demonstrate the key role of these sex steroid hormones in glucose homeostasis.

Estrogen administration exerts a significant protection from type 2 diabetes by preventing android obesity and insulin resistance, but also through direct beneficial actions on the endocrine pancreas. Indeed, estrogens are recognized to promote the survival and to enhance the functions of β cells.

These protective effects of estrogens mainly result from the activation of estrogen receptor alpha (ERα) which is thus considered as a promising therapeutic target.

The development of selective ERα modulators with maintained protective properties on insulin sensitivity and insulin secretion, but devoid of proliferative side effects on reproductive tissues such as the uterus and the breast, would thus open new perspectives for the prevention and treatment of type 2 diabetes.

Keywords: Diabetes – Estrogens – Estrogen receptor – Insulin sensitivity – Pancreatic beta cell.

U n faisceau d’arguments épidémiologiques, cli- niques et expérimentaux plaide désormais en faveur d’un effet bénéfique des estrogènes sur l’homéostasie énergétique et plus spécifiquement sur le métabolisme glucidique. Dans cette brève revue, nous revenons sur les principales données justifiant l’intérêt de mieux définir le potentiel de la voie des estrogènes et, tout particulièrement, le rôle central du récepteur α des estrogènes (ERα), qui constitue une nouvelle cible thérapeutique potentielle pour la prévention ou le trai- tement du diabète de type 2.

Le traitement hormonal de la ménopause réduit l’incidence du diabète de type 2

Il est parfaitement admis que la ménopause marque

un tournant significatif vis-à-vis du risque de diabète

de type 2, en particulier en amplifiant l’exposition à

divers facteurs favorisants, dont l’accumulation de tissu

adipeux viscéral (1). L’influence du traitement hormonal

de la ménopause (THM) sur le métabolisme glucidique

est donc une préoccupation ancienne, mais il aura fallu

attendre les résultats des grands essais d’intervention

(2)

HERS (CEE + MPA) 6,2 9,5 0,65 (0,48-0,89)

WHI (CEE + MPA) 3,5 4,2 0,79 (0,67-0,93)

WHI (CEE seuls) 8,3 9,3 0,88 (0,77-1,01)

CEE : estrogènes conjugués équins ; HERS : Heart and Estrogen/progestin Replacement Study ; HR : Hazard Ratio ; MPA : acétate de médroxyprogestérone ; WHI : Women’s Health Initiative.

à des femmes ménopausées a permis de réduire de 21 jusqu’à 35 % l’incidence du diabète au cours du suivi, par comparaison à un placebo (tableau) [2-4]. Cet effet protecteur du THM a été récemment confirmé par les données de suivi de larges cohortes européennes, en particulier dans le cadre de l’étude française E3N (étude épidémiologique auprès de femmes de la Mutuelle générale de l’Éducation nationale). L’analyse de cette cohorte française révèle, en effet, une réduction signifi- cative du nombre de cas incidents de diabète chez les femmes ayant bénéficié d’un THM (RR = 0,82 ; IC

95

: 0,72- 0,93). Cet effet favorable semble plus marqué lors de l’administration des estrogènes par voie orale par com- paraison avec la voie transdermique, mais s’avère cepen- dant significatif pour les 2 modes d’administration (5).

Les estrogènes :

acteurs clés du métabolisme glucidique

De façon remarquable, l’implication spécifique des estrogènes dans la régulation de l’action de l’insuline et du métabolisme glucidique a pu être affirmée chez l’humain à l’occasion d’observations exceptionnelles concernant des sujets, principalement des hommes, présentant des mutations inactivatrices du gène de l’aromatase, enzyme clé de la voie de synthèse des estro- gènes. Cette carence en estrogènes conduit en effet au développement prématuré d’un surpoids androïde et de stigmates francs d’insulinorésistance, dont une intolérance au glucose (6). Confirmant ces observations, l’invalidation du gène de l’aromatase chez la souris aboutit à un phénotype dysmétabolique identique.

Par ailleurs, l’utilisation de divers modèles animaux a définitivement confirmé le potentiel thérapeutique de l’activation de la voie des estrogènes. À titre d’exemple, chez des souris femelles ovariectomisées et soumises à un régime hyperlipidique, notre équipe a rapporté que l’administration d’estradiol prévient la prise de poids et le développement des dépôts adipeux, et exerce un effet protecteur très significatif vis-à-vis de la survenue de l’insulinorésistance et de l’intolérance au glucose classiquement induites par ce type de régime (7).

Le rôle crucial du récepteur α des estrogènes Deux principales cibles moléculaires sont susceptibles de relayer les effets des estrogènes, les récepteurs des

estrogènes α et β (ERα et ERβ), membres de la famille des récepteurs nucléaires aux hormones stéroïdes.

Dans l’état actuel des connaissances, il est admis que la grande majorité des effets extrareproducteurs des estrogènes, incluant leurs actions métaboliques, met en jeu l’activation du ERα. En premier lieu, il est intéres- sant de noter que plusieurs analyses pangénomiques, conduites dans des populations distinctes, ont montré une association entre l’existence d’un diabète de type 2 et le gène ESR1, codant pour le ERα (8). D’autre part, démontrant le caractère indispensable de ce récepteur nucléaire, tout défaut d’expression ou de fonction du ERα se traduit par un syndrome métabolique précoce et sévère. C’est le phénotype typique du premier cas de mutation inactivatrice du ERα rapporté dans la lit- térature, chez un homme qui a également présenté des dysfonctionnements vasculaires prématurés (9). Les souris déficientes en ERα, aussi bien mâles que femelles, sont également caractérisées par une accumulation de masse adipeuse, une altération franche de la sensibi- lité à l’insuline et une hyperglycémie (10). Enfin, nous avons montré que l’effet protecteur de l’administration d’estradiol vis-à-vis des conséquences métaboliques délétères d’un régime hyperlipidique est totalement aboli chez ces animaux déficients en ERα (7).

Une action favorable sur différents acteurs tissulaires de l’homéostasie glucidique

Les mécanismes impliqués dans l’effet bénéfique des estrogènes sur le métabolisme glucidique ne sont pas totalement élucidés. Les données expérimen- tales suggèrent cependant différentes actions favo- rables permettant de contrer les 2 principaux traits physiopathologiques du diabète de type 2, à savoir, la diminution de la sensibilité à l’insuline et l’altéra- tion progressive de la capacité d’insulinosécrétion du pancréas (figure 1, p. 258) [11].

Les estrogènes préservent la sensibilité à l’insuline

Plusieurs travaux ont suggéré que les femmes en

période d’activité génitale présentaient une meilleure

(3)

d o s s i e r

Figure 1. Mécanismes impliqués dans l’effet bénéfique des estrogènes sur le métabolisme glucidique (11, 12, 15).

Intestin

Foie

Muscle Glucose

Insuline

+

Pancréas

Tissu adipeux Sensibilité

à l’insuline

Sensibilité à l’insuline Adiposité viscérale

Lipogenèse

Métabolisme basal Activité physique Prise alimentaire

Synthèse et sécrétion d’insuline

Survie des cellules pancréatiques β

Système nerveux

central

sensibilité à l’action de l’insuline que les hommes d’âge comparable. En revanche, comme nous l’avons évoqué (cf. supra), l’installation de la ménopause favorise la constitution d’un surpoids avec répartition androïde de la masse grasse et la survenue progressive d’une insulinorésistance pouvant conduire au diabète de type 2 (1). De nombreuses études se sont attachées à apprécier l’influence du THM sur la sensibilité à l’insuline, générant des données parfois discordantes en fonction du mode de quantification de la sensibilité à l’insuline, et surtout du type de molécules administrées (proges- tatifs en particulier). L’étude WHI apporte, là encore, son lot d’enseignements, observant notamment une diminution significative de l’insulinémie à jeun et de l’indice HOMA (Homeostasis Model Assessment) dès les premiers mois de traitement hormonal (3, 4).

Toujours d’après l’étude WHI, l’effet protecteur du THM vis-à-vis de la survenue du diabète de type 2 ne semble pas s’expliquer de façon exclusive par la prévention de la prise pondérale et de l’accumulation de masse grasse.

En effet, l’incidence du diabète a été également signi- ficativement réduite par le traitement chez les femmes dont l’indice de masse corporelle et le tour de taille sont demeurés stables au cours du suivi (3). Le béné- fice conféré par les estrogènes en termes de sensibilité à l’insuline pourrait donc combiner des effets indirects par prévention de la prise de poids et de l’accumulation de tissu adipeux à prédominance abdominale, et des effets directs sur la cascade de signalisation du récepteur de l’insuline au sein des tissus cibles (muscle squeletti- que, foie, adipocyte). Ainsi, en présence d’estradiol, des

expériences réalisées in vitro et in vivo chez l’animal ont objectivé une amplification de la phosphorylation de molécules clés de la voie de l’insuline au niveau du tissu adipeux et du muscle squelettique (Insulin Receptor Substrate 1 [IRS1] en particulier) [7].

Enfin, toujours chez le rongeur, l’influence des estrogènes sur certaines régions du système nerveux central, expri- mant fortement ERα, semble aussi directement impli- quée dans leur effet métabolique favorable en modulant la prise alimentaire et le métabolisme basal (12).

Cependant, l’influence favorable de ces hormones sur la composition corporelle et le phénotype métabolique découle principalement d’une majoration du niveau d’activité physique et de la dépense énergétique globale, et s’avère indépendante de l’effet spécifique sur la prise alimentaire (12). Par ailleurs, les modèles d’invalidation spécifique de l’expression de ERα dans l’adipocyte et l’hépatocyte ont révélé des effets directs sur ces types cellulaires, contribuant respectivement à la prévention de l’obésité et de la stéatose hépatique (14, 15).

Des arguments en faveur d’un effet direct sur les cellules β pancréatiques

Les données expérimentales cumulées au cours des

dernières années démontrent aussi le rôle important

des estrogènes dans la physiologie et l’adaptation

physiopathologique du pancréas endocrine. Comme

nous le détaillons ci-dessous, leurs effets concourent à

améliorer la fonction des cellules pancréatiques β, mais

également à préserver la masse cellulaire β en limitant

les processus apoptotiques (13). Bien que les cellules β

(4)

Figure 2. Structure du récepteur ERα précisant la localisation des 2 fonctions d’activation AF-1 et AF-2.

Indépendant de la présence

de l’hormone AF-1

N A/B C D E F C

Liaison

à l’ADN Liaison

à l’hormone

Région charnière

AF-2 Dépendant de la présence

de l’hormone

d’insuline en réponse au glucose, via l’activation d’ERα.

Ainsi, l’estradiol augmente in vitro le contenu en insuline et stimule la sécrétion d’insuline par les îlots murins isolés, un effet également observé après administra- tion de l’hormone in vivo (18). Cet effet amplificateur de l’estradiol sur la synthèse d’insuline est conservé chez des animaux ERβ-/-, mais totalement aboli chez des souris n’exprimant pas ERα (invalidation globale ou spécifique des cellules β (16). ERα est également impliqué dans la régulation de la sécrétion d’insuline en réponse au glucose, et la mise en jeu d’effets non génomiques semble au premier plan, contribuant à la dépolarisation de la membrane et à l’entrée de calcium dans la cellule β (16). Cette modulation de l’insulino- sécrétion pourrait également impliquer ERβ et GPR30, mais ERα est logiquement considéré comme une cible pertinente pour amplifier la fonction cellulaire β (16).

Les estrogènes favorisent également la survie des cel- lules pancréatiques β. Ainsi, in vitro, l’estradiol protège les îlots de Langerhans humains de l’apoptose induite par différents stimuli inflammatoires (19). Récemment, S. Liu et al. ont montré que l’administration d’estradiol améliorait la survie d’îlots humains transplantés chez des souris nude rendues diabétiques par administration de streptozotocine (STZ) [20]. In vivo, l’administration d’estradiol exerce un effet protecteur dans les modèles animaux caractérisés par une altération spontanée ou induite de la masse cellulaire β (rats ZDF, rats OLETF, souris transgéniques surexprimant le polypeptide amy- loïde humain, administration d’alloxane ou de STZ) [21].

Les souris déficientes en aromatase présentent égale- ment une plus grande susceptibilité au diabète induit par la STZ. Dans ce modèle, l’administration d’estradiol prévient l’apoptose des cellules β et par conséquent la survenue de l’hyperglycémie (17). L’effet anti-apopto- tique de l’estradiol est aboli chez les souris ERα-/-, ren- forçant l’intérêt de cette cible moléculaire pour préserver les cellules pancréatiques β en situation physiopatho- logique (17). Les mécanismes impliqués dans l’effet anti-apoptotique des estrogènes ne sont pas totale- ment élucidés, mais les résultats récents de l’équipe de F. Mauvais-Jarvis indiquent que l’estradiol protège les cellules pancréatiques β des phénomènes délétères induits par la lipotoxicité (22). L’estradiol réduit en effet l’expression de gènes clés de la lipogenèse via l’activa- tion de STAT3 dans les îlots de Langerhans murins, action favorable dépendante d’ERα et potentiellement médiée

Vers une modulation sélective du ERα pour prévenir ou traiter le diabète de type 2 ?

L’ensemble des actions bénéfiques des estrogènes sur la sensibilité à l’insuline et sur l’insulinosécrétion implique ERα qui représente donc une cible pertinente pour le développement de nouvelles stratégies thérapeutiques.

Bien entendu, les effets indésirables des estrogènes eux-mêmes, en particulier sur la sphère reproductrice (risque majoré de néoplasie utérine en particulier), les disqualifient pour une démarche de prévention ou de traitement du diabète de type 2. En revanche, le déve- loppement de modulateurs sélectifs des récepteurs des estrogènes (Selective Estrogen Receptor Modulator [SERM]) exerçant une action protectrice sur la sensibilité à l’insuline et l’insulinosécrétion, tout en étant dénués d’effets prolifératifs sur les cibles utérines et mammaires, ouvrirait de nouvelles perspectives thérapeutiques (24).

Les SERM actuellement disponibles (tamoxifène, raloxifène, etc.) ne répondent malheureusement pas à l’ensemble des critères, en particulier dans une démarche de prévention du diabète. Ainsi, une meilleure connaissance des modalités d’action des estrogènes est un préalable indispensable au dévelop- pement de ce type de molécules présentant un profil optimisé en termes d’efficacité et de sécurité d’emploi.

Les estrogènes exercent classiquement leurs actions en modulant la transcription de gènes cibles, effets

“génomiques” mettant en jeu 2 fonctions activatrices

distinctes, respectivement localisées dans la par-

tie N-terminale (AF-1) ou C-terminale (AF-2) du ERα

(figure 2) [25]. L’utilisation de modèles murins originaux

(5)

d o s s i e r

Figure 3. L’administration d’estradiol (E2) prévient totalement l’incidence du diabète auto-immun chez la souris Non Obese Diabetic (34).

75

Incidence du diabète (%)

100

50 25

00 5 10 15 20 25 30

Âge (semaines) p < 0,001 Diabète spontané

Non traitées (n = 15) E2 (n = 16)

75

Incidence du diabète (%)

100

50 25

00 5 10 15 20 25 30

Jours après injection de cyclophosphamide

p < 0,001 Diabète induit par cyclophosphamide

Non traitées (n = 16) E2 (n = 15)

présentant une déficience spécifique soit en fonction AF-1, soit en fonction AF-2, nous a récemment permis de démontrer la possibilité de dissocier certains effets bénéfiques des estrogènes (prévention de l’athéro- sclérose, de l’obésité, de l’insulinorésistance et de l’ostéo porose) de leurs effets prolifératifs délétères sur l’utérus en activant ERα indépendamment de sa fonction AF-1 (26-29). Ces différents effets protecteurs sont en revanche dépendants de l’activation d’AF-2, sou- lignant, d’une part, l’importance des effets génomiques et, d’autre part, l’intérêt d’une modulation sélective privilégiant la mise en jeu de cette dernière fonction sans activation d’AF-1 (26-29).

Des effets dits “membranaires” ou “non génomiques”

des estrogènes ont également été décrits in vitro, cor- respondant à l’activation d’une fraction des molécules ERα localisée à la membrane plasmique, ce qui conduit à la phosphorylation très rapide de cascades de signalisa- tion intracellulaire (30). Des données récentes suggèrent qu’une stratégie d’activation spécifique des effets non génomiques relayés par ERα pourrait également per- mettre de conserver certains effets protecteurs tels que l’accélération de la cicatrisation endothéliale, sans effet délétère sur le sein et l’utérus (31). Une démarche d’ac- tivation sélective des effets non génomiques pourrait donc offrir des perspectives alternatives ou complé- mentaires pour dissocier certains effets protecteurs des estrogènes de leurs actions délétères sur les tissus reproducteurs. Ainsi, l’utilisation d’un activateur spéci- fique de ces effets non génomiques (Estrogen-Dendrimer Conjugate [EDC]) a suggéré l’intérêt de cette voie de signalisation membranaire pour favoriser les processus de cicatrisation endothéliale, sans aucun effet proli-

fératif sur l’utérus, ni influence sur la progression de tumeurs mammaires (31). Très récemment, ce mode d’activation sélectif des effets membranaires du ERα par l’EDC a montré sa capacité à prévenir la constitution d’une stéatose hépatique chez des souris soumises à un régime hyperlipidique, mais sans aucun effet pro- tecteur vis-à-vis de l’accumulation de masse grasse et de la survenue d’une hyperglycémie (32). Nous avons récemment développé un nouveau modèle murin qui présente un défaut d’adressage membranaire du ERα et, chez ces souris, nous avons montré une abolition des effets non génomiques, offrant pour la première fois la possibilité d’étudier in vivo l’influence de ce mode d’activation sur le plan métabolique (33). Ce nouveau modèle nous permettra de préciser très prochainement l’implication exacte de cette voie non génomique du ERα dans le maintien de l’homéostasie énergétique et glucidique.

Conclusion

En résumé, les estrogènes exercent des effets métabo-

liques globalement bénéfiques, contribuant à préserver

l’homéostasie énergétique et glucidique, et la prescrip-

tion d’un traitement hormonal permet probablement

de réduire le risque de développer un diabète de type 2

chez la femme ménopausée. Cependant, si ce bénéfice

métabolique doit probablement être pris en compte,

il n’occulte pas les effets indésirables potentiels des

différen tes combinaisons hormonales, et donc la néces-

sité d’une décision individualisée et d’une réévaluation

annuelle de la balance bénéfice/risque.

(6)

P. Gourdy déclare ne pas avoir de liens d’intérêts avec le contenu de cet article.

Les autres auteurs n’ont pas précisé leurs éventuels liens d’intérêts.

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R é f é r e n c e s

tisées dans cette revue, ce concept paraît évident en ce qui concerne le diabète de type 2, mais nos observations expérimentales récentes montrent qu’il pourrait égale- ment s’appliquer au diabète de type 1. En effet, l’admi- nistration d’estradiol prévient totalement la survenue d’un diabète auto-immun dans le modèle classique de

peutique visant à préserver l’homéostasie glucidique

passe par une meilleure compréhension des mécanismes

impliqués et par l’identification de modulateurs sélectifs

du ERα conservant les effets métaboliques et vasculaires

bénéfiques des estrogènes, mais totalement dénués

d’effets délétères, en particulier carcinologiques. ■

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