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LA CRITIQUE LITTÉRAIRE D'ALFRED JARRY À LA REVUE BLANCHE.

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Academic year: 2021

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LA CRITIQUE LITTÉRAIRE D’ALFRED JARRY À LA REVUE BLANCHE.

Matthieu Gosztola

To cite this version:

Matthieu Gosztola. LA CRITIQUE LITTÉRAIRE D’ALFRED JARRY À LA REVUE BLANCHE..

Littératures. Université du Maine, 2012. Français. �tel-00743016v4�

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Université du Maine (Le Mans / Laval)

École doctorale Sociétés, cultures, échanges (Angers)

THÈSE DE DOCTORAT

présentée et soutenue publiquement par M. Matthieu GOSZTOLA

le vendredi 12 octobre 2012

La critique littéraire d’Alfred Jarry à La Revue blanche .

Édition critique et commentée.

J URY

M. le Professeur Émérite Henri BÉHAR, Université Paris III Sorbonne Nouvelle M. le Professeur Émérite Patrick BESNIER, Université du Maine

M. le Professeur Bertrand MARCHAL, Université Paris IV Sorbonne

Mme la Maître de conférences HDR Nathalie PRINCE, Université du Maine

Directeur de thèse : M. le Professeur Émérite Patrick BESNIER

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« Ferme la mort de mes cils au monde extérieur, pour que je réfléchisse dans la nuit de dessous mon crâne »

(Les Minutes de sable mémorial)

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5 REMERCIEMENTS.

Remerciements à M. Patrick Besnier et à M. Henri Béhar, pour leurs conseils.

Un immense merci à Ana Orozco, sans qui cette thèse n’aurait jamais pu naître.

Un grand merci également à Michel Garier, à mon père, à ma mère, à Julien Schuh, à Louise Thunin et à Bernard Pignero, pour la façon dont ils ont ouvert la voie et leur indéfectible soutien.

Je suis extrêmement redevable à Julien Schuh, pour sa sagacité, son amitié, sa sensibilité.

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7 AVERTISSEMENT.

Des choix ont été opérés pour faire en sorte que cette édition critique et commentée gagne en lisibilité :

— Afin de pouvoir être retrouvés plus aisément, les textes commentés sont en gras, avec un corps plus important.

— Nous avons logiquement opté pour un système de notes sur deux niveaux : chaque niveau est indépendant, du point de vue des références, et des conventions qui y sont appliquées (afin de rendre la lecture de chaque niveau possible séparément).

— Le propre d’une telle édition étant de pouvoir être lue non linéairement, les références sont formulées entièrement à chaque partie, ainsi qu’à chaque nouveau texte commenté (pour ce qui est, bien évidemment, de leur première apparition). Néanmoins, quelques éditions étant citées avec une récurrence particulièrement notable, des abréviations ont été conservées tout au long de notre travail (se reporter à la liste des abréviations pour en prendre connaissance).

— La mention « op. cit. », lorsqu’elle suit un nom d’auteur, de revue, ou de livre (« op. cit. » a alors le sens d’ « édition citée »), renvoie toujours à la précédente occurrence de cet auteur, de cette revue ou de ce livre dans le cours des références. Ainsi, si plusieurs ouvrages d’un auteur sont cités (dans l’espace d’un texte commenté), la mention « op. cit. » suivant son nom renvoie toujours au dernier ouvrage de sa main rappelé en note. Lorsque « op. cit. » n’est pas suivi d’un numéro de page, cela signifie que le numéro de page reste inchangé par rapport à la précédente référence concernée.

— Lorsqu’il n’est pas indiqué, le lieu d’édition est Paris.

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9 LISTE DES ABRÉVIATIONS.

OC I : Alfred Jarry, Œuvres complètes, I, textes établis, présentés et annotés par Michel Arrivé, Gallimard, collection Bibliothèque de la Pléiade, 1972.

OC II : Alfred Jarry, Œuvres complètes, II, édition établie par Henri Bordillon, avec la collaboration de Patrick Besnier et Bernard Le Doze, Gallimard, collection Bibliothèque de la Pléiade, 1987.

OC III : Alfred Jarry, Œuvres complètes, III, édition établie par Henri Bordillon, avec la collaboration de Patrick Besnier et Bernard Le Doze et la participation de Michel Arrivé, Gallimard, collection Bibliothèque de la Pléiade, 1988.

Bouquin : Alfred Jarry, Œuvres, sous la direction de Michel Décaudin, Robert Laffont, collection Bouquins, 2004.

GDU : Dir. Pierre Larousse, Grand dictionnaire universel du XIX

e

siècle : français, historique, géographique, mythologique, bibliographique…, Administration du Grand Dictionnaire Universel, 1866-1890.

BL I : Les Mille et une nuits, traduit [de l’arabe] par le Dr J.C. Mardrus, volume 1, Robert Laffont, collection Bouquins, 1980.

BL II : Les Mille et une nuits, traduit [de l’arabe] par le Dr J.C. Mardrus, volume 2, Robert Laffont, collection Bouquins, 1980.

BESNIER : Patrick Besnier, Alfred Jarry, Fayard, 2005.

CARAMASCHI : Enzo Caramaschi, Critiques scientistes et critiques impressionnistes : Taine, Brunetière, Gourmont, Pisa [Italie], Libreria Goliardica éditrice, 1963.

BOURRELIER : Paul-Henri Bourrelier, La Revue blanche, Une génération dans l’engagement, 1890- 1905, Fayard, 2007.

NORDMANN : Jean-Thomas Nordmann, La Critique littéraire française au XIX° siècle (1800- 1914), Le livre de poche, collection Références, 2001.

LEROY BERTRAND-SABIANI : Géraldi Leroy, Julie Bertrand-Sabiani, La vie littéraire à la Belle Époque, Presses Universitaires de France, 1998.

« Commentaire » : « Commentaire pour servir à la construction pratique de la machine à explorer le temps » (texte paru dans le numéro de février 1899 du Mercure de France).

Faustroll : Gestes et opinions du docteur Faustroll, pataphysicien, « roman néo-scientifique ».

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11 SOMMAIRE DES TEXTES DE JARRY.

1. Par ordre d’apparition.

— « Almanach du Père Ubu pour le XXe siècle (en vente partout). » .... p. 406.

— « Jean Hess : L’Affaire Iukanthor (Juven). » .... p. 415.

— « Saint-Georges de Bouhélier : La Tragédie du nouveau Christ (Bibliothèque Charpentier). » .... p.

426.

— « Fernand Hauser : Le Ressuscité (Charles). » .... p. 454.

— « Mécislas Golberg : Lazare le Ressuscité (édité par le Comité Golberg, chez M. Albert Wolff). » .... p. 460.

— « Albert Fua : Le Semeur d’idéal (éditions de la Plume). » .... p. 468.

— « Ernest Haeckel : État actuel de nos connaissances sur l’origine de l’homme (Schleicher). » .... p. 473.

— « Docteur Ph. Maréchal : Supériorité des animaux sur l’homme (Fischbacher). » .... p. 489.

— « Maurice Maeterlinck : La Vie des abeilles (Fasquelle). » .... p. 506.

— « Jean S. Barès : Gramaire françaize (Le Réformiste). » .... p. 510.

— « L. Clédat : La Question de l’accord du participe passé (Bouillon). » .... p. 521.

— « Francisque Sarcey : Quarante ans de théâtre (Les Annales). » .... p. 524.

— « A. Lagoguey : Alceste ou la Fidélité conjugale, tragi-comédie grecque traduite d’Euripide en vers français (Brunel). » .... p. 536.

— « Mgr Spalding : L’Éducation supérieure des femmes (Bloud et Barral). » .... p. 540.

— « Hubertine Auclert : Les Femmes arabes (Société d’éditions littéraires). » .... p. 548.

— « Mme Hudry-Menos : La Femme (Schleicher). » .... p. 553.

— « J.-H. Rosny : Thérèse Degaudy, roman de mœurs mondaines (éditions de la Revue blanche). » .... p. 560.

— « Li-Taï : Le Mystère posthume (Schleicher). » .... p. 571.

— « Michel de Karnice-Karnicki : Vie ou mort (Chaix). » .... p. 581.

— « Synésius (Fabre des Essarts) : L’Arbre gnostique (Chamuel). – Sophronius : Catéchisme expliqué de l’Église gnostique (Chamuel). » .... p. 588.

— « Georges Duruy : Pour la justice et pour l’armée (Ollendorff). » .... p. 599.

— « Henry Leyret : Les Jugements du président Magnaud, réunis et commentés (Stock). » .... p. 602.

— « Dr Th. Pascal : Essai sur l’évolution humaine (Publications théosophiques). » .... p. 607.

— « Dr J. Marcus : Étude médico-légale du meurtre rituel. » .... p. 614.

— « Thomas de Quincey : De l’assassinat considéré comme un des beaux-arts, traduit par André

Fontainas (Mercure de France). » .... p. 620.

(13)

12

— « L’HOMME AU SABLE ». .... p. 628.

— « Pierre Apéry : Communications au XIII

e

congrès international de médecine. » .... p. 638.

— « Fanny Pierrel : L’Éternité (Bligny-Cottot, à Autun). » .... p. 646.

— « Léon Walras : Éléments d’économie politique pure (Pichon). » .... p. 658.

— « Eugène Demolder : L’Agonie d’Albion, avec de nombreuses caricatures de M. Haringus (Mercure de France). » .... p. 668.

— « Carolus Didier : Napoléon et l’amour (Méricant). » .... p. 678.

— « Léon Duplessis : Moderne Médée (Ollendorff). » .... p. 686.

— « Paul Adam : L’Enfant d’Austerlitz (Ollendorff). » .... p. 690.

— « Gustave Kahn : L’Esthétique de la rue (Bibliothèque Charpentier). » .... p. 698.

— « G. M. : La Natalité en France en 1900 (Bernard). » .... p. 709.

— « Gaston Danville : La Psychologie de l’amour (Alcan). » .... p. 723.

— « G. Dubois-Desaulle : Prêtres et moines non conformistes en amour (éditions de la Raison, in-18 de 346 pages, 3,50 F). » .... p. 745.

— « F.-W. Mariassy : Le Golf en Angleterre et les Golf-Clubs de France (Robaudy, à Cannes). » .... p.

773.

— « Lucien Hendebert : Au pays des Somalis et des Comoriens (Maisonneuve). » .... p. 786.

— « Félix Chapiseau : Au pays de l’esclavage (Maisonneuve). » .... p. 807.

— « LE LIVRE DES MILLE NUITS ET UNE NUIT, traduction J.-C. Mardrus, tome V (éditions de la Revue blanche). » .... p. 813.

— « Le Livre des Mille Nuits et Une Nuit (tome IX : « Histoire d’Abou-Kir et d’Abou-Sir » ;

« Anecdotes morales du Jardin Parfumé », soit « Les Trois Souhaits », « Le Jeune Garçon et Le Masseur du hammam », « Il y a blanc et blanc » ; « Histoire d’Abdallah de la Terre et d’Abdallah de la Mer » ; « Histoire du jeune homme jaune » ; « Histoire de Fleur-de-Grenade et de Sourire- de-Lune » ; « La Soirée d’hiver d’Ishak de Mossoul » ; « Le Fellah d’Égypte et ses enfants blancs » ; « Histoire de Khalife et du khalifat »), traduction littérale et complète du texte arabe par le Dr J.-C. Mardrus (éditions de la Revue blanche). » .... p. 832.

— « Le Livre des Mille nuits et Une Nuit (traduction littérale et complète du texte arabe par le Dr J.-C. Mardrus) ; tome X (« Les Aventures de Hassân Al-Bassri », « Le Diwân des gens hilares et incongrus », « Histoire du dormeur éveillé », « Les Amours de Zein Al-Mawassif », « Histoire du jeune homme mou »), éditions de la Revue blanche. » .... p. 853.

— « J.-C. Mardrus, trad. : Le Livre des Mille Nuits et Une Nuit ; tome XII : « La Parabole de la vraie science de la vie » ; « Farizade au sourire de rose » ; « Histoire de Kamar et de l’experte Fatima » ;

« Histoire de la jambe de mouton » ; « Les Clefs du Destin » ; « Le Diwân des faciles facéties et de

(14)

13

la gaie sagesse » ; « Histoire de la princesse Nourennahar et de la belle Gennia » (Eugène Fasquelle, in-8 de 324 pages, 7 F). » .... p. 867.

— « A.-Ferdinand Herold : Les Contes du vampire (Mercure de France, 3,50 F). » .... p. 887.

— « Albert de Pouvourville : L’Empire du Milieu (Schleicher). » .... p. 900.

— « Le Comte de Pimodan : Promenades en Extrême-Orient (Champion). » .... p. 911.

— « Émile Vedel : Lumières d’Orient (Ollendorff). » .... p. 917.

— « Amédée Vignola : Toutes les femmes (Méricant). » .... p. 923.

— « Alfred Capus : La Bourse ou la Vie (éditions de la Revue blanche). » .... p. 927.

— « LE CAMELOT ». .... p. 932.

— « Léopold Courouble : La Famille Kaekebrouck (Lacomblez). » .... p. 940.

— « DE DON QUICHOTTE À OTERO » (« Quevedo : Pablo de Ségovie ; éditions de la Revue blanche, un vol. in-18 de 288 pages. » « Jean-Louis Talon : La Marquesita ; éditions de la Revue blanche, un vol. in-18 de 318 pages, sous couverture en couleurs de Sancha. » « Frank Harris : Montès le Matador, traduit de l’anglais ; Mercure de France, un vol. in-18. »). .... p. 944.

— « W. C. Morrow : Le Singe, l’Idiot et autres gens (éditions de la Revue blanche). » .... p. 966.

— « William Platt : A Three-Fold Utterance (W. Platt). » .... p. 972.

— « Verlaine : Parallèlement, illustré par Pierre Bonnard (Vollard). » .... p. 1012.

— « Albert Trachsel : Rêveries dans la montagne (Fischbacher). » .... p. 1033.

— « Eugène Demolder : Le Cœur des pauvres (Mercure de France). » .... p. 1046.

— « Eugène Demolder : Trois contemporains (Deman, à Bruxelles). » .... p. 1059.

— « Gaston Lecouffe : Code-Manuel du pêcheur et Code-Manuel du chasseur (Giard et Brière). » .... p.

1072.

— « Meilhac et Halévy : Théâtre, tomes III et IV (Calmann-Lévy). » .... p. 1082.

— « Messaline, Roman de l’ancienne Rome, par Alfred Jarry (un volume à 3,50 F aux éditions de la Revue blanche). » .... p. 1088.

— « Rachilde : Contes et nouvelles, suivis du Théâtre (Mercure de France). » .... p. 1107.

— « Octave Mirbeau : Les Vingt et Un Jours d’un neurasthénique (Bibliothèque Charpentier). » .... p.

1117.

— « Georges Polti : Timidité de Shakespeare (L’Humanité nouvelle). » .... p. 1130.

— « Louise France : Les Éphémères m’as-tu vu (Juven). » .... p. 1135.

— « Le Sar Péladan : Pereat ! (Flammarion). » .... p. 1177.

— « Péladan : Modestie et vanité (Mercure de France, in-18 de 361 pages, 3,50 F). » .... p. 1184.

(15)

14

2. Par ordre alphabétique (en ce qui concerne les noms d’auteurs).

1

— ADAM Paul, « L’Enfant d’Austerlitz (Ollendorff). » .... p. 690.

— APÉRY Pierre, « Communications au XIII

e

congrès international de médecine. » .... p. 638.

— AUCLERT Hubertine, « Les Femmes arabes (Société d’éditions littéraires). » .... p. 548.

— BARÈS Jean S., « Gramaire françaize (Le Réformiste). » .... p. 510.

— BOUHÉLIER Saint-Georges de, « La Tragédie du nouveau Christ (Bibliothèque Charpentier). » .... p. 426.

— CAPUS Alfred, « La Bourse ou la Vie (éditions de la Revue blanche). » .... p. 927.

— CHAPISEAU Félix, « Au pays de l’esclavage (Maisonneuve). » .... p. 807.

— CLÉDAT L., « La Question de l’accord du participe passé (Bouillon). » .... p. 521.

— COUROUBLE Léopold, « La Famille Kaekebrouck (Lacomblez). » .... p. 940.

— DANVILLE Gaston, « La Psychologie de l’amour (Alcan). » .... p. 723.

— DEMOLDER Eugène, « L’Agonie d’Albion, avec de nombreuses caricatures de M. Haringus (Mercure de France). » .... p. 668.

— DEMOLDER Eugène, « Le Cœur des pauvres (Mercure de France). » .... p. 1046.

— DEMOLDER Eugène, « Trois contemporains (Deman, à Bruxelles). » .... p. 1059.

— DIDIER Carolus, « Napoléon et l’amour (Méricant). » .... p. 678.

— DUBOIS-DESAULLE G., « Prêtres et moines non conformistes en amour (éditions de la Raison, in- 18 de 346 pages, 3,50 F). » .... p. 745.

— DUPLESSIS Léon, « Moderne Médée (Ollendorff). » .... p. 686.

— DURUY Georges, « Pour la justice et pour l’armée (Ollendorff). » .... p. 599.

— FRANCE Louise, « Les Éphémères m’as-tu vu (Juven). » .... p. 1135.

— FUA Albert, « Le Semeur d’idéal (éditions de la Plume). » .... p. 468.

— GOLBERG Mécislas, « Lazare le Ressuscité (édité par le Comité Golberg, chez M. Albert Wolff). » .... p. 460.

— HAECKEL Ernest, « État actuel de nos connaissances sur l’origine de l’homme (Schleicher). » .... p.

473.

— HALÉVY (voir MEILHAC).

— HARRIS Frank, « Montès le Matador, traduit de l’anglais ; Mercure de France, un vol. in-18 » (dans « DE DON QUICHOTTE À OTERO »). .... p. 944.

— HAUSER Fernand, « Le Ressuscité (Charles). » .... p. 454.

— HENDEBERT Lucien, « Au pays des Somalis et des Comoriens (Maisonneuve). » .... p. 786.

1

Nous conservons ici la graphie exacte de Jarry.

(16)

15

— HEROLD A.-Ferdinand, « Les Contes du vampire (Mercure de France, 3,50 F). » .... p. 887.

— HESS Jean, « L’Affaire Iukanthor (Juven). » .... p. 415.

— HUDRY-MENOS Mme, « La Femme (Schleicher). » .... p. 553.

— JARRY Alfred, « Almanach du Père Ubu pour le XXe siècle (en vente partout). » .... p. 406.

— JARRY Alfred, « L’HOMME AU SABLE ». .... p. 628.

— JARRY Alfred, « LE CAMELOT ». .... p. 932.

— JARRY Alfred, « Messaline, Roman de l’ancienne Rome, par Alfred Jarry (un volume à 3,50 F aux éditions de la Revue blanche). » .... p. 1088.

— KAHN Gustave, « L’Esthétique de la rue (Bibliothèque Charpentier). » .... p. 698.

— KARNICE-KARNICKI Michel de, « Vie ou mort (Chaix). » .... p. 581.

— LAGOGUEY A., « Alceste ou la Fidélité conjugale, tragi-comédie grecque traduite d’Euripide en vers français (Brunel). » .... p. 536.

— LECOUFFE Gaston, « Code-Manuel du pêcheur et Code-Manuel du chasseur (Giard et Brière). » ....

p. 1072.

— LEYRET Henry, « Les Jugements du président Magnaud, réunis et commentés (Stock). » .... p. 602.

— LI-TAÏ, « Le Mystère posthume (Schleicher). » .... p. 571.

— M. G., « La Natalité en France en 1900 (Bernard). » .... p. 709.

— MAETERLINCK Maurice, « La Vie des abeilles (Fasquelle). » .... p. 506.

— MARCUS Dr J., « Étude médico-légale du meurtre rituel. » .... p. 614.

— MARDRUS J.-C., « LE LIVRE DES MILLE NUITS ET UNE NUIT, tome V (éditions de la Revue blanche). » .... p. 813.

— MARDRUS J.-C., « Le Livre des Mille Nuits et Une Nuit (tome IX), éditions de la Revue blanche. » .... p. 832.

— MARDRUS J.-C., « Le Livre des Mille nuits et Une Nuit (traduction littérale et complète du texte arabe par le Dr J.-C. Mardrus) ; tome X, éditions de la Revue blanche. » .... p. 853.

— MARDRUS J.-C., « Le Livre des Mille Nuits et Une Nuit ; tome XII (Eugène Fasquelle, in-8 de 324 pages, 7 F). » .... p. 867.

— MARÉCHAL Docteur Ph., « Supériorité des animaux sur l’homme (Fischbacher). » .... p. 489.

— MARIASSY F.-W., « Le Golf en Angleterre et les Golf-Clubs de France (Robaudy, à Cannes). » .... p.

773.

— MEILHAC et HALÉVY, « Théâtre, tomes III et IV (Calmann-Lévy). » .... p. 1082.

— MIRBEAU Octave, « Les Vingt et Un Jours d’un neurasthénique (Bibliothèque Charpentier). » ....

p. 1117.

— MORROW W. C., « Le Singe, l’Idiot et autres gens (éditions de la Revue blanche). » .... p. 966.

(17)

16

— PASCAL Dr Th., « Essai sur l’évolution humaine (Publications théosophiques). » .... p. 607.

— PÉLADAN Le Sar, « Pereat ! (Flammarion). » .... p. 1177.

— PÉLADAN, « Modestie et vanité (Mercure de France, in-18 de 361 pages, 3,50 F). » .... p. 1184.

— PIERREL Fanny, « L’Éternité (Bligny-Cottot, à Autun). » .... p. 646.

— PIMODAN Le Comte de, « Promenades en Extrême-Orient (Champion). » .... p. 911.

— PLATT William, « A Three-Fold Utterance (W. Platt). » .... p. 972.

— POLTI Georges, « Timidité de Shakespeare (L’Humanité nouvelle). » .... p. 1130.

— POUVOURVILLE Albert de, « L’Empire du Milieu (Schleicher). » .... p. 900.

— QUEVEDO, « Pablo de Ségovie ; éditions de la Revue blanche, un vol. in-18 de 288 pages » (dans « DE DON QUICHOTTE À OTERO »). .... p. 944.

— QUINCEY Thomas de, « De l’assassinat considéré comme un des beaux-arts, traduit par André Fontainas (Mercure de France). » .... p. 620.

— RACHILDE, « Contes et nouvelles, suivis du Théâtre (Mercure de France). » .... p. 1107.

— ROSNY J.-H., « Thérèse Degaudy, roman de mœurs mondaines (éditions de la Revue blanche). » .... p. 560.

— SARCEY Francisque, « Quarante ans de théâtre (Les Annales). » .... p. 524.

— SOPHRONIUS, « Catéchisme expliqué de l’Église gnostique (Chamuel). » .... p. 588.

— SPALDING Mgr, « L’Éducation supérieure des femmes (Bloud et Barral). » .... p. 540.

— SYNÉSIUS (Fabre des Essarts), « L’Arbre gnostique (Chamuel). » .... p. 588.

— TALON Jean-Louis, « La Marquesita ; éditions de la Revue blanche, un vol. in-18 de 318 pages, sous couverture en couleurs de Sancha » (dans « DE DON QUICHOTTE À OTERO »).

.... p. 944.

— TRACHSEL Albert, « Rêveries dans la montagne (Fischbacher). » .... p. 1033.

— VEDEL Émile : Lumières d’Orient (Ollendorff). » .... p. 917.

— VERLAINE, « Parallèlement, illustré par Pierre Bonnard (Vollard). » .... p. 1012.

— VIGNOLA Amédée, « Toutes les femmes (Méricant). » .... p. 923.

— WALRAS Léon, « Éléments d’économie politique pure (Pichon). » .... p. 658.

(18)

17 SOMMAIRE DE LA THÈSE.

REMERCIEMENTS … 5 AVERTISSEMENT … 7

LISTE DES ABRÉVIATIONS … 9

SOMMAIRE DES TEXTES DE JARRY … 11 SOMMAIRE DE LA THÈSE … 17

INTRODUCTION … 19

PREMIÈRE PARTIE : JARRY ET LA CRITIQUE … 37 I. MÉPRIS DE JARRY POUR LE DOGME DU LISIBLE … 39 II. LA CRITIQUE POUR JARRY,

OBLIGATION POUR ASSURER LA MATERIELLE ? ... 66

III. LA REVUE BLANCHE PRENANT POUR JARRY LA PLACE DU MERCURE ? … 107 IV. QUELLE CRITIQUE ADOPTE JARRY ? … 157

V. LA CRITIQUE IMPOSSIBLE ? … 182

VI. LA CRITIQUE VÉCUE, « SAUVÉE » PAR JARRY

COMME MODULATION DE SON GOÛT POUR L’ÉRUDITION ? ... 243 DEUXIÈME PARTIE : TEXTES ET COMMENTAIRES … 353 A. JARRY EN PRISE AVEC L’IDÉE DE PROGRÈS … 355

I. CONDAMNATION INVARIABLE DU PROGRÈS CHEZ JARRY ? … 355 II. JARRY EN PROIE À L’ACTUALITÉ ? … 389

III. ABSENCE DE PROGRÈS QUANT À L’ÉVOLUTION … 473

IV. ABSENCE DE PROGRÈS POUR CE QUI EST LE FAIT DE L’HOMME … 588 B. JARRY FACE À L’ALTÉRITÉ ?... 786

I. LE PITTORESQUE EN LIEU ET PLACE DE L’ALTÉRITÉ … 786 II. ALTÉRITE DU SIGNE GRAPHIQUE :

UNE SÉMANTIQUE DU SEUL VISIBLE … 983 III. APOLOGIE DU MÊME … 1065

CONCLUSION … 1191 ANNEXES … 1209

BIBLIOGRAPHIE … 1217 INDEX … 1281

TABLE DES ILLUSTRATIONS … 1309

TABLE DES MATIÈRES … 1311

RÉSUMÉ … 1335

(19)
(20)

19 INTRODUCTION.

La critique littéraire d’Alfred Jarry a fait l’objet de trois éditions. Deux exhaustives : celle de Maurice Saillet

1

et celle d’Henri Bordillon et Bernard Le Doze

2

. Et une partielle : celle de Michel Décaudin

3

.

Néanmoins, en ce qui concerne l’ensemble que nous prenons en considération, qui concerne aussi bien ses comptes rendus que les réponses qu’il a données à des enquêtes, les textes de ses conférences etc., la seule édition exhaustive est celle d’Henri Bordillon et Bernard Le Doze.

La seule édition à être critique est celle de Bordillon et Le Doze, mais l’annotation ne fait, le plus souvent, qu’effleurer le texte (en outre les annotateurs n’ont-ils pu mettre la main sur certains livres que chronique Jarry, manque qui est en grande partie comblé par le biais de cette présente édition).

1. Pluralité des objets de savoir véhiculés par les textes critiques.

1. 1. Nécessité d’un dialogue entre les savoirs.

Ce qui apparaît immédiatement à l’esprit (et ce qui frappe d’emblée), lorsque l’on aborde l’ensemble de la critique littéraire que Jarry donna à La Revue blanche, c’est la diversité des objets de savoir sur laquelle elle se construit. En effet, l’auteur de La Chandelle verte rend aussi bien compte de romans que de livres en lien avec la médecine, l’astronomie, l’économie politique etc.

Si l’on est avec Jarry, pour reprendre une formulation de Paul Topinard dans L’Anthropologie et la science sociale : Science et foi (Masson et Cie éditeurs, 1900), face à un champ vaste qui « exige des connaissances que nous qualifierons d’encyclopédiques », celles-ci ne doivent nullement être considérées comme le seul souhait d’exprimer un discours savant qui modalise l’appropriation d’une érudition pléthorique.

Le goût encyclopédique de Jarry nous amène à éprouver la nécessité de faire reposer un raisonnement « sur des problématiques d’ensemble […] tâchant de rendre compte de manière systématique », autant que faire se peut, « des recherches en cours

4

», à l’époque de Jarry, concernant chacun des sujets, chacune des disciplines évoqués ; cela nous force à un dialogue

1

Voir Alfred Jarry, « [Spéculations annexes, Notes sur des livres et des spectacles, Réponses à des enquêtes, etc.] », La Chandelle Verte, lumières sur les choses de ce temps, édition établie et présentée par Maurice Saillet, Le livre de poche, 1969, p. 521-679.

2

Voir Alfred Jarry, « [Textes critiques et divers] », OC II, p. 575-684.

3

Voir Alfred Jarry, « [Compléments] », Bouquin, p. 1116-1131.

4

Christophe Charle, Les intellectuels en Europe au XIX° siècle, Essai d’histoire comparée, Seuil, collection

L’Univers historique, 1996, p. 12.

(21)

20

entre les savoirs qui soit constant, seul à même de pouvoir rendre compte de la spécificité et de l’originalité de son propos (si toutefois, bien évidemment, celle-ci affleure) se faisant jour à un moment historique donné, et ce au mépris des classifications faciles et il est vrai commodes :

« [t]rop souvent », comme le constate Christophe Charle, « notamment dans le cas des intellectuels, les travaux s’ignorent parce qu’ils relèvent de disciplines différentes comme l’histoire culturelle, la sociologie, l’histoire des idées, l’histoire de l’art, l’histoire de la littérature, des sciences ou de la philosophie

1

».

1. 2. Nécessité de l’ampleur des commentaires.

Pour saisir l’ampleur de l’érudition déployée par Jarry qui se refuse, du moins entièrement, à l’intellection, le lecteur doit avoir, ainsi que l’exprime Henri Béhar, « un nombre considérable de connaissances, dans les domaines les plus hétérogènes.

2

» D’où la pléthore de notes qui se veulent tout à la fois précises et circonstanciées (une connaissance n’est rien si elle n’est pas replacée dans son contexte), sur les sujets les plus divers, à chaque fois que cela se révèle nécessaire.

En outre, il nous faut, dans la mesure du possible, contextualiser chaque allusion, chaque citation, et ce afin que soit perceptible l’intentionnalité de Jarry concernant chaque découpe, chaque prélèvement, chaque montage…

L’on peut à juste titre s’étonner de l’ampleur parfois palpable des citations, dans les notes qui parsèment cette édition commentée. En effet, lorsque Jarry opère un calque du texte initial, le signaler aurait pu paraître suffisant, en renvoyant précisément à la pagination de l’œuvre source, dans une édition courante, lorsque cela est possible toutefois, afin de faciliter les recherches.

Si nous avons conservé le choix de citer non pas uniquement le fragment de phrase réutilisé mais également, souvent, le passage (certes souvent resserré) au sein duquel il se situe, ce n’est pas seulement parce que les textes que Jarry commente sont souvent (extrêmement) difficiles d’accès, cette raison demeurant néanmoins présente – car, si l’accès aux textes demeure difficile voire impossible comme en ce qui concerne La Natalité en France en 1900, renvoyer à de tels ouvrages a- t-il le moindre sens ? (Nous n’avons pu néanmoins parfois faire autrement, – y compris en ce qui concerne ce dernier exemple –, pour ce qui est de certaines notes, notre propos ayant dû se tenir loin d’un déploiement trop pléthorique, en espérant que ces textes seront un jour accessibles).

Mais cette posture qui est la nôtre tient surtout à ce que nous ayons voulu faire affleurer, et ce d’un seul regard, les altérations, souvent minimes, mais qui n’en sont pas moins possiblement

1

Ibid.

2

Henri Béhar, Les cultures de Jarry, Presses universitaires de France, collection Écrivains, 1988, p.

152.

(22)

21

révélatrices d’une démarche, d’une visée, lisibles à travers la façon suivant laquelle Jarry opère sur le texte source, quand bien même il le cite le plus souvent avec une exactitude notable : si les altérations concernent particulièrement la ponctuation, celle-ci est bien, comme l’indique Ulla Tuomarla, « une composante à part entière de l’organisation écrite d’un texte

1

».

Si rendre apparentes les altérations est fondamental, c’est du fait de la façon suivant laquelle elles manifestent l’effort d’accaparement d’un texte ayant, de fait, figure d’altérité, autant qu’elles rendent possible cette appropriation. « La place, le volume et le contenu des citations dans le texte, tout est indice. De même, la manière dont un discours découpe ses citations est révélatrice du fonctionnement de ce discours et l’interprétation d’une citation singulière dépend en partie de la place discursive où elle est située.

2

»

Et pour que tout cela soit apparent (sans forcément en passer par les circonvolutions de l’explication), il faut bien évidemment que les citations soient révélées. En effet, renvoyer simplement le lecteur au texte source en décrivant les altérations se serait révélé extrêmement complexe et fastidieux pour le lecteur, et d’une clarté souvent fallacieuse, – ce choix ayant été un instant adopté par nous, pensant qu’il aurait pu être préférable, du fait de la bien plus grande concision qu’il implique évidemment.

En outre, il nous a paru important de citer la phrase prélevée en la resituant dans son contexte, avec néanmoins la plus grande parcimonie possible, pour montrer justement en quoi chaque citation a valeur pour Jarry de « raccourci », concept que nous expliciterons. Si l’on ne citait pas le passage au sein duquel se trouve la citation, lorsque celui-ci est révélateur, n’apparaîtrait pas l’identité du raccourci en tant que tel : Jarry donne véritablement à ce terme le sens de prélèvement (en somme de citation) et non (même si telle est fantasmatiquement sa visée affichée, ainsi que nous le verrons) de moyen simplifié d’atteindre à la signification d’un ensemble par le biais d’un détail.

Resituer la phrase prélevée dans son contexte minimal obéit également à une autre visée : il s’agit, ce faisant, de montrer la façon suivant laquelle Jarry opère une découpe dans un ensemble ; nous ne cherchons pas néanmoins à tirer systématiquement leçon de la façon dont s’opère cette découpe (ce afin de faire affleurer sa signification et sa visée), car notre propos est surtout d’ouvrir un champ d’études possibles autour de ces textes, et non de refermer au moyen d’un propos exégétique clos le geste de Jarry que nous avons surtout cherché à faire apparaître ; libre après à chaque lecteur de livrer son propre schéma interprétatif concernant la visée de telle et telle

1

Ulla Tuomarla, La citation mode d’emploi, sur le fonctionnement discursif du discours rapporté direct, Helsinki, Academia Scientiarum Fennica, collection Suomalaisen tiedeakatemian toimituksia Sarja Humaniora, 1999, p. 107.

2

Id., p. 105.

(23)

22

découpe : c’est là notre souhait, quand bien même il a peu de chances, l’on en conviendra, d’être actualisé.

2. Possibilité d’une lecture immanente du texte jarryque ? 2. 1. Étudier la Chose même du texte jarryque ?

La volonté propre à Jarry – constante pour ce qui est de ses chroniques, mais également de ses textes critiques, lorsqu’il ne s’agit pas pour l’auteur du Surmâle de s’effacer derrière une pratique fidèle de la citation indirecte – d’affirmer sa parole comme seule parole, de faire que sa parole ne s’élève qu’ « en sa vérité absolue, sans discussion

1

» (Almanach du Père Ubu illustré de 1899), ne signifie nullement – quand bien même c’est là le souci, tout à la fois affiché et intériorisé, de l’auteur de Messaline – qu’il ne s’agit pas des modalités d’une parole subjective, et ainsi d’une opinion (puisque les sujets que convoque la somme de La Chandelle verte et ceux que les comptes rendus abritent sont tous, d’une façon ou d’une autre, en lien avec l’actualité).

L’esthétique du « raccourci » que développe incessamment Jarry et le refus dans lequel il se tient de développer une parole qui reconnaisse sa subjectivité lui permettent certes de supprimer toute « discussion » possible. S’il le fait, est-ce parce que sa parole est éminemment singulière et qu’ainsi elle doit ne pas souffrir la moindre remise en question pour (pouvoir) être acceptée, s’affirmant suivant les tours et les détours de sa seule singularité, redoutant ainsi ce qui peut mettre en péril la force de son énoncé, et peut se présenter en nombre, cette parole étant fait d’exception ?

Jarry, s’il exprime les saillies de son esprit, a contrario du sens commun, nécessite une attention continue du lecteur afin que celui-ci puisse être en mesure de se prendre au jeu (de jouer le jeu, en suivant une pensée non habituelle jusqu’au paroxysme de la logique confinant à l’absurde par quoi elle s’exprime) : s’il n’y a pas d’attention, ou si celle-ci est aussitôt brisée, éphémère (le lecteur contestant le propos, ou se refermant face à son déroulé), alors, la visée spéculative de certains textes critiques de Jarry ou même les points de vue qu’il développe en creux (au travers des « raccourcis ») dans ceux qui se situent en-deçà de la mécanique spéculative qui imbibe toutes les chroniques ne peuvent parvenir jusqu’au surgissement dans la conscience au point que leur miel (certes acide) puisse être goûté. Sa parole s’élève-t-elle seulement en vérité unique du fait de son absolue singularité (autrement, cela ne serait pas, de fait, « sa » parole, mais bien une parole – en l’occurrence commune) ?

1

OC I, p. 536.

(24)

23

En réalité, derrière l’apparence d’une parole singulière se déploie une communauté de paroles appartenant aux personnalités dont Jarry se sent proche, communauté qui lui permet de tisser, sans discontinuer, une filiation avec Le Mercure de France le plus souvent, comme nous nous attacherons à le montrer tout au long de cette édition critique et commentée.

Ainsi, il s’agit, dans la lignée des travaux d’Henri Béhar, de Julien Schuh ou de Patrick Besnier, de replacer Jarry « dans le contexte de son époque, parmi ses pairs en littérature », et, ce faisant, de mettre « en évidence un état d’esprit, une forme de pensée, un courant culturel dans lequel écrivains, artistes, philosophes et scientifiques de l’époque de Jarry se retrouvent

1

».

Il s’agit de continuer de chercher à montrer – a contrario des très nombreuses exégèses prenant en charge la Chose même du texte jarryque en la plaçant dans une irréductible distance légitimée par les principes de la ’Pataphysique et la façon qu’a Jarry d’être perçu invariablement, le plus souvent, comme un précurseur (ce dont témoignent, par exemple, les travaux du Collège de

’Pataphysique) rattaché inéluctablement au courant de la modernité littéraire qui irrigua tout le vingtième siècle – que Jarry « résume l’esprit de toute une époque, et mieux encore, de toute une famille d’esprits qu’on peut reconnaître par comparaison réciproque […] : un certain état de révolte où l’intelligence s’allie au tonique bouleversement de tous les conformismes

2

».

Comme le résume Julien Schuh, « dès que l’on plonge dans l’histoire des idées et l’histoire littéraire de la fin du XIX° siècle, on retrouve un contexte culturel dans lequel Jarry pourrait presque faire figure de mesure-étalon. Tous les thèmes qu’il aborde sont extrêmement répandus lorsqu’il se lance dans la littérature […]

3

»

Une phrase de La Dragonne se révèle particulièrement parlante en ce sens (et à travers le « il » se lit en creux la présence de Jarry) : « il s’était « emballé », comme il ne l’eût peut-être point fait plus tard, sur les théories qu’il lui était impossible […] de ne point sentir ambiantes : anarchisme, ibsénisme, etc.…

4

»

Il est certes extrêmement tentant (et nombre de commentateurs ne s’en sont pas privés, comme nous l’avons suggéré) d’étudier l’œuvre de Jarry en elle-même, tant elle semble, riche en potentialités sémantiques diverses, unique dans son époque, inéluctablement. Il s’agirait ainsi, pour reprendre la terminologie philosophique, de comprendre la Chose même dont parle le texte jarryque, voulant penser avec l’auteur, considérant que c’est seulement du point de vue d’une

1

Henri Béhar, Brunella Eruli, « Théorie d’ensembles », L’Etoile-Absinthe, 25

e

-28

e

tournées, « Jarry et Cie », Communications du Colloque International (T.N.P. 12-13 mai 1985), réunies par Henri Béhar et Brunella Eruli, Société des amis d’Alfred Jarry, 1985, p. 5.

2

Id., p. 6.

3

Julien Schuh, « Alfred Jarry à l’assaut du mouvement symboliste », Histoires littéraires, n° 28, Paris

& Tusson, Du Lérot éditeur, octobre-décembre 2006, p. 7.

4

OC III, p. 446.

(25)

24

lecture immanente, qui explicite le texte, que peuvent être saisis l’originalité et l’intérêt de cette pensée et de cette écriture.

Cette lecture immanente est d’autant plus tentante que Jarry est l’instigateur d’une pensée philosophique, la ’Pataphysique, qui peut ne se comprendre qu’à la lecture de l’ensemble de l’œuvre jarryque. Ainsi les spéculations qu’il a voulu réunir sous le titre La Chandelle verte, lumières sur les choses de ce temps sont-elles ordinairement perçues comme étant l’anarchique mise en pratique de la science en ’Pataphysique explicitée – mais obscurément, de telle sorte que l’explicitation n’exclut nullement une surcharge de potentialités sémantiques – dans Les Jours et les Nuits.

2. 2. Pièges d’une lecture immanente.

Une telle lecture immanente, si elle veut s’exprimer, laisse obligatoirement de côté l’époque dans laquelle le texte s’enracine, percevant ainsi celui-ci comme un hapax, comme s’il n’était pas le fruit justement de cette époque à laquelle le regard critique l’arrache pour le considérer comme une monade en soi, un monde clos sur lui-même qui n’appelle aucune autre interprétation que celle le faisant exister dans toute son irréductible mesure.

Voulant cerner la spécificité de l’œuvre en tant que telle, ce travail d’exégèse n’est en fait jamais teinté de la neutralité d’un regard critique opérant par-delà les comparaisons qu’il suppose, et sur laquelle il s’articule prétendument, puisqu’en voulant faire affleurer la spécificité d’un texte, c’est l’unicité et par conséquent la singularité de ce dernier qu’il cherche à faire poindre, laquelle singularité ne peut exister de facto mais est toujours le fruit d’une comparaison, souvent multiple et protéiforme du reste, lui permettant d’apparaître justement en tant que principe d’exception – dérogeant à une règle commune – qui n’existe pas seulement en tant que principe esthétique fondant une œuvre, fondant son originalité, mais en tant que la résultante d’une connaissance (intériorisée par l’auteur) au moins approximative d’un terreau littéraire et, bien évidemment, d’une façon beaucoup plus vaste, culturel.

Or, pour que ce principe de comparaison ait lieu (même si ce dernier n’est pas formulé, il ne

peut toujours qu’avoir lieu dans la psyché du commentateur, puisque chaque lecture n’est qu’une

façon d’invariablement placer virtuellement mais avec force le texte face à d’autres lectures,

celles-ci pouvant bien évidemment n’exister que sous forme de souvenirs, plus ou moins ténus,

plus ou moins recomposés), la lecture ne peut être véritablement immanente, mais au contraire

cherche presque toujours à tendre dans une direction, laquelle, en ce qui concerne Jarry, est

souvent celle de la modernité (mais peut être multiple, la figure de Jarry permettant de cristalliser

les aspirations extrêmement diverses des critiques).

(26)

25

Ainsi, cette neutralité du regard pourtant défendue est impossible puisqu’il s’agit toujours, plus ou moins, et plus ou moins inconsciemment du reste (tant ce qui détermine l’élan critique est souvent une conviction profonde, grandie au moyen de découvertes ou prenant appui sur une lecture éclairante du texte), de rattacher la figure de Jarry à d’autres figures afin de pouvoir la grandir suite à ces évocations, en conséquence de leur survenue.

Aussi a-t-il été tentant de ne faire de Jarry que le précurseur d’une modernité littéraire et poétique s’inscrivant dans une volonté de s’affranchir de tous les carcans et de faire exister un principe poétique au sein de la vie même.

On le voit, cette lecture, pour distanciée qu’elle ait voulu être, cherchait constamment à rattacher Jarry à la modernité en en faisant un précurseur, en considérant d’emblée sa singularité comme un principe novateur à même de pouvoir être entendu au sein du XX

ème

siècle.

Tous ces aspects, pour autant qu’ils soient (bien évidemment) vrais, faussent la lecture que l’on a du texte de Jarry en faisant de ce dernier un prétexte, un « entraîneur » pour l’exégèse grandissant en suivant le cours de sa volonté première (et de sa volonté propre), et imposant à la figure de cet auteur la forme qu’elle cherche à lui voir prendre.

Aussi une telle lecture immanente n’est-elle de ce fait jamais tout à fait possible, quand bien même le texte de Jarry offre des principes philosophiques qui sont explicités ou illustrés par l’œuvre entière et qui naissent entièrement de celle-ci (en soi, il serait tout à fait possible de considérer l’œuvre de Jarry comme les différentes pièces d’un puzzle s’éclairant les unes les autres, et de présenter un élan critique qui prenne en compte cet enchevêtrement, ce jeu de miroitement sémantique entre les différentes pièces de l’œuvre sans prendre en considération la façon dont, par le biais de l’intertextualité notamment, elle ne vit, ne grandit sémantiquement parlant, que par le biais de son contexte).

Quand elle a lieu, elle ne fait que sembler avoir lieu, et est en réalité toujours dirigée par l’intentionnalité du critique qui cherche à adapter la Chose même du texte à son désir de critique qui s’est évidemment construit sur des découvertes et lectures préalables mais qui, pour pertinent et unique qu’il soit, n’en demeure pas moins réducteur et inapte à garantir l’ensemble des possibilités sémantiques d’un texte (fantasme du reste dans tous les cas jamais actualisable, bien évidemment).

Il n’est ainsi possible que de lire en constituant un réseau de comparaisons extrêmement agrandi qui permette, en contextualisant un texte, de situer son unicité et ainsi de la faire affleurer.

Or, cette volonté, en constituant un réseau de référents qui fasse poindre l’objet même du

texte comme étant unique et absolument inégalable eu égard à l’enchevêtrement de textes avec

lesquels il a des points communs, ne serait-ce que parce qu’il est pris dans la même trame

(27)

26

temporelle qu’eux, présuppose également que tout texte précisément étudié (au détriment des textes qui ne servent que de comparants) porte en son sein une marque d’élection qui est sous- entendue par l’élan critique même.

En effet, pourquoi étudier un texte qui ne mériterait pas de l’être ? Pourquoi faire d’un texte le centre d’une constellation s’il n’est pas plus important que l’ensemble des satellites textuels qui constituent cette constellation

1

? Pourquoi étudier un texte plus que d’autres, si ce n’est justement parce que l’unicité de ce texte est plus flagrante que celle des autres ?

Cet a priori critique est toujours rattaché à l’élan exégétique, quand bien même le critique chercherait à étudier des textes dont la valeur est niée (sa volonté conférerait ainsi à cette valeur communément niée un intérêt qui changerait de fait sa nature).

Pour rompre cet a priori, il suffit de considérer que l’élan exégétique (par-delà même les règles inévitables qu’instaure le champ universitaire) n’est jamais permis par le texte mais qu’il peut être imposé à tout objet factuel comprenant une matérialité graphique douée d’une sémantique approchable par l’intellection et/ou l’imaginaire (un imaginaire se construisant à partir d’un réseau de significations évidemment extérieures à lui).

Aussi l’acte critique, s’il confère de la valeur au texte, n’est pas là, quand bien même il porte en son sein un marqueur laudatif implicite incessant, pour reconnaître et valider cette valeur, et ainsi la faire exister unanimement.

Plutôt que de partir du postulat selon lequel toute œuvre étudiée recèle une part d’originalité qu’il s’agit d’arracher à la part d’indifférenciation en laquelle elle se trouve être plongée, étant pour ce faire décontextualisée par un regard tâtonnant cherchant à approcher la Chose même du texte, sans chercher à en distinguer (de fait) tous les paramètres, il faut comprendre que la considération critique ne validera pas la grandeur du texte en lui reconnaissant, in fine, cette grandeur, mettant un discours normatif sur une grandeur tue, car ravalée par le texte, ou par le contexte au sein duquel il se trouve.

Certes, pour que l’acte critique ait une légitimité, il faut qu’il ait une réelle nécessité, et cette nécessité ne peut être en lien qu’avec la valeur du texte, quelle qu’elle soit. Or, la valeur, par définition, c’est le principe de distinction reconnu dans le texte même : la valeur, c’est ce qui distingue un texte d’un autre, ce qui le met résolument hors d’un contexte.

1

L’on peut immédiatement répondre que tout est question de point de vue et qu’une autre étude

pourra refaire le travail en prenant comme point central, comme point de référence, tel satellite

textuel de la constellation. Néanmoins, cela apparaîtrait comme étant assez vite faux car l’acte

critique n’est possible qu’en étant légitimité par un certain nombre de principes qui le constituent

en tant qu’acte critique tangible, et le premier principe est que l’objet d’étude doit être à même de

pouvoir répondre aux problématiques dont il est l’objet. Et tous les textes sont loin de répondre à

cette exigence.

(28)

27

Cependant, plutôt que de tâcher de distinguer le texte, de le mettre hors de contexte, il s’agira de chercher au contraire à le contextualiser le plus possible (c’est-à-dire le plus précisément possible) afin de comprendre dans quelle mesure son propos singulier peut s’inscrire dans un champ littéraire, lequel est souvent en relation étroite (étant donné tout à la fois l’époque et l’ipséité de Jarry) avec les champs scientifique, philosophique etc. Aussi pour le définir faut-il faire affleurer la façon qu’il a d’être en lien (et dans une liaison éminemment mouvante) avec d’autres champs.

Et c’est seulement si le propos dévie de ce champ resserré au maximum (puisque les précisions ne pourront apparaître que suivant une synthèse, non suffisamment affirmée toutefois pour qu’elle soit en mesure de – malgré elle – dévoyer la nuance, la contradiction, l’ambiguïté) que l’on se posera la question de savoir en quoi l’on peut parler ainsi d’originalité.

Autrement dit, la valeur accordée à un texte (qui entre étroitement en dialogue avec la place qui lui a été conférée par la postérité, – entité sans cesse mouvante, étant en reconstruction perpétuelle –, c’est-à-dire tout à la fois, peut-on penser, par les avant-gardes qui se sont institutionnalisées et par la dynamique des études universitaires) au détriment des textes qui ne sont guère plus enserrés dans la trame exégétique d’élans de pensée (qui naissent moins à la limite d’individualités que de collectivités, puisque chaque commentateur s’inscrit précisément dans un champ et avec une force qui tient au fait que son élan de pensée est suscité, en une certaine part du moins, entièrement par lui), ne devra pas faire infléchir notre intentionnalité critique, tout au long de cette édition critique et commentée, au point de faire que l’on considère ce texte comme étant d’emblée fondamentalement (et intrinsèquement) autre.

3. Le choix nécessaire d’une édition critique et commentée.

3. 1. Une œuvre mineure ?

Jarry a tout abandonné, depuis la rédaction du Surmâle, des complications syntaxiques qui enracinaient, au moins en surface, ses premiers écrits dans la mouvance symboliste. Aussi les comptes rendus qu’il fait paraître régulièrement à La Revue blanche n’ont-ils plus rien à voir avec ceux qu’il faisait paraître à L’Art littéraire, et qui témoignaient d’un réel souci de ne pas rendre compte de l’ouvrage, mais de se l’approprier dans un discours critique savamment obscur qui fasse œuvre de poème en prose.

Ces nouveaux comptes rendus qu’il fait paraître à La Revue blanche sont d’une grande clarté

syntaxique et lexicale. Toute obscurité semble en être désormais absente. Mais cette grande clarté

doit poser question et ne pas s’affirmer justement comme une norme, à laquelle Jarry répondrait

(29)

28

dans un souci de conformer son discours à l’horizon d’attente qui émane de la revue qui l’emploie, son travail de critique étant avant tout alimentaire. C’est à la suite de ce constat semble- t-il que Henri Bordillon, au sein de l’édition Pléiade, observe que « [d]e l’ensemble important de pages que nous publions ici sous le titre Textes critiques et divers, il n’y a finalement que peu à dire.

1

»

Implicitement, Bordillon considère ainsi que l’ensemble des comptes rendus est une œuvre mineure, travail uniquement alimentaire, l’essentiel demeurant, en partie du moins pour Jarry, d’« annoncer la publication d’un livre […]

2

».

Du reste, les autres éditeurs des textes critiques de Jarry, hormis Sylvain-Christian David en ce qui concerne la critique picturale

3

, mettent implicitement en avant le fait qu’il s’agit d’une œuvre subsidiaire de Jarry, de par leur choix de titre. Ainsi, Michel Décaudin nomme

« Compléments » le choix de critiques littéraires de Jarry qu’il donne à la suite de La Chandelle verte

4

et Maurice Saillet choisit à dessein le terme « annex[e] » dans le titre qu’il donne à l’ensemble des « Textes critiques et divers » : « Spéculations annexes, Notes sur des livres et des spectacles, Réponses à des enquêtes, etc. »

5

.

Si Bordillon – et en un certain sens jusqu’à l’ensemble des éditeurs des « Textes critiques et divers » – considèrent que cet ensemble est une œuvre mineure, l’on ne peut néanmoins pas parler d’œuvre mineure en soi bien évidemment (ce qui ne signifierait rien). L’on peut uniquement parler d’œuvre mineure eu égard à l’œuvre complète : « lorsque l’on distingue entre œuvres majeures et mineures, on définit bien une relation hiérarchique, au sens fort : l’assignation d’un rang s’y fait sous condition d’une unité préexistante, qui est celle de l’œuvre [complète]. Cela ne signifie pas [bien sûr] que chaque fois qu’on distingue entre œuvres majeures et mineures, on fasse une théorie, explicite et conséquente, de l’unité de l’œuvre [complète] et de la façon dont elle englobe des contraires, mais plutôt que la distinction entre œuvres majeures et œuvres mineures fait fonctionner une relation hiérarchique

6

».

Ce sont les conditions d’émergence des textes critiques parus dans La Revue blanche qui ont, semble-t-il, pour Bordillon, façonné cette caractéristique d’œuvre mineure. En somme, est en cause ici le fait que la critique littéraire soit un travail alimentaire, le compte rendu étant voué à

1

OC II, p. 940.

2

Id., p. 941.

3

Voir L’Étoile-Absinthe, n° 9-12, « Alfred Jarry, Pont-Aven et autres lieux », Société des amis d’Alfred Jarry, 1981.

4

Voir Alfred Jarry, « [Compléments] », Bouquin, p. 1116-1131.

5

Voir Alfred Jarry, « [Spéculations annexes, Notes sur des livres et des spectacles, Réponses à des enquêtes, etc.] », La Chandelle Verte, lumières sur les choses de ce temps, op. cit., p. 521-679.

6

Catherine Larrère, « Foucault, critique des hiérarchies littéraires », Dir. Catherine Volpilhac-

Auger, Œuvres majeures, œuvres mineures ?, Lyon, ENS Éditions, collection Signes, 2004, p. 22.

(30)

29

l’éphémère dans ses conditions d’apparition qui impliquent la possibilité d’un certain laisser-aller par opposition aux exigences relatives à l’œuvre publiée en volume, et étant soumis à la rapidité dans son écriture, ce qui induit également le risque de ce laisser-aller, la périodicité seule du compte rendu, son retour incessant légitimant son écriture dans le sens où c’est elle seule qui permet de transformer cette discipline en véritable travail alimentaire et, en l’occurrence, en un travail pouvant assurer (du moins momentanément) la survie de Jarry.

Et, de fait, Jarry compte très notablement pendant la période où il participe à La Revue blanche comme l’un de ses « principaux chroniqueurs

1

», ainsi que le remarque Paul-Henri Bourrelier ; rien qu’en terme de critique littéraire, « avec […] trente huit » livraisons, « Jarry signe […]

soixante quinze » chroniques

2

; mais il tiendra également, comme le spécifie Maurice Saillet, « la chronique des théâtres dans les huit dernières livraisons de la revue.

3

»

Cette périodicité « impose un rythme de pensée et de création qui n’est pas celui du livre. L’un des effets possibles de ce paramètre est d’entraîner » Jarry, qui œuvre d’abord au sein de La Revue blanche, à certains égards, en tant que philosophe déployant la ’Pataphysique, « à suivre de près l’actualité scientifique, politique, ou artistique, à confronter ses conceptions à un réel mouvant. Le philosophe endosse alors une posture qui tranche avec l’image traditionnelle : il quitte la sphère intemporelle des idéalités et consent, au moins provisoirement, à l’imprévisible, au contingent, au fugace, à l’inachevé

4

» : en témoigne la « Revue des plus récents événements politiques, littéraires, artistiques, coloniaux, par-devant le père Ubu

5

» de l’Almanach du Père Ubu pour le XX° siècle qui apparaît comme la synthèse du travail effectué par Jarry au sein de La Revue blanche dans ses comptes rendus.

Le fait pour Jarry « de rédiger des articles ou des comptes rendus, de réagir à l’actualité, de répondre à des enquêtes, l’engage dans une voie excentrée par rapport à la pratique canonique de l’écriture livresque

6

». L’œuvre ne répondant plus à cette « pratique canonique de l’écriture livresque », peut-on encore parler d’œuvre ?

Si œuvre mineure il y a, c’est ainsi la résultante du fait semble-t-il que, comme Mallarmé, l’auteur de La Chandelle verte ait « varié les postures d’énonciation, occupant singulièrement toutes sortes de places singulières, situé dans des configurations diverses et pris nécessairement dans le

1

BOURRELIER, p. 996.

2

Ibid.

3

Alfred Jarry, La Chandelle Verte, lumières sur les choses de ce temps, op. cit., p. 18.

4

Laurent Fedi, « Les pratiques de pensée à l’œuvre dans les revues philosophiques et généralistes, des années 1870 à 1900 », Dir. Marie-Eve Thérenty et Alain Vaillant, Presse et plumes, Journalisme et littérature au XIX° siècle, Nouveau monde éditions, collection Culture-médias, Études de presse, 2004, p. 294.

5

OC II, p. 603.

6

Laurent Fedi, op. cit.

(31)

30

jeu de toutes sortes d’extériorités, où se manifeste non pas tant l’absence du sujet que sa dispersion, liée à la dispersion des destinataires et à la multiplicité des objets de pensée requis

1

» par Jarry.

3. 2. Force dispersive à laquelle participent les comptes rendus.

Du reste cette diversité dans les postures d’énonciation qui a donné naissance aux textes critiques se ressent-elle fortement jusque dans l’écriture de ces derniers : en témoignent notamment les répétitions qui parcourent l’ensemble, les allusions et renvois à d’autres éléments du corpus, à des éléments de l’œuvre complète, ou à d’autres œuvres. En ce sens, dans les comptes rendus, ainsi du reste que dans les chroniques (puisque celles-ci partagent les modalités d’apparition et d’existence des comptes rendus), « la dispersion, ou plus exactement la force dispersive, est constitutive de l’œuvre en tant que telle

2

», pour reprendre la formulation de Laurent Zimmermann à propos de Rimbaud.

Ne pas présenter notre travail sous la forme d’une édition critique et commentée, c’eût été rendre obligatoirement inapparente cette force dispersive, en la maquillant sous les atours d’un propos exégétique gommant les répétitions en même temps que ramenant à l’unité l’éclatement qui pourtant structure paradoxalement l’ensemble des comptes rendus.

Cette force dispersive ne peut être restituée autrement qu’en la donnant à voir (et ressentir) au travers de ce mode d’édition

3

qui même s’il unifie et thématise par de nombreux aspects un discours exégétique, fût-il protéiforme, garde néanmoins intact quelque chose de l’éclat de la répétition, de la persistance appuyée de schèmes, parfois contradictoires, qui se fait jour dans l’apparent constant renouvellement d’un point de vue critique – qui est en fait sa perpétuation – ayant trait à des ouvrages exaltant, pour Jarry, le Même.

1

Daniel Oster, « Ce que je pourrais dire de Stéphane Mallarmé », Dir. Bertrand Marchal et Jean- Luc Steinmetz, Mallarmé ou l’obscurité lumineuse, Hermann, collection Savoir : lettres, 1999, p. 20.

2

Laurent Zimmermann, Rimbaud ou la dispersion, Éditions Cécile Defaut, 2009, p. 10.

3

Aussi notre volonté d’avoir recours à une édition critique et commentée ne découle-t-elle

aucunement (car elle pourrait y voir une forme de justification) du fait qu’un certain nombre de

thèses soutenues ou bien en cours sont des éditions commentées (en le présentant ou non dans

leur titre). Ainsi, pour ce qui de thèses soutenues récemment, l’on se reportera notamment, pour

ce qui est des Lettres Modernes et de la Littérature française, à la thèse de Myriam

Barakat intitulée Édition commentée des « Discours politiques et militaires » de François de la Noue (1531-

1591) (Montpellier 3, thèse placée sous la direction d’Evelyne Berriot-Salvadore) et à celle de

Radu Suciu titrée La mélancolie en français : édition commentée du Discours des maladies mélancoliques

d’André Du Laurens (1594) (Paris IV, thèse placée sous la direction de Patrick Dandrey et Michel

Jeanneret).

(32)

31

En outre la force dispersive tient-elle au fait que Jarry construit le corpus de ses comptes rendus, dans le sens où il s’agit bien d’une série de « textes homogènes sur le plan générique », à partir de questions ayant trait à l’actualité principalement, comme au féminisme par exemple, qui recoupent ainsi à chaque fois des « champs », métaphore « exportée de la sociologie bourdieusienne en analyse du discours, en particulier par Dominique Maingueneau, permet[tant]

de souligner l’hétérogénéité, l’interdépendance, la mobilité, la dispersion et la dissymétrie potentielle des positionnements discursifs autour d[e] question[s demeurant à chaque fois] en litige.

1

»

Jarry ramène ainsi le « champ » dans le « corpus », mais sans les fondre l’un dans l’autre, le corpus se structurant autour de la notion d’éclatement qui caractérise en propre le champ. Jarry signifie ainsi implicitement que le corpus par son être même n’exclut pas le champ sur lequel il s’élabore pas plus qu’il ne l’intègre entièrement à son halo d’existence. En effet, le champ garde ses caractéristiques de champ du fait de la façon dont Jarry utilise le « raccourci », l’auteur de La Chandelle verte faisant des allusions constantes à la réalité du ou des champs qui excède(nt) chaque compte rendu.

Étant donné la façon dont les « raccourcis » chez Jarry sont dans son travail journalistique, comme nous le verrons, la résultante d’un mécanisme de pensée qui érige la synecdoque en synthèse, ouvrant l’encyclopédique sur l’intransivité d’un texte opaque et autotélique, le champ convoqué demeure bien ainsi hors corpus car hors discours, se refusant plus à l’intellection qu’il ne s’offre à elle.

4. La mise à jour d’un pan méconnu de l’œuvre jarryque.

À l’inverse de Bordillon considérant implicitement les textes critiques de Jarry comme œuvre mineure, nous-mêmes, faisant du corpus des textes de critique littéraire l’objet de ce travail, semblons nous tenir à l’opposé du parti pris éditorial adopté au sein de l’édition Pléiade.

Il semble ainsi que nous « [r]efus[ions] la hiérarchie des œuvres », mais « cela ne conduit-il pas à établir une hiérarchie des auteurs, qui ne vaut pas mieux ?

2

». L’on se tient alors dans

« l’englobement du contraire

3

», ainsi que l’exprime Louis Dumont.

1

Juliette Rennes, Le mérite et la nature, Une controverse républicaine : l’accès des femmes aux professions de prestige 1880-1940, Éditions Fayard, collection L’espace du politique, 2007, p. 9.

2

Catherine Larrère, op. cit., p. 21.

3

Louis Dumont, postface à Homo hierarchicus. Le système des castes et ses implications (1966), Gallimard,

collection Tel, 1979, p. 397.

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