A427. Une ribambelle de carrés
Soit un entier p ≥ 1. On cherche les entiers naturels distincts a et b tels que les six produits des entiers a,b,a + p et b + p pris deux à deux donnent le plus grand nombre possible m(p) de carrés parfaits. Démontrer que :
Q1 : m(p) > 1 quel que soit p.
Q2 : m(p) = 2 pour un nombre fini de valeurs de p.
Q3 : si m(p) > 3 alors m(p) = 6.
Q4 : il existe une infinité de valeurs de p telles que m(p) = 6. Déterminer le plus petit entier p et un couple (a,b) tel que m(p) = 6.
Solution proposée pat Gaston Parrour
Les 6 produits deux à deux sont les suivants
ab a(b+p) b(b+p) a(a+p) b(a+p) (a+p)(b+p) Q1 - m(p) > 1 quel que soit p.
Il suffit ici de montrer qu'étant donné p quelconque, on est certain de trouver a et b tels que m(p) > 1 Cas de p impair et p > 1
Si a est un carré a = n2, en lui ajoutant p = 2n+1 avec n > 0 , on obtient a + p = (n+1)2
Ainsi, étant donné un tel p impair > 1, p = 2n+1, il suffit de choisir a = n2 auquel on adjoint un b = m2 quelconque, pour obtenir (a+p) = (n+1)2 et ainsi
ab = (nm)2 a(a+p) = [n(n+1)]2 b(a+p) = [m(n+1)]2 donc pour p> 1 ==> m(p impair) > 1 Cas de p pair
On doit distinguer :
1) p de type pair-impair p = 2t(2n+1) n > 0 et t > 0
alors avec ce qui précède : le choix a = 2tn2 et b = 2tm2, conduit à : ab = (2tnm)2 a(a+p) = [2tn(n+1)]2 b(a+p) = [2tm(n+1)]2
==> m(p=2t(2n+1)) >1 2) p est une puissance de 2 p = 2t
→ Cela nous amène au cas n = 0 . Ce cas, non encore examiné, correspond pour les impairs à p = 1.
Cas p=1 (n=0)
→ ab peut être un carré de deux façons :
a est carré et b est carré (a et b premiers entre eux (a,b)=1) cas1 a = c.n2 et b = c.m2 ou c est un produit de nombre premiers sans exposant pair cas2 Si a = n2 alors a+p = n2+1 ne peut être un carré (la « distance » entre deux carrés est au moins égale à 3) ; cela s'applique aussi bien à b+p puisqu'alors b est un carré.
Si a = c.n2 alors a+p = c.n2+1 ne peut être de la forme c.n'2 ; cela s'applique aussi bien a b+1 puisqu'alors b=c.m2 → Donc la seule question est :
si ab est un carré, existe-t-il des entiers a et b tels que (a+1)(b+1) soit un carré ?
cas1 partant de a = 1 = 12, on peut balayer les carrés successifs pour b : on trouve ainsi que le premier candidat est b = 49 Ainsi ab = 49 = 72 et (a+1)(b+1) = 2.50 = 100 = 102
cas2 par exemple partant de a = 3= 3.12, un premier candidat b = 3.m2 est b = 3.42 Ainsi ab = 9.16 = 144 = (12)2 et (a+1)(b+1) = (3+1)(48+1) = 196 = (14)2
→ De toute façon cela montre que pour p=1, des entiers a et b existent de façon à ce que ==> m(1) > 1 Puisque le cas où p = 2t se ramène de ce point de vue au cas n = 0 pour les impairs, on a bien aussi
m( p=2t) > 1 Conclusion ==> m(p) > 1 quel que soit p> 0 Q2 - m(p) = 2 pour un nombre fini de valeurs de p.
La fin de la question Q1 montre que m(1) > 1 → On a vu en effet :
si a=n2 et b = m2 (cas où PGCD (a,b) = 1), il est clair que (a+1) n'est pas un carré et (b+1) non plus, cependant (a+1)(b+1) peut être un carré (voir cas 1 ci-dessus)
si a = c.n2 et b = c.m2 , (a+1) et (b+1) ne sont pas de la forme cn'2 et cm'2, par contre ils peuvent être séparément carrés ; auquel cas
(a+1)(b+1) est un carré (voir cas 2 ci-dessus)
==> quoi qu'il en soit, avec p = 1, on a au plus 2 carrés parmi les 6 produits ; ce sont :
ab et (a+1)(b+1) donc ==> m(1) = 2 A la fin de la question Q1 on a aussi obtenu m(2 ) > 1t
on peut reprendre ce qui est dit ci-dessus :
→ Avec a = n2 pour quelles valeurs de p = 2t peut-on obtenir « a+p est un carré parfait » ? Pour répondre à cela, on peut songer à résoudre
n2 + 2t = z2
→ Cette équation de Diophante n'a clairement pas de solution entière pour t=1,2,3 Cela concerne a priori 3 valeurs de p : p =2, 4, 8.
Cependant on peut remarquer que dans le cas p = 8 , on a la relation 12+8 = 32
Ainsi, avec p = 8 et a = 12 on obtient au moins trois carrés parfaits avec b = m2 quelconque : ab = m2 a(a+p) = (1+8) et b(a+p) = m2(1+8) ==> m(8) > 2
==> ici, seulement pour p = 2, 4 pas de troisième carré parfait ==> m(2)=m(4)=2 → Avec t = 4 n2 + 42 = z2 a pour solution, la solution de base n = 3 et z = 5 ; et donc a=9 Avec p = 24 , a = 9 et b quelconque b=m2 (m différent de 3 pour avoir a différent de b) , on obtient au moins 3 carrés parmi les six produits, ce sont :
ab a(a+p) b(a+p) donc m(24) > 2
→ Pour t > 4 on peut poser p = 2t-4 .24 et définir alors a = 2t-4 .a' et b = 2t-4 .m2 (m2 différent de a') La recherche de solution à « a(a + p) carré parfait », est alors ramené à l'équation précédente si on pose a' = n2 : a(a+p) = (2t-4)2n2(n2+24) et cela est un carré parfait avec n = 3 et n2+24 = 52
→ Ainsi d'une façon générale, pour tout t > 3, p = 2t [avec a = 2t-4 . 32 et b = 2t-4 .m2 (m différent de 3) ] conduit à : 3 produits au moins parmi les six sont des carrés parfaits :
ab a(a+p) b(a+p) donc m(2t) > 2 (pour t >3) ==> En conclusion : seulement pour p = 1, 2, 4, on a m(p) = 2
Q3 - si m(p) > 3 alors m(p) = 6.
Ce qui précède montre que
lorsque m(p) = 2, cela revient à exclure parmi les six produits possibles a(a+p) b(a+p) et les symétriques a(b+p) b(b+p)
Cela laisse alors effectivement (au maximum) ab et (a+1)(b+1) comme carrés parfaits lorsque m(p) =3 cela est du à ab et par exemple à a(a+p) et b(a+p)
Si m(p) > 3 cela signifie qu'on fait appel en plus à un quatrième carré, par exemple a(b+p)
Mais dans un tel cas d'ailleurs, par symétrie [comme avec le facteur (a+p)], alors aussi b(b+p) sera carré parfait.
→ Alors avec ab a(a+p) b(a+p) a(b+p) b(b+p) carrés parfaits, et sachant que a différent de b, il y a 2 possibilités pour le le PGCD de a et b est noté (a,b) :
1- (a,b) = 1
alors ab carré ==> a carré et b carré et donc a(a+p) carré ==> (a+p) carré
a(b+p) carré ==> (b+p) carré et finalement on a
(a+p)(b+p) est un carré parfait
2 - (a,b) > 1 alors, puisque ab est un carré : a = c.n2 et b = c.m2
et donc puisque a(a+p) est un carré ==> (a+p) = c.n'2 et a(b+p) est un carré ==> (b+p) = c.m'2 et finalement
(a+p)(b+p) = c2n'2m'2 est un carré parfait
==> En conclusion : Les six produits sont carrés parfaits si m(p) > 3
N.B. Variante possible :
Avec m(p) > 3 , on peut aussi partir de ceci :
ab a(a+p) b(a+p) sont carrés parfaits , et le quatrième carré parfait est (a+p)(b+p) .
Le raisonnement précédent, avec les deux possibilités pour la décomposition de ab, se reconduit à l'identique.
On distingue les deux cas : a et b premiers entre eux ou non ; soit donc a = n2 ou a = c.n2 ...
En conservant les notations ci-dessus :
soit (a+p) est un carré parfait (lié à a=n2) , soit (a+p) = c.n'2 (lié à a=c.n2) donc « en correspondance » (b+p) est un carré parfait ou (b+p) = c.m'2
Et finalement :
a(b+p) et b(b+p) sont des carrés parfaits.
Q4 : il existe une infinité de valeurs de p telles que m(p) = 6. Déterminer le plus petit entier p et un couple (a,b) tel que m(p) = 6.
Avec les questions précédentes, on a vu que m(p) = 2 lorsque on a au plus à la fois ab carré parfait ET (a+p)(b+p) carré parfait → En se plaçant dans la cas a = n2 et b = m2, si on réalise séparément (HYP1) a+p = z2 carré parfait
et b+p = z'2 carré parfait , les 4 autres produits sont alors des carrés parfaits ; soit m(p) = 6
→ On doit donc, pour le même p, résoudre le SYSTEME suivant
n2 + p = z2 (1) m2 + p = z'2 (2) Donc p doit vérifier séparément p = z2 – n2
p = z'2 – n2
→ p s'exprime par la différence de deux carrés au moins de deux manières différentes.
Puisqu'il s'agit de déterminer le plus petit p, cherchons le premier p qui répond à l'exigence En fait
si p = r.s r> s alors avec z+n = r et z – n = s z = (r+s)/2 et n = (r-s)/2 Puisqu'on a affaire à des entiers, il faut que (r+s) soit pair ; (r-s) le sera alors.
→ p est donc le premier entier qui peut s'écrire comme deux produits p = r.s et p = r'.s' et où r,s,r',s' vérifient cela
→ On observe que le premier candidat entier est p = 15 : p =15 = 15.1 = 3.5 ,
les entiers qui précèdent, ou bien sont des nombres premiers, ou bien ne vérifient pas (r+s) et (r'+s') pairs.
Ainsi z = (16)/2 = 8 n = (14)/2 = 7 et 15 = 64 – 49 z' = 8/2 = 4 m = 2/2 = 1 et 15 = 16 – 1
==> Avec p = 15, on obtient ainsi a = n2 = 49
b = m2 = 1
Donc ab = (n.m)2 = 72
a(a+p) = az2 = 49.64 = (7.8)2 b(a+p) = z2 = 82
a(b+p) = n2.z'2 = (7.4)2 b(b+p) = z'2 = 42
(a+p)(b+p) = (z.z')2 = (8.4)2
→ Il y a bien sûr une infinité d'autres entiers p ( p > 15) qui satisfont les critères de sélection et sont donc solution du SYSTEME
Remarques finales :
1 - Retour sur (HYP1) faite au début de cette question Q4 :
En se plaçant dans le cas PGCD (a,b) > 1 soit a = c.n2 et b = c.m2 ,
Pour avoir « a(a+p) est un carré », il faut alors pouvoir mettre c en facteur dans (a+p) ; donc p = c.p' → La démarche avec p' est ensuite la même qu'avec p ci-dessus :
Déterminer p' de façon à ce que n2+p' = z2 et m2+ p' = z'2 avec m et n non égaux
Autrement dit : le premier p' obtenu ici sera également 15 et donc p correspondant sera c.15 avec c > 1 ==> La première valeur de p ainsi déterminée sera plus grande que p = 15 déterminée avec (HYP1)
2 - Pour résoudre le système ci-dessus, on pourrait poser p = q2, ces deux équations de Diophante s'écrivent
n2 + q2 = z2 (1) m2 + q2 = z'2 (2)
Puisque l'approche précédente assure qu'on a affaire au plus petit p possible, il est clair que cette démarche-ci ne satisfait pas le critère « p le plus petit possible ».
N.B. En fait on peut vérifier que la première valeur acceptable par cette approche est p = (12)2 = 144
==> En conclusion :
Il y a une infinité de valeurs de p [chacune liée à au moins un couple d'entiers (a,b)] , et pour lesquelles m(p) = 6 La valeur la plus faible de p est p = 15 à laquelle s'associent a = (7)2 et b = (1)2 ; ainsi m(15) = 6
Les valeurs correspondantes des six produits sont données en rouge ci-dessus.