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indare

V

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ISBN : 2-85210-054-1 (ouvrage complet) tome I : 2-85210-055-X tome II : 2-85210-056-8 tome III : 2-85210-057-6 tome IV : 2-85210-058-4 tome V : 2-85210-059-2 tome VI : 2-85210-060-6 tome VII : 2-85210-061-4 tome VIII : 2-85210-062-2 toute reproduction ou reprographie même partielle et tous autres droits réservés

© 1997 Jean YGAUNIN PRODUIT EN FRANCE

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Jean YGAUNIN

PINDARE

les poètes et de la célébration

tome V

les poètes romantiques français après 1830

MINARD

1997

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L'œuvre de Pindare, telle qu'elle a été transmise au-delà du monde grec, apparaît aux poètes capables de la lire, d'en analyser les éléments et d'essayer de rivaliser avec elle, comme la forme la plus parfaite d'une certaine Poésie.

Sur le plan des êtres, c'est un monde où dieux, héros et hommes sont rangés par clans, comme dans un monde aristocratique, selon une hiérarchie de la gloire octroyée par le Maître des dieux.

Le Poète, marqué d'un signe divin dès sa naissance, a con- science du rôle de porte-parole des événements ou des aspirations d'une époque, tantôt dans le monde aristocratique, tantôt dans le peuple, ou celui d'intermédiaire entre le monde divin et le monde humain, par la prière, comme le prêtre, par la connaissance de la volonté divine, reçue directement, comme le prophète.

Il a la certitude que la Poésie, langage parfait, apporte l'immor- talité à la fois au Poète et à celui ou à ce qu'il chante : l'éloge d'un notable de son temps, est lié à la conviction que cette postérité sera plus durable que celle des inscriptions sur les monuments. Le

« grand lyrisme » est exaltation.

Sur le plan des idées, le Poète élimine ce qui est impie et bas, mais la souffrance peut servir d'épreuve pour les forts.

Le Poème a une architecture savante, fondée plutôt sur l'asso- ciation que sur une structure logique. Il comporte des maximes, expression de l'exemple moral. Il contient un ou plusieurs mythes, en accord avec le personnage, l'environnement ou la situation. Il utilise une langue distincte de celle de la prose et comportant beaucoup d'images. Il associe l'ampleur de la strophe à celle de la phrase lyrique. Il sert de support à la musique et même éventuel- lement à une chorégraphie.

Mais si le mythe de l'inspiration demeure, si le mécénat se poursuit, l'éloge poétique des vainqueurs aux Jeux n'existant plus, les poètes qui s'inspireront de Pindare devront chercher de nouveaux « Héros » et, à partir d'une certaine époque, utiliser de nouveaux mythes. L'essence de la Poésie pourra prendre la forme du Symbole, qui associe étroitement pensée intuitive et image.

On peut alors se demander s'il existe un « pindarisme », comme il a existé un « pétrarquisme », les poètes ayant en commun une conception de l'Amour, des thèmes, des comparaisons et une forme rythmique : la poésie devenait un exercice intellectuel et technique autant que l'expression du sentiment.

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A 1830, le Romanti

Lamartine, parti des Ultras, veut dès que possible jouer un

sme devient social.

rôle politique. Député de 1831 à 1848, membre du Gouvernement provisoire en 1848, il définit en prose et en vers sa pensée politique, le « devenir historique ». Homme de réflexion, il est homme d'influence et d'action. Il voit les étapes de la libération de l'homme : il sera désormais le guide, le prêtre et le prophète de l'Humanité. L'expression poétique des grands mythes sera le symbole et un rythme oratoire en accord avec sa passion.

A. de Vigny, plus penseur qu'homme d'action, exprime son évolution sur le plan politique, métaphysique et religieux dans son œuvre. Le poète, nouveau vates, sera le guide de son époque et l'exprimera sous la forme durable du symbole, emprunté à la Bible, à l'Histoire ou à la réalité.

V. Hugo, en politique, évoluera avec son époque. Il se croit un rôle après 1835, s'oppose au Second Empire et verra la naissance de la Troisième République. Sa pensée religieuse s'affirmera et il deviendra le prêtre d'une religion nouvelle (Dieu, La Fin de Satan).

Il développe les grands mythes du XIX siècle : Napoléon, l'évolution de l'Humanité sur le plan historique ou en visionnaire, servi par une langue riche et une versification étonnante.

Les poètes de cette époque sont donc «l'écho» de leur temps et veulent être les guides, soit d'une élite, soit du peuple.

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SEPTIÈME PARTIE

À TRAVERS LE ROMANTISME FRANÇAIS

APRÈS 1830

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LECTURES CONSEILLÉES

TEXTES

HUGO, Victor. La Légende des siècles. Édition Paul BERRET. Paris, Hachette, 1925.

« Grands Écrivains français ».

HUGO, Victor. Œuvres poétiques. Édition Pierre ALBOUY. Paris, Gallimard, 1964.

« Bibl. de la Pléiade ». 3 vol..

LAMARTINE. Œuvres poétiques. Édition Maurice LEVAILLANT. Paris, Hatier, 1939.

LAMARTINE. Œuvres poétiques. Paris, Gallimard, 1991. « Bibl. de la Pléiade ».

PINDARE. Texte et traduction Aimé PUECH. Paris, Belles Lettres : Isthmiques (1952), Néméennes (1958), Olympiques (1970), Pythiques (1992).

VIGNY, Alfred DE. Les Destinées. Édition Verdun L. SAULNIER. Genève, Droz, 1947.

VIGNY, Alfred DE. Poèmes. Paris, Belles Lettres, 1952.

ÉTUDES

ALBOUY, Pierre. La Création mythologique chez V. Hugo. Paris, Corti, 1963.

ALBOUY, Pierre. Mythes et mythologies dans la littérature française. Paris, Colin, 1969.

BARRÈRE, Jean Bertrand. Hugo, L'homme et l'œuvre. Paris, Boivin, 1952.

BARRÈRE, Jean Bertrand. Hugo, l'écrivain devant Dieu. Paris, Desclée De Brouwer, 1965.

BÉGUIN, Albert. L'Âme romantique et le rêve. Paris, Corti, 1956.

BÉNICHOU, Paul. Le Temps des prophètes. Doctrines de l'âge romantique. Paris, Gallimard, 1977.

BÉNICHOU, Paul. Les Mages romantiques. Paris, Gallimard, 1988.

BUCHANAN, Donald W.. Les Sentiments religieux de V. Hugo de 1825 à 1848.

Besançon, Imprimerie de l'Est, 1939.

CASTEX, Pierre-Georges. Vigny, l'homme et l'œuvre. Paris, Boivin, 1952.

CASTEX, Pierre-Georges. Les "Destinées" d'Alfred de Vigny. Paris, SEDES, 1964.

CELLIER, Léon. L'Épopée humanitaire et les grands mythes poétiques. Paris, SEDES, 1971.

CHANTAVOINE, Jean. Beethoven. Paris, Plon, 1948.

DERRÉ, Jean René. Lamennais, ses amis et le mouvement des idées à l'époque romantique (1824-1834). Paris, Klincksieck, 1962.

DURRY, Marie-Jeanne. Gérard de Nerval et le mythe. Paris, Flammarion, 1956.

GUILLEMIN, Henri. Lamartine, l'homme et l'œuvre. Paris, Boivin, s.d..

MOREAU, Pierre. Les Destinées d'Alfred de Vigny. Paris, Malfère, 1936.

SAURAT, Denis. La Religion ésotérique de Victor Hugo. Courrier du Livre, s.d.

TULARD, Jean. Le Mythe de Napoléon. Paris, Colin, 1971.

VILLIERS, Charles. L'Univers métaphysique de Victor Hugo. Paris, Vrin, 1970.

ZUMTHOR, Paul. Hugo poète de Satan. Paris, Laffont, 1946.

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CHAPITRE PREMIER PRÉSENCE DE PINDARE AU XIX SIÈCLE EN FRANCE

PREMIERS ÉCHOS

A XIII siècle, l'opinion littéraire sur Pindare est souvent défavorable : Voltaire accuse le poète grec d'ignorer « l'art,

le goût et la raison ». Au XIX si les éditions de ce poète sont nombreuses et continues en Allemagne et en Angleterre, il n'en est pas de même en France, où l'épisode révolutionnaire va désorganiser l'enseignement classique, si bien que la première et la seule édition du texte seul sera celle de François Boissonnade en 1825.

On trouve par contre des traductions, avec ou sans notes, accompagnées ou non du texe :

1818. Traduction complète des Odes de Pindare, en regard du texte grec, avec des notes par R. Tourlet (2 vol.). Paris.

1841. Traduction complète par Faustin Colin. Strasbourg.

1848. Œuvres de Pindare : traduction avec texte en regard par Sommer. Hachette.

1853. Traduction complète par C. Poyard. Paris : en 1902 et 1908, on fera une nouvelle édition avec adjonction d'Anacréon et de Sappho.

1854. Traduction en vers par Alphonse Fresse-Montval. Paris.

1867. Traduction par J.-F. Boissonnade, complétée et publiée par Egger. Hachette.

1910. Les Épinicies de Pindare, essai nouveau de traduction, avec des fragments de Callinos, Tyrtée, Mimnerme, Simonide de Céos, par M. Rathier. Paris.

1931. Les Olympiques par A. Puech. Les Pythiques, par le même.

Il en sera de même pour les Isthmiques et les Néméennes. Édition des Belles-Lettres. Paris.

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On trouve des éditions partielles :

en mai 1820, Philarmos donne une traduction libre de la Première Pythique : la critique a sur le poète grec la même opinion que Voltaire.

1838. Les Olympiques et les Pythiques traduites en vers français par P.A. Mazier. Poitiers.

1840. Les Néméennes par O. Orly.

1846. Les Néméennes par M. Fix, traduction par Sommer.

1847. Les Isthmiques, texte grec et traduction par Sommer.

Hachette.

1857-1867. Les Olympiques, les Pythiques et les Isthmiques, traduction avec le texte en regard par J. Al. Perrault-Maynard (2 vol.). Paris.

1859. Les Odes les plus remarquables, avec une analyse raisonnée par Jean-François Vauvilliers. Paris.

Il ne semble pas que quelqu'un de ces travaux ait intéressé Lamartine ; on ignore si Vigny en a eu connaissance. Hugo a pu y trouver certains aspects pour Les Contemplations et La Légende des siècles.

Mais deux aspects vont se rencontrer chez ces trois écrivains, qui s'apparentent à la poésie de Pindare : c'est le poète « guide de son époque » et l'utilisation du symbole, remplaçant le mythe.

En effet, comme le remarque P. Albouy : «De Ballanche à Leconte de Lisle, la création littéraire, dans ses plus hautes ambitions, dans quelques-unes de ses plus grandes réussites [...] a été une création mythologique » (La Création mythologique, p.47). « Les poètes ont incorporé leurs messages à des mythes qu'ils ont quelquefois créés, mais le plus souvent empruntés, et alors interprétés [...] Les grands initiateurs, les grands criminels, les grandes victimes des religions et des mythologies ont été la proie naturelle des chercheurs de symboles : Adam, Caïn, Satan, Lilith, Cedar, et le Satyre, et le Ballon, et le Mur des Siècles leur ont servi de porte-voix », soulignait Cellier (L'Épopée humanitaire et les grands mythes poétiques, pp. 69-70).

Et cela était dans la logique même de l'époque. En effet, V. Cousin, en 1828, constate que, si la philosophie, qui se fonde sur la réflexion, peut convenir à une élite qui accède à cette lumière, la religion, « réduite aux formes » est faite pour les masses. Donc le jour où les poètes, se croyant dotés d'une mission soit sociale, soit divine, voudront s'adresser au peuple, ils devront utiliser le symbole ou mieux le mythe, qui est développement et récit.

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CHAPITRE II

POÉSIE ET VOCATION POLITIQUE O Romantisme vers le domaine politique et social. Mais on donne généralement 1830 pour date de l'orientation du pourrait trouver, avant cette date, un engagement politique ou un désir d'engagement que les circonstances ne favorisent pas. Après cette date le poète se servira de son audience auprès du public pour lui servir de « guide », en s'inspirant de mouvements contempo- rains, mais en gardant une certaine indépendance, en tant que

«poète de la cité» : c'est ce que l'on constate pour Lamartine, Vigny et Hugo.

En 1817-1818, influencé par M Charles et par M. de Bonald, Lamartine adhère à l'idée d'ordre établi et au conservatisme politique. Dans la Dixième Méditation, intitulée Ode, après avoir rappelé que le ciel fait retomber sur leurs descendants les crimes des ancêtres, il flétrit l'orgueil des Révolutionnaires qui ont voulu imposer leur idéal aux rois et aux nouvelles générations : tout est anéanti et la France a même perdu la grandeur qu'elle devait à la monarchie. Les sciences ont remplacé Poésie et Religion. La Dix-neuvième Méditation, Le Génie, est l'éloge de la philosophie politique énoncée par de Bonald, qui fait dériver de Dieu la loi et le gouvernement, et la certitude qu'il durera plus que ses détracteurs. Plus tard, l'homme politique expliquera cette première attitude par les attaches familiales : «J'étais né d'une famille royaliste qui avait gémi plus qu'aucune autre sur la chute du trône, sur la mort du vertueux et du malheureux roi, sur les crimes de l'anarchie. J'eus un accès d'admiration pour tous les passés, une imprécation contre tous les démolisseurs des vieilles choses. »

En 1819, mécontent du présent, il aspire au triomphe de 1. Cours familier de Littérature. La Méditation s'inspire surtout des idées de M. de Bonald.

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doctrines qui se réclameraient de la raison souveraine et se montre indépendant : « Il y a longtemps, dit-il, que les ultras m'appellent libéral et les libéraux ultra : je ne suis ni l'un ni l'autre, car je voudrais être gouverné et non pas gouverner moi-même ». Deux ans après la mort de Napoléon, dans la Méditation Bonaparte, il suppose la méditation de l'empereur déchu, à Sainte-Hélène;

vainqueur des rois et couronné lui-même, il a commis un crime, que rappelle le nom de Condé : le poète en appelle à Dieu, qui est Justice et Clémence.

En 1824, les préoccupations politiques reparaissent, alors qu'il attend sa nomination à Florence. En 1827, dans une lettre à son ami de Virieu, où il calcule combien d'années lui restent encore à attendre avant les quarante ans qui lui permettraient d'être éligible, après avoir rappelé que, s'il n'aime pas la Révolution, il n'aime pas non plus ce qui a précédé et qu'il faut tenir compte du fait que la Révolution a existé, il laisse deviner sa future orientation :

« Je ne dis pas : "Revenons à l'Ancien Régime" ; je dis : "Faisons du neuf et du bon... Nous sommes dans une ère nouvelle ; les liens du passé et de l'avenir ont été brisés et ne peuvent ni ne doivent se renouer : il faut filer un câble neuf. Pour la monarchie, la liberté représentative avec tout son jeu ; pour la religion, la tolérance chrétienne et philosophique avec tous ses développements. Rien par la force, tout par les doctrines" ». Il reproche à son ami de rester dans le vague.

Dès 1828, de Florence, il prévoit les événements de 1830, et, lors de la formation du ministère Polignac, il note l'erreur de Charles X. Il était à Aix-les-Bains lorsqu'il apprit la Révolution de Juillet : il plaignit les vaincus, vit avec plaisir le triomphe du principe de la liberté, mais il redoutait l'anarchie. Le 19 septembre 1830, il adressa au comte Molé sa démission de ses fonctions diplomatiques, en protestant de sa fidélité au « Roi des Français », lettre qui lui concilia la bienveillance de Louis-Philippe. À l'occasion de l'émeute du 19 octobre 1830 près du donjon de Vincennes, où la foule avait réclamé la peine de mort pour ceux qui avaient contresigné les « Ordonnances de Juillet », Lamartine écrivit une Ode contre la peine de mort, en exaltant le courage des Révolutionnaires et en montrant la grandeur du pardon.

Le lettre à Virieu du 7 février 1831 montre sa décision et sous-entend ses désirs : « La révolution, écrit-il, peut être bonne, utile, féconde en résultats heureux et moraux pour l'humanité et la religion véritable, et cependant détestable dans quelques-unes de

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ses phases, dans ses agents, dans les masses ignorantes et féroces qu'elle soulève momentanément ». Il montre à son ami que la neutralité est impossible : «Je te le dis tout net et tout cru, une telle neutralité est à mes yeux un crime envers soi-même, une blessure inguérissable à sa conscience ». Et le devoir oblige à ne pas garder la neutralité, même si le ralliement ne semble pas apporter un bien apparent immédiat : « Être neutre, c'est abdiquer, c'est répudier tout le monde ; mais choisir entre deux partis le moins mauvais, ce n'est pas s'interdire de revenir plus tard au meilleur».

En mai 1831, il posait sa candidature à Bergues, 2e circonscrip- tion électorale de l'arrondissement de Dunkerque : son beau-frère, M. de Coppens et M Caroline Angebert soutenaient sa candida- ture. Mais il n'avait pas de vrai programme. Le candidat du gouvernement, fort du pamphlet de Barthélémy dans la Némésis du 3 juillet, fut élu le 6 juillet par 198 voix pour, et 181 contre.

En même temps, candidat dans la circonscription de Toulon, Lamartine fut battu par M. de Portalis, par 78 voix contre 72 : pris pour un « Carliste » dans le Nord, il avait passé pour un « libéral » dans le Midi.

Le poème de Barthélémy était une satire assez caustique : au poète de la Nature, des clairs de lune, accablé par le mal du siècle, il opposait l'homme de lettres lié à l'éditeur Gosselin, pressé d'en- trer à l'Académie et se présentant devant les électeurs sans titres de dévouement à la liberté. On l'invitait à se présenter à Jéricho, puisqu'il avait un projet de voyage pour la Palestine. La réponse du poète parut le 20 juillet dans L'Avenir, sous le titre Réponse à Némésis. En quatorze strophes de 8 vers, il montrait avec une éloquence vigoureuse que sa Muse n'était ni une Furie, ni une prostituée au service de la rue ou de l'argent, et qu'après avoir chanté une douleur sincère, il ne pouvait être indifférent à la Révo- lution : il n'était pas, étant homme, différent de son accusateur ; il était le serviteur de Dieu et de la liberté. Barthélémy répondit en atténuant ses attaques et en 1849 il fit campagne pour Lamartine.

C'est à l'automne 1831, du 10 septembre au 10 octobre, que séjourna à Saint-Point quelqu'un qui allait avoir, en politique, une forte influence sur Lamartine, J.-M. Dargaud (né le 22 février 1800 à Paray-le-Monial, † 1865) auteur d'ouvrages historiques et de Souvenirs, lié aux cercles libéraux parisiens où l'on assimilait Lamartine à Chateaubriand et à J. de Maistre. Dargaud voulut faire de son nouvel ami non un « prophète du passé » mais un « Prophète

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de l'avenir ». Il séjourna chaque automne à Saint-Point et, après 1834, à Paris il accompagnait Lamartine dans sa promenade quotidienne au Bois de Boulogne. Lié à Michelet, à Quinet, à Béranger et à George Sand, il s'intéressait aussi au domaine religieux : il avait traduit les Psaumes, le Livre de Job, le Cantique des Cantiques ; il était auteur d'une Histoire de la liberté religieuse et de ses fondateurs (en 4 vol.).

C'est au début d'octobre 1831 que Lamartine publia sa Politique rationnelle, brochure dans laquelle il précisait sa pensée politique et ses idées sociales. Après avoir dénoncé les erreurs de la monarchie avant 1830, par crainte de l'anarchie, il se rallie sans enthousiasme au nouveau régime. Il souhaite vivement des réformes : l'abolition de la pairie héréditaire, la liberté de la presse, l'existence de l'école pour tous, afin de former l'esprit du peuple, la séparation de l'Église et de l'État, le suffrage universel à plusieurs degrés, correspondant à l'importance sociale, et l'aboli- tion de la peine de mort. Faisant l'éloge du saint-simonisme, il demande que le gouvernement ait une politique sociale. Le pays a besoin d'un homme politique intelligent, convaincu, éloquent, ayant le génie de l'avenir, «Bonaparte de la vie civile» et

« Christophe Colomb de la liberté ». Cela suppose une « foi sincère dans la destinée progressive de l'humanité, dans un religieux respect pour notre dignité d'hommes, dans le but constant de la société, le perfectionnement de l'individu et de l'humanité qui doit rapprocher de Dieu l'homme vertueux et la société elle-même ».

Mais, prophète avec vingt ans d'avance, il met en garde contre l'utilisation du désir de vaine gloire : «Le premier qui prendra le chapeau étriqué et la redingote grise et se croira un Bonaparte, sabrera la civilisation et la liberté des branches à la racine, et dira :

"Mon peuple", jusqu'à ce qu'on en cherche un autre pour mieux parer la servitude. Le peuple libre n'aime pas assez la liberté ; il croit toujours voir le temple de la gloire avec un héros sur le seuil...

Il se trompe, le héros n'est plus ; et la liberté est son seul asile ».

Ce premier ouvrage de Lamartine en prose ne fut pas lu. À la même date, pour sauver le fameux libraire du Palais-Royal, Ladvocat, de la faillite, il insère dans un ouvrage collectif une Ode, Les Révolutions, qui s'adresse à tous les conservateurs pour leur montrer que le mouvement est la loi de l'humanité. Au retour de son voyage en Orient (20 juin 1832-octobre 1833), durant lequel sa foi en sa mission fut renforcée par la méditation qu'il fit aux Lieux Saints le 29 octobre et par la prédiction de Lady Esther

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Stanhope concernant son avenir politique, le 15 mars 1834, il publia dans la Revue des deux Mondes un manifeste : Des destinées de la Poésie. La Poésie «ne sera plus lyrique... ni épique... ni dramatique... mais de la raison chantée... l'écho profond, réel, sincère des plus hautes conceptions de l'intelligence, des plus mystérieuses impressions de l'âme ». Le poète a sa place dans la cité, pour montrer « des utopies, des républiques imaginaires, des cités de Dieu» et pour donner «le courage de les atteindre». La poésie doit devenir « populaire, comme la religion, la raison et la philosophie », pour assurer le triomphe de la raison universelle.

Élu député, à une élection partielle, à Bergues, en mars 1833, il ne siégea à la Chambre des Députés qu'à partir du 23 décembre.

Élu conseiller général de Mâcon en novembre 1833, il le restera jusqu'en 1849. Aux élections de 1834, élu à la fois à Bergues et à Mâcon, il opta pour le Nord; à celles de 1837, élu à Bergues, à Mâcon et à Cluny, il choisit Mâcon, dont il restera le député jusqu'en 1849. À cette date, il choisit le Loiret, plutôt que la Saône-et-Loire.

Comme il méprisait les partis existants, quand on lui demanda où il siégerait, avec humour il répondit : « Au plafond ». Il voulait représenter la conscience du pays et une « république rationnelle ».

Devenu rapidement orateur, il défend la cause des sucreries du Nord ou des propositions beaucoup plus générales. Il doit s'attaquer à de profonds préjugés, notamment quand il invite ses collègues, le 13 mai 1834, le 13 avril 1835 ou le 9 mai 1835, à se préoccuper des classes laborieuses en modifiant le système des impôts, le code du travail pour les femmes et les enfants, et l'organisation des œuvres d'assistance. Mais il n'oublie pas le respect du droit de propriété. Le 24 mars 1837, il s'oppose à Arago qui voulait faire dominer l'enseignement scientifique, et il défend les études classiques.

Son attitude à l'égard du gouvernement échappe à beaucoup ; seul Talleyrand a compris sa tactique. En 1838, il obtient le maintien de Molé, qui représente la politique de Louis-Philippe, malgré la coalition de Guizot, Odilon Barrot et Thiers ; mais il a un mot prophétique : « La France est une nation qui s'ennuie ».

En décembre 1838, à la fin de la Préface des Recueillements poétiques, il précise la raison de son engagement : c'est un devoir, parce qu'il devra un jour rendre des comptes au Souverain Juge. De plus, il s'agit de savoir si le monde social avancera ou non ; si l'éducation du genre humain se fera par la liberté ou le despotisme ;

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si l'humanité sera gouvernée par la vertu ou par la force ; si la fraternité règlera les rapports entre les hommes et les nations ; si l'on supprimera la peine de mort et la guerre; si «Dieu sera de siècle en siècle mieux adoré en œuvres et en paroles, en esprit et en vérité ».

Thiers ayant fait accepter par l'Angleterre le retour des cendres de Napoléon, le 26 mai 1840, à la séance de la Chambre qui devait décider du lieu où elles reposeraient, Lamartine improvisa un discours, où il opposait le culte de la raison à la «religion napoléonienne », dont l'immoralité est flagrante; il accueillait les cendres avec recueillement, mais sans fanatisme ; il votait la subvention et souhaitait que les cendres soient placées au Champ de Mars : Bonaparte « y serait seul [...] et sa statue et son génie passeraient encore les revues de nos soldats, au départ et au retour ».

Ce beau style ne doit pas nous cacher ses ambitions. En 1839, Lamartine avait espéré un portefeuille : il fut oublié. En octobre 1840, il refusa un petit portefeuille dans le ministère présidé par Soult, où Guizot était aux Affaires Étrangères. Entre le 21 et le 28 janvier 1841, Thiers qui, en septembre 1840 avait décidé, par ordonnance, la construction d'une fortification continue autour de Paris, redevenu simple député, fut rapporteur pour les crédits nécessaires. Lamartine montra que les progrès de l'artillerie déconseillaient l'adoption du projet, que la France n'avait pas à redouter la guerre, mais que la situation serait intenable pour l'Assemblée, si elle était assiégée par la foule et si Paris faisait une révolution : il était donc préférable de construire des forts. À la suite de l'ultimatum adressé par l'Angleterre, la Russie, la Prusse et l'Autriche à Méhémet-Ali, pacha d'Égypte, protégé par la France, le poète allemand Nicolas Becker composa une chanson, Le Rhin allemand, où l'expression «le libre Rhin allemand»

revenait presque dans chaque strophe. Le 17 mai, Lamartine écrivit sa réponse, La Marseillaise de la paix, où « Roule libre » revient comme un refrain, et qui comportait ces deux vers :

Et pourquoi nous haïr, et mettre entre les races Ces bornes ou ces eaux qu'abhorre l'œil de Dieu ?

Le 28 décembre, il fut invité par certains à briguer la Présidence de la Chambre ; ce fut un rude échec : 64 voix sur 308 suffrages. La Présidence fut accordée à Sauzet, personnage effacé. Lamartine

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devenait donc un des chefs de l'opposition. Il sait que la Révolution vient et qu'il faudra imposer la République, sans faire la Révolution sociale. Pour être puissant au jour du changement, il faut désormais se rendre impossible aux yeux de la droite. Le 15 février 1842, il propose avec Ledru-Rollin l'extension du droit de vote aux

« capacités » : on se fondait alors non plus seulement sur la fortune, mais sur la profession. Mais il est d'accord avec le gouvernement sur certaines réalisations : il vote la loi du 11 juin 1842, qui régit les chemins de fer et, inspirée par les idées saint-simoniennes, fait de Paris le point de départ des grandes lignes.

Pendant six ans, avec patience, il va préparer le changement et s'assurer une place. Son Histoire des Girondins, commencée durant l'été 1843 et terminée en décembre 1847, va, en plus de certains moyens financiers, lui donner la popularité qui lui manquait : le rappel des « grandes journées » redonne l'enthousiasme à ce monde blasé et surtout à la jeunesse ; en montrant la faction modérée de la Révolution broyée par la Montagne, il indique le futur obstacle à surmonter et se rallie les modérés. Pour fêter le succès de la publication des huit volumes entre le 20 mars et le 19 juin 1847, Mâcon offrit, le 18 juillet, un banquet de 2500 couverts. À la même époque, Odilon Barrot commence la campagne des banquets, destinée à provoquer une agitation favorable à une réforme électorale. Ledru-Rollin, avec le parti radical, en prend la direction.

Partout on réclame Lamartine qui s'abstient. Mais il prévient ses confidents, par exemple Dargaud, à qui il indique le 17 août 1847 :

« Nous commençons une grande bataille, la bataille de Dieu ».

Le 20 janvier 1848, il attaque la politique étrangère du gouverne- ment qu'il accuse d'être contre-révolutionnaire dans tous les pays.

Il est alors applaudi par la gauche et par les légitimistes, qui s'imaginent qu'il prépare le retour de Henri V. Le 11 février, comme le gouvernement flétrit la « campagne des banquets », il lance cet avertissement : « Souvenez-vous du Jeu de Paume ». Le 22 et le 23 février, après l'interdiction du « banquet réformiste » du XII arrondissement, fiévreux et souffrant, il reste à l'écart. Mais catholiques, légitimistes et modérés voient en lui «l'homme providentiel », qui sauvera la propriété : il amènera la République, mais écartera la solution socialiste.

Le 24 février, à dix heures, il reçoit la visite de Bocage et de Hetzel, commissaires des sociétés secrètes, et il accepte la proposi- tion qu'ils lui font, d'entrer éventuellement dans un « Gouverne- ment provisoire ». À deux heures, il se rend à la Chambre où, en

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présence de la duchesse d'Orléans et de son fils, Tocqueville et des journalistes amis de Ledru-Rollin, ainsi que quelques libéraux pro- posent l'idée d'une Régence dont Lamartine serait le Ministre. Odi- lon Barrot suggère aussi une Régence, mais avec un Ministère d'opinions avancées. Lamartine ne voit dans une Régence qu'un gouvernement faible, en butte à tous les coups de force venus de la rue : ce sera le désordre. Il faut donc arriver à imposer la Répu- blique avec le suffrage universel, qui mettra en minorité le monde ouvrier, la bourgeoisie et surtout la paysannerie (plus des deux- tiers de la population) étant attachées à l'idée de la propriété. Les socialistes seront donc pris au piège de la majorité dans l'égalité des droits. Marie et Crémieux proposent de créer un Gouverne- ment provisoire ; Ledru-Rollin reprend cette idée ; Lamartine, pris pour arbitre, se prononce pour. Dupont de l'Eure et Ledru-Rollin établissent une liste de cinq noms, où figure Lamartine.

À l'instigation de Bocage, le groupe se rend à l'Hôtel de Ville à pied. Une délégation populaire demande que Louis Blanc et l'ouvrier Albert soient adjoints aux cinq proposés. Lamartine accepte Louis Blanc, pensant qu'il le persuadera, et envisage la création d'une Commission du Luxembourg pour les questions sociales : on en ferait un groupe honorifique, sans efficacité.

Le gouvernement s'installe au premier étage, à l'Hôtel de Ville.

Lamartine prend le poste des Affaires Étrangères. Sur la place, la foule réclame la République. Du balcon, Lamartine s'adresse à elle et lui montre qu'il ne peut proposer qu'une «République provisoire », tant qu'il n'y aura ni élections, ni assemblée. Il signe cependant un décret qui proclame la « République une et indivisible ». Le rôle de Lamartine est particulièrement difficile : il doit lutter contre les socialistes qui veulent imposer leurs principes de société : il essaie donc de composer avec eux ; le

«parti de l'ordre» se demande si l'on peut avoir confiance dans ce chef. C'est grâce à son habileté et à son talent oratoire d'improvisation qu'il va obtenir ce qu'il a prévu.

Le 25 février, vers deux heures de l'après-midi, guidés par les chefs socialistes, les faubourgs arrivent à l'Hôtel-de-Ville, précédés du drapeau rouge, qu'ils veulent imposer comme drapeau de la nouvelle République. Lamartine, monté sur une chaise de paille, au milieu de la foule, finit par se faire entendre au milieu du tumulte.

Il salue la gloire de ceux dont la victoire a été si rapide, mais les invite à la modération et leur rappelle la nécessité de la discipline politique. Va-t-on aujourd'hui substituer une révolution de ven-

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geance et de supplices à la Révolution d'unanimité et de fraternité de la veille ? Mieux que le drapeau rouge, symbole du combat à mort entre les citoyens d'une même patrie, vaudrait le drapeau noir qui indique les édifices à respecter lors d'un siège. Devant les cris favorables ou hostiles, il prononce la phrase géniale : « Citoyens, vous pouvez faire violence au gouvernement ; il n'acceptera jamais un pareil deshonneur... Car le drapeau rouge que vous nous rapportez n'a jamais fait que le tour du Champ de Mars, traîné dans le sang du peuple en 91 et 93, et le drapeau tricolore a fait le tour du monde avec le nom, la gloire et la liberté de la patrie ! » La foule en délire crie : « Vive Lamartine ! Vive le drapeau tricolore ! » Mais une nouvelle poussée réclame le drapeau rouge et vocifère contre le gouvernement ; on tourne les armes contre son chef. Lamartine ne fut sauvé que par un homme du peuple blessé qui, se tournant vers la foule, s'écria : «Je mourrai mille fois pour conserver un bon citoyen à mon pays ». À ce symbole du peuple, les enragés s'attendrissent et Lamartine peut reprendre la parole, pour montrer que la République que l'on vient de fonder est un État, non avec des classes, mais égalitaire, avec un seul peuple formé de l'universalité des citoyens, et il invite à fraterniser. Le gouvernement réclamait quelques jours pour organiser la victoire du peuple. Et, pour l'étranger, la France doit conserver le drapeau tricolore, celui de ses victoires, non le drapeau rouge, drapeau d'un parti. « La France et le drapeau tricolore, c'est une même pensée, un même prestige, une même terreur, au besoin, pour nos ennemis ». Lamartine ajoute la nécessité de l'ordre. «Il exècre l'anarchie et la démagogie, mais veut un gouvernement fraternel ». La foule pleura et les armes tombèrent.

Il fallait rassurer l'Europe, pour laquelle le mot de «Répu- blique» rappelait 1792. Lamartine rédigea un manifeste : «La Révolution est le fait d'un grand peuple et la République prouve un degré de maturité politique ». La République de 48 n'est pas la guerre, mais la fraternité et la paix. Tous se sont ralliés : c'est le peuple qui gouverne, non la bourgeoisie égoïste cherchant une diversion ; or le peuple veut la paix et le travail : en lui les idées politiques ont pénétré. Par contre, si nous sommes attaqués, nous saurons nous défendre. Les traités de 1815 sont abolis, mais la République admet les divisions territoriales comme un fait, dans ses rapports avec les autres nations. Elle protègera toutes les libertés qui s'affirmeront chez les peuples. Par ses principes, Liberté, Égalité, Fraternité, son désir de paix intérieure et extérieure, la

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France déclare amitié et fraternité à tous les peuples.

Dès le 25 février, on a prévu des élections générales, fixées au 27 avril et que les socialistes auraient voulu retarder, pour une Assemblée nationale constituante. Le 26, on établit une Garde nationale de 1 200 hommes, composée de jeunes ouvriers, bien payés et dévoués à la personne de Lamartine, et une Garde mobile de 100000 hommes, venus des faubourgs. On passa une revue des deux troupes, ralliées au chef du gouvernement. Le 16 avril, les clubs et Louis Blanc organisent une manifestation populaire socialiste, à laquelle on doit répondre par la force. Après cette date l'armée entre dans Paris, ce qui rassure tout le monde.

Le 27 avril ont lieu les élections à l'Assemblée constituante.

Lamartine fut élu dans dix départements et totalisa 1600000 voix.

La première séance de l'Assemblée, le 4 mai, décida qu'il y aurait un Ministère exécutif, choisi et révocable par elle, un Président du Conseil et un Président de la République. Lamartine demanda qu'en attendant la Constitution une Commission exécutive de cinq membres fût établie. Constituée le 10 mai, elle comprenait Arago, Garnier-Pagès, Marie, Lamartine et Ledru-Rollin (dont Lamartine avait exigé la présence à ses côtés). Du côté de la droite, la popularité de Lamartine baisse.

Le 15 mai, une émeute, conduite par Albert et Barbès, envahit l'Hôtel de Ville. Lamartine se rend à cheval de l'Assemblée à l'Hôtel de Ville et rétablit l'ordre, ovationné par la foule. Les chefs du mouvement sont arrêtés ou en fuite. À la suite de l'insurrection du 23 mai, dans les quartiers pauvres de Paris, due au fait que le général Cavaignac, ministre de la Guerre, n'avait pas pris la peine de quadriller la ville avec des soldats, en mettant des canons aux carrefours, l'Assemblée, le 23 mai, prononça la déchéance de la Commission exécutive : c'était le résultat de l'entente entre Monta- lembert, Falloux, Thiers et le banquier Goudchaux. De plus Lamar- tine est accusé de détournement de fonds (un ou deux millions pour régler ses dettes, acheter des propriétés en France et à Lon- dres), d'avoir fait reculer les élections pour prolonger sa dictature, d'avoir conclu un accord perfide avec les communistes et fait des promesses irréalisables au peuple. La Commission d'enquête pré- sidée par Odilon Barrot lava Lamartine de toutes ces accusations.

Celui-ci fit deux discours important à l'Assemblée constituante : le 27 septembre, pour une Assemblée législative unique ; le 6 octobre, pour l'élection du Président de la République au suffrage universel, malgré les graves conséquences possibles. Avait-il

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encore l'espoir de pouvoir le devenir ?

Le 10 décembre, aux élections présidentielles, le Prince Louis-Napoléon Bonaparte obtint 5434326 voix, Lamartine 17910; Cavaignac et Ledru-Rollin en avaient plus que lui. Il ne fut pas élu député de Mâcon à l'Assemblée législative, mais plus tard, dans le Loiret, et un peu après, de nouveau, à Mâcon. Il refusa l'offre d'un ministère dans le gouvernement du Prince-Président.

Le 15 mars 1851, il prononça un discours pour défendre la Garde nationale, en rappelant qu'elle avait défendu le drapeau tricolore.

Son activité politique l'orienta vers le journalisme. En avril 1849, avec l'appui du financier Mirès, il fonda une revue mensuelle de 50 à 70 pages, grand format, Le Conseiller du Peuple, dont il était le seul rédacteur ; cette revue comportait un article politique et un commentaire des nouvelles. Il voulait donc être le «Fénelon du Peuple-Roi » ; il collabora aussi à La Presse, le journal de son ami, Émile de Girardin. En 1849, parut, en deux tomes, son Histoire de la Révolution de 1848.

Ayant jugé le prince Louis-Napoléon « modéré et clairvoyant », même s'il le voyait taciturne, ce qui pouvait être inquiétant, Lamartine ne croyait pas au coup d'État. Il avait cependant dit, le 6 octobre 1848 : «Je sais bien qu'il y a des moments d'aberration dans les multitudes ; qu'il y a des noms qui entraînent les foules, comme le mirage entraîne les troupeaux, comme le lambeau de pourpre attire les animaux privés de raison ! » Est-ce sa confiance en la lucidité instinctive du peuple, son idée de la Providence guide des nations, qui l'ont trompé ? ou a-t-il ignoré l'entourage du prince ? ou, ami de l'ordre et d'un pouvoir fort, dans l'attente de la conscience politique du peuple, ne voyait-il qu'un « monarque choisi par la volonté générale» pour assurer la stabilité et la grandeur de la France ? A-t-il été l'homme de l' Utopie ou le calculateur lucide et patient ?

Il y a eu pour Lamartine, comme pour Pindare, un signe d'élection, dès sa naissance. Alors qu'il était âgé de dix-huit mois, sa mère, fuyant la Terreur, l'avait emmené à Lausanne. Dès son arrivée à l'auberge, elle reçut la visite de trois Allemands, disciple du philosophe Saint-Martin. Le plus âgé prit l'enfant, l'examina et dit aux deux autres : «C'est lui », et il ajouta : «Il est marqué pour quelque chose de grand et d'inconnu ». Le samedi 20 janvier 1821, alors qu'il sortait de Naples, il se sentit illuminé par un rayon d'en Haut : l'idée d'une épopée de l'Humanité par visions succes-

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L'œuvre de Pindare, telle qu'elle a été transmise au-delà du monde grec, apparaît aux poètes capables de la lire, d'en analyser les éléments et d'essayer de rivaliser avec elle, comme la forme la plus parfaite d'une certaine Poésie.

Sur le plan des êtres, c'est un monde où dieux, héros et hommes sont rangés par clans, comme dans un monde aristocratique, selon une hiérarchie de la gloire octroyée par le Maître des dieux.

Le Poète, marqué d'un signe divin dès sa naissance, a conscience du rôle de porte-parole des événements ou des aspirations d'une époque, tantôt dans le monde aristocratique, tantôt dans le peuple, ou celui d'intermédiaire entre le monde divin et le monde humain, par la prière, comme le prêtre, par la connaissance de la volonté divine, reçue directement, comme le prophète.

Il a la certitude que la Poésie, langage parfait, apporte l'immortalité à la fois au Poète et à celui ou à ce qu'il chante : l'éloge d'un notable de son temps, est lié à la conviction que cette postérité sera plus durable que celle des inscriptions sur les monuments. Le « grand lyrisme » est exaltation.

Sur le plan des idées, le Poète élimine ce qui est impie et bas, mais la souffrance peut servir d'épreuve pour les forts.

Le Poème a une architecture savante, fondée plutôt sur l'association que sur une structure logique. Il comporte des maximes, expression de l'exemple moral.

Il contient un ou plusieurs mythes, en accord avec le personnage, l'environnement ou la situation. Il utilise une langue distincte de celle de la prose et comportant beaucoup d'images. Il associe l'ampleur de la strophe à celle de la phrase lyrique. Il sert de support à la musique et même éventuel- lement à une chorégraphie.

Mais si le mythe de l'inspiration demeure, si le mécénat se poursuit, l'éloge poétique des vainqueurs aux Jeux n'existant plus, les poètes qui s'inspireront de Pindare devront chercher de nouveaux « Héros » et, à partir d'une certaine époque, utiliser de nouveaux mythes. L'essence de la Poésie pourra prendre la forme du Symbole, qui associe étroitement pensée intuitive et image.

On peut alors se demander s'il existe un « pindarisme », comme il a existé un « pétrarquisme », les poètes ayant en commun une conception de l'Amour, des thèmes, des comparaisons et une forme rythmique : la poésie devenait un exercice intellectuel et technique autant que l'expression du sentiment.

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