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Dans la lenteur des nuits

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Academic year: 2022

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Texte intégral

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katia lemieuxdans la lenteur des nuits

K A T I A L E M I E U X

Dans la lenteur des nuits

ROMAN

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Dans la lenteur des nuits

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katia lemieuxdans la lenteur des nuits

Les Éditions Sémaphore 3962, avenue Henri-Julien Montréal (Québec)

h2w 2k2

514 281-1594

info@editionssemaphore.qc.ca www.editionssemaphore.qc.ca isbn : 978-2-923107-21-9 (papier) isbn : 978-2-923107-68-4 (pdf) isbn : 978-2-923107-69-1 (epub)

© Les Éditions Sémaphore et Katia Lemieux, 2011 Dépôt légal : BAnQ et BAC, 3e trimestre 2011 Diffusion Dimedia

www.dimedia.com/

Distribution du Nouveau-Monde www.librairieduquebec.fr/

Couverture :

Marie-Josée Morin m-j.morin@entrep.ca

Illustration de la couverture : Katia Lemieux

Éditions électroniques : Jean Yves Collette

jycollette@vertigesediteur.com

Nous remercions le Conseil des arts du Canada de l’aide apportée à notre programme de publication.

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K A T I A L E M I E U X

Dans la lenteur des nuits

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À Jean-Pierre

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Tu dors

dans le sommeil de l’autre

mille oiseaux dans le sommeil de l’autre et mon amour en toi

jusque dans le sommeil de l’autre je te laisse encore cette lumière surtout, tu éteindras

Normand de Bellefeuille

« Obscènes »

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Prologue

Mon frère Thomas m’a téléphoné tôt ce matin pour m’annoncer la nouvelle.

J’ai dit... je ne me souviens plus de ce que j’ai dit, et puis j’ai appelé l’aéroport pour faire une réservation.

« Le prochain vol pour Boston décolle de Beaufort ce matin à onze heures trente », m’a informée l’employée de la compagnie aérienne. « Vous quittez Boston pour Montréal à treize heures et votre transfert pour l’aéroport de Sherbrooke se fera à dix-huit heures, ce qui vous donne le temps de... »

Mais de quoi avais-je besoin maintenant ? De réconfort, et de parler à quelqu’un. Ce qui n’était pas facile, de nos jours les gens ont tendance à flairer le malheur et à s’excuser en douce avec des mots comme ci comme ça, sans rien de plus, parce qu’avec un petit peu de plus... Pour tout dire, ça ressemble à s’y méprendre à une carte de vœux anodine vendue en pharmacie.

Ensuite j’ai ramassé quelques vêtements, dont un costume d’été et une robe noire à peu près convenable pour une telle circonstance, le tout entassé dans une valise qui avait fait son temps. Après quoi je suis sortie et j’ai marché le long de l’océan jusqu’à épuisement. Thomas m’avait dit qu’il viendrait me prendre à l’aéroport dès mon arrivée, de ça je me souviens.

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Lila

L’avion descendit, plongea des nuages par une brèche et entra dans le bleu du ciel qui un instant m’éblouit par sa pureté. Si bleu, ce bleu, pareil à celui de l’océan que je venais de quitter. Consciente que je serais bientôt dans ce coin de pays qui m’a vue grandir. Le Québec, mon pays, peut-être aurait- il changé ? Tout change si vite pour qui parcourt la Terre. Tandis que l’appareil coulait lentement dans cette mer fluide, se déployait sous mes yeux ce fabuleux territoire d’Amérique parsemé çà et là de miroirs d’eau étincelants, telle une multitude de paillettes argentées. Puis semblable à une tapisserie molletonneuse apparut le vert de noir de la forêt étalée autour de l’aéroport. Les minutes tombaient les unes après les autres au son de l’altimètre, une chute inéluctable qui me rapprochait de ma destination. Le soubresaut de l’appareil entrant en contact avec la piste me tira de ma rêverie.

Le lourd transporteur roula, tourna pour se ranger en vue du débarquement des passagers, puis s’immobilisa. À mes oreilles, le sifflement des moteurs et mon pouls qui battait fort. Les secondes se consumaient, retombant en poussière invisible : un passage temporel relié à un chapitre de ma vie auquel je croyais avoir échappé.

Il était là, mon frère, parmi les gens qui attendaient. Je l’ai regardé, il m’a regardée. Pour me ressaisir, je me suis arrêtée un moment avant d’arriver jusqu’à lui. Il avait tout de même changé, voilà qu’il ressemblait à mon père : le même air grave, la même retenue. Puis je l’ai rejoint. Me serrant contre lui, il a balbutié : « Allez, viens ! Rentrons à la maison. »

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Sur le chemin du retour, j’éprouve un sentiment de confusion que le confort de la voiture, la circulation même fluide ne parviennent pas à dissiper. Il y a l’incertitude – une sorte de flottement que le silence laisse filtrer – les

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silhouettes découpées des arbres, le ciel lumineux qui ne reflète rien. Thomas dissimule mal l’appréhension qu’il éprouve envers moi. Notre conversation se limite aux commentaires sur les lieux que je redécouvre au fil du chemin.

Il y a le contrefort des Appalaches dans le bleu profond du ciel à l’horizon, les falaises d’ardoise et de granit taillées abruptes dans les montagnes, le long de la route qui serpente en couloir entre les villages que nous traversons.

Soudain, au sortir du défilé, le lac droit devant,

à l’ouverture sur les champs. Je ressens un choc en retrouvant ce paysage majestueux déroulé devant moi. Au loin, la ville de Mégantic semble endormie sous le soleil. Nous arrivons à Piopolis, et mon cœur fait un bond en revoyant le village baignant dans le calme de cette journée d’été. Dispersés sur le lac, des bateaux de plaisance, leurs voiles agitées de frissons lents, la plage en contrebas, les grands pins sous lesquels on devine étendus des baigneurs. Et face à l’église, à deux pas de l’auberge, le gazebo de la pointe du quai :

— Piopolis n’a pas vraiment changé... Il hausse les épaules :

— Plus touristique qu’avant, répond-il, et il me pose la question : « Et toi, Lila, tu vas rester longtemps ici ? »

— Je ne sais pas... Deux semaines, trois peut-être. On verra, d’accord ?

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Simon

La chaleur, la poussière, l’ennui le jour et que la nuit pour vivre vraiment.

C’est par une telle journée qu’Elle a fait son apparition. La revoir, voilà à quoi j’ai d’abord songé. Je ne sais pourquoi cette idée m’est venue à l’esprit.

Simple curiosité ? Possible... Après tout, rien de plus normal, me suis-je dit pour me convaincre.

Nous étions à la mi-août mais il faisait encore très chaud. En milieu de journée, le thermomètre oscillait entre vingt-cinq et trente degrés pour ne redescendre que très lentement après le coucher du soleil. La chaleur et l’humidité qui duraient depuis des semaines avaient ralenti le rythme de nos activités. La nuit apportant peu de repos, nous fonctionnions à une cadence qui nous rendait léthargiques, alternant entre le désir d’être ailleurs, dans une piscine ou sur une plage, et l’obligation d’exécuter nos tâches quotidiennes. Il suffisait de passer d’un édifice climatisé à la touffeur de la rue pour éprouver le besoin de s’installer à l’ombre et boire n’importe quoi de désaltérant.

Cette torpeur me rappelait trop bien un autre été, semblable à celui-ci, un été d’il y a longtemps. Avec soulagement, j’ai quitté mon bureau et, tandis que je me dirigeais vers la sortie, ma pensée ne cessait de dériver vers Elle.

J’étais conscient des conversations animées qui constituaient le bruit de fond des couloirs de l’édifice, mais je n’arrivais pas à chasser de mon esprit l’idée de la présence de Lila, ici, parmi nous. Depuis le temps qu’elle était partie...

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Lila

Je suis chez Thomas et Chloé depuis quelques heures, ma sœur Caroline et Hulan, son mari, sont venus se joindre à nous. Assis dans la véranda devant une sangria, nous discutons des funérailles. Il y a la chaleur, le choc du décès et moi, tombée dans leur vie comme une pierre trop chaude. Déjà assez compliqué tout ça pour eux. Oui, préférable que je m’installe dans la maison de maman.

Elle semble écouter, Caroline, mais elle n’écoute pas. Secouée par les événements, elle va et vient, s’assoit une minute, se relève, hoche la tête sans raison. Le front soucieux de qui cherche à comprendre, les mains ouvertes devant elle en signe d’impuissance, elle dit d’une voix consternée : « Comment c’est possible ? » Son regard s’éloigne, sans but, puis s’adressant à Hulan, elle demande : « Tu veux bien aller jeter un coup d’œil sur Kim ? », et il se lève et va dans la chambre voir si tout va bien. Il revient et tout va bien : la petite dort à poings fermés.

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Maman avait pris soin de tout prévoir, « juste au cas où ». S’ils ne m’ont pas contactée plus tôt c’est qu’elle ne le voulait pas. Intuitive, ma mère ? Le médecin leur avait dit de ne pas trop s’inquiéter : « Ce n’est qu’une opération de routine », avait- il ajouté, rassurant. Mais voilà : après elle n’avait pas repris conscience, elle avait sombré dans le coma. En quelques heures c’était terminé. Une fin inattendue, brutale : « Elle était trop jeune pour mourir », dit Caroline d’une voix morne. Les mains serrées entre les genoux, elle éclate en sanglots. Interdits, nous ne savons que dire. Thomas s’approche d’elle, la prend par les épaules avec douceur. Je me sens impuissante pour elle, pour nous ; incapable de dire ou faire quoi que ce soit, simplement ébranlée moi aussi, sans mots.

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Ils n’ont rien oublié, se sont occupés d’aviser parents et amis puis le curé, ont veillé au moindre détail : le salon funéraire, le service funèbre, la mise en terre et pour conclure, un repas chez mon frère pour les intimes. Ce qu’elle aurait aimé, croient-ils.

L’atmosphère semble électrifiée. Curieux, craintifs, les fils de Thomas tournent autour de nous, nous regardent sans comprendre. Hulan se charge de les distraire, de les éloigner de la cuisine et de nous. Moments qui stagnent, s’enlisent dans le non-dit. L’attente en moi, pourtant rien ne se produit.

Pour ne pas me sentir inutile, j’aide Chloé à préparer le repas. Caroline s’est installée dehors pour le boire du bébé. Trop crevé pour être encore efficace, Thomas s’est endormi dans le salon. Il y a une sorte d’accalmie, un semblant de répit. Les heures passent, le téléphone sonne à intervalles réguliers : des parents, des amis qui viennent aux nouvelles, qui appellent pour demander si nous avons besoin d’aide. Nous sommes là, ensemble, et tout paraît s’organiser sans heurt. Je n’aurai qu’à signer des documents.

Approuver. Remercier.

Nous parlons de tout et de rien. Comment parler de ce qui importe tant ? Comment ? Somnolente, je bois mon verre, écoutant ce qui se dit autour de moi. Tableau chinois : le soleil couche l’ombre oblique d’un cerisier sur le mur en crépi de la maison. Devant moi, dans le calme de la nuit qui vient, le lac argenté sous la lumière déclinante de la fin de journée.

Il fait trop bon pour être ici. Là-bas, la mer est basse à cette heure-ci, et j’irais marcher longtemps avant de rentrer.

Sur la grève où je descends, l’eau dans sa paisible indolence me redevient familière, et j’éprouve une certaine consolation à rester assise là sans rien demander au ciel, aux étoiles, sans rien exiger de la lune que son scintillement sur la surface étalée paresseusement devant moi. Mes pieds foulent le territoire de mes racines et mon cœur se penche en larmes sur le regret de ma mère, vers la lanterne de lune dans l’eau qui console, avec le sentiment que rien ne me sera demandé que je ne puisse accorder à son âme.

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Difficile de rétablir le contact, si fragile le sentiment d’affection qui nous lie. Nos rapports se sont transformés, moins spontanés ils ont pris une autre dimension. La nostalgie de ce qui n’est plus, telle une main glacée, me serre le cœur et je me demande ce que nous sommes devenus les uns pour les autres.

Partie vivre ailleurs, je les ai laissés derrière moi, pour eux, en somme, une désertion. Comme si je les avais trahis, que je devais comprendre à demi- mot que je les avais abandonnés, que j’aurais dû, qu’il aurait fallu... Je devine ce qu’ils ressentent et ne peux les en blâmer, pourtant ce malaise ne fait que confirmer notre incapacité à nous rejoindre et nous soutenir mutuellement.

Mais il n’y a pas de coupable, c’est le fait de l’existence et du passage du temps.

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C’est d’abord l’odeur qui me prend, l’odeur tonique, un peu acide du bois de cèdre qui se répand dans l’air du soir. Sur le guéridon où je dépose les clés, le halo sombre que dessine la lampe lorsque j’allume. Le mouvement de mon ombre se déploie dans la lumière sur le parquet de bois verni ; le parfum de cèdre se mélange à celui de ma mère, dans le sillage duquel j’avance. Je me sens désorientée dans cet univers figé, arrêté au moment de son départ ; inapte à réinvestir ces lieux qui ne me renvoient rien, ne me disent rien à moi, l’intruse que je suis devenue.

Dans chaque pièce où je pénètre, tout me paraît dans le même ordre que lorsque je vivais ici. Étonnée de constater que les objets si bien connus n’aient plus la même signification, que la maison ne parle plus le même langage. Je cherche ce qui pourrait me rappeler que j’ai vécu ici, mais dans ma tentative de remise en place, je ne rencontre que le vide. Plus que ce sentiment de perte, et je tourne en rond sans retrouver la trace de mon histoire. Est-ce moi qui, dans mon souvenir, l’aurais idéalisée ?

Je traverse le couloir et me retrouve au pied de l’escalier, que je monte, qui grince toujours à la même marche sous mes pas. Ma main court sur la rampe

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de bois polie par l’âge. La première chambre à droite sur le palier, la sienne, où je n’entre pas. Par la porte entrebâillée qu’éclaire un réverbère, les mêmes meubles, le lit parfaitement tiré. Je ferme la porte et avance jusqu’à ma chambre où rien n’a changé, et j’éprouve une sorte de déchirement à voir que même ici, rien ne me rend aux sensations d’avant. J’ouvre ma fenêtre et, dans le calme venu, j’entends nager la tête des arbres à contre-courant du vent tranquille, seuls leurs crânes aigus émergent dans la nuit du ciel, supportés par la masse compacte des corps touffus.

La maison de mon enfance, ce paquebot abandonné, échoué là, mais depuis combien de temps ? Un univers à présent dépouillé de magie que je tente de réinvestir de la puissance affective et de la singularité que lui conférait ma mémoire. Les pièces de ce lieu tant aimé que je traverse l’une après l’autre : impression de me déplacer devant les vitrines d’un musée à contempler les vestiges d’un naufrage ; images troubles qui ne sont autres que celles de mes souvenirs. Et je réalise que le vrai moment du retour n’est pas celui où l’on pose ses bagages. C’est celui où le silence s’installe autour de soi après l’espoir, le doute, les questions restées en suspens.

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Dans la lenteur des nuits de Katia Lemieux composé en Jenson corps 18

a été mis en ligne en août deux mil douze.

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