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Surditéslégères et surdités unilatérales chez l’enfant : quelle importance ?

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Academic year: 2022

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Texte intégral

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 J. Cherpillod  F. Waridel

introduction

Le dépistage néonatal de la surdité et la sensibilisation aux problèmes d’audition de l’enfant sont devenus la règle. C’est un grand progrès mais qui induit de nouvelles questions. Par- mi celles-ci : faut-il s’inquiéter ? que faire face à un enfant qui souffre d’une perte auditive modérée ou unilatérale ? Ces deux situations pas- saient inaperçues durant des années auparavant et étaient le plus souvent ba- nalisées. A juste titre ou non ?

surditéslégères

Les déficiences auditives provoquent une diminution de la perception des sons et sont classées, selon la perte en audiométrie tonale, en fonction de leur gravité. La perte totale mesurée en décibels (dB) est calculée à partir de la perte en dB aux fréquences de 500, 1000, 2000 et 4000 Hz. L’audition est dite normale pour une perte ne dépassant pas 20 dB car une telle perte n’entraîne pas d’inci- dence sociale. Pour une perte tonale moyenne comprise entre 21 et 40 dB, la sur- dité est caractérisée de légère.1 Dans ce cas, la parole est perçue à voix normale, mais elle est difficilement perçue à voix basse ou lointaine et dans le bruit. En cas de perte auditive plus importante, on pose le diagnostic de surdité moyenne (perte de 41 à 70 dB), sévère (perte de 71 à 90 dB), profonde (perte de 91 à 119 dB) et de cophose au-delà de 120 dB. Il est clairement établi depuis longtemps que les enfants présentant une surdité moyenne, sévère ou profonde souffrent de troubles de la communication, de retard d’acquisitions langagières et sco- laires et de difficultés psychosociales.2

Le diagnostic de surdité légère regroupe les atteintes auditives bilatérales légères, la surdité unilatérale et les pertes auditives sélectives aux hautes fré- quences.3 Elles peuvent être secondaires à un défaut de transmission aérienne du son, le plus souvent en cas d’otite sécrétoire. Des épisodes répétés d’otite sécrétoire peuvent entraîner un retard et des troubles dans l’acquisition du lan- gage, des problèmes d’attention et de moins bonnes performances scolaires.3

Plusieurs études ont démontré l’influence des troubles auditifs mineurs sur Minimal or unilateral hearing loss in

children : is it a problem ?

The word «minimal» or «mild» hearing loss seems to imply that their effects are mild or negligible. The literature supports that they can have a significant impact on educative end edu- cational development of young children and contribute to problems in fields of social func- tion, communication and educational achie- vement.

Unilateral hearing loss in children has been considered for long to be of little consequen ce.

In fact it causes problems in speech and lan- guage development, speech understanding, especially in noisy environments, and school results. Early diagnosis, follow-up during pre- school and school ages are mandatory.

Rev Med Suisse 2010 ; 6 : 397-400

Les pertes auditives caractérisées de légères ou mineures ont parfois été méconnues ou paraissaient avoir des effets négli- geables. Pourtant un nombre croissant d’études a permis de démontrer qu’elles ont un impact important sur le développe- ment du jeune enfant. Elles se manifestent par des difficultés de communication, sociales et scolaires. Ces pertes auditives doi- vent donc être détectées le plus tôt possible pour permettre une prise en charge spécialisée ciblée.

De même, la surdité unilatérale chez l’enfant a été longtemps ignorée ou banalisée. Elle induit cependant des difficultés de compréhension, en particulier dans le bruit, et des risques de retard de langage et de difficultés scolaires significatifs. Il faut y penser, la diagnostiquer tôt et prendre les mesures de suivi préscolaires et scolaires adéquates.

Surdités légères et surdités unilatérales chez l’enfant : quelle importance ?

le point sur…

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 24 février 2010 Drs Jacques Cherpillod 

et François Waridel 

Service oto-rhino-laryngologie  CHUV et Hôpital de l’enfance  Montétan 18, 1004 Lausanne  Jacques.Cherpillod@chuv.ch  François.Waridel@chuv.ch

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les performances scolaires. Une étude a évalué et corrélé l’audition et les résultats scolaires de 1228 enfants.4 La prévalence de la surdité légère était de 5,4%. Les enfants atteints présentaient quatre fois plus de problèmes liés à la communication et trois fois plus de difficultés scolaires.

Le taux de redoublement de ces enfants était de 30% lors des trois premières années d’école primaire, et augmen- tait jusqu’à 50% à la fin de leur neuvième année scolaire.

Ces enfants présentaient également plus de problèmes comportementaux que les normo-entendants.

D’autres études ont démontré que les enfants avec une surdité légère étaient en difficulté scolaire en raison de problèmes de perception auditive dans les locaux scolai- res.5 Dans les salles de classe d’une école primaire, le bruit de fond généré par les enfants est important, de l’ordre de 60 dB. Crandell a étudié la perception de la parole dans des locaux avec un bruit de fond similaire au niveau habituel retrouvé dans les écoles primaires. Les performances de perception langagière de douze enfants normo-entendants, âgés de cinq à quinze ans, ont été comparées à celles de douze enfants avec une surdité mineure. La reconnaissan ce des phrases dans chaque groupe était supérieure à 90%

dans le calme. Dans le bruit, les performances diminuaient dans les deux groupes, mais celles des enfants sourds étaient davantage altérées avec des résultats jusqu’à 33%

inférieurs à ceux des enfants normo-entendants. Ces ré- sultats démontrent que la perception de la parole est af- fectée par un bruit de fond retrouvé habituellement dans une salle de classe ordinaire et que la gêne est significati- vement plus importante chez les enfants présentant une déficience auditive légère.

Une étude récente a démontré que les enfants avec une perte mineure de l’audition n’étaient pas capables de maintenir une écoute attentive lorsqu’ils étaient occupés par une autre tâche visuelle.6 Les résultats de cette étude montrent aussi que ces enfants peuvent pallier une légère déficience de l’audition par une concentration accrue mais que cette attention supplémentaire fait défaut lorsqu’ils sont occupés à d’autres tâches et, dès lors, leurs performan- ces auditives diminuent.

L’ensemble de ces résultats prouve l’importance non négligeable des déficiences auditives mineures. L’identifi- cation précoce de ces enfants est la première étape criti- que pour une prise en charge appropriée. Pour ces raisons, il est recommandé de détecter tous les enfants avec une atteinte même mineure de l’audition par un dépistage néonatal systématique de l’audition.7 Le suivi attentif des pédiatres et le dépistage systématique de l’audition dans le cadre scolaire sont également les moyens indispensables et nécessaires à la détection de ces troubles. La précocité du diagnostic et la reconnaissance des difficultés secon- daires à ce handicap permettront une prise en charge mé- dicale et pédago-thérapeutique adéquate et optimale.

surditéunilatérale

Marion Downs écrivait en 1978 : «les ORL ne sont pas concernés par la surdité unilatérale de l’enfant… si ce n’est pour dire aux parents que ce n’est pas un handicap».8 En 2007, elle signe un éditorial intitulé : La perte auditive unila-

térale chez l’enfant : un appel aux armes.9

Rappelons que la mesure en décibels est logarithmique, que l’intensité double tous les 3 dB, que la voix parlée nor- male est aux alentours de 55 à 60 dB, qu’un grand magasin ou une classe enfantine présente un bruit de fond de 60 dB, que le rapport entre la voix que l’on veut comprendre et le bruit de fond doit être de 15 dB pour être très confortable, et de 0 dB au minimum, ceci pour un sujet entendant.

Prévalence et étiologie

La surdité unilatérale L 45 dB survient chez trois en- fants/1000, la surdité unilatérale L 25 dB chez 13/1000.

L’étiologie reste inconnue dans la moitié des cas si l’at- teinte est congénitale, mais on l’estime héréditaire en gé- néral. Les causes postnatales sont le plus souvent virales ou postméningitiques. A cela s’ajoutent les malformations de l’oreille moyenne et externe, qui ne sont en général pas corrigibles chirurgicalement avec des résultats audiologi- ques valables.

Evolutivité

Deux études10,11 ont montré une évolutivité de la sur- dité unilatérale chez 5 à 15% des enfants. En particulier, il faut noter le risque d’évolutivité chez les enfants atteints d’une infection à cytomégalovirus (CMV) prénatale. Un ris- que de bilatéralisation est également évoqué.

Répercussions physiologiques

L’audition binaurale apporte :

• une sommation des sons, correspondant à une amplifi- cation de 3 à 6 dB, une amélioration de la compréhension des mots de 18% et des phrases de 30% ;

• la suppression de l’ombre acoustique de la tête qui est de 6,4 dB en passant du bon au mauvais côté. S’il y a un bruit de fond du côté opposé au signal utile, cette valeur double. Cet effet est maximal pour les hautes fréquences, les plus importantes pour la compréhension, en particulier des consonnes ;

• une meilleure localisation des sons par la différence in- teraurale d’intensité et de temps d’arrivée du signal ;

• une meilleure capacité à comprendre dans le bruit : meil- leure différenciation message/bruit de fond par différence interaurale de temps.

La surdité unilatérale fait perdre tous ces avantages. Il a été toutefois prouvé que la compréhension des phrases est bonne dans le silence. Par contre, avec du bruit de fond ou de la réverbération, la compréhension des enfants avec surdité unilatérale diminue de manière importante, en par- ticulier du côté de leur oreille malentendante.

Conséquences développementales et scolaires

Une méta-analyse des articles sur ce sujet11 entre 1966 et 2003 a montré, pour les enfants malentendants d’une oreille que :

• 27,5% avaient un retard significatif de développement du langage ;

• 59% avaient une histoire de difficultés scolaires ou com- portementales, proportionnelles à la sévérité de leur sur- dité unilatérale ;

• 24% répétaient au moins une année scolaire (contre 2%

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dans le groupe témoin) et 41% ont eu besoin d’une aide pédagogique (contre 8,6% pour le groupe témoin). Le pro- blème était plus marqué pour les enfants sourds de l’oreille droite.

Comme toujours dans les méta-analyses, les critères d’in- clusion étaient variables et on peut estimer que la sélec- tion était biaisée vers les situations les plus graves, les autres n’étant pas dépistées. De plus, il existe quelques études montrant au contraire une absence de handicap.

Traitement et prise en charge

La surdité unilatérale n’est pratiquement jamais curable, soit parce qu’elle est neurosensorielle, soit parce qu’elle est mécanique mais sans possibilité de chirurgie fonction- nelle efficace. Il faut donc se concentrer sur son diagnostic, son suivi et son accompagnement.

Le diagnostic se fait en période néonatale au moyen du dépistage par otoémissions acoustiques, à condition qu’il soit effectué des deux côtés. Plus tard, il est de la responsa- bilité du médecin traitant d’y penser en cas de méningite, de plainte auditive des parents (moins bonne compréhen- sion dans le bruit, mauvaise localisation), de retard de parole et de langage. Il faut garder en tête la possibilité d’attein- tes évolutives, en particulier après une infection à CMV.

Après le diagnostic, un contrôle audiologi que annuel est nécessaire pour rechercher une aggravation ou une éven- tuelle bilatéralisation.

Le suivi développemental doit être scrupuleux, en par- ticulier celui du langage.

En âge scolaire, les enseignants doivent être sensibilisés au problème des surdités légères et unilatérales, notamment aux difficultés dans le bruit et les environnements réver- bérants. L’enfant doit être placé adéquatement, près de

l’enseignant et du bon côté, en cas d’atteinte unilatérale, et ses résultats doivent être évalués régulièrement en fonc- tion de ce handicap, invisible mais réel. Si nécessaire, une aide pédagogique familiarisée avec cette problématique doit être mise en place.

Sur le plan auditif, en cas de problème, on peut envisa- ger un système FM avec micro-émetteur porté par l’ensei- gnant et récepteur sur la bonne oreille de l’enfant, ce qui diminue le problème du bruit de fond, éventuellement un système ostéo-implanté sur la mastoïde (BAHA) fréquem- ment utilisé chez l’adulte sourd unilatéral et qui transmet le son par voie osseuse à l’oreille entendante. Ces systèmes sont toutefois «stigmatisants» pour l’enfant et leur indica- tion doit être pesée avec soin. Une implantation cochléaire unilatérale est même discutée par certains mais n’est pas (encore ?) d’actualité.

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Implications pratiques

Les surdités légères impliquent des difficultés scolaires, socia- les et langagières

Bien que passant inaperçus au quotidien, ces troubles audi- tifs doivent être détectés au plus tôt pour optimiser leur prise en charge

La surdité unilatérale doit être dépistée précocement et suivie sur le plan audiologique et du développement

La surdité unilatérale est susceptible de causer retard de lan- gage et difficultés scolaires : les parents et les enseignants doi- vent y être sensibilisés et une aide pédagogique doit être mise en place

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1  Bureau international d’audiophonologie. Recomman- dations et classification audiométrique des déficiences auditives.

2  Bess FH, McConnell FE. Education and the hearing impaired child. Audiology St. Louis, MO, CV Mosby, 1981.

3  ** Tharpe AM, Bess FH. Minimal, progressive, and fluctuating hearing losses in children. Characteristics, identification, and management. Pediat Clin North Am 1999;46:65-78.

4  Gravel JS, Wallace IF. Early otitis media, auditory abilities, and educational risk. Am J Speech Language Pathol 1995;4:89-94.

5  Crandell CC. Speech recognition in noise by child- ren with minimal degrees of sensorineural hearing loss.

Ear and Hearing 1993;14:210-6.

6  McFadden B, Pittman A. Effect of minimal hearing loss on children’s ability to multitask in quiet and in noise.

Language, speech and hearing services in the schools 2008;39:342-51.

7  ** Joint Committee on Infant Hearing (JCIH). Joint Committee on Infant Hearing 2007 position statement : Principles and guidelines for early hearing detection and intervention programs. Pediatrics 2007;120:898-921.

8  Northern J, Downs M. Hearing in children, ed 2.

Baltimore : Williams and Wilkins, 1978;143.

9  Downs M. Unilateral hearing loss in infants : A call to arms. Int J of Audiology 2007;46:161.

10 Song JJ, et al. Unilateral hearing loss in children. The importance of temporal bone computed tomography and audiometric follow-up. Otology and Neurotology 2009;30:604-8.

11  ** Cho Lieu J. Speech-language and educational con- sequences of unilateral hearing loss in children. Arch Otolaryngol Head Neck Surg 2004;130:524-30.

*  à lire

**  à lire absolument

Bibliographie

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