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Problèmes choisis de liquidation du régime matrimonial

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Academic year: 2022

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Proceedings Chapter

Reference

Problèmes choisis de liquidation du régime matrimonial

BADDELEY, Margareta, TERRIER, Christian

BADDELEY, Margareta, TERRIER, Christian. Problèmes choisis de liquidation du régime

matrimonial. In: Pichonnaz, Pascal, Rumo-Jungo, Alexandra. Droit patrimonial de la famille . Genève : Schulthess, 2004. p. 119-145

Available at:

http://archive-ouverte.unige.ch/unige:17148

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(2)

Problèmes choisis de liquidation du régime matrimonial

Margareta Baddeley, Professeure à l'Université de Genève Christian Terrier, Notaire à Pully

Sommaire

1. Casus n° 1 (traité par Christian Terrier) •••••• _ ... __ ... _ ••• _ ••• _ •• _ •••••• _._ •••••• 120

A. Donnée ... 120

B. Introduction ... 120

1. Éléments distinctifs de la donnée ... 120

2. Phases de la liquidation du régime de la participation aux acquêts ... 121

C. Dissociation des patrimoines des époux ... 122

1. lmmeuble ... 122

2. Dette hypothéeaire ... 122

3. Créance ... 122

4. Synthèse ... 122

D. Dissociation des biens propres et des acquêts de chaque époux ... 123

1. Immeuble ... 123

2. Dette hypothéeaire ... 123

3. Créanoe de l'épouse ... 124

4. Récompenses en faveur des acquêts du mari ... 124

5. Synthèse ... 125

E. Répartition de la plus-value ... 1 26 1. Montantdeiaplus-value ... 126

2. Créance de l'épouse ... 126

3. Récompenses en faveur des acquêts du mari ... 126

4. À quelle masse la plus-value correspondant à la partie non remboursée de la dette profite-t-elle? ... 128

5. Synthèse ... 131

II. Casus 2 (traité par Margareta Baddeley) ... _ ... _ ... 133

A. Donnée ... 133

B. Solution ... 134

1. Liquidation du régime matrimonial ... 134

2. La situation de ce même couple en cas de séparation de biens (question b) ... 143

Bibliographie ... _ ... _ ... _ ... _ ...

+ ... _ ...

145

(3)

J. Casus nO 1 (traité par Christian Terrier)

A. Donnée

Les époux A se sont mariés en 1977.

Peu avant le mariage, le mari avait acquis un terrain à bâtir pour le prix de Fr.

50'000.-. Un montant de Fr. 40'000.- provenait de ses propres économies et le solde de Fr. 10'000.- avait été avancé par la future épouse. Celle-ci avait prélevé les fonds sur ses économies personnelles.

En 1979, une villa a été construite sur le terrain du mari pour le prix de Fr. 200'000.-. Le coût de construction a été réglé à concurrence de Fr. 30'000.- au moyen de fonds épargnés par le mari en cours de mariage et pour le solde de Fr. 170'000.- par un emprunt hypothécaire contracté par le mari. Les époux ont occupé personnellement l'habitation dès l'achèvement des travaux.

Une procédure en divorce a été ouverte en 2003.

La dette hypothécaire a fait l'objet d'amortissements réguliers au moyen des revenus courants du mari. À la date de la dissolution du régime matrimonial, elle se trouvait ramenée à Fr. 90'000.-.

La valeur vénale actuelle de l'immeuble est estimée à Fr. 450'000.-.

Comment la valeur de l'immeuble se répartit-elle entre les diverses masses matrimoniales?

B. Introduction

1_ Éléments distinctifs de la donnée

Nous avons affaire à un immeuble qui a été acquis au seul nom du mari, pour partie avant le mariage (le terrain) et pour partie pendant le mariage (construction de l'habitation). Les deux conjoints ont contribué à l'acquisition du terrain; pour la construction de la villa, il a été fait appel à des acquêts du mari et à un emprunt hypothécaire. Au moment de la liquidation du régime matrimonial, l'immeuble jouit d'une plus-value conjoncturelle.

Est admise l'application du régime matrimonial légal de la participation aux acquêts (CC 181 et 196 ss).

120

(4)

2. Phases de la liquidation du régime de la participation aux acquêts

Le régime de la participation aux acquêts connaît deux catégories de biens, les propres et les acquêts. Soit, pour les deux conjoints, quatre masses de biens, qu'il convient normalement de séparer au moment de la liquidation. Cette liquidation se déroule en 4 phases 1

La première phase consiste à dissocier les patrimoines des deux époux, opération dans le cadre de laquelle il importe également d'identifier les éventuelles créances entre conjoints.

Aprés avoir déterntiné ce qui revient à chacun des conjoints, on peut passer à la deuxième phase. Il s'agit maintenant de dissocier les biens propres et les acquêts dans le patrimoine de chaque époux. Il convient en outre d'exantiner si des récompenses doivent être prises en considération entre les biens propres et les acquêts d'un même époux.

Après ces deux premières phases, l'ensemble du patrimoine conjugal peut être réparti en quatre comptes ou dans un tableau comprenant 4 colonnes, respectivement pour les propres du mari, les propres de l'épouse, les acquêts du mari et les acquêts de l'épouse.

La troisième phase consiste à déterminer le bénéfice ou le déficit de chaque époux.

La quatrième phase de la liquidation comprend la répartition des bénéfices respectift et, au besoin, l'établissement d'un état final des créances entre époux.

Nous nous arrêterons ici aux deux premières phases, qui mènent au tableau en 4 colonnes.

DESCHENAux/STEINAUERlBADDELEY. 507 ss.

(5)

c. Dissociation des patrimoines des époux

1. Immeuble

Il est inscrit au Registre foncier au seul nom du mari; les époux n'ont pas manifesté l'intention de l'acquérir en copropriété. Il s'agit donc d'un bien du mari.

2. Dette hypothécaire

Les biens du mari sont grevés de la dette, dont le mari est le seul débiteur.

3. Créance

Pour sa contribution de Fr. 10'000.- à l'achat du terrain, l'épouse jouit d'une créance contre le mari. En effet, la donation ne se présume pas et l'investissement n'a donné lieu à aucune contre-prestation. En vertu de l'art.

206 al. 1 CC, cette créance participe à la plus-value du bien acquis, puisqu'il s'agit indiscutablement d'une contribution à l'acquisition ou, si l'on se place à la date du mariage, à la conservation de l'immeuble (créance variable). À noter que cette créance ne participerait pas à une moins-value2Le calcul du montant de la créance sera examiné plus bas.

4. Synthèse

BiensdeM. BJem de

"

M-

immeuble 450"000

dette hypothécaire -90'000

créance CC 2061 pour contribution à -10'000 10'000

l'acquisition du terrain (:mQnfilll: mYi~Qm:)

350'000 10'000

Néanmoins, l'art. 206 al. l CC ne garantit pas le nominal de chaque contribution prise séparément. Il est donc concevable qu'un époux soit appelé à participer à une moins-value, si celle-ci est compensée par une plus-value réalisée sur d'autres investissements; cf.

DESCHENAUXlSTEINAUERIBADDELEY, 521, n. 1282.

122

(6)

D. Dissociation des biens propres et des acquêts de chaque époux

1.

Immeuble

Le terrain ayant été acquis avant le mariage, il se rattachait nécessairement, dès le début du régime, aux biens propres du mari (CC 198/2).

La construction de la villa en cours de mariage n'a pas eu d'incidence sur ce statut Dans le régime de la participation aux acquêts, la doctrine (ou à tout le moins la doctrine dominante) exclut la possibilité d'une subrogation patrimoniale partielle ou remploi proportionnel'. L'immeuble appartient soit aux biens propres, soit aux acquêts; il ne peut avoir un statut mixte.

Par ailleurs, en vertu du principe de l'accession (CC 667), le terrain et la construction forment un tout. On ne saurait les dissocier, car ils forment un bien unique.

2. Dette hypothécaire

Dans un arrêt du 27 février 1997" le Tribunal fédéral - non sans réserver certains cas exceptionnels - a considéré qu'une dette hypothécaire devait être rattachée à la masse à laquelle l'immeuble appartient, soit ici les biens propres du mari.

Le Tribunal fédéral se fonde sur l'art. 209 al. 2 CC: <<une dette grève la masse avec laquelle elle est en rapport de connexité ou, dans le doute, les acquêts» 5

Il motive sa position comme suit: «Contrairement à la jurisprudence relative à l'ancien droit matrimouial6, la seule existence d'une hypothèque n'amène pas sans autre à considérer qu'il y a acquisition à titre onéreux à attribuer aux acquêts; au contraire, l'octroi d'un crédit entraîne une moins-value correspondante de l'immeuble grevé d'un droit de gage immobilier, raison pour laquelle une hypothèque, en tant que dette, doit grever la masse à laquelle est attribué l'immeuble» 7

4

DESCHENAux/STEINAUERIBADDELEY, 416 B., n. 1033 s.

A TF 123 III 152, JdT 1997 1 626.

DESCHENAUxiSTEINAUER!BADDELEY, 419 S., n. 1039.

ATF 116 II 225, JdT 1991 1226.

ATF 123 III 152, c. 6b1aa, JdT 1997 1 626.

(7)

3. Créance de l'épouse

La créance se rattache aux biens propres de l'épouse, puisqu'elle a pris naissance avant le mariage (CC 19812).

La dette correspondante grève les propres du mari, en raison du rapport de connexité avec l'immeuble rattaché à cette masse (CC 209ll)8.

4. Récompenses en faveur des acquêts du mari

a. Contribution de Fr. 30'000.- au paiement du coOt de construction de la villa

Pour cette prestation, les acquêts du mari, qui ont contribué à l'acquisition d'un bien de l'autre masse, bénéficient d'une récompense contre les propres du mari.

En vertu de l'art. 209 al. 3 CC, cette récompense participe à la plus-value du bien objet de l'investissement (récompense variable). À noter que la participation interviendrait aussi en cas de moins-value.

b. Amortissement bypothécaire de Fr. 80'000.-

Sur le plan interne, les acquêts du mari ne sont pas grevés de la dette hypothécaire et n'ont donc pas à supporter les amortissements. Pour cette prestation, ils bénéficient aussi d'une récompense contre les propres du mari.

n

s'agit à nouveau d'une récompense variable. On admet en effet que la prise en charge des amortissements représente une contribution à l'acquisition de l'immeuble9

c. Intérêts bypothécaires

Ils ont certainement été réglés au moyen des acquêts du mari.

Si le bien est productif de revenus, les intérêts de la dette bypothécaire sont à la charge des acquêts de l'époux propriétaire, du fait que les revenus rentrent dans cette masse selon l'art. 197 al. 2 ch. 4 CC'·.

10

124

DESCIŒNAux/STEfNAUERlBADDELEY, 547, n. 1350 s.

IDEM. 558, n. 1384.

DESCHENAux/STEINAUERIBADDELEY,420, n. 1039 et 558 S., n. ) 387.

(8)

Cette hypothèse n'est pas réalisée in casu, car le couple habitait la villa. La prise en charge des intérêts incombait néanmoins aux acquêts du mari au titre de contribution à l'entretien du ménage selon l'art. 163 CC". Dès lors, cette prestation ne donne pas lieu à une récompense. Il en irait d'ailleurs de même si l'immeuble avait appartenu à l'épouse.

Dans les cas assez rares où la prise en charge durable des intérêts donne lieu à une créance en faveur de l'autre conjoint ou à une récompense en faveur de l'autre masse du conjoint propriétaire, ladite créance ou récompense participe à la plus-value12

s.

Synthèse

(Créance et récomoenses sans la oarticipation à la olus-value)

immeuble dette hypothécaire

créance CC 206 1 pour contribution à l'acquisition du terrain (montant provisoire)

récompense CC 209

m

pour contribution au paiement du coût de construction (montant provisoire)

récompense CC 209 m pour amortissements (montant provisoire)

11 12

IDEM, 535, n. 1322.

IDEM, 534, n. 1319 et 560, n. 1391.

Propres Propres Acquêts

M. M- M.

450'000

·90'000

·10'000 10'000

·30'000 30'000

-30'000 80'000

240'000 10'000 110'000

Acquêts

M~

0

(9)

E. Répartition de la plus-value

l. Montant de la plus-value

La plus-value se calcule comme suit:

1> valeur vénale actuelle de l'immeuble: ... Fr.450·000.·

1> dont'à déduire: prix de revient: Fr. 50'000.· + Fr. 200'000.·

Fr.250·000.·

1> plus·value: ... Fr 200'000 .

En l"espèce. on admettra que le terrain n'a pas bénéficié d'une plus·value conjoncturelle substantielle entre le moment de l"acbat (1977) et celui de la construction de la villa (1979). Si une augmentation de valeur était intervenue, une première répartition de plus·value devrait être effectuée à la date de la construction de la villa et une seconde à la date de la liquidation effective du régime. Il en irait de même dans l"hypotbèse où des travaux d'amélioration seraient intervenus postérieurement à la construction de l'habitation, tels que l'aménagement d'une piscine.

2. Créance de l'épouse

L'épouse jouit d'une créance variable (CC 206

n

pour sa contribution à l'acquisition du terrain.

Cette créance participe à la plus.valu";;- (Fr. 200'000.·) proportionnellement à l"importance de la contribution (Fr. 10'000.·) par rapport au prix de revient total (Fr. 250'000.·), soit:

Fr. 200'000.· x 10/250 = Fr. 8'000.·

3. Récompenses en faveur des acquêts du marI

Les acquêts du mari jouissent, à l'encontre des biens propres du mari. de deux récompenses variables (CC 209

lIn.

126

(10)

a. Contrlbntion de Fr. 30'000.- an paiement du codt de construction de la villa

La participation à la plus-value est également calculée en fonction du rapport entre le montant de la contribution et le prix de revient total:

Fr. 200'000.- x 30/250 = Fr. 24'000.- b. Amortissement hypothécaire de Fr. 80'000.-

La participation à la plus-value au titre des amortissements hypothécaires suit les mêmes règles, qu'il s'agisse d'une créance au sens de l'art. 206 al. 1 CC pour des remboursements effectués par le conjoint de l'époux propriétaire de l'irmneuble, ou d'une récompense au sens de l'art. 209 al. 3 CC pour des paiements supportés par l'autre masse du conjoint propriétaireJ3

Même si l'on admet que la prise en charge des amortissements représente une contribution à l'acquisition de l'irmneuble, cette contribution intervient postérieurement à l'acquisition, et en règle générale par étapes successives.

Fondamentalement, «chaque remboursement fait naltre une créance au sens de l'art. 206 al. l, dont le montant variera en fonction de la plus-value prise par l'irmneuble entre le moment de l'amortissement et celui de la liquidation du régime» 14. Il en va de même pour les récompenses au sens de l'art. 209 al. 3 CC.

<<Dans la plupart des cas, les amortissements ne sont [ ... ] pas opérés par des versements importants et occasionnels, mais sous forme d'annuités représentant 1 à 2 % de la dette. Il est alors pratiquement impossible de [ ... ] recalculer, armée après année, l'effet de l'amortissement sur la créance variable en fonction de l'évolution de la valeur de l'irmneuble. Il faut dès lors considérer les amortissements dans leur ensemble et calculer une valeur moyenne de la créance variable, pour tenir compte du fait que les remboursements partiels ont été étalés daos le temps» IS.

Sauf circonstances particulières, la part de la plus-value se calcule donc sur la valeur moyenne des amortissements, soit sur la moitié de ceux-ci lorsqu'ils sont effectués à un rythme constant.

13 DESCHENAux/S1EmAuERfBADDELEY. 558, n. 1384.

1. IDEM, 532, n. 1315.

J5 IDEM, 533, n. 1317.

(11)

En l'espèce, les remboursements représentent un montant total de Fr. 80'000.-, soit la différence entre le montant initial de l'emprunt (Fr. 170'000.-) et le solde de la dette à la date de la dissolution du régime matrimonial (Fr. 90'000.-). On calculera ainsi la participation à la plus-value en assimilant l'ensemble des remboursements partiels à un amortissement unique de Fr. 40'000.- qui serait intervenu dès l'acquisition de l'immeuble.

Soit:

Fr. 200'000.- x 40/250 = Fr. 32'000.-

4. À quelle masse la plus-value correspondaut à la partie uon remboursée de la dette profite-t-elle?

a. Jurisprudence

Cette question est sans doute l'une de celles qui a fait couler le plus d'encre dans la doctrine relative au régime de la participation aux acquêts. Dans son arrêt du 27 février 1997'6, le Tribunal fédéral a considéré qu'il se justifiait, lorsque les deux masses d'un conjoint participaient à l'acquisition, de répartir les plus- ou moins-values dues à l'existence d'une hypothèque

<<proportionnellement sur les masses concernées»". En d'autres termes, la répartition est effectuée «proportionnellement aux autres contributions ayant permis l'acquisition de l'immeuble»".

Dans l'arrêt cité, l'emprunt hypothécaire considéré n'avait fait l'objet d'aucun amortissement.

"

17

"

128

ATF 123

m

152, JdT 19971626.

Arrêt précité, c. 6b1bb.

DESCHENAuxiSTElNAUERlBADDELEY, 559, n. 1388. La solution retenue par le Tribunal fédéral, telle qu'esquissée dans l'arrêt cité, n'aboutit pas toujours à des résultats équitables et confonnes à l'esprit du régime de la participation aux acquêts. On peut regretter en particulier que, dans certains cas, J'effet de levier dû à l'emprunt hypothécaire bénéficie uniquement ou presque exclusivement aux biens propres, en tant que masse propriétaire de l'immeuble, sans offiir aux acquêts une contrepartie satisfaisante pour la charge - parfois très lourde - supportée au titre des intérêts, ni pour la responsabilité assumée du fait que l'entier du patrimoine répond de la dette. Nous pensons notamment à la situation, fréquente dans la pratique, où J'immeuble constituant le logement conjugal est rattaché aux biens propres du conjoint propriétaire parce que cette masse a fourni une prestation au comptant, alors même que 80 % ou p1us du prix d'achat ont été financés par Wl emprunt Des nuances et correctifs mériteraient donc d'être pris en considération. Ct SUZETIE SANDOZ. À propos del'ATF 123 III 152,JdT 1997 1 626, JdT 1997115258.

(12)

Le Tribunal fédéral ne s'est prononcé que dans le cadre de l'application de l'art. 209 al. 3 CC. On peut donc se demander si, dans la répartition d'une plus- value afférant à un emprunt hypothécaire, il sied de tenir compte également des contributions de l'autre conjoint donnant lieu à des créances variables au sens de l'art. 206 al. 1 CC. À notre sens, tel est le cas, pour des motifs d'équitél9, même si certains arguments invoqués par le Tribunal fédéral n'ont de pertinence qu'en relation avec l'art. 209 al. 3 CC (en particulier, le fait que c'est l'ensemble du patrimoine de l'époux débiteur qui répond de l'hypothèque;

dans le cadre de l'art. 206 al. 1 CC, cet élément plaiderait plutôt contre l'attribution d'une part de la plus-vaine à l'autre époux).

b. PIns-value à répartir

Seule la plus-value correspondant à la partie non remboursée de la dette doit être répartie entre les masses ayant fourni des contributions. Toutefois, nous tiendrons compte non seulement de la partie réellement non amortie de la dette (Fr. 90'000.-), mais aussi des remboursements non pris en considération lors de la détermination de la part de plus-value attribuée aux acquêts au titre des amortissements (Fr. 40'000.-; cf. supra V.C.2.).

Soit:

"

Fr. 200'000.-x (90

+

40)/250 = Fr. 104'000.-

Prenons l'exemple d'un immeuble qui aurait été acquis au seul nom du mari pour le prix de Fr. 250'000.-. dont Fr. 150'000.- couverts par un emprunt hypothécaire, les fonds propres ayant été prélevés à raison de Fr. 50'000.- dans les biens propres du mari ct de Fr. 50'000.- également dans les biens propres de l'épouse. Au moment de la liquidation du régime matrimonial, cet immeuble bénéficierait par bypothèse d'une importante plus-value. Aucun amortissement ne serait intervenu sur l'emprunt hypothécaire, Si la créance de J'épouse pour sa contribution (CC 206 1) était écartée de la répartition de la plus-value, les propres du mari - auxquels rimmeuble se rattache - absorberaient toute la part de pI~vaJue afférant à l'emprunt hypothécaire (3/5). Pour des investiSlilements égaux, les"propres du mari obtiendraient 4/5 de la plus-value totale et ceux de l'épouse 1/5 seulement. Cette différence de traitement parai'! difficile à justifier.

(13)

c. Contributions participant à la répartition

Les «auttes contributions ayant permis l'acquisition de l'immeuble» sont à notre sens les suivantes:

~ biens propres du mari: fonds investis dans l'achat du terrain Fr. 40'000.- c> biens propres de l'épouse: fonds investis dans l'achat du terrain Fr. 10'000.- c> acquêts du mari: fonds investis dans la construction de la villa Fr. 30'000.-

~ acquêts du mari: 1/2 du total des amortissements C> total des <<autres contributions»

Fr. 40'000.- Fr 12Q'QQQ-

d. Répartition

La part de plus-value de Fr. 104'000.- se répartit dès lors comme suit:

C> biens propres du mari:

C> biens propres de l'épouse:

C> acquêts du mari:

Fr. 104'000.-x 40/120 = Fr. 34'666.- Fr. 104'000.-x 10/120 = Fr. 8'666.- Fr. 104'000.- x (30 + 40)/120 = Fr. 60'666.- Comme l'immeuble se rattache aux propres du mari, seules les parts de plus- value supplémentaires attribuées aux biens propres de l'épouse et aux acquêts du mari devront figurer dans le décompte de liquidation du régime matrimonial.

130

(14)

5. Synthèse

(Créance et récompenses avec la participation à la plus-value)

Propres Propres Acquêts Acquêts

M. M- M. M~

immeuble 450'000

dette hypcthécaiI< ·90'000

créance CC 206 1 CC pour contribution ·10'000 10'000

à l'acquisition du terrain -8'000 8'000

créance CC 206 1 CC, supplément de ·8'666 8'666 pJwHalue

récompense CC 209 m cc pOlU -30'000 30'000

contribution au paiement du coQt de -24'000 24'000

construction

recompensc CC 209 III CC pour -80'000 80'000

amortissements -32'000 32'000

récompenses CC 209 m, supplément de -60'666 60'666 plus-value

106'668 26'660 226t666 0

(15)

i .

1 . 1

i

1

(16)

II. Casus nO 2 (traité par Margareta Baddeley)

A.

Donnée20

Bernadette et Jean-Louis se sont mariés en 1978, sans conclure de contrat de mariage. Le couple a eu deux enfants, Nicole et Francine. Jean-Louis a exercé son métier d'expert-comptable indépendant jusqu'à fin décembre 1996, date à laquelle il a pris sa retraite bien méritée. Entre janvier 1985 et 1996, Bernadette a secondé son mari en tant que secrétaire-assistante, sans recevoir de rémunération. La famille a toujours vécu confortablement.

Jean-Louis vient de décéder. Son patrimoine, au jour du décès, se compose comme suit:

divers comptes bancaires Fr. 176.250.-

argent au comptant Fr. 1.200.-

voiture Fr. 6.500.-

divers objets (not. matériel de sport) Fr. 2.850.- terrain à construire en montagne Fr. 50.000.- créance contre la caisse-maladie Fr. 750.- dette d'impôt pour 2002 et 2003 Fr. 2.200.-

dette de loyer Fr. 1.850.-

Tout ce que possédait Jean-Louis était le fruit de son travail; seul le terrain constituait un héritage. Bernadette possède un modeste compte en banque, reste de l'héritage de ses parents. Des Fr. 75.000.- hérités, deux tiers ont été utilisés par le couple en 1995 pour renouveler le mobilier de l'appartement familial qui vaut aujourd'hui Fr. 30.000.-. Bernadette possède aussi Fr. 2.000.- en pièces d'argent; il s'agit du reliquat de l'argent du ménage qu'elle a toujours su bien gérer de sorte à garder une petite partie pour ses dépenses personnelles.

Enfin, un objet pose problème: il s'agit d'une belle commode d'une valeur actuelle de Fr. 8.000.-, acquise au début de leur mariage. A cette période, les

20

~~}

La donnée a été légèrement amendée par rapport à l'énoncé présenté au colloque, pour tenir compte des remarques faites pendant les discussions et pour clarifier la donnée et les questions. voire les réponses.

(17)

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1

époux ont également fait plusieurs autres acquisitions. Bernadette travaillait comme employée dans une fiduciaire et disposait encore de quelques économies faites avant le mariage. Elle ne saurait dire qui des deux époux a payé la commode et quels fonds avaient été utilisés.

a) Veuillez préparer la liquidation de la succession de Jean-Louis en procédant à la liquidation du régime matrimonial du couple. Sachez que l'aide non rémunérée de Bernadette a permis d'importantes économies pour l'entreprise de son mari. Jean-Louis était le premier à le reconnai'tre. Une secrétaire équivalente aurait pu prétendre à env. Fr. 480.000.- de salaire pour la période considérée. Que pensez-vous de l'affirmation selon laquelle la question de la rémunération de Bernadette est sans pertinence pour la liquidation du régime matrimonial du couple étant donné qu'une somme, à ce titre, devrait être prélevée des acquêts de Jean-Louis et rentrer dans les acquêts de Bernadette, et serait donc compensée.

b) En quoi, la situation serait-elle différente pour un couple marié sous la séparation de biens?

B.

Solution

La question a) sera traitée dans la première partie 1. de la solution.

Préalablement à la liquidation du régime matrimonial, il convient de déterminer le régime matrimonial applicable (a.). II" y a lieu ensuite de procéder à la liquidation du régime, en attribuant les biens aux masses et en établissant les comptes (b. [1) à b.[2)). Lors de cette phase, il s'imposera de traiter la question des services n0"'1:émunérés de l'épouse. Les comptes établis permettront de déterminer le bénéfice de l'union conjugale et de prendre position par rapport à l'affirmation évoquée (b.[3) et b.[4]).

La solution à la question b) est donnée ensuite, sous 2.

1. Liquidation du régime matrimonial

a. Détermination du régime matrimonial

Le mariage a eu lieu en 1978, donc avant l'entrée en vigueur du drQit matrimonial actuel. Le couple était soumis à l'ancien régime matrimoniÏt1 ordinaire de l'union de biens. En l'absence d'un contrat de mariage, d'une déclaration de maintien du régime matrimonial et d'une liquidation sous l'ancien régime pour la période avant 1988, le couple était soumis au régime

134

(18)

légal ordinaire de la participation aux acquêts pour toute la durée de son mariage (CC 9a, 9d et 9f, 10 tit. fm., et 196 SS)21. Les biens sont attribués aux masses selon les art. 196 ss CC, en tenant compte des art. 159 ss CC, notamment des art. 163 à 165 CC.

b. Liquidation du régime matrimonial (1) Généralités22

Le régime est liquidé au jour du décès d'un des époux (CC 204 1), donc au jour du décès de Jean_Louis23

Il convient d'établir les masses matrimoniales des deux époux, soit les acquêts (AC, CC 197) et les biens propres (BP, CC 198) de chacun d'eux. La valeur à prendre en compte est la valeur vénale (CC 211). Les biens entrent dans une des masses de l'époux (co)propriétaire (CC 196, 205 II). Chaque époux reprend les biens qui se trouvaient en possession de son conjoint (CC 205 1). Les dettes sont attribuées à la masse avec laquelle elles ont le lien de connexité le plus proche (CC 209 11)24. Les dettes à régler sont celles envers des tiers (CC 209 II), envers le conjoint (CC 205 III, 206) et envers l'autre masse du même époux (CC 209 1). Certaines libéralités faites à des tiers antérieurement doivent être réunies aux acquêts en verto de l'art. 208 CC25

Les soldes des comptes acquêts des deux époux forment le bénéfice de l'union conjugale

(ct

210 1). Toutefois, il n'est pas tenu compte d'un déficit qui reste donc à la charge du seul époux concerné (CC 210 11). Le bénéfice est, en principe, partagé par moitié (CC 215 1) entre les époux ou, comme dans le cas présent, entre le conjoint survivant et les héritiers de l'époux décédé. Les créances entre époux sont compensées (CC 215 II, CO 134 I13).

Avant d'attribuer les biens aux masses, il convient de liquider d'éventuels autres rapports juridiques ordinaires, p. ex. des rapports de copropriété et des liens contractuels entre époux26Dans le cas présent, un contrat de travail entre Jean-Lonis et Bernadette pourrait entrer en considération. Toutefois, la

"

"

23

Cf. pour une présentation schématique: BADDELBy/BuCHER, 50 S.; ég.

PICHONNAZICARRON, 67 S5.

Pour les phases de la liquidation du régime, voir également supra, Casus 1. Solution, par. B.

DIlSCHENAUXISTElNAUERIBADDELEY, 500, n. 1225 el 502, n. 1228.

24 DeschenauxlSteinauerlBaddeley, 491, n. 1206.

IDEM, 566, n. 1413 ss.

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IDEM, 505, n. 1238 S5.

(19)

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donnée indique que le couple n'avait pas conclu un tel contrat; il faut donc revoir la question d'une éventuelle dette de Jean-Louis envers sa femme sous l'angle de l'art. 165 CC (voir infra 2.2.b.).

(2) Attributions des biens aux comptes (i.) Jean-Louis

Comptes bancaires: A teneur de l'énoncé, ces comptes contiennent le produit du travail de Jean-Louis, les pensions versées par les institutions de prévoyance, les intérêts et les éventuels autres revenus de Jean-Louis. Il s'agit d'acquêts au sens des art. 197 al. 1 cum 197 al. 2 ch. 1 et 2 Cc. La créance envers la banque constitue, en tant que telle, un remploi desdits revenus (CC 197 I1/5). Fr. 176.250 doivent donc être portés à l'actif des acquêts du mari.

Argent au comptant: Le raisonnement est le même que pour l'argent déposé à la banque. Il s'agit donc aussi d'un acquêt au sens des chiffres 1 et/ou 2 de l'art. 197 al. 2 CC et la somme de Fr. 1.200 se trouve à l'actif des acquêts de Jean-Louis.

Voiture: Jean-Louis a certainement utilisé les revenus de son travail ou sa pension pour financer ce bien. Il s'agit donc d'un remploi d'acquêts, au sens de l'art. 197 al. 2 ch. 5 CC, à savoir du remplacement, dans le patrimoine du même propriétaire, de Jean-Louis, d'un bien par un autre bien, la voiture2'. La valeur vénale de la voiture, soit Fr. 6.500, est portée à l'actif des acquêts du mari.

Divers objets: Ces objets ont été acquis en remploi des revenus de Jean- Louis, selon l'art. 197 al. 2 ch.'-,S CC28Le matériel de sport peut avoir constitué, pendant la vie de Jean-Louis, des effets affectés à son usage personnel, ce qui en faisait des biens propres (CC 198/1) bien que financés par les acquêts. Toutefois, l'usage personnel n'étant plus possible après le déeès de l'époux propriétaire, ces biens doivent être réattribués à la masse qui les a financés, in casu les acquêts2 •• On trouve donc Fr. 2.850 à l'actif des acquêts du mari.

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19

136

ATF 121 m 2OI,1dT 1997151; DESCHENAUXISTElNAUERlBADDELEY, 465, n, 1138 ss, Pour les références concernant le remploi. cf. paragraphe précédent.

DESCHENAUXISTElNAUERlBADDELEY, 466, n. 1140 et 395, n. 981 5.; STETILERlWAELTI, 148, n. 276 el 106, n. 206; lIAusHEER/REuSSERIGElSER, Ehegütemcht, 449, n, 18 5., not.

19.

(20)

Terrain à construire en montagne: Il s'agit d'un bien propre de Jean-Louis, acquis à titre gratuit par succession (CC 198/2 2 .... hyp.). Il convient donc de porter Fr. 50.000 à l'actif des biens propres de Jean-Louis.

Créance contre la caisse-maladie: Il s'agit probablement de factures de médecin ou de pharmacie payées par Jean-Louis, pour lesquelles il a droit au remboursement par la caisse-maladie. C'est une créance ordinaire envers un tiers. Les frais médicaux en tant que composantes de l'entretien (CC 163) sont, en principe, à la charge des acquêts et la créance en remboursement s'attache donc également à cette masse'o. Dans la mesure où les factures ont déjà été payées par les acquêts, la créance contre la caisse-maladie constitue un remploi d'acquêts, au sens de l'art. 197 al. 2 ch. 5 CC. Le poste de Fr. 750 se trouve donc à l'actif des acquêts de Jean-Louis.

Dette d'impôt 2002: Le mariage ne modifie pas la capacité civile des époux qui répondent de leurs dettes sur tous leurs biens (CC 201, 202). La dette d'impôts est une delle ordinaire envers des tiers. Les impôts font, en principe, partie de l'entretien nécessaire du ménage et doivent donc être supportés par les acquêts". La dette de Fr. 2.200 figurera au passif des acqnêts du mari.

Dette de loyer: Sauf circonstances particulières, le loyer doit être supporté par les acquêts, sur la base de raisonnements analogues à ceux relatifs à la dette d'impôt (cf. paragraphe précédent). La dette de loyer de Fr. 1.850 se trouve donc au passif des acquêts de Jean-Louis.

(ii.) Bernadelle

Compte en banque: Il s'agit du solde du compte que Bernadette a hérité de ses parents. Ce compte est un bien acquis par succession, qui doit être attribué aux biens propres de l'épouse, en vertu de l'art. 198 ch. 2, 2 .... hyp. Le solde s'élève à 1/3 de la somme initiale, soit à Fr. 25.000, et constitue un actif des biens propres de Bernadette.

2/3 de l'héritage ont été utilisés en 1996 pour renouveler le mobilier de l'appartement familial. Ces meubles valent Fr. 30.000 aujourd'hui et rentrent,

JO DESCHENAUxlSTEINAUERIBADDELEY, 219, n. 473. 454, n. 1109; S~ERMANI, 62.

D . 7 7 . " ! -

"

DESCHENAUXISTEINAUERIBADDELEY, 220, n. 474 et 496, n. 1214 s; STETILERIGERMANI.

64, n. 81.

(21)

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en tant que biens de remploi (CC 198/4), dans l'actif des biens propres de Bernadette (Solution reportée sur les comptes)".

Toutefois, l'on pourrait aussi soutenir que l'acquisition du mobilier de la demeure conjugale incombe aux acquêts, ce à titre de l'entretien familial (CC 163)33.

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faudrait alors accorder une créance de remboursement aux biens propres de l'épouse contre les acquêts du mari, seul à disposer d'acquêts (suffisants) (CC 205 III). Dans cette hypothèse, les acquêts du mari devraient aussi être crédités de la valeur actuelle des meubles (Solution non reportée sur les comptes).

Fr. 2.000.- en pièces d'argent: L'énoncé permet de penser que cette somme représente des éconollÙes sur l'argenl de poche inclus dans l'argent du ménage. L'époux qui n'exerce pas d'activité lucrative a droit à l'argent de poche, dans les limites des possibilités du budget fanùlial (CC 163). Le budget fanùlial in casu doit l'avoir perllÙS.

A teneur de l'énoncé, il n'y avait pas de versement d'un montant à libre disposition, au sens de l'art. 164 CC, de Jean-Louis à Bernadette, auquel Bernadette aurait cependant pu prétendre vu le niveau de vie du ménage34

, Mais la distinction ne fait pas de différence dans le cas présent: les éconollÙes sur ces sommes font partie des acquêts du bénéficiaire; il convient donc de mettre Fr. 2.000 à l'actif des acquêts de l'épouse.

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Autres biens

Commode: Ce bien a été acheté au début du mariage. A ce moment, les deux époux disposaient encore d'économies faites avant le mariage. Mais on ne peut ni déterllÙner lequel des deuJèépoux a réglé la facture, ni quelle masse de l'époux concerné a réellement supporté cette dépense ou devait le faire selon la volonté des époux. En l'absence de preuves au sens de l'art. 200 al. 1 CC, les époux sont présumés copropriétaires (CC 200 li) et il y a lieu de créditer leurs acquêts de la moitié de la valeur pour chacun d'eux (CC 200 Ill). Fr.

4.000 sont donc portés respectivement à l'actif des acquêts de Jean-Louis et des acquêts de Bernadette.

Collaboration de Bernadette dans l'entreprise de Jean-Louis: Bernadette a collaboré à la profession et dans l'entreprise de son mari. Il est fort probable.

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"

"

138

Pour 1es références au sujet du remploi, cf. supra, voiture de Jean-Louis.

DESCHENAuxJSTEINAUERlBADDEUlY, 219, n, 472,

DESCHENAUxiSTElNAUERlBAODEUlY, 221, n, 476, 231, n, 204 ss.

(22)

vu l'expérience de la vie, qu'elle a en plus tenu le ménage et s'est occupée des enfants. De surcroît, il ne s'agissait pas d'une aide occasionnelle; au contraire, Bernadette a secondé son mari pendant 9 ans permettant à ce dernier d'économiser pendant cette période l'entier d'un salaire de secrétaire, soit une somme de Fr. 480.000.

La collaboration de Bernadette dépassait ainsi notablement /' entretien dû, soit ce qui peut être attendu de l'épouse en vertu des art. 159 al. 1 et 3, ainsi que 163 CC35Elle a donc droit à une indemnité équitable au sens de l'art. 165 al.

1 CC sauf si elle peut prétendre à une rémunération en vertu d'un contrat de travail ou d'autre rapport juridique (CC 165 III). Les époux n'ont manifestement pas conclu de contrat de travail. L'existence d'un contrat de travail tacite (CO 320 II) n'est pas exclue sous le droit actueI'6. Toutefois, le couple n'a pas songé à liquider sous quelque forme que ce soit les prétentions de Bernadette découlant de son travail pour Jean-Louis à la fin de la vie active du mari. Nous excluons, par conséquent, l'application du droit du contrat du travail. A teneur de l'énoncé, il ne s'agit pas non plus d'une donation de l'épouse (CO 239 ss; .une telle donation ne doit pas être présumée3'). En l'absence d'un autre rapport juridique donnant droit à rémunération, l'épouse peut prétendre à une indemnité équitable au sens de l'art. 165 al. 1 Cc.

Pour déterminer le montant de l'indemnité due, l'équité exige de tenir compte, d'une part, de la prestation fournie et de sa valeur sur le marché du'/

travail et, d'autre part, du devoir d'assistance entre époux (CC 4, 159 Il, III, .- 163) et du fait que, par les économies professionnelles du mari, la famille a / acquis un niveau de vie supérieur dont bénéficiait aussi l'épouse. L'indemnité ne peut donc pas, en principe, atteindre le niveau du salaire ordinaire pour ' l'activité en question. Il n'est pas justifié, en revanche, de limiter le montant de l'indemnité allouée au solde positif des acquêts de l'époux débiteur au seul motif de protéger les acquêts de celui-ci38Une telle interprétation du texte légal tendrait à présumer une donation pour la partie de l'indemnité qui dépasse cet actif; or, la présomption de la donation est précisément écartée dans le message du Conseil fédéral et par la doctrine (cf. supra, et Message du Conseil fédéral concernant la révision du code civil suisse, du 11.7.1979,

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37 38

IDEM, 224 S., n. 487 S8, 240 5., n. 531 S8.

ATF 5C.13712OO1, SJ 2002 1 65; STETI'LERlGERMANl, 91, HAuSHEERIREUSSERIGEISER, Wirkungen, 268, n. 40.~.",

BADDELEY. n. 3 ad art. 240 CC avec références. 11

n. 128;

Ce qui n'empêche cependant pas que pour des considérations d'équité l'on aboutisse à un tel résultat.

(23)

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Margareta Baddeley

214.34 qui traite également les conséquences de ces prétentions sur le plan de l'exécution forcée).

La doctrine se prononce également dans ce sens en préconisant l'affectation de toute la fortune - acquêts et biens propres - au paiement de cette indemnitë9

L'indemnité n'est, en outre, due que pour la période après le 1.1.1988, date de l'entrée en vigueur du droit actuel.

La collaboration de Bernadette s'est faite pour env. 75 % (1988-1996) sous le nouveau droit. En outre, elle a bénéficié d'un niveau de vie confortable.

Tenant compte de ces critères, nous admettons que, sur les Fr. 480.000 de salaire économisés par Jean-Louis, Fr. 200.000 constituent une indemnité équitable de l'épouse. Cette somme grève donc les acquêts du mari et doit être créditée aux acquêts de Bernadette.

39

140

HAusHEERiREussERIGmsER, Wirkungen, 257, n. 27. L'indenmité de l'art. 165 al. 1 constitue, en principe, un revenu imposable et soumis aux cotisations des assurances sociales (cf. p. ex. AlF 115 lb 37. et ATF du 19.8.1998. in: Droit du travail et de l'usurance-chômage 1999, 113 SS~ les opinions des auœurs à ce sujet sont partagées; cf.

KAHlL-WOLFF. 99 S5, 123 S8, avec des références aux auteurs, ainsi que DESCHENAux/STEINAtJERlBADDELEY. 2S7. n. 585 et nbp 229). La siruation se complique cependant lorsque l'indemnité est versée, comme dans le cas présent. globalement des ann6es après la naissance du droit. Dans ce cas, le revenu de l'époux débiteur a déjà subi les prélèvements fiscaux et des assurances sociales à un niveau plus élevé en raison du noo- paiement de l'indemnité. Une nouvelle imposition contreviendrait au principe de la capacité . contributive, ct un prélèvement de cotisations des asswances sociales constitueràit également une deuxi~mc ponction du même revenu. De ce fait, ces nouveaux prélèvements devraient être accompagnés de remboursements des sommes perçues en trop initialement (dans ce sens aussi SPORI, 23 ss, 26 S8). En raison des probl~mes de calcul, la solution la. plus adéquate paraît etre une renonciation à de nouveaux prélèvements. Cf. aussi ATF 128 V 189, concernant la couverture d'assurance...çhômage, not. c. 3 albb).

(24)

(3) Etablissement des comptes et détermination du bénéfice de l'union conjugale

Biens propres Jean-Louis Diem: propres Bernadette

actif passif actif passif

Terrain 50.000 Compte hérité 25.000

Meubles 30.000

Solde 50.000 Solde 55.000

Totaux 50.000 50.000 Totaux 55.000 55.000

Acquêts Jean-Louis Acquêts Bernadette

Actif passif actif passif

Comptes 176.250 Pièces d'argent 2.000

Argent 1.200 Commode 4.000

Voiture 6.500 Créance (CC 165) 200.000

Objets div. 2.850

Créance 750

cJcaisse maladie

Dette d'impôt 2.200

Dette de loyer 1.850

Commode 4.000

Dette (CC 165) 200.000

Solde .12.500 Solde +206.000

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Totaux 204.050 204.050 Totaux 200.000 206.000

(25)

Les acquêts de Jean-Louis se soldent par un déficit de Fr. 12.500, alors que ceux de Bernadette bouclent avec un bénéfice de Fr. 206.000. En vertu de l'art. 210 al. 1 et al. 2 CC, le bénéfice de l'mUon conjugale s'élève donc à Fr.

206.000. En l'absence de convention dérogatoire à ce sujet, Bernadette doit la moitié de cette somme à la succession de son mari (à laquelle elle participe, cf.

CC 462/1 cum 457"'), soit Fr. 103.000. Le déficit de Jean-Louis n'est pas partagé; ses dettes grèvent la succession (CC 474 II). Pour liquider toutes les prétentions découlant du régime, il convient en outre de régler la dette de l'indemnité de l'art. 165 CC en faveur de Bernadette. Par le jeu des compensations (CC 215 II, CO 134113), Bernadette aura encore une créance à faire valoir, d'un montant de Fr. 97.000.41

(4) Comptabilisation de la prétention découlant de l'art. 165 CC Il s'agit de répondre à la question de savoir si la rémunération de Bernadette est sans pertinence pour la liquidation du régime matrimonial du couple étant donné qu'une somme à ce titre devrait être prélevée des acquêts de Jean-Louis et rentrer dans les acquêts de Bernadette et serait donc compensée.

Cette afflfllllltion n'est correcte que si les acquêts des deux époux bouclent avec un bénéfice. Dans ce cas, les attributions se compensent; l'opération comptable ne modifie pas le bénéfice de l'union conjugale et est donc neutre.

En revanche, elle ne l'est pas, si les acquêts d'un des époux (ou des deux) se soldent par un déficit dont il n'est pas tenu compte dans le partage du bénéfice de l'union conjugale (CC 215 II)42. La liquidation du régime des époux, et notamment l'établissement du bénéfice de l'union conjugale, dans le cas d'espèces, le démontre.

"-

Le bénéfice des comptes acquêts des époux doit être déterminé avec précision.

Il est donc correct, dans tous les cas, de comptabiliser le montant de l'indemnité au sens de l'art. 165 CC tant dans les acquêts de l'époux débiteur que dans ceux de l'épnux créancier. Cela découle également de l'application

41

"

142

n va de soi que les descendants n'ont pas J'action en réduction (CC 522 S8) s'agissant de la créance en vertu de

"art.

165 Cc.

La masse successorale de Jean-Louis s'élève à Fr. 50.000 '+ (103.000-12.500) = 140.5QO.

Bernadette retire de la liquidation du régime Fr. 55.000 + 103.000 = 158.000. En l'absericc de testament. de rapport et de réunion, eUe aUlll droit à Fr. 70.250 dans la sllOOession de son mari, portant son patrimoine total à Fr. 228.250. Pour comparaison: sans l'indemnit~ de l'art. 165 CC et en participant au bénéfice d'aequ€ts de Jean-Louis. Bernadette se trouverait avec un patrimoine final de Fr. 225.125.

DESCHENAUxiSTEINAUERIBADDELEY, 264 S., n. 60S, 431, n. 1068,468. n. 1147.

(26)

pure et simple de la loi qui exige l'établissement de deux masses pour chaque époux quelque soit le résultat de la liquidation du régime.

2. La situation de ce même couple en cas de séparation de biens (question b)

La séparation de biens présente plusieurs caractéristiques communes avec la participation aux acquêts 43.

- les époux disposent de patrimoines distincts pendant le mariage,

le régime des dettes des époux envers des tiers et entre eux est le même (CC 247, 249), et

- les effets généraux du mariage (CC 163 - 179) sont applicables.

Il n'y a cependant pas lieu de distinguer des masses au sein des patrimoines des époux, car il n'y a aucun partage à la fin du régime. Un seul compte est établi pour chaque époux. Pour Bernadette et Jean-Louis, l'on peut donc reporter sur le compte de chacun les biens qui se trouvent dans ses acquêts et dans ses biens propres établis sous 1. ci-dessus. L'attribution de la commode se fait en copropriété, sur la base de l'art. 248 CC. Bernadette peut également faire valoir sa prétention fondée sur l'art. 165 Cc.

Bleos Jean·Louis Biens Bernadette

actif assit actif sif

AC ('upra) 191.550 204.050 AC (,upra) 206.000

BP (supra) 50.000 BP(supra) 55.000

Solde 37.soo Solde 261.000

Totaux 241.550 241.550 Totaux 261.000 261.000

~f,

'~

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IDEM. 718 5S, n. 1879 ss.

(27)

Margareta Baddeley

Le résultat est nettement plus favorable pour Bernadette qui garde tons ses biens, dont la créance en vertu de l'art. 165 CC, sans partage. A cela s'ajoute sa part dans la succession de son mari (CC 462/I cum 457)44 .

..

144

n va de soi que les descendants n'ont pas l'action en réduction (CC 522 58) s'agissant de la clÛnce cn vertu de l'art. 165 CC. Dans l'hypothèse envisagée, Bernadette retirera de la succession de son mari Fr. 18.750; son patrimoine total final sera de Fr. 279.750. Sans l'indemnité de l'art. 165 CC. Bemadene se trouverait avec un patrimoine fmal de Fr.

179.750.

(28)

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