Article
Reference
Nouvelles dimensions dans les suivis pneumologiques
NICOD, Laurent P, GASCHE-SOCCAL, Paola Marina Alessandra
NICOD, Laurent P, GASCHE-SOCCAL, Paola Marina Alessandra. Nouvelles dimensions dans les suivis pneumologiques. Revue médicale suisse , 2017, vol. 13, no. 583, p. 1971-1972
PMID : 29143499
Available at:
http://archive-ouverte.unige.ch/unige:126911
Disclaimer: layout of this document may differ from the published version.
1 / 1
Éditorial
www.revmed.ch
15 novembre 2017
1971
Nouvelles dimensions
dans les suivis pneumologiques
Prs LAURENT P. NICOD ET PAOLA M. SOCCAL La pneumologie et surtout les patients souf
frant de maladies respiratoires bénéficient de façon spectaculaire de traitements nou
veaux qui changent leur devenir dans des domaines comme les asthmes sévères diffi
ciles à contrôler, les fibroses pulmonaires, la mucoviscidose et, de façon tout aussi remar
quable, dans les succès thérapeutiques récents des patients atteints de cancers pulmonaires.1 C’est sur ce dernier aspect que notre atten
tion se porte ici.
L’apparition de traitements biologiques ciblés a diminué l’incidence des toxicités classiques des chimiothérapies dans le cadre
des traitements oncologiques.
Ini tialement, il s’agissait d’uti
liser des anticorps contre des molécules telles que les CD20 des lymphomes, les récepteurs de crois sance comme l’epidermal growth factor receptor (EGFR) ou des inhibiteurs des facteurs de croissance vasculaires comme le VEGF. Les inhibiteurs des tyro
sines kinases (TKI) plus ou moins
spé cifiques des signaux de transduction intra
cellulaires ont suivi pour des processus hé
matologiques et certaines tumeurs solides.
Chacune de ces approches a été liée à des bénéfices en survie, mais aussi à des effets secondaires nouveaux en particulier au ni
veau cardiovasculaire, avec amplification des processus thromboemboliques ou même des hypertensions pulmonaires. Les syndromes liés au largage des cytokines ont été vécus dans le cadre de la transplantation avec des anticorps antiCD3 par exemple, ou des anti
corps antiCD20 nécessitant un monitoring cardiopulmonaire chez certains patients. Des anticorps dirigés contre les récepteurs de l’IL6 (antiIL6r) ont été liés à des hépato
toxicités mais aussi à des immunosuppres
sions avec activation de virus et réactivation de tuberculose.
L’incidence de pneumopathies interstitielles a été décrite jusqu’à 15 % des traitements cyto
toxiques récents.2 L’utilisation du rituximab a entraîné des atteintes pulmonaires inattendues telles que des pneumopathies interstitielles desquamatives ou des pneumo nies granulo
mateuses. Des dyspnées secondaires à l’usage de TKI, comme le dasatinib, ont été attri
buées à des épanchements pleuraux et des péricardites.3 Il a fallu reconnaître et traiter ces nouvelles manifestations.
L’apparition d’anticorps contre les molécules qui contrôlent l’immunité cellulaire anti
tumorale, appelés check point in- hibitor, est une vraie révolution dans le traitement de tumeurs solides comme les mélanomes, les cancers pulmonaires non à petites cellules ou le cancer co
lorectal. Leur efficacité est com
pliquée par des immune-related adverse events (IRAE). Les effets secondaires sont connus au ni
veau digestif, hépatique et endo
crinien. Le poumon n’est pas en reste avec des pneumopathies interstitielles d’origine infectieuse mais aussi non infec
tieuse.4 L’application de ces traitements im
munologiques pour des cancers pulmonaires, amplifiant les propres défenses des patients en diminuant celles des tumeurs contre l’immu
nité acquise de l’hôte, apporte des bénéfices considérables avec des survies inespérées antérieurement. Ils peuvent aussi entraîner des réponses inflammatoires con si dé rables et aggraver une maladie auto immune pré
existante. On ne sait pas encore très bien quels mécanismes physiopathologiques sont enclenchés. Un diagnostic et une prise en charge impliquent des suivis multidiscipli
naires qui deviennent heureusement mieux codifiés. Des suivis endoscopiques doivent souvent être réalisés afin de différencier les causes infectieuses et immunitaires, qui elles Articles publiés
sous la direction de
LAURENT P. NICOD Centre d'oncologie thoracique et Chef du Service de pneumologie CHUV, Lausanne
PAOLA M. SOCCAL Cheffe du Service de pneumologie et Responsable du Centre pour le cancer pulmonaire HUG, Genève
ChACUNE DE CES APPROChES
A éTé LIéE à DES béNéfICES
EN SURvIE, MAIS AUSSI à
DES EffETS SECONDAIRES
NOUvEAUx
bibliographie 1
Reck M , Rabe FK . Precision diagnosis and treatment for advanced non-small cell lung cancer. N Engl J Med 2017;377:849-61.
2
Vahid B, Marik PE.
Infiltrative lung diseases:
Complications of novel antineoplastic agents in patients with hema tological malignancies. Can Respir J 2008;15:211-6.
3
Cortes JE, Saglio G, Kantarjian HM, et al.
Final 5-year study results of DASISION:
The dasatinib versus imatinib study in treatment-naive chronic myeloid leukemia patients trial. J Clin Oncol 2016;34:2333-40.
4
Michot JM, Bingenwald C , Champiat S , et al.
Immune-related adverse events with immune checkpoint blockade:
a comprehensive review.
Eur J Cancer 2016;54:139-48.
REVUE MÉDICALE SUISSE
WWW.REVMED.CH 15 novembre 2017
1972
bénéficieront d’antibiotiques ou d’immuno
suppression plus ou moins importante, plus ou moins prolongée.5 Nous entrons ainsi dans des zones inconnues à ce jour pour le suivi de ces patients avec des infiltrats péribroncho
vasculaires ou interstitiels plus ou moins denses, des pneumopathies chroniques plus ou moins organisées, des pneumopathies lymphoïdes interstitielles mimant des lym
phangites carcinomateuses, ou l’apparition de formes aiguës de sarcoïdose évoquant des métastases en lâchers de ballons.
Ces patients oncologiques, avec leur durée de vie nouvellement prolongée, vont devoir bénéficier d’un suivi conjoint par des pneu
mologues et des oncologues. Ceci va s’imposer
pour faire face à des manifestations néces
sitant non seulement des investigations en
doscopiques mais aussi pour mettre au point des monitorings de biomaqueurs pour ces manifestations inflammatoires et probable
ment bientôt la détection en phase liquide d’éventuelles récidives tumorales. Ces dé
veloppements sont nécessaires au delà des détections actuelles par suivi d’imageries métaboliques comme le PETscan. Ces nou
velles thérapies immunomodulatrices onco
logiques vont nous obliger à investir plus de moyens dans la physiopathologie des pneu
mopathies inflammatoires engendrées ou réactivées et ouvrent aussi de nouvelles opportunités pour l’approche de maladies pulmonaires rares.
5 Kroschinsky F, Stölzel F, von Bonin S, et al, and on behalf of the Intensive Care in Hematological and Oncological Patients (iCHOP) Collaborative Group. New Drugs, new toxicities: Severe side effects of modern targe- ted and immu notherapy
of cancer and their management. Crit Care 2017;21:89.