• Aucun résultat trouvé

Faire interner un proche ? Le travail sur l’autonomie en contexte de troubles psychiques.

N/A
N/A
Protected

Academic year: 2021

Partager "Faire interner un proche ? Le travail sur l’autonomie en contexte de troubles psychiques."

Copied!
65
0
0

Texte intégral

(1)

HAL Id: hal-02147682

https://hal.ehesp.fr/hal-02147682

Submitted on 14 Jun 2019

HAL is a multi-disciplinary open access archive for the deposit and dissemination of sci- entific research documents, whether they are pub- lished or not. The documents may come from teaching and research institutions in France or abroad, or from public or private research centers.

L’archive ouverte pluridisciplinaire HAL, est destinée au dépôt et à la diffusion de documents scientifiques de niveau recherche, publiés ou non, émanant des établissements d’enseignement et de recherche français ou étrangers, des laboratoires publics ou privés.

Faire interner un proche ? Le travail sur l’autonomie en contexte de troubles psychiques.

Delphine Moreau

To cite this version:

Delphine Moreau. Faire interner un proche ? Le travail sur l’autonomie en contexte de troubles psychiques.. 2007. �hal-02147682�

(2)

° 94

DOSSIER D’ETUDE N° 94 Juillet 2007

1

er

prix de la CNAF 2006 Delphine Moreau

Faire interner un proche ?

Le travail sur l’autonomie en contexte de troubles psychiques

Ecole des Hautes Etudes en Sciences Sociales

(EHESS)

(3)

° 94

TABLE DES MATIERES

AVANT-PROPOS ...4

INTRODUCTION ...5

L’AUTONOMIE EN QUESTION ... 6

REVUE DE LITTERATURE ET AXES DE RECHERCHE ... 7

1. La place des proches auprès des malades et des personnes dépendantes ... 7

2. Le problème de la qualification psychiatrique et du rôle des familles en psychiatrie ... 8

CADRE THEORIQUE ... 9

METHODE ET DESCRIPTION DU TERRAIN... 9

1. Les entretiens ... 10

2. Caractéristiques des personnes concernées ... 11

3. Les observations ... 12

PREMIERE PARTIE : L’AUTONOMIE DISQUALIFIEE PAR LE JUGEMENT D’ANORMALITE, DE FOLIE ? ... 14

A.CONTEXTE DE LA QUALIFICATION PSYCHIATRIQUE... 15

1. Qualification psychiatrique et jugement de folie dans l’histoire de la psychiatrie ... 15

2. Soupçons sur la qualification psychiatrique : la labelling theory ... 15

B.LA DIFFICILE QUALIFICATION PSYCHIATRIQUE DES TROUBLES... 17

1. Des petits signes difficiles à identifier ... 18

2. Transgression, folie, inexplicable ... 19

3. Signes spécifiques ou troubles intolérables ? ... 20

C.LE TRAVAIL DE DEFINITION DE LA NATURE DES TROUBLES ... 21

1. L’hospitalisation et/ou le diagnostic forment-ils une entrée dans la « carrière morale du malade mental » ? ... 21

2. « Folie » et qualification de la nature des troubles ... 23

CONCLUSION DE LA PREMIERE PARTIE ... 28

DEUXIEME PARTIE - ENTRE INTERVENTION ET INGERENCE, DU CONSEIL A LA COERCITION : PRATIQUES D’AUTONOMIES ET DE REFUS DE L’AUTONOMIE DANS LE SOIN... 30

A.PROLONGEMENT DE LA RELATION PARENTALE : ENTRE SOUTIEN ET ACCOMPAGNEMENT ... 30

1. Cohabitation, rapatriement, décohabitation : le jeu de la dépendance et de l’indépendance ... 30

2. La décohabitation comme prise d’indépendance parentale coûteuse ... 32

B.LE RECOURS A LA CONTRAINTE PAR LES PROCHES ... 33

1. Degrés d’intervention, formes de la contrainte : entre recommandation et pression, entre exercice de l’autorité et usage de la force ... 34

2. Qu’est-ce qui définit l’intervention légitime ? Où commence l’ingérence ? ... 37

C.CE QUI SUSCITE LINTERVENTION ... 39

1. Un « danger pour soi ou pour les autres » ? ... 39

2. Ce qui est craint, ce qui fait problème ... 40

CONCLUSION DE LA SECONDE PARTIE ... 43

TROISIEME PARTIE : DEFINITION DE LA PLACE PARENTALE ... 44

(4)

° 94

A.LA PARENTALITE A LŒUVRE DANS LINTERVENTION ... 44

1. La triple responsabilité des parents ... 44

2. Parentalité : Des moments de protection sans limites ... 45

3. Les modèles d’intervention parentale ... 47

B.UNE INTERVENTION EN INTERACTION AVEC DAUTRES ACTEURS ... 51

1. Une sœur en première ligne, en l’absence d’autres relais ... 52

2. Recours à l’entourage familial : des solidarités familiales très diverses ... 52

3. Une place parentale définie de façon contradictoire par les autres acteurs ... 53

C.LES CONDITIONS DUNE REDEFINITION CHOISIE DU MODE DINTERVENTION ... 55

1. L’impuissance et l’ignorance des familles ... 55

2. Supports et tiers : les conditions de l’accès à une forme d’autonomie par la définition d’une indépendance mutuelle ... 56

CONCLUSION ... 60

BIBLIOGRAPHIE ... 62

REMERCIEMENTS ... 64

(5)

° 94

AVANT-PROPOS

Ce dossier d’étude est réalisé à partir du travail de master 2 recherche de Delphine Moreau, lauréate du 1er prix Cnaf 20061. C’est l’occasion de présenter ici un travail intéressant et clair portant sur la redéfinition des relations familiales en cas de troubles psychiques de l’enfant.

Les politiques désinstitutionalisation de la psychiatrie et la diminution du nombre de lits en hôpital ont remis au premier rang les familles pour la prise en charge des malades psychiques chroniques.

Comment les parents définissent-ils leur rôle face à un enfant qui est ou devient adulte lorsque son autonomie est ébranlée par des troubles psychiques ? Delphine Moreau s’intéresse aux parcours où cette autonomie a été, au moins ponctuellement, disqualifiée par une hospitalisation sans consentement.

Elle décrit de manière très précise la façon dont les parents identifient, puis qualifient les troubles. L’absence de connaissances préalables, les maladies inconnues, la difficulté de trouver une forme de logique rendent cette étape longue et difficile à vivre. D’autant plus que les troubles mentaux sont le plus souvent assimilés à des conduites déviante et introduiraient du désordre dans la société

Une fois la maladie identifiée, les parents interviennent pour le bien de l’enfant, leur action se situant alors dans le prolongement de la parentalité, avec parfois une dimension plus intrusive voir coercitive. Les troubles psychiques ont pour effet la prolongation de cette responsabilité bien au-delà de la majorité. Cette période, plus ou moins longue, fait l’objet de parcours de décohabitation/recohabitation. Les parents passent par des phases de négociations, de pressions avant le recours à un tiers. Ces familles doivent alors faire le deuil des espoirs investis dans les enfants pour leurs parcours scolaires et professionnels.

Dans ce contexte, les membres du groupe familial élargi peuvent servir de relais comme source d’information, soutien financier, soutien affectif, aide ponctuelle.

Delphine Moreau poursuit et approfondit cette année ce travail dans le cadre d’une thèse, parions que ce sera une étude originale et de qualité !

Catherine Vérité

CNAF – Pôle recherche et prospective

1Pour la présentation de ces prix, voir le site www.cnaf.fr rubrique Jeunes chercheurs

(6)

° 94

INTRODUCTION

L’apparition de troubles psychiques2 chez une personne peut conduire à la fois à la mobilisation et la mise en crise des liens familiaux. La redéfinition des relations entre les membres d’une famille face à une situation nouvelle et difficile est l’occasion d’une mise en lumière de ce que ces liens impliquent selon les acteurs. Comment les parents définissent-ils leur rôle face à un enfant qui est ou devient adulte lorsque son autonomie est ébranlée par des troubles psychiques ? Cela sera ici étudié dans les parcours où cette autonomie a été, au moins ponctuellement, disqualifiée par une hospitalisation sans consentement.

La psychiatrie a connu des transformations majeures dans la seconde moitié du XXE siècle, dont la principale a été la fermeture des grands asiles et l’effort pour réintégrer les malades dans la communauté. Ces transformations ont opéré une reconfiguration de la prise en charge de la maladie mentale et déplacé la signification sociale de la folie.

Elles ont notamment mis les familles en première ligne dans l’accompagnement et la prise en charge des personnes affectées de troubles psychiques.

Les sévices subis par les « fous » au cours de la seconde guerre mondiale ainsi que la critique de l’asile au cours des années 1960-70 ont, en effet, conduit à remettre fortement en cause les politiques ségrégatives et à chercher au contraire à opérer une prise en charge des malades au sein de la communauté et à privilégier leur (ré)-insertion. La découverte de chimiothérapies permettant de réduire et de contrôler les troubles (médicaments psychotropes) a participé à cette politique de déshospitalisation, facilitant le maintien en milieu ordinaire des patients par une réduction des symptômes une diminution des troubles. En France, s’est opéré depuis les années 60 un vaste mouvement de sectorisation et de désinstitutionnalisation, avec le développement de structures de jour alternatives à l’hospitalisation. La politique de réduction des coûts de santé a amplifié cette évolution, conduisant à une diminution du nombre de lits (places) disponibles et à une diminution plus importante encore des durées moyennes de séjour. Les hospitalisations tendent ainsi aujourd’hui à répondre aux états aigus et ne plus constituer la prise en charge

« normale », « au long cours »3 des personnes souffrant de troubles psychiques.

Cette évolution ne s’accompagne pas d’une diminution du recours aux hospitalisations sans consentement (HSC)4, bien au contraire. Les HSC sous leur deux modalités, l’hospitalisation d’office (HO) et l’hospitalisation à la demande d’un tiers (HDT) sont définies par la loi du 27 juin 1990. Celle-ci s’inscrit dans le mouvement de développement des droits des malades et était destinée à mieux protéger notamment les droits des personnes hospitalisées en psychiatrie5 ; elle maintient cependant la possibilité de la contrainte, contrairement à la loi italienne de 1978 dite « Loi Basaglia », qui entérine la décision de fermeture des asiles. Or le nombre d’HSC a fortement augmenté depuis 1990, en particulier le nombre d’hospitalisations à la demande d’un tiers (HDT), dont une proportion particulièrement significative des procédures d’urgence6. L’interprétation de ce phénomène est complexe : on peut s’inquiéter de la possibilité d’abus et de détournement de la loi de 1990, interroger l’organisation du système de prise en charge psychiatrique en France (en notant la disparité des chiffres entre les départements)7 et poser la question notamment de la réduction des temps de séjour et de l’absence éventuelle d’un réseau d’accueil de jour suffisant, obligeant à des hospitalisations multipliées. Le rôle de questions nouvelles comme le développement de l’usage de produits psycho-actifs et l’hypothèse d’une plus grande intolérance sociale aux troubles sont également examinés.

Ces transformations de la psychiatrie ont impliqué directement les familles, quoique de façon longtemps invisible. Les familles sont, en effet, amenées à participer de façon importante à la prise en charge de leurs proches : en amont de tout contact médical, par la sollicitation de soin, l’organisation ou la signature d’une hospitalisation à la demande d’un tiers, et en amont comme en aval dans un accompagnement sous diverses formes : soutien, démarches, logement, argent, aide au quotidien…8 Elles restent cependant diversement reconnues comme partenaires de la prise en charge par les soignants dès lors que leur parent malade a atteint sa majorité.

Nous nous sommes attachée à l’étude de ces situations où des proches sont intervenus dans la vie d’une personne jusqu’à participer éventuellement à son hospitalisation contre son gré, c'est-à-dire à une privation de liberté

2 Nous avons choisi ce terme de « troubles », parce qu’il permettait de désigner à la fois des désordres « intérieurs », la « pathologie » à l’œuvre, et les désordres sociaux incitant des témoins à opérer ce travail de qualification. Par suite, ce terme permettait de ne pas trancher entre ce qui relève dans la maladie psychique d’un processus endogène ou de la relation d’un individu à son milieu.

3 F. Zambrowski, Moderniser et diversifier les modes de prise en charge de la psychiatrie française, Rapport au Ministre de la Santé, 1986, Paris, La Documentation française, 1989.

4 Autrefois nommées « placements » dans la loi de 1838 ou plus couramment « internements », terme encore employé, les hospitalisations sans consentement, telles qu’elles sont désignées par la loi de 1990 sont couramment dites « sous contrainte », ce qui est plus explicite.

5 La loi de 1990 s’intitule « Loi relative aux droits et à la protection des personnes hospitalisées en raison de troubles mentaux et à leurs conditions d'hospitalisation », modifiée par la loi du 4 mars 2002 (Code de la Santé Publique Art L3211-1 à L3215-4). Elle intègre les orientations d’une recommandation européenne de 1983 (Comité des Ministres du Conseil de l’Europe, « Recommandation R(83)2 sur la protection juridique des personnes atteintes de troubles mentaux et placées comme patients involontaires », adoptée le 22 fév. 1983).

6 Circulaire du Ministère de la Santé DGS/6C du 24 mai 2004.

7 M. Coldefy, Les secteurs de psychiatrie générale en 2000, DREES, Etudes n° 42 – mars 2004

8 Cf. L’enquête de Martine Bungener auprès des proches de malades membres de l’UNAFAM : Trajectoires brisées, familles captives. La maladie mentale à domicile, Paris, Les Editions Inserm, 1995.

(7)

° 94

de mouvement et potentiellement l’imposition de traitements, et cela en raison de troubles psychiques. L’analyse des différentes modalités de l’intervention des proches et de la manière dont ils définissent la situation dans laquelle ils interviennent permet de mettre en évidence les conceptions de l’autonomie que ces pratiques définissent en creux.

L’

AUTONOMIE EN QUESTION

La réalisation d’hospitalisations sans consentement implique une conception selon laquelle il peut être porté atteinte à l’autonomie d’une personne, à la possibilité pour elle de déterminer son sort (par une atteinte à la fois à sa volonté exprimée et à sa liberté de mouvement), au nom de son autonomie défaillante : son incapacité à juger correctement des choses, un mésusage de sa liberté jusqu’à la dangerosité. Les conduites qui font troubles sont alors imputées à la défaillance de l’autonomie et interprétées comme la manifestation d’une maladie à soigner.

Cette première formulation du problème de l’autonomie met en jeu ce qu’on pourrait appeler par ces termes aujourd’hui moins employés : la liberté et la folie. La folie est-elle une aliénation de la liberté des sujets ? La folie est- elle la désignation de la déviance à une norme au nom de laquelle on enferme des personnes ?

L’enquête sur la place des proches, et notamment des parents, dans le parcours de personnes hospitalisées sans leur consentement en psychiatrie met en lumière une seconde dimension de la question de l’autonomie. C’est cette deuxième dimension qui s’avère première dans l’expérience des proches : c’est ainsi que se présentent à eux les questions, les événements qu’ils vivent, ce qu’ils perçoivent et la manière dont ils se le formulent. Il s’agit de la manière dont les troubles psychiques affectent l’indépendance d’un enfant devenant adulte ou déjà adulte, sa capacité à assumer sa vie quotidienne, à habiter seul, suivre ses études, obtenir un emploi et en remplir les tâches, etc., conduisant les parents ou les proches à intervenir plus ou moins dans sa vie. Cette intervention peut comporter de multiples facettes, depuis le ménage, l’aide à remplir des documents administratifs, la pension alimentaire, l’accompagnement chez le médecin, jusqu’à l’hospitalisation sans consentement.

Partant des débats autour de l’hospitalisation sous contrainte, il est apparu que la compréhension de ce que font les parents face à l’hospitalisation sous contrainte dépend de la définition d’une place parentale qui concerne de façon beaucoup plus large le réglage de l’ensemble de leurs interventions face aux troubles psychiques de leur enfant et leurs effets.

La manière dont les proches, en particulier les parents, décrivent les conceptions qu’ils ont de l’autonomie et leurs interventions, s’inscrit dans trois temporalités : (1) celle de l’accès à l’âge adulte et à l’indépendance des enfants9, que vient perturber la seconde, (2) celle de l’apparition des troubles et de leur évolution, à laquelle vient « répondre » (3) celle des positionnements respectifs des différents acteurs (parents, enfants, entourage, soignants…), leur propre parcours face aux troubles, qui a son rythme propre à chacun.

La relation parents-enfants est, en effet, prolongée ou réactivée à l’apparition des troubles, ce qui implique probablement de redéfinir cette relation, dans la mesure où la situation de dépendance partielle d’un jeune enfant à ses parents n’est pas a priori vouée à perdurer indéfiniment. Entre soutien dans une situation difficile et infantilisation, entre un désordre mineur et acceptable et une défaillance à laquelle il faut pallier, entre intervention et ingérence, entre l’écart à ce que les parents jugent « normal » et l’identification par l’un des acteurs d’un trouble relevant du psychiatrique, chaque jour peut être porteur de son lot d’« épreuves » (au sens courant et au sens de la sociologie pragmatique10) où il s’agit de qualifier la situation pour définir la réponse adéquate à y apporter.

L’autonomie associée à l’âge adulte renvoie ainsi à trois aspects : l’autonomie comme liberté de la volonté en son sens le plus fort, mais ici dans sa dimension dynamique de la liberté à laquelle on accède, d’émancipation11; l’autonomie comme capacité (en acte) à se prendre en charge matériellement (depuis l’hygiène corporelle jusqu’à l’indépendance financière) ; et enfin la majorité légale. Elle s’oppose alors moins à l’aliénation-folie, la contrainte ou l’interdiction qu’à l’aliénation-soumission aux autres, la dépendance, la déficience (le handicap) et la minorité.

Cette enquête propose ainsi un éclairage sur la place de l’autonomie dans nos sociétés sous un angle différent de celui proposé par les analyses décrivant la montée de l’autonomie comme norme12, en réinscrivant la question de l’autonomie dans les pratiques, dans la manière dont les acteurs la définissent et en font jouer les sens, dans les relations de solidarité et de dépendance.

9 La majorité des troubles de type schizophrènes ou psychotiques apparaissent entre 15 et 25 ans. De plus, en raison des modalités de notre rencontre des enquêtés, que nous décrivons plus loin, nous avons plutôt interviewé des parents de malades, parfois des frères, sœurs ou conjoints que des enfants de malades (certains cumulant cependant les positions). Ce sont deux raisons, l’une tenant peut-être à la nature des troubles, l’autre plus conjoncturelle tenant aux conditions de notre enquête, qui ont suscité l’interrogation sur la manière dont les troubles interfèrent avec le devenir adulte/passage à l’âge adulte des personnes.

10 Voir infra,le chapitre « Cadre théorique ».

11 Kant définit ainsi la « majorité » comme courage et capacité à penser par soi-même dans Qu’est-ce que les lumières ? (1784), Paris, Garnier- Flammarion, 1991.

12 Alain Ehrenberg décrit ainsi une société d’individus à la fois émancipés de liens contraignants et « déficitaires » devant une exigence d’auto- réalisation toute-puissante. Cf. La fatigue d’être soi. Dépression et société, Paris, Odile Jacob, 1998

(8)

° 94

On voit ici que la notion d’autonomie renvoie à des dimensions hétérogènes : quotidiennes, légales, cognitives, métaphysiques… On pourrait se demander dans quelle mesure cette notion ne perd pas en signification dans l’extension de son usage et s’il est pertinent de l’employer encore. On veillera dans l’analyse à distinguer ces différentes dimensions, mais surtout on s’intéressera aux articulations qu’en proposent les acteurs (par exemple l’incapacité à prendre soin de soi et sa vie en charge comme signe d’une pathologie de la volonté, ou au contraire l’articulation de la reconnaissance d’une pathologie psychiatrique assez lourde et du souci pour le proche avec le maintien d’une distance et la reconnaissance d’un espace de non-intervention des parents).

La question de l’autonomie des personnes atteintes de troubles psychiques est ainsi abordée à travers la question de l’intervention de proches auprès d’eux, qui peuvent agir à leur place et parfois contre leur gré, au nom de leur autonomie (psychique) défaillante et parfois pour leur permettre une forme d’autonomie (sociale) possible, la contrainte étant justifiée par le but de soins. Il s’agit de comprendre comment cette intervention s’articule à une qualification psychiatrique des troubles mais aussi à une définition de la place parentale et, par suite, quelle définition pratique de l’autonomie des enfants jeunes adultes elle implique.

R

EVUE DE LITTERATURE ET AXES DE RECHERCHE

Notre étude s’inscrit ainsi au croisement de trois domaines de recherche dans les sciences sociales : la famille, la médecine en général, et la psychiatrie.

1. La place des proches auprès des malades et des personnes dépendantes

La place des proches dans l’accompagnement des malades fait l’objet, de la part des sciences sociales, d’un intérêt croissant notamment depuis le début des années 90 : cela suscite un renouvellement de l’approche de la médecine et de la maladie en mettant en lumière le travail invisible des « aidants » dans la prise en charge des maladies chroniques et neuro-dégénératives, mais aussi un renouvellement de la réflexion sur la famille, avec la mise en exergue de solidarités familiales vivaces contrairement aux thèses affirmant l’éclatement de la famille comme résultat d’un individualisme croissant.

Le rôle des proches dans la prise en charge de la maladie est apparu dès les années 70 dans les travaux sociologiques. La notion de « trajectoire de maladie », issue de la sociologie interactionniste américaine, développée notamment par Anselm Strauss et Juliet Corbin à propos des maladies chroniques13, a permis notamment de mettre en évidence le travail et les différents acteurs qui entourent la maladie hors de sa seule prise en charge par les soignants :

« (…) le terme de trajectoire a pour les auteurs la vertu de faire référence non seulement au développement physiologique de la maladie de tel patient, mais également à toute l’organisation du travail déployée à suivre ce cours, ainsi qu’au retentissement que ce travail et son organisation ne manquent pas d’avoir sur ceux qui s’y trouvent impliqués. »14

Mais c’est surtout à partir des années 1990 que se sont développées des études portant spécifiquement sur le point de vue des proches, avec les travaux de Waissman sur les parents d’enfants souffrant d’insuffisance rénale15 mais surtout avec les travaux sur la maladie d’Alzheimer16.

La place des proches est actuellement en cours de reconfiguration dans la pratique médicale : la promotion de l’autonomie du patient et de ses droits tend à effacer le rôle de la famille mais une nouvelle place se dessine avec la notion de « personne de confiance » (chargée de représenter l’intérêt du patient au cas où il serait hors d’état de s’exprimer), et l’identification d’« aidants principaux » par les soignants (la ou les personnes qui seront en charge de manière privilégiée d’une personne atteinte de démence évolutive). L’éclairage jeté sur les situations de dépendance vient ainsi remettre en cause cette valorisation de l’autonomie. La définition de ce qu’implique le respect de l’autonomie dans ces situations complexes suscite de nouvelles tensions, notamment dans les cas frontières (typiquement : adulte capable légalement, c'est-à-dire sans mesure de tutelle, et dont les capacités ne sont affectées que partiellement).

C’est également à partir des notions de dépendance et de solidarité que la sociologie de la famille a ouvert de nouvelles perspectives sur l’étude des liens familiaux. La vivacité, dans le champ anglo-saxon, des études fondées sur la notion de care (souci/soin des autres), issues des perspectives féministes, a participé à la mise en évidence du travail invisible de ceux qui sont engagés dans des pratiques d’aide aux personnes dans des situations de dépendance17.

13 J. Corbin, « Le soin : cadre théorique pour un cheminement interactif », Revue Internationale d’Action Communautaire, automne 1992, 28/68, p.39- 50. A. Strauss (et al.), « Maladie et trajectoire », in La trame de la négociation, textes réunis par I. Baszanger, Paris, L’Harmattan, 1992, p.143-189.

14 A. Strauss (et al.), ibid.., p.143.

15 R. Waissman, « L’enfant, la famille et la maladie chronique : construction d’une autonomie », in Novaes S. (dir.), Biomédecine et devenir de la personne, Paris, Esprit/Seuil, 1991.

16 Cf E.K. Abel, “The caregivers’perspective”, in Charmaz K.,. Paterniti D.A (eds.), Health, Illness and healing : society, social context and self, Los Angeles, Rowbury, p.150-164. Pour une bibliographie complémentaire, voir S. Samitca, « Les secondes victimes de la maladie d’Alzheimer », Paris, Sciences sociales et Santé, Juin 2004, vol 22, n°2, p.73-96.

17 P. Paperman, S. Laugier (dirs.), Le souci des autres. Ethique et politique du care, Raisons Pratiques n°16, Paris, Editions de l’EHESS, 2005.

(9)

° 94

Cela a amené à relativiser les perspectives en mettant l’accent sur les recompositions familiales et leur lien avec un individualisme croissant18, plutôt développées par les spécialistes de la conjugalité et de l’enfance, certains spécialistes de la vieillesse et de la dépendance soulignant la vivacité des solidarités familiales19. Il existe cependant des situations contrastées. Cette notion aujourd’hui clef de « solidarités familiales » fait en même temps l’objet d’une déconstruction, dans la mesure où elle tend à se reposer sur l’évidence de solidarités dites « naturelles » et à masquer le désengagement de l’Etat dans la prise en charge de problèmes sociaux20. Les études actuelles cherchent à réinscrire les solidarités familiales dans les réseaux d’échanges autour des individus, réseaux qui ne sont pas superposables à la famille nucléaire.

Rémi Lenoir souligne que la « famille » n’est pas un groupe « naturel », qui « va de soi »21, précisément parce que la configuration des liens effectivement mobilisables et mobilisés est très variable : le terme fonctionne comme s’il désignait un référent stable, mais la définition de ceux qui en sont membres varie selon ses occurrences (petit cercle ou grand cercle) et certains de ses membres en sont implicitement exclus. La « famille » apparaît ainsi comme un objet rien moins que naturel, sauf lorsqu’il est « mis en acte » : son caractère « naturel » n’est pas une propriété a priori des liens familiaux, mais leur est imputé quand l’action se fait au nom de ces liens. Le recours à la « famille » paraît alors

« aller de soi ».

Si nous employons dans ce mémoire le terme de « famille » pour désigner les proches mobilisés dans la prise en charge22, cet usage ne doit ainsi pas masquer les grandes différences observables au sein des familles, et notamment le fait que certains membres se mobilisent plus que d’autres (le plus souvent les parents, mais pas toujours, et de façon différenciée dans le couple). De fait, notre recherche porte sur des liens effectivement mobilisés. De plus l’identification d’« aidants principaux » ne doit pas masquer le recours à des réseaux secondaires23, et leur mobilisation doit être analysée au regard de la place que prennent les autres acteurs, et du rôle qui leur est assigné. La définition de la place des familles se fait en effet en interaction et dans la négociation avec d’autres acteurs : le membre de la famille sujet des troubles lui-même, les soignants, et les autres intervenants (autres membres de l’entourage, police, etc.)

2. Le problème de la qualification psychiatrique et du rôle des familles en psychiatrie

L’étude de la place des proches en psychiatrie s’inscrit ainsi dans la lignée de ces travaux. Elle se double cependant de problématiques spécifiques. Nous en distinguerons deux principales : (1) l’étude des modalités actuelles de la prise en charge des personnes souffrant de troubles psychiques, suite aux bouleversements de la psychiatrie.

Celles-ci font-elles l’objet d’un traitement social spécifique ? Ce qu’Erving Goffman nommait la « carrière morale des malades mentaux », notion dont nous aurons à nous interroger sur la pertinence actuelle. Et (2) l’étude de la place des familles en psychiatrie, qui ont été l’objet de nombreux soupçons, de la part des critiques des dispositifs psychiatriques comme de la part des professionnels du psychique, sous les différentes figures de la famille-instance de contrôle social, la famille-interneuse, et la famille pathogène. Ce n’est que ces dernières années, ou de façon plus minoritaire, que d’autres dimensions ont été mises en avant, comme les effets de la maladie psychique sur le groupe familial, la charge du soin, et la famille comme partenaire dans le soin. Des recherches ont été réalisées pour mettre en évidence le rôle de la famille dans la prise en charge24 et la manière dont les troubles psychiques d’un de ses membres affectaient le cours de sa vie, y causant une véritable rupture25.

Une longue histoire de soupçons pèse sur la qualification psychiatrique, qui est étroitement liée à ce qui a longtemps été sa traduction pratique : l’hospitalisation, encore aujourd’hui nommée dans le langage courant

« internement »26. L’enfermement des malades mentaux a été l’objet des premiers travaux de sciences sociales sur la psychiatrie : généalogie de cet enfermement 27, histoire des pratiques d’hospitalisation, et notamment de l’institutionnalisation de l’hospitalisation sous contrainte28, étude de la condition du malade mental en asile29. Ces

18 F. de Singly, Le soi, le couple et la famille, Paris, Nathan, 1996 ; D. Le Gall et C. Martin, « L’instabilité conjugale et la recomposition familiale », in F. de Singly, La famille, l’état des savoirs, Paris, La Découverte, 1991, p.58-56.

19 F. Weber, S. Gojard., A. Gramain, Charges de famille. Dépendance et parenté dans la France contemporaine, Paris, La Découverte, « Enquêtes de terrain », 2003.

20 D. Debordeaux, P. Strobel (dir.), Les solidarités familiales en questions. Entraide et transmission, Paris, LGDJ, « Droit et société », vol.34, 2002.

21 R. Lenoir, Généalogie de la morale familiale, Paris, Seuil, 2003, p.17.

22 « Quand tous les mots sont piégés, il faut bien quand même les utiliser », Agnès Pitrou, commentant l’usage des mots « famille » et « solidarités », précisant qu’il lui semble plus important de s’attacher à définir ce dont on parle que de vouloir délimiter de manière définitive les concepts utilisés : A. Pitrou, « A la recherche des solidarités familiales. Concepts incertains et réalité mouvante », D. Debordeaux, P. Strobel (dir.), op.cit., p. 233-254.

23 Ce qu’Alain Grand nomme la « seconde ligne » de soutien dans un article portant sur la prise en charge des personnes atteintes de la maladie d’Alzheimer (A. Grand., « Des « secondes victimes » aux managers du dispositifs de prise en charge », Sciences sociales et Santé, Juin 2004, vol 22, n °2), faisant référence à la notion de réseau de support social de Keating (N. Keating (et al.), « Understanding the caring capacity of informal network of frail seniors : a case for care networks », Ageing and society, 2003, 25, p.115-127).

24 M. Bungener, op. cit.

25 J. Harden, « Parenting a young person with mental health problems temporal disruption and reconstruction » , Sociology of health and illness, 27, 3, pp.351-371.

26 Le terme d’internement est encore d’usage courant : nous l’avons entendu dans les conversations ordinaires sur l’hospitalisation en psychiatrie et il arrive que les interviewés l’utilisent. Les proches, et notamment ceux qui se sont engagés dans une association, tendent plutôt à éviter ce vocable et à placer la mesure sous l’égide du soin en se servant du terme « hospitalisation ». Il arrive qu’il ressurgisse notamment quand ils parlent de leur appréhension vis-à-vis de cette mesure sous contrainte, ce qu’elle évoquait pour eux. Ainsi Jérôme Gauthier parlant d’un de ses amis : « Mais pour moi, c’était, c’est sûr que c’était inquiétant, mais on savait pas quoi faire. J’avais pas pensé un seul instant à l’interner. Je me disais : il faudrait vraiment qu’il soit suivi. Je me disais : je peux pas le forcer, c’est pas possible. » J. Gauthier, 24 ans.

27 M. Foucault, Histoire de la folie à l’âge classique, Paris, Gallimard, 1972 (1ère éd. 1961).

28 R. Castel, L’ordre psychiatrique. L’âge d’or de l’aliénisme, Paris, Editions de minuit, 1976.

(10)

° 94

travaux ont nourri une vive critique du pouvoir psychiatrique, mettant en évidence le fait que, par-delà le soin, le pouvoir médico-administratif répondait en réalité à une demande sociale d’un autre ordre, l’enfermement d’individus perçus comme « déviants »30.

Le mouvement de désinsitutionnalisation et de sectorisation n’a fait que déplacer la critique, et susciter le soupçon contre ces nouvelles modalités du contrôle social que seraient la médication et le suivi par le réseau de prise en charge de jour31. Les sciences sociales ont de leur côté développé des approches sensiblement nouvelles : étudiant la conception de l’individu véhiculée par les pratiques psychiatriques32 ou l’articulation de celles-ci avec les transformations globales de la société33.

Le soupçon qui pesait sur les qualifications psychiatriques vise doublement les familles, à la fois de la part de ceux qui ont une vision critique de la psychiatrie en général, mais aussi de la part des professionnels eux-mêmes. La famille peut être considérée comme participant au maintien d’un ordre social34 et/ou se servir de la psychiatrie pour régler ses conflits internes35.

Nous nous interrogerons sur le travail de qualification psychiatrique des troubles opéré par les parents, la manière dont il s’articule au traitement social de ces troubles et notamment à sa prise en charge médicale (hospitalisation en psychiatrie, diagnostic).

C

ADRE

T

HEORIQUE

Nous souhaitons par une approche compréhensive participant du cadre interactionniste36 et de la sociologie pragmatique37 saisir la dynamique des positionnements des acteurs. Pour comprendre comment les proches définissent leur intervention, il nous a semblé important d’aborder l’organisation de la prise en charge de manière dynamique : ces parcours, très longs, et souvent qualifiés de « chaotiques », connaissent en effet différentes phases, selon l’évolution des troubles, les succès et les échecs des solutions trouvées, les ressources dont disposent les proches (en termes d’information, de personnes, d’argent, d’endurance parfois), et l’extension et les modalités de l’intervention côté soignants. La notion de « trajectoire de maladie », développée par Juliet Corbin et Anselm Strauss38, outre le fait qu’elle fait apparaître le rôle des proches, permet de mettre en évidence la diversité des modes d’intervention autour du malade, l’importance de la dimension temporelle dans l’organisation de ce travail et la complexité des facteurs qui l’affectent.

Il faut souligner que le « travail » qui entoure les troubles psychiques n’est qu’en partie « médical » en un sens strict, même si on y inclut les thérapies psychologiques. Il comporte toute une part d’accompagnement « social » (gestion de l’argent, aide aux démarches…), quel que soit l’acteur qui le met en œuvre. Strauss soulignait le travail de soin opéré par des non-soignants, ici l’accompagnement social peut être opéré par des soignants et des membres de l’institution médicale : demande d’Allocation adulte handicapé (AAH), de tutelle, et même, gestion des relations avec le voisinage.

La définition même de la situation comme relevant du médical et des troubles comme maladie ne va d’ailleurs pas de soi, mais fait l’objet de tout un travail de qualification. Le cadre de la sociologie pragmatique en particulier nous permettra de travailler simultanément à deux niveaux : étudier les notions-clefs qui organisent la pratique, et analyser les situations concrètes dans lesquelles sont engagés les acteurs. Il s’agit en effet de saisir les principes et dispositifs auxquels se réfèrent les acteurs, qu’ils construisent lors d’épreuves39 : ces moments de crise privilégiés où s’opèrent qualification et requalification par les acteurs de leur contexte d’action. Il s’agit de saisir ici les définitions et reconfigurations d’une autonomie désignée à la fois comme défaillante et dont la restauration serait la finalité ultime de la décision.

M

ETHODE ET DESCRIPTION DU TERRAIN

L’approche qualitative au moyen d’entretiens approfondis avec des proches nous permet d’une part, de reconstituer la trajectoire d’une personne hospitalisée sous contrainte en psychiatrie, sans la faire commencer a priori par sa prise en charge médicale et d’autre part, de comprendre la manière dont les proches définissent leur

29 E. Goffman, Asile, étude sur la condition sociale des malades mentaux, Paris, Editions de Minuit, 1968 (1ère ed. Asylums, 1961) ; A.H. Stanton & M.S.

Schwartz, The mental hospital, NewYork, Basic books Inc. publishers, 1954.

30 H. Becker, Outsiders. Etudes de sociologie de la déviance, Paris, Métailié, coll. « Observations » (1ère éd. 1963) 1985.

31 R. Castel, La gestion des risques. De l’anti-psychiatrie à l’après-psychanalyse, Paris, Editions de minuit, 1981.

32 A. Young, Harmony of illusion.Inventing post-traumatic disorder, Princeton university press, 1995.

33 M. Gauchet et G. Swain, La pratique de l’esprit humain, Paris, Gallimard, 1980 ; A. Ehrenberg, La fatigue d’être soi. Op. cit.

34 J . Donzelot , La police des familles, Paris, Ed. de Minuit, 1995 (1ère éd. 1977)

35 A. Farge et M. Foucault, Le désordre des familles. Lettres de cachet des Archives de la Bastilles, Paris, Gallimard/Julliard, 1982.

36 E. Goffman, La mise en scène de la vie quotidienne, Paris, Editions de Minuit, 1972 ; E. Goffman, Les rites d'interactions, Paris, collection Le sens commun, Ed. de Minuit, 1988.

37 L. Boltanski, L. Thévenot, De la Justification. Les économies de la grandeur, Paris, Gallimard, 1991.

38 J. Corbin J., « Le soin : cadre théorique pour un cheminement interactif », op. cit. ; A. Strauss A. (et al.), « Maladie et trajectoire », in La trame de la négociation, op. cit.

39 L. Boltanski, L. Thévenot, op. cit. ; N. Dodier, Leçons politiques de l'épidémie de sida, Paris, Ed. de l’EHESS, 2003, p.31-32.

(11)

° 94

intervention, en commençant par la manière dont ils qualifient les situations auxquelles ils sont confrontés. L’enquête de Martine Bungener, Trajectoires brisées, familles captives40 a permis de rassembler des résultats quantitatifs utiles et d’objectiver les modalités de vie en milieu ouvert des personnes souffrant de troubles psychiques : environ 40% de malades vivent en famille, un tiers de façon « indépendante », mais avec un fort investissement familial, et 24% de façon durable en institution. Cette enquête permet de fournir un tableau synchronique des modes de prise en charge actuels des malades concernés41, ainsi qu’une esquisse de leur trajectoire, et de mesurer l’implication des aidants dans ces parcours. L’approche qualitative que nous proposons, centrée sur la perspective des parents, nous permettra de mettre en évidence de façon dynamique comment les proches ont été amené à intervenir et la manière dont ils définissent leur intervention.

Partant de l’expérience des proches, nous serons amenée à mettre en évidence le rôle de différents outils juridiques ou d’outils plus spécialisés (comme les formations psycho-éducatives en direction des proches) : nous ne les analyserons que dans la mesure où ils interviennent dans leur approche.

1. Les entretiens

25 personnes ont été interrogées dans le cadre de cette recherche : principalement des parents (n=19), surtout des mères (n=15 ; pères n=4), mais aussi des sœurs (n=3), un frère, une épouse et un ami.

Elles ont, pour certaines, été contactées par bouche à oreille (n=8), et, pour la plupart (n=17), à travers une association de familles de malades psychiques, l’UNAFAM-Paris (Union Nationale des Familles et Amis de Malades Psychiques), dans laquelle elles étaient impliquées à des degrés divers, étant soit bénévoles (n=8) soit simples usagères (groupes de parole, permanences, n=9)42. Parmi ces interviewés, nous avons pu interroger chacun des conjoints de deux couples et quatre membres d’une même famille (nous avons d’ailleurs pu réaliser un entretien avec le fils qui avait été hospitalisé, que nous ne comptons pas parmi les entretiens ci-dessus). Cela a permis de recueillir différents points de vue sur les parcours des personnes concernées et les interventions autour d’elles. Rencontrer d’autres types d’apparentés ou de proches, sans rendre possible une comparaison systématique, permettait de mettre la position des parents en perspective.

Nous avions initialement défini l’échantillon à partir du fait que le proche « malade » devait avoir fait l’expérience d’une HDT (au moins) avant de constater que le cadre légal n’était pas nécessairement l’élément déterminant par lequel les acteurs qualifiaient les situations. Nous avons alors poursuivi l’enquête à partir d’une définition plus large de l’hospitalisation sous contrainte, au-delà de ses seules modalités légales (Hospitalisation à la Demande d’un Tiers, HDT, et Hospitalisation d’Office, HO), en nous intéressant à la fois aux situations où les proches avaient effectivement signé une HDT (mais parfois à l’initiative d’un médecin, voire de la police) et aux situations d’hospitalisation « libre » accompagnée de l’exercice d’une « contrainte », décrite comme telle par les personnes43. L’étude de ces situations où des proches interviennent auprès d’une personne jusqu’à participer à son hospitalisation contre son gré, en réinscrivant cet événement dans un parcours, permettra d’aborder sous un angle nouveau la question de l’« autonomie ». Au-delà des discours sur la « société de l’autonomie », elle permettra de problématiser cette notion en montrant ses différentes acceptions et sa place dans la vie sociale, dans des situations où sont mises en œuvre solidarité et contrainte au nom d’une autonomie jugée défaillante.

Les personnes interrogées sont ou ont été fortement impliquées dans les parcours des personnes hospitalisées, quoiqu’à des degrés divers. Nous n’avons pas rencontré de personnes qui auraient refusé de prendre part à l’histoire de quelqu'un de proche. Ce n’était pas un critère de sélection des interviewés, mais cela est très probablement dû au mode de rencontre de ceux-ci : je n’avais l’occasion de rencontrer que les personnes se sentant concernées par ce sujet et disposées à en parler. Les personnes rencontrées par l’intermédiaire de l’association avaient fait la démarche de s’y rendre et parfois d’y consacrer du temps comme bénévole, ce qui dénote un souci de la maladie du proche, même si cela n’implique pas nécessairement une implication directe dans sa prise en charge.

Par suite, nous n’avons pas accès, dans cette première enquête, à des parcours de personnes isolées, c'est-à-dire sans entourage, et/ou en rupture avec tous ses apparentés. Notre étude ne porte donc que sur des solidarités familiales effectivement mises en œuvre, quelque qu’en soient leurs limites et leurs modalités.

Autres biais importants : la plupart des personnes interviewées appartiennent à des classes aisées (moyennes- supérieures). Beaucoup ont pu par exemple payer le loyer d’un studio pour leur enfant voire en acheter un, avoir recours à des services d’urgences en psychiatrie privés (comme SOS-psychiatrie ou Urgence-psychiatrie), payer un transport en ambulance44 - tous éléments non négligeables que ce soit pour la réponse à une situation de crise ou la

40 Op. cit.

41 Ce sont des proches, adhérents de l’UNAFAM, qui répondent au questionnaire.

42 L’UNAFAM, créée en 1963, regroupe majoritairement des familles de personnes présentant des troubles psychiques chroniques et/ou graves.

Elle s’est battue au niveau national pour que soit reconnue la notion de « handicap psychique », ce qu’elle a obtenu en 2005, afin que soient pris en compte les déficiences spécifiques engendrées par le trouble mental. Cette notion ne fait cependant pas consensus parmi ses membres. Dans le paysage associatif autour de la psychiatrie, elle ne fait pas partie des associations les plus critiques (la plus connue, et l’une des plus critiques, étant probablement le Groupe Information Asile ; mais il existe entre les deux toute une série de petites associations, comme Schizo-Oui). Elle a établi un certain nombre de coopérations durables avec des psychiatres, et ce dès son origine, ainsi qu’avec des chercheurs en psychiatrie, notamment à l’INSERM). Elle a un recrutement particulièrement important parmi les mères, les retraités, les classes socio-professionnelles moyennes- supérieures, et notre échantillon accentue probablement cette tendance.

43 Ce que relevait également Erving Goffman, dans Asile, étude sur la condition sociale des malades mentaux, op. cit., p.187.

44 Un interviewé mentionne un tarif de l’ordre de 400-500 euros.

(12)

° 94

mise en place de conditions facilitant la vie avec la maladie. De plus, l’échantillon est presque exclusivement constitué de personnes ayant fait des études supérieures, voire ayant un niveau d’études élevé (bac + 4 et plus). Les personnes interviewées tendent à disposer de plus de ressources en termes d’information ou de voies d’accès à l’information comme en termes de personnes susceptibles de les conseiller et de les orienter. Pour autant, nous verrons qu’elles ne manquent pas de se sentir très démunies et très seules face aux troubles. Cette sur-représentation, à laquelle Martine Bungener a également affaire dans son enquête45, peut se comprendre notamment par le mode de rencontre des enquêtés : les différentes catégories sociales tendent en effet à ne pas s’investir de la même façon dans le monde associatif.

Nous avons entendu à plusieurs reprises (entretiens, réunions UNAFAM, discussions informelles) que la maladie des enfants provoquait bien souvent la rupture du couple parental – et leur prise en charge de manière très prépondérante par la mère. Les personnes interrogées sont le plus souvent des mères (plus investies que le mari dans la prise en charge des enfants et/ou ayant plus facilement recours à une association, comme usagère et comme bénévole). Elles sont le plus souvent mariées ou en couples stables. Deux mères vivent seules, et deux ont divorcé.

Les parents ont entre 48 et 75 ans, les frères et sœurs qui témoignent entre 25 et 42 ans. Ils datent la survenue des troubles de souvent plus de 10 ans auparavant (l’entrée la plus récente dans la maladie date de 4 ans et la plus ancienne de 22 ans). Ils ont ainsi effectué un long parcours : ils ont expérimenté différentes difficultés, différents dispositifs pour y répondre et ont pu également cheminer dans leur appréhension des choses.

Le fait qu’une majorité d’interviewés aient un niveau d’éducation élevé, des revenus conséquents et soient pour la plupart en couple est probablement imputable au fait que l’acceptation d’un entretien nécessite sans doute d’avoir une situation qui ne soit pas trop fragile matériellement et psychologiquement. Le fait d’avoir recours à une association et éventuellement de s’y investir est sans doute déjà l’indicateur de certaines ressources. Leur situation leur permet d’avoir accès à différentes sources d’information, différentes interprétations de ce qui se passe, différents recours face aux problèmes qui se présentent.

Cependant, plusieurs cas sortent de ces biais, ce qui permet de les pondérer, de même que les cas entendus lors des rendez-vous observés à l’UNAFAM-Paris (Cf. infra « Observations »). De plus, le désarroi qu’ils décrivent face aux troubles et leurs difficultés à trouver des solutions, malgré les moyens dont ils disposent, permet de considérer que les cas ici étudiés offrent une perspective tout à fait éclairante sur l’expérience des parents en général.

La surreprésentation des mères peut être imputée à plusieurs facteurs : (1) à leur mode de rencontre, car tant les bénévoles que les usagers de l’UNAFAM sont majoritairement des femmes et des mères de malade psychique ; (2) à ce qui conduit plus de mères à venir trouver l’association : elles occupent peut-être un rôle plus grand dans la prise en charge et le soin des enfants et des malades de la famille, et (3) il est probable qu’elles ont un rapport différent à la parole en général et à la dimension du psychique- psychologique en particulier. La réticence des pères à envisager puis accepter le caractère psychique des troubles est un élément auquel plusieurs enquêtés font référence.

Les entretiens, d’une durée de deux heures en moyenne, avaient lieu soit au domicile des personnes interrogées, soit dans un bureau de l’association. Après leur avoir brièvement décrit le thème de notre enquête, nous leur demandions de nous raconter le parcours de leur proche, avant de revenir sur certains points pour des précisions ou sur des thèmes non encore abordés. Nous avons réalisé des entretiens supplémentaires avec quatre d’entre elles, et pu rediscuter avec certaines dans des cadres informels par téléphone ou lorsque nous venions à l’association. Deux nous ont confié les copies d’un certain nombre de documents, comme des amendes de la SNCF, des échanges de courriers avec les voisins, avec les autorités de tutelle, mais surtout avec les psychiatres ou des représentants de l’institution hospitalière voire de l’Etat. L’une des interviewées nous a par ailleurs remis un tapuscrit qu’elle avait un temps pensé à publier et qu’elle a fait lire à des amis où elle relate chronologiquement les faits marquants de la maladie de son fils et de sa (non-)prise en charge par la psychiatrie. Il s’agit d’un document qui se veut à la fois factuel et le reflet de son indignation devant le « parcours d’obstacles » qu’a été pour elle la demande de soins pour son fils pendant 15 ans.

Les entretiens ont été enregistrés46, pris en notes et retranscrits. Les noms des personnes interrogées et de celles qu’elles désignent dans leurs entretiens ont été modifiés. Les éléments trop identifiants ont été changés par des équivalents.

2. Caractéristiques des personnes concernées

Il n’était souvent pas question que d’une personne dans les entretiens : au moins treize entretiens évoquaient plusieurs cas dans leur entourage proche avec plus ou moins de détails. L’entretien était généralement centré sur une

45 M. Bungener, ibid. Peu d’informations y sont disponibles sur les familles elles-mêmes : essentiellement l’âge et la catégorie socio-professionnelle des parents, qui correspond à notre échantillon.

46 Seuls deux n’ont pas été enregistrés : l’un était lors d’un second rendez-vous où une mère nous a présenté différents documents liés au parcours de son fils, ce qui a donné lieu à une longue discussion plus informelle très riche d’informations, au cours de laquelle nous avons pu prendre des notes mais où l’enregistrement nous est apparu comme risquant de donner une tonalité différente à la rencontre ; le deuxième suite au refus d’une mère qui parlait à l’insu de son enfant et était très effrayée qu’il l’apprenne, malgré nos assurances données sur l’anonymisation dont l’entretien ferait l’objet s’il était mentionné.

(13)

° 94

personne, et il apparaissait au cours du récit qu’un autre membre proche dans la famille avait également connu des hospitalisations sans consentement. Cinq entretiens portaient explicitement sur les histoires de plusieurs personnes (deux fils, un frère et une cousine, une mère et un fils) dont un sur trois personnes : toutes les histoires n’ont alors pas pu être également développées. Les cas des parents (n=3) notamment n’ont pas été développés par les interviewés, c’est pourquoi nous ne les incluons pas dans la description des personnes concernées ci-dessous. Par ailleurs, pour les entretiens avec les membres d’une même famille, nous n’avons bien sûr compté qu’une personne concernée.

Les parcours d’environ 26 personnes ont ainsi été reconstruits par les proches que nous avons rencontrés. Il s’agit de 6 femmes et 20 hommes, qui ont entre 24 et 44 ans. Une s’est suicidée à l’âge de 36 ans.

Les proches ne reçoivent pas toujours un diagnostic de la part des médecins, ou celui-ci est proposé seulement à titre d’hypothèse. Certains ont reçu plusieurs diagnostics ou entendu différentes caractérisations des troubles. Le

« type » de troubles en question, d’un point de vue psychiatrique, peut rarement être établi de façon ferme et définitive.

Il s’agit cependant pour les personnes concernées de troubles de type psychotiques, de schizophrénies ou de troubles bi-polaires, plutôt dans des formes relativement graves et/ou chroniques.

Leurs troubles ont débuté pour les plus précoces avant l’âge de 2 ans (n=2), ou dans l’enfance (entre 6 et 14 ans : n=2), et pour les plus tardifs à 38 ans (n=1), mais pour la plupart, les troubles ont commencé à l’adolescence (entre 15 et 18 ans : n=6), ou jeunes adultes (entre 20 et 30 ans : n=15)47. Les parcours étudiés sont pour la plupart assez longs, d’une moyenne d’environ dix ans (les plus courts sont de 2 à 4 ans et les plus longs vont jusqu’à plus de 20 ans). Le « début » des troubles est cependant parfois difficilement définissable et fait l’objet d’un important travail d’interprétation rétrospective.

La plupart des personnes concernées ont peu ou n’ont pas travaillé, beaucoup reçoivent une allocation adulte handicapé. Certains sont cependant encore dans une perspective de recherche d’emploi, en milieu « normal » ou en milieu protégé. Un homme diagnostiqué bi-polaire, dont nous avons rencontré des proches sans passer par l’association de familles, occupe aujourd’hui un emploi de cadre, est marié et a un enfant. Une femme, également diagnostiquée bi-polaire, est intermittente du spectacle. Seule une partie est sous curatelle48. Certains ont vécu en couple, certains ont actuellement une relation amoureuse, mais une grande majorité est célibataire.

Où vivent-ils au moment des entretiens ? 8 sont dans des logements indépendants, souvent à proximité de leurs parents – seuls deux ou trois en sont propriétaires ou en paient eux-mêmes le loyer ; 6 vivent chez leurs parents, 3 dans des chambres dans l’immeuble de leur parents, 2 sont dans des foyers, 1 dans une institution en Belgique, 1 dans une famille d’accueil et 3 sont hospitalisés49.

Il est probable que la plupart des cas décrits représentent des formes graves de la maladie, la gravité et la chronicité des troubles étant probablement un facteur important dans la démarche des proches d’aller trouver une association et de s’y investir.

3. Les observations

Nous avons complété ces entretiens par des observations de permanences de l’association (n=17) où l’on peut venir se renseigner sur rendez-vous, ce qui était presque systématiquement l’occasion pour les proches usagers de faire le récit de leur histoire, tantôt spontané, tantôt suscité par des demandes d’éclaircissement de la part des bénévoles afin de cerner la situation. Sont venus aux permanences observées 10 mères, 2 pères venus avec leur femme, 5 sœurs, dont une demi-sœur. Il arrivait au cours de ces rendez-vous que les bénévoles fassent part de leur expérience (nous avons par ailleurs réalisé des entretiens avec certains d’entre eux, voir plus haut).

Ces observations ont permis d’entendre les questions posées par les parents (recherche d’une mutuelle à un prix pas trop élevé, d’une structure d’accueil d’habitation ou pour des vacances ou des activités, d’un « psy » ; information sur la maladie, les tutelles ; besoin de parler). Elles ont également permis d’avoir accès à des parcours plus diversifiés, à des moments de doute sur la nature des troubles, antérieurement à toute prise en charge psychiatrique, à des moments plus chaotiques des parcours (une bénévole a ainsi incité une mère très en détresse à aller consulter pour elle-même un psychiatre, elle est alors allée aux urgences d’un hôpital accompagnée d’une autre bénévole : cette mère témoignait d’un grand isolement, séparée de son mari et peu entourée par ailleurs). Les récits sont cependant souvent trop parcellaires pour être exploitables et sont utilisés ici essentiellement à titre de contrepoint.

Nous examinerons donc la question de la place des parents dans les parcours de personnes souffrant de troubles psychiques à travers trois moments :

47 Cela correspond aux données épidémiologiques qui indiquent une plus grande fréquence de début de troubles entre 15 et 25 ans, ainsi qu’une disproportion hommes-femmes, plus accentuée dans notre échantillon. Les psychoses plus tardives n’apparaissent pas dans l’échantillon sans doute en raison du mode de recrutement des interviewés, l’UNAFAM rassemblant plutôt des parents de malades psychiques. Lorsque des troubles apparaissent vers 40-50, les parents peuvent être trop âgés pour prendre en charge le malade, voire être décédés, ou d’autres personnes peuvent être mobilisées, comme le conjoint.

48 La curatelle est un mode de tutelle allégé : les personnes sous curatelle ne sont pas privées de tous leurs droits civiques, mais voient leurs bien gérés par un curateur, avec des degrés d’intervention ajustables : depuis les actes importants, comme la vente d’un bien immobilier, jusqu’à la gestion de l’argent au quotidien. Cf B. Eyraud, Habiter sous tutelle. Un révélateur de nouvelles conditions de dépendance ou d’autonomie, Mémoire pour le DEA de sociologie, EHESS, 2003.

49 Les proportions correspondent à celles identifiées par l’enquête de Martine Bungener, que nous citions plus haut : environ 40% de malades vivant en famille, un tiers de façon indépendante, et 24% de façon durable en institution.

(14)

° 94

(1) Comment les parents identifient-ils les troubles psychiques et opèrent-ils la qualification qui les conduit à avoir recours à la psychiatrie ? Il s’agit de se demander comment s’articule leur intervention à cette qualification et dans quelle mesure celle-ci les conduit à une disqualification de l’autonomie de leurs enfants.

(2) Comment les parents interviennent-ils ? Après avoir étudié leur conception de l’autonomie de leur enfant, nous nous intéresserons à la manière dont, pratiquement, ils la définissent : il s’agira notamment d’étudier la place de la contrainte dans leur intervention, ses formes et ses degrés, la manière dont elle est légitimée, et ce qui la suscite.

(3) Comment cette intervention est-elle définie ? Nous mettrons en évidence que les modes d’interventions se révèlent très contrastés, bien que s’inscrivant initialement dans une référence à une conception commune de la parentalité. Il s’agira de distinguer ce qui permet de rendre compte de ce contraste, en réinscrivant l’intervention parentale tant dans l’interaction avec les autres acteurs que dans les éléments de contexte (matériel, légal, culturel) dans lequel elle prend place.

Références

Documents relatifs

« On ne force pas les professeurs ou les départements à passer à la formation en ligne [...] mais, de temps en temps, on leur rappelle que s'ils veulent se faire connaître,

Je me sens plein de vide Je reçois le vide j'aime le vide je contiens le vide je suis le vide je suis vide le vide viderai le vide je n'évite pas le vide je connais je connais bien

A travaillé avec Présage d’Innocence (Sofie Kokaj, (E)Utopia (Armel Roussel), Garçongarçon (Salvatore Calcagno), Mariedl (Selma Alaoui), les Viandes Magné- tiques (Jean-Baptiste

Pierre Tilly Historien, HELHa et UCL Mons Contrairement à d’autres continents où les recherches sont plus abouties, la question du travail au sens large dans le monde colonial

Mais quel que soit le contexte, la participation des usagers telle qu’elle est pensée au travers de la démocratie sanitaire vise un même objectif : reconnaître les personnes non

Dès qu ' il y a deux enseignants ils sont obligés (cela devrait pouvoir pré sen ter des côtés positifs) d'organiser un planning d'utilisation des in stallations

21.. ne pas tout accepter. J'ai même eu quatre correspondants puisque les élèves de 6e avaient accepté les échanges avec une classe de Yougoslavie. Nous avons

J’y suis jamais allé… J’ai jamais vu… Même lui est déjà allé dehors, dit-il en pointant du doigt son poisson dont le bocal était posé sur la table basse, j’ai lu dans un