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Potentiel évolutif du pouvoir pathogène de Venturia inaequalis en lien avec la domestication du pommier et l'utilisation de résistances quantitatives en amélioration variétale

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Academic year: 2021

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Submitted on 27 Jan 2012

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Potentiel évolutif du pouvoir pathogène de Venturia inaequalis en lien avec la domestication du pommier et l’utilisation de résistances quantitatives en amélioration

variétale

Amandine Lê Van

To cite this version:

Amandine Lê Van. Potentiel évolutif du pouvoir pathogène de Venturia inaequalis en lien avec la do- mestication du pommier et l’utilisation de résistances quantitatives en amélioration variétale. Sciences agricoles. Université d’Angers, 2011. Français. �tel-00663827�

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Université d'Angers

Année 2011

Potentiel évolutif du pouvoir pathogène de Venturia inaequalis en lien avec la domestication du

pommier et l’utilisation de résistances quantitatives en amélioration variétale

Thèse de doctorat

spécialité : Sciences Agronomiques

Ecole doctorale : Végétal, Environnement, Nutrition, Agroalimentaire, Mer (ED VENAM)

Présentée et soutenue publiquement le 25 mars 2011 à la Faculté des Sciences

d’ANGERS

par Amandine Lê Van

Devant le jury ci-dessous :

Tatiana GIRAUD (Rapporteur), Directrice de Recherches, CNRS, Orsay Alain PALLOIX (Rapporteur), Directeur de Recherches, INRA, Avignon Lydia BOUSSET (Examinateur), Chargée de Recherches, INRA, Rennes Philippe SIMONEAU (Examinateur), Professeur, Université d’Angers Bruno LE CAM (Examinateur), Chargé de Recherches, INRA, Angers Charles-Eric DUREL (Directeur de thèse), Directeur de Recherches, INRA, Angers

Valérie CAFFIER (Invitée), Chargée de Recherche, INRA, Angers

Directeur de thèse : Charles-Eric DUREL

Co-encadrants : Valérie CAFFIER et Bruno LE CAM

INRA, Centre d’Angers-Nantes, Unité Mixte de Recherche Pathologie Végétale (PaVé) et Unité Mixte de Recherches Génétique et Horticulture (GenHort), 42 rue Georges Morel, BP60057, 49071 Beaucouzé, cedex

Année 2011

N° d’ordre 1138

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Remerciements

Après 3 ans de thèse, et 4 mois pour être précise, beaucoup de noms et de visages me viennent à l’esprit, espérons n’oublier personne et pour cela soyons méthodique :

Merci à Lydia Bousset, Tatiana Giraud, Alain Palloix, et Philippe Simoneau de me faire l’honneur d’être dans mon jury de thèse. Je remercie également très chaleureusement tous les membres de mon comité de thèse : Benoît Moury, Didier Andrivon et Jérôme Enjalbert pour leurs conseils avisés qui ont beaucoup apportés à cette thèse.

Cette aventure a commencé, lorsque j’ai reçu ce mail de Lilian Goût, merci à lui qui a certainement oublié cet envoi, ‘A l’attention des PPE : une offre de thèse à Angers…’

Après Lilian il me faut remercier Charles Manceau et Elisabeth Chevreau, les boss respectifs des UMRs PaVé et Genhort qui m’ont permis de faire cette thèse.

Vient ensuite le trio de choc : Valérie Caffier, Charles-Eric Durel et Bruno Le Cam. Car j’ai été gâtée, trois encadrants pour moi toute seule ! Et quels encadrants !! Vous avez été parfaits et surtout très complémentaires. Valérie, je ne saurais jamais te remercier suffisamment pour ta disponibilité, ton écoute, ta patience, ta gentillesse, ton attention, bref tes grandes qualités humaines qui font que l’on se sent soutenue ! Charles-Eric, malgré la tonne de projets que tu mènes de front tu as toujours su te rendre disponible lorsqu’il le fallait. Merci également pour les touches d’humour que tu as pu mettre dans tes commentaires lors de la correction ! Bruno, toujours positif et enthousiaste, même lorsque les manips marchent à l’envers ! Grâce à toi j’ai persévéré dans le pyroséquençage. Merci énormément à tous les trois.

Merci également à Pascale Expert, Christine Boursier et Marie Noëlle Bellanger pour leur aide concernant les tests ‘patho’ mais aussi pour les bons moments partagés ensemble. Merci à Frédérique Didelot pour son aide inestinable lors des analyses statistiques. Merci à toutes les stagiaires, celles que j’ai encadré de façon plus ou moins formelle : Sabrina Philau et Marie de Gracia mais aussi Stéphanie et Morgane. Je ne crois pas qu’une seule d’entre vous ai échappée aux heures de notations dans la cellule en confinement. Nous avons de la chance que la tavelure se développe à 18°C ! Merci à toute la petite équipe de Valérie soudée par une passion commune : le chocolat !

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Merci à l’équipe des serres de PaVé, Joël Benard et Sylvain Hanteville pour le soin apporté aux plantes mais surtout pour leur sympathie. Je remercie de la même façon l’équipe des serres de Genhort, Nicolas Dousset et son illustre prédécesseur Jean-Michel Boré et pour ne citer qu’elle : Lysiane.

Merci énormément à Caroline Denancé pour son aide, très efficace, sur les extractions d’ADN.

Merci à Pierre Gladieux et Christophe Lemaire qui ont enrichi l’article « Q1 » grâce à leur point de vu évolutif !

Merci énormément à toute l’équipe de Dominique Brunel pour son accueil chaleureux à Evry.

Merci Aurélie C. pour l’aide pour le pyrosequençage, tu sais manier le hérisson comme personne ! Merci pour toute votre aide et vos conseils lors de la mise au point de cette technique qui était nouvelle pour moi.

Merci à toute l’unité paVé pour les pauses café et thé sympathiques, merci à tous ceux dont la présence contribue à l‘ambiance décontractée à l’INRA, Sophie Gironde, Tristan Boureau, Thibault Leroy, Laurianne…. La liste est trop longue pour citer tout le monde. Merci aussi à Elisabeth Deloménie pour m’avoir évité les déboires administratifs.

Merci à toutes les personnes de passage qui nous amène le soleil dans leur sourire : Vania Passo, Ahmet akköprü et Salwa. Après la thèse ça m’en fera des pays à visiter : le Portugal, la Turquie et le Maroc ;)

Merci à mes collègues de bureau pour tous les bons moments passés ensemble : Véronique Bignon, aussi ma partenaire de badminton, Baba Issa Camara et Aigo Qin, mes partenaires de course à pied.

J’adresse à Pauline Lasserre-Zuber mes remerciements les plus sincères. J’ai appris beaucoup de choses avec toi, merci pour tes formations sur GeneMapper et sur les logiciels de cartographies. Tes petites fiches m’ont été très utiles ! Et surtout merci pour ton amitié.

Un énorme merci à toute la troupe de l’INHP, grâce à vous j’ai gardé le sourire jusqu’au bout ! Pauline Le Guigo, merci pour ton soutien et tes conseils lors de chacune de mes gaffes. Merci d’avoir toujours été là dans les pires moments et surtout dans les meilleurs, les cours de dessin, le sport, les sorties et bientôt sur les pistes cyclables ! Marie Jamont, merci pour ton énergie

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déborbante, Sabrina Marquez, Amélie Rabot, alors les filles on la fait quand cette crémaillère ? Fatoumata Sané pour sa constante bonne humeur et Laure Cormier, les filles, je vous adore ! Merci pour toutes ces soirées filles bières et saucissons !

Et plus récemment : merci à Soulaiman Sakr (professeur de Yoseikan training) et Armin Bischoff (coach de la bandes de filles pour la course à pied).

Merci à ma famille pour leur soutien inconditionnel, merci sincèrement maman. Merci aux « petites sœurs », Amélie et Elodie et à ma grande sœur Mai, pour avoir essayé de lire et corriger mes articles en anglais !

Et Le meilleur pour la fin : merci Maël.

Finalement je n’ai pas du tout été méthodique. Que les personnes oubliées ne s’offusquent pas, de ma part cela ne veut rien dire ! Comme dit Baba « celui qui essaye de lister en omettra surement ! ».

Merci à tous, j’ai rencontré grâce à cette thèse des personnes formidables et j’ai passé trois bonnes années grâce au soutien de mes trois encadrants !

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Introduction Générale

Course aux armements, guerre des tranchées, agressivité, virulence, ces mots pourraient être ceux employés pour l’introduction d’une thèse sur la psychologie des poilus. Pourtant nous ne parlerons ici que de pathologie végétale. La brutalité du vocabulaire reflète bien le caractère ‘disruptif’ dans les interactions entre les agents pathogènes et leurs hôtes lié à l’activité humaine. En effet, dès le début de l’agriculture, la domestication a conduit à des changements rapides chez les plantes liés à la sélection consciente et inconsciente. Le processus de domestication des plantes est supposé être un processus évolutif long et graduel (Harlan, 1975). Cependant, la recherche de déterminants génétiques de la domestication des plantes suggère que les évènements de domestication auraient été beaucoup plus rapides et saccadés que ce qui était supposé et impliqueraient un nombre relativement faible de gènes (Paterson, 2002). Comment les agents pathogènes co- évoluant, pour certains, depuis des millions d’années avec leur hôte se sont adaptés à ce nouvel environnement anthropisé ?

Si la domestication des plantes a entrainé des changements profonds, l’agriculture a également bouleversé les paysages. L’augmentation de la densité en hôtes en parallèle avec la diminution de la diversité génétique a favorisé le développement des épidémies (Stukenbrock & McDonald, 2008). De même que le contact entre les hommes et leurs animaux domestiques a favorisé l’émergence de nouvelles maladies, le contact entre les plantes cultivées et sauvages a permis l’émergence de nouvelles maladies (Couch et al., 2005). Les échanges commerciaux, liés à l’activité humaine grandissante, ont également favorisé l’émergence de maladies en transportant les agents pathogènes au-delà de leur capacité de dispersion intrinsèque (Pysek et al., 2010). Les agents pathogènes se sont donc adaptés malgré le caractère parfois soudain, relativement à l’échelle de l’évolution, de ces modifications.

L’intensification de l’agriculture au siècle dernier a accentué ces modifications et offert les conditions idéales pour le développement des épidémies : cultures homogènes sur de grandes surfaces, irriguées et fertilisées. Cependant, grâce aux progrès de l’industrie chimique les agents pathogènes ont pu être efficacement contrôlés. Actuellement les limites de l’agriculture intensive et de la lutte chimique sont bien connues : épuisement des sols, érosion, pollution environnementale et apparition récurrente de résistances aux pesticides. Là encore les agents pathogènes se sont adaptés. La lutte génétique a été proposée comme alternative à la lutte chimique mais de nouveau les agents pathogènes se

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sont adaptés aux variétés résistantes implantées. Le déterminisme génétique des résistances contournées, basé dans la plupart des cas sur des gènes de résistance majeurs a été mis en cause dans la faillite de la lutte génétique. D’autres types de résistances, polygéniques et partielles ont été proposés comme solution plus durable (Parlevliet, 2002). En effet, leur caractère polygénique serait plus complexe à contourner pour un agent pathogène, leur efficacité partielle exercerait une pression de sélection moins forte et leur spectre d’action serait large, c'est-à-dire efficace vis-à-vis d’un grand nombre de souches d’une même espèce d’un agent pathogène. Leur durabilité a longtemps été proclamée malgré un nombre croissant d’études mettant en évidence les risques d’érosion (perte d’efficacité) de ces résistances.

Afin de limiter de nouvelles émergences et de préserver les ressources génétiques résistantes, il est primordial de comprendre les processus d’adaptation des agents pathogènes. L’analyse rétrospective des évènements passés liés à l’adaptation des agents pathogènes à la domestication de leur hôte peut être riche d’enseignements pour les stratégies futures d’utilisation des facteurs de résistance dans les agro-écosystèmes.

Venturia inaequalis est l’agent pathogène de la tavelure sur pommier. Différentes caractéristiques de ce pathosystème en font un bon modèle pour l’étude de l’adaptation des agents pathogènes en réponse à des modifications anthropiques telles que la domestication ou l’implantation de variétés résistantes. D’une part, les caractéristiques biologiques de cet ascomycète lui confèrent un potentiel adaptatif élevé (McDonald & Linde, 2002). Ce potentiel est illustré notamment par le contournement récent du gène de résistance Vf, introgressé dans la majorité des nouvelles variétés résistantes de pommier (Parisi et al., 1993). D’autre part, l’histoire évolutive de V. inaequalis montre qu’il aurait émergé par host-tracking. V. inaequalis aurait ainsi suivi l’évolution de son hôte lors du processus de domestication (Gladieux et al., 2010). De plus, l’introduction des pommiers cultivés en Europe aurait favorisé des sauts d’hôtes vers les pommiers sauvages endémiques. Enfin, de nombreux facteurs génétiques conférant une résistance partielle ont été cartographiés chez le pommier. Le spectre étroit de certains de ces facteurs de résistance met en doute leur durabilité. Néanmoins, des facteurs de résistance à large spectre d’action ont également été identifiés, permettant ainsi d’étudier le lien entre spectre d’action et durabilité en intégrant l’évaluation des pressions de sélection exercées sur les populations pathogènes.

Les objectifs de ma thèse peuvent se décomposer en trois questions qui feront l’objet de trois chapitres présentés sous la forme d’articles :

(i) L’émergence de Venturia inaequalis par host-tracking au cours de la domestication du

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pommier et le saut d’hôte vers des pommiers sauvages Européens se sont-ils accompagnés d’une modification du pouvoir pathogène ?

(ii) Les populations de Venturia inaequalis présentes sur les pommiers sauvages représentent-elles une menace pour les vergers cultivés et notamment pour les génotypes combinant un nombre élevé de facteurs de résistance ?

(iii) Quelles pressions de sélections les résistances partielles à spectre d’action étroit et large exercent-elles sur des mélanges de souches de Venturia inaequalis ?

Je présenterai tout d’abord quelques éléments de bibliographie pour aborder les concepts utilisés dans cette thèse. Les chapitres 1 à 3 présenteront les résultats obtenus lors de ma thèse, le chapitre 2 a fait l’objet d’une publication dans Plant Pathology (sous presse).

Enfin, je synthétiserai et discuterai les principaux résultats. Je conclurai sur les perspectives de cette étude.

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1. Introduction bibliographique

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Je présente dans la partie qui suit quelques éléments de bibliographie permettant d’introduire le sujet. Je me concentrerai sur l’interaction plante-agent pathogène.

1.1 Pouvoir pathogène : évolution et adaptation

1.1.1 Virulence et Agressivité, définitions

Dans la littérature, il règne autour du terme ‘virulence’ une certaine confusion liée aux différentes définitions données selon les domaines scientifiques. Ainsi en biologie de l’évolution et en pathologie animale et humaine, le terme de virulence réfère à la quantité de dommages infligée à l’hôte suite à l’infection par un agent pathogène (Read, 1994). Les dommages causés à l’hôte sont supposés être négativement corrélés à sa capacité de reproduction. En pathologie végétale, la définition de la virulence proposée par Van der Plank (1968) perdure encore aujourd’hui. Il définit la virulence comme la capacité d’un agent pathogène à infecter un hôte spécifique. La virulence est donc un caractère qualitatif.

Cette définition de la virulence correspond à la définition du terme ‘pathogénicité’ ou

‘infectivité’ en biologie de l’évolution. L’agressivité est définie par Van der Plank comme étant la composante non-spécifique du pouvoir pathogène. La notion de spécificité de l’interaction dans la définition de l’agressivité fut supprimée suite à l’étude de Caten (1974). L’agressivité est actuellement définie comme la variation quantitative du pouvoir pathogène en situation compatible (Pariaud et al., 2009a). Les termes de virulence en pathologie animale et d’agressivité en pathologie végétale ne sont donc pas synonymes.

Ceci a des conséquences importantes, notamment pour la modélisation de l’évolution de la virulence qui sera différente selon que l’on utilise la définition de la virulence (parfois mesurée par le taux de mortalité de l’hôte suite à l’infection) ou de l’agressivité. Dans cette thèse le pouvoir pathogène sera défini comme la résultante de la virulence (capacité à infecter) et de l’agressivité (variation quantitative du pouvoir pathogène). La virulence et l’agressivité sont deux composantes de la fitness d’un agent pathogène, la fitness se définissant comme l’espérance du nombre de descendants d’un génotype donné. Selon les pathosystèmes, ces deux traits d’histoire de vie peuvent ne pas être liés de façon continue à la fitness. C’est-à-dire qu’une augmentation constante de la virulence ne conduit pas forcément à l’augmentation de la fitness.

En effet, il peut exister des compromis (trade-off) entre les différentes composantes de la fitness et notamment entre l’agressivité et la virulence. Ces compromis peuvent

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d’ailleurs évoluer au cours du cycle de vie de l’agent pathogène (Nespolo et al., 2009). Il est donc important d’étudier plusieurs traits d’histoire de vie pour évaluer au mieux la fitness.

1.1.2 L’agressivité, mesure et déterminisme génétique

L’agressivité peut se mesurer de façon globale par la sévérité de la maladie, exprimée par le pourcentage de surface de l’hôte présentant des symptômes. Plusieurs composantes de l’agressivité peuvent également être mesurées : le taux d’infection, la période de latence, le taux de sporulation, la durée de l’infection ou encore la taille des lésions (Pariaud et al., 2009a). La production de mycotoxines est parfois utilisée comme mesure de l’agressivité bien que la relation entre les deux ne soit pas toujours directe et reste conflictuelle dans la littérature (Cumagun & Miedaner, 2004 ; Von der Ohe & Miedaner, 2010). L’expression de l’agressivité est très sensible aux conditions environnementales et à l’état physiologique de l’hôte ce qui rend sa mesure particulièrement délicate (Hartman et al., 1999 ; Li & Xu, 2002 ; Robert et al., 2004). Le phénotypage précis de l’agressivité se révèle donc difficile.

Quelques études montrent le caractère polygénique de l’agressivité (Caten et al., 1984 ; Hawthorne et al., 1994 ; Cumagun & Miedaner, 2004) cependant, rares sont les études de cartographie de QTL (locus de caractère quantitatif) (Cumagun et al., 2004 ; Lind et al., 2007). La construction actuelle ou récente de cartes génétiques, comme dans le cas de Phaeosphaeria nodorum, Mycosphaerella fijiensis ou de Venturia inaequalis (Manzo- Sanchez et al., 2008 ; Malkus et al., 2009 ; Xu et al., 2009) devrait conduire à la détection de nouveaux QTL. De même, l’accès aux techniques de séquençage à haut débit des génomes des agents pathogènes, associé à la génomique des populations, devraient largement accélérer l’identification et la localisation des gènes contrôlant l’agressivité (Xu et al., 2006 ; Celton et al., 2010). Notamment, la recherche de polymorphisme par le scan du génome (Storz, 2005) permet d’identifier les loci sous sélection et donc potentiellement impliqués dans le pouvoir pathogène.

1.1.3 Coévolution dans les systèmes naturels

La coévolution se définit comme l’évolution de l’interaction entre deux (ou plusieurs) espèces : lorsque la composition génétique de l’une change, il s’en suit, en réponse, une modification génétique de l’autre (Janzen, 1980). Les études de coévolution entre les plantes et leurs bioagresseurs dans les populations naturelles sont relativement peu

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fréquentes (Burdon & Thrall, 2009). Ceci peut être lié au fait que les relations dans les systèmes naturels peuvent être beaucoup plus complexes à étudier que dans les systèmes cultivés de part le nombre de protagonistes potentiellement plus important. Cependant, la prise en compte de la diversité des communautés naturelles et des habitats est primordiale pour comprendre les relations entre individus et leur évolution. Un bon exemple vient de l’interaction entre Greya politella, papillon parasite pollinisateur, et sa plante hôte Lithophragma parviflorum. Sur une distance de quelques centaines de kilomètres, cette interaction est, selon les populations étudiées, mutualiste, commensaliste ou encore antagoniste. Cette différence vient de la présence ou non d’autres pollinisateurs pour la plante hôte (Thompson & Cunningham, 2002).

La divergence dans les trajectoires de sélection entre les populations, à travers l’espace et le temps, est prédite par la théorie de mosaïque géographique de la coévolution (Geographic Mosaic Theory of Coevolution) (Thompson, 1999). Ainsi, les forces évolutives s’exerçant sur une même espèce peuvent être très différentes d’un habitat à un autre conduisant à une structuration spatiale des populations. La plupart des espèces sont donc constituées de plusieurs sous-populations locales connectées par des flux de gènes plus ou moins importants. L’échelle spatiale de l’étude de la coévolution est particulièrement importante et dépend des propriétés de chaque système, notamment de l’échelle du flux de gènes et de l’échelle à laquelle l’environnement biotique et abiotique diverge (Laine, 2009). L’étude de l’évolution devrait donc se faire idéalement dans le temps et l’espace. Néanmoins, mis à part pour les bactéries et leurs bactériophages, la mise en place d’expérimentations ou d’observations sur une échelle de temps suffisante n’est pas possible (Buckling & Rainey, 2002). La plupart des études se basent donc sur l’observation à un temps t des systèmes.

1.1.3.1 L’adaptation locale comme mesure de la coévolution

L’étude de l’adaptation locale est un bon outil pour mesurer la coévolution entre plusieurs espèces dans des systèmes géographiquement structurés. L’adaptation locale qui correspond à l’adaptation d’un agent pathogène à différentes populations d’une même espèce hôte se distingue de la spécialisation qui correspond à l’adaptation à différentes espèces hôtes (Joshi & Thompson, 1995).

L’adaptation locale se traduit par une meilleure performance des agents pathogènes sur les populations hôtes sympatriques. Plusieurs facteurs écologiques tels qu’un flux de gènes faible, une forte sélection contre les génotypes adaptés à d’autres habitats (trade-off

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entre les performances sur des hôtes différents) et une faible propension à la plasticité phénotypique, favorisent l’adaptation locale (Kawecki & Ebert, 2004). Une variabilité spatiale de l’habitat favorise également l’adaptation locale en favorisant les phénotypes spécialistes par rapport aux phénotypes généralistes qui sont plutôt favorisés par une variabilité temporelle de l’habitat.

Une méta-analyse menée par Greischar et Koskella (2007) a permis de tester les attendus théoriques des effets du taux de migration relatif, du temps de génération et de l’agressivité des agents pathogènes sur l’adaptation locale. Ils mettent ainsi en évidence l’importance du taux de migration comparativement aux autres facteurs sur l’adaptation locale. Les agents pathogènes ayant un taux de migration plus élevé que celui de leur hôte sont plus souvent localement adaptés que les agents pathogènes ayant un taux de migration relatif faible.

Cependant, les modèles théoriques prédisent qu’un flux de gènes fort tend à homogénéiser les populations pathogènes alors qu’un flux de gènes faible ou intermédiaire favorise l’adaptation en augmentant la variabilité génétique sur laquelle la sélection peut agir (Holt

& Gomulkiewicz, 1997 ; Gandon & Michalakis, 2002).

La coévolution est mise en évidence lorsque chaque sous-population ou deme possède une meilleure fitness dans son habitat d’origine (Kawecki & Ebert, 2004). Ceci peut être testé soit en comparant les performances d’une population locale et d’une population étrangère dans un habitat donné soit en comparant les performances d’une population dans deux habitats différents : local et étranger. Pour mesurer la fitness, une des approches possibles est d’utiliser un ou plusieurs traits d’histoire de vie tels que la résistance aux parasites pour les populations hôtes et la virulence pour les populations pathogènes (Burdon & Thrall, 2000 ; Laine, 2005 ; Goss & Bergelson, 2006).

L’agressivité est un paramètre parfois utilisé dans les études d’adaptation locale (Kaltz & Shykoff, 2002 ; Laine, 2005 ; Sicard et al., 2007). Peu d’études sur l’adaptation locale utilisent plusieurs traits d’histoire de vie. Cependant des résultats différents sont parfois mis en évidence lorsque la virulence et l’agressivité sont conjointement utilisées.

Ainsi, Laine (2005) trouve une adaptation pour la virulence mais pas pour l’agressivité pour le pathosystème Plantago lanceolata-Podosphaera plantaginis alors que Biere et Honders (1996) trouvent l’inverse mais sur un autre pathosystème Silene sp.-Microbotryum violaceum. Une autre étude, sur le pathosystème Phaseolus sp.-Colletotrichum lindemuthianum, met en évidence une adaptation locale que ce soit avec la virulence ou l’agressivité (Sicard et al., 2007). Outre la diversité des pathosystèmes sur lesquels sont basées ces études, les différentes façons de mesurer l’agressivité peuvent expliquer ces

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différences. Elles montrent l’intérêt d’étudier plusieurs caractères pour l’évaluation de la fitness.

1.1.3.2 Evolution de la virulence et de l’agressivité dans les systèmes naturels

Les agents pathogènes sont considérés comme étant une des principales pressions de sélection sur leurs hôtes et auraient donc un rôle majeur dans la création et le maintien de la diversité biologique. Actuellement, deux modèles principaux décrivent les interactions plantes-agents pathogènes. Dans le modèle de la guerre des tranchées (trench-warfare hypothesis), les cycles épidémiques successifs permettent le maintien d’allèles de résistance et de sensibilité sur de longues périodes de temps. De façon alternative, le modèle de la course aux armements (arms-race) génère, du côté de l’hôte, une accumulation de mécanismes de défense ou d’évitement et du côté de l’agent pathogène, une accumulation de mécanismes de pathogénicité. Au niveau du gène, ceci se caractérise par la fixation rapide et continue de mutations nouvelles conférant un avantage adaptatif (Tiffin & Moeller, 2006).

Dans les populations hôtes naturelles, plus diversifiées au niveau de leur résistance que dans les peuplements cultivées, l’agressivité des agents pathogènes est supposée être moins forte. Thrall et Burdon (2003) montrent en effet, pour le couple Linum-Melampsora, un compromis entre le pattern de virulence d’une population et son agressivité mesurée par la production de spores. Les populations hôtes les plus diverses en gènes de résistance hébergent les populations pathogènes les plus diverses en virulences et les moins agressives alors que les populations hôtes sensibles (avec moins de gènes de résistance) hébergent les populations les plus agressives mais majoritairement avirulentes. Ce compromis entre la virulence et l’agressivité empêcherait les souches multivirulentes de dominer la population pathogène (Thrall & Burdon, 2003).

L’évolution de l’agressivité a fait l’objet de nombreuses recherches en biologie évolutive. Cependant, si plusieurs modèles mathématiques ont pu être développés, les études expérimentales sont rares (Sacristan & Garcia-Arenal, 2008). De plus, ces modèles prennent comme définition de l’agressivité celle utilisée en biologie évolutive. A priori les agents pathogènes n’ont pas ‘d’intérêt’ à être trop agressifs vis-à-vis de l’hôte dont ils dépendent et devraient donc évoluer vers une plus faible agressivité. Cependant, ce n’est pas ce qui est observé. Le lien inévitable entre la multiplication intra-hôte, composante majeure de la fitness des agents pathogènes, et l’agressivité pourrait expliquer l’augmentation de l’agressivité. Néanmoins, une forte agressivité entrainant la mort de

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l’hôte sera au détriment de la transmission inter-hôte. C’est pourquoi l’hypothèse d’un trade-off entre la transmission et l’agressivité a été proposée (Massad, 1987). Cependant, une des hypothèses fortes de ces modèles est que la multiplication intra-hôte, la transmission inter-hôte et l’agressivité sont des traits corrélés (Frank, 1996). Or pour les agents pathogènes des plantes, selon la mesure de l’agressivité prise en compte, la corrélation avec la fitness n’est pas toujours évidente. En effet, lorsque l’agressivité est mesurée par la quantité de spores produites, la relation avec la fitness est évidemment plus directe que lorsque l’agressivité est mesurée par la perte de rendement chez la plante hôte.

De plus, le modèle se complique si les infections multiples au sein d’un même hôte sont prises en compte (Read & Taylor, 2001).

Dans le cas d’infections multiples les individus les plus agressifs, ceux qui exploitent leur hôte le plus rapidement, seront favorisés (de Roode et al., 2005). Cependant, lorsque les différents individus infectant un même hôte sont apparentés alors la mise en place de

« biens communs » peut conduire à diminuer le niveau global de la maladie (Brown, 2001). L’étude du lien d’apparenté entre les individus lors d’une infection multiple a permis de mettre en évidence pour le pathosystème Silene latifolia-Microbotryum violaceum, une tendance à l’exclusion des individus les plus éloignés. Ainsi, dans les populations avec une forte diversité génétique les infections multiples sont moins fréquemment reportées (Lopez-Villavicencio et al., 2007). D’autres modèles mathématiques montrent que les infections multiples peuvent conduire à une diminution de l’agressivité (Frank, 1996 ; Brown et al., 2002). Notamment, lorsque l’infection conduit à d’autres effets que la mort de l’hôte, tels qu’une réduction de la croissance de l’hôte qui en retour affecte le taux de croissance de l’agent pathogène alors l’infection multiple peut conduire à une diminution de l’agressivité (Schjorring & Koella, 2003). De même, l’existence de trade-offs entre l’aptitude à la compétition et l’agressivité peut également conduire à une diminution de l’agressivité (Chao et al., 2000). De façon expérimentale, quelques études montrent que les souches les plus agressives ou produisant le plus de toxines ne sont pas forcément les plus compétitives (Mehl & Cotty, 2010 ; Von der Ohe &

Miedaner, 2010). L’évolution de l’agressivité est donc un trait difficile à prédire et dépend de nombreux facteurs écologiques et épidémiologiques.

La complexité des interactions entre espèces au sein d’une communauté et avec leur environnement souligne à quel point les processus biologiques peuvent être sensibles aux perturbations de l’environnement par l’homme telles que le changement climatique, la fragmentation des habitats, l’introduction de nouvelles espèces en dehors de leur aire

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d’origine ou encore la domestication des plantes et l’agriculture.

1.1.4 Impact des agro-écosystèmes

1.1.4.1 La domestication des plantes et le début de l’agriculture Définition générale

La domestication des plantes peut se définir comme un processus évolutif par lequel la sélection par l’homme sur le phénotype de populations sauvages de plantes a conduit à des modifications dans les génotypes de ces populations, les rendant ainsi plus utiles pour l’homme (Clement, 1999). La domestication des plantes aurait débuté il y a environ 13 000 ans, à la fin du Pléistocène, quand les conditions climatiques très variables ainsi que la disparition de grands mammifères, proies de choix pour la chasse, ont amorcé un changement dans les sociétés humaines passant alors de sociétés de cueilleurs-chasseurs à des sociétés agricoles sédentaires (Diamond, 2002). Les premiers centres de domestication se situent dans le croissant fertile et en Asie de l’Est mais la domestication des plantes s’est faite de façon indépendante et concomitante dans des régions différentes (Figure 1).

Figure 1. Centres de domestication des plantes. (Balter, 2007)

Si le terme de domestication est couramment utilisé pour les animaux ou les plantes, il est moins commun de parler d’agents pathogènes domestiques ! Pourtant, parmi les microorganismes existants, nombreux sont les exemples de ceux qui ont été domestiqués par l’homme à des fins industrielles. Ainsi, pour la levure Saccharomyces

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cerevisiae, les termes de levures domestiques et levures sauvages sont employés (Liti et al., 2009). Le terme de domestication est aussi utilisé sans complexe par Stukenbrock et ses collaborateurs pour le champignon phytopathogène Mycosphaerella graminicola (2007). Or, parler de domestication pour les agents pathogènes est un abus de langage car les agents pathogènes ne sont pas sélectionnés pour des caractères utiles à l’homme.

Cependant, il est vrai que la domestication des plantes a entrainé de profondes modifications au sein des populations phytopathogènes allant jusque dans certains cas à la spéciation (Couch et al., 2005 ; Stukenbrock et al., 2007).

Origine des agents pathogènes dans les agro-écosystèmes

L’origine des agents pathogènes dans les agro-écosystèmes a récemment fait l’objet d’une revue par Stukenbrock et McDonald (2008). Les auteurs rapportent quatre mécanismes évolutifs majeurs concernant l’émergence des agents pathogènes dans les agro-écosystèmes. Une maladie est dite émergente lorsqu’elle est décrite sur un nouvel hôte, dans une nouvelle région ou suite à une augmentation de la pathogénicité (Anderson et al., 2004).

Le premier des quatre mécanismes, la co-divergence, réfère à l’évolution d’un agent pathogène lors du processus de domestication de son hôte (host-tracking). Dans ce modèle, l’agent pathogène et l’hôte partageraient le même centre d’origine. Quelques agents pathogènes auraient suivi ce scénario d’émergence tels que Usilago maydis sur le maïs et Venturia inaequalis sur le pommier (Munkacsi et al., 2008 ; Gladieux et al., 2010).

Selon un second modèle d’émergence, le saut d’hôte (host-shift), les agents pathogènes infecteraient un nouvel hôte jusqu’alors non hôte. Les sauts d’hôtes auraient pu être favorisés par l’activité humaine qui, de part les échanges commerciaux, disperse les agents pathogènes au-delà de leur capacité de dispersion intrinsèque. La mise en contact des populations de plantes sauvages avec les zones cultivées aurait également favorisé les sauts d’hôtes. En effet, les plantes sauvages peuvent être une source d’agents pathogènes pour les plantes cultivées et inversement.

Ainsi Magnaporthe oryzae aurait « sauté » du millet Setaria vers le riz à partir duquel il aurait infecté les mauvaises herbes communément associées à la riziculture : Leersia hexandra et Panicum repens (Couch et al., 2005). Rhynchosporium secalis qui serait passé d’herbes sauvages au riz et à l’orge et Phytophthora infestans qui serait passé de Solanacées sauvages à la pomme de terre sont d’autres exemples d’agents pathogènes qui auraient émergés suite à un saut d’hôte (Grunwald & Flier, 2005 ; Gomez-Alpizar et

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al., 2007 ; Zaffarano et al., 2008).

Un troisième modèle propose le transfert de gènes horizontal comme mécanisme d’émergence. Le transfert de gènes, de régions génomiques ou de chromosomes entiers impliqués dans la pathogénicité se fait entre deux espèces reproductivement isolées (Friesen et al., 2006). Ce processus bien connu chez les bactéries serait chez les champignons bien plus important que supposé précédemment (Rosewich & Kistler, 2000).

Par exemple, l’émergence de Pyrenophora tritici-repentis sur blé serait vraisemblablement dû à un transfert horizontal d’un gène codant pour une toxine de Staganospora nodorum, toxine essentielle à la virulence (Friesen et al., 2006).

Le dernier modèle majeur est l’émergence suite à l’hybridation entre des agents pathogènes appartenant à des espèces différentes (Ioos et al., 2006).

Si l’augmentation des échanges commerciaux est sans conteste un facteur majeur dans l’émergence des agents pathogènes (Pysek et al., 2010) la structure particulière des agro-écosystèmes serait un autre facteur favorisant les émergences. En effet, les agro- écosystèmes représentent des environnements plus denses et homogènes (diversité en hôtes réduite) et une ressource stable (apport de la fertilisation et irrigation) qui seraient plus propices au développement des épidémies que les écosystèmes naturels et favoriseraient la spécialisation des agents pathogènes aux plantes hôtes domestiques (Stukenbrock &

McDonald, 2008). De plus, la perturbation de la structure spatiale des populations hôtes, engendrée par la mise en place de l’agriculture, peut conduire à une diminution des flux de gènes entre les populations pathogènes présentes sur les hôtes sauvages et les hôtes domestiques. Ceci a pour conséquence l’augmentation de la consanguinité au sein des populations pathogènes sur les plantes domestiques (Garrett & Mundt, 1999 ; Zhu et al., 2000). Les pratiques agriculturales peuvent aussi, en diminuant la résistance des plantes ou en diminuant la compétition entre les populations pathogènes, favoriser l’évolution d’agents pathogènes spécialisés (Cohen, 2000). Cependant, l’idée simplificatrice d’environnements sauvages diversifiés et résistants aux maladies est à proscrire. En effet, les épidémies peuvent être aussi sévères dans les écosystèmes naturels que dans les agro- écosystèmes (Kranz, 1990).

Evolution de l’agressivité dans les agro-écosystèmes

La densité des populations hôtes cultivées est un facteur supposé entraîner une augmentation de l’agressivité des populations pathogènes associées aux cultures (Stukenbrock & McDonald, 2008). En effet, une forte densité combinée à une homogénéité

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génétique de l’hôte favorise la transmission entre les individus malades et les individus sains. Une augmentation de l’agressivité, même si elle conduit à la mort de l’hôte ne nuira pas à la transmission efficace de l’agent pathogène.

D’autres caractéristiques des agro-écosystèmes telles que la fertilisation, les grandes surfaces ou la plus grande sensibilité des cultivars, comparativement aux plantes sauvages, peuvent conduire à une augmentation de la taille des populations pathogènes augmentant dans un même temps le potentiel adaptatif des agents pathogènes (Kawecki &

Ebert, 2004). La fertilisation a deux effets sur l’agressivité, d’une part des concentrations importantes d’azote dans les plantes peuvent conduire à une augmentation de la production de spores et de l’efficacité de l’infection (Robert et al., 2004) et d’autre part la croissance rapide des plantes favorise la présence d’organes jeunes qui sont souvent plus sensibles que les organes plus âgés (Knott & Mundt, 1991 ; Turechek & Stevenson, 1998). Les monocultures implantées sur de grandes surfaces sont favorables à la production de populations pathogènes de grande taille. Le risque d’apparition et d’envahissement d’une mutation favorable y est donc d’autant plus élevé.

L’impact de la domestication et de l’agriculture sur l’évolution de l’agressivité a fait l’objet de très peu d’études expérimentales. Une étude portant sur l’agressivité sur blé d’isolats de Stagonospora nodorum issus de plantes sauvages, montre que certains des isolats d’origine sauvage peuvent avoir un niveau d’agressivité similaire aux isolats isolés de blé (Krupinsky, 1997). Ce résultat ne va pas dans le sens d’une augmentation de l’agressivité lié à la domestication et aux pratiques de l’agriculture intensive. Si peu d’études comparent le niveau d’agressivité des agents pathogènes selon leur origine sauvage ou cultivée, nombreuses sont celles traitant de l’agressivité des agents pathogènes au sein de l’agro-écosystème (Kolmer & Leonard, 1986 ; Lehman & Shaner, 1997 ; Pariaud et al., 2009b).

1.1.4.2 La résistance des plantes Les différents types de résistance

D’un point de vue phénotypique, deux grands types de résistance peuvent être distingués lors d’une interaction de type hôte : les résistances totales et les résistances partielles. Les résistances totales sont souvent associées à des symptômes d’hypersensibilité (HR) (Greenberg & Yao, 2004). Les résistances partielles n’entraînent qu’une réduction incomplète de la quantité de maladie. Elles peuvent aussi s’accompagner de symptômes de réaction de la plante (crispation des feuilles, chlorose).

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Ces résistances, totales ou partielles, peuvent être soit constitutives soit induites.

Les résistances constitutives ou préformées reposent sur des défenses physiques telles que la cuticule ou la paroi végétale, et chimiques notamment par l’action de composés antimicrobiens du métabolisme secondaire, les phytoanticipines (Morrissey & Osbourn, 1999). Les résistances inductibles se divisent en résistances inductibles basales et résistance induite par la reconnaissance spécifique d’un effecteur, aussi appelée ETI (Effector-Triggered Immunity) (Jones & Dangl, 2006). Les effecteurs sont des molécules manipulant la structure ou les fonctions cellulaires de l’hôte facilitant ainsi l’infection (facteurs d’agressivité et toxines) et/ou déclenchant les réponses de défense (Kamoun, 2007). Les résistances inductibles basales sont déclenchées suite à la reconnaissance par des récepteurs transmembranaires (PRR pour ‘pattern recognition receptors’) de profils moléculaires associés aux agents pathogènes, les PAMP ou MAMP (pathogen/microbe associated molecular patterns) (Chisholm et al., 2006). On parle alors de PTI pour PAMP- Triggered Immunity. Ces profils sont hautement conservés et sont donc non spécifiques d’une espèce. Les résistances de type ETI sont plus spécifiques. Plusieurs modèles d’interactions ont été décrits, notamment le modèle gène-pour-gène direct ou indirect (modèle de garde ; Dangl & Jones, 2001) (Figure 2) et le modèle gène pour gène inverse.

Figure 2. (d'après Bomblies & Weigel, 2007) Représentation schématique du modèle de reconnaissance directe (schéma du haut) et indirecte (schéma du bas). Dans le modèle de l’interaction directe, la protéine R (R protein) est un récepteur sur lequel vient se fixer l’effecteur (Pathogen effector). Dans le modèle de garde, l’effecteur se fixe sur une protéine cible (Endogeneous protein) et cette interaction entre l’effecteur et la protéine cible conduit à l’activation de la protéine R.

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Dans le modèle gène-pour-gène direct, un récepteur de la plante hôte, produit du gène de résistance, va reconnaître directement un effecteur de l’agent pathogène et déclencher ensuite la réponse de défense (Flor, 1971). Les effecteurs déclenchant les défenses et conduisant à une réponse de type HR sont aussi appelés facteurs d’avirulence.

Pour échapper à la reconnaissance de l’hôte, l’agent pathogène doit modifier ou perdre la protéine codée par l’allèle d’avirulence par mutation, insertion de transposons ou délétion totale. Ces pertes de fonctions peuvent conduire à une diminution de la fitness de l’agent pathogène (coût de la virulence) (Castagnone-Sereno et al., 2007 ; Bahri et al., 2009 ; Montarry et al., 2010). Du côté hôte, cette course à l’armement conduit à une sélection diversifiante des gènes de résistance afin de pouvoir reconnaître les variants des effecteurs des agents pathogènes (Paterson et al., 2010). Rares sont les exemples où la reconnaissance directe a été démontrée (Tang et al., 1996 ; Jia et al., 2000 ; Deslandes et al., 2003 ; Ellis et al., 2007) et les exemples les plus décrits sont ceux où la reconnaissance est indirecte (Rivas & Thomas, 2005 ; Rooney, 2005 ; van der Hoorn & Kamoun, 2008). Dans le modèle de garde, la modification de la protéine cible lors de la ligation avec l’effecteur va être reconnue par le gène de résistance et déclencher la réponse de défense (Tang et al., 1996). L’association intime entre le produit du gène de résistance et la protéine cible limite la sélection diversifiante observée dans le premier modèle. Le dernier modèle, gène-pour- gène inverse, a des conséquences évolutives bien différentes du premier modèle (Fenton et al., 2009). En effet, dans ce modèle, l’infection est déterminée par la reconnaissance de protéines cibles de l’hôte par l’agent pathogène. Ainsi, l’hôte aura intérêt à muter ou perdre les cibles visées par l’agent pathogène pour échapper à l’infection. La résistance devrait donc être récessive chez un hôte diploïde. Dans ce modèle la diminution de fitness serait du côté hôte (coût de la résistance) (Tian et al., 2003).

Les résistances totales seraient le résultat des résistances constitutives et inductibles avec une part très forte des résistances inductibles et notamment des gènes de résistance impliqués dans la résistance gène-pour-gène. C’est pourquoi, les résistances totales sont souvent appelées résistances qualitatives et apparaissent sous déterminisme monogénique.

De même, les résistances partielles peuvent être basées à la fois sur des résistances constitutives et inductibles. Les résistances partielles sont souvent nommées quantitatives ou polygéniques bien qu’il existe des résistances partielles monogéniques (Spielmeyer et al., 2005). Par la suite, j’utiliserai les termes de résistance qualitative et quantitative pour définir les deux types de résistances et les termes de ‘gènes R’ et ‘QRL’ (loci de résistance quantitative) pour désigner les gènes conférant respectivement chacun des types de

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résistance.

Les mécanismes moléculaires et les gènes sous jacents aux QRL sont beaucoup moins connus et caractérisés que les gènes R pour lesquels cinq classes principales ont été définies (Figure 3) dont la classe bien connue contenant un domaine NB-LRR (nucleotide binding-leucine rich repeat) (Martin et al., 2003). Quelques gènes responsables de résistances quantitatives chez le blé et le riz ont été clonés. Ils appartiennent tous à des classes de gènes différentes de celles déjà identifiées (Zenbayashi-Sawata et al., 2007 ; Fu et al., 2009 ; Krattinger et al., 2009). Néanmoins, il faut garder en mémoire que les résistances partielles peuvent aussi être conférées par des gènes de résistance pouvant appartenir aux classes déjà connues et notamment à la classe NB-LRR (Andaya & Ronald, 2003 ; Stewart et al., 2003).

Figure 3. Représentation schématique des cinq principales classes de protéines codées par les gènes R chez les plantes (Dangl & Jones, 2001). CC : coiled-coil, LRR : leucine rich repeats, NB : nucleotide binding, NLS : nuclear localisation sequence, Kin : Kinase, TIR : récepteur Toll/Interleukine-like. Au sein de la classe NB-LRR le domaine N-terminal peut varier. Les protéines de cette classe sont cytoplasmiques. Les protéines Cf-x et Xa-21 possèdent un domaine transmembranaire et un domaine LRR extracellulaire.

Plusieurs hypothèses concernant les mécanismes sous-jacents aux QRL ont été posées (Poland et al., 2009) : (i) des gènes impliqués dans la morphologie et le développement architectural de plantes seraient impliqués dans les résistances quantitatives

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tels que les gènes contrôlant la densité ou l’ouverture des stomates (Bradley et al., 2003 ; Melotto et al., 2006) ; (ii) des mutations ou des allèles de gènes impliqués dans la résistance basale (PRR impliqués dans la reconnaissance de la chitine ou de la flagelline) conditionneraient les résistances quantitatives (Zipfel et al., 2004 ; Miya et al., 2007) ; (iii) des composés chimiques de défenses tels que les phytoalexines seraient impliqués dans les résistances quantitatives (Kliebenstein et al., 2005) ; (iv) les QRL seraient impliqués dans la transduction du signal de défense (Koornneef & Pieterse, 2008) ; (v) les QRL seraient des formes alléliques ou des gènes paralogues ‘faibles’ des gènes R ou encore, la résistance partielle serait due à un effet résiduel de gènes R contournés (Li et al., 1999 ; Rauscher et al., 2010) et (vi) les gènes sous-jacents aux QRL seraient des gènes uniques encore jamais identifiés. Cette dernière hypothèse est confortée par le clonage de QRL qui a permis d’identifier des nouvelles classes de gènes. Une étude récente montre aussi l’importance des résistances constitutives dans les résistances partielles chez le riz (Vergne et al., 2010).

Toutes ces hypothèses ne sont pas exclusives et il est très probable que les mécanismes sous-jacents aux résistances quantitatives soient encore plus variés que ce qui est actuellement décrit (Poland et al., 2009).

Contournement des résistances qualitatives

L’utilisation de résistances qualitatives peut conduire dans les agro-écosystèmes à un scénario se rapprochant de celui de la course aux armements. Le pathosystème rouille- blé illustre parfaitement ce scénario (Liu et al., 1996). Le déploiement sur de grandes surfaces d’une variété possédant un nouveau gène de résistance impose une pression de sélection forte sur l’agent pathogène conduisant à l’apparition ou à l’augmentation en fréquence d’un mutant capable de contourner, c’est à dire d’échapper à la reconnaissance de l’hôte, et d’infecter ainsi l’hôte précédemment résistant. La variété est alors remplacée par une nouvelle variété résistante jusqu’à ce qu’un nouvel événement de contournement se produise. Des cycles de « boom and bust » (Stakman, 1957) se succèdent ainsi au fur et à mesure de l’introduction de nouvelles résistances.

La durée variable de l’efficacité d’une résistance a conduit Johnson à proposer le concept de durabilité des résistances (1981). Une résistance est considérée durable lorsqu’elle reste efficace dans une variété déployée sur de grandes surfaces, pendant une longue période de temps et dans un environnement favorable au développement de la maladie. Les résistances reposant sur un seul gène de résistance ne sont en général pas

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durables car il suffit de mutations de l’allèle d’avirulence correspondant pour contourner la résistance. Néanmoins, si la perte du gène d’avirulence entraine une diminution suffisamment forte de la fitness de l’agent pathogène ces résistances peuvent se révéler durables. Les exemples de résistances monogéniques durables sont surtout rapportés pour les virus (Goulden et al., 1993 ; Garcia-Arenal & McDonald, 2003 ; Kang et al., 2005) mais quelques cas sont aussi connus chez les champignons (Jorgensen, 1992 ; Spielmeyer et al., 2005). Le coût de fitness associé à la virulence peut être compensé soit par des croisements chez les agents pathogènes ayant recours à la reproduction sexuée soit par mutations compensatrices (Hartl & Taubes, 1996).

Afin d’augmenter la durabilité des résistances qualitatives, plusieurs stratégies ont été proposées : le cumul de plusieurs gènes de résistance dans un génotype (pyramidage) mais aussi le renforcement des gènes R par des résistances quantitatives (Palloix et al., 2009 ; Brun et al., 2010). La gestion du déploiement de ces résistances dans l’espace et dans le temps et une conduite appropriée des cultures, visant à diminuer la taille des populations pathogènes, peuvent également prolonger leur durabilité (Mundt, 2002 ; Sapoukhina et al., 2009 ; Lo-Pelzer et al., 2010a ; Lo-Pelzer et al., 2010b).

Erosion des résistances quantitatives

Les résistances quantitatives sont souvent supposées être plus durables que les résistances qualitatives (Parlevliet, 2002). D’une part, leur caractère souvent polygénique implique que le contournement d’un des gènes entrant dans la résistance quantitative ne confèrera à l’agent pathogène qu’un avantage sélectif partiel voire mineur. D’autre part, leur effet partiel sur la diminution de la maladie et leur spectre d’action supposé plus large imposent une pression de sélection moins forte sur les agents pathogènes. Une résistance

‘large spectre’ est définie comme une résistance efficace vis-à-vis de différentes espèces pathogènes ou alors vis-à-vis d’un grand nombre de souches d’une même espèce pathogène (Qu et al., 2006). Les résistances à large spectre s’opposent aux résistances spécifiques, efficaces seulement vis-à-vis de quelques souches d’un agent pathogène.

Il est maintenant largement reconnu que les résistances quantitatives peuvent être spécifiques. Cette spécificité pourrait s’expliquer notamment par le principe de la relation

‘gène-mineur-pour-gène-mineur’ énoncé par Parlevliet et Zadoks dès 1977. Pour la pyriculariose du riz (Magnaporthe oryzae), une méta-analyse montre que les QRL

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spécifiques seraient plus fréquents que les QRL à large spectre avec seulement trois méta QRL large spectre sur 47 (Ballini et al., 2008). Le caractère isolat-spécifique des QRL a été également montré dans de nombreux autres pathosystèmes tels que les pathosystèmes pommier-Venturia inaequalis (Calenge et al., 2004), pomme de terre-Phytophthora infestans (Rauscher et al., 2010), choux-Plasmodiophora brassicae (Rocherieux et al., 2004), Medicago truncatula-Aphanomyces euteiches (Hamon et al., 2010), peuplier- Melampsora larici-populina (Dowkiw et al., 2010), tournesol-Phoma macdonaldii (Darvishzadeh et al., 2007), l’orge-Puccinia hordei (Qi et al., 1999 ; Marcel et al., 2008), melon-Fusarium oxysporum f. sp. melonis (Perchepied et al., 2005).

La spécificité de la résistance quantitative conduit à exercer sur les populations pathogènes des pressions de sélections différentielles augmentant ainsi les risques d’érosion de l’efficacité de ces QRL par sélection de souches ‘contournantes’. La sélection de souches plus agressives par les résistances quantitatives, démontrée par un modèle théorique, peut également conduire à l’érosion de la résistance (Gandon & Michalakis, 2000). Cette prédiction du modèle de Gandon et Michalakis a été confirmée de façon expérimentale par Cowger et Mundt sur le pathosystème blé-Mycosphaerella graminicola (2002). Dans cette étude, les hôtes partiellement résistants sélectionnent des isolats plus agressifs contrairement aux hôtes sensibles. Cependant, la spécificité des facteurs de résistance portés par les hôtes n’est pas connue dans cette étude.

L’érosion de QRL a pu également être démontrée, (i) au champ, dans le pathosystème pomme de terre-Phytophthora infestans (Montarry et al., 2006), (ii) de façon expérimentale par sélection artificielle pour un virus du blé (Barley yellow dwarf virus- PAV) (Chain et al., 2007), pour Puccinia triticina sur le blé (Lehman & Shaner, 1997 ; Lehman & Shaner, 2007) et par détection de QRL pour le pathosystème hévéa-Microcyclus ulei (Le Guen et al., 2007). Dans cette dernière étude, aucun des QRL détectés avec des souches d’agressivité moyenne ne sont détectés avec la souche la plus agressive. Cette étude supporte donc l’hypothèse d’une érosion des résistances quantitatives par sélection de souches plus agressives.

La liste de pathosystèmes où une érosion a été rapportée est finalement assez faible comparativement à la liste des QRL spécifiques détectés. Ceci peut être lié au fait que la durabilité des QRL a fait l’objet de moins d’études ou que l’avantage conféré à une souche

‘contournant’ un QRL n’est pas suffisant pour éroder la résistance du fait de la présence d’autres QRL. Le temps pour qu’un même génotype pathogène combine différents facteurs pour éroder la résistance peut être ainsi rallongé. De plus, il est possible d’imaginer des

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coûts de contournement de QRL sur la fitness. Néanmoins, les listes ci-dessus ne sont pas exhaustives.

Les mécanismes sous-jacents aux QRL érodés ne sont pas connus. De même, leur spectre d’action avant leur érosion n’est pas toujours documenté. Il peut donc être supposé que les QRL érodés soient essentiellement des QRL spécifiques ou que les gènes sous jacents soient des gènes R contournés.

1.2 Le pathosystème Venturia inaequalis-Malus spp.

Venturia inaequalis (Cke) Wint. est un champignon ascomycète haploïde, hémibiotrophe responsable de la tavelure sur pommier. D’autres hôtes moins connus appartenant aux genres Sorbus, Cotoneaster, Crataegus, Heteromeles, Kageneckia, Pyracantha et Eriobotrya ont également été décrits (Le Cam et al., 2002 ; Sivanesan, 1977

; Raabe & Gardner, 1972). La tavelure est présente quasiment partout où le pommier est cultivé. Cette maladie est particulièrement dommageable dans les régions aux printemps humides et frais. Actuellement, elle est principalement contrôlée par une combinaison de pratiques culturales associées à des traitements chimiques pour lesquels un positionnement précis est impératif pour leur efficacité. Le développement de modèles de risques d’infections en fonction des conditions climatiques permettent de positionner au mieux les traitements (Mills & Laplante, 1951 ; Carisse et al., 2009). Cependant le nombre de traitements fongicides nécessaires, que ce soit en agriculture conventionnelle, intégrée ou biologique reste encore élevé (Holb, 2006). De plus, V. inaequalis a successivement développé des résistances à différentes classes de fongicides : dodine, benzimidazole, inhibiteur de la biosynthèse des stérols et inhibiteur de la respiration (QoI ‘quinone outside inhibitors’) (Quello et al., 2010 ; Koller et al., 2004). Ainsi, les problèmes bien connus lié au recours important à la lutte chimique nécessitent le développement d’autres méthodes de lutte telles que la prophylaxie, les méthodes culturales, la lutte biologique (Hossain et al., 2009) et la résistance variétale. Les coûts liés à la lutte contre cette maladie, bien que relativement faibles comparativement aux coûts engendrés par la main d’œuvre, en font la maladie la plus importante économiquement sur pommiers. En effet, si la tavelure ne menace pas la vie de son hôte elle rend les fruits tavelés impropres à la commercialisation.

Le champignon adopte une stratégie d’exploitation de son hôte peu commune : il ne pénètre pas les cellules de son hôte, du moins lors de sa phase parasitaire, et les premiers

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symptômes visibles sur feuilles et sur fruits (Figure 4) n’apparaissent qu’après accumulation d’une biomasse mycélienne au niveau subcuticulaire. Il y a bien formation d’appressorium, pour favoriser la pénétration au travers de la cuticule, sans formation ultérieure d’haustorium. Le moyen qu’utilise le champignon pour puiser ses ressources nécessaires n’est pas connu (MacHardy, 1996 ; MacHardy et al., 2001).

Figure 4. Symptômes de tavelure sur fruits (A) et feuilles (B). Photos Le Cam et photothèque INRA.

Le cycle biologique de V. inaequalis est intimement lié à la phénologie du pommier et peut être décomposé en deux phases (Figure 5) : une phase saprotrophe, au cours de laquelle se déroule la reproduction sexuée permettant la survie hivernale du champignon et une phase parasitaire où se déroulent de nombreux cycles de reproduction asexuée.

A

B

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Figure 5. Cycle biologique de Venturia inaequalis (Agrios, 2005)

L’infection débute au printemps au moment où les jeunes organes de l’hôte sont les plus sensibles. La projection des ascospores, à partir des pseudothèces présents au niveau de la litière foliaire, se fait lors d’événements pluvieux. D’abord projetées à une très faible distance (quelques millimètres), les ascospores sont ensuite dispersées par le vent sur des distances inférieures à 100m (Aylor, 1998 ; MacHardy et al., 2001). La germination des ascopores se fait uniquement en présence d’eau libre à la surface des tissus hôtes. Le tube germinatif pénètre la cuticule après la formation d’un appressorium (Smereka et al., 1987).

Le champignon développe alors une structure pseudo-parenchymateuse, nommée stroma, à partir de laquelle vont se différencier un mycélium sous-cuticulaire puis des conidiophores portant à leur extrémité les conidies (mitospores). Les conidies constituent l’inoculum secondaire et sont dispersées par le vent ou par la pluie sur de courtes distances (quelques mètres). La germination des conidies nécessite également la présence d’eau libre à la surface des tissus hôtes.

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La dispersion longue distance se fait principalement par le transport de matériel infecté par l’homme.

1.2.1 Origine et domestication du pommier

Le pommier appartient à la division des Angiospermes et à la classe des Dicotylédones.

Il fait partie de la famille des Rosaceae, tribu des Spiraeoideae qui regroupe les anciennes sous-familles des Maloideae et des Amygdaloideae, sous-tribu des Pyrinae et du genre Malus (Potter et al., 2007). Le genre Malus aurait émergé au Sud de la Chine, vers la fin de la période du Tertiaire, à l’époque Eocene, il y a plus de 30 millions d’années (Phipps et al., 1991). Ce genre compterait entre 8 à 79 espèces selon les auteurs (Juniper &

Mabberley, 2006). La variabilité du nombre d’espèces reconnues traduit bien la difficulté à différencier les espèces selon des caractères morphologiques. De plus, la notion d’espèce au sein du genre Malus reste floue du fait de la grande diversité génétique, de l’hybridation potentielle, et de la présence de polyploïdie (Campbell et al., 1991). L’utilisation de marqueurs moléculaires ainsi que des analyses phylogénétiques ont permis de préciser la taxonomie des Malus (Robinson et al., 2001 ; Velasco et al., 2010). Cependant, celle-ci reste encore incomplète du fait notamment que la distinction entre pommiers sauvages et pommiers domestiques est difficile à faire. Le nom même du pommier domestique est toujours soumis à controverse. Ainsi, le pommier domestique a été nommé Malus pumila Miller, M. communis Desf., Pyrus malus, P. malus var. paradisiaca, M. sylvestris (L.) Miller, M. domestica (Borkh) et Malus × domestica (Korban & Skirvin, 1984 ; Mabberley et al., 2001 ; Juniper & Mabberley, 2006). Le nom de Malus pumila a été récemment proposé comme étant le nom correct pour le pommier domestique (Juniper & Mabberley, 2006). L’espèce Malus pumila regroupe le pommier domestique et un pommier sauvage M.

sieversii. Afin de distinguer les deux, nous utiliserons le nom de Malus × domestica qui est communément utilisé et où le ‘×’ fait référence au caractère hybride du pommier domestique.

La ressemblance entre les fruits portés par l’espèce Malus sieversii, espèce sauvage d’Asie Centrale, et ceux des pommiers domestiques, de même que la très grande diversité morphologique des Malus sieversii, ont poussé très tôt Vavilov à proposer cette espèce comme étant l’ancêtre principal du pommier domestique (1930). La très grande diversité morphologique observée au sein de cette espèce amène certains auteurs à penser que la sélection inconsciente et consciente à partir de cette espèce pourrait, à elle seule, expliquer la diversité observée chez le pommier cultivé (Juniper & Mabberley, 2006). Des travaux

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portant sur l’analyse phylogénétique de séquences d’ADN nucléaires et chloroplastiques suggèrent une part importante de M. sieversii comme géniteur maternel de Malus × domestica (Robinson et al., 2001 ; Harris et al., 2002). Suite au séquençage du génome du pommier, une analyse portant sur 74 accessions et 23 gènes, a permis de confirmer M.

sieversii comme étant l’ancêtre principal du pommier domestique. Les auteurs ne distinguent d’ailleurs qu’une espèce et proposent, comme Juniper et mabberley (2006), le nom de M. pumila Mill. pour désigner M. sieversii et M. × domestica (Figure 6).

L’aire de répartition de M. sieversii s’étend des montagnes du Tian Shan aux bords de la mer Caspienne (Morgan & Richards, 1993). Ces pommiers sauvages forment des forêts entières, parfois en association avec des abricotiers ou d’autres fruitiers. Vers la fin du Néolithique, début de l’âge de bronze, les voyageurs et leurs animaux domestiques empruntant les grandes voies commerciales, connues sous le nom des routes de la soie, auraient disséminé des pépins du pommier sauvage asiatique de l’Asie centrale, vers l’Europe à l’Ouest et vers la Chine à l’Est (Juniper & Mabberley, 2006). Tout au long de cette route, d’autres espèces de pommiers jusqu’alors isolées auraient pu participer au pool génétique du pommier cultivé par hybridation (Janick et al., 1996). Cependant, si les occasions d’hybridation ‘naturelle’ entre espèce de Malus ont été nombreuses et sont souvent décrites comme étant des événements majeurs dans l’évolution du pommier cultivé (Li Yunong, 1999) leur réelle occurrence est contestée par certains auteurs (Juniper

& Mabberley, 2006).

Un autre candidat, dans la recherche de l’origine du pommier domestique, a été proposé par Coart et al. (2006) : M. sylvestris. Ce pommier sauvage Européen présente une aire de répartition s’étendant de l’Europe de l’Est à l’Europe de l’Ouest. Cependant, il est actuellement peu fréquent au point d’être considéré dans certains pays comme une espèce menacée (Coart et al., 2003). M. sylvestris produit des fruits amers et astringents. Il pousse de façon isolée dans les forêts mais peut parfois former de petits bosquets. L’étude de Coart et al. (2006) montre que cette espèce aurait contribué de façon significative au pool génétique du pommier cultivé ou du moins à certains cultivars européens, notamment des cultivars belges. Il est cependant délicat de généraliser sa contribution à l’ensemble des cultivars de M. × domestica. De plus, la contribution de M. sylvestris au pool génétique du pommier domestique est rejetée dans l’étude de Velasco et ses collaborateurs au profit d’autres espèces sauvages asiatiques telles que M. orientalis (Velasco et al., 2010). Le choix des cultivars de M. × domestica dans chacune des études pourrait expliquer la divergence de leurs conclusions.

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Figure 6. Relations phylogénétiques au sein du genre Malus, d’après Velasco et al. (2010), incluant 74 accessions dont 12 cultivars de M. × domestica, 10 M. sieversii, 21 M.

sylvestris, 31 autres espèces sauvages de Malus et 2 espèces du genre Pyrus. Arbre construit à partir de l’alignement de séquences concaténées multilocus dérivées du reséquençage de 23 loci chez le pommier. A, O, P, accessions de M. × asiatica, M.

orientalis et Pyrus respectivement. La divergence entre M. × domestica, M.sieversii, M.

orientalis, M. × asiatica et les autres espèces est surlignée en rouge. En vert est surlignée la divergence permettant de séparer M. sylvestris. Les distances génétiques ont été obtenues avec les distances de Hamming. Le graphique a été construit avec Splits-Tree 4.10.

La domestication du pommier a grandement bénéficié de la découverte de l’art du greffage, aussi appelé domestication instantanée (Zohary & Hopf, 2000), probablement en Mésopotamie il y a 3800 ans (Harris et al., 2002). Cette découverte aurait permis le début de la culture du pommier en rendant possible le transfert des meilleurs spécimens de pommiers sauvages vers les jardins. Les Romains auraient ensuite introduit en Europe de l’Ouest et en Afrique du Nord les pommiers domestiques ainsi que cette nouvelle technique il y a environ 2000 ans. Cependant, il semblerait que le pommier cultivé, développé à partir de semis, était présent en Europe de l’Ouest avant l’arrivée des Romains. A partir de l’Europe, le pommier cultivé aurait ensuite été disséminé aux autres continents lors de la conquête du Nouveau Monde (Morgan & Richards, 1993).

1.2.2 Origine de la tavelure et émergence

L’élucidation de l’origine de la tavelure a bénéficié des récentes avancées dans la détermination de l’origine de son hôte principal : le pommier. Ainsi, une première étude de

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