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Problématique des cibles de pression artérielle

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Academic year: 2022

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Texte intégral

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A propos de l’article de Forni V, Wuerzner G, Pruijm M, Guihard L et Burnier M. Traiter l’hy- pertension artérielle : l’incertitude des défi- nitions et des cibles. Revue médicale suisse 2010;6:1709-12,1714.

L’article de Valentina Forni, et coll. «Traiter l’hy­

pertension artérielle : l’incertitude des définitions et des cibles»,1 paru dans la Revue médicale suisse du 15 septembre 2010 aborde deux ques­

tions pertinentes : celle de la définition de l’hy­

pertension artérielle et celle des valeurs cibles à atteindre (p. 1711). En référence aux recomman­

dations ESC/ESH de 2007 2 et après avoir bien rappelé les incertitudes concernant les cibles de pression artérielle à atteindre chez les pa­

tients hypertendus, les auteurs concluent para­

doxalement que «les incertitudes concernant les valeurs cibles de la pression artérielle ne de- vraient pas nous dérouter de notre devoir de prévenir les complications cardiovasculaires en traitant l’hypertension artérielle à des cibles raisonnables, soit l 140/90 mmHg» (p. 1714).

Nous voudrions ici discuter cette conclusion.

Les études épidémiologiques non intervention­

nelles suggèrent que plus la pression artérielle est basse mieux cela vaut.3 C’est une observation faite entre individus différents, à partir d’une rela­

tion linéaire et sans seuil apparent entre les écarts de niveau pressionnel et la multiplication du ris­

que cardiovasculaire. Cependant, cette observa­

tion ne peut pas être transposée chez un individu pour prédire la meilleure réduction de risque à attendre du traitement. En effet, une corrélation entre deux variables n’implique pas nécessaire­

ment une causalité.4 Pour répondre à cette ques­

tion, il faudrait tester différents degrés de baisse tensionnelle et leur relation avec l’abaissement du risque. C’était l’objectif de l’étude HOT.5 Cette étude est la plus puissante pour vérifier que l’in­

tensification de la baisse de pression permettrait de réduire encore plus le risque cardiovascu­

laire. Or, elle n’a pas permis de conclure. Les ré­

sultats favorables chez les 8% de diabétiques ont été mis en avant. De façon surprenante, les auteurs ont laissé sous silence la tendance à la surmortalité totale chez les non­diabétiques, et ont attendu cinq ans pour révéler la surmortalité très significative observée chez les fumeurs soumis à l’intensification du traitement.6 De plus, la synthèse Cochrane,7 qui réunit les autres études ayant évalué un contrôle strict et intensif de la pression artérielle diastolique avec des cibles variant entre l 92 mmHg (Etude AASK) et l 75 mmHg (Etude ABCD) vs un con­

trôle moins intensif, conclut de façon plus claire que ne le laissent entendre Forni et coll. : «Trea- ting patients to lower than standard BP targets, 140-160/90-100 mmHg, does not reduce mor- tality or morbidity». Enfin, plusieurs observations de la relation pression­risque sous traitement ont effectivement montré une courbe en J.

Les meilleures données pour prédire la réduc­

tion du risque à partir d’une baisse de pression sont fournies par la méta­analyse de Staessen et coll.8 Les auteurs concluent que la réduction du risque pourrait être expliquée par la baisse de pression, en insistant sur l’importance du con­

trôle pressionnel. Une conclusion radicalement différente nous paraît cependant s’imposer : au- delà de 10 à 15 mmHg, la baisse de pression systolique n’est associée à aucune variation du bénéfice.

Etant donné d’une part les incertitudes concer­

nant les cibles de pression artérielle à atteindre et, d’autre part, les données que nous avons brièvement rappelées, nous aimerions tirer une conclusion légèrement différente. Premièrement, se rappeler que le but de ces traitements est la diminution du risque cardiovasculaire, et non pas l’abaissement des chiffres de pression en des­

sous d’un seuil qui reste à ce jour parfaitement arbitraire. Deuxièmement, il ne semble pas y avoir de bénéfice à abaisser la PA systolique de plus de 10 à 15 mmHg, avec au contraire des effets néfastes graves possibles chez certains patients, par exemple les fumeurs. Troisièmement, ces cons tatations incitent à associer les interven­

tions contre les différents facteurs de risque plu­

tôt que vouloir à tout prix «contrôler» l’un d’entre eux.

Dr Rémy Boussageon Département de médecine générale Université Claude Bernard Lyon 1 F­69622 Villeurbanne cedex remy.boussageon2@wanadoo.fr Dr Theodora Bejan-Angoulvant Pr François Gueyffier Centre d’investigation clinique Hôpital cardiovasculaire et pneumologique Louis Pradel F­69677 Bron

1 Forni V, Wuerzner G, Pruijm M, Guihard L, Burnier M.

Traiter l’hypertension artérielle : l’incertitude des défini­

tions et des cibles. Rev Med Suisse 2010;6:1709­12, 1714.

2 Mancia G, et al. 2007 ESH­ESC Practice guidelines for the management of arterial hypertension : ESH­ESC task force on the management of arterial hypertension.

J Hypertens 2007;25:1751­62. Erratum in : J Hypertens 2007;25:2184.

3 Prospective studies collaboration. Age­specific rele­

vance of usual blood pressure to vasculae mortality : A meta­analysis of individual data for one million adults in 61 prospective studies. Lancet 2002;360:1903­13.

4 Fleming TR, et al. Surrogate end points in clinical trials : Are we being misled ? Ann Intern Med 1996;125:605­13.

5 Hansson L, et al. Effects of intensive blood­pressure lowering and low­dose aspirin in patients with hyperten­

sion : Principal result of the Hypertension Optimal Treat­

ment (HOT) randomised trial. Lancet 1998;351:1755­62.

6 Zanchetti A, et al. Benefits and risks of more intensive blood pressure lowering in hypertensive patients of the HOT study with different risk profiles : Does a J­shaped curve exist in smokers ? J Hypertens 2003;21:797­

804.

7 Arguedas JA, Perez MI, Wright JM. Treatment blood pressure targets for hypertension. Cochrane Database Syst Rev 2009:CD004349.

8 Staessen JA, et al. Cardiovascular protection and blood pressure reduction : A meta­analysis. Lancet 2001;358:

1305­15.

Réponse

Nous agréons avec les auteurs de ce courrier sur l’incertitude actuelle en matière de cibles de pression artérielle à atteindre et sur la nature ar­

bitraire des cibles thérapeutiques actuellement recommandées, notamment l 140/90 mmHg pour la population générale.

Par contre, la recommandation que «au-delà de 10 à 15 mmHg, la baisse de pression systolique n’est associée à aucune variation du bénéfice»

ne nous semble pas adéquate. En effet, les au­

teurs omettent de considérer le niveau tensionnel de base : le risque d’un patient avec une pression systolique de 200 mmHg est clairement plus élevé que celui d’un patient avec 160 mmHg. Dès lors, baisser de 15 mmHg la pression chez les deux patients n’aura pas le même impact et le premier patient conservera un risque cardiovas­

culaire élevé. Par ailleurs, les études de popula­

tion ont bien démontré qu’il existe une relation linéaire entre le niveau de pression artérielle et le risque cardiovasculaire en tout cas pour des pressions entre 110 et plus de 200 mmHg. Dès lors, limiter la baisse de la pression à 15 mmHg nous semble inapproprié.

Le problème c’est de définir s’il existe un seuil tensionnel inférieur, au­dessous duquel on perd les bénéfices et les risques augmentent. A ce jour, nous n’avons pas de bonnes études pros­

pectives qui ont étudié la courbe «dose­réponse»

pour des valeurs de pression l 140 mmHg. Même dans la revue Cochrane, citée dans la discus­

sion, les auteurs arrivent à définir des cibles thé­

rapeutiques, 140­160/90­100 mmHg. Toutefois, l’analyse de la revue Cochrane met en exergue une difficulté supplémentaire, qui complique en­

core la formulation d’une recommandation, no­

tamment l’hétérogénéité des populations. En effet, dans le même chaudron de cette méta­analyse ont été incluses des populations de patients très hétérogènes incluant entre autres des patients afro­américains atteints d’insuffisance rénale (AASK) et des diabétiques de type 2 (ABCD).

Ceci pose des problèmes pour l’extension des conclusions à la population générale. Le pro­

blème de définition du seuil reste pourtant ou­

vert, car nous manquons d’élément de preuve en faveur d’«un objectif thérapeutique» bien dé­

fini. C’est pourquoi, dans l’état actuel des con­

naissances, nous proposons de donner aux pra­

ticiens un message simple et clair. A notre avis, la cible de l 140/90 mmHg est la plus appro­

priée pour la population générale. Cette cible nous semble aussi adéquate pour les patients à haut risque cardiovasculaire car les risques de la «courbe en J» s’observent essentiellement pour des valeurs très basses de systolique et/ou de diastolique, en particulier chez les patients coronariens.

Dr Valentina Forni Pr Michel Burnier Service de néphrologie et consultation d’hypertension

CHUV, 1011 Lausanne valentina.forni@chuv.ch

courrier

Revue Médicale Suisse

www.revmed.ch

20 avril 2011

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Problématique des cibles de pression artérielle

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