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La chimiothérapie inhalée – partie 1 : concept et challenges technologiques actuels

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REVUE GÉNÉRALE

La chimiothérapie inhalée partie 1 : concept et challenges technologiques actuels

Inhaled chemotherapy Part 1: General concept and current technological challenges

R. Rosière

a

, J. Hureaux

b

, V. Levet

a

, K. Amighi

a

, N. Wauthoz

a,∗

aLaboratoiredepharmaciegaléniqueetdebiopharmacie,facultédepharmacie,université libredeBruxelles(ULB),boulevardduTriomphe,campusplaineCP207,1050Bruxelles, Belgique

bInserm1066,CNRS6021,servicedepneumologie,unitémicro-etnanomédecines biomimétiques(MINT),pôleHippocrate,universitéd’Angers,universitéBretagne-Loire, centrehospitalieruniversitaire,49933Angers,France

Rec¸ule28f´evrier2017 ;acceptéle12juillet2017

MOTSCLÉS Cancersbronchiques primitifs;

Métastases pulmonaires; Aérosol;

Voieadministration pulmonaire; Nanomédecine

Résumé Leschimiothérapiesoccupenttoujoursuneplaceimportantedanslapriseencharge depatientsprésentantunoudestumeurspulmonaires,primairesetmétastases,etcemalgré degraveseffetssecondairesdécrits.Afinderéduirecesderniersetaussiintensifierl’activité desagentsthérapeutiques,différentesstratégiesontétédécrites.Parmicelles-ci,l’utilisation desnanomédecinesetdelavoied’administrationpulmonairedeschimiothérapies.Cetteder- nièreapprochenepeutcependantêtreréaliséedemanièreefficaceetsansdangersansune adaptationdestechniquesd’inhalationactuellementdisponibles,c’est-à-diredesdispositifs d’inhalationetdesformulationsmédicamenteuses.Cetterevueprésentedifférentsdéveloppe- mentsprécliniquesquitendentactuellementàapporterdessolutionsauxprincipaleslimitations observéesavecl’inhalationdechimiothérapiedansletraitementdestumeurspulmonaires.Ces solutionsportentnotammentsurl’utilisationd’inhalateursàpoudresècheetdestratégiesde formulationadéquatestellesque(i)lesformesàlibérationcontrôléeetàrétentionpulmonaire prolongéeet(ii)lesnanomédecines.

©2018SPLF.Publi´eparElsevierMassonSAS.Tousdroitsr´eserv´es.

Auteurcorrespondant.

Adressee-mail:nawautho@ulb.ac.be(N.Wauthoz).

https://doi.org/10.1016/j.rmr.2018.02.001

0761-8425/©2018SPLF.Publi´eparElsevierMassonSAS.Tousdroitseserv´es.

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KEYWORDS Lungneoplasms;

Lungtumors;

Aerosol;

Pulmonarydelivery;

Nanomedicine

Summary Despitesevereadverseeffects,chemotherapyisstillwidelyusedinthetreatment oflungtumors,includingprimarylungtumorsandmetastases.Inordertoreducetheriskof harmandtointensifytreatmentresponses,severalstrategieshavebeendescribedrecently.

Theseincludetheuseofnanomedicine-basedchemotherapiesandpulmonarydrug delivery.

However,totreatlungtumors,inhalationcannotbeeffectiveandsafewithoutanadaptation ofcurrent inhalationtechniques,i.e. inhalationdevicesanddrug formulations.This canbe verychallenging.Thisreviewpresentsrecentpreclinicaldevelopmentsthatcouldaddressthe limitationsobservedwithaerosolizedchemotherapy.Thesolutionsinvolvetheuseofdrypowder inhalersandadvanceddrugformulations,suchascontrolledandsustainedreleaseformulations andnanomedicine-basedformulations.

©2018SPLF.PublishedbyElsevierMassonSAS.Allrightsreserved.

Introduction

Lestumeurs localisées dans le tractus respiratoire repré- sentent un véritable problème de santé publique. D’une part,lecancerbronchiqueprimitifestl’undescancersles plusfréquentsdanslemonde, avec1,8millionsdecas en 2012,et le cancer leplus meurtrier, avec1,6 millionsde caslamêmeannée[1].D’autrepart,lepoumonestunsite privilégiédemétastasesprovenantdecancersprimairesdu poumonet d’autresorganes telsque le côlon, le sein,la prostate, les reins etles os [2]. Les pronostics de survie sont généralement mauvais, avec un taux de survie glo- balà5ansd’environ15%pourlestumeursprimairestous stadesconfondus [1], etde 5à 80 % pour lesmétastases pulmonairesenfonctiondelalocalisationprimaireducan- cer[2].Cesmauvaispronosticss’expliquentparlefaitque lestumeurspulmonairessontsouventdécouvertestardive- mentchezlepatientquiprésentealorsdéjàunstadeavancé delamaladie[2,3].Lesmodalitésthérapeutiques,utilisées seulesouencombinaison dans letraitement des tumeurs primairesetsecondairespulmonaires,sont lachirurgie,la radiothérapie, la chimiothérapie, les thérapies ciblées et l’immunothérapie.

Les patients étant majoritairement diagnostiquésà un stadeavancé,l’approchethérapeutiqueestprincipalement palliative avec, toujours dans la grande majorité des cas actuellement(∼80%),l’utilisationdechimiothérapiesadmi- nistréesparvoiesystémique.Toutefois,leschimiothérapies conventionnelles étant peu spécifiques et peu sélectives pourlestumeurs,comparéesauxtissussainsdel’organisme, elles peuvent induire de graves effets secondaires systé- miques.Lesrégimesdechimiothérapiesdepremièreligne destinésàtraiterlescancersdupoumonsontbaséssurles dérivés duplatine (cisplatine oucarboplatine) associés le plussouvent àunautre agent telsque le pémétrexed,la gemcitabine,lavinorelbineetlestaxanes(lepaclitaxelet ledocétaxel)pourlecancerbronchiquenonàpetitescel- lules(CNPC)[4,5]ouassociéàl’étoposideouautopotocan pourlecancerbronchiqueàpetitescellules(CPC)[6,7].

Cette revue expose le concept de la chimiothérapie inhalée comme nouvelle approche thérapeutique dans le traitementdestumeurs pulmonaires.Danscettepremière partie du travail, nous abordons les différentes problé- matiques liées à l’administration systémique des agents anticancéreux et les potentiels avantages que pourraient présenter l’administration pulmonaire en tenant compte

deschallengesactuelsliésàl’applicabilitédecettemoda- lité thérapeutique dans le domaine de l’oncologie. Dans la seconde partie du travail, nous présentons l’état de l’art des études cliniques réalisées jusqu’à présent et le positionnementdelachimiothérapieinhaléedansl’arsenal thérapeutique.

• Lestumeurs du tractus respiratoiresont parmiles plus fréquentes et leur pronostic est en général sombre,avecune survieglobale à5 ans d’environ 15%pourlestumeursprimairesetde5à80%pour lesmétastasespulmonaires.

• Les modalités thérapeutiques, utilisées seules ou encombinaison,sontlachirurgie, laradiothérapie, la chimiothérapie, les thérapies ciblées et l’immunothérapie.

• Les chimiothérapies sont le plus souvent administrées par voie systémique, avec de graves effetssecondairessystémiques.

• Lesrégimes de chimiothérapies de première ligne destinésàtraiterlescancersdupoumonsontbasés surlesdérivésduplatine(cisplatineoucarboplatine) associés le plus souventà unautre agent tels que lepémétrexed,lagemcitabine,lavinorelbineetles taxanes pour le cancer bronchique non à petites cellules (CNPC) ou à l’étoposide ou au topotocan pourlecancerbronchiqueàpetitescellules(CPC).

• La chimiothérapie inhalée pourrait constituer une nouvelleapprochethérapeutiquedansletraitement destumeurspulmonaires.

Problématiques liées à l’administration systémique des agents anticancéreux Toxicité systémique des chimiothérapies conventionnelles

L’administrationdeschimiothérapiesvialavoiesystémique impliquequeladoseadministréeestdiluéedanslacircula- tionsystémiqueetdistribuéeàl’ensembledel’organisme.

Lemanquedesélectivitédesagentsanticancéreuxconven- tionnels va affecter les tissus à division rapide tels que

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les cellules de la moelle osseuse, la muqueuse gastro- intestinale,la peau provoquantnausées etvomissements, myélodépression etalopécie[8].Ces agentspeuvent éga- lementaltérer d’autresorganesetinduirenéphrotoxicité, ototoxicité, et neurotoxicité pour les sels de cisplatine.

La sévérité de ces toxicités limite la dose administrable qui déterminera directement les concentrations plasma- tiques deces agents. De plus, la préventionde certaines toxicités implique des procédures d’administration par- fois très longue (6—8h pour le cisplatine comprenant des phases d’hydratation intense) et/ou des phases de repos permettant aux tissus normaux de se régénérer mais qui peuvent favoriser la repopulation des cellules tumorales survivantes[9].Bienquemoins sévèresque pourlesanti- cancéreux conventionnels, il est à noter que des effets secondaires systémiques sont également observés avec les thérapies ciblées (diarrhée, rashs cutanés, pneumo- pathies interstitielles etc.) et avec les immunothérapies [10,11].

Danslebutdediminuerlatoxicitédeschimiothérapies conventionnelles,lesnanomédecinesontétédéveloppées.

Ellesontpermisd’augmenterlesdosesadministrablespour certainsagentsanticancéreuxetdecefait,d’intensifierleur effetthérapeutique[12].Lesnanomédecinespeuventêtre définies commedes formulations pharmaceutiques élabo- rées à l’échelle du nanomètre (généralement entre 25 à 250nm, bien que définies entre 1—100nm) qui ajoutent desfonctionnalitéssupplémentairesàl’agentthérapeutique contenu dans les dites formulations [13,14]. En tant que nanomédecine,unnanovecteurestunsystèmedetransport d’un agent thérapeutique sous forme de nanoparticule à based’excipientsdenaturepolymérique,lipidiqueouautre quiaméliorelapharmacocinétiqueet/oulabiodistribution decet agentthérapeutique.Denombreuxnanovecteurs à butthérapeutiqueontétédéveloppéscesdernièresannées danslebutd’améliorerlesthérapiesanticancéreusesavec denombreuxbénéficesconvaincantsobservéslorsd’études précliniquesetcliniques[15—17].Eneffet,lesnanovecteurs sont capables de transporter des agents thérapeutiques (petites molécules chimiques et/ou biomacromolécules) dans l’organisme en modifiant leur pharmacocinétique et la biodistribution favorisant une accumulation préféren- tielle dans les tumeurs, par rapport aux tissus sains de l’organisme ; ces nanovecteurs ayant été principalement administrésparlavoiesystémique.Plusieursmédicaments anticancéreuxissusdesnanomédecinessontapprouvéspar laFoodandDrugAdministration,maisunseull’estcontre leCPNC,leNabTM-paclitaxel.LeNabTM-paclitaxelcontient du paclitaxel sous formecomplexée à des nanoparticules d’albumineetestadministréparlavoiesystémique.Leprin- cipalavantagedecettethérapieestlameilleuretolérance parlespatients,comparéàlaformulationconventionnelle dupaclitaxel quiest àbasedemicellesdetensioactifset d’éthanol.Deplus,NabTM-paclitaxelpermetd’améliorerle profilpharmacocinétique etd’augmenter lafraction libre du paclitaxel par rapport à la formulation convention- nelle.Une accumulationpréférentielledes nanoparticules au niveau du site tumoral a également été démontrée grâce à unrécepteur spécifiquemédiant la transcytose à traverslescellulesendothélialesetgrâceàl’effetphysio- pathologique de perméabilité et de rétention augmentée

pour les macromolécules (appelé effet EPR « enhanced permeability and retention effect » dans la terminologie anglo-saxonne).Ainsi, leNabTM-paclitaxel peutêtre admi- nistréàdeplushautesdosesenpaclitaxel (jusqu’à50%), avecpourconséquenceuneréponsethérapeutiqueaugmen- tée[18].

Autres problématiques

Pour être efficace, l’agent thérapeutique doit arriver au seindutissutumoraletatteindrechacunedesescellules.

De plus, il doit être à une concentration suffisante pour permettre son action thérapeutique [19]. En effet, Kim etal.ontdémontréunecorrélationentrelaconcentration tumorale de platine et la réponse thérapeutique (réduc- tiondetaille dela tumeuretsurvie)de patientsatteints deCNPCtraitésparducisplatineouducarboplatine[20].

Cependant,les tumeurs solides présentent une vasculari- sationanormale etanarchiquelimitantl’accèsdes agents thérapeutiques à toutes les cellules cancéreuses [21]. De plus, elles présentent un système lymphatique immature voireabsent[22] etune matriceextracellulairecomplexe [23] qui provoque une pression élevée limitant la diffu- sion et la convection et par conséquent la distribution des agents anticancéreux au sein du tissu tumoral [24].

Deplus,cette distributionest égalementdépendantedes caractéristiques physicochimiques et pharmacocinétiques de l’agent anticancéreux dont son poids moléculaire, sa charge, son hydro- ou lipophilie, et ses interactions non spécifiques[19].Eneffet,unemoléculedepetitetaillede typehydrophile et non chargée diffusera plus facilement dans la matrice extracellulaire de la tumeur mais diffu- serapluslentement àtraverslamembrane plasmiquedes cellulescancéreuses,contrairement auxpetitesmolécules lipophiles qui passeront plus facilement les membranes.

Lankheet et al. ont étudié la concentration en erlotinib dansdes tumeurs pulmonaires de13 CNPCaprèsthérapie néoadjuvante[20].Lesconcentrationsenerlotinibretrou- vées dans les tumeurs de 1 à 19jours après la dernière administrationoraled’erlotinibétaientde149±153ng/g.

Decesvaleurs,lesauteursontestimé,parextrapolation,la concentrationdanslatumeuraujourdelaprise dumédi- camentàenviron200ng/g.Bienquelégèrementau-dessus de la valeur IC50 de l’erlotinib pour l’EGFR (183ng/mL), les concentrations retrouvées sont relativement faibles (environ16%)comparéesauxconcentrationsplasmatiques 18—24h après la dernière administration, qui étaient de 1222±678ng/mL.

Finalement, la voie systémique reste la voie la plus utilisée pour administrer les chimiothérapies convention- nelles.Elleconsisteàinjecteruneformulationaqueusedans uneveine superficielleouviauneperfusionàl’aided’une aiguilleoud’uncathéterplacédansuneveinesuperficielle ouprofonde.Cemodeinvasifd’administrationengendredes traumasauxveinespouvantaboutiràdesthrombophlébites.

L’extravasation des substances dans l’espace extracellu- laire peut mener à de l’irritation voire à de la nécrose tissulairesurtout avec des substances vésicantes [25]. De plus, des infections peuvent apparaître au niveaudu site d’introductionducathéter etdes embolies peuventavoir lieu[26].

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• Lesagents anticancéreuxconventionnelsmanquent de sélectivité et, quand ils sont administrés par voie systémique, ils affectent les tissus à division rapide tels que les cellules de la moelle osseuse de la muqueuse gastro-intestinale et de la peau, provoquant nausées et vomissements, myélodépression etalopécie;pour lecisplatine, il existeenoutreunenéphrotoxicité,uneototoxicité, etuneneurotoxicité.

• Lesnanomédecines, quiutilisentdes nanovecteurs transportant des agents thérapeutiques, ont été élaborées pour diminuer la toxicité des chimiothérapies conventionnelles et donc d’augmenterlesdosesadministrablespourcertains agentsanticancéreux.

• Avec les nanovecteurs, essentiellement administrés par voie systémique, les nouvelles pharmacocinétiqueetbiodistributionfavorisentune accumulation préférentielle dans les tumeurs par rapportauxtissussains.

• Pour être efficace, l’agent thérapeutique doit atteindrechacunedescellulesdelatumeur,àune concentration suffisante,ce quin’est pastoujours facile à obtenir parce que les tumeurs solides ont unevascularisation anormale etanarchique et une matrice extracellulaire complexe limitant la diffusion des agents thérapeutiques à toutes les cellulescancéreuses.

• La distribution dépend également des caractéristiques physicochimiques et pharmacocinétiques de l’agent anticancéreux : une molécule de petite taille, hydrophile et non chargée diffusera facilement dans la matrice extracellulaire de la tumeur, mais plus lentement à travers la membrane plasmique des cellules cancéreuses,alorsquepetitesmoléculeslipophiles traverserontplusfacilementlesmembranes.

• De plus, le mode d’administration le plus utilisé des agents systémiques (voie IV) est invasif, avec traumatisme veineux local et risque de thrombophlébites,toxicitélocaledessubstancesen casd’extravasationdansl’espaceextracellulaireet risquesinfectieuxlocaletembolique.

La chimiothérapie inhalée comme

nouvelle modalité thérapeutique dans la lutte contre les tumeurs pulmonaires Particularités de l’administration pulmonaire dans le domaine de l’oncologie

Afin de pallier les différentes problématiques liées à l’administration systémiquedes chimiothérapies discutées ci-dessus, l’administration pulmonaire d’agents thérapeu- tiques est prometteuse. L’administration pulmonaire de médicaments est une voie non invasive permettant de délivrer de manière topique des agents thérapeutiques.

Ces derniers sont délivrés sous forme d’aérosol généré à

partird’uneformulationàl’aided’ungénérateurd’aérosol et inhalé par le patient au travers d’un dispositif d’inhalation[27].L’inhalationapporte denombreuxavan- tagesdansletraitementd’affectionspulmonairescequien fait la voie d’administration privilégiée dans l’asthme, la bronchopneumoniechroniqueobstructive(BPCO),lamuco- viscidose ou encore l’hypertension artérielle pulmonaire.

Un bon nombre de ces avantages pourraient s’appliquer aux agents anticancéreux administrés dans le traitement du cancer dupoumon. L’inhalationpermet de réduireles doses d’agents thérapeutiques administrées (dans le trai- tementdel’asthme,parexemple, lesdosessontréduites d’un facteur 10 avec la voie pulmonaire par rapport à la voie orale [28]) tout en permettant une déposition de hautes doses au niveau de son site d’action, c’est- à-dire les poumons, sans distribution conséquente dans la circulation systémique et sans effet de premier pas- sage hépatique [29]. Cette diminution de la distribution systémique s’accompagne d’une diminution drastique des effets secondaires systémiques quilimitent la dose admi- nistrable chez le patient et impose le respect de phases d’interruptions de traitement [9,30]. Envue d’une appli- cation dans le domaine de l’oncologie, différents points technologiques cruciaux doivent être considérés et adap- tés de l’administration par inhalation des médicaments actuels.

Unpremierpointimportant estla doseélevée d’agent anticancéreux à délivrer au patient présentant un can- cer.Lesdosesadministréesdanslestraitementsclassiques administrésparinhalation,commeceuxdel’asthmeetde la BPCO, sont, de l’ordre du microgramme, par exemple 6 et 12␮g de formotérol et 25 ou 50␮g de salmétérol.

Dans le traitement des tumeurs pulmonaires, les doses à administrerseraientdeplusieursdizainesdemilligrammes [31—33].Cette problématique liéeà ladose àdélivrerau patient est accentuée par le fait que les anticancéreux sontdesmoléculesgénéralementpeuvoireinsolublesdans l’eau (solubilitéde l’ordre du nanogramme parmillilitre, par exemple la solubilité dans l’eau du paclitaxel est de

∼300ng/mL).Celapeutposerproblèmepouruneadminis- tration sous forme desolution pournébulisation [34],qui n’estpossiblequepourdesmoléculessuffisammentsolubles commepourl’ipratropiumbromuredisponiblesousformede solutionpournébulisationavec0,25et0,50mgdissoutdans 2mL.

D’autrespointsmajeursàconsidérersontliésàlatoxi- citédesagents anticancéreux.L’aérosolgénéré lorsd’une séance d’inhalation doit être confiné etla contamination environnementale totalement contrôlée afin de protéger le personnel médical [30]. Des systèmes de tentes et de cabines équipées d’extracteur d’air filtré par des filtres HEPA («high efficientparticulateair »dans laterminolo- gieanglo-saxonne)ontétédécrits[31—33].Decepointde vue, le choix d’un dispositif d’inhalation adapté à cette application est extrêmement important (voir section sui- vante). Toujours des suites de la toxicité de ces agents, unelibérationimmédiatedeceux-cidanslesfluidespulmo- naires peut mener à des concentrations en anticancéreux trop élevées dans le poumon générant des effets secon- daireslocaux(touxd’irritation,bronchite,dyspnée,fibrose, etc.)[35—38].Danslebutdelimitercespicsdeconcentra- tion,ilestintéressantdesetournerversdesstratégiesde

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formulationpermettantdelibérerprogressivementl’agent anticancéreuxdans lesfluidespulmonaires toutenéchap- pant auxsystèmes declairance pulmonairedes particules nonsolubilisées(voirLesformulationsàlibérationcontrôlée etàrésidencepulmonaireprolongée).

Etenfin,lesmodifications morphologiquesdesconduits respiratoiresduesàlaprésencedela(des)tumeur(s)modi- fiant la déposition de l’aérosol dans le poumon doivent également être prises en compte. Par exemple, comme dans des pathologies telles que la mucoviscidose et la bronchiectasie,lestumeurspeuventchangerradicalement l’architecture des bronches en altérant les angles des embranchementsetenobstruantlesvoiesaériennescequi influenceladépositiondesparticulesinhalées.Ladiminu- tiondudiamètredesconduitsprovoquedesobstructionsce quientraîneunécoulementd’airturbulentlàoùilétaitnor- malementlaminairecequipeutaugmenterlesdépositions parimpactiondansceszones[39].Lesobstructionstotales quantàellesmodifientetdévientlefluxd’airversleszones àproximiténonobstruées,diminuantainsiladépositionau niveau des zones obstruées [40]. Concernant lestumeurs pulmonaires,KleinstreueretZhang[39]ontétudiél’impact delatailleetdelalocalisationd’uneoudedeuxtumeurs danslagénérationG5d’unmodèlesimulantlesgénérations G3à G6desvoies respiratoiresdeWeibelsurle fluxd’air et le mouvement des particulesà proximité des tumeurs maiségalementsurladépositiondesparticulesensurface decelle-ci.Lebutétaitdedévelopperàlongtermedesinha- lateursperformantspermettantdecontrôleretdeciblerla déposition des particules inhalées au niveau des tumeurs etdeminimiserladépositionsurle tissusain.Lafraction maximalequisedéposeàlasurfacedelatumeur(dontle rapportdurayondelatumeurhémisphériquersurlerayon duconduitrespiratoireRvariant de1à1,5)variaitde5à 10%danslesconditionsnormalesetpouvaitaugmenterde 35à92%dansdesconditionscontrôléesetciblées.Deplus, lafractionmaximalequisedéposesurlerestedelagéné- rationG5étaitde20à25%(dansdesconditionsnormales) etdiminuait à5 à15 % dansdes conditionscontrôlées et ciblées.

• L’administration directement pulmonaire, topique et non invasive par inhalation des agents thérapeutiquespourraitpermettredeminimiserles effetsindésirablesdel’administrationsystémique.

• L’inhalation a fait la preuve de son intérêt dans des affections comme l’asthme, la BPCO, la mucoviscidose ou l’hypertension artérielle pulmonaire,etcesavantagespourraientégalement s’appliquer aux agents anticancéreux : les doses totales administrées sont moindres avec un dépôt de fortes doses au niveau du site d’action (les poumons), sans distribution systémique notable et sans effet de premier passage hépatique, avec donc diminution drastique des effets secondaires systémiques.

• Dans les cancers,la dose d’agent anticancéreux à délivrer au patient doit être élevée, ce qui peut s’avérerproblématiqueparcequelesanticancéreux sont des molécules généralement peu voire insolublesdans l’eau,compliquantl’administration sous forme de solution pour nébulisation qui supposeunehydrosolubilitésuffisantedesmolécules utilisées.

• Ilfautenoutretenircomptedelatoxicitédesagents anticancéreux,etl’aérosolgénérélorsd’uneséance d’inhalation doit être confiné et la contamination environnementale totalement contrôlée afin de protéger le personnel médical ; de plus, pour le patient lui-même, la libération immédiate des agentsdanslesfluidespulmonairespeutmeneràdes concentrationsenanticancéreuxexcessivesdansle poumon.Pourlimitercespicsdeconcentration,des formulationspermettantdelibérerprogressivement l’agent anticancéreux dans lesfluides pulmonaires tout en échappant aux systèmes de clairance pulmonairedesparticulesnonsolubiliséessemblent intéressantes.

• Il faut enfin tenir compte des modifications morphologiques des conduits respiratoires dues à la présence de la (des) tumeur(s) modifiant la dépositiondel’aérosol.Cette dépositionpeut être hétérogène, voire absente en cas d’obstruction totale.

• Lebutàlongtermeestdedévelopperdesinhalateurs performants permettant de contrôler et de cibler ladépositiondes particulesinhaléesauniveaudes tumeurstoutenminimisantladépositionsurletissu sain.

Choix du dispositif d’inhalation

Lechoixdutypededispositif d’inhalationadaptéàcette applicationestcrucial.Actuellement,lesdifférentstypesde dispositifspourl’administration pulmonairesontlesnébu- liseurs,lesinhalateurspressurisésàvalvedoseuseoupMDI (« pressurizedmetered dose inhalers»),lesinhalateurs à poudresècheouDPI(«drypowderinhalers»)etlesinhala- teurs«SoftMistTM»[41—43].Leurrôleestdedisperserun liquidepourlesnébuliseurs,lessystèmespMDIetlesinhala- teursSoftMistetunepoudrepourlessystèmesDPI,etceen petitesentités(gouttelettesouparticules).Lesavantageset inconvénientsdechacundecesdispositifssontreprisdans leTableau1.

Deparleurincapacitéàdélivrerdehautesdosesd’agents thérapeutiquesdans le poumon(faiblesdoses nominales), lesdispositifs pMDInesontpasadaptés audomaine onco- logique. Ces petits dispositifs portatifs sont adaptés aux traitementsaiguscommedansl’asthmeetlaBPCO.Ilssont capablesdedélivrerdesdosesdel’ordredumicrogramme, commepourl’associationdefluticasone(25␮g)avecdusal- métérol(250␮g).

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• Les différents dispositifs actuellement disponibles pourl’inhalationsontlesnébuliseurs,lesinhalateurs pressurisésà valvedoseuseoupMDI (« pressurized metered dose inhalers»), lesinhalateurs àpoudre sèche ou DPI (« dry powder inhalers ») et les inhalateurs«SoftMistTM».

• Lesnébuliseurs,lessystèmespMDIetlesinhalateurs Soft Mistdispersent un liquideet lessystèmes DPI dispersentunepoudre,etceenpetitesentités.

• LesdispositifspMDInesontpasadaptésenoncologie parcequ’ils nepermettentpas l’administrationde hautesdoses.

Les nébuliseurs

CommeexposédansleTableau1,lesnébuliseursprésentent l’avantagedenepasnécessiterdetechniqued’inhalationou decoordinationparticulière etd’utiliserdes formulations assezsimplestellesquedessolutionsoudessuspensions.De plus,ilspermettentdedélivrerdesdosesélevéesetsontuti-

lisableschezdespersonnestrèsaffaibliesouphysiquement incapablesd’utiliserlesautresdispositifsd’inhalation.

Cependant,ladépositiondel’aérosol généréauniveau pulmonaireétantrelativementfaible[44,45](généralement de 10 à 15 % [33,46]), ils présentent les désavantages denécessiteruntempsd’administrationrelativementlong (environ15min parsessiondenébulisation[33]).Deplus, cetypededispositifd’inhalationinduitunecontamination conséquente de l’environnement parl’aérosol généré, ce qui nécessite la mise en place obligatoire d’équipements (coûteux, lourds et contraignants) assurant la protection du personnelsoignant pendant l’administration du traite- ment anticancéreux. Ces deux problématiques liées à la performancedudispositifd’inhalation,enplusdes’avérer critique pour l’administration de doses efficaces en prin- cipe actif, sont égalementà l’origine d’inconfortpour le patientetdecoûtssupplémentairespourl’hôpitalassurant ceservice.Afind’améliorerladépositionpulmonaireetlimi- ter les pertes dans l’environnement [28],des nébuliseurs intégrant undispositif de filtration pour limiterla conta- mination de l’environnement ou des nébuliseurs de type

«breath-enhanced»peuventêtreutilisés[31,47].Cetype

Tableau1 Avantagesetinconvénientsdesdispositifsd’inhalationutilisableschezl’homme.

Dispositif d’inhalation

Avantages Inconvénients

Nébuliseurs pneumatique, ultrasonique,à mem-

brane/tamis vibrante

Nenécessitentpasdetechniqued’inhalationni decoordinationparticulière

Tempsd’administrationlongs(∼15min/5mL) etimportantespertesdansl’environnement Formulationaqueusesimpledetypesolution

(oususpension)

Applicationàdesagentsthérapeutiquesde préférencesolublesdansl’eau.Peutnepas conveniràladélivrancedesmacromolécules et/oudesliposomes(stressintense)

Permettentd’administrerunaérosolàdes enfantsetàdespersonnesdansl’incapacité d’utiliserlesautresdispositifs

Enmajoritépeuportatifs,nécessitentune sourced’énergiesursecteuroubatterie, facilementcontaminésetnécessitentdela maintenance

Dosesdélivréesélevées(jusquequelques centainesdemilligrammes)

Efficacitédedépositionfaibleettrèsvariable d’undispositifàl’autre

Aérosolsdoseurs pressurisés (pMDI)

Compacts,portatifs,etpeucoûteux Nécessitentdestechniquesd’inhalationetune coordinationmain—poumon

Dosesmultiplesadministréesdemanière reproductibleenuntempscourts(<1min)

Importantedépositionoropharyngéeetune faibledépositionpulmonaire

Formulationcontenuedansunrécipient hermétique

Applicabilitépourunnombrelimitéd’agents thérapeutiquesetdosemaximum

administrable<milligramme Inhalateursà

poudresèche (DPI)

Compacts,portatifs,peucoûteux,possibleà usageunique

Dosedéposéegénéralementdépendantedu fluxinspiratoiredupatientetdel’humidité Applicablesàunegrandevariétéd’agents

thérapeutiquesetpermettentl’administration dedosesélevées(20—100mg)enuneou plusieursprises

Formulationrelativementcomplexe

Activésparlefluxinspiratoiredupatient,ne nécessitentpasdecoordinationmain—poumon ettempsd’administrationcourt(∼1min)

Nécessitentsouventunnombreélevéde manipulationslorsdel’administration Inhalateurs«Soft

Mist»

Compactsetportatifs Tempsd’administrationlongsetpertes importantesdansl’environnement Contiennentlaformulation,typiquementune

solution,dansunrécipienthermétique (multidose)

Nombrelimitédesubstancesactivespouvant êtreformuléesetdosemaximum

administrable<milligramme

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denébuliseurprésenteunsystèmedevalvepermettantde faireentrerdel’airpendant l’inspiration.Cecifavorisela formationd’uneplusgrandequantitéd’aérosolaumoment de l’inspiration et un autre système de valve au niveau de l’emboutpermet dedévier le flux d’airdupatient en dehors dela chambre denébulisationlors del’expiration permettantde limiterlacontamination environnementale [48].

• Les nébuliseurs ont plusieurs avantages : pas de nécessité de technique d’inhalation ou de coordination particulière du patient, emploi de formulationsassezsimplestelsquedessolutionsou desdispersionsetpossibilitédedélivrancededoses élevées, même chez des personnes très affaiblies ou physiquement incapables d’utiliser les autres dispositifsd’inhalation.

• Ils ont en revanche plusieurs inconvénients : le dépôt de l’aérosol généré au niveau pulmonaire est relativement faible,le temps d’administration est relativement long et il y a une contamination conséquente de l’environnement nécessitant l’emploi d’équipements coûteux, lourds et contraignants.

• Pour améliorer la dépositionpulmonaire etlimiter lespertesdansl’environnement,onpeututiliserdes nébuliseursintégrantundispositifdefiltrationpour limiterlacontaminationdel’environnementoudes nébuliseursdetype«breath-enhanced».

Les inhalateurs à poudre sèche mieux adaptés à la chimiothérapie inhalée

GénéralitéssurlesdispositifsDPI

Les DPI présentent plusieurs avantages en oncologie.

Ils permettent d’administrer des doses élevées en un temps d’administration relativement court (c’est-à-dire 1min/dosede20—30mg),encomparaisonavecceluinéces- saire aux nébuliseurs (c’est-à-dire 15min/5mL, pouvant contenir, pour l’exemple deliposomes de cisplatine utili- sés lors d’une étude clinique récente, 5mg de cisplatine [33]).Deplus,l’activationdel’aérosolpourlesDPIsefait grâceàl’inspirationdupatientuniquement,cequilimiteles pertesdansl’environnement(<0,2%pourl’airexhalé[46]) parrapport aux nébuliseursoù l’aérosol estgénéré avant l’inhalationparlepatientetpourlesquelsunedécontami- nationestnécessaire.Deplus,lesDPIpeuventêtreélaborés danslebutd’uneadministrationunique(dispositifjetable) au vude leurfaiblecoûtde production.Ce dernierpoint pourrait éliminer les problèmes de maintenance rencon- trésaveclesnébuliseursetfaciliterleuréliminationviaun circuitderécupérationhospitalierdesdéchetscontaminés destinésàl’incinération.

Ilexistedifferents typesdeDPI disponiblessurlemar- ché:ceuxparactivationpassivequisontsoitdesdispositifs unidoses (avecgéluletelque l’Aerolizer®)oudes disposi- tifsmultidoses(avecréservoirtelquele Turbohaler® ouà dosespré-séparéestelqueleDiskus®)etceuxparactivation active qui sont réservés généralement à l’administration systémique [49]. Dans le cadre des patients atteints de

tumeurs pulmonaires et présentant une fonction respira- toireaffaiblie, ilestimportantdesélectionner desDPIde typeunidosepermettantdedélivrerdesdosesplusimpor- tantes que les systèmes multidoses. De plus, les DPI de typeunidosebaséesur des gélulespeuventprésenter des résistances au flux d’air très faibles grâce à la participa- tionde la gélule à l’aérosolisation et à la dispersion des particulesdepoudre.Cette faiblerésistanceau flux d’air nécessitemoinsd’effortinspiratoirepourgénérerlaturbu- lencenécessaireàl’aérosolisationetàladispersionqueles DPIàhautesrésistancesauxfluxd’air[49].D’autresmodi- ficationspourront égalementêtre apportéesaux DPI pour les rendre plus adaptés au domaine oncologique, comme parexempledesdispositifspermettantunedépositionplus importantedutraitementsurlatumeur,enfonctiondesa tailleetdesalocalisationdansletractusrespiratoire.Des dispositifsjetablestotalementhermétiquespeuventégale- mentêtreenvisagésafin d’évitertoutecontaminationpar l’agentanticancéreux après que le patient ait inhalé son traitement.

Ladépositionde lasubstance active dans lespoumons dépenddes propriétésdelapoudre,des performancesdu dispositifd’inhalationetdufluxinspiratoire.Eneffet,quand le flux d’air passeà travers le dispositif d’inhalation,les moléculesd’air,ayantunecertaineénergiecinétique,vont bombarderlelitdepoudrecequivapermettredelaflui- diseret dela désagglomérer. Parconséquence, la poudre vaêtremisesousformed’aérosolenquatreétapessimulta- nées:(i)dilatationdulitdepoudrestatique,(ii)fluidisation delapoudre dans le flux d’air,(iii) désagglomérationdes microparticulesouséparationdelasubstanceactivedeson transporteuretenfin,(iv)dépositiondansletractusrespi- ratoire[50].

Formulationsde poudressèches pourinhalationà based’agentsanticancéreux

Concernantl’aspect formulationdes poudressèches pour inhalation,laplupartdesspécialitésprésentessurlemarché utilisentdes formulationsàbased’un«transporteur»tel quelelactose.Commediscutéprécédemment,lesdosesde principeactifàadministrerpourletraitementdel’asthme ou de la BPCO sont généralement de l’ordre du micro- gramme(entre 20et500␮g)cequinécessiteunedilution dans un volume de poudre plus important de l’ordre de la dizaine de milligramme (teneur en principe actif de 0,05à 2% généralement).De plus,la taille deces trans- porteurs, le plus souvent comprise entre 50 et 100␮m, permetd’améliorerlespropriétésd’écoulementainsiquela dispersiondelasubstanceactivemicronisée(detaillegéné- ralementcompriseentre1et5␮m)danslefluxinspiratoire [50].

Dans le cadre de la délivrance pulmonaire d’anticancéreux,ladémarcheseratrèsdifférente.Eneffet, lespoudressèchespour inhalationàbased’anticancéreux devront contenir une teneur en principe actif élevée en vue de délivrer des doses suffisantesau niveaudes voies respiratoiresinférieures.Pourcefaire, desformulationsà based’agglomératsdeparticulesmicroniséesdesubstance active seront plus adéquates [34]. Les forces d’adhésion entre les microparticules agglomérées devront être suf- fisamment lâches pour être surpassées par les forces généréesparlefluxd’airinspiratoireàtraversledispositif

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d’inhalation.Le butestdoncdeproduiredesformes hau- tementdoséesenprincipeactif,avecdebonnespropriétés dedésagglomérationetdedépositionpulmonaire.Deplus, commelesanticancéreuxsontdessubstancesrelativement peusolublesdansl’eau,leurs profilsdedissolutioninvitro danslesliquidessimulantlefluidepulmonairedevrontêtre évalués au risqueque ces substances nesoient éliminées in vivo par les systèmes d’élimination des particules non solubilisées avant leur dissolution complète. Cependant, une libération immédiate des anticancéreux dans les fluides pulmonaires pourrait mener à des concentrations pulmonaires en principe actif trop élevées générant des effetssecondaireslocauxpouvantêtreimportants[35,36].

Comme mentionné plus haut, il est alors intéressant de setourner versdes stratégies de formulationpermettant delibérer progressivementl’agentanticancéreux dans les fluides pulmonaires tout en échappant aux systèmes de clairancepulmonairedesparticulesnonsolubilisées.Cette possibletoxicitélocaledépendantdel’agentanticancéreux utilisé,le choix dece dernierest également crucialpour une bonne tolérance locale des traitements (voir partie 2).

• Les DPI ont plusieurs avantages en oncologie : ils permettent d’administrer des doses élevées en un temps d’administration relativement court, l’activationdel’aérosolsefaitgrâceàl’inspiration du patient uniquement, ce qui limite les pertes dans l’environnement, et leur coût de production estfaible,permettantl’emploidedispositifsàusage unique.

• Il existe différents types deDPI disponibles sur le marché:ceuxparactivationpassive,soitunidoses (avec gélule tel que l’Aerolizer®), soit multidoses (avecréservoirtelqueleTurbohaler®ouàdosespré- séparéestelquele Diskus®)etceuxparactivation active, habituellement réservés à l’administration systémique.

• En cas de tumeurs pulmonaires chez un patient présentantunealtérationdelafonctionrespiratoire, ilfautchoisirdesDPIdetypeunidosepermettantde délivrerdesdosesplusimportantesquelessystèmes multidoses, et ce avec des résistances au flux d’airtrèsfaiblesdiminuantl’effortinspiratoirepour générerla turbulence nécessaire à l’aérosolisation etàladispersion.

• D’autres modifications pourront également être apportéesaux DPI pour lesrendreplus adaptés en oncologie : dispositifs permettant une déposition plus importante du traitement sur la tumeur, en fonction de sa taille et de sa localisation dans le tractus respiratoire et dispositifs jetables totalement hermétiques permettantd’éviter toute contaminationparl’agentanticancéreux.

• La déposition de la substance active dans les poumons dépend des propriétésde la poudre, des performances du dispositif d’inhalation et du flux inspiratoire.

• Quatre étapes simultanées sont nécessaires pour que la poudre soitmise sous formed’aérosol : (i) dilatationdulitdepoudrestatique,(ii)fluidisation delapoudredanslefluxd’air,(iii)désagglomération des microparticules ou séparation de la substance activedesontransporteuretenfin,(iv)déposition dansletractusrespiratoire.

• Pour la formulation des poudres sèches pour inhalation, la plupart des spécialités utilisent actuellement des formulations contenant un

« transporteur » tel que le lactose, mais pour la délivrance pulmonaire d’anticancéreux, la démarche sera très différente : il faut obtenir des formes hautement dosées en principe actif (avec des formulations à base d’agglomérats de particulesmicronisées),avecdebonnes propriétés dedésagglomérationetdedépositionpulmonaire.

• Lesanticancéreuxsontdessubstancesrelativement peu hydrosolubles mais leur libération dans les fluides pulmonaires pourrait mener à des concentrations pulmonaires en principe actif excessives, et des stratégies de formulation permettant de libérer progressivement l’agent anticancéreuxdans lesfluidespulmonaires touten échappantauxsystèmesdeclairancepulmonairedes particulesnonsolubiliséesseraientintéressantes.

Les formulations à libération contrôlée et à résidence pulmonaire prolongée

Le développement de formulations permettant de main- tenir une libération du principe actif soutenue dans les fluides pulmonaires a fait l’objet de nombreux travaux au cours de ces dernières années [51,52]. Le Tableau 2 reprend les différentes stratégies de formulation adop- tées,letyped’excipientutilisé,latolérancepulmonaire,la taille desparticulesdéveloppées, lafaisabilitéd’une pro- duction à grande échelle et le stade de développement le plus avancé. Dans le domaine del’oncologie tout par- ticulièrement, la mise en place de telles stratégies, qui doivent être adaptées suivant l’agent anticancéreux uti- lisé, pourraient présenter certains avantages. En effet, pour qu’une chimiothérapie soit bien tolérée et efficace parinhalation,unelibérationlenteetsoutenuedel’agent anticancéreux dans les fluides et tissus pulmonaires pen- dant un laps de temps suffisamment long semble être préférable[37,53].Denombreusesétudesprécliniquesont démontré qu’après inhalation, les formulations à libéra- tion prolongée mènent à un aplatissement des pics de concentrationsplasmatiques,directementliéesauxconcen- trationsplusfaiblesdel’agentanticancéreuxdissoutdans lestissuspulmonaires. Parconséquent,unediminutionde la Cmax pulmonaire de la molécule dans son état phar- macologiquement actif mène à une meilleure tolérance destraitementsquecequiestgénéralementobservéavec l’administration de formulations à libération immédiate tellesquedessolutionsoudespoudresàdissolutionimmé- diate [54—57]. En prolongeant la résidence de l’agent anticancéreux dans le poumon (jusqu’à parfois 7jours

(9)

Tableau2 Stratégiesdeformulationspourunelibérationprolongée,letyped’excipientutilisé,latolérancepulmonaire, latailledes particulesdéveloppées,lafaisabilitéd’une productionàgrandeéchelleetlestadededéveloppementle plusavancé.

Excipients Tolérance pulmonaire

Tailledes particules

Productionà grandeéchelle

Stadede développement Liposomes Lipides,phos-

pholipides, phaseaqueuse

++ 50nm—5␮m + Commercial

(injectable)

PhaseIII(inhalation)

Micelles Lipides,

polymères, phaseaqueuse

+/− <100nm +/− PhaseII(injectable)

Préclinique(inhalation) Dendrimères Polymères

(PAMAM, PEHAM)

+/− 4—20nm +/− PhaseI(injectable)

Préclinique(inhalation) Nanoparticulesà

basede polymères

Polymères (PLA,PLGA)

− 10—250nm +/− PhaseI(injectable)

Préclinique(inhalation) Microparticulesà

basede polymères

Polymères (PLA,PLGA)

− 0,25—5␮m ++ PhaseI(injectable)

Préclinique(inhalation) Nanoparticules

lipidiques solides

Lipides, phospholipides

+ 10—250nm −/+ Commercial(topique)

Préclinique(injection etinhalation) Microparticules

lipidiques solides

Lipides, phospholipides

+ 0,25—5␮m ++ Commercial(topique)

Préclinique(injection etinhalation)

Pourlatolérancepulmonaire,+représente lesformulationspour lesquellesunebonnetolérance aétéobservéechezl’hommeou dansdesétudesinvivo,+/représentelesformulationsquiontétépartiellementétudiéesinvivooupourlesquellesilmanquedes données, représente lesformulationsquiontmontréesunetolérance limitéeinvivo.PAMAM : dérivépolyamidoamine; PEHAM :dérivépoly(etherhydroxylamine);PLA:poly(lacticacid);PLGA:poly(D,L-lactide-co-glycolide).

[57]), et donc à proximité du site tumoral, les formula- tions à libération prolongée ont montré une plus grande activitéantitumoraleinvivosurdifférentsmodèlesprécli- niques[55,57,58]. Etenfin, ilestà noter quel’utilisation deformulationsà libérationprolongéepourraitpermettre également de diminuer le nombre d’administration tout en garantissant la présence au niveau local de concen- trations effectives en agents anticancéreux pendant une plus longue durée, ce qui pourrait augmenter le confort et la compliance du patient pour ce type de traite- ment.

Dans une perspectived’administration parvoiepulmo- naire,destechniquesd’ingénierieparticulairedoiventêtre développéesdemanièreàdéposerlesformulationsàlibé- rationsoutenuedanslepoumon.Toutefois,enplusduchoix de la composition et du mode de préparation de formu- lations qui permettent une déposition pulmonaire élevée et une libération modifiée de l’agent anticancéreux, des stratégiesdeformulationdoiventêtremisesenplacepour échapper aux systèmes d’élimination des particules non solubiliséesdanslepoumon,c’est-à-direlaphagocytosepar desmacrophagesalvéolairespourlazonerespiratoire[51].

En effet, le taux de phagocytose étant optimal pour des particulesdetaillecompriseentre1et2␮m,lesmicropar- ticulesdéposéesdanslazonerespiratoiresontrapidement éliminées (<1—2h) avant de pouvoir libérer l’agent anti-

cancéreux.Différentes stratégies ont été proposées dans cebut, commel’utilisation departicules degrande taille géométrique(>5␮m)defaibledensité[59,60],lamodifica- tiondespropriétésdesurfacedesparticulesparPEGylation afin de diminuer l’opsonisation des particules (propriétés

« stealth ») et par conséquent leur phagocytose [61] ou encore l’utilisation des nanomédecines (voir Les formu- lations à base de nanomédecines). La Fig. 1 illustre ces différentesstratégiesavecl’utilisationdeformulationsde poudressèchesprésentant des propriétésdelibération et rétention prolongées de l’anticancéreux dans le poumon, aveclesformulationsàbasedeparticulesmicroniséesetde nanomédecines.

• Pourqu’unechimiothérapieparinhalationsoitbien toléréeetefficace,unelibérationlenteetsoutenue de l’agent anticancéreux dans les fluides ettissus pulmonairespendantunlapsdetempssuffisamment longsembleêtrepréférable.

• Avec les formulations à libération prolongée, on note un aplatissement des pics de concentrations plasmatiques, en raison de la plus faible concentration de l’agent anticancéreux dissout danslestissuspulmonaires.

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Figure1. Formulationsde poudresèche à libérationet rétentionprolongéesà base departicules microniséeset denanomédecine

dépositionetdevenirauseindespoumonsportantdestumeurs.1.Lesparticulesinhaléesvontsedéposerenfonctiondeleurdiamètre aérodynamique(Dae)danslazoneconductrice(Daede2à5m)oudanslazonerespiratoire(Daede1à2m).2.Aprèsdispersiondansles fluidespulmonaires,lesparticulesvontpermettreunelibérationetunerétentionprolongéedansletractusrespiratoireenéchappantaux mécanismesdeclairancepulmonairedeparleurcomposition(composantsmucoadhésifs),leurspropriétésdesurface(PEGylation)et/ou deleurtaille(particulesdegrandetaillegéométriquedefaibledensité,nanoparticules).3.L’utilisationdesnanomédecinespermetlamise enplaced’unciblageactifdescellulescancéreusesavecunelibérationintracellulairedel’agentanticancéreuxsuiteàlaliaisonspécifique deligandsprésentsàlasurfacedesnanovecteursavecleurrécepteur(endocytosemédiéepardesrécepteurs).

• Lesformulationsàlibérationprolongéeontuneplus grande activité antitumorale in vivo sur différents modèles précliniques et leur emploi pourrait permettredediminuerle nombred’administration tout en maintenant des concentrations effectives en agents anticancéreux pendant une plus grande durée.

• Pour une administration par voie pulmonaire, il faudrait mettre au point des formulations à libération soutenue dans le poumon qui permettent une déposition pulmonaire élevée et

unelibérationmodifiéedel’agentanticancéreux,et quipermettentégalementd’échapperauxsystèmes d’élimination des particules non solubilisées dans le poumon (phagocytose par des macrophages alvéolaires), notamment en augmentant la taille desparticules;onpourraitégalementmodifierles propriétésdesurfacedesparticulesparPEGylation pour diminuer l’opsonisation des particules (et donc aussi leur phagocytose), ou utiliser des nanomédecines.

(11)

Exemples de formulations à base de particules micronisées

De nombreuses stratégies de formulations de particules micronisées à libération modifiée ou prolongée ont été décrites pour obtenir un profil pharmacocinétique local plus intéressant qu’avec des formulations à libération immédiate. C’est le cas notamment des microparticules polymériquesoudesmicroparticuleslipidiquessolides(SLM pour«solidlipidmicroparticles»).Alorsquelesmicropar- ticulespolymériquessontcomposéesdematériauxsouvent nonacceptablespourlavoiepulmonaireoupourlesquelsil existepeu oupasdedonnéestoxicologiques [62],lesSLM présentent l’avantage d’être composées de lipides endo- gènes(oudérivés de),commelesphospholipides,pouvant présenter un meilleur profil toxicologique en inhalation (Tableau2)[62,63].

Levetetal.ontdéveloppédesformulationsDPIàbasede SLMdecisplatine(i)utilisantdes méthodesdeproduction transposables à l’échelle industrielle, (ii) avec des exci- pientspotentiellementbientolérésparlavoiepulmonaire et (iii) présentant des propriétés de libération contrôlée et de rétention pulmonaire augmentée [35,36]. Ces for- mulations consistaient en des microcristaux de cisplatine dispersésdansunematriced’excipientscomposésdetrigly- cérides avecousansexcipients PEGylés.Cesformulations étaientcaractériséespardesteneursélevéesencisplatine (min. 50 % dans la poudre finale) et des propriétés aéro- dynamiquesintéressantes(fractionenparticulefine(FPF), c’est-à-direcellequisedéposethéoriquementauniveaudu poumonprofond, jusqu’à50 %).Concernant lesprofils de libérationdansdesconditionssimulantlefluidepulmonaire invitro,lesformulationsprésentaientdeslibérationsducis- platinesoitimmédiates,soitcontrôléessur24h.Certaines formulations incluantdes excipients PEGylés présentaient égalementdes propriétésderétention pulmonaire invivo chezlasourispouvantallerjusqu’à7h [36].L’airesous la courbedanslepoumon(obtenueàpartirduprofildeconcen- trationenfonctiondutemps)aalorsétéaugmentée d’un facteur11,4et3pourunemêmedosedecisplatineavecles SLMPEGyléescomparéesàunesolutionIV,uneformulation DPIàlibérationimmédiateetdeSLMnonPEGylées,respec- tivement.Pourtenircomptedelacapacitéàlocaliserune dosetoutenévitantl’expositionsystémique,lesfacteursTe etTasontdécritspourillustrerrespectivement,l’efficacité etl’avantagedeciblage(«targetingefficiency»et«tar- geting advantage», respectivement)[36]etsont calculés commesuit:

(1) Ta= AUCInhalationPoumon

AUCIVPoumon (2)

Detouteslesconditionsévaluées,lesvaleursdeTeetde Talesplusélevéesontétéobtenuesavecl’administration pulmonaire de la formulation de SLM PEGylées, avecdes valeurs de Te de 1,6 vs 0,09 et deTa de 10,9 vs 1 pour l’injection d’une même dose de cisplatine en IV [36].

L’inhalationdeSLMPEGyléesamenéàunelégèreinflamma- tionetcytotoxicitélocaleschezlasouris(dansdeslavages broncho-alvéolaires,diminutionde50%dunombredecel-

lules totaleset recrutement de neutrophiles maispas de différencessignificatives,comparéauxsouriscontrôlesnon traitées,dans les concentrations de protéinestotales,de cytokinespro-inflammatoiresIL-1␤, IL-6etTNF-␣ etdans l’activitédelaLDH)[64].Cettefaibletoxicitéétaitdirec- tementimputable aucisplatine et nonau véhicule utilisé (excipientssousformedepoudre).

L’apport de ce type de formulation de poudre sèche entermesde tempsd’administrationestconsidérable. En effet,laplushautedosedecisplatineadministréelorsdes étudescliniques(c’est-à-dire60mg/m2)anécessitéunpeu plusde6hdenébulisationautotal(administréen2cycles de3jours consécutifs) [33,65].Sachant que le nébuliseur pneumatique utilisé dans cette étude permet de déposer environ10—15%deladosenominaledanslespoumons[33], ladosemaximaledéposéedanslespoumonsétaitd’environ 20mg. Avecl’utilisation de la formulation DPI présentant unelibérationcontrôléeetuntempsderésidencepulmo- naireaugmentée(SLMPEGylées),cettemêmedosepourrait être administrée dans les poumons à l’aide de 4 gélules contenant20mgdeformulationsachantqu’ilfautenviron 1minpourl’administrationd’unegéluleparDPI.

• Les microparticules polymériques ou les microparticuleslipidiquessolides(SLMpour «solid lipid microparticles ») permettent d’obtenir un profil pharmacocinétique local intéressant, mais les microparticules polymériques sont souvent inutilisables pourla voiepulmonaire, alorsqueles SLMprésententsontcomposéesdelipidesendogènes (ou dérivés de), comme les phospholipides, ayant unmeilleurprofiltoxicologiqueeninhalation.

• Il existe des formulations DPI à base de SLM de cisplatine dispersés dans une matriced’excipients composés de triglycérides avec ousans excipients PEGylésquipeuventêtreproduitsindustriellement, avec des excipients potentiellement bien tolérés parlavoiepulmonaireetprésentantdespropriétés delibérationcontrôléeetderétentionpulmonaire augmentée.

• Ces formulations sont caractérisées par des teneurs élevées en cisplatine et des propriétés aérodynamiques intéressantes pour un dépôt dans le poumon profond, avec debonnes propriétés de rétentionpulmonairepourlesformesPEGylées.

• Cette formulation de poudre sèche permet de diminuer considérablement le temps d’administration comparativement à des formulationspournébulisation.

Les formulations à base de nanomédecines

Auvudesnombreusesfonctionnalitéspouvant êtreappor- tées par les nanomédecines (voir Problématiques liées à l’administration systémique des agents anticancéreux), leur utilisation par inhalation pour lutter contre les tumeurs pulmonaires permettrait également d’apporter des alternatives intéressantes à certaines des probléma- tiques soulevées. Les principaux types de nanomédecine ayant été développés dans le cadre de l’inhalation et

(12)

Figure2. Avantagesetlimitationsdesformulationsàbasedenanomédecinespourinhalation.

des tumeurs pulmonaires ainsique leurs principaux avan- tages et inconvénients sont illustrés sur la Fig. 2. Les avantagespotentielsd’unetelleapprochesont(i)uneaug- mentation de la solubilité et de la stabilité de l’agent anticancéreux,(ii)uneaugmentationdelabiodisponibilité locale par le prolongement du temps de résidence dans le poumon, (iii) une réduction de la phagocytose par les macrophagesalvéolaires,(iv) unemeilleure pénétrationà travers les barrières biologiques comme le mucus, et (v) unemeilleuredistributiondanslesganglionslymphatiques.

Deplus,(vi) uneaccumulationpréférentielledansle tissu tumoral via l’effet EPR après l’absorption des nanoparti- cules dans la circulation locale pour les nanovecteurs à ciblage passif, (vii) une augmentation de l’internalisation et la reconnaissance spécifique et sélective des cellules cancéreuses via des récepteurs surexprimés à leur sur- face, pour des nanovecteurs à ciblage actif, et (viii) la possibilité de lever certains mécanismes de résistance [66—70].

Le premier type de nanovecteur développé dans les années 1990 pour l’inhalation était le liposome, devenu depuis le type le plus développé pour cette application.

Lesliposomes sont d’ailleursà ce jourles seulsnanovec- teursà avoir été évalués en inhalation chez l’homme au coursd’étudescliniques (voirPartie2).Cesvésiculessont constituées principalement de lipides endogènes biocom- patibles (phospholipides, cholestérol), biodégradables et nontoxiquesauniveaupulmonaire[63].Ilspermettentde diminuerle passagede la substance active dans la circu- lationgénérale etprolongent ainsile temps derésidence dans les poumons [51,63,71]. Cependant, les liposomes présentent des désavantages tels qu’une faible capacité d’encapsulationensubstanceactive(del’ordrede2à5%) [33,72], une faible stabilité lors du stockage et une cer- tainedifficultéàlesproduireàlargeéchelle[73].Deplus, ilspeuventprésenterdesproblèmesdestabilitédurantla

nébulisation[63,74].Cesdésavantages limitent fortement leur application en chimiothérapie inhalée malgré le fait qu’ilssoientlesplusutilisésàcejour.

Denombreuses études décrivant le développement de nanovecteursadaptésàlavoiepulmonairepouruntraite- ment antitumoral ont été publiées au cours de ces vingt dernièresannées.Cesétudessontlargementdiscutéesdans deuxrevuesdelalittérature[75,76].Différentsexemplesde développementdenanomédecineinhaléedansledomaine del’oncologiesontprésentésdansleTableau3.Ilestànoter que la grande majorité de ces nanovecteurs sont décrits sousformedenanosuspensiondansunliquide,c’est-à-dire adaptéeauxnébuliseurs.

Concernant le développement de nouveaux nanovec- teurs pour inhalation, la rétention dans le poumon de ceux-ci et/ou de l’agent anticancéreux encapsulé est souvent évaluéechez la sourisetle rat [54,57,77].Com- paré à l’administration IV, la délivrance pulmonaire de l’agentanticancéreuxencapsulédansunnanovecteurmène à une plus faible exposition systémique, et par consé- quent à des toxicitésmoindres (Tableau 3)[77]. De plus, l’administration localisée des nanovecteurs parinhalation aboutitàuneplusgrandeexpositionpulmonairedel’agent anticancéreuxencapsulé,c’est-à-direl’observationdeplus grandesconcentrationssurunepériodedetempspluslongue (jusqu’à septjours dans certains cas [57]), par rapport à l’administration pulmonaire de l’agent anticancéreux non encapsulédansunnanovecteur[77].L’absorptiondesnano- vecteurs dans la circulation systémique est généralement dépendantedeleur taille (lesplus petitesparticulessont absorbéesplusrapidementetenplusgrandequantité).Par conséquent,letempsderésidencedansletractusrespira- toireest dépendantdela taillepour desnanovecteurs de compositionidentiquecommec’estlecasparexemplepour lesdendrimères(12%et60%deladoseretrouvéedansles poumons après 48h pour des dendrimères de 6 et20nm,

(13)

Tableau3 Exemplesdenanomédecinesdéveloppéesenprécliniquepourl’inhalationdechimiothérapie.

Typede Nanovec- teur

Formulation Technique d’inhalation (dispositif sidécrit)

Études précliniques (modèles utilisés)

Observationsmajeures Référence

Liposomes Liposomes chargés avecdela doxorubi- cine,des oligonu- cléotides antisenset dessiRNA fluores- cents

Liquide Lignée cellulaire d’adénocarci- nomehumain A549

Modèlemurin orthotopique detumeurs pulmonaires (lignéeA549)

Incorporationintracellulairedes 3agentsinvitro

Plusgrandesconcentrationsetplus longuesretentionsdansles poumonsdeliposomesfluorescents administrésparinstillation intratrachéale(AUCdejusqu’à 7,5foisplusgrandqu’aveclavoie IV)

[92]

Liposomes chargésen paclitaxel

Liquide (AeroMistTM jet nebulizer)

Sourissaines Modèlemurin demétastases pulmonaires decarcinome rénal(modèle renca)

Augmentationdel’expositiondes poumonsaupaclitaxel(AUC26fois plusgrandqu’aveclavoieIV) Activitéanticancéreuse significativeinvivo(vssouris contrôlesnontraitées)

[71]

Micelles polymériques

Nanoparticules dePEG-PLA chargéesen paclitaxel, présentant desdérivés EpCAMen surface

Liquide (Micros- prayer AeroliserTM)

Modèlemurin transgénique cancerdu poumon (modèlec-Raf)

Légèreinflammationlocale observée

Meilleuretolérancelocaledu véhiculeetdesnanoparticules chargées(vssolutiondepaclitaxel) Activitéantitumoralesignificative invivo(vssouriscontrôlesnon traitées)

[56]

Micellesde DSPE-PEG chargéesen paclitaxel

Liquide Sourisetrats sains

Augmentationdel’expositiondes poumonsaupaclitaxelenutilisant l’inhalation(AUC45foisplusgrand qu’aveclavoieIV)etenutilisant lesmicelleslocalement(AUC3fois plusélevésqu’aveclaformulation conventionnelledupaclitaxel localement)

Expositionsystémiqueaupaclitaxel limitée

Bonnetolérancelocalduvéhicule (pasd’augmentationdesmarqueurs detoxicitépulmonaireALPetNAG)

[77]

Micellesde F-PEG-HMD chargéesen paclitaxel

Liquide (Micros- prayer AerolizerTM) etDPI (DP-4Met Axahaler®)

Lignées cellulairesdu cancerdu poumonmurin M109-HiFRet ducancer humain ovarienHeLa Sourissaines Modèlemurin orthotopique detumeurs pulmonaires (lignée M109-HiFR)

Incorporationintracellulairedes micellesfluorescentesdansles 2lignéescellulairesexprimantle récepteuraufolate

Pénétrationetdistributiondes micellesfluorescentesdansletissu tumoralinvivo

Pasd’inflammationnide

cytotoxicitélocaleobservéesuiteà l’administrationendotrachéaledu véhicule(excipientssousformede poudre)

[88]

(14)

Tableau3 (Suite) Typede

Nanovec- teur

Formulation Technique d’inhalation (dispositif sidécrit)

Études précliniques (modèles utilisés)

Observationsmajeures Référence

Nanoparticules lipidiques

Nanoparticules NLC

chargéesen siRNA (protéines MRP1et BCL2)et paclitaxel, ciblantle récepteur LHRH

Liquide (nébuli- seur)

Modèlemurin orthotopique detumeurs pulmonaires (lignéeA549)

Incorporationintracellulairesdu contenudunanovecteurinvitroet invivo

Accumulationpréférentielledes NLCdanslestumeurspulmonaires invivo(vstissuspulmonaires normaux)

Disparitionquasicomplètedutissu tumoraldesanimauxtraités

[70]

Nanoparticules SLN

chargéesen paclitaxel

Liquide Lignée cellulaire

d’adénocarcinome mammaire murinMXT-B2 Modèlemurin demétastases pulmonaires d’adénocarcinome mammaire (lignée MXT-B2)

Activitécytotoxiqueinvitro significativementaugmentée (20foisplusélevéequele paclitaxelconventionnel)

MeilleureefficacitédesSLNquedu paclitaxelconventionnelIVdansla suppressiondesmétastases

pulmonaires,diminutiondunombre (jusqu’à10fois)etduvolume Rémissioncomplètede75%des animaux

SLNfluorescentesretrouvéesdans lesystèmelymphatiqueaprès inhalation

[78,81]

Nanoparticules SLN

chargéesen paclitaxel etenrobées parF-PEG- HTCC

Liquide (Micros- prayer AerolizerTM)

Lignées cellulairesdu cancerdu poumonmurin M109-HiFRet ducancer humain ovarienHeLa Modèlemurin orthotopique detumeurs pulmonaires (lignée M109-HiFR)

Incorporationintracellulairedes SLNenrobéesetfluorescentesdans 2lignéescellulairesexprimantle récepteuraufolate

Activitéantiproliférativeinvitro significativementaugmentée(6fois plusélevéequelepaclitaxel conventionnel)

PénétrationetdistributiondesSLN enrobéesetfluorescentesdansle tissutumoralinvivo

[90]

Nanoparticulesà basede polymères

Nanogelde dextran chargéen siRNA (protéine EGFP), présentant ensurface desgroupe- ments folates grefféssur du surfactant pulmonaire

Liquide Lignées cellulairesde CNPChumains H1229etA549

Augmentationdel’incorporation intracellulairedusiRNAetde l’extinctiondugèneciblé Extinctioncomplètedugènepour desconcentrationsensiRNAde l’ordredunanomolaire

[86]

(15)

Tableau3 (Suite) Typede

Nanovec- teur

Formulation Technique d’inhalation (dispositif sidécrit)

Études précliniques (modèles utilisés)

Observationsmajeures Référence

Nanoparticules den-

butylcyanoacrylate chargéen

doxorubi- cine contenue dansune matrice sèche efferves- centeou non

DPI(DP-4M InsufflatorTM)

Sourissaines Modèle orthotopique murinde tumeurs pulmonaires (lignéeH460)

Augmentationsignificativede l’efficacitéantitumoraleetdela survie(70%desanimauxencoreen vieaprès14joursvstousles animauxmortsen50joursavecune solutionIVdedoxorubicine) Aucunetoxicitécardiaqueobservée contrairementàl’inhalationd’une solutiondedoxorubicine

[80]

Nanoparticules degélatine chargéeen cisplatine ciblant l’EGFR

Liquide (Nebulizer AP- 100100®)

Modèles murinsde tumeurs pulmonaires sous-cutanées et

orthotopiques (lignéeA549)

Aprèsinhalation,plusgrande accumulationdesnanoparticules cibléesetduPtdanslestumeurs (vsnanoparticulesnoncibléesetvs solutiondecisplatine,

respectivement)

Accumulationpréférentielledes nanoparticulesdansdespoumons avectumeursquedansdes poumonssains(facteur3,5) Aprèsinjectionintra-tumoralein vivo,activitéantitumorale significativementaugmentée(vs souriscontrôlesnontraitées

—volumetumoraldiminuéd’un facteur6)

[58,82]

Dendrimères Dendrimères de

poly-lysine PEGylés greffésàla doxorubi- cine

Liquide Modèleratde métastases pulmonaires d’un carcinome mammaire (tumeursMAT 13762IIIB)

Longstempsderétentiondela doxorubicinedanslespoumons aprèsinhalation(∼15%deladose administréetoujoursprésente localementaprès7jours) Plusgranderéductiondes

métastasespulmonairescompareà unesolutiondedoxorubicineIV Diminutiondelatoxicitélocale comparéàunesolutionde doxorubicineenintratrachéale

[57]

Nanocristaux Agglomérats denano- cristauxde paclitaxel contenus dansune matrice sèchede cisplatine

DPI Caractérisation des

formulations DPI

Améliorationdelacinétiquede dissolutiondupaclitaxel(3fois plusdepaclitaxelsolubilitéen1h parrapportàunepoudrede paclitaxelcommercialisée) Bonnespropriétésaérodynamiques desformulations

[93]

PEG-PLA:copolymèredepoly(éthylèneglycol)-poly(acidelactique);EpCAM:epithelialcelladhesionmolecule;DSPE-PEG:dérivé de phosphatidyléthanolamine-poly(éthylène glycol) ; F-PEG-HMD : folate-poly(ethyleneglycol)-hydrophobically-modified dextran ; NLC: nanostructuredlipid nanocarrier;LHRH: luteinizinghormonereleasinghormone ;SLN : nanoparticuleslipidiquessolides ; F-PEG-HTCC:folate-poly(ethyleneglycol)-N-[(2-hydroxy-3-trimethylammonium)propyl]chitosan.

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