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Résistances aux antibiotiques : deux tests de diagnostic rapide bientôt sur le marché

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2034 Revue Médicale Suisse www.revmed.ch 24 octobre 2012

actualité, info

Résistances aux antibiotiques : deux tests de diagnostic rapide bientôt sur le marché

Les voies de la santé publique ne sont pas toujours impénétrables. Mais elles peuvent parfois être plurielles. Ainsi arrive-t-il qu’elles croisent le chemin des publications scienti- fiques et des médias d’information générale, sans oublier la toujours cruciale dimension commerciale d’une découverte technique. Un exemple nous en est donné aujourd’hui avec un communiqué du service de presse de l’Ins- titut national français de la santé et de la re-

cherche médicale (Inserm). «Deux tests de diagnostic rapide de multirésistance aux anti- biotiques de spectre large viennent d’être mis au point par l’Unité Inserm 914 "Résistances émergentes aux antibiotiques" (Hôpital de Bicêtre, Le Kremlin-Bicêtre) dirigée par le Pr Patrice Nordmann, précise ce communiqué.

Ces tests permettent en moins de deux heu res d’identifier certaines bactéries qui résis tent aux antibiotiques les plus fréquents et les plus importants en clinique. Les bactéries cibles sont en particulier les entérobactéries (com me Escherichia. coli). Une utilisation à l’échelle mondiale de ces tests extrêmement perfor- mants (excellentes sensibilité et spécificité) permettra une adaptation individuelle des traitements antibiotiques et un meilleur con-

trôle de la diffusion des résistances aux anti- biotiques notamment en milieu hospitalier.»

Résumons : ces tests diagnostiques vont donc permettre une identification rapide de certaines bactéries devenues résistantes aux antibiotiques et donc d’adapter au mieux les traitements pour les patients infectés ; d’évi- ter l’usage inapproprié de certains antibio- tiques et donc d’éviter l’usage trop fréquent de certains antibiotiques à large spectre. Ils

permettront aussi d’isoler les malades por- teurs de ces bactéries résistantes pour éviter le développement d’épidémies hospitalières.

Voilà pour ce qui est destiné aux médias et qu’ils voudront bien (ou non) relayer. Le chemin des publications scientifiques n’est pas oublié. Le même communiqué précise ainsi que ces travaux viennent d’être publiés dans deux revues spécialisées d’audience internationale : Emerging Infectious Diseases 1 et The Journal of Clinical Microbiology.2

On voit bien que l’on est pleinement ici dans le champ de la santé publique. L’Inserm nous le rappelle à l’envi, qui nous dit que

«les bactéries semblent toujours plus nom- breuses à émerger, responsables d’épidémies qui dépassent les frontières». Et qui ajoute

que «les chercheurs s’accordent sur le fait que ce n’est pas leur nombre qui est en cause mais bien leur résistance de plus en plus forte aux antibiotiques». Avec un focus tout parti- culièrement dramatique pour les bacilles à Gram négatif comme les entérobactéries.

Ainsi, alors que certains antibiotiques (les céphalosporines à large spectre et les carba- pénèmes notamment) étaient réservés aux situations les plus graves, il arrive désor- mais qu’ils puissent être totalement inac tifs vis-à-vis de certaines souches bactériennes pour lesquelles il n’y a plus, dès lors, d’anti- biotique efficace. «De ce fait, on voit déjà survenir des échecs thérapeutiques au cours de traitements d’infections de ville assez ba- nales, comme des infections urinai res ou des infections intra-abdominales. Ces échecs menacent la vie des patients» souligne l’In- serm.

Les responsables de la région Europe de l’OMS abondent dans ce sens. Ils précisent aussi que ce phénomène est dû à «l’utilisa- tion répandue, exagérée et abusive d’antibio- tiques chez les humains et les animaux» et qu’il «s’agit d’un problème urgent». «Dans l’Union européenne, 25 000 personnes dé- cèdent tous les ans à la suite d’une infection bactérienne grave et résistante, généralement acquise sur les lieux des soins médicaux, ajoutent-ils. Sans la mise au point de nou- veaux antibiotiques efficaces, mais avec une aggravation du phénomène de résistance, la société pourrait retrouver les conditions qui prévalaient avant les antibiotiques, quand une infection pulmonaire simple pouvait tuer un enfant, ou quand les médecins étaient impuissants devant les cas de méningite. La tuberculose multirésistante constitue un autre exemple de cette nouvelle menace pour la santé.»

Et il n’est sans doute pas inutile de rappe- ler en écho que le développement de ces résis tances aux antibiotiques risque de com- promettre tout un pan de la médecine ac- tuelle, celle qui nécessite l’usage d’anti bio- tiques efficaces (on pense ici aux greffes, à la chirurgie lourde et aux prises en charge so- phistiquées de réanimation).

Et c’est bien avec l’objectif de tenter de freiner ces résistances de plus en plus im- portantes que les chercheurs de l’Inserm ont mis au point un système de détection ra- pide. La détection des deux enzymes res- ponsables de la résistance bactérienne très fréquente à deux classes d’antibiotiques ; pré- cisément les céphalosporines de spectre large et les carbapénèmes. Dans ces tests, la pré- sence d’une enzyme signe la présence d’une bactérie résistante.

En pratique, ces deux tests («Carba NP test»

avancée thérapeutique

CDC/Dr. JJ Farmer

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Revue Médicale Suisse www.revmed.ch 24 octobre 2012 2035

1 Nordmann P, Poirel L, Dortet L. Rapid detection of carba­

penemase­producing Enterobacteriacae. Emerg Infect Dis 2012;18:1503­7.

2 Nordmann P, Dortet L, Poirel L. Rapid detection of ex­

tended­spectrum b­lactamase producing Enterobacte­

riacae. J Clin Microbiol 2012;50:3016­22.

et «ESBL NDP test») sont fondés sur les pro- priétés d’acidification générées par l’activité des enzymes (b-lactamases et les carbapéné- mases) en présence de l’antibiotique. Si l’une de ces enzymes est présente, le milieu s’aci- difie et l’indicateur d’acidité vire de la cou- leur rouge à jaune.

A l’heure actuelle, ces tests peuvent être réalisés à partir de bactéries isolées dans les urines lors d’une infection déclarée ou à par- tir des bactéries présentes dans les selles. Le résultat est obtenu en moins de 120 minutes (contre un délai actuellement compris entre 24 et 72 h avec d’autres techniques). Toujours selon l’Inserm, ces tests sont par ailleurs d’une extrême sensibilité et d’une haute fiabilité.

Et on souligne (sans doute à l’attention du grand public) qu’ils sont «totalement inof- fensifs car réalisés sur les bactéries isolées des patients ou sur les produits biologiques (urines…).»

«Une évaluation de ces tests est en cours pour apprécier leur sensibilité directement à partir de sites infectés comme le sang ou les urines» précise Patrice Nordmann, directeur de recherche Inserm et principal auteur de ce travail. On peut ainsi selon lui espérer, en particulier dans de nombreux pays occiden- taux n’étant pas encore en situation d’en- démie pour ces multirésistances (la France notamment), réussir à préserver dans une certaine mesure l’efficacité des céphalospo- rines de spectre large et des carbapénèmes, antibiotiques dits de dernier recours.» Mis en œuvre au lit du malade, ces tests permet- tront une optimisation de l’antibiothérapie et ceci en particulier dans les pays en voie de développement où les taux de résistance sont très élevés.

Reste, toutefois, précisément à savoir quand ils pourront être utilisés dans les pays en voie de développement. Pour l’heure, ces tests ont fait l’objet de deux dépôts de brevets inter- nationaux auprès d’«Inserm Transfert». Leur commercialisation en cours de développe- ment devrait intervenir dans douze à seize mois. Toutefois, ces techniques novatrices sont actuellement disponibles pour les cher- cheurs des laboratoires spécialisés qui sou- haiteraient participer à leur développement.

Jean-Yves Nau jeanyves.nau@gmail.com

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