Astérisque
J EAN -J ACQUES R ISLER
Construction d’hypersurfaces réelles [d’après Viro]
Astérisque, tome 216 (1993), Séminaire Bourbaki, exp. n
o763, p. 69-86
<http://www.numdam.org/item?id=SB_1992-1993__35__69_0>
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69
CONSTRUCTION D’HYPERSURFACES
RÉELLES [d’après Viro]
par
Jean-Jacques
RISLERSéminaire BOURBAKI Novembre 1992
45ème
année, 1992-93,
n° 7631. INTRODUCTION
L’étude de la
topologie
deshypersurfaces algébriques
réellesprojectives
etlisses a une
longue
histoire. Ils’agit
duproblème
suivant :quelle peut
être latopologie
duplongement
d’unehypersurface
lisse dedegré
d ?Cette
question
a faitl’objet
d’un desproblèmes
de Hilbert(le 16-ième) qui posait
laquestion
pour les courbes dedegré 6,
et les surfaces dedegré
4. Le casdes courbes de
degré
6 a été résolu par Gudkov en 1969(cf. [Gud 74]),
et celuides surfaces de
degré
4 par Kharlamov en 1976([Kha 77]).
Le cas des courbes dedegré
7 a été résolu par Viro(cf. plus bas),
et celui des courbes dedegré
8n’est pas encore
complètement
élucidé. Pour desSurveys
sur laquestion,
onpeut
consulter
[Gud 74], [A-0 79], [A’
C79], [Wi 78]
ou[Vi 86].
L’étude de la
topologie
des variétésalgébriques
réellescomprend
deuxparties
bien distinctes :
a)
Décrire des"prohibitions", i.e.,
donner une liste(la plus complète possible)
des obstructions sur les
types topologiques
deplongements.
b)
Construire deshypersurfaces
lisses dedegré
ddonné ;
si l’onpeut
construiretous les
types topologiques
non interdits par lesprohibitions
dea),
leproblème posé
est considéré comme résolu.A titre
d’exemples,
citons les deux fameux théorèmes de Harnack :1.1 Théorème
([Ha 76]).-
Une courbe dedegré
d dansRP2
a auplus
2
+ 1composantes
connexes.1.2 Théorème
([Ha 76]).-
Pour tout entierd > 1,
et m tel queI m
d-1) d-2 +1,
il existe dansRP2
une courbe lisse dedegré
d avec mcomposantes
connexes.
Le théorème 1.1 est un résultat de
type a),
et le théorème 1.2 est detype b) :
il résout
complètement
leproblème
dutype topologique
des courbes lisses dedegré d,
mais ne dit rien sur letype topologique
duplongement.
Il utilise la méthode des"petits paramètres" :
on construit une courbe dedegré
d enperturbant légérement
l’union d’une courbe de
degré
d -1 et d’une droite secoupant
transversalement.Les résultats de
type a)
sont nombreux etintéressants ; cependant,
lesujet
de cet
exposé
étant un résultat detype b), je
neprétends
pas en faire unrésumé,
même succinct. Le lecteur intéressé pourra consulter
[Wi 78],
ou[Vi 86].
Les nomsprincipaux
dans ce domaine sontHarnack, Petrovskii, Gudkov,
Arnol’d etRokhlin,
et la recherche dans ce domaine est restée très
active,
surtoutparmi
l’école russe.Je vais dans cet
exposé
décrire la méthode de Viro de constructiond’hyper-
surfaces
réelles, qui procède
d’unesprit
très différent des méthodes "à la Harnack"employées jusqu’ici,
etexpliquer
lesapplications
aux courbes dedegré
7.Cette méthode
apparaît
dans la thèse de Viro([Vi 83]),
en cours de traduction par l’auteur. Le théorèmeprincipal
est énoncé dans[Vi 84]
dans le cas des courbes.Le théorème est montré dans
[G-K-Z 92]
sous une formeplus
faible.2. COMPACTIFICATIONS DE
(R*)n
Nous allons décrire deux
compactifications
de(R*)n
associées aupolytope
deNewton d’un
polynôme
deR[Xi,..., Xn].
Considérons une famille
(ao, ... , GN)
depoints
entiers deR’~,
et soit A leurenveloppe
convexe. On leur associe uneapplication ~ : ( C * )’~
-> Rn définie paravec la notation X =
(x1,...,xn),
Xa =x03B111 1 ...
si , a =(03B11,..., CYn).
Notons 03A3 ~ (Z/2Z)n le groupe
engendré
par lessymétries
de Rn parrapport
aux
hyperplans
de coordonnées et(R+)n
lequadrant positif
ouvert de Rn.0
2.1 Lemme.-
Supposons A
de dimension n(i.e.,
A nonvide). Alors,
si o’ EE,
0
est un
difféomorphisme
du"quadrant" a((R+)n)
sur A .On
peut
soit montrer ce lemmedirectement,
soit utiliser les résultats de[Ati 82]
ou[G-S 82]
surl’application
des moments.L’application 03C6
se factorise en effet paravec 03C8(x1,...,xn) = [X03B1o,...,X03B1N], et g([y0,...,yN]) = 03A3Ni=0 03A3|yi| |yi|.
L’application g
estl’application
des momentscorrespondant
à l’action du tore(C*)n
surCPN
définie part,y
=L’application
des momentsest souvent définie par ... ,
yN~~ _ a‘ . I~~ ‘, I 2 2 .
Les résultats cités ici sont valables pour les deux cas.L’image
l’orbite dupoint (1, ..., 1),
etil est montré dans
[Ati 82] (Th. 2)
queg(Y) _ A,
et que siT~
G(C*~n
est le torecompact, g
induit unhoméomorphisme
de surA,
et undifféomorphisme
de0
sur A. On en déduit immédiatement le lemme 2.1.
Pour
simplifier l’exposé,
nous supposerons que lesc~i sont >
0. On aalors
0
’
toujours
avecl’hypothèse 0394
nonvide,
unepremière compactification CA
deégale
àdéfinie par
l’application $
définie comme~(r(.r)) = ~(~(x~~
pour a etx E
~((R+~’~~.
2.2
Exemple.-
Prenons n =2,
etpour A
l’ensemble des monômes en(x, y)
dedegré
d. On trouve alors lacompactification
habituelle de(R* ~Z
par undisque
(Figure 1).
Viro considère une seconde
compactification C~
de(R*)’~ (mais
utilise en faitsurtout la
première)
en considérant lapartie
réelle de la variététorique
associéeau
polytope A (cf. [Dan 78],
ou[Oda 88]).
2.3 Lemme.-
C~
esthoméomorphe
auquotient
deCo lorsque
l’on identifie les faces deCo
avec larègle
suivante : si F est une face deC f:1,
pour tout vecteur( al, ... , an)
à coordonnées entièresorthogonal
àr,
r est identifiée avec la face étant lasymétrie ((-1)al, ... , (-1)an )
2.4
Exemple :
Dans le cas où 0394 est lepolygone
del’exemple 2.2,
on trouveque
C~
est leplan projectif Rp2.
La démonstration du lemme 2.3 se fait en considérant l’action du tore sur l’ouvert affine de la variété
torique correspondant
à la face r.3. CARTE D’UN
POLYNÔME
Avec les notations du
§2, rappelons
que si E est un ensemble depoints
à co-ordonnées
entières 2::
0d’enveloppe
convexeA,
on a uneapplication 1 : (R*)n
-Cf:1, et que $
est unplongement
si dimA = n.3.1 Définition.- Soit P E
R[X1,...,Xn]
unpolynôme, Z(P)
C Rn l’ensemble de seszéros,
sonpolytope
de Newton. Si A est unpolytope
à sommets àcoordonnées
entières ~ 0,
onappelle
0-carte de P lapaire
formée de A et del’adhérence de n
(R*)n)
dansCa.
Cette carte est notée3.2
Remarques
1)
Lepolytope A
naturel pour construire la A-carte de P estA(P).
SiA =
A(P),
la A-carte de Ps’appelle simplement
la carte de P et est notéeC(P).
Cependant,
si dimA = n, onpeut
considérer des cartesC (P)
pour d’autrespolytopes.
Si dimA n, la carteCo(P)
n’a designification
que siA(P)
C A.2)
On s’intéresse autype topologique
"stratifié" des cartes au sens suivant : deux sous-ensemblesCi
etC2
deC~
seront considérés commeéquivalents
s’il existeun
difféomorphisme
stratifié h :Co
2014~Co
telque h
induise unhoméomorphisme
de
Ci
n F surC2
n F pour toute face F deC’A.
3)
Si A contient lepolytope
de Newtonil( P),
et si F est une face deA,
notons
Pr
lepolynôme "0393-tronqué"
deP, I.e.,
lepolynôme
formé àpartir
de Pen ne
gardant
que les monômescorrespondant
à despoints
de F. On voit alorsfacilement que si l’on pose
fi
=4) Supposons
que n = 2 et que P soit untrinôme ;
alors la carteC(P)
seconstruit de la manière suivante : on marque le
signe
des monômes àchaque
sommet de
A(P) ;
si les trois sommets ne sont pas de mêmesigne,
on traceun
segment
de droitejoignant
les deux côtés dont les sommets sont designes opposés. Si a
EE,
on fait de même pourr(A(P)),
avec larègle
suivante : si M = est un sommet de0(P),
et si a =(~1, ~~2),
lesigne
dea(M)
estcelui de M
multiplié
par(cf. l’exemple
3.5ci-dessous).
Ceci segénéralise
immédiatement à tout entier n, pour des
polynômes ayant
n + 1 monômes dont lepolyèdre
de Newton est alors unsimplexe.
3.3 Définition.- Un
polynôme
P ER[X1’... , Xn]
est nondégénéré (par rapport
à son
polytope
de NewtonA~)
si pour toute face r deA, Pr
estréduit,
etZ(pr)
o
est lisse
(au
sensalgébrique)
dans(R*)n. (Ici,
A est considéré comme une face deA).
3.4
Proposition.- Supposons
P nondégénéré.
AlorsC(P)
est transverse aubord de
CA(P) (au
sens des ensemblesstratifiés).
Le
problème
est local en unpoint x
d’une strate du bord deÇA.
On peut alors raisonner dans la variététorique (non
nécéssairementnormale)
(notation
de2.1)
auvoisinage
dupoint x correspondant à x, auquel
cas la stratepassant par x
est l’orbite de~,
et lepolynôme
P s’identifie à une forme linéaire.Dans le cas d’une variété
torique
lisse(sur
le corpsC),
cetteproposition
estmontrée dans
[Kho 77].
3.5
Remarque :
Cetteproposition
est vraie si l’on suppose seulement queZ(Pr)
est lisse pour toute face r decodimension 2::
1(i.e., Z(P) peut
avoir dessingularités
dans(R* )’~ ).
3.6
Exemple :
Pour P =X3 - y2 X2
+y3,
la carteC(P)
estreprésentée
ci-dessous.
4. COLLAGES DE CARTES
4.1 Définition.- Soit A C Rn un
polytope
convexe à sommets entiers >0,
A = une
décomposition
de A par despolytopes
convexes àsommets
entiers. On dit que cettedécomposition
estrégulière
si :o 0
1) ~i ~ ~~ _ ~
pour i=1- j .
2) ~~
est une face commune à~i
et~~.
3)
Il existe une fonction affine par morceaux concave v : A -R+
telle quea)
soit affine Vi E I.b)
ne soit pas affine pour i=1= j.
c)
C Z.Toutes les
décompositions
ne sont pasrégulières.
Unexemple classique
estdonné par la
figure
suivante(cf. [Co-He 80]).
Considérons une
décomposition régulière ~
= et despolynômes Pi
tels que :a) ~(Pz ~
=Oz
pour tout i.b)
c)
LesPi
sont nondégénérés.
Alors les cartes
C( Pi)
se recollent en un ensemble contenu dansCA ,
et lesPi
en un
polynôme
P = tel queP°~
Soit v : 0 --~ R une fonction concave affine par morceaux associée à la
décomposition,
et posonsPT =
Onappelera PT
le"polynôme
de Viro" associé à la fonction v.
Le théorème
principal
de cetexposé
est alors :4.2 Théorème.- Avec les
hypothèses ci-dessus, il
existeTo
> 0 tel que pour t >To le polynôme Pt
soit nondégénéré,
et la carteC(Pt ) équivalente
aucollage
des cartes
C(Pi).
Remarque :
Si onremplace
v par une fonction convexe, on a le même résultat queci-dessus,
pour 0 tTo,
avecTo
assezpetit.
Démonstration : Soit
Gv
G R’~ x R legraphe
de lafonction v,
et soit~"
sonenveloppe
convexe ;Av
est lepolytope
de Newton dupolynôme PT.
Considérons dans la carte dupolynôme T -To.
Cette carte est unehypersur-
face dans Alors
(T - To ))
=Gv
au sens suivant : la limite del’hyperplan tangent
en unpoint
3’TQ dequi
tend vers x EGv
contientla face de
Gv passant
par x. Onpeut
démontrer ce fait(essentiel
pour le théorème4.2)
en serestreignant
à une droitepassant
par x etorthogonale
à la face deGv
contenant x
(cette
droite estl’image
d’une courbe monomiale de(R*)n).
Pour
chaque polytope Di
de ladécomposition
deA,
soit~~
legraphe
deLa
projection 7r : Rn+1
~ Rn induit unisomorphisme
dei
sur0394i,
et elle identi- fie les cartes03C0(Ci(P0394iT))
et =(Si PT
i =a03C9T03BD(03C9)X03C9,
et si
v(al, ... ,
pour ce =(al, ... , an) E O2,
on effectue lechange-
ment de variables Ui =
T X i ).
On voit donc que
Gu, qui
est lecollage
des cartes estéquivalente
aucollage
des cartes(Pi).
4.3 Lemme.- Posons =
pour To
assezgrand,
C039403BD(PT0)
esthoméomorphe
àG".
Le lemme résulte du fait que est transverse à
Gv (au
sensstratifié)
par la
proposition
3.4(cf.
la remarque3.5),
et quelimT0~~C039403BD (T - To) -
Gv.
Pour montrer lelemme,
onpeut
utiliser latechnique développée
par M.-H.Schwartz sur les
voisinages
du bord des variétés à coins([Sch 91],
p.15-21), qui
permet
de construire unchamp
de vecteurs dans unvoisinage
deGv
dansAv, tangent
à transverse aux strates deGv.
Ceci achève la démonstration du théorème
4.2, puisque Cov (PTo )
seprojette
par 7r sur la carte que nous avons vu que
Gv
seprojetait
par 7r sur le
collage
des cartesExemple :
Prenons n =1,
~ =[0,3]
CR, ~ _ Ai
U~2,
avecAi
=[0,2],
et~2
=[2, 3].
Cettedécomposition
de A estrégulière,
et onpeut
poser parexemple v(o)
=3, v(2)
=2, v(3)
= 0.Posons
Pl
= 1 -X2, P2
=-X2
+X3;
lecollage
des cartes dePi
etP2
estreprésenté
sur lafigure
ci-dessous.Le théorème 4.2 dit que
pour t
>To,
lepolynôme Pt
=X 3 - t2X2 + t3
a troisracines
réelles,
deux >0,
et une 0. Lepolygone Av
est celui del’exemple
3.3.4.4
Remarque :
Onpeut
aussiinterpréter
le théorème 4.2 comme un théorèmesur la "lissification" des
singularités,
de la manière suivante.Soit
P(X1, ... , X~)
= 0l’équation
d’unehypersurface algébrique ayant
unesingularité à l’origine
nondégénérée
parrapport
à sondiagramme
deNewton N(P).
On suppose queN(P)
estcompact (i.e.,
rencontre tous les axes decoor-
données),
etl’hypothèse
dit quePr
est réduit et lisse pour toute face deN(P) (toutes
les faces sont ici decodimension 2:: 1,
contrairement au casglobal
oùl’on avait une face de codimension
0).
Soit A laportion
de Rn délimitée parN(P)
et leshyperplans
decoordonnées ;
supposons comme dans le théorème 4.2 que l’on ait unedécomposition ~
= des cartesC(Pi)
depolynômes Pi (de polygônes
de NewtonPi)
nondégénérés,
et une fonction convexe v affine parmorceaux définie sur A. On suppose que v vérifie les conditions de
4.2,
etqu’en
plus
v est nulle surN(P).
On construit alors commeplus
haut unpolynôme
PT(X1,
...,Xn)
tel quePo = P,
et que pourTa
assezpetit
et 0 tTo,
l’hypersurface Pt( Xl,
...,X n)
= 0 soit lisse en0,
et que sa carte soit lecollage
descartes
C(Pi),
et de la carte de P en dehors de A.(Autrement dit,
on aremplacé
la
singularité
par lecollage
des cartesC(Pi)
dans unvoisinage
de0,
sans rienchanger
àl’extérieur).
Nous allons en voir desexemples plus
bas.5. APPLICATIONS ET
COMPLÉMENTS a)
Lissification de lasingularisé J~.
Dans
[Vi 90],
Viro classifiesystématiquement
les lissifications de toute un série desingularités (non dégénérées),
en suivant la classification d’Arnol’d(cf. [A-V-G 85]).
Jeprendrai
ici commeexemple
lasingularité J~,
dont les lissi- fications donnent de nouveauxtypes topologiques
de courbesalgébriques, lorsque
l’on utilise le théorème 4.2.
La
singularité
notéeJ~
estéquivalente
à lasingularité
formée de trois arcsde
paraboles tangents (par exemple, (Y - X 2 )(Y - 2X 2 )(Y - 3X 2 )
auvoisinage
de
l’origine) ;
elle est nondégénérée,
et mêmequasi-homogène.
Viro([Vi 84]
ou[Vi 90])
dresse une listecomplète
de ses lissifications(i.e.,
destypes topologiques
des "fibres de Milnor
réelles") :
il y en a 31. Je vais enindiquer
trois seule-ment,
obtenues par la méthode décrite ci-dessus(Viro
utilise une méthode "à laHarnack" ).
5.1 Lemme.- Il existe des lissifications de
Jl~
avec les cartes suivantes :Indiquons
parexemple
comment obtenir letype c),
entriangulant
lapartie
duplan
délimitée par lediagramme
de Newton et les deux axes decoordonnées,
enindiquant
lessignes
desmonômes,
et en recollant des cartes detrinômes,
commeexpliqué plus
haut. Latriangulation
est enpointillés,
et la carte obtenue en traitsb)
Courbes dedegré
6On considère maintenant les trois
paraboles
ci-dessus dans leplan
comme unecourbe de
degré
6d’équation § ayant
deuxsingularités
detype J1~ :
l’une en0,
etl’autre à l’infini. Soit A le
triangle
de sommets(0,0), (0,6)
et(6,0).
Lepolygone
de Newton de
l’équation § sépare 0
en deuxtriangles : A
=Ai
UOZ (Figure 8).
D’après
le théorème4.2,
onpeut
utiliser le lemme5.1,
et recollerindépendamment
des cartes de
type a)
oub)
dansAi
et~2,
pour obtenir la carte d’une courbe lisse dedegré 6,
que l’on pourra considérer dans ledisque
ou dansRP2.
On obtient ainsi les trois
types
de M-courbes dedegré
6 dont les schémas sontindiqués Figure
9(il n’y
a que troistypes
de M-courbes dedegré 6).
La courbe du milieu par
exemple
s’obtient en recollant une carte detype a)
dansAi
et une carte detype b)
dansÂ2 :
c)
Courbes dedegré
7Une courbe
plane
lisse dedegré impair
atoujours
unecomposante
connexe(et
uneseule) homotope
à une droiteprojective, appelée pseudo-droite.
Les autrescomposantes
sont des ovales. Une courbe dedegré
7 est réunion d’unepseudo-
droite et d’au
plus
15ovales, d’après l’inégalité
de Harnack. Viro a classé toutes les courbes dedegré
7 en 1980. Dans laproposition suivante, qui
décrit le résultatde
Viro,
onappelle
ovale libre un ovalequi
n’est contenu dans aucun autre ovale.5.2
Proposition (Viro ;
cf.[Vi 84]).-
Letype topologique
duplongement
d’unecourbe de
degré
7 est constitué d’unepseudo-droite,
et d’ovales avec l’une des 121possibilités
suivantes :i)
Un ovale contenant aovales,
et b ovaleslibres,
aveca + b
14 et1 a
13.ii )
a ovaleslibres,
avec0 c~
15iii )
3 ovales emboîtés.Montrons par
exemple
comment construire une courbe dedegré 7
detype i),
avec a =
10,
b = 4(Cette
courbe était inconnuejusqu’à Viro,
et nepeut
pas être construite par une méthode "à laHarnack" ).
Viro commence par construire une
courbe,
dedegré
7 avec deuxsingularités
de
type J~,
dont la carte estreprésentée (en
traitspleins) Figure
11. Viro utiliseune méthode
"classique"
pour construire lacourbe, (en partant
d’uneellipse
etd’une droite
transverse),
mais onpeut
aussi la construire en utilisant la méthode ducollage
descartes,
comme pour la courbe de laFigure
7.En "collant" dans
Ai
et~2 (et
leurssymétriques)
des cartes detype b) (Figure 6),
et en recollant avec la cartede 03B3
à l’aide du théorème4.2,
on obtientune courbe de
degré
7 avec a= 10,
b = 4(Figure 11).
5.3
Remarque :
Toutes les courbes construitesjusqu’ici
par la méthode de Virosont des "T-courbes"
(T
pour"Triangle"), i.e.,
des courbes obtenues en collant des cartes de trinômesayant
pourpolygônes
de Newton destriangles
d’aire1/2,
comme sur la
figure
7. On ne sait pas si tous lestypes topologiques
des M-courbespeuvent être obtenus avec des T-courbes.
6. AUTRES
RÉSULTATS
a)
Courbes dedegré >
7. Pour les courbes dedegré
8 on pourra consulterle survey
[Pol 88].
Une courbe dedegré
8 a auplus
22ovales,
et le statut desM-courbes
(i.e.,
avec 22ovales)
semble être actuellement le suivant : en tenantcompte
desprohibitions
connues, il y a 91possibilités
detypes topologiques.
Parmices 91
possibilités,
78 ont été effectivement réalisées(avec
la méthode de Viro oudes
variantes), principalement
parKorchagin, Shustin,
et Viro. Il reste donc 13cas à élucider.
On
peut
citerKorchagin (non publié)
pour ledegré 9,
et Chislenko([Chi 89]
pour le
degré
10.b)
Généralisations de la méthode de ViroShustin
([Shu 85], [Shu 92])
agénéralisé
la méthode de Viro au cas où l’on colle des cartes de courbes avecsingularités.
Il montre enparticulier
que, avec leshypothèses
du théorème 4.2 sur lapartition A
=Ui,
onpeut toujours
recollerles cartes de
polynômes Pi,
si leurs zéros n’ont commesingularités
que despoints
doubles ordinaires.
Dans le cas d’autres
singularités,
des "cusps"
parexemple,
il y a des con-traintes sur leur nombre. Shustin montre en
particulier
avec cette méthode que pour tout entier k vérifiant0 k d2--~, il
existe une courbe dedegré
d avec kcusps
(réels), i.e.,
ksingularités
dont lecomplexifié
esttopologiquement équivalent
à la
singularité y2 - X~
= 0.La méthode de Shustin consiste à
remplacer
lespolynômes
de Viropar des
polynômes
avec +O(t),
lesaij
étant construits defaçon
àpréserver
lessingularités
despolynômes Pi
dedépart ;
l’existence desaij
est uneconséquence
du théorème deRiemann-Roch,
comme dans le fameux théorème de Brusotti sur la lissification des
singularités
d’une courbe
algébrique n’ayant
que despoints
doubles ordinaires.Signalons
que B. Chevallier([Che 92])
travaille sur une autre variante de la méthode deViro,
et que D.Pecker
([Pe 92])
construit trèssimplement
des courbes avec despoints
doubles ordinaires en nombre maximal.
B. Sturmfels
([St 92])
annonce unegénéralisation
du théorème de Viro aux in-tersections
complètes
sous la forme suivante : on considère despolytopes
convexesAi,..., Ak,
pourchaque
i unetriangulation
deA, correspondant
à une fonctionvi concave affine par morceaux
(1
ik). Alors,
si A =Ai
+ ... +Ak
estla somme de Minkowski des
Di,
onpeut
définir une subdivision dupolytope A, correspondant
à la fonction v = VI + ...+ vk,
pourvu que lesfonctions
soientassez
"génériques" ([Lee 91]) ;
ceci entraîne enparticulier
que pourchaque i,
ladécomposition
deOz
est unetriangulation.
Soit pour
chaque
i unpolynôme
de Virocorrespondant
à la fonction v;(tel
queil(Pi)
=Di). D’après
le théorème4.2,
la carte s’obtient(pour t
assezgrand)
en recollant des cartesCi
définies dans lessimplexes
dela
triangulation
deA; ;
Sturmfels décrit unprocédé
combinatoire pour relever les cartesC~
dansA,
tel que celles-ci se recollent(pour
ifixé)
en des cartesCi équivalentes
à L’intersection desCi
est alors(pour t
assezgrand)
unecarte de l’ensemble
~ki=1
c) Polytope
de Newton du discriminantLa construction de Viro est à la base de la théorie de
Gelfand, Kapranov
etZelevinsky ([G-K-Z 92])
sur lesA-discriminants,
même si ceux-ci l’ontdéveloppée indépendamment.
La raison en est la suivante : si on fixe un ensemble depoints A = (a;)
CZ’~, chaque partition régulière 7~
de leurenveloppe
convexe A définitune famille de fonctions
v~ : ,~4 ~
Z.Réciproquement,
toute fonction v : ,~l -i Z définit unepartition régulière
deA,
en considérant laprojection
del’enveloppe
convexe
supérieure
dugraphe
de v.D’autre
part,
à une fonction v : A -+ Z est associée une direction de droites dansl’espace
des coefficients(ai),
définie par a~ =v(ai)8.
L’ensemble des droitescorrespondant
à unepartition régulière
forme alors un cônepolyédral,
et ce cône estd’intérieur non vide si et seulement si la
partition
est unetriangulation.
Onpeut
alors montrer que le cône
correspondant
à unetriangulation
de A est contenu dansle cône dual d’un et un seul sommet du
polytope
de Newton du A-discriminant(cf. [G-K-Z 92]).
d)
En utilisant la méthode deViro,
I.Itenberg
vient de construire unefamille de courbes
qui
contredisent laconjecture
deRagsdale (cf. [It 93]).
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