Astérisque
P IERRE P ANSU
Le flot géodésique des variétés riemanniennes à courbure négative
Astérisque, tome 201-202-203 (1991), Séminaire Bourbaki, exp. no738, p. 269-298
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269
LE FLOT
GÉODÉSIQUE
DESVARIÉTÉS
RIEMANNIENNESÀ
COURBURENÉGATIVE
par Pierre
PANSU1
Séminaire BOURBAKI Février 1991
43ème
année, 1990-91,
n° 7381. INTRODUCTION
Sur une variété riemannienne
V,
la distance entre deuxpoints est,
par
définition,
la borne inférieure deslongueurs
des courbesqui
les relient.Pour deux
points
assezproches,
cette borne inférieure est atteinte pourune
unique
courbe. Onappelle géodésique
une courbeparamétrée qui
réalise ce minimum entre deux
quelconques
de sespoints (assez proches),
et
qui
est parcourue à vitesse constante. Lesgéodésiques
sont les solutions d’uneéquation
différentielle du second ordre. Autrementdit,
ce sont lesprojections
des orbites d’unchamp
de vecteurs X sur le fibrétangent
TV.On dit que V est
complète
si cechamp
estcomplet, i.e.,
s’ils’intègre
enun groupe à un
paramètre
dedifféomorphismes
deTV,
défini pour touttemps.
Ainsi,
lesgéodésiques peuvent
être vues sous deuxangles.
Lepoint
de vue variationnel - la
géodésique
est solution d’unproblème
de Dirichlet- a
joué
un rôle essentiel dans ledéveloppement
interne de lagéométrie
rie-mannienne. Le
point
de vuedynamique -
lagéodésique
est solution d’unproblème
deCauchy -
a donné naissance à une brancheparticulièrement
riche en interactions avec les
disciplines
voisines.~ L’auteur est
partiellement
soutenu par le contrat CEE GADGETn°
SC1-0105-C.
S.M.F.
Astérisque 201-202 - 203 (1991)
Dans cet
exposé,
onrappellera quelques-unes
despropriétés globales
du flot
lorsque
la courbure estnégative.
Laplus
saisissante est sans doute le fait que lesgéodésiques,
aucomportement apparemment irrégulier, s’organisent
collectivement suivant une loi codée dans le groupe fonda- mental(stabilité structurelle). L’apport
de la théorieergodique,
notam-ment la notion
d’entropie,
soulève de nombreuxproblèmes
derigidité
dugenre : telle
propriété
estcaractéristique
de telexemple.
Onprésentera
notamment trois résultats récents
qui
vont dans ce sens :. caractérisation du flot
géodésique
des espaces localementsymétriques
par la différentiabilité du
feuilletage stable ;
. caractérisation des espaces localement
symétriques
comme minimade
l’entropie
normalisée par lacourbure ;
. détermination d’une surface par son
spectre marqué
deslongueurs.
Je tiens à remercier Patrick Foulon et les
participants
du séminairede Géométrie
Ergodique
de l’EcolePolytechnique qui
m’ont initié auxmystères
du flotgéodésique.
2. INSTABILITE INFINITESIMALE
2.1. Un flot hamiltonien. Une
géodésique
parcourue à vitesse constante est unpoint critique
del’énergie
Depuis Hamilton,
on sait que lechamp
de vecteursX,
dont les orbites seprojettent
sur lesgéodésiques,
vitplus
naturellement sur le fibre cotan-gent
que sur le fibrétangent.
La
métrique
définit une fonction H - la moitié du carré de la norme des covecteurs - sur lecotangent.
Or celui-ci porte une 1-formecanonique
a, dont la différentielle extérieure da est
symplectique.
La relationdéfinit le
champ
de vecteurs hamiltonienY,
dont le flotpréserve
cx. Lamétrique
définit aussi undifféomorphisme (linéaire
sur lesfibres)
de TVsur T*V. Ce
difféomorphisme applique
lechamp
hamiltonien Y sur le flotgéodésique X,
la forme Of sur une 1-forme A et la fonction H en unefonction - la norme des vecteurs - invariante par X. Le flot
géodésique
esttangent
aux surfaces de niveau - les fibrés ensphères,
et on considérera désormais sa restriction au fibré unitaireTI V.
La restriction de A au fibré unitaire est une forme decontact, qui
détermine entièrement lechamp X,
via les relationsOn dit que X est le
champ
de Reeb de la forme de contact A. On voitque .J’y préserve
l’élément de volume(où
n est la dimension deV)
que l’onappelle
souvent la mesure de Liou-ville.
2.2. Intervention de la courbure.
Pour évaluer la différentielle du
difféomorphisme cet,
on doit résoudrel’équation
aux variations desgéodésiques.
C’estl’équation
de Jacobi. Elleporte
sur deschamps
de vecteurstangents
J lelong
d’unegéodésique c(t),
ets’écrit,
en fonction de la dérivée covariante D de lamétrique riemannienne,
où R est le tenseur de courbure riemannien. La courbure
apparaît
doncà travers
l’endomorphisme symétrique
nul sur
c,
et dont les autres valeurs propres sont des courbures section- nelles.De cette
équation vectorielle,
tirons uneéquation
satisfaite par lanorme du
champ
de vecteurs J :On voit
qu’il
estplus
aiséd’interpréter l’équation
de Jacobiquand
onse donne une borne
supérieure
sur la courbure sectionnelleplutôt qu’une
borne inférieure. On suppose désormais que J est
orthogonal
au vecteurvitesse c.
Si la courbure sectionnelle est
négative
ounulle,
la fonction t- 1 J (t) (
est convexe. Cela annonce le fait que localement la fonction distance entre
deux
géodésiques
est convexe.Si de
plus
la courbure sectionnelle I( estmajorée
par une constantenégative,
parexemple
A"-1,
alors engénéral,
la fonction]
tendvers l’infini au moins comme
et lorsque t
tend vers +00 ou -oo. Celaindique qu’en général
deuxgéodésiques
infiniment voisinesdivergent
ex-ponentiellement.
Il y a toutefois des
exceptions :
certaines solutions tendent vers0 en +00 ou en -oo.
L’espace
E deschamps
de Jacobi lelong
de corthogonaux
à c est de dimension 2n - 2. Les solutionsqui
tendent vers0 en +00
(resp. -oo)
forment un sous-espace vectoriel Es(resp. EU)
dedimension moitié n - 1. En
effet,
pourchaque
t, la conditionJ(t)
= 0définit un sous-espace
E(t)
deE,
dedimension n - 1,
et ES est la limitedes
E(t) lorsque t
tend vers +00.Clairement,
ES n EU = 0. Revenantau fibré unitaire
tangent,
enchaque point
p ETiV,
oninterprète jE~
etEp
comme des sous-espaces deTpTIV.
En termesdynamiques, Ep
estcandidat à être
1’espace tangent
en p à la variété stable de p.Conclusion. La courbure
négative
se manifeste de trois manières différentes :(1)
la convexité de la fonctiondistance ;
(2)
l’instabilité desgéodésiques ;
(3)
l’existence de variétés stable et instable transverses et de dimension n-1.3. L’ESPACE DES
GEODESIQUES
3.1. Le
plan hyperbolique
Le
plan hyperbolique,
notéH2,
découvert parLobatchevsky
et Bol-yai
vers1828,
est unegéométrie
où l’axiome desparallèles
est en défaut.On le
représente
traditionnellement comme l’intérieur d’undisque plan.
Les
géodésiques
sont les arcs de cercleorthogonaux
au bord(appelé
lecercle à l’infini et noté car il se trouve à distance
infinie).
On voitque, étant donnés une
géodésique
c et unpoint
x, il existe une infinité degéodésiques passant
par x et ne rencontrant pas c(voir figure).
Toutefois,
par deuxpoints
distincts du cercle à l’infini passe exacte- ment unegéodésique. L’espace
desgéodésiques G(H2)
duplan hyper- bolique
est doncLes variétés stables du flot
géodésique
sont aussi aisées à décrire.Les cercles
géodésiques (lieu
despoints équidistants
d’unpoint donné)
sont
représentés
par des cercles euclidiens mais décentrés(le
centrehy- perbolique
estplus près
du bord que le centreeuclidien).
A lalimite,
lescercles euclidiens
tangents
au bords’appellent horocycles.
Leurstrajec-
toires
orthogonales
sont desgéodésiques convergeant exponentiellement
dans une direction. Il y a donc
bien,
pourchaque
p =(x, u)
du fibréunitaire,
une variété stable. On l’obtient comme suit. L’orbite dep est
une
géodésique
orientée aboutissant en unpoint ~
du cercle à l’infini. Unpoint
q =(y, v)
de la variété stable de p a saprojection
y surl’horocycle passant
par x et q, et le vecteur v est la normaledirigée
vers q(voir
figure)
..Les variétés stables s’identifient aux
horocycles
3.2. Les
quotients
duplan hyperbolique.
Dans les années
20,
E.Artin,
G.D.Birkhoff,
J. I:oebe s’intéressent à ladynamique
du flotgéodésique
sur unquotient
duplan hyperbolique.
Ces variétés
s’imposent
en raison du dictionnaire - issu du théorème d’uniformisation de Riemann-Poincaré-Koebe :chaque
surface de Rie- mann,i.e.,
variétécomplexe
de dimension1,
decaractéristique
d’Eulernégative
s’écrituniquement
comme unquotient
de ceplan hyperbolique
par un groupe discret sans
point
fixe d’isométriespréservant
l’orientation.D’autre
part,
lacomplexité
de ladynamique
a été mise en évidencedès 1898 par J. Hadamard. Suivant la voie
indiquée
par H.Poincaré,
onétudie les orbites fermées.
Puis,
sousl’impulsion
de G. D.Birkhoff,
lesquestions
de transitivité. Petit àpetit,
les résultats seront étendus à lacourbure variable et aux dimensions
supérieures.
Voir à cesujet
l’articlede revue de G. A. Hedlund
[He2].
Si V est le
quotient
deH2
par un groupe discret r d’isométries deH2,
sanspoint fixe,
alorsl’espace
desgéodésiques
de V est lequotient
del’espace
desgéodésiques
du revêtement universel V =H2
par l’action de r. Comme l’action de r seprolonge
aubord,
on aLes
propriétés
du flotgéodésique
de V se traduisent par des pro-priétés
de l’action de F surH2 ( 00)
et surG(H2).
Une
géodésique
fermée dans Vcorrespond
à un axe deI‘,
i.e. unepaire
depoints
deV(oo), qui
sont despoints
fixes(une
source et unpuit)
d’un élément de F. On a un dictionnaire :
3.3. Généralisation
La discussion
précédente
s’étend aux variétéssimplement
connexes àcourbure
négative (et même,
pour certains aspects, courburenégative
ounulle).
La convexité de la distance entregéodésiques joue
ungrand
rôle :elle
garantit
l’unicité de lagéodésique joignant
deuxpoints
et la convexité des boules. Etant donné unegéodésique
c, la famille des boules passantpar x et centrées en
c(t)
estcroissante,
sa réunion définit unehoroboule,
dont le bord est une
horosphère.
Deuxgéodésiques
c et c’ définissentla même famille
d’horosphères
si et seulement si la distanced(c(t) , c’(t))
reste bornée
lorsque t
tend vers +00. Deux tellesgéodésiques
sont ditesasymptotes,
et les classesd’équivalence
degéodésiques asymptotes
for-ment la
sphère
à l’infini deV,
notéeV(oo) (si
l’idée de cette relationd’équivalence
remonte à M. Morse[M2],
J. Hadamard[Hl]
mettaitdéjà
en évidence l’invariance de "l’ordre circulaire" des
géodésiques).
Lorsque
la courbure est strictementnégative,
deuxgéodésiques
a-symptotes
serapprochent
l’une de l’autreexponentiellement,
et les horo-sphères,
relevées dans le fibré unitaire par leur vecteur normal rentrant,sont les variétés stables. De
plus, chaque horosphère
est une sous-variétéplongée,
aussirégulière
que lamétrique
donnée.Enfin,
par deuxpoints
dela
sphère
à l’infini passe uneunique géodésique.
Parconséquent, lorsque
V est
simplement
connexe à courburestrictement négative, l’espace
desgéodésiques G(V)
s’identifie auxpaires
depoints
distincts de lasphère
àl’infini.
En
général,
pour une variété V à courburenégative,
nonsimplement
connexe, de revêtement universel
V, l’espace
desgéodésiques G(V)
estle
quotient
par l’action du groupe fondamental de l’ensemble despaires
depoints
distincts deV(oo),
et le dictionnaires’étend,
P. Eberleinet G. ° O’Neill
[EO], [E].
°4.
GEODESIQUES
FERMEESDans ce
paragraphe,
onexplique pourquoi,
en courburenégative,
il ya tant de
géodésiques
fermées. Leprincipe dégagé
vers 1924 par E.Artin,
J.
Nielsen,
M. Morse(voir [He2])
est que,près
dechaque géodésique
presque
fermée,
il y a unegéodésique
fermée. Cela résulte du fait suivant : dansl’espace euclidien,
si on sedéplace
enrega,rdant
leciel, l’aspect
de lavoûte étoilée ne
change
pas(l’angle
entre les étoiles ne variepas).
Dansle
plan hyperbolique,
aucontraire, lorsqu’on
sedéplace,
on voit les étoiles s’écarter les unes des autres. Plusprécisément,
Lemme.- Soit
V
une variétésimplement
connexe à courburemajorée
par une constante
négative
-K. Soit S un secteur de sommet x, d’ou-verture a, déterminant un ouvert 0 sur la
sphère
à l’infini. Si y E S etd(x, y)
>1,
alors 0 est vu de y sous unangle
au moinségal
àa’(~, a)
>a.
Théorème.
(Closing Lemma).-
Soit V une variété à courburenégative.
Pour tout f
petit
et Tgrand, il
existe avec lapropriété
suivante :pour tout p E
Tl V tel
qued(p, ~T(p))
~, il existe q ETl V
et un T’ E[T - E, T
+6]
tel que~T~ (q) -
q et E pour toutt E [o, T ~ .
En
effet,
passons au revêtement universel. Il existe une isométrie q Exi (M)
telle queIl faut montrer que q laisse invariante une
géodésique proche
de p.Pour E
petit
et Tgrand, 1(P)
est contenu dans un secteurS(p, a)
depetite
ouverture.D’après
lelemme,
ce secteur estenvoyé
dans lui-même par 1. Parsymétrie,
le secteuropposé S(-~~(p), a)
estenvoyé
danslui-même par
~y-1.
La famille décroissante de convexesa une intersection
vide,
donc leurs adhérences dans IIU V (oo)
ont un seulpoint
commun, fixé par 1. On trouve de même unpoint
fixe de1-1.
Lagéodésique qui
lesjoint
est invariante par 1 etproche
de p.Corollaire.- Soit V une variété
simplement
connexe à courbure ma-jorée
par une constantenégative.
Toutegéodésique
récurrente(i.e., qui
s’accumule sur elle-même dans
Tl V )
est limite degéodésiques
fermées.En
particulier,
si le volume de V estfini,
lespoints périodiques
du flotgéodésique
sont denses dansTl V .
Il y a d’autres manières de mesurer la richesse d’un flot en orbites
périodiques : compter
le nombre degéodésiques
fermées delongueur
inférieure à
T,
étudier leurrépartition
"en mesure"(voir
auparagraphe 11),
étudier finement larépartition
deslongueurs
à travers lespropriétés
de la fonction zeta
(voir [PP]).
La méthode consiste à établir une cor-respondance
entre le flot et un flotsymbolique,
décrit en termes finis.L’idée de
départ -
coderchaque
orbite par une suite infinie desymboles -
se trouve en germe dans
[Hl]
et s’estdéveloppée
en une riche théorie que M. Morse[Ml]
abaptisée dynamique symbolique.
5. TRANSITIVITE
L’instabilité des
géodésiques,
mise en évidence en2.2,
donne à penser que, sur une variété compacte, unegéodésique typique
va visiter toutela variété. C’est ce que l’on entend par transitivité. Par
exemple,
J.Hadamard
[Hl]
montrait que, étant donnée une surface à courburenéga-
tive
plongée
dansl’espace euclidien, qui
a parconséquent
des branchesinfinies, après
uneperturbation
arbitrairementpetite,
on peut fairepartir
toute
géodésique
dansn’importe laquelle
des branches infinies.La transitivité
topologique
affirme l’existence degéodésiques
denses.C’est une
conséquence
assez directe de la densité des orbitespériodiques,
voir
[He2].
Dans la
catégorie mesurable,
la transitivités’appelle ergodicité.
Elleaffirme que les seules fonctions mesurables invariantes sont les fonctions
constantes presque partout. Activement recherchée - l’histoire de
l’ergo-
dicité remonte à Maxwell et
Boltzmann,
mais peud’exemples
desystèmes
dynamiques ergodiques
existent avant les années30, -
elle estprouvée
par Hedlund en 1934[Hel]
pour les surfaces d’airefinie,
à courbure constante.En
1938,
E.Hopf
proposel’argument suivant, qui
s’étend au cas dela courbure variable
[Hop].
Ils’agit
de prouverl’ergodicité
de l’action du groupe7Ti(V)
sur lespaires
depoints
du cercle à l’infini. Un lemme de G. Birkhoffpermet
de se ramener aux fonctions obtenues comme limitestemporelles
de fonctions continues àsupport compact
sur V(les
limitestemporelles
existent pour presque tout x et sont presque
partout égales).
Or claire-ment la limite
f+
est constante sur les variétésstables, i.e.,
sur lestranches
ç
xV(oo), f-
est constante sur les variétés instables.Dans cet
argument
intervient unpoint technique :
le mesure na-turelle sur
G(V)
est-elle absolument continue parrapport
à la mesureproduit ?
Cela découle de la différentiabilité del’homéomorphisme
entrel’espace
desgéodésiques G(V)
etVT(oo)
xY(oo) -Diag,
liée à larégularité
du
feuilletage
stable lVs. E.Hopf
savait montrer seulement en dimension2 que le
feuilletage
stable est de classeCl.
En dimensionssupérieures,
leproblème
del’ergodicité
du flotgéodésique
des variétéscompactes
à cour- burenégative
non constante est resté ouvertjusqu’en
1962. D.V. Anosov le résoud en montrant que lefeuilletage
stable est absolument continu[Al].
On reviendra sur cettequestion
derégularité
auparagraphe
8.6. STABILITE STRUCTURELLE
Dans une variété compacte à courbure
négative, chaque
classe d’ho-motopie
libre de courbes fermées contient uneunique géodésique (à
trans-lation du
paramètre près).
Cela résulte duprincipe
variationnel(exis-
tence)
et de la convexité(unicité).
Parconséquent,
si onperturbe
lamétrique,
onpeut
suivrechaque géodésique
fermée. En est-il de même pour lesgéodésiques
non fermées ? Laréponse
remonte à M. Morse[Ml] : l’espace
desgéodésiques G(V)
est essentiellementindépendant
de la
métrique
à courburenégative particulière.
Cela résulte de la car-actérisation de la
sphère
à l’infini du revêtement universel au moyen dequasigéodésiques,
due à G.A.Margulis.
6.1. Invariance de
l’espace
desgéodésiques
Une courbe cr dans
if
est unequasigéodésique
si( 1 )
sa vitesse estbornée ;
(2)
lerapport
est borné.On montre que, dans une variété
simplement
connexe à courburemajorée
par une constantenégative,
toutequasigéodésique
est contenue dans unvoisinage
tubulaire delargeur
bornée d’uneunique géodésique.
Par
conséquent,
lasphère
à l’infini s’identifie aux classesd’équivalence
dequasigéodésiques asymptotes.
En
fait,
la notion dequasigéodésique garde un
sens dans un groupediscret de
type
fini. Si V estcompacte, V(oo)
est attachéintrinsèquement
au groupe discret F =
7Ti(V),
etLa
sphère
à l’infini devient un outil pour l’étude du groupe F : despropriétés
de l’action de F surr(oo),
on déduit la structure des sous-groupes
abéliens,
l’existence de sous-groupesdistingués libres,
la finitudedu nombre de sous-groupes
isomorphes
à un groupedonné,
la finitude de etc...Ce
point
de vue,inauguré
par A. Preissmann[P],
a étédéveloppé
parM. Gromov
[Gr2].
Celui-cigénéralise
lespropriétés
des groupes fonda- mentaux liées à la courburenégative
à la classe des groupeshyperboliques, qui
contient "laplupart"
des groupes discrets de typefini,
voirl’exposé
[Gh3].
6.2. Stabilité structurelle des flots d’Anosov
Soit V une variété
compacte,
X le flotgéodésique
d’unemétrique
rie-mannienne à courbure
négative,
vu comme unchamp
de vecteurs surTiV.
On vient de voir que, si on
perturbe X parmi
leschamps géodésiques
at-tachés à des
métriques riemanniennes, l’espace
des orbites resteinchangé.
Qu’en
est-il pour desperturbations plus générales ’?
C’est leproblème
dela stabilité structurelle.
D.V. Anosov
[A2]
a formulé ses résultats sousl’hypothèse
suivantesur un
champ
de vecteurs différentiableX,
de flot sur une variété M :il existe une
décomposition
où
RX,
et surES, (resp. EU)
la dérivée(resp.
estuniformément contractante.
Depuis,
unchamp
de vecteursayant
cespropriétés
estappelé
flotd’Anosov. La définition
correspondante
pour undifféomorphisme
estévidente
(supprimer
lapartie E° ) .
Théorème
[D.V. Anosov], ([A2]).-
Sur une variétécompacte,
unchamp
de vecteurs d’Anosov X estC1-structurellement stable, j.e.,
si X’ est unchamp
de vecteurs suffisammentCI-proche
deX, il
existeun
homéomorphisme (dépendant
différentiablement de laperturbation )
envoyant
les orbites du flot de X sur les orbites du flot de X’.D.V. Anosov fait remonter la méthode
qu’il emploie
à J.Hadamard, [H2].
Peut-on faire mieux ? On ne
peut
certainement pas transformer cetteéquivalence
d’orbites enconjugaison (même mesurable),
car leslongueurs
des orbites
fermées,
parexemple,
seraient alors conservées.Du côté de la
régularité,
onpeut
affirmer quel’équivalence
d’orbitesn’est pas absolument continue en
général.
Eneffet,
il résulte de la preuve du théorème derigidité
de G.D. Mostow[Mos]
que, pour des surfaces à courbure -1homéomorphes
mais nonisométriques,
lacorrespondance
entre cercles à l’infini n’est pas absolument continue.
Enfin,
onpeut
se demandersi,
pour deux variétés à courburenégative
ayant
mêmetype d’homotopie, l’homéomorphisme
entre fibrés unitairestangents implique
unhoméomorphisme
entre variétés. C’est vrai engrande dimension,
mais on nepeut
pas allerjusqu’à
undifféomorphisme, [FJ].
6.3. Universalité de
l’hyperbolicité
L’instabilité du comportement individuel des
trajectoires
entraîne la stabilité de leurcomportement
collectif. Ceprincipe paradoxal,
mis enévidence par D.V. Anosov dans le contexte des flots
géodésiques,
a été ob-servé simultanément par S. Smale sur son fameux "fer à cheval". S. Smale
[S]
adégagé
l’idée quel’hypothèse (U) d’Anosov,
satisfaite seulement lelong
d’un compact invariant A suffit pour assurer la stabilité de A et unedescription symbolique.
Un tel compact invariant est dithyperbolique.
Il
émerge
de ces travaux une méthoded’investigation
d’unsystème dynamique : partant
du fait que les ensembles invariantshyperboliques
sont
compris,
on doit décrire comment lecomportement
dusystème
serattache ou diffère du
comportement hyperbolique.
Cepoint
de vue esttoujours d’actualité,
voir parexemple [Y].
7. COURBURE NEGATIVE OU NULLE ET ERGODICITE Certains
aspects
de la courburenégative
s’étendent au cas où onautorise la courbure à s’annuler tout en restant non
positive.
Enquelque
sorte, il suffit
qu’une géodésique
rencontre un peu de courburenégative
pour que son comportement soit conforme au modèle
hyperbolique.
Cettegénéralisation
faitl’objet
de l’article de revue de Ya. Pesin[Pes].
La
question
del’ergodicité
du flotgéodésique
a conduit W. Ballmann àl’hypothèse
suivante.Définition.-- Soit vT une variété à courbure
négative
on nnlle. Le rang d’unegéodésique
c est la dimension del ’espace
vectoriel deschamps
de Ja-cobi
parallèles
lelong
de c. Le rang de la variété V est la borne inférieure des rangs desgéodésiques
de V.L’hypothèse
de rangégal
à 1 entraîneprobablement l’ergodicité
duflot
géodésique. Malheureusement,
cepoint
n’est pas encorecomplète-
ment éclairci.
Toutefois,
on aThéorème
[W.
Ballmann et M.Brin], ([BB]).-
Soit V une variété àcourbure
négative
ounulle,
de rang un. Si le volume de V estfini,
alorsil existe dans
Tl V
un ouvert invariant surlequel
le flotgéodésique
estergodique.
Voici deux classes de variétés de rang
supérieur
ouégal
à 2 :. les
produits
riemanniens : le rang d’unproduit
est la somme desrangs des
facteurs ;
. les espaces
symétriques
de rangsupérieur
ouégal
à2 ;
un espacesymétrique
est lequotient
d’un groupe de Liesemi-simple
par soncompact maximal ;
le rang est la dimension des sous-espacesplats
totalement
géodésiques maximaux,
et ne vaut 1 que pour une courte listed’exemples
décrits auparagraphe
suivant.Le flot
géodésique
sur unproduit (resp.
sur un espace localementsymétrique
de rangsupérieur
à2)
a desintégrales premières
invariantes par isométries. Ils’agit
del’angle
que fait un vecteurtangent
avec lesfacteurs
(resp.
avec les murs de sa chambre deWeyl).
Suite aux efforts
conjugués
de W.Ballman,
M.Brin,
K.Burns,
P.Eberlein,
R,.Spatzier,
on sait maintenant que les variétéscompactes,
à courbure
négative
ounulle,
de rangsupérieur
ouégal
àdeux,
sontessentiellement les variétés localement
symétriques
de rangsupérieur ou égal
à deux.Théorème.
([Bal], [BBE], [BBS], [BS]).-
Soit 11 une variétécompacte
à courbure
négative,
de rang au moinségal
à 2. Alors le revêtement universel de V est, ou bien unproduit,
ou bien un espacesymétrique
derang
supérieur
ouégal
à 2.La preuve consiste à reconstruire un à un les éléments de la
géométrie
des espaces
symétriques :
sous-espacesplats
totalementgéodésiques
max-imaux,
chambres deWeyl, intégrales premières.
W. Ballmann montre queles
intégrales premières
sont invariantes par holonomie et conclut avec unthéorème fameux de M.
Berger.
K. Burns et R.Spatzier préfèrent
utiliserla
rigidité
des immeubles de Titssphériques.
Le théorème est maintenant connu sous
l’hypothèse
suivante : toutpoint
deTl V
est récurrent[EH].
8. LES ESPACES
SYMETRIQUES
DE RANG 1Ce sont les espaces
symétriques
dont la courbure est strictementnégative.
Ily a le plan hyperbolique
décrit en3,
et sesgénéralisations,
en dualité avec les espaces
projectifs.
Il y a unexemple,
noté KHm surchacun des corps K =
R, C, H, Ca,
pourchaque
dimension m(seulement
m = 2 pour les octaves de
Cayley Ca) .
Parexemple,
leplan hyperbolique
est à la fois
RHZ
etDans un espace
symétrique,
le tenseur de courbure estparallèle, l’équation
de Jacobi est à coefficients constants. En rang un, le groupe d’isométries est transitif sur le fibreunitaire,
et les valeurs propres nonnulles de
l’opérateur
ne
dépendent
pas de c. Elles valent -1(dans
le casréel), -1
et -4 dansles autres cas, avec les
multiplicités (m - 1)A-,
et k - 1respectivement
(k
= dimK).
Voicipourquoi :
est un ouvert dans leprojectif Chaque géodésique
est contenue dans une K-droiteunique, qui
est totalement
géodésique
à courbure-4,
etresponsable
des k - 1 valeurs propres -4.Chaque
vecteur propre de valeur propre -1 esttangent
àun
Rp2
C KP~’~ totalementgéodésique
à courbure-1, qui
contient lagéodésique.
Il est clair que, dans ces
exemples symétriques,
les directions stablesES, qui
sont déterminées par le tenseur decourbure,
sont différentiables.Comme on l’a vu au
paragraphe 5,
laquestion
de larégularité
dufeuilletage
en variétés stables est délicate. D.V. Anosov a montré que, endimension
supérieure
à3,
lefeuilletage
n’est pastoujours
de classeCl.
On arrive à
C~
à condition de faire unehypothèse
sur lesexposants
de contraction uniforme du flot(M.
Hirsch et C.Pugh [HP],
B. Hasselblatt[Has]), qui correspond
aupincement 1/4
pour la courbure sectionnelle.En dimension
2,
S. Hurder et A. Katok[HK]
sont allésplus
loin :il obtiennent assez de
régularité (une
dérivée dans la classe deZyg- mund)
pourpouvoir
définir et calculer l’invariant deGodbillon-Vey (c’est heureux,
car cesfeuilletages
sont lesprincipaux exemples
où l’invariant deGodbillon-Vey
est nontrivial,
voir parexemple [Gh2]).
Enfait,
leurrésultat s’étend aux flots d’Anosov de contact en dimension 3. Un flot d’Anosov est de contact si le
champ
deplans Es ~ Eu
forme une structure . de contact de classeC°° ;
c’estautomatique
pour une flotgéodésique.
Il est
probable
que lefeuilletage
stable n’est de classe C°° que pour les espaces localementsymétriques
de rang 1. Dans cettevoie,
Y.Benoist,
P. Foulon et F. Labourie ont obtenu le résultat
suivant, qui
constitue unesorte de
pendant
à la caractérisation des espacessymétriques
de rangsupérieur
à 1évoquée
auparagraphe précédent.
Théorème.
[Y. Benoist,
P. Foulon et F.Labourie], ((BFL~).-
Tout flotd’Anosov de contact sur une variété
compacte,
dont les directions stables et instables sont de classe Coo est obtenu àpartir
du flotgéodésique
d’unevariété localement
symétrique
de rang 1 par lesopérations
suivantes : passage à un revêtement ou à unquotient fini, cltang.ement
deparamètre
de classe Coo.
En
fait,
les seulschangements
deparamètre possibles
sont de la forme Xchangé
enX/(1
+ est une 1-forme fermée dont seule la classe decohomologie joue
un rôle.Remarques.
Le résultat en dimension 3 est dû à E.Ghys, [Ghi].
Il est
probable
que le théorème reste vrai si lesfeuilletages
sont sup-posés
seulement de classeC?.
Cela a été établi en dimension 3 par S.Hurder et A. Katok
[HK].
La preuve : l’idée initiale est due à M. Kanai
[Kan].
Soit A la forme de contact. Sur le noyau deA,
la formesymplectique dA,
les sous-espaceslagrangiens
EU et ES déterminent une formequadratique ~
designature nulle,
invariante par le flot. Parconséquent,
q+ A2
est unemétrique pseudoriemannienne
invariante par le flot. Ceci constitue une structuregéométrique rigide.
Y.
Benoist,
P. Foulon et F. Labourie utilisent un résultat de M.Gromov
[Gr3]
sur lespseudogroupes
d’isométries localespseudorieman-
niens : une orbite dense d’un tel
pseudogroupe
estautomatiquement
ouverte. Ils obtiennent une
algèbre
deLie 9
d’isométries locales. La condition d’Anosov entraîneqlle Q
estsemi-simple
donc l’orbite ouverte et denseporte
une structure modelée sur un espacehomogène G/H.
Unargument dynamique
montre que cette structure estcomplète,
donc Vest un
quotient
V =F B G/H.
Il reste à trier les
paires G/H possibles.
On étudie une"sphère
àl’infini
généralisée" (G/H)(oo)
=G/P
où P estparabolique
maximal.La condition d’Anosov entraîne
qu’au
moins un élément de Fagit
surG/P
comme en courburenégative, i.e.,
avec unpuit
et une source.Ceci conduit à une restriction sur le groupe de Lie G : si P- est un
parabolique
maximalopposé
à P(par
le flotgéodésique
JY EC),
alorsP- a exactement deux orbites dans
G/P,
dont l’une est réduite à unpoint.
La théorie des groupesalgébriques
montre que, dans ce cas, G estde rang 1.
Remarques.
Le
problème plus
vaste où le flot n’est passupposé
de contact estouvert.
Si on
part
du flotgéodésique
deV,
on trouve undifféomorphisme
de
T1V
sur le fibré unitaireT1V’
d’un espace localementsymétrique qui
échange
les flots(le changement
deparamètre
est exclu dans cecas).
Cedifféomorphisme provient-il
d’une isométrie de V sur 1/’ ? Laréponse
estpositive lorsque
dim V =2, [Kat] (voir
aussi leparagraphe 10)
mais laquestion
reste ouverte en dimensionsupérieure.
9. ENTROPIES
Ce sont des nombres
qui
mesurent l’instabilitéexponentielle
des or-bites d’une transformation. Ils ont été inventés par A.N.
Kolmogorov [I~] .
9.1.
Entropie topologique
Ils’agit
decompter,
étant donné une ré- solution f, le nombre d’orbites delongueur
nqu’on peut distinguer.
Autrement
dit, soit ~
une transformation d’un espacecompact
M. No-tons
On
C Mnl’ensemble
des orbites delongueur
n, muni de la distance sup. On compte le nombre maximalN(n, f)
de boules 2 à 2disjointes
derayon
E/2
dansl’espace métrique On.
L’entropie topologique
est la limiteLe nombre ne
dépend
pas de la distance choisielorsque
M est com-pact.
Pour un flot on définit
l’entropie
comme étant celle de~i.
Pour un flot
géodésique, l’entropie topologique
est reliée àl’exposant
de croissance du volume des boules.
Théorème.
[A. Manning] , (~Man~).-
Soit le flotgéodésique
d’unevariété riemannienne
compacte
V. Pour r > 0 et .1: unpoint
du revête-ment universel
V,
notonsB(.x, r)
la boule de rayon n° de centre .~ dansV.
Alors pour tout
x,
et
régalé
a lieu en courburenégative.
En
particulier, l’entropie
du flotgéodésique
de 1." nedépend
que du revêtement universelV
deV,
et onparlera
librement del’entropie
de V.Par
exemple, l’entropie
del’espace symétrique
KH1n vaut À;vn, + k - 2.En