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Sémantique du nom propre chez l’écrivain des villes Etude lexicométrique

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SEMANTIQUE DU NOM PROPRE CHEZ L’ECRIVAIN DES VILLES

ETUDE LEXICOMÉTRIQUE ---

SEMANTICS OF THE PROPER NAME IN THE WRITER OF CITIES

LEXICOMETRIC STUDY

Ouidiane ELAREF

FLAM, Université Cadi Ayyad, Maroc Ouidiane.elaref@yahoo.fr

Résumé :

Le nom propre est utilisé dans la vie quotidienne, pour distinguer les êtres, les lieux, les concepts ou les objets. En conséquence du fait que le nom est un mot qui peut n’avoir aucune définition spécifique, sinon référentielle, et dont la signification dépend le plus souvent du contexte et qui, en outre, peut être subjective. Cette contribution porte sur l’analyse lexico- sémantique de cette catégorie grammaticale dans l’œuvre romanesque de Tahar BEN JELLOUN (dix-huit romans parus entre 1973 et 2010). Ce nom propre est-il choisi au hasard ou fait-il référence à une culture sociétale. C’est dans cette optique que nous essayerons de vérifier la charge sémantique du nom propre-3588 occurrences - dans les récits benjellouniens en usant de l’outil de traitement des grands corpus Hyperbase, permettant un zoom sur le contexte des occurrences et un éclaircissement des zones d’ombre de cette catégorie.

Mots clès : Nom propre, léxicométrie, sémantique, fréquence, connotation

Abstract:

The proper name is used in everyday life to distinguish beings, places, concepts or objects. As a consequence of the fact that the noun is a word that can have no specific definition, except referential, and whose meaning depends most often on the context and, moreover, can be subjective. This contribution deals with the lexical-semantic analysis of this grammatical category in the novels of Tahar BEN JELLOUN (eighteen novels published between 1973 and 2010). Is this proper noun chosen at random or does it refer to a societal culture? It is in this perspective that we will try to verify the semantic load of the proper noun-3588 occurrences- in Benjelloun's narratives by using the large corpus processing tool Hyperbase, allowing a zoom on the context of the occurrences and a clarification of the grey areas of this category.

Keywords : Proper noun, lexicometry, semantics, frequency, connotation

Introduction

Un nom propre (D. VAN DE VELDE et N. LAUX, 2000, pp.145-147) est ce qui a été accroché à un objet déterminé, à l’exclusion de ce qui lui est assimilable. Il a comme fonction cognitive de base de nommer et de marquer une individualité. Il renvoie à ce qui est communément employé en linguistique, le signifié et le signifiant, les deux éléments complémentaires du concept de signe linguistique développé par Ferdinand de Saussure.

Contrairement au nom commun (dorénavant Nc) qui peut désigner des objets de même genre, le nom propre (dorénavant Npr) désigne une seule personne en particulier. WILMET (1995 : 1) souligne à ce propos que :

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« D’une manière générale, les noms propres sont des prénoms, des noms de famille, des noms de dynasties, des noms de peuples, des noms géographiques désignant des pays, des contrées, des villes, des fleuves, des montagnes, etc. »

Qu’en est-il de la définition linguistique de cette catégorie grammaticale ? LEROY (2004 : 125) l’explicite en soulignant que :

« Le nom propre reste un objet linguistique particulier, au statut essentiellement double. D’un côté, il s’intègre au lexique du français, par sa nature et ses fonctionnements, de la façon la plus banale qui soit ; en même temps, il se distingue toujours, par tel ou tel aspect, des autres unités lexicales, et en particulier de celle dont il le plus proche, le nom commun.

Cette dualité s’observe dès les préliminaires définitoires : le nom propre se révèle impossible à définir facilement, nettement à l’aide de critères distinctifs et de propriétés établies. On a donc recours à un groupe de critères hétéroclites, dont aucun n’est nécessaire et suffisant ; il en résulte un flou indéniable de la catégorie, un imparfait avec lequel il faut néanmoins composer. »

Pour LEROY, le Npr a un double statut d’abord c’est un élément du lexique de façon naturelle, ensuite il se distingue de son proche le Nc par plusieurs critères. Cette dualité est palpable dès les essais de la délimitation qui ne sont pas toujours faciles.

Cela nous renvoie au statut linguistique de cette catégorie grammaticale.

1. Problèmes de délimitation Npr/ Nc

La distinction Npr et Nc a souvent posé des problèmes aux linguistes. Ce qui est constaté dans les études sur ces catégorie et quelques soient les critères de distinction adoptés, majuscule, intraduisabilité, absence d’article, mono-réferentialité, manque de sens ou incompatibilité avec les déterminants), il reste toujours difficile de les discerner. L’embarras est toujours présent comme l’a souligné COSERIU (1975 :234), il faudrait se décider si l’application du terme de Npr est sur une forme ou une fonction. Ainsi les critères comme ceux de la majuscule, de l’absence de l’article et de l’intraduisabilité ont pour objectif de cerner une classe d’expression linguistique ou de forme, vision du linguiste. Alors que le caractère qu’il n’accepte pas de pluriel ou qui renvoie à un seul être visent plutôt une fonction à savoir celle logique, vision du philologue ou philosophe. Ce qui nous intéresse dans le présent travail, ce n’est pas sa délimitation car nous jugeons que c’est un point dépassé mais plutôt son aspect sémantico-référentiel. Comprenons-nous ce nom propre de la même manière ? Cette catégorie ne subit-elle pas l’influence d’autres facteurs ? Kleiber (1981) et d’autres linguistes ont évoqué l’influence du contexte sur l’interprétation des Npr. Blin (2009) a pris en compte la dimension interpersonnelle en suggérant que l’interprétation pouvait jouer sur la distinction entre connaissances propres et connaissances attribuées. La problématique du sens et de la référence du Npr n’a pas eu un grand succès par rapport à l’intérêt porté par les chercheurs. Devons-nous l’approcher de façon intuitive ou un examen plus pointu apportera de la nouveauté et permettra une meilleure compréhension du choix d’un à la place de l’autre. Qu’en est-il de la sémantique de cette catégorie alors ?

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2. Sémantique du Npr

Nous commencerons par la dernière question qui porte sur le sens du Np. Cela nous renvoie directement à la sémantique qui se fond sur une définition du sens. Définir le sens consiste essentiellement à privilégier un ou plusieurs des multiples phénomènes sémiotiques.

En effet, on peut postuler que tout terme sémiotique, toute relation entre ces termes et tout produit d’une relation sont susceptibles d’être appelés « sens », ou d’être considérés comme des sens, par une théorie ou l’autre. (Hébert, 1995 :43).

Traditionnellement, les sémantiques sélectionnent le contenu dénotatif comme seul sens pertinent. Il constitue, en définitive, le produit rémanent de la relation entre le signifié et son référent. Les sémantiques classiques soutiennent, en général, l’asémanticité du nom propre ; conséquemment, aucun des phénomènes précités, selon elles, ne formerait un sens pertinent ou n’affecterait le sens pertinent, le sens dénotatif.

À l’opposé, pour la sémantique interprétative sens et signification résident dans l’interaction des signifiés et non dans la relation des signifiés à leur référent. Elle invalide l’opposition contenus dénotatifs/connotatifs et lui préfère celle de sèmes inhérents/afférents, où les termes sont départagés par le critère des systèmes producteurs.

RUSSEL (1905) soutient que le sens d’un nom propre est donné par une seule description précise nécessaire et suffisante. Par exemple, Aristote se réfère à Aristote lui-même au moyen d'une description en écrivant : « Aristote fut l'élève grec de Platon et fut le maître d’Alexander

» qui détermine de façon unique le référent, à savoir Aristote. Ce postulat n’est pas toujours correct du moment qu’il est souvent difficile de trouver une seule description précise qui détermine de façon unique le référent d'un Npr.

L’étude du nom propre dans une approche sémantique conduit selon MOLINO (1982) à la pragmatique, c'est-à-dire le passage du sens à l’usage, du langage à la société. Pour lui, une « linguistique ouverte » ne fait pas de barrière entre les deux domaines. Une question se pose alors, dans ce domaine, sur l’usage et le fonctionnement du Npr dans la société. Avant de chercher à y répondre, il est important de s’interroger sur comment et sous quelles conditions les noms propres sont attribués dans une société aussi complexe que celle traitée par Tahar BEN JELLOUN. À ce propos, l’article de BROMBERGER montre que dans chaque société, il existe une sorte de traditions qui représentent les règles de jeu bien respectées lors de l’attribution des Npr.

Pour voir plus clair, nous avons opté pour une étude lexico-sémantique du Np dans l’œuvre romanesque de Tahar BEN JELLOUN. Cet écrivain qui a toujours su impressionner ses lecteurs tantôt par les sujets abordés, par les modalités d’écriture et même par le choix des différentes catégories grammaticales et surtout le Npr.

3. Le Npr dans l’œuvre romanesque de Tahar BEN JELLOUN

Dans la production de T. BEN JELLOUN, les Npr comptent 3588 occurrences qui se répartissent dans les dix-huit textes de manière différente.

Dans le diagramme ci-dessous, les bâtonnets en rouge représentent les textes dans lesquels les Npr sont excédentaires, alors que ceux en bleu renvoient aux romans où cette catégorie est déficitaire.

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157 Répartition des noms propres dans le corpus

Le premier constat que nous pouvons faire est que cette catégorie est déficitaire durant la première partie de la production de l’auteur exeption faite du roman La Plus Haute des Solitudes qui se détache de la liste et marque un leger excedent d’emploi. Pour ce qui est de la seconde moitié cette catégorie est plus remarquée surtout dans les deux romans l’Auberge des Pauvres et Labyrinthe des sentiments.

De plus, ces Np – à travers leurs contextes- ont une double fonction : dénotative renvoyant à la personne, au pays, à la ville, à la région… mais aussi connotative, ce qui traduit l’originalité de l’écrivain marocain d’expression française. Pour T. BEN JELLOUN, le choix du nom-propre est antiphrastique1( Idem :147) c’est-à-dire que l’intention morale qui réside dans l’attribution de ce nom est différente de celle de l’opinion publique ainsi que tout ce qui est négatif est magiquement transformé pour devenir positif.

Selon R. BARTHES (1973 :218) :

« … un nom propre doit toujours être interrogé soigneusement, car le nom propre est, si l’on peut dire, le prince des signifiants, ses connotations sont riches, sociales et symboliques »

C’est dans cette perspective que nous tentons d’examiner la connotation des noms propres cités dans l’œuvre de BEN JELLOUN. La question qui se pose est comment catégoriser le Npr ?

Selon MOLINO (1982 : 6), pour établir une liste maximale, il serait judicieux d’examiner tous les termes qui ont pu appartenir, au moins une fois, à la catégorie de Npr. Laquelle liste permettrait, selon ZABEEH (1968) et Le BIHAN (1974) cité par MOLINO (1982 : 6), de distinguer huit classes :

1- Les noms des personnes ou anthroponymes : Jean, Homère, Reagan, etc. ;

2- Les noms d’animaux : Médor (ceux-ci peuvent d’ailleurs ne pas être spécifiques puisqu’un chat peut être appelé Pythagore) ;

3- Les appellatifs et titres : Papa, Maman, etc. ;

4- Les noms de lieux : Paris, Aix-en-Provence, La Normandie, La France, etc. ;

1 R.IRAQI, « Onomastiques et Personnages Féminins », in : Ecritures Maghrébines –Lectures croisées, Casablanca, Afrique Orient, 1991, p.147

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5- Les noms de temps : midi, lundi, septembre, Pâques, la Renaissance, etc. ; d’institutions : Renault, la C.G.T., etc. ;

6- Les noms de produits de l’activité humaine : la 5è symphonie, Madame Bovary, Concorde, etc. ;

7- Les noms de symboles mathématiques et scientifiques : pi, etc. ;

8- Les autres noms propres : ceux qui ne se regroupent avec aucune des classes opticités.

Une autre classification réalisée à partir d’une étude du Wall Street Journal comportant 30 catégories divisées en 9 classes (B. DAILLE, 2000 :115-129) se présente comme suit :

1- Géographique : villes, ports, aéroports, îles, comtés ou départements, provinces, pays, continents, régions, fleuves, autres noms géographiques ;

2- Affiliation : religions, nationalités ;

3- Organisation : entreprises, types d’entreprises, institutions, institutions gouvernementales, organisations ;

4- Humain : personnes, fonctions ; 5- Document : documents ;

6- Équipement : logiciels, matériels, machines ; 7- Scientifique : maladies, drogues, médicaments ; 8- Temporelle : dates et heures ;

9- Divers : autres noms d’entités nommées.

Une autre classification réalisée par le linguiste germanophone BAUER (1985) répond aux besoins traductifs que ce soit dans le cadre de la traduction automatique ou la traduction humaine assistée par ordinateur. DAILLE (2000 : 119) nous dit à ce propos que « la classification des noms propres s’organise autour d’une évaluation des composants de la réalité objective composant le référent du nom ». En effet, ce dernier divise la liste des Npr en 6 classes comprenant plusieurs catégories :

1- Anthroponymes : les personnes individuelles ou les groupes (patronyme, prénoms, pseudonymes, gentilés, hypocoristes, ethnonymes, groupes musicaux, moderne, ensembles artistiques et orchestres classiques, partis et organisations) ;

2- Toponymes : les noms des lieux : pays, villes, microtoponymes, hydronymes, oronymes, installations militaires ;

3- Ergonymes : les objets et les produits manufacturés et par extension les marques, entreprises, établissements d’enseignement et de recherche, titres de livres, de films, de publications, d’œuvre d’art ;

4- Praxonymes : les faits historiques, les maladies, les évènements culturels ;

5- Phénonymes : les ouragans, les zones de haute et de basses pressions, les astres et Les comètes ;

6- Zoonymes : les noms d’animaux familiers.

Dans le cadre de ce travail, une distinction des Npr, chez l’écrivain des villes, a été établie selon la répartition du linguiste BAUER. L’examen de la liste lemmatisée (voir image ci- dessous) extraite du corpus a donné référence à deux catégories, celle des Anthroponymes et celle des Toponymes. Ces deux catégories sont transcrites en français mais portent une charge sémantique qui n’est pas à négliger.

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159 Figure 1 Extrait du dictionnaire des Npr de Tahar BEN JELLOUN

Il faudrait préciser que la liste en question se présente sous forme d’un fichier avec des vocables obéissants à un ordre décroissant de fréquence dans le corpus. Dans les parties suivantes il sera question de présenter l’exemple du Npr le plus significatif tout en examinant son association avec d’autres catégories grammaticales.

4. Les Anthroponymes du récit de Tahar BEN JELLOUN

Comme nous l’avons abordé ci-dessus, le terme « anthroponyme » désigne les noms utilisés pour identifier les personnes comme : les patronymes, prénoms, pseudonymes etc. Ces anthroponymes sont classés comme suit :

4.1.Noms propres des personnes individuelles

Les Npr chez T. BEN JELLOUN sont généralement des noms renvoyant au peuple marocain, ce qui permet aux textes de se distinguer par les sonorités arabes. Il y a ceux qui ont une connotation religieuse (nom des prophètes) et bien sûr d’autres occidentaux.

Noms des personnes arabes - Noms de femmes

keltoum, Rhimou, Kenza, Siham, Malika, Soumaya, Soraya, Ghita, Wahida, Sakina, Ouarda, Fattouma, Izza, Maria, Zina, Houda, Chérifa, Najia, Karima, Hlima, Batoule, Zineb, Nadia, Fatima, Radhia, Naïma, Aïcha, Yamna.

Ces noms propres de femmes ont une particularité de remplir au moins deux fonctions, en plus d’être une étiquette pour chaque personne, c’est un signe qui marque une individualité vu la charge sémantique qu’il en porte. Sans oublier leurs fréquences qui n’est pas gratuite.

Par exemple, la femme en plus d’être une belle (Zina, 160 occ.), celle avec les joues colorées ( Keltoum, 161 occ.), la reine du soleil en berbère (Kenza, 209occ.), la beauté des étoiles (Soraya, 29 occ.), rose (Ouarda, 20 occ.) qui embellit la vie de l’homme, belle avec des joues colorées (Keltoum, 161 occ.), la perle rare (Ghita,45occ.), celle aimée par tout le monde (Maria,40 occ.) elle est censée être seule (Wahida, 80 occ.) pour ne pas avoir d’appui, calme (Sakina, 25 occ.) afin d’apporter la paix au foyer, celle qui est sur la bonne voie de Dieu

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(Halima, 30 occ.) généreuse (Karima, 46 occ.) et devrait accepter son sort (Radhia, 27 occ.) sans oublier sa pitié permanente qui, des fois la laisse à l’écart et insinue une faiblesse de personnalité, elle n’est que (Rhimou, 26 occ.), sa grâce et douceur ( Naïma 1occ.), son indulgence ( Halima, 30 occ.), mais c’est aussi celle qui a le don de possession (Malika, 98 occ.), la noble ( Chérifa, 1occ.), celle qui orne son père(Zineb, 39occ.), celle qui s’accroche à la vie (Aïcha, 31 occ.)…

Nous remarquons que T. BEN JELLOUN met en avant l’aspect physique de la femme et sa beauté qui ensorcelle les protagonistes pour arriver à ses traits de caractères qui sont très recherchés par la société arabe surtout pour la bru. Au côté de ces prénoms au féminin, il y a toujours une panoplie de ceux de sexe masculin qui connotent eux aussi plusieurs idées.

- Noms d’hommes

Nâzim, Nabil, Mourad ,Larbi, Abbas, Mamed, Ali, Wakrine, Mfedel, Achar, Lhoucine, Laziz, Salim, Abid, Azel, Moha, Hamid, Mourad, Ahmed, Sindibad, Jamal, Aziz, Noureddine Mohammed, Brahim, Driss, Youssef, Idriss, Moustafa, Omar.

En examinant les prénoms attribués aux hommes, nous remarquons qu’ils portent dans la plus part du temps une charge religieuse, le recours à ce type de prénoms est pour la famille, dans la majorité, des temps un souhait et une attente d’une acquisition ou une ressemblance avec les prophètes et leurs compagnons surtout au niveau du comportement. Par exemple : (Mohamed,200 occ.) pour celui qui reçoit la grâce [ al hamd], Mustapha, l’élu du Dieu - le prédestiné…, Brahim pour le père tendre, Driss pour le savant, le connaisseur, Youssef pour le sage, (Mamed,105 occ.), c’est l’élevé, le très haut en se rapprochant du Dieu (Ali, 96 occ.), celui qui loue Dieu ( Hamid, 70 occ.), la lumière de l’islam (Noureddine, 35occ.), celui qui prie Dieu (Abid, 50 occ.), le sain, sans défaut (Salim, 60 occ.) aussi bon et beau (Lhoucine,45occ.), celui qui a la grâce (Nâzim, 70 occ.), il y même des noms qui insinuent ce qui est voulu et désiré ( Mourad, 32 occ.), ou aussi renvoient à l’origine arabe (Larbi, 38 occ.).

Sans oublier celui qui est toujours fâché (Abbas, 45occ)… En plus d’être le préféré de la famille (Laziz / Aziz15 occ., Mfedel l25occ.). L’homme chez Tahar BEN JELLOUN est la lumière de dieu qui va illuminer la vie de sa famille et qui va assurer la descendance du nom familial.

Certes les textes de BEN JELLOUN sont remplis de charge sémantique arabomusulmane mais ils sont aussi un tremplin pour l’ouverture sur le monde extérieur, ce qui explique la présence des nom étrangers.

Noms de personnes étrangères

Marcel, Roland, Miguel, Carmen, Ramon, Ernest, Victor, Momo, Gino, Marco, Piero, Carlos, Tarzan, Marc, Boby, Piero...

Ces prénoms ne sont pas vides de charge sémantique et explique même la présence de ces personnes dans les récits ou même le pourquoi des rencontres avec les autres dits arabes.

A titre d’exemple, nous notons : Victor pour le vainqueur, Carlos pour l’homme fort/ libre, Miguel dérive de Michel semblable à Dieu, Ernest pour celui qui lutte dans la vie, Carmen en faisant référence au poème ou le chanty …

L’auteur n’hésite pas à employer des prénoms étrangers pour marquer à la fois l’ouverture du monde arabe sur l’occident et pour apporter à ses écrits plus de vérité par rapport aux événements et histoires narrés. A plusieurs reprise, l’auteur use de la connotation de ces Npr pour effectuer des économies d’écriture même ou pour laisser la liberté aux lecteurs à

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effectuer leurs interprétations selon leurs cultures, appartenances, leurs références et même leurs vécus.

Les Npr dans les romans de BEN JELLOUN font référence aussi à l’histoire du Maroc, l’auteur les cite en renvoyant aux héros du combat marocain par rapport à la colonisation, ceux qui ont résisté aux français comme Cheïkh Mostafa Ma-Al-Aynayn, Abdel Karim El Khattabi...

mais aussi à ceux qui ont trahi le Maroc pendant le protectorat comme Pacha El Glaoui. Les noms qui illustrent l’art et la littérature sont cités aussi présents : Abou Nawass, Imam Ghazali, Al Hallaj…

Comme nous l’avons soulevé au début de cette partie, les Npr féminins les plus significatifs sont Kenza (1721occ) / Keltoum (155occ), ceux masculins sont Pierre (423occ) /Mohamed (232occ). Un examen de leurs environnements thématiques donne les associations suivantes :

- Association Kenza/Keltoum

Figure 2 Association Keltoum & Kenza

Comme le montre le graphique(figure2), les deux Npr se présentent dans les mêmes contextes, ils sont toujours cités successivement ce qui explique leur rapport avec les mêmes items. Ces derniers renvoient généralement à des statuts comme celui de la fille, la mère, l’épouse ou à des lieux avec des moyens de transport Espagne, avion. Des associations qui traduisent l’envie de tous les jeunes à l’époque qui n’avaient aucune préoccupation sauf celle de traverser la méditerranée. Surtout pour le sexe féminin qui était lésée dans la société marocaine et qui cherchait à tout prix de s’enfuir.

Ce rapprochement des deux Npr confirme aussi de la liaison qu’il y a entre leurs connotations. Si Kenza est considérée comme la reine du soleil, ces rayons alors illuminent les joues de Keltoum dont le prénom fait référence.

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-Association Pierre/ Mohamed

Figure 3 Association Pierre

Figure 4 Association Mohamed

Comme le montrent les figures 3et le sens du Npr est explicite même à travers le couplement qu’il a avec les différents éléments du lexique. Pierre, ce Npr qui renvoie au rocher et qui caractérise cet aspect dur de la pierre est associé aux Nc : terre, mur, arbre, amas, banc, puits… mais aussi aux adjectifs : gros, sec, fort…

Pour Mohamed, le Npr le plus populaire dans la société arabe, il est couplé avec musulman, prophète, Dieu aussi avec le nom des compagnons : Brahim, Larbi, Ahmed sans négliger le verbe vedette Respecter qui témoigne du caractère principal de ce nom.

Cette richesse d’anthroponymes confirme l’idée que l’écriture de T.BEN JELLOUN propose une diversité de noms de personnes dont l’itinéraire est facilement traçable grâce aux noms des places citées en l’occurrence les toponymes.

5. Noms de lieux ou toponyme

Pour les noms d’endroits (V. BONNET, 2013 : 81-111), ce sont des noms de pays, de villes et de régions arabes ou européennes. Le métissage des cultures et l’ouverture sur le

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monde extérieur sont illustrés à travers ces noms de différents espaces. Les villes ou régions évoquées constituent un miroir réflecteur permettant la découverte des relations établies entre la culture arabo-musulmane et celle occidentale.

5.1.Noms des pays, de villes et des régions - Arabes

Agadir, Casablanca, Marrakech, Chaouen, Algérie, Maroc, Maghreb, Fass, Fès, Meknès, Rabat, Khémisset, Zarhoun, Sakia el hamra, Assila, Tanger, Sefrou, Smara, Tiznit, Tétouan, Salé, Azrou, Koutoubia, Sidi Hrazem, Taza, Ain Leuh, Mellah, Dakhla, Adrar, Sahara.

- Etrangers

France, Espagne, Barcelone, Mellilia, Suède, Ceuta, Naples, Gibraltar, Resteville, Bristot, Paris,

A travers les noms des lieux, T. BEN JELLOUN dessine les itinéraires des protagonistes ; ce qui permet au lecteur de parcourir, d’abord, avec eux ces régions et de découvrir ces endroits ainsi que leurs spécificités, leurs couleurs et leurs atmosphères. Ces personnages traversent les villes marocaines en passant par des villages pour arriver aux pays européens.

En lisant BEN JELLOUN, deux types de villes sont présentes à savoir la ville ancienne et la ville moderne. L’auteur insiste sur le côté traditionnel des villes, qui est perçu dans les anciennes médinas, les souks, les places publiques…. puisqu’il a une importance capitale dans la culture arabe. De plus, les places publiques des différentes villes constituent un carrefour qui favorise la rencontre de plusieurs cultures et l’échange entre les différentes ethnies qui composent la population marocaine. Ces places jouent aussi le rôle de gardien de la tradition, vu qu’elles accueillent un grand nombre de conteurs qui perpétuent la tradition orale ainsi que le folklore arabo-musulman.

De plus, l’auteur évoque aussi le côté moderne des villes ; pour lui les villes modernes (KAMAL_TRENSE, :15-23) sont des représentations géographiques et sociales de l’avenir à l’occidentale, ces dernières tendent, aussi, à marginaliser la cité traditionnelle, à faire perdre la culture d’origine et à favoriser l’oublie des racines.

L’auteur insiste sur le contraste ancien-moderne pour marquer ce déséquilibre entre la tradition et la modernité. A travers ce double emploi, la plume de l’auteur décrit avec précision le côté traditionnel des villes du Maroc. Grâce à cette description, le lecteur peut, à la fois, entrevoir tout ce qui est coincé dans l’ombre des murs et murailles des villes et arriver à apprécier les sons et les saveurs propres à la société marocaine et profiter de l’aspect contemporain de ces endroits. Parler de modernité, pour BEN JELLOUN, c’est afficher une sorte de révolte contre les clichés attribués à ses origines par l’occident.

L’aspect moderne (KAMAL_TRENSE : 118) des villes renvoie à l’après indépendance, car les européens sont partis en laissant une infrastructure exploitable. Et bien sûr avec le désir de garder le cap sur l’occidentalisation, les villes s’élaboraient au fur et à mesure selon une conception étrangère, réalisée dans la majorité des temps par des architectes et des urbanistes formés à l’étranger.

Cette modernité a conduit, selon N. K-TRENSE (1998:119) à « une batardisation de l’espace, une déchirure et une schizophrénie du corps urbain… », ce qui explique parfaitement l’ambiguïté qu’affronte le visiteur de ces endroits et les marques du métissage culturel facilement détectable dans les ruelles des villes marocaines.

Il ne faut pas oublier que ce type de nom aussi est porteur de sens. A titre d’exemple : France (la libre) , Espagne ( peau du lapin), Suède ( cuir doux au toucher), Naples ( la ville nouvelle), Paris ( tribu :celle vivant sur une île de la seine), Agadir ( le grenier fortifié), Casablanca ( la maison blanche), Marrakech ( la terre de Dieu), Algérie ( les îles) , Maroc ( le

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couchant), Meknès ( le guerrier ou le combattant), Rabat ( le camp de la victoire), Tanger (la terre sec), Smara ( le résistant), Tiznit ( la sainte), Tétouan (œil ou yeux), Salé (ayant l’eau coulante), Azrou ( pierre, roche ou rocher), Koutoubia ( libraires), Taza ( le col en tamazigh), Mellah ( quartier juif), Dakhla (Villa Cisneros), Sahara ( désert).

Ces toponymes établissent des associations avec d’autres catégories qui dans la plupart des temps témoignent de l’histoire de l’endroit et justifie sa signification. Nous nous focaliserons sur ceux les plus significatifs à savoir France (324 occ.)/ Maroc (242 occ.) et Tanger (334 occ.)/ Naples (321 occ.) :

- Association France/Maroc

Figure 5 Association France

Figure 6 Association Maroc

Les deux figures 5 et 6 illustrent ces associations et montrent que si la France est plutôt associée à l’Algérie, au travail, au passeport en général tout ce qui se rapporte à la période de colonisation rapportée par l’auteur, le Maroc, quant à lui, est plutôt associé à l’Espagne, aux

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vacances, au voyage pour faire référence aux différents étrangers qui y étaient et qui entraient en relations surtout avec les filles marocaines.

- Association Naples/Tanger

Figure 7Association Naples

Figure 8Association Tanger

Les deux graphiques des figures 7et8 illustrent l’environnement thématique des deux Toponymes Naples/ Tanger. Le premier constat est que chacune des villes est en rapport étroit avec des éléments du discours qui reflètent sa charge sémantique. Si Naples, dite ville nouvelle, est associée dans un premier niveau à Carton les lits utilisés par les migrants, dans les rues donnant lieu à texte production littéraire de ces immigrés pendant le désespoir. Tanger, nommée terre sèche, est plutôt rapprochée de Afrique et Europe pour parler de sa localisation, au Port, à Naples et à la Casbah pour évoquer les différents endroits fréquentés ou souhaités par les protagonistes.

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Conclusion

En somme, les Npr, qu’ils soient de personnes ou d’endroits, référent à une identité, à une histoire économique ou sociale mais surtout à une culture. L’introduction de cette catégorie permet l’embrayage du récit sur l’histoire, grâce aux noms de villes, de personnes, de citations… ce qui est une des règles du roman réaliste ou même postmodérniste. Dans ce sens, Ph. HAMON (1982 : 119-132) affirme que le récit réaliste est :

«… embrayé sur une méga (extra) Histoire qui, en filigrane, le double, l’éclaire, le prédétermine, et crée chez le lecteur des lignes de frayage de moindre résistance, de prévisibilités, un système d’attentes, en renvoyant implicitement ou explicitement (par la citation, par le nom propre, par l’allusion, etc.) à un texte déjà écrit qu’il connaît. Ce texte peut être sacré ou profane… »

Par cet embrayage sur un arrière- plan historique, politique ou social, le texte se constitue d’une manière prévisible et à travers les Npr historiques ou géographiques qui assurent des points d’ancrage et permettent l’économie d’un énoncé descriptif, nous avons un effet accentué de réel global et une transcendance de tout décodage de détail. Cela ne peut que confirmer notre idée du départ qui sous-entend que cette catégorie est porteuse de signification et elle suscite plus d’intérêt comme toutes les autres catégories de la langue.

Les Npr chez Tahar BEN JELLOUN sont de deux types : des anthroponymes et des toponymes diversifiés. Les premiers inscrivent les textes dans un contexte arabe en faisant référence aux prophètes et accompagnant mais aussi ouvert sur l’occident. Lesdits prénoms font référence à des traits physiques : Zina, Kenza… mais aussi à des traits de caractères sollicités par la société : Lmfedel, LAziz... Pour les seconds, ils marquent d’une part la richesse du Maroc et d’autre part ses séquelles.

Bibliographie

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