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Politiques et Management Public : Article pp.697-703 du Vol.29 n°4 (2012)

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*Auteur correspondant : shyam.sunder@yale.edu

doi:10.3166/pmp.29.697-703 © 2012 IDMP/Lavoisier SAS. Tous droits réservés

Shyam Sunder 

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Professeur titulaire de la chaire J. L. Frank Yale University, School of Management

Résumé

L’importance accordée à la publication dans des revues internationales peut certes servir un objectif à court terme : repérer les chercheurs les plus doués en vue de leur promotion ou de leur titularisation. Cependant, à cause de cette politique, au lieu de consacrer des talents et des ressources rares aux problèmes urgents du pays, ceux-ci se trouvent mis au service de préoccupations lointaines pour lesquelles les chercheurs ne sauraient bénéficier d’un quel- conque d’avantage comparatif. En outre, ce type de politique détruit l’espoir d’atteindre cet objectif plus fondamental qu’est la constitution d’une culture autochtone de la recherche à travers l’innovation, le débat, la critique et le travail de publication. La société gagnerait sans doute à ce que les privilèges de la hiérarchie et de l’âge perdent de leur importance au profit du mérite et de la mobilité. © 2012 IDMP/Lavoisier SAS. Tous droits réservés

Mots clés : Culture, politique de publication, recherche, revues.

Abstract

Nurturing Research Culture. Emphasis on publication in international journals may help the short term goal of selecting more talented faculty for promotion and tenure in universities. However, such policies also divert the application of scarce talent and resources from pressing domestic issues to distant ones in which researchers have little competitive advantage. They also undermine the more fundamental goal of building local research culture through innovation, discussion, criticism, and editorial work. De- emphasizing the power of hierarchy and age, and increasing mobility and merit may be serve the society better. © 2012 IDMP/Lavoisier SAS. Tous droits réservés

1 This is a revised version of the author’s “Building Research Culture” published in China Journal of Accounting Research, Vol 1, (2008): 81-83. Yuri Biondi’s assistance in this revision is gratefully acknowledged.

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Pour une culture de la recherche ?

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Keywords: Culture, publication’ policies, research, journals.

Le corps enseignant et les directeurs d’écoles de commerce demandent souvent à leurs collègues étrangers pourquoi leurs recherches ne trouvent pas place dans leurs publications.

Quel type de recherche faut-il mener si l’on veut être publié dans des revues internationales ? Ces problèmes ne sont pas sans importance, ils se posent de manière urgente et tout à fait authentique dans la perspective d’une soutenance de thèse, d’un emploi, d’une promotion ou d’une titularisation soumis à des règles universitaires ou administratives imposant la publication dans des revues internationales. Ces publications à l’étranger comptent souvent pour beaucoup dans les décisions que l’on considère généralement comme déterminantes pour le succès ou l’échec d’une carrière universitaire.

L’impératif de la publication dans des revues internationales (et la participation à des col- loques internationaux) constituent désormais des critères d’évaluation pour nombre d’universités et de ministères de l’éducation à travers le monde, le but étant d’introduire une culture de la recherche dans des institutions anciennes qui n’ont pas forcément cette tradition de recherche ou de développer cette culture dès le départ dans de nouvelles institutions. L’objectif est admirable.

On peut tenter d’atteindre ce but en se conformant aux règles du jeu internationales de la publication et remplir ainsi l’objectif à court terme d’une sélection des candidats ou des unités de recherche répondant aux critères requis, mais non sans payer un très lourd tribut puisque l’on sacrifie l’objectif à plus long terme de la formation d’une culture autochtone de la recherche, propre à répondre aux problèmes majeurs de la société.

De nombreux pays déplorent l’absence d’une solide tradition de recherche dans leurs universités. Certaines universités cherchent à faire connaître les travaux de leurs propres équipes en les publiant dans des revues internes, ce qui les prive d’une évaluation indé- pendante de leur qualité. Parfois, les processus d’évaluation existants se trouvent pris dans des réseaux de relations personnelles. Enfin, dans les universités locales, il n’y a pas toujours assez de spécialistes activement engagés dans la recherche qui soient en mesure de procéder à ces évaluations.

Les procédures des revues internationales sont loin d’être parfaites, et certaines revues locales existantes peuvent rivaliser avec les meilleures du monde. Il reste que, de manière générale, depuis des décennies les revues internationales sont bien plus nombreuses à s’être imposées dans leurs domaines respectifs. Elles sont dirigées et évaluées par des spécialistes reconnus, dont beaucoup sont des pionniers dans leur domaine. Ces directeurs de publications, rédacteurs et rapporteurs ne connaissent certainement pas la plupart des auteurs étrangers, et le cas échéant, on peut compter sur leurs procédures bien établies pour éviter avec succès le favoritisme ou les conflits d’intérêts. On comprend dans ces conditions que les chefs d’établissement, désireux de repérer les talents parmi les chercheurs de leurs facultés, s’appuient sur la publication dans les revues internationales les plus connues pour répondre au problème de l’évaluation objective de la recherche au sein de leur propre équipe.

Cette stratégie se heurte à plusieurs difficultés. Premièrement, le nombre des univer- sités et des enseignants étant considérable et ne cessant d’augmenter, les revues publiées par un nombre restreint d’associations de recherche actives ne peuvent prendre en charge que quelques publications venues de l’extérieur. La stratégie qui consiste à sous-traiter

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l’évaluation des recherches menées par des centaines de milliers d’auteurs en la confiant à un petit nombre de revues bien connues est tout simplement inenvisageable, en particulier pour les grands pays d’Europe et d’Asie. Tous les pays, et en particulier les plus grands, doivent s’acquitter de cette tâche complexe et coûteuse.

Deuxièmement, même si l’espace ne représentait pas une contrainte, la plupart des revues prestigieuses ont tendance à porter leur attention sur des problèmes concernant les économies des pays dans lesquels la plupart de leurs lecteurs résident. Lorsqu’un article issu d’une recherche arrive sur le bureau d’un rédacteur, la première question que celui-ci se pose, c’est de savoir si cet article a de l’importance et présente un intérêt pour ses lecteurs. Étant donné qu’une part considérable de la recherche en économie dépend du type d’économie dans laquelle elle est menée, seule une infime partie des articles provenant d’ailleurs peut franchir cet obstacle de l’importance et de l’intérêt au niveau des revues internationales. C’est cet obstacle, à la fois perçu et réel, qui est à l’origine des questions dont on a commencé par faire état.

Troisièmement, les chercheurs, soumis dans leur pays à des règles d’évaluation qui leur imposent de publier dans des revues internationales et confrontés à l’obstacle posé par ce jugement d’importance/intérêt, ont tendance à se désintéresser des sujets de recherche qui concernent leur propre économie pour se tourner vers les problèmes des sociétés dans lesquelles sont publiées les revues qu’ils visent. Or, en dépit de tous leurs efforts, la plupart des chercheurs étrangers ne disposent d’aucun avantage comparatif sur ce terrain. Et qui pis est, le temps précieux et le talent rare de ces chercheurs se trouvent détournés des questions importantes et des problèmes urgents propres à leur pays, où leurs recherches pourraient déboucher sur des résultats significatifs et des politiques mieux adaptées. La politique de publication à l’international les incite ainsi à traiter de problèmes qui leur sont étrangers et concernent des pays éloignés, dans le seul but d’obtenir les quelques publications qui leur vaudront une promotion. C’est tout le sens de la recherche qui s’en trouve renversé : au lieu de mettre sa recherche au service de la société, le corps enseignant se lance dans une recherche en vue de la publication, afin d’obtenir la promotion qui lui permettra de pour- suivre son activité de recherche. On peut légitimement se demander pourquoi une société devrait financer, tant en termes de temps que de ressources, ce type d’activité.

Quatrièmement, dans de nombreuses universités, la recherche et l’innovation peinent sous le poids écrasant de la hiérarchie. Il est difficile de faire-valoir ses idées lorsqu’elles rendent caduques les idées de ceux qui détiennent un droit de veto qu’ils ne répugnent pas à utiliser.

Les colloques lors desquelles on présente ses travaux, répond à des questions et reçoit des critiques ne se passent pas toujours dans un esprit de franchise et d’ouverture, tandis que les processus visant à accroître la rigueur des raisonnements, à apporter de l’innovation et à intégrer des apports transdisciplinaires pourront s’avérer trop faibles. Les procédures liées à la révision et à l’évaluation des publications par des rapporteurs manquent par ailleurs d’indépendance par rapport aux normes internationales. Mais surtout, le plus difficile reste de séparer les relations personnelles de la critique portant sur la recherche. Si l’on veut ren- forcer la culture de la recherche, il faut agir sur ces caractéristiques propres aux universités et à leur corps enseignant en modifiant les attentes mutuelles que les chercheurs ont entre eux.

Il n’est pas de meilleur moyen de faire naître une culture de la recherche qu’en favorisant des conditions saines pour les auteurs, et en encourageant des pratiques de bon aloi lors des confrontations entre chercheurs, lors des présentations publiques, lors des évaluations par des rapporteurs et lors de la publication dans des revues locales. Malheureusement,

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cet objectif fondamental est remis en question par la pression que subissent les chercheurs pour publier dans des revues internationales. Non seulement cela pousse les meilleurs à s’engager dans une course à la publication à l’étranger, mais cela anéantit les efforts pour produire des revues de qualité et favoriser une culture de la recherche au sein du pays.

Les chefs d’établissements ainsi que les décideurs des pouvoirs publics doivent résoudre un dilemme politique. Faut-il continuer à favoriser cet objectif immédiat qui consiste à s’assurer que les enseignants-chercheurs que l’on recrute, promeut ou auxquels on donne des postes à responsabilités ont un niveau de publications internationales équivalent à celui des autres pays ? Car même s’il est louable, dès lors qu’on lui accorde une trop grande importance, cet objectif de court terme empêche de développer une culture autochtone pour la recherche à travers des processus, des procédures et des revues locales. S’il est important aussi d’encourager une culture autochtone de la recherche, comment trouver un équilibre entre les deux ?

Même s’il n’existe pas de formule définitive pour développer une quelconque culture, et encore moins une culture de recherche, on peut quand même dégager quelques pistes pourvu que les superviseurs se laissent guider par la sagesse (et non la bureaucratie). Une première étape pourrait consister à alléger le poids du pouvoir hiérarchique qui pèse sur les chercheurs plus jeunes et plus créatifs, surtout si ceux qui sont au pouvoir ne sont pas eux-mêmes des chercheurs actifs. L’innovation elle-même, telle qu’elle se reflète à travers leurs travaux et leurs activités, pourrait être valorisée lors de l’évaluation académique. On pourrait s’intéresser notamment à cette innovation que serait le lancement de nouveaux types de revues avec des idées radicalement nouvelles. Tout ce qui augmente la mobilité des chercheurs au sein des établissements d’enseignement et des instituts de recherche peut contribuer à créer un marché externe pour les chercheurs de talent. En faisant baisser les coûts de transactions liés au changement d’établissement, on évitera que les chercheurs se trouvent pris au piège d’instituts dont les besoins ne correspondent ni à leurs capacités ni à leurs talents. Il sera sans doute judicieux de laisser davantage de place à la liberté et à la subjectivité en matière de recrutement, de promotion et de titularisation, n’était le problème du favoritisme qui surgit immédiatement. Mais si on peut réduire les coûts de transaction liés au changement d’établissement, les effets du favoritisme s’en trouveront compensés et les erreurs dues au caractère subjectif des procédures peut-être limitées, sinon corrigées, par le marché des talents. Il sera sans doute aussi utile de faciliter et d’encourager les rela- tions de long terme entre jeunes chercheurs. De manière générale, la plupart des systèmes d’enseignements supérieurs traitent le corps enseignant comme n’importe quel autre corps de la fonction publique que l’on peut gérer par des procédures bureaucratiques usuelles.

Manifestement, on peut le gérer de cette manière et on ne s’en prive pas. Mais on ne saurait dans ces conditions attendre qu’il produise l’innovation radicale qu’exige une culture de recherche, et de fait, on ne la voit pas arriver.

Au siècle dernier, de nombreux pays ont connu de rapides avancés dans bien des domaines, alors qu’ils s’en croyaient incapables en raison de barrières culturelles suppo- sées. Or, les êtres humains sont globalement les mêmes partout et les différences dans leurs accomplissements proviennent de l’image qu’ils ont d’eux-mêmes et des attentes mutuelles qu’ils ont entre eux. Ainsi, pourvu que l’on fasse les bons choix politiques, la recherche est susceptible de connaître de rapides avancés dans tous les pays, sans exception.

Août 2012

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Commentaires sur la note

« Pour une culture de la recherche » de Shyam Sunder

Pascal Petit

Directeur de recherche émérite du CNRS, ancien directeur du CEPN, Centre d’Économie de l’Université de Paris Nord

32, rue de Lyon - Paris 75012 pascal.petit@univ-paris13.fr

La note de Shyam Sunder aborde deux thèmes complémentaires d’une inégale com- plexité. Le premier porte sur les implications néfastes des stratégies de publication dans les grandes revues internationales prônées aux jeunes économistes ou gestionnaires par leurs hiérarchies. Le second thème évoque la nécessité de développer une culture nationale de la recherche dans les disciplines de l’économie et de la gestion. La note entend souligner que le premier processus, assez bien décrit, condamne largement la possibilité du second, ce qui serait dommageable. Si l’on veut bien suivre l’auteur sur tous les inconvénients d’un principe d’évaluation assez réducteur, il est plus difficile de voir dans le court format de cette note ce que l’on peut entendre par une culture nationale de la recherche en économie et gestion… quand bien même on partagerait cette intuition. Essayons simplement de reprendre l’argumentation de l’auteur en soulignant les points qui mériteraient d’être développés pour étayer la proposition centrale qui donne son titre à la note en question.

Publier ou périr. Il est de fait frappant que, dans tous les pays, les administrations de l’enseignement supérieur et de la recherche aient retenu, comme élément central de leurs évaluations des travaux des chercheurs (comme des unités) en économie et gestion, des publications dans un petit nombre de revues internationales, quasiment toutes anglo-saxonnes.

Comme le nombre de ces revues ne s’est pas multiplié dans les mêmes proportions que les chercheurs en question cela donne aux « grandes » revues établies une rente de situation exceptionnelle. Si l’on ajoute que leur mode de fonctionnement, le cercle des personnes actives concernées, comme les sujets privilégiés ont peu évolué, alors de fait l’internationa- lisation d’un principe d’évaluation, privilégiant les publications dans un cœur de « grandes revues internationalement reconnues », a des effets appauvrissant sur la discipline. Les stratégies de recherche des jeunes économistes et gestionnaires vont avant tout chercher à se positionner par rapport aux thématiques débattues dans les dites revues, favorisant un certain conformisme et/ou des innovations marginales. Cette situation est effectivement globalement contreproductive même si elle mériterait plus ample analyse pour tenir compte tant de l’arrivée, en nombre non négligeable, de nouvelles revues que du renouvellement des thématiques des grandes revues, ne serait-ce que pour répondre aux questions nouvelles que pose l’évolution du monde, de l’internationalisation des économies aux changements des techniques et des comportements de consommation.

Mais, à grands traits, l’effet réducteur de la diffusion internationale d’un principe d’évaluation trop centré sur les publications dans un noyau de grandes revues devrait être avéré. À cela, l’auteur ajoute que cet appauvrissement est encore plus marqué si l’on admet que cette centralisation fait perdre tout l’intérêt que l’on pourrait trouver à des analyses de questions plus spécifiquement nationales. On perdrait ainsi en diversité alors que la variété des capitalismes (pour reprendre une thématique contemporaine) offrirait des perspectives de renouvellement de nos disciplines largement inexploitées. Là encore l’argument est sans

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doute justifié. Le basculement du monde, que représente le nouveau poids économique de l’Asie ne s’est pas encore accompagné d’un quelconque mouvement dans la hiérarchie des publications. Il y a là pour le moins une certaine inertie mais l’on ne peut exclure que l’autorité de certaines publications asiatiques par exemple (en Chine, Japon ou Corée du Sud surtout) ne s’accroisse très sensiblement. La lenteur de telles évolutions reste manifeste si l’on tient compte de l’obstacle de la langue qui laissera pour des temps encore plus longs tous ses avantages à la langue anglaise.

Alors que faire face à de telles pesanteurs ? C’est en posant cette question que l’on perçoit à quel point les dérives dénoncées ci-dessus tiennent à des conceptions très sim- plistes de ce qu’est la recherche en économie et gestion. Le point de départ reste souvent un corpus de faits stylisés assez idéologisés (la vacuité de la référence à la notion de marché en serait l’exemple le plus fréquent) et de données produites en série (sans que l’utilisateur en connaisse le contexte) que des chercheurs mobiliseraient pour conforter ou confronter un certain nombre de thèses établies. Il y a peu de remise en cause de vérités établies, par exemple sur la pleine rationalité des acteurs ou sur les interactions en agents dans leurs choix de décision. Les stratégies des auteurs restent plutôt individuelles tendant à privilégier les contributions qui s’inscrivent dans un débat bien formaté et facilitent de ce fait leur publication. Les données sont nombreuses et leurs utilisations valorisées mais la réflexion critique sur leur signification et les conditions de leur élaboration est souvent réduite si ce n’est totalement absente.

Cette vision de la recherche fait fi d’une possible confrontation à un réel en permanente évolution ou à des hypothèses de départ différentes. Elle ignore aussi les apports qui peuvent découler des développements des autres disciplines comme de la confrontation entre dif- férentes approches. Mais une telle compréhension large et réactive du processus de recherche n’est pas du tout chose aisée. S’en remettre aux choix sélectifs, aussi biaisés soient-ils, de grandes revues internationales bien établies représente une position assez confortable. Un des « mérites » de la crise financière, où la responsabilité d’une grande partie des écono- mistes croyant aveuglément aux vertus de mécanismes de marché idéalisés est largement engagée, sera peut-être de forcer la profession à mieux connaître l’évolution des forces et faiblesses de la discipline dans un monde en permanente transformation.

Cette introspection, strictement nécessaire pour échapper à l’opprobre qui frappe nos disciplines, conduira en premier chef à une profonde révision de nos modes d’évaluation.

Une approche pragmatique serait déjà de regarder, au-delà des réputations, les pratiques des revues (modes de fonctionnement, champs effectivement couverts, attention portée aux évolutions du monde comme des autres disciplines scientifiques…). Mais l’on ne saurait s’en arrêter là. Il faut à l’évidence que les instances de tutelle aillent au-delà pour favoriser l’attention et les questionnements des chercheurs. L’attention aux apports interdisciplinaires ne doit pas s’arrêter à un vœu pieu sans conséquence sur les pratiques d’évaluation, ce qui rétroagit fortement sur les stratégies des jeunes chercheurs alors même que les moyens de communication et d’information devraient faciliter les apports croisés entre disciplines.

Cette « révolution » des pratiques des instances de tutelle ne pourra être qu’assez lente et n’exclura pas des erreurs de recommandation et d’évaluation mais la posture de réflexion critique que l’on suggère devrait contribuer à limiter les biais que présente un système d’évaluation trop passivement axé sur des revues internationales à forte réputation. Cette volonté d’analyse critique des processus de production scientifique dans nos disciplines

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est en elle-même porteuse d’un processus d’apprentissage qui devrait s’avérer rapidement bénéfique, même s’il ne faut pas sous estimer l’ampleur de la tâche. C’est ce même processus qui peut contribuer à développer une culture de la recherche au sens où l’entend sans doute Shyam Sunder. Cette culture peut avoir des dimensions nationales dans la mesure où elle s’appuie entre autres sur les façons de prendre en compte des spécificités des économies nationales comme sur le développement des autres disciplines avec leurs propres spécificités.

Pour la France, par exemple, nos disciplines peuvent à juste titre être influencées par le développement dans notre système d’enseignement et de recherche de disciplines comme la sociologie et les mathématiques. C’est assez dire que ces influences croisées peuvent avoir des implications complexes. C’est aussi rappeler que cette perspective d’enrichis- sement, par un regard croisé sur les démarches voisines comme sur le monde environnant, ne conduit pas à une culture de la recherche d’inspiration administrative à la Lyssenko mais au contraire à une recherche vivante libre qui sait tirer profit de toutes les intermédiations et techniques contemporaines à sa disposition. Cela conduira peut-être à moins d’auto- proclamation d’excellence mais à une démarche plus assurée d’aller dans le bon sens, ce dont nos économies dites du savoir ont un impérieux besoin.

Biographies

Shyam Sunder est professeur titulaire de la chaire J.L. Frank d’économie, comptabilité et finance à Yale (School of Management) ; il est professeur à la faculté d’économie et professeur adjoint à la faculté de droit de cette même université. Il est mondialement reconnu pour ses théories sur la comptabilité et pour son travail expérimental sur l’économie. Sa recherche porte également sur les normes comptables, la diffusion de l’information sur les marchés des valeurs mobilières, la théorie statistique de la valeur et la configuration des marchés électroniques. C’est un pionnier dans les domaines de la finance et de la macro-économie expérimentales. Il a obtenu de nombreuses récompenses pour ses travaux de recherche.

Shyam Sunder a publié six ouvrages et plus de 175 articles dans les plus grandes revues spécialisées dans la comptabilité, l’économie et la finance ainsi que dans des magazines destinés au grand public. Ses recherches actuelles portent sur les moyens de structurer les firmes de comptabilité et d’audit, tant aux États-Unis qu’au niveau international, en vue de trouver un équilibre judicieux et efficace entre observation de la réglementation et compétitivité sur le marché. Il a présidé l’American Accounting Association, a été directeur de recherche honoraire du Great Lakes Institute of Management, et chercheur indépendant associé au Center for Study of Science and Technology Policy.

Pascal Petit est économiste, il a publié des ouvrages sur la croissance, l’innovation et l’emploi, en particulier en Europe. Il étudie depuis plusieurs années les questions liées à l’internationalisation des économies et analyse en particulier les implications de cette mutation sur les institutions qui gouvernent la recherche, les modes de production et les déterminants de l’emploi.

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