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Plus on est vieux, plus on se protège : le sentiment de sécurité chez les personnes âgées

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Plus on est vieux, plus on se protège : le sentiment de sécurité chez les personnes âgées

RIOM, Loïc, et al.

Abstract

Cet article repose sur une étude qualitative menée auprès de personnes âgées vivant à domicile dans une grande ville de Suisse romande et portant sur leur sentiment de sécurité/

insécurité. Cette étude se distancie des approches abordant la question uniquement sous l'angle de la peur du crime. Nos résultats révèlent un important contraste entre la tendance des médias et des institutions à dénoncer l'insécurité à laquelle seraient exposées les personnes âgées et les préoccupations exprimées par ces dernières. En effet, si nos données montrent un mouvement de repli progressif sur le quartier, voire sur le domicile, peu de personnes rencontrées déclarent ne pas se sentir en sécurité. Pour les personnes interviewées, la question de la sécurité est d'abord associée à leur vulnérabilité croissante qui les amène à développer différentes parades pour limiter les entraves liées au vieillissement, notamment en matière de mobilité. Ces parades font partie du processus de déprise qui n'est pas à comprendre comme un renoncement à un monde perçu comme menaçant sur la seule dimension de [...]

RIOM, Loïc, et al . Plus on est vieux, plus on se protège : le sentiment de sécurité chez les personnes âgées. Retraite et société , 2015, vol. 71, p. 58-74

Available at:

http://archive-ouverte.unige.ch/unige:78873

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Loïc Riom, Cornelia Hummel, Leah Kimber et Claudine Burton-Jeangros

Département de sociologie, Université de Genève

plus on se protège » : le sentiment de

sécurité chez les

personnes âgées

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abs t r a c t s

Riom L., Hummel C., Kimber L., Burton-Jeangros C., 2015, « Plus on est vieux, plus on se protège : le sentiment de sécurité chez les personnes âgées », Retraite et société, n° 71, p. 58-74.

Cet article repose sur une étude qualitative menée auprès de personnes âgées vivant à domicile dans une grande ville de Suisse romande et portant sur leur sentiment de sécu- rité/insécurité. Cette étude se distancie des approches abordant la question uniquement sous l’angle de la peur du crime. Nos résultats révèlent un important contraste entre la tendance des médias et des institutions à dénoncer l’insécurité à laquelle seraient expo- sées les personnes âgées et les préoccupations exprimées par ces dernières. En effet, si nos données montrent un mouvement de repli progressif sur le quartier, voire sur le domicile, peu de personnes rencontrées déclarent ne pas se sentir en sécurité. Pour les personnes interviewées, la question de la sécurité est d’abord associée à leur vulnérabi- lité croissante qui les amène à développer différentes parades pour limiter les entraves liées au vieillissement, notamment en matière de mobilité. Ces parades font partie du processus de déprise qui n’est pas à comprendre comme un renoncement à un monde perçu comme menaçant sur la seule dimension de la criminalité, mais comme une adap- tation qui permet à la personne âgée de maintenir des activités porteuses de sens alors même que le processus de fragilisation la rend plus vulnérable. Porter attention aux défi- nitions subjectives de la sécurité et de l’insécurité et les interpréter à la lumière du pro- cessus de déprise souligne la nécessité de distinguer différentes facettes du sentiment de sécurité et de prendre en compte le contexte de vie des individus dans la compré- hension de ce sentiment.

The older you are, the more self-protective you become: older people’s sense of safety This article is based on a qualitative study of older people living in their own homes in a large city in French-speaking Switzerland, who were asked about their sense of safety or danger. This study distances itself from approaches that address this issue solely from the perspective of fear of crime. Our results reveal an important contrast between the tendency of the media and institutions to decry the alleged danger to which older people are exposed, and the concerns expressed by older people themselves. Indeed, although our data show a gradual withdrawal to the neighbourhood, or even the home, few of the people we interviewed reported not feeling safe. Our respondents primarily associa- ted safety with their own increasing vulnerability, which leads them to develop various strategies to counter limitations related to ageing, particularly mobility. Those strategies are part of the disengagement process, which should not be understood as a withdrawal from a world perceived as dangerous solely in terms of crime, but as an adaptation that enables older people to maintain meaningful activities as increasing frailty makes them vulnerable. Listening to subjective definitions of safety and interpreting them in terms of the disengagement process highlights the importance of considering different aspects of perceptions of safety and taking individuals’ living environments into account when interpreting those perceptions.

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l

e sentiment d’insécurité, a fortiori lorsqu’il s’agit des aînés, fait souvent l’ob- jet d’une grande agitation médiatique. Les spéculations à son sujet sont nom- breuses, notamment au sein du monde politique. Cependant, c’est un sujet qui a encore été peu étudié par les sciences sociales, en particulier, dans le champ de la recherche francophone (Roché, 1998 ; Dittmann, 2005 ; Le Goff, 2011). En effet, au-delà des constats généraux répétés depuis quelques décennies maintenant, les études spé- cifiques sur le sentiment d’insécurité chez les personnes âgées restent rares. La crimino- logie a relativement peu problématisé la question du vieillissement et différents angles morts de la recherche persistent (Hayman, 2011).

Généralement, le concept utilisé en sociologie ou en criminologie pour traiter de ce sujet est celui de la peur du crime (fear of crime) (Ferraro, 1995 ; Dittmann, 2005). Dittmann (2005) le définit dans les termes suivants : « La peur du crime constitue en ce sens une réaction émotionnelle primaire à des actes criminels, perçus comme une menace person- nelle. » Toutefois, ce concept pose plusieurs problèmes et n’a pas été encore clairement défini malgré de nombreux débats. La question généralement posée lors d’enquêtes quantitatives pour évaluer la peur du crime est la suivante : « Avez-vous peur de sortir seul le soir (ou la nuit) dans votre quartier ? » Cette formulation est problématique, car elle repose sur une conception du sentiment de sécurité qui est très étroite et individua- lisée, mais aussi parce qu’elle place l’individu dans une situation complètement hypo- thétique (Hollway et Jefferson, 1997). En d’autres termes, le concept de peur du crime revient à considérer l’insécurité uniquement comme une évaluation des risques de cri- minalité par l’individu, alors qu’il s’agit d’un phénomène complexe qui demande une compréhension plus large. Ferrero et LaGrange (1987) montrent à quel point ce concept est ambigu et pose des problèmes méthodologiques. Premièrement, la peur et la per- ception des risques s’influencent mutuellement. Deuxièmement, il est difficile de savoir si la question susmentionnée mesure bel et bien la perception que les individus ont du risque ou si elle opère une réduction d’un phénomène plus diffus (Ferraro et LaGrange, 1987 ; Dittmann, 2005). Enfin, troisièmement, la peur du crime fait uniquement référence au concept de crime, c’est-à-dire aux événements interprétés par les individus comme tels (Ferraro et LaGrange, 1987). Ceci exclut donc d’autres éléments qui peuvent por- ter atteinte au sentiment de sécurité des individus.

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En suivant Giddens (1991a), nous proposons de ne pas entendre le sentiment d’insécu- rité uniquement comme le fait d’une situation spécifique de risque ou de danger, mais de le replacer dans le contexte plus global dans lequel l’individu se situe. À partir de là, il s’agit de comprendre comment les individus appréhendent et donnent du sens à leur cadre de vie. De cette manière, il est possible d’avoir un autre regard sur le sentiment d’insécurité en partant des situations que les individus jugent comme problématiques et non en leur demandant de s’exprimer sur des situations hypothétiques. De plus, une approche compréhensive permet également de saisir comment le sentiment de sécurité/

d’insécurité se construit au fil des expériences biographiques.

Au sein de la population sur laquelle se porte notre attention, les expériences biogra- phiques sont en partie déterminées par le processus de fragilisation qui accompagne le vieillissement. Les individus âgés vivent ainsi un certain nombre de changements qui modifient leur rapport au monde. Lalive d’Épinay et Cavalli (2013, p. 27) considèrent ce processus de fragilisation comme une « constellation de conditions multiples ». Plusieurs éléments de la vie des aînés changent au fil du temps : perte de ressources, vulnérabi- lité accrue, perte de résilience ou rupture de l’équilibre entre l’individu et son environ- nement, d’où une difficulté croissante à préserver une relation harmonieuse entre soi et son environnement quotidien. Ces différents éléments constituent « un défi que la nature adresse à la volonté d’autonomie du vieillard » (Lalive d’Épinay et Cavalli, 2013, p. 30) et doivent donc être pris en compte dans la compréhension du sentiment de sécurité ou d’insécurité.

Toutefois, il est nécessaire de ne pas cantonner les individus dans un rôle passif face à ces transformations. Nous ne considérons pas que les personnes âgées sont « par nature » plus exposées, voire inévitablement livrées, au sentiment d’insécurité. Nous rejoignons les auteurs soulignant que les individus travaillent sur leurs peurs et cherchent à s’en pro- téger1 (Roché, 1998 ; Dittmann, 2005). Pour les aînés, ce travail d’adaptation se conjugue avec celui, plus général, permettant de faire face aux importantes transformations liées à leur vieillissement. Ce travail de réaménagement de l’existence a été théorisé par Caradec (2012 et 2014) sous le nom de déprise : « la déprise est ainsi un processus actif à tra- vers lequel les personnes qui vieillissent mettent en œuvre des stratégies d’adaptation de manière à conserver, aussi longtemps que possible, des engagements importants pour elle » (Caradec, 2012, p. 103). Considérer la déprise comme un simple processus de renoncement serait une erreur : il s’agit d’un travail de réaménagement – d’ailleurs Caradec (2012 et 2014) la qualifie également de reconversion-déprise. Les individus ne font pas que renoncer à des activités, ils les remplacent ou les transforment2. Ils opèrent des sélections, en choisissant de conserver certaines activités plutôt que d’autres. Il ne faut pas non plus comprendre la déprise comme un phénomène uniforme. Les stratégies de chaque individu dépendent du contexte, de l’état de sa santé ou de ses ressources.

La déprise est donc un ressort d’action sur le sentiment de perte de maîtrise lié au vieil- lissement. Elle n’est pas la source de la perte du sentiment de sécurité, mais un moyen d’action sur ce dernier. Cette approche, dépassant le cadre de la victimisation (réelle ou crainte), permet de mettre en avant l’inventivité des aînés ainsi que leurs stratégies pour agir sur leur condition (De Certeau, 1990).

1. Par exemple, en modifiant son itinéraire pour éviter certaines zones jugées risquées (Roché 1998).

2. Par exemple, quelqu’un pourra choisir de regarder la messe à la télévision plutôt que de se rendre à l’église tous les dimanches.

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Cet article s’inscrit dans un effort de compréhension du sentiment de sécurité chez les personnes âgées dans le but de dépasser la notion de peur du crime. Nous privilégions ainsi un questionnement qui porte sur le sentiment de sécurité comme élément fonda- mental de la qualité de vie, le sentiment d’insécurité étant conçu comme une atteinte au sentiment de sécurité. Questionner le sentiment de sécurité permet d’éviter l’écueil de l’essentialisation du sentiment d’insécurité à l’œuvre dans les débats médiatico-politiques – écueil qui guette également le sociologue. Comme le propose Roché (1998), nous nous intéressons au contexte de vie des individus pour comprendre comment se construit leur sentiment de sécurité. Cette approche compréhensive nous permettra de mettre en avant comment la vulnérabilité – psychologique et physique – joue un rôle important à la fois dans la perception du sentiment de sécurité ou d’insécurité, mais également dans les efforts déployés par les individus pour s’y adapter.

Notre étude, qui se veut exploratoire, a pour objectifs de cartographier les risques res- sentis par la population âgée, dans ses propres termes, ainsi que de comprendre quelles sont les stratégies développées par les aînés pour faire face à l’insécurité perçue. La première partie de l’article est consacrée au vieillissement et à ses conséquences sur la perception des risques. La deuxième décrit les stratégies mises en place par les aînés en s’intéressant à trois thématiques : le repli sur le domicile, le renoncement aux sorties nocturnes et les stratégies de mobilité et de protection des valeurs dans l’espace public.

En conclusion, nous tenterons de comprendre comment les expériences des individus génèrent différentes formes d’adaptation.

Méthodologie

Cette étude a été réalisée sur mandat de la Police régionale. Cette dernière entreprend depuis plusieurs années des études quantitatives sur le sentiment de sécurité et dési- rait changer de perspective en portant l’attention sur les représentations des indivi- dus. L’étude se base sur des entretiens qualitatifs menés auprès de 51 personnes entre janvier et avril 2014. Les participants à l’étude sont 36 femmes et 15 hommes de divers milieux sociaux, âgés de 70 à 92 ans, vivant seuls à domicile pour la majo- rité d’entre eux, dans différentes zones de la ville (centre et quartiers périurbains).

Nous avons, dans la mesure du possible, cherché à interviewer des personnes déjà entrées dans une phase de fragilisation, sans pour autant être encore dépendantes.

Le recrutement a été réalisé, pour la moitié des participants, au moyen des réseaux personnels de l’équipe de recherche, puis, par effet boule-de-neige, à partir de ces personnes. La deuxième moitié a été recrutée au travers des structures institution- nelles et associatives, entre autres des clubs d’aînés. Les entretiens semi-directifs ont abordé les thèmes suivants : la vie quotidienne et les problèmes de santé, la sécurité dans l’espace public, la sécurité dans l’espace privé et les attentes en matière de poli- tique de sécurité. Afin de ne pas arrimer notre étude à un discours sécuritaire, nous avons abordé les entretiens sous l’angle de la qualité de vie. Les thèmes abordés ont été assez larges afin de laisser s’exprimer les personnes interviewées sur plusieurs sujets. Du fait des délais imposés par le mandant, les entretiens ont été relativement courts : entre 11 et 69 minutes pour une durée moyenne de 35 minutes.

ENCADRÉ 1

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Compte tenu des contraintes temporelles de la recherche, les entretiens ont fait l’objet d’une « transcription analytique » combinant transcriptions in extenso de certaines parties jugées importantes et transcriptions descriptives et analytiques du reste des entretiens.

Les transcriptions ont ensuite donné lieu à une analyse thématique au moyen du logiciel TAMSAnalyser. Le codage a permis d’identifier les passages relatifs aux thèmes analysés, afin de pouvoir comparer les entretiens sur les différentes thématiques traitées (Lejeune, 2014).

Fragilité et sentiment de sécurité

Les entretiens permettent de faire un premier constat : le vieillissement change la nature des risques et modifie les enjeux autour de la sécurité. Ces changements sont induits par les différentes évolutions qui transforment les rapports de l’individu avec son corps et son environnement. Dans cette première partie, nous nous intéresserons à trois changements majeurs, liés à la fragilisation, et leurs conséquences sur le senti- ment de sécurité : la croissance de la fragilité personnelle, le mitage relationnel et les injonctions de la société.

De nouvelles limites pour le corps : faire face à sa vulnérabilité

Comme le notent Lalive d’Épinay et Cavalli (2013), le déclin des capacités cognitives et physiques est un élément central du vieillissement. À ce déclin s’ajoutent une installa- tion de la douleur dans le quotidien et l’apparition de nouveaux risques liés à l’avance- ment de l’âge. Par conséquent, les actions qui autrefois pouvaient paraître bénignes se révèlent être difficiles à réaliser. « Le risque principal se déplace. Auparavant, il surve- nait principalement de l’extérieur, le voici maintenant qui, porté par le flux de la fragili- sation, s’est également installé dans la personne elle-même. De telle sorte qu’au seul fait de vivre et d’accomplir les gestes de la vie quotidienne est associé un indice croissant de dangerosité. » (Lalive d’Épinay et Cavalli, 2013, p. 69) Par conséquent, les aînés sont – et se sentent – plus fragiles. Dans les entretiens, nous avons retrouvé l’expression de ces craintes liées à leurs nouvelles conditions physiques, notamment concernant leur capa- cité à pouvoir se soustraire à une situation indésirable. C’est le cas de Madame Roux3 qui se rend bien compte de ces changements et des conséquences qu’ils ont sur sa vul- nérabilité : « Bah disons que oui parce que j’ai pris de l’âge. J’ai moins d’équilibre.

Bon, je ne peux plus courir. Ce qui fait que c’est plutôt le manque de mobilité qui fait que j’ai davantage peur. Parce que, bon, si on me bouscule, je tombe. [Elle sou- pire] ça, c’est sûr. » [Madame Roux, 85 ans]

La fragilisation entraîne l’apparition de difficultés physiques – par exemple, difficulté à courir ou problèmes cardiaques – qui sont jugées handicapantes pour se sortir de situa- tions difficiles. Nous avons constaté chez une bonne partie de nos répondants une perte de confiance en leur capacité de réaction face à un problème, ce qui nourrit leur senti- ment de vulnérabilité. Sur ce point, nos résultats rejoignent la littérature. En effet, la vul- nérabilité, associée à une santé déclinante, est considérée comme un élément renforçant le sentiment de ne pas pouvoir se protéger en cas d’agressions ou d’actes malveillants

3. Les noms sont des pseudonymes.

ENCADRÉ 1 > suite

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(Cossman et Rader, 2011). Il est probable que la perception de la sécurité par les per- sonnes âgées prend en compte cette vulnérabilité lorsqu’elles anticipent des difficultés à faire face aux conséquences à la fois physiques et émotionnelles d’actes malveillants (Roché, 1998 ; Powell et Wahidin, 2008).

Par ailleurs, l’extrait de l’entretien avec Madame Roux introduit une autre probléma- tique liée à la fragilisation. Les conséquences de certains événements, qui étaient aupa- ravant sans gravité, changent avec la fragilisation du corps. Les chutes sont l’exemple par excellence de ces changements. C’est un élément connu dans la littérature de la sociologie du vieillissement. Effectivement, les chutes sont dangereuses pour les aînés, notamment à cause des risques de fracture du col du fémur qu’elles peuvent entraîner (Dargent-Molina et Cassou, 2008). Par conséquent, elles sont souvent l’une des grandes craintes des personnes âgées qui ont conscience de ces risques. Nous avons également retrouvé cet aspect auprès des répondants de notre étude. Un exemple particulière- ment parlant est celui des femmes qui nous ont expliqué qu’elles ne portent pas leur sac en bandoulière par peur de tomber. Alors que cette pratique peut paraître plus pru- dente parce qu’elle rend plus difficile le vol du sac, elle comporte un risque plus élevé de chute en cas de tentative de vol. Ces dames préfèrent donc prendre le risque d’un vol plutôt que d’une chute qui pourrait avoir de graves conséquences sur leur santé.

Les aînés se trouvent ainsi confrontés à des risques qui ne sont pas perçus en tant que tels par le reste de la population. Cela peut d’ailleurs entraîner des problèmes de partage de certains espaces avec d’autres générations qui ne se rendent pas compte des risques qu’elles leur font courir. C’est, entre autres, le cas de l’utilisation des trottoirs : « Vous comprenez, par exemple, tout à coup, il y a ces gamins qui vous contournent avec une trottinette à toute vitesse. Ils sont formidables. Ils vous évitent, mais il suffirait d’une fois où ils vous font tomber. Ou, par exemple, je vais volontiers, en été, au parc là- bas, je prends un livre ou des mots croisés, puis je suis bien là. Je suis à l’air et tout.

Je m’assieds sur un banc. Alors, quand je repars, souvent, j’ai peur parce que vous descendez l’allée, il y a des bicyclettes qui vont à toute vitesse dans ce parc, alors que c’est interdit et ils ne sonnent pas. On n’entend rien. Ils pourraient, je me dis, mon Dieu, si une me rentrait dedans, moi je suis presque tuée. » [Madame Morin, 90 ans] Madame Morin a l’impression que les autres utilisateurs des trottoirs, en l’oc- currence les enfants en trottinette et les cyclistes, ne se rendent pas compte des risques auxquels ils l’exposent. Une chute provoquée par un cycliste pourrait avoir de graves conséquences pour elle, alors qu’elle serait bénigne pour lui.

Enfin, les aînés sont également conscients qu’ils apparaissent plus vulnérables. Ils craignent donc d’avantage d’être la cible d’actes malveillants. C’est le cas de Madame Stähli qui exprime cette inquiétude : « Je suis tellement prudente ! J’espère que ça ne m’arrive pas. Mais, vous savez, personne n’est à l’abri d’une agression. C’est ces personnes âgées qui sont vulnérables. C’est eux qu’on recherche le plus. Un jeune homme ou une jeune femme, on ne va pas l’agresser, parce qu’elle a de la poigne, elle est vive.

Et puis ces petites vieilles qui trottinent dans la rue, c’est des proies. » [Madame Stähli, 85 ans]

Cet extrait montre comment le sentiment de vulnérabilité n’est pas seulement nourri par la propre conscience de sa fragilité physique, mais également par la croyance que cette fragilité est perçue par les autres. Roché met en avant que le sentiment de vulnérabilité

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se construit, notamment, à partir « d’un jugement sur la gravité de certains faits et de la faiblesse d’en limiter les conséquences », de la croyance « d’être une cible poten- tielle » et « en lien avec la capacité de maîtrise pratique ou symbolique de la situation (les capacités de se soustraire ou de faire face à un événement traumatisant) » (1998, p. 291). Ici, nous comprenons mieux comment la fragilisation individuelle et le sentiment de vulnérabilité s’entrecroisent. Les personnes âgées se sentent à la fois moins capables de réagir, font face à l’apparition de nouveaux risques et jugent être des cibles plus faciles d’actes malveillants.

Faire face au « mitage » relationnel

Le sentiment de vulnérabilité ne repose pas seulement sur la fragilité corporelle, il est aussi lié à l’insertion relationnelle de l’individu (Roché, 1998). Or, le vieillissement s’ac- compagne d’un phénomène de mitage du réseau social. Au fil du temps, les pairs dis- paraissent et les amis avec qui on partageait des sorties ou des activités ne sont soit plus là, soit plus capables de les pratiquer. À cela, peut s’ajouter l’isolement domestique qui suit la mort de l’éventuel conjoint. Plus les individus avancent en âge, plus ils sont expo- sés à la solitude et tendent à recentrer leurs relations sur leur famille et, en particulier, leurs enfants (Lalive d’Épinay et Cavalli, 2013). Nos répondants ont d’ailleurs souvent expliqué que c’est à leurs enfants qu’ils faisaient appel en cas de problème.

Cependant, en milieu urbain, les proches n’habitent pas toujours à proximité ; ils peuvent se trouver éparpillés dans l’agglomération, voire ne pas habiter dans la même ville. De plus, le maintien d’un contact régulier est mis à l’épreuve par la perte de mobi- lité des aînés. Dès lors, le fait d’avoir une sociabilité centrée sur une ou deux sphères composées des proches devient un handicap si ces derniers n’habitent pas à proxi- mité. Certains aînés peuvent se retrouver esseulés et ont tendance à être plus inquiets (Roché, 1998). Le fait de ne plus avoir quelqu’un à proximité qui puisse aider en cas de problème renforce le sentiment de vulnérabilité. Par exemple, Madame Hiller, se sentant moins en sécurité, a renoncé aux sorties nocturnes après la mort de son mari :

« Et puis avant je sortais avec mon mari tandis que maintenant ça fait plus de trois ans que je suis veuve. Oui, j’ai peur qu’on veuille m’arracher mon sac et que je tombe. » [Madame Hiller, 85 ans]

Le sentiment d’être plus isolé contribue à donner une place particulière à des figures classiques telles que le concierge. Plusieurs personnes interviewées relèvent à quel point il est appréciable de pouvoir compter sur sa présence. Comme l’explique très bien Madame Schmid : « Je me sens en sécurité. Qu’est-ce qui peut m’arriver d’autre ? Il y a un concierge qui s’occupe de tout l’immeuble. » [Madame Schmid, 83 ans] Le concierge est une figure de référence à qui l’on peut s’adresser. Il permet de construire un lien de familiarité avec l’immeuble et le quartier. Il est aussi un gage du maintien et du respect d’un certain ordre sécurisant pour les aînés. Enfin, il peut s’avérer d’une aide précieuse en cas de problème. Sa présence est donc un facteur sécurisant. À tel point que certains des répondants, habitant dans un immeuble sans concierge, se plaignent de ce manque, allant jusqu’à critiquer sévèrement la politique des gérances immobi- lières consistant à supprimer les concierges au profit de sociétés de nettoyage. À l’ins- tar de la dispersion des familles dans la ville, la disparition progressive des concierges est problématique pour des aînés qui, face à la perte de leurs ressources relationnelles, se sentent livrés à eux-mêmes.

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Répondre aux injonctions de la société

Les projections concernant les risques encourus par les aînés sont nombreuses. Elles viennent, elles aussi, remettre en question le sentiment de sécurité des personnes âgées.

Il ressort de nos entretiens que les aînés sont soumis à un discours omniprésent fait de recommandations et de mises en garde. Ce discours provient notamment des proches, des services d’aide et de soins à domicile, des médias et de la police. Les interviewés évoquent les différentes injonctions à la sécurité auxquelles ils sont exposés. Certains expliquent que leur entourage proche les enjoint à mettre en place des dispositifs de sécurité, comme demander une téléalarme ou renforcer la sécurité de la porte de l’appartement. Au-delà des proches, les personnes interviewées parlent de toutes les consignes qui leur sont adressées, par leur entourage, par les professionnels ou par « les gens » plus généralement.

Plusieurs évoquent ce qu’on pourrait qualifier d’ambiance insécuritaire en émaillant leurs propos d’incises du type « avec tout ce qu’on entend » ou « avec tout ce qu’on lit ». Les médias sont perçus comme une source qui alimente la perte du sentiment de sécurité : « Ah, ben oui, tout le monde le dit. Tout le monde. Tous les gens de mon âge. Tout le monde a peur. Et puis, déjà, quand on lit les journaux aussi. Y’a des faux policiers. Y’a des faux plombiers, mais je ne sais même pas si je demanderais s’ils ont un papier de la gérance immobilière ou comme ça. J’y penserais même pas.

[Elle rit] » [Madame Alessandri, 76 ans] Caradec (2012) signale que, pour des per- sonnes qui sortent de moins en moins, les médias « constituent, au même titre que les récits des enfants ou des aides à domicile, une source d’information et une ouverture sur le monde qui permettent de maintenir un sentiment d’appartenance à la société » (ibid., p. 74). En conséquence, tous les récits, notamment les faits divers concernant des agressions de personnes âgées4, viennent alimenter la représentation du monde que se fait l’aîné et influencent son interprétation des risques qu’il encourt.

Cependant, certaines personnes expriment la volonté de ne pas se laisser envahir par un sentiment de crainte qu’elles jugent exagéré. Plusieurs interviewés expriment d’ail- leurs leur frustration par rapport aux injonctions qui leur sont répétées et prennent de la distance face aux attentes exprimées. Ils ne sont notamment pas prêts à laisser ces préoccupations réduire leurs activités ou leur indépendance : « Écoutez, mon fils m’a dit : “Maman, ne sors plus le soir !” Mais écoutez, je suis condamnée à quoi ? » [Madame Caracas, 83 ans] Dans ce cas, alors que son fils lui demande de renoncer à sor- tir le soir, Madame Caracas s’y refuse. Roché (1998) utilise le concept de peur altruiste pour qualifier le souci ressenti pour les proches qui comptent. Cette notion est parti- culièrement orientée vers les catégories jugées vulnérables, telles que les enfants et les personnes âgées, pour lesquelles tout acte criminel suscite l’indignation sociale (Warr, 2000). Avec l’âge, le regard de la société change et des peurs, pas forcément en lien avec le vécu des aînés, sont projetées sur la population âgée. Le discours ambiant vient donc lui aussi nourrir l’inquiétude des aînés concernant les risques qu’ils encourent.

Toutefois, il serait abusif de penser que ce discours influence tous les individus de la même façon : nos entretiens font état de la diversité des réponses à ce discours, allant de l’adhésion à la rébellion.

4. Ces dernières années, les médias locaux se sont fait l’écho d’une vague d’arnaques à la qualité (faux pompier, faux plombier, etc.) en Suisse romande.

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Il faut donc faire la distinction entre la dimension individuelle et sociale du sentiment de sécurité. La fragilisation de l’individu et le mitage de son réseau relationnel ont des conséquences sur la première de ces dimensions. À l’inverse, les injonctions de la société renvoient à la dimension sociale qui correspond à des jugements de valeur sur l’état de la société, et renvoie au registre de la morale (Furstenberg, 1971, in Roché, 1998). Elle est donc particulièrement sensible aux discours politiques et médiatiques et, par consé- quent, fluctue en fonction d’événements jugés emblématiques de l’insécurité ou pré- sentés en tant que tels (Dittmann, 2005 ; Le Goff, 2011).

Stratégies et réadaptations face aux risques

Dans cette partie, nous verrons quelles sont les stratégies mises en place par les aînés pour se prémunir des dangers auxquels ils se sentent confrontés. Nous présenterons trois exemples de stratégies de réaménagement de la vie quotidienne : le retrait dans l’espace privé, le renoncement aux sorties nocturnes et les stratégies dans la vie de tous les jours autour des déplacements et de l’argent.

Le retrait dans l’espace privé

Plusieurs auteurs constatent chez les personnes âgées un repli sur l’espace privé (Caradec, 2012 ; Lalive d’Epinay et Cavalli, 2013). Nous n’avons donc pas été surpris de consta- ter que la grande majorité des personnes interrogées se sentent en sécurité chez elles.

Comme l’a montré Roché (1998), de manière générale, la familiarité est un facteur sécu- risant. Ceci est d’autant plus vrai pour les personnes âgées pour qui le domicile devient, selon l’expression de Veysset (1989, in Caradec, 2014), à la fois un repère – un lieu forte- ment identitaire pour l’individu face à un monde qui lui paraît de plus en plus étranger – et un repaire – un lieu dans lequel on se sent protégé. À l’inverse, l’extérieur devient, lui, étrange et menaçant. Nos entretiens montrent, par exemple, que la ville, en particu- lier le soir, est une sorte « d’ailleurs » (dans l’espace et le temps), un lieu qui devient non familier, voire étrange avec l’avancement en âge et la fragilisation de la santé. De façon graduelle, les personnes n’ont plus la motivation d’aller « en ville », car elles y ressentent de l’inconfort, voire de la crainte. Ce phénomène, bien connu en sociologie de la vieil- lesse, relève d’un processus identitaire se traduisant par un sentiment de désajustement du monde ou d’étrangeté au monde (Membrado, 1997 ; Clément, 2006 ; Caradec, 2012).

Les frontières géographiques de la familiarité – des lieux que l’on connaît, que l’on maî- trise, où l’on se sent bien et en sécurité – se resserrent avec l’âge : les déplacements se concentrent sur le quartier. Cet extrait d’entretien avec Madame Amel [87 ans] illustre bien cette centration sur le quartier repaire et repère ainsi que la crainte de « la ville » :

« J’évite de prendre les bus, je ne vais plus en ville, la ville m’effraye. Ça m’effraye.

Tout ce monde m’effraye. […] J’évite les grands magasins maintenant, parce que je suis débordée, je suis débordée et j’ai tous mes petits centres d’achat dans mon quartier et voilà. » Madame Amel n’est pas la seule à préférer les petits commerces aux grandes surfaces. Face à cette réduction du sentiment de sécurité et au malaise que la foule et l’agitation de la ville leur procurent, certains se tournent vers les endroits qu’ils connaissent le mieux et où ils se sentent encore à l’aise : le quartier. Par exemple, ils renoncent à leur médecin installé en ville pour se rendre dans le centre médical du quar- tier. Cette frontière symbolique, qui se resserre peu à peu autour du domicile, pousse à

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la réorganisation des activités du quotidien. Dans une étude portant sur la mobilité de personnes âgées résidant en banlieue, Lord et al. (2009) montrent qu’avec l’avancement en âge, les déplacements deviennent de plus en plus domocentrés5, même si le nombre de déplacements et le nombre de lieux fréquentés dans le même périmètre peuvent augmenter suite à un report (les magasins situés au centre-ville que l’on fréquentait auparavant sont remplacés par des commerces de proximité). Par conséquent, le quar- tier prend une place plus importante dans la vie des personnes âgées : non seulement parce qu’elles y passent plus de temps, mais également parce qu’il apparaît comme un lieu familier auquel elles sont, bien souvent, attachées (Buffel, Phillipson et Scharf, 2013).

Caradec (2012) identifie la difficulté à maintenir une familiarité avec son environne- ment face à l’étrangeté croissante du monde comme un des enjeux centraux du vieillis- sement. Les personnes âgées ont le « sentiment qu’elles n’ont plus vraiment leur place dans la société d’aujourd’hui » (ibid., p. 106). Ce sentiment est renforcé par la perte des contemporains ou l’éloignement de la famille. Dès lors, afin de pouvoir encore être à l’aise en dehors de chez soi, les aînés doivent chercher à maintenir des prises sur le monde extérieur afin de garder une certaine familiarité avec ce dernier. Dans ce contexte, toute nouveauté ou transformation de l’environnement nourrit une certaine méfiance, car elle vient fragiliser ce monde. Par exemple, des travaux, le développement de lieux de sorties nocturnes ou les changements démographiques du quartier peuvent être des facteurs déstabilisants. De plus, l’effort du maintien d’un rapport avec le monde se trouve, entre autres, confronté à la difficulté de construire des relations avec des voisins qui sont éloignés socialement (par leur âge ou leur mode de vie) : « Oui, très peu [de contacts]. Vous savez. Maintenant, les mamans travaillent. Alors on voit personne toute la journée. J’ai un jeune couple qui est là depuis Noël, qui habite là avec deux garçons. Une jeune femme qui vient des fois avec ses garçons, y’a un va-et-vient et puis, elle part de nouveau. Je n’ai aucune relation. Et puis à côté, la dame, mais elle travaille. Elle a un petit chien gentil. Et j’entends des fois « wouf wouf » qui sort et c’est elle, ou je ne sais pas si elle a un fils ou une fille qui dort là… Non, j’ai très peu de [contacts]. » [Mme Mottet, 89 ans]

Il est parfois difficile pour les aînés de construire des relations avec des personnes qui n’ont pas le même mode de vie. De plus, les sous-locations6 rendent également beaucoup plus difficile l’interconnaissance avec le voisinage et mettent à rude épreuve la familiarité au sein de l’immeuble. Monsieur Bujard exprime ce sentiment désagréable qu’est de trou- ver un inconnu dans son immeuble : « Le problème c’est qui y a pas mal des appar- tements qui sont sous-loués, et puis on rencontre des gens qu’on ne connaît pas. Et puis ça change beaucoup. Ça change énormément. » [Monsieur Bujard, 80 ans] Ces changements engendrent une perte de contrôle sur l’environnement immédiat qui est problématique pour le sentiment de sécurité dans le quartier et l’immeuble. Certains interviewés racontent qu’ils se retrouvent entre « anciens » de l’immeuble. Cependant, en raison des décès et des problèmes de mobilité, ces réseaux peuvent se trouver forte- ment diminués et ont tendance à disparaître. Les changements dans le quartier et l’arri- vée de nouvelles personnes avec qui les personnes âgées ne parviennent pas à recréer de la familiarité mettent à mal leur sentiment « d’être chez soi » (Blokland, 2003 ; Buffel,

5. Le terme domocentré définit des pratiques centrées autour du domicile.

6. La pratique de la sous-location est très courante en Suisse romande en raison de la situation immo- bilière difficile.

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Phillipson et Scharf, 2013). Plusieurs de nos interviewés ont d’ailleurs montré une cer- taine nostalgie en parlant de leur quartier.

De la même manière, les intrusions dans le domicile – tel un cambriolage – ou dans l’im- meuble (par exemple, des jeunes fumant des drogues douces dans l’allée) contribuent à ce malaise. Elles peuvent même être, dans certains cas, traumatisantes. C’est le cas des cambriolages. Madame Vonlanthen a vécu ce genre d’épisode lorsqu’elle a trouvé un cambrioleur chez elle en rentrant de courses : « [Silence] Ça fait un drôle d’effet. […]

Trouver le type chez moi, j’aurais jamais pensé. Non. [Silence] Pour ça, ils ont tous été super avec moi. Mais pendant longtemps, j’avais – le moindre bruit, encore maintenant, je me lève tout de suite pour voir si ma porte est bien fermée. » [Mme Vonlanthen, 86 ans]

Un tel événement est vécu comme une atteinte profondément déstabilisante, d’autant plus chez les personnes âgées pour qui le domicile est si important. De plus, un cam- briolage s’accompagne souvent de la disparition d’objets – en particulier des bijoux – qui ont une valeur aussi bien sentimentale que monétaire. Face à ces intrusions, les aînés se protègent en renforçant les frontières de leur domicile. Ils installent des barres à leur porte, un système d’alarme ou renoncent à ouvrir la porte lorsqu’ils n’attendent per- sonnes. Ils s’appuient aussi, s’ils en ont la possibilité7, sur des personnes-ressources : la famille, les voisins ou le concierge.

De manière générale, le retrait dans l’espace privé et, plus particulièrement, au domicile permet aux personnes âgées de se protéger de l’extérieur. Le rétrécissement des fron- tières de l’activité conduit à une perte de familiarité avec la ville et une réorganisation des activités dans le quartier. Ces lieux familiers apparaissent comme des espaces pro- tecteurs dans lesquels on se sent davantage en sécurité. Le contenu de nos entretiens rejoint d’ailleurs sur ce point les résultats statistiques (Le Goff, 2011). Le maintien de la familiarité avec l’environnement proche du domicile est toutefois un travail constant qui est mis à rude épreuve par les transformations du quartier. Le quartier et le voisinage restent, en tant que zone intermédiaire entre le logement et la ville, des lieux qui offrent des ressources importantes en matière d’accès aux biens nécessaires à la vie quotidienne, de moments de sociabilité et de services (reçus et rendus). Dans ce contexte, le quar- tier est un déterminant important du sentiment de sécurité des personnes âgées (Buffel, Phillipson, et Scharf, 2013 ; De Donder et al., 2013).

Le rapport à la nuit

Une autre frontière symbolique apparaît dans les entretiens. Il s’agit de la nuit. La majo- rité des personnes interrogées mentionnent cette dernière comme un facteur désécu- risant. Les craintes prennent deux formes : le renoncement aux sorties le soir (ou leur évitement, la sortie le soir étant possible mais exceptionnelle) et le maintien des sorties mais avec des stratégies réduisant les risques perçus. Il est important de noter que ce cas est symptomatique des entrecroisements entre la perte du sentiment de sécurité et les autres facettes de la déprise. Effectivement, les personnes qui ne sortent plus imputent ce renoncement tant aux problèmes de sécurité qu’à la fatigue, au manque de motiva- tion ou d’occasions. Le rétrécissement de cette frontière, temporelle cette fois, pousse

7. Voir supra, section « Faire face au mitage relationnel ».

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les aînés à renoncer à certaines activités comme les sorties du soir : « Je me suis vue étant jeune rentrer à trois heures du matin de n’importe où. Je ne rentre pas tard.

D’abord parce que je n’ai pas l’âge aussi où on fait des nuits folles, vous voyez. C’est ça aussi. Si j’avais 25 ans et que j’aurais envie de danser, probable que j’irais danser.

Voilà, parce que quand on a vraiment envie de vivre certaines choses… Moi j’ai pris des risques étant jeune quand j’allais danser et tout ça. J’ai eu certains problèmes, mais c’est normal. L’envie de vivre est telle, vous prenez aussi le risque. Tandis que maintenant, plus on est vieux, je trouve, plus on se protège. Alors… c’est vraiment effrayant. On se protège, parce qu’on se sent plus fragile, on se sent tout ça alors, voilà quoi. » [Madame Piccand, 84 ans]

Face à la crainte que provoque la nuit, nombreux sont ceux qui ont renoncé aux sorties nocturnes. Plusieurs de ces personnes signalent qu’elles ont reporté leurs sorties (cinéma, spectacle) à l’après-midi pour être de retour chez elles avant le soir, profitant notam- ment de toute une offre culturelle à l’attention des aînés adaptée à ce besoin. D’autres développent des activités différentes pour occuper leurs soirées, comme regarder la télévision ou lire. Parmi les répondants qui sortent parfois le soir, beaucoup décrivent leurs itinéraires à l’aller et au retour, en explicitant les choix relatifs à ceux-ci : ils évitent les ruelles sombres, les parcs, et les grandes places mal éclairées. Les itinéraires privilé- giés sont ceux où se mêlent éclairage, passage automobile et présence d’autres piétons sans pour autant qu’il y ait trop de monde.

La littérature montre que la nuit influe sur le sentiment de sécurité. « D’un point de vue éthologique, la nuit transforme l’espace et augmente la vulnérabilité : elle diminue la capacité d’être alarmé, restreint l’étendue de la zone d’aguets et donc la possibilité d’anticiper et de se soustraire à une situation non désirée. » (Le Goff, 2011, p. 292) Les personnes âgées sont d’autant plus sensibles à cette différence entre le jour et la nuit que certaines de leurs capacités – comme la vue – sont altérées. Les solutions peuvent être le renoncement à des sorties après la tombée de la nuit ou l’aménagement d’iti- néraires qui empruntent des rues illuminées et fréquentées. La gestion de la nuit est un exemple parlant de la manière de réadapter son existence selon le schéma de la déprise.

Il est intéressant de noter que, dans ce cas, la réponse à la problématique de la nuit est plutôt uniforme et une large majorité des aînés rencontrés renoncent aux sorties et leur substituent d’autres activités.

Les stratégies quotidiennes dans l’espace public

Lorsqu’ils ne renoncent pas à une activité, les aînés sont amenés à aménager leur vie quotidienne pour se prémunir des risques. Dans ce but, ils développent de multiples stratégies. Celles-ci concernent notamment deux aspects vécus comme problématiques dans l’espace public : le transport sur soi d’argent ou de valeurs et les déplacements. Au contraire des sorties nocturnes, ces deux activités diurnes sont difficilement substituables ou évitables. Les individus sont donc amenés à s’adapter. Nous avons d’ailleurs été sur- pris par la créativité dont font preuve les aînés et la diversité des stratégies.

Pour commencer, le transport de valeurs sur soi est vécu comme un facteur aggravant le risque d’être pris comme cible par un agresseur. Plusieurs situations éveillent l’attention des aînés. Un moment particulièrement délicat est le retrait d’argent : certains renoncent à utiliser les distributeurs extérieurs et n’utilisent que les distributeurs situés à l’intérieur

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des bâtiments ; d’autres n’utilisent le distributeur qu’en étant accompagnés, générale- ment par un proche ; d’autres encore n’utilisent pas du tout les distributeurs et ne vont qu’au guichet (de la banque, de la Poste). Lors de cet exercice, certaines attitudes sont adoptées pour éviter des problèmes : parler doucement lorsqu’on demande de l’argent au guichet, regarder autour de soi lorsqu’on va au distributeur, composer le code à l’abri des regards. Dans cet extrait, Monsieur Wallin raconte ses choix opérés quant au lieu, ainsi que l’attention qu’il déploie lors d’un retrait d’argent : « Je vais au bancomat, oui, ou bien au guichet, ça dépend. J’aime bien aller au guichet, mais autrement, le banco- mat, je vais au centre commercial ou je vais sur la commune. En principe, j’aime bien aller le matin, quand il n’y a pas encore trop de monde. Il faut faire tellement atten- tion aujourd’hui, voilà. Ah oui, il faut toujours regarder un petit peu… Maintenant, si je vais chercher par exemple de l’argent en fin d’après-midi, sur la commune, tout d’un coup, si on a besoin d’une nécessité, je regarde toujours avant de rentrer dans le local, qui est dans l’environnement, parce que vous savez, à un certain âge, on se fait bousculer et puis on n’a plus les réactions de 20 ans. En principe, je vais toujours, mais je regarde bien, oui. Il faut être vigilant. » [Monsieur Wallin, 78 ans]

La question des moyens de paiement fait également l’objet de diverses stratégies. Certains font attention à ne pas avoir d’argent liquide sur eux, ou très peu : uniquement de quoi faire leurs courses ou une somme de dépannage. L’argent liquide peut être aussi caché – dans une poche intérieure ou une pochette près du corps. Quelques femmes racontent même s’être mises à porter des pantalons pour éviter de transporter leur argent dans leur sac. Le sac à main est d’ailleurs un enjeu important pour certaines aînées. Sachant qu’il est une cible facile, elles y renoncent parfois ou le portent vide. De manière générale, elles font attention à ce que le sac soit bien fermé. Une alternative consiste à renoncer à l’argent liquide et à utiliser uniquement sa carte bancaire. À l’inverse, une autre méthode consiste à n’avoir jamais sa carte de crédit sur soi. Certains refusent même catégoriquement ce moyen de paiement allant jusqu’à la destruction de leur carte dès qu’ils en reçoivent une. Enfin, des répondants mentionnent qu’il ne faut pas « montrer » l’argent, autrement dit, ne pas porter de bijoux, de belles montres pour ne pas tenter les voleurs.

Les déplacements dans l’espace public constituent un deuxième point délicat, car ils sont vécus comme des moments dangereux, notamment à cause des risques de chutes.

Par conséquent, certains ont adopté une aide à la mobilité : canne, déambulateur ou même caddie de grand magasin (pour s’en faire un appui) : « J’y vais à pied ou alors avec un… c’est encore mieux. Avec un caddie de… les grands magasins, parce que je peux m’appuyer. C’est très, très confortable. Et puis je conduis avec les coudes.

C’est ce que j’ai trouvé de mieux. » [Monsieur Balmat, 75 ans]

L’horaire choisi est aussi le résultat d’une réflexion. Certains privilégient les moments de la journée où ils sont le plus en forme – par exemple, la matinée. Les personnes inter- viewées font également attention à fréquenter les commerces, les services et les trans- ports publics en dehors des heures de pointe. Dans les transports publics, l’évitement de la foule réduit le risque de bousculade, ainsi que l’exposition aux pickpockets. Comme nous l’avons vu dans le cas de la nuit, les itinéraires sont également soumis à un aména- gement. Les zones ayant mauvaise réputation ou les espaces peu fréquentés sont évi- tés. De la même manière, certaines personnes changent de trottoir lorsqu’un groupe de jeunes s’y trouve. Les personnes ayant des problèmes de mobilité repèrent les WC, les bancs ou les passages pour piétons réglés par des feux, qu’elles privilégient de manière

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à pouvoir être sûres de traverser. Les déplacements en voiture font aussi l’objet de stra- tégies, entre autres dans le choix de la destination. Ainsi, certains renoncent aux dépla- cements vers des endroits n’offrant pas de places de parking à proximité et obligeant à faire un long déplacement à pied.

Les moyens de déplacement suivent également des choix longuement réfléchis. Certains renoncent aux transports publics face, par exemple, à leur difficulté pour monter les marches des bus : « Je suis toujours en voiture. Je ne prends plus les bus. Vous savez pourquoi ? Nous avons un service de bus qui ne s’arrête pas loin, seulement, les bus c’est pire encore que les trams, parce que vous avez des secousses et si vous n’avez pas une place assise, vous risquez de tomber et très souvent, j’ai remarqué comme je me déplace plus difficilement, il y a un certain nombre de personnes qui des- cendent, j’arrive au moment où les personnes qui montent, montent déjà, si bien que c’est toujours difficile pour moi de prendre le bus. » [Madame Caracas, 83 ans]

Ici, Madame Caracas met en exergue la difficulté que constitue pour elle l’utilisation de transports publics qui ne sont pas adaptés à ses besoins. D’autres utilisent la voiture pour éviter de devoir marcher, même quand il s’agit d’aller au centre commercial voi- sin. Les utilisateurs de transports publics, eux, font attention à toute une série de choses comme monter à l’avant du bus pour être vus par le conducteur, éviter les groupes de jeunes qui sont synonymes de bruit et de bousculades ou privilégier les trams et les bus qui ont un accès sans marche.

Chacun développe des stratégies personnelles qui lui permettent de faire face à sa propre situation de vulnérabilité. Certains sont très fiers d’ailleurs de montrer toute leur ingé- niosité. Ils vont même parfois jusqu’à critiquer leurs contemporains qui ne font pas, selon eux, suffisamment attention. Caradec (2012) souligne que les stratégies de réadaptation et de réaménagement de la vie varient selon les croyances, les ressources et les expé- riences des individus : « la fragilité exige de la personne un travail de réaménagement successif de son mode de vie, qui demande de l’énergie et de l’inventivité » (p. 61).

Conclusion

La compréhension des stratégies visant à maintenir, voire à renforcer le sentiment de sécurité est bien sûr complexe. Notre étude n’ayant pas été spécifiquement organisée autour de ce thème, il est difficile d’en tirer des enseignements définitifs. Cependant, nous pouvons proposer quelques pistes. Il semble que ces différentes adaptations résultent d’une prise de conscience réflexive par l’individu de sa condition ou des risques liés à une situation donnée. Nous inscrivant dans le sillage des travaux menés sur la déprise, nous suggérons que l’individu est poussé à réaménager sa vie suite à des expériences qui constituent un apprentissage de sa condition. Le phénomène n’est donc pas recti- ligne, mais progresse par à-coups. La prise de conscience des nouveaux risques liés à la fragilisation est le fruit d’événements qui en déclenchent la perception aussi bien que de la transformation du mode de vie.

Cette approche est précieuse pour comprendre les pratiques des aînés face aux enjeux de sécurité auxquels ils sont confrontés. Comme le note Roché (1998, p. 288), « le fait d’être victime conduit à rechercher des protections ». Nous l’avons vu, les aînés font preuve d’une très grande créativité pour trouver des solutions pour se protéger. L’élaboration

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de ces stratégies est le fruit d’un long travail, fait d’échanges avec autrui et d’expériences vécues. Souvent, c’est en nous racontant un événement que les personnes interrogées nous expliquent comment elles ont adapté leurs pratiques : « Depuis que je suis sor- tie de l’hôpital, parce que je suis tombée du lit, au début de l’année passée, fin jan- vier, je suis tombée du lit, pendant la nuit et j’arrivais pas à venir au téléphone et j’ai rampé jusque-là, mais puisque je n’ai pas pu me relever, j’ai ça maintenant. [Elle montre sa téléalarme au poignet] » [Madame Manson, 84 ans]

Dans cet extrait, on comprend comment une expérience provoque chez la répondante une réadaptation de ses pratiques. Madame Manson, face à un nouveau risque – la chute – lié à son vieillissement, est amenée à trouver de nouvelles solutions pour garantir sa sécurité. Roché (1998) qualifie ce phénomène de peur en réaction. Il l’oppose à la peur d’anticipation. À la différence de la peur d’anticipation, la peur en réaction est induite non par la conviction de sa vulnérabilité, mais par l’expérience de celle-ci. Cette logique rejoint l’idée de facteur déclencheur de la déprise : lorsqu’un individu se rend compte par lui-même de sa propre vulnérabilité, il change son comportement. Ce schéma de réac- tion permet de compléter la compréhension du sentiment de vulnérabilité des aînés, en le considérant comme étant le fruit d’une fragilisation et la conséquence d’expériences.

Notre étude montre que les aînés ne sont pas passifs face aux changements qui affectent leur sentiment de sécurité. Au contraire, ils font preuve d’une très grande créativité et d’une importante capacité d’adaptation. Ils travaillent activement au réaménagement de leur vie. Les adaptations qui nous ont été rapportées peuvent être assimilées à ce mouvement plus large du réaménagement de la vie au quotidien décrit dans la littéra- ture sous le terme de déprise (Caradec, 2012 et 2014). Comme nous l’avons vu au sujet des stratégies élaborées autour de la nuit, les motivations d’ordre sécuritaire peuvent en rencontrer d’autres. Ces pratiques s’inscrivent donc plus largement dans l’effort des personnes âgées pour réaménager leur rapport à leur environnement. Et, à ce titre, la transformation de la perception de la vulnérabilité est un fort initiateur d’adaptation.

Autour du processus de déprise, les aînés en viennent à se replier sur l’espace du domicile qui reste familier, et parviennent ainsi à préserver leur sentiment de sécurité en adaptant leurs pratiques. Si l’on peut y voir une réduction de leur qualité de vie, les travaux en géron- tologie montrent que l’évaluation de celle-ci change avec l’avancée en âge (Wilhelmson et al., 2005), prenant en compte la déprise progressive. Pour le dire autrement, le sentiment de désajustement étroitement associé au vieillissement réduit la sécurité ontologique de l’individu, définie par Giddens (1991b, p. 92) comme « la confiance que la plupart des êtres humains ont dans la continuité de leur identité et dans la constance des environne- ments d’action matériel et social ». Ces processus sont centraux dans la compréhension du sentiment de sécurité chez les aînés.

L’approche compréhensive que nous avons adoptée a permis de montrer que le sen- timent de sécurité dépasse largement la définition seule de la peur du crime. Il a été montré que le sentiment d’insécurité est influencé par de nombreux facteurs, comme le genre, la classe sociale, l’âge, l’état de santé ou encore l’isolement social (Acierno et al., 2004). Notre étude exploratoire ne permet pas de mettre clairement en lumière le rôle de ces variables dans le sentiment de sécurité et les stratégies mises en place. Il serait pour cela nécessaire de mener des entretiens biographiques approfondis. Nous espérons cependant avoir convaincu de la nécessité de comprendre le sentiment de sécurité des

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personnes âgées au-delà de la seule peur du crime. Notre étude appelle donc à pour- suivre les pistes ouvertes par une approche qualitative et compréhensive de la question.

Le sens que donnent les aînés au sentiment de sécurité contribue également à éclai- rer le décalage entre l’augmentation du sentiment d’insécurité avec l’âge tel qu’attesté par les études quantitatives et la plus faible probabilité des plus âgés d’être victimes d’actes malveillants (Hayman, 2011 ; Powell et Wahidin, 2008 ; Le Goff, 2011). Ce déca- lage nécessite de mieux comprendre l’articulation entre exposition objective et subjec- tive aux risques. La perception différentielle de la sécurité est très bien illustrée par les propos de Madame Boris lorsqu’elle parle du quartier de P. Ce quartier a très mauvaise réputation dans la ville étudiée et fait régulièrement l’objet de mesures sécuritaires. Alors que pour la population, les prostituées de rue exerçant dans ce quartier constituent un problème, voire une source de crainte, Madame Boris leur attribue une fonction de sur- veillance de l’espace public : « Ma coiffeuse est à la rue X, là y’a des dealers, mais je me dis que je n’ai pas une tête à acheter de la drogue. Je me dis… ils me regardent parce que si jamais, quand même cette vieille dame elle voulait de la cocaïne, mais j’ai pas l’impression qu’ils me veulent du mal. C’est plein de femmes prostituées donc je crois que… je ne pense pas qu’on m’agresserait là. » [Madame Boris, 70 ans]

Les propos de Madame Boris nous rappellent que l’étude du sentiment de sécurité chez les aînés doit se méfier du piège durkheimien de la prénotion. En effet, la projection de représentations socialement situées et propres à des adultes en bonne santé a pour consé- quence de gommer les effets du vieillissement, alors même que, comme nous l’avons montré, le vieillissement est un élément central de la couleur particulière que prend le sentiment de sécurité chez les aînés.

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