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Interdictions de fumer : qui sont les gagnants ?

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Revue Médicale Suisse

www.revmed.ch

21 décembre 2011

actualité, info

avancée thérapeutique

Consacré au tabac, c’est un pas- sionnant dossier que publie la re- vue mensuelle Prescrire 1 dans sa livraison datée de décembre ; un dossier consacré au tabac ou plus précisément aux effets des inter- dictions croissantes de fumer dans les espaces publics. Est-il possible d’évaluer leur impact sanitaire tant chez les consommateurs que chez les non-fumeurs exposés au tabagisme ? C’est là une bien belle question de santé publique. Sa ré- ponse concerne désormais directe- ment les dizaines de millions de personnes qui, dans les pays in- dustrialisés, ont appris à vivre avec des mesures législatives et réglementaires prohibant la con- sommation de tabac au nom des méfaits du tabagisme dit passif.

«Pour les fumeurs les interdictions de fumer réduisent le temps et les espaces disponibles pour fumer, pour autant incitent-elles à moins fumer, à fumer plus ou à cesser de fumer ?» s’interroge Prescrire. Il n’est pas si simple de répondre

tant la lutte contre le tabac emprun- te des voies diverses et complé- mentaires concernant les haus ses récurrentes des prix, les informa- tions sur la nocivité des cigarettes ou les possibles aides au sevrage.

De plus, les conséquences des in- terdictions chez les fumeurs ont été moins étudiées que celles pou- vant être observées chez les non- fumeurs qui constituent avant les autres la population-cible à proté- ger. Plusieurs études ont toutefois cherché à évaluer la prévalence du tabagisme avant et après les mesures d’interdiction. Une étude espagnole et une autre, écossaise, (les deux du même type et de même ampleur) n’ont pas pu mettre en évidence de différences significatives.

En Italie (mesures d’interdiction prises en 2005), la prévalence du tabagisme serait passée de 26,2%

(en 2004) à 24,3% (en 2006) ; une différence statistiquement signifi- cative dans l’ensemble de la popu- lation et ce chez les hommes et les

femmes de moins de 45 ans. Mais peut-être l’interdiction de fumer n’a-t-elle fait qu’amplifier ici ou là une tendance globale à la baisse observée dans les années 1990. En Norvège, une baisse de la préva- lence du tabagisme (quotidien et déclaré) a été recensée dans une cohorte d’employés du secteur des bars et des restaurants : 3,6% à quatre mois maintenue onze mois après l’interdiction. Il semble ne pas en être allé de même en Irlan de : petite diminution entre 2004 et 2005 potentiellement compensée par une remontée l’année suivante.

Dans ce paysage, la France occupe une position quelque peu para- doxale. La part des fumeurs (quo- tidien et déclaré) parmi les 15-75 ans a augmenté de 2% entre 2005 et 2010 (de 27,1 à 29,1%). Cette aug- mentation est intervenue en dépit des interdictions de fumer dans les lieux publics de 2007 et 2008.

C’est en outre la première aug- mentation observée depuis le dis- positif législatif de lutte promulgué en 2001 (connu sous la dénomina- tion de Loi Evin). Ce sont les fem- mes (et tout particulièrement celles âgées de 45 à 64 ans) qui sont à l’origine de ce phénomène.

«Selon la synthèse du Réseau Co- chrane de 2010, la plupart des

études ayant analysé l’impact des interdictions sur la consommation de tabac ont montré une diminu- tion du nombre moyen de ciga- rettes fumées» résume Prescrire.

Deux synthèses ont quantifié cette baisse comme étant en moyenne de trois cigarettes au moins par jour ; sans toutefois que l’on sache si les fumeurs n’ont pas compensé la différence numérique par de nouvelles pratiques d’inhalation.

Deux études conduites aux Etats- Unis dans des milieux profession- nels différents (interdiction com- plète ou interdiction limitée) vont dans le même sens : diminution de la consommation entre 2,5 et 1,5 ciga rettes quotidiennes. Des ob- servations parcellaires faites en Norvège et en Irlande semblent également converger.

Plus généralement, il apparaît aujourd’hui que les mesures d’in- terdiction de fumer ont réduit de manière importante les expositions aux fumées de tabac dans l’air ambiant. La diminution aux parti- cules fines et à certains composés cancérogènes est variable mais peut atteindre de 80 à 90% dans certains espaces publics. La réduc- tion des imprégnations des adul tes non fumeurs et des enfants a pu être évaluée de manière objective par le dosage des taux sériques ou salivaires de cotinine.

Différentes études ont établi une amélioration de la santé respira- toire chez les employés du secteur hôtelier et des bars. Elles ont en général montré une évolution fa- vorable de certains symptômes comme toux, respiration sifflante, irritation de la sphère oculaire ou des voies aériennes supérieures ; et ce tant chez les fumeurs que chez les non-fumeurs. Les impacts directs des interdictions de fumer sur la fonction respiratoire (débits, volumes) varient toutefois selon les études. Au Canada et aux Etats- Unis, on a également pu noter une réduction des admissions hospita- lières pour asthme.

«L’impact de ces mesures sur la survenue de maladies à long terme liées au tabagisme passif, tels les cancers, ne peut encore être me- suré, souligne Prescrire. Toutefois dans plusieurs régions du monde, une baisse du nombre d’hospitali- sations pour syndrome coronaire aigu ou infarctus du myocarde a été observée après l’entrée en vi- gueur des interdictions, mais pas en France.» Ces études émanent de travaux menés au Canada, aux

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1 Environnement : Interdictions de fumer : une efficacité réelle pour les non-fu- meurs, mineure pour les fumeurs. Rev Prescrire 2011;31:938-43.

Etats-Unis, en Ecosse et en Italie.

En France, une étude (dite Evincor- PMSI) a montré une diminution régulière des hospitalisations pour syndrome coronaire aigu pendant la période 2003-2009 sans pour autant mettre en évi- dence un effet d’amplification du décret d’interdiction de fumer de 2006. Il est vrai que l’application en deux temps de ce décret (en fé- vrier 2007 et en janvier 2008) a pu compliquer l’évaluation dans ce domaine. Et il est vrai aussi que la France a enregistré (entre 1995-

1997 et 2005-2007) des baisses im- portantes de la prévalence du ta- bagisme passif ; baisses qui ont été traduites de manière perceptible dans le champ des prises en charge des pathologies cardiovasculaires.

Jean-Yves Nau jeanyves.nau@gmail.com

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