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La mise en place d'un nouveau système fiscal incitatif : propositions législatives pour le Canton de Genève

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La mise en place d'un nouveau système fiscal incitatif : propositions législatives pour le Canton de Genève

OBERSON, Xavier

OBERSON, Xavier. La mise en place d'un nouveau système fiscal incitatif : propositions législatives pour le Canton de Genève. In: Byrne-Sutton, Quentin, Dumont Kurz, Corinne et Mariéthoz, Fabienne. L'encouragement au mécénat en matière culturelle : aspects économiques et fiscaux . Zürich : Schulthess, 1998. p. 161-174

Available at:

http://archive-ouverte.unige.ch/unige:13061

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v

LA MISE EN PLACE D'UN NOUVEAU SYSTEME FISCAL INCITATIF: PROPOSITIONS LEGISLATIVES POUR LE

CANTON DE GENEVE

)CA VIER OBERSON

Professeur à l'Université de Genève, avocat

1. INTRODUCTION

Le droit genevois contient déjà diverses dispositions destinées à favoriser le patrimoine culturel connne le domaine artistique en général. On sait, par exemple, que les collections artistiques et scientifiques sont exonérées de l'impôt sur la fortune (art. 36 lettre a in fine LCP), mais pas de l'impôt sur les successions. On peut aussi mentionner qu'à la snite du canton du Jura, Genève vient d'adopter une loi cantonale permettant la dation d'objets d'art en matière d'impôts sur les successions et les donations.

Toutefois, le secteur du mécénat, si l'on s'en tient au droit en vigueur, peine à se développer; le régime fiscal paraît à cet égard assez peu attrayant.

L'idée d'encourager la culture, notanunent par des mesures fiscales, rencontre un écho nettement favorable, non seulement chez les contribuables, mais aussi auprès des collectivités publiques qui se sont vite rendues compte que le mécénat permet d'accroître les moyens financiers en faveur de l'art, sans pour autant entamer davantage des finances publiques actuellement en difficultés. Une loi cantonale sur l'encouragement à la culture vient d'être

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162 PRoposmONS LÉGISLATIVES

adoptéel Cette dernière prévoit notamment que « le développement du mécénat est favorisé par des mesures fiscales incita/ives» (art. 5 ch. 5)'. De même, une motion en vue de mettre sur pied la Fondation de Genève pour les arts, la culture et la science est actuellement à l'examen'-

Le propos de la présente contribution est ainsi d'examiner dans quelle mesure des modifications législatives de nature fiscale pourraient être mises en place en droit genevois, afin de stimuler le mécénat de manière beaucoup plus marquée.

Pour ce faire, après un bref survol du régime actuel (2), nous tenterons de suggérer quelques améliorations destinées à renforcer l'attrait du mécénat à Genève, tout en tenant compte des projets récents de réfonne de la fiscalité (3).

2. LE RÉGIME ACTUEL

A. Généralités

Le droit fiscal genevois est actuellement dans une période de transition. Le 1"

janvier 1993, est entrée en vigueur la loi fédérale sur l'harmonisation des impôts directs des cantons et communes (LHIDt, qui pose les éléments essentiels de l'imposition du revenu et de la fortune, éléments que les cantons sont tenus de mettre en œuvre dans leur législation dans un délai de 8 ans (art. 72 LHID). La fiscalité genevoise est donc en pleine effervescence, s'agissant notamment d'adapter la fiscalité cantonale aux préceptes de la LHID. Une première phase d'harmonisation vient d'être parachevée, suite à l'adoption des lois cantonales genevoises sur l'imposition des personnes

Voir la Loi sur l'accès et l'encouragement à la culture du 20 juin 1996 (RSG C/3/05), annexe 1 du présent ouvrage.

Mémorial des séances du Grand Conseil 1996 p. 3376.

Mémorial des séances du Grand Conseil 1996 p. 3268 ss; voir annexe 2 du présent ouvrage.

RS 614.14.

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PROPOSITIONS LÉGISLATIVES 163

morales (LIPM)', respectivement sur l'imposition à la source des personnes physiques et morales', entrées en vigueur le 1" janvier 1995. Une seconde phase devrait viser le régime d'imposition des personnes physiques, vraisemblahlement dès le 1" janvier 1999 (voire 2001). Enfin, indépendamment de la LHID, le régime de l'imposition des successions et des donations devrait également être remanié.

B. Les incitations fiscales

Le droit fiscal genevois actuel contient essentiellement quatre types de mesures permettant d'encourager le mécénat:

- La possibilité, pour les personnes physiques et morales, de déduire, dans des limites étroites, les prestations bénévoles effectuées en faveur de certaines personnes morales poursuivant des buts culturels;

- un régime d'exonération (pour l'impôt sur le revenu et la fortune)

d'institutions d'utilité publique poursuivant notamment des buts culturels;

- l'exonération des institutions d'héritiers et donations faites à des entités poursuivant des buts cnlturels;

- la dation en paiement'.

L'exonération des collections d'oeuvres d'art de l'impôt sur la fortune n'est pas à proprement parler une incitation au mécénat. Tout au plus peut-on soutenir qu'elle pousse les contribuables à investir dans des valeurs culturelles (la plus-value réalisée lors d'une cession ultérieure échappant par ailleurs à l'impôt sur le revenu tant au niveau fédéral que cantonal) comme

RSGD/l/IS.

RSGD/l/20.

Cette mesure est prévue par la loi genevoise sur la dation en paiement (RSG 0/3/35), entrée en vigueur le 1er novembre 1996; voir à ce propos le règlement cantonal d'application (RSG D/3/35.01); voir à ce sujet La dation d'oeuvres d'art en paiement d'impôts, (Etudes en droit de l'art, vol. 8) Zurich 1996.

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164 PROPOsmONs LÉGlSLA liVES

elle peut motiver des non-résidents du canton à venir habiter avec leurs trésors artistiques. TI n'en sera pas traité davantage par la suite.

(i) La déductibilité des prestations bénévoles (a) Les personnes physiques

Les prestations bénévoles effectnées par des personnes physiques à des personnes morales d'utilité publique qui ont leur siège ou un établissement dans le canton et qui poursuivent un but cultnrel, social, humanitaire ou de protection de la natnre sont déductibles, pour la partie de leur montant comprise entre 2% et 7% du revenn net (art. 21 lettre u Loi sur les contributions publiques (LCP)). On notera que dans un arrêt récent, le Tribunal administratif genevois a opté en faveur d'une interprétation stricte de cette disposition". Selon lui, l'art. 21 lettre u LCP ne peut s'appliquer qu'à des donations effectnées en espèces. La donation d'oeuvres d'art à un musée genevois n'a ainsi pas pu être déduite du revenu d'un contribuable établi dans le canton.

Cet arrêt nous paraît critiquable pour plusieurs raisons. Tout d'abord, la solution du Tribunal administratif n'est pas conforme au texte même de la loi, la notion de « prestation », en droit fiscal suisse, se référant à des remises d'espèces ou d'objets. En outre, une interprétation qui s'écarte du texte de la loi se justifie d'autant moins que l'objectif de cette disposition est justement d'encourager l'emploi d'une partie du revenu à des fins d'utilité publique, notamment cultnrelles9. Or, contrairement à ce qu'affirme le Tribunal administratif, les prestations en natnre effectnées en faveur d'un contribuable peuvent très bien constitner pour lui un revenu (voir aussi l'art. 16 al. 2 UFD). On songera à l'échange de biens, la remise de biens à titre de paiement, etc. Les prestations en natnre devraient donc pouvoir être déduites du revenu dans la mesure où les autres conditions sont réalisées.

En ce qui concerne la déduction des prestations bénévoles, le Conseil d'Etat établit et publie chaque année la liste des personnes morales d'utilité

ATA du 19 avril 1992, StE 1993 B 27.4 No 9.

Mémorial des séances du Grand Conseil 1983, p. 1015.

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PROPOSITIONS LEGISLATIVES 165

publique visées à l'art. 21 lettre u LCP10 Confonnément à la pratique suivie par l'administration fiscale genevoise, le fait de figurer sur la liste du Conseil d'Etat n'implique en revanche pas nécessairement que la société visée soit exonérée, au sens de l'art. 9 LIPM. Cette exonération répond à une procédure indépendante et est sujette aux conditions fixées dans cette disposition.

(b) Les personnes morales

Les versements effectués par des personnes morales sont déductibles, jusqu'à concurrence de 10% du bénéfice net, dans la mesure où ils sont destinés à des personnes morales qui ont leur siège en Suisse et qui sont exonérées des impôts en raison de leur but de service public ou d'utilité publique (art. 13 lettre c LIPM). La déductibilité des prestations bénévoles est donc ouverte plus largement aux personnes morales qu'aux personnes physiques. En effet, d'une part, le seuil de déduction est nettement plus élevé (10% du bénéfice net), et d'autre part, la déductibilité vise les personnes morales ayant leur siège en Suisse (et non pas seulement celles ayant un établissement ou leur siège dans le canton).

(ii) Exonération de l'impôt sur le revenu et la fortune

Selon l'art. 9 LIPM, sont exonérées de l'impôt sur le bénéfice et le capital, les personnes morales visant des buts de service public ou d'utilité publique, dans la mesure où leur bénéfice et leur capital sont exclusivement et irrévocablement affectés à ces buts. Cette disposition correspond en substance à l'art. 23 lettre f LHID (voir également l'art. 56 lettre g LIFD).

Les personnes morales poursuivant des buts de promotion culturelle peuvent bénéficier de celte disposition".

On précisera que l'exonération ne porte toutefois pas sur l'impôt cantonal sur les gains immobiliers régi par les art. 80 ss LCP (art. 9 al. 2 LIPM).

tl Art. 9B al. 1 du règlement d'application de la Lep, du 30 décembre 1958, RSG D/3/05.04.

Il Voir, notamment, sur les notions de service public et d'utilité publique, la circulaire de t'Administration fédérale des contributions no 12, du 8 juin 1994, (Archives 63, 130).

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166 PROPOSITIONS LÉGISLATIVES

Contrairement à l'ancien régime, l'exonération devrait être accordée, en principe, par le département cantonal des finances, respectivement l'administration fiscale cantonale (art. 332 al. 1 et 346 LCP). A notre connaissance, l'ancienne pratique prévoyant l'octroi de l'exonération par le biais d'un arrêté du Conseil d'Etat est toutefois maintenue. Cette solution est d'autant plus opportune qu'elle permet un examen complet du dossier par le Conseil d'Etat.

(iii) L'exonération des successions et donations .

Sont notamment exonérés de droits de succession, sur requête au Conseil d'Etat, les institutions d'héritiers, les legs et autres libéralités à cause de mort, respectivement les donations faites aux sociétés et institutions ayant la personnalité morale, à la double condition qu'elles exercent une activité d'utilité publique, philanthropique ou de charité et que le testateur n'ait pas mis les droits à charge des héritiers légaux ou institués (art. 6 al. 2 de la loi genevoise sur les droits de succession; LOSlZ). Le Conseil d'Etat peut de même exonérer de lous droils les donations faites à certaines sociétés ou institutions d'utilité publique poursuivant des buts culturels, aux conditions de l'art. 28 al. 1 lettres q, r, s el al. 2 de la loi genevoise du 9 octobre 1969 sur les droits d'enregistrement (LOE)B

(iv) Les imperfections du système actuel

Le système actuel, en définitive, et malgré la liste qui précède, est fort peu attrayant pour les mécènes. Les règles sont souvent complexes, pointillistes, englobant des conditions ou des limites trop restrictives. Par exemple, l'art. 21 lettre u LCP, entré en vigueur le 1" janvier 1986, limitant la déductibilité des « prestations bénévoles» des personnes physiques à certaines personnes morales d'utilité publique pour la partie du montant compris entre 2% et 7%, esl d'une application inutilement compliquée tant pour l'administration que pour les contribuables. Le mécanisme légal s'avère, souvent, guère compréhensible. En outre, à partir du moment où le Tribunal administratif entend limiter la déductibilité aux seules prestations en espèces, contrairement au texte légal qui parle de « prestations », l'incitation fiscale

"

RSG D/3/25.

13 RSG D/3/30.

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PROPOsmONS LÉGISLATIVES 167

est alors réduite à la portion congrue. Il semble d'ailleurs qu'en pratique, cette disposition n'est que peu utiliséel4.

A cela s'ajoute que les normes fiscales en cause ne sont souvent pas coordonnées. Les conditions prévues à la déductibilité des prestations bénévoles ne sont notannnent pas les mêmes suivant que le donateur est une personne physique (art. 21 lettre u LCP) ou une personne morale (art. 13 lettre c LlPM). Cette différence, qui découle notamment de la mise en œuvre progressive de la LHID dans le canton de Genève, devrait toutefois être corrigée prochainement. On peut également citer, dans le même contexte, l'art. 28 LDE lettres q, r et s LDE qui pose diverses conditions en matière d'exonération des droits d'enregistrement qui ne correspondent pas nécessairement à celles fixées en matière de droits de succession (comp. art.

6 al. 2 LDS). Enfin, les conditions d'exonération en matière d'impôts sur les successions et donations ne sont pas harmouisées avec celles de la LCP.

3. PROPOSmONS DE RÉFORMES

La fiscalité genevoise étant en pleine refonte, le terrain est propice aux suggestions de réforme en faveur du mécénat. Les modifications devront toutefois teuir compte des principes fixés par la LHID que les cantons sont tenus de mettre en œuvre d'ici au 1'" janvier 200l. Certaines réformes devraient sinon nécessairement passer par une modification de la UnD elle- même. L'impôt cantonal sur les successions et les donations, n'étant en revanche pas concerné par cette deruière (art. 1 LHID a contrario), son adaptation devrait pouvoir se réaliser plus aisément.

A. Déductibilité des prestations effectuées par des particuliers

Les conditions de la déductibilité des prestations bénévoles effectuées par des personnes physiques en faveur d'institutions d'utilité publique agréées devraient nettement s'améliorer lors de la mise en œuvre des principes de la LHID en ce qui concerne les personnes physiques. Selon un nouvel art. 28 lettre f de l'avant-projet de loi genevoise sur l'imposition des

14 Olivier Vodoz, Mémorial du Grand Conseil 1996, p. 3301.

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168 PROPOSITIONS LÉGlSLA TIVES

personnes physiques (LIPP), les versements bénévoles à des personnes morales ayant leur siège en Suisse et qui sont exonérées de l'impôt en raison de buts de service public ou de pure utilité publique seront déductibles jusqu'à concurrence de 10% du revenu net. Cette norme - qui correspond à l'art. 9 al. 2 lettre i LHID - a le mérite de fixer une limite à la fois claire et praticable, tout en mettant sur un pied d'égalité les personnes physiques avec les personnes morales.

Peut-on aller plus loin? La fixation du seuil de déductibilité demeure de la compétence des cantons (art. 9 al. 2 lettre 1 UnD). Genève pourrait donc augmenter à sa guise la limite des 10%. A cet égard, on pourrait suggérer de conserver un tel taux comme règle générale et de prévoir, moyennant l'agrément de l'administration, la possibilité d'accroître ce seuil de 10% (par exemple de le doubler). En revanche, le texte du projet de LIPP qui emploie le terme « versement n, repris de la LHID, semble conforter l'interprétation restrictive du Tribunal administratif en défaveur de la déductibilité des dons en nature. A notre sens, une interprétation conforme au but visé par la norme et plus favorable au mécénat devrait pennettre la déduction des prestations en naturel'.

Ajoutons que l'entrée en vigueur de la LIPP devrait offrir aux contribuables la possibilité de déduire les frais de restauration de monuments historiques sur les immeubles en leur possession, en accord ou sur ordre des autorités, en vertu de dispositions légales (art. 28 al. 1 lettre j LIPP; 9 al. 3 lettre b LHID). Là aussi, le droit genevois pourra mettre en œuvre des incitations fiscales à buts culturels permettant, du même coup, de réduire les charges financières considérables de la collectivité en termes de rénovation.

Pour le surplus, la LHID précise qu'«on n'admettra pas d'autres déductions», sous réserve des déductions pour enfant et autres déductions sociales (art. 9 al. 4 LHID).

B. Déductibilité des prestations effectuées par des entreprises

Il est reconnu aujourd'hui que les actions conduites par les entreprises en faveur du mécénat en constituent le moteur principal et la part prépondérante,

"

Voir infra note 21.

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PRoPOsmONS LÉGISLATIVES 169

financièrement parlant'". En effet, les entreprises se sont rendues compte de l'intérêt qu'elles pouvaient avoir à promouvoir leur image aux yeux du public, notanunent en participant au financement d'événements de nature culturelle. De surcroît, l'entreprise attend des retombées - certes indirectes - des dépenses engagées en faveur du mécénat sous forme publicitaire, tout en assurant sa compétitivité. L'encouragement du mécénat de l'entreprise sert donc également l'intérêt de la collectivité dans son ensemble, dès lors qu'il concourt à l'enrichissement du patrimoine national, tout en limitant la nécessité de recourir à un subventionnement public.

Partant de ces prémisses, le législateur fiscal peut intervenir dans les secteurs suivants.

(i) Dépenses de mécénat

Peuvent être déduites du bénéfice imposable des entreprises, les charges justifiées par l'usage cornnlercial (art. 10 LHID, 21 lettre a Lep pour les indépendants; 24 LHID, 12 lettres a et d LlPM pour les personnes morales).

On admet généralement que les dépenses de mécénat ou de sponsoring sont déductibles, dès lors qu'elles présentent un caractère publicitaire". Selon le Tribunal fédéral, « les dépenses engagées à des fins culturelles et sociales ont un caractère publicitaire; elles visent à soigner les relations publiques de la société mécène et à en donner une image humaniste qui contrebalance partiellement l'aspect matériel de son activité commerciale ... Si les moyens utilisés sont dans un rapport indirect avec l'obtention d'un chiffre d'affaires ou d'un bénéfice plus important, ils visent néanmoins à asseoir la position économique de la société. A ce titre, ils sont justifiés par l'usage commercial, qu'ils soient engagés par des sociétés de capitaux ou des sociétés coopératives »".

16 Hyacinthe Lena, Fiscali,é du Mécénat Paris 1991, p. 117.

17 Harold Grüninger, KulturfOrderung und fiskaliscbe Anreize, Archives 54 (1985/86) p. 545, 5S] ; Wolfgang Maute, Sponsorbeitrâge ays steuerlicher Sicht, L'Expert comptable 1988, p. 281.

\8 ATF 1151b III, 118, Société coopérative Migros.

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170 PROPOSITIONS LÉGISLATIVES

Toutefois, même s'il «n'appartient pas au fisc de substituer sa propre appréciation à celle de la direction de la société19», de telles dépenses doivent demeurer dans un cadre raisonnable pour pouvoir encore être justifiées commercialement parlant. Le législateur genevois dispose donc d'une importante marge de manoeuvre pour préciser l'étendue des dépenses admises à titre de mécénat, sans pour autant heurter le cadre légal de la LHID. On pourrait ainsi envisager que, même par voie réglementaire, l'exécutif genevois affiche ouvertement sa position en faveur de la déductibilité des dépenses culturelles des entreprises, iout en fixant à l'égard des entreprises des limites claires. Cela ne peut que renforcer l'attractivité des opérations de parrainage que les entreprises souhaiteraient développer.

(ilj Achats d'oeuvres d'art

Afin de stimuler l'enrichissement du patrimoine artistique du canton, en s'inspirant du droit français' ·, on pourrait envisager deux mesures: la déductibilité des acquisitions d'oeuvres d'art ou la possibilité de les amortir.

En France, notamment, les entreprises peuvent, avec l'agrément de l'Etat, amortir l'acquisition de certaines oeuvres d'art, à la condition d'en faire don à l'Etat à l'issue de la période d'amortissement. En outre, certaines dépenses d'acquisition des oeuvres d'artistes vivants peuvent, dans des limites bien étroites, être déduites immédiatement.

En droit genevois actuel, les dépenses des entreprises destinées à acquérir ou améliorer des biens ne sont toutefois pas déductibles (art. 23 lettre a LCP; 12 lettre d LIPM). L'introduction d'une déduction fiscale tendant à inciter l'acquisition d'oeuvres d'art par les entreprises passerait donc nécessairement par une modification légale. A l'issue d'un délai d'amortissement fixé dans la loi, l'œuvre serait ensuite acquise par l'Etat. Un tel mécanisme permettrait donc à l'Etat d'accroître, dans l'intérêt de la collectivité, le patrimoine culturel, tout en assurant le financement de l'acquisition par les entreprises. De ce point de vue, comme en droit français, l'Etat devrait à tout le moins pouvoir s'assurer, par un mécanisme d'agrément, que l'œuvre d'art soit d'une valeur artistique ou culturelle

19 ATF IISIb Ill, 118,SociélécoopérativeMigros.

20 Lena, op. cil. p. 119 55; Jacques Fingerhut, La fiscalité des oeyvres d'art, Paris 1995, p. 243 ss.

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PROPOSITIONS LÉGISLATIVES 171

suffisante. On pourrait à cet égard renvoyer sur ce point à la définition qui se trouve dans la loi cantonale sur la dation en paiement2l. L'introduction de cette nouvelle déduction pose toutefois problème sous l'angle de la LHID qui ne la prévoit pas. A moins d'admettre que ces déductions sont encore

!" justifiées par l'usage commercial, une telle mesure serait contraire à l'art. 24

al. 1 lettre a LHID.

L'autre incitation fiscale tout aussi intéressante consisterait alors, plutôt qu'une déduction, à autoriser au moins un amortissement des oeuvres d'art.

Certes, à notre connaissance, les oeuvres d'art détenues par les entreprises ne sont généralement pas susceptibles d'être amorties. Dans la mesure où l'œuvre, à l'issue d'une période à fixer par le législateur, devient la propriété de l'Etat, on peut toutefois concevoir que sa valeur pour l'entreprise se déprécie avec le temps, ce qui justifie alors pleinement un amortissement.

i,

Une telle conception permettrait au législateur genevois d'introduire cette nouvelle possibilité d'amortissement, sanS faire trop violence aux principes de laLHID.

(iii) Prestations bénévoles à des institutions poursuivant des buts culturels

Sur ce point, on l'a vu, le cadre légal est étroitement limité par la LHID (voir art. 9 al. 2 lettre i, pour les personnes physiques et 25 al. 1 lettre c pour les personnes morales).

Le droit genevois pourrait tout de même envisager deux modifications, tout en restant dans le cadre fixé par la LHID. En premier lieu, à l'instar de ce que nous avons proposé pour les personnes physiques, le seuil de 10%, devrait pouvoir être doublé (au maximum), moyennant agrément préalable de l'administration, sur la base de conditions précises. Cela permettrait d'encourager de façon spécifique des manifestations d'importance. Par ailleurs, du moment que le seuil se fonde sur le bénéfice net, cela a pour effet d'exclure les entreprises déficitaires de la possibilité de toute déduction. Or, une entreprise en difficulté peut avoir tout autant intérêt à promouvoir des opérations culturelles, notamment daus le cadre d'une politique de marketing

li Selon l'art. 2 al. 1 de la loi genevoise sur la dation en paiement, est réputé bien culturel tout bien meuble tel que œuvre d'art, livre, objet de collection ou document dans la mesure où il présente une haute valeur artistique ou scientifique.

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171 PROPOsmONS LÉGISLATIVES

visant son redressement à moyen ou long terme". On devrait pouvoir dès lors autoriser ces entreprises à reporter sur une certaine période le rattrapage des déductions.

En second lieu, par rapport aux règles de la LHlD, le droit genevois exige, comme condition supplémentaire à la déductibilité des versements bénévoles à des personnes morales de service public ou d'utilité publique, que les versements soient faits en espèces (art. \3 lettre c LIPM). Cette limitation a pour effet d'empêcher la déductibilité des prestations en nature effectuées par les personnes morales (mise à disposition de locaux, de terrain, aides diverses, travaux en faveur de l'institution, etc.). La suppression de l'expression «faits en espèces» à l'art. \3 lettre c LIPM élargirait ainsi la palette des prestations en faveur du mécénat. Le terme de « versement» n'est en effet pas suffisamment précis, selon nous, pour contraindre les cantons à une interprétation restrictive". Pour les indépendants, cette règle devrait déjà être admise sur la base de l'art. 21 lettre u LCP, contrairement à l'avis précité du Tribunal administratif, puis, à partir du 1" jan\~er 1999 (en principe), en vertu du nouvel art. 28 lettre fLIPM.

C. EXONÉRATION

En matière d'exonération de l'impôt sur le revenu et la fortune des institutions à buts culturels, la marge de manoeuvre du canton paraît réduite, le cadre légal étant fixé à l'art. 23 al. 1 lettre fLHlD. En revanche, le régime d'exonération des droits de succession et de donation, fixé aux art. 28 LDE lettres q, r et s LDE, respectivement 6 al. 2 LDS, pourrait être profondément remanié. Les conditions d'exonération, obscures et divergentes, devraient être harmonisées entre elles, à la lumière des règles récentes fixées à l'art. 13 lettre c LIPM .

"

Voir à ce propos, Lena, op. cit. p. 105 S5.

2J La même solution prévaut en droit français qui, en ce qui concerne les dons, autorise, à l'art. 238Bis 1. du Code général des impôts, les entreprises à déduire de leur bénéfice, dans la limite de 2 pour mille de leur chiffre d'affaires, les «versements» au profit des organismes d'intérêt général visés, tout en autorisant par interprétation les prestations en nature de toute sorte; voir Léna, op. cit., p. 40.

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il

PROPOsmONS LEGISLA TlVES 173

Dans ce contexte, on ne peut qu'être enthousiaste à l'idée, préconisée par une récente motion genevoise", de créer, sur le modèle de la Fondation de France, une Fondation de Genève pour les arts, la culture et la science.

Cette fondation, bien évidemment, devrait être exonérée d'impôt. Elle aurait pour fonction de recueillir les prestations bénévoles ou les dons sans affectation particulière ayant bénéficié des déductions fiscales usuelles. De la sorte, en pleine conformité avec le cadre de la LHID, on ouvre des possibilités de déductions à un vaste cercle de personnes tout en assurant la promotion de manifestations culturelles les plus diverses.

4. CONCLUSION

Nonobstant l'entrée en vigueur de la LHID, diverses mesures fiscales sont donc concevables en vue d'encourager le mécénat. Sans prétendre à l'exhaustivité, on peut proposer les améliorations suivantes:

(a) Admettre pour les personnes physiques, à titre de déduction de l'impôt sur le revenu et la fortune, toutes prestations bénévoles à des institutions poursuivant des buts culturels, et ce jusqu'à 10 % du revenu net avant impôt, avec possibilité, moyellllant agrément préalable de l'Etat, de doubler ce seuil.

(b) lnterpréter le terme «prestation bénévole », à l'art. 21 lettre u LCP (personnes physiques), respectivement « versement », à l'art. 13 lettre c LIPM (personnes morales) comme englobant aussi les prestations en nature.

(c) Accepter largement pour les entreprises la déductibilité de dépenses en faveur du mécénat en tant que « charges justifiées par l'usage commercial ».

(d) Introduire dans la législation genevoise, la possibilité d'amortir les acquisitions d'œuvres d'art par les entreprises, avant leur remise définitive à l'Etat. L'introduction d'une déduction innnédiate en cas d'acquisition, mesure également envisageable, nécessiterait par contre une modification de la LHID.

24 Voir la Motion sur la Fondation de Genève pour les arts) la culture et la science qui a été adoptée te 20 juin 1991 (annexe 2 du présent ouvrage) et Mémorial du Grand Conseil 1996, p. 3377.

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174 PROPOSITIONS LÉGISLATIVES

(e) Autoriser les entreprises à déduire de leur revenu (profit), les prestations bénévoles à des institutions poursuivant des buts cultutels jusqu'à 10% du revenu net, avec possibilité, moyennant agrément de l'Etat, de doubler ce seuil, tout en autorisant le report de ces possibilités de déduction sur une certaine période.

(f) Harmoniser les règles d'exonération des art. 9 lettre f LIPM (impôts sur le revenu et la fortune des personnes morales), 28 lettres q, r et s et al. 2 LDE et 6 al. 2 LDS.

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