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Le prix de la compétitivité

Michel Husson, Regards, Avril 2011

La France perd des parts de marché parce qu’elle n’est pas compétitive, donc il faut baisser le coût du travail, donc il faut rogner sur le « modèle social » français qui est décidément trop cher et, donc, il faut se rallier au pacte de compétitivité proposée par Angela Merkel. Laurence Parisot est allée jusqu’à dire que le coût du travail serait devenu nettement plus élevé en France qu’en Allemagne, mais cette affirmation a fait pschitt : l’Insee avait malencontreusement introduit une rupture de série dans les données transmises à Eurostat, corrigée depuis.

Ce qui est sûr, c’est que les salaires sont gelés en Allemagne depuis plusieurs années, et que les parts de marché allemandes se maintiennent alors qu’elles ont plutôt tendance à baisser partout ailleurs en Europe. Mais il n’y a pas de rapport direct avec la progression relative des salaires : la compétitivité-prix de la France s’est par exemple maintenue. Le recul des parts de marché s’explique donc par d’autres facteurs. Le premier est bêtement arithmétique : puisque les parts de marché des pays émergent augmentent, il faut donc qu’il y en ait qui baissent. Et c’est le cas pour les Etats-Unis, le Japon et la grande majorité des pays européens. Les pays de la zone euro sont pénalisés par la baisse du dollar sur les marchés mondiaux. L’effort d’innovation des entreprises françaises est à la traîne par rapport à ce qui se fait en Allemagne, etc. Enfin, les statistiques sont obscurcies par la mondialisation : les exportations de Volkswagen ou de Porsche sont comptées dans les parts de marché allemandes parce que la phase finale d’assemblage est réalisée sur le territoire allemand. Mais les exportations de Logan fabriquées en Roumanie figurent dans les exportations roumaines. Bref, il y a un écart croissant entre la compétitivité de l’économie-France et la santé florissante des grands groupes français qui réalisent les deux tiers de leur chiffre d’affaires hors de France.

L’institut patronal Rexecode propose « une baisse de 5 à 10 % des coûts de production pour l’industrie sur notre territoire par une mesure de réduction des charges pesant sur le travail, financièrement compensée autant que possible par une réduction significative des dépenses publiques ». Cette préconisation ne correspond pas au diagnostic. Elle est en outre techniquement inapplicable : il n’existe aucune mesure permettant de cibler la baisse des coûts sur les secteurs exposés à la concurrence internationale. Le basculement des cotisations vers une TVA « sociale » bénéficierait principalement aux secteurs abrités, comme c’est déjà le cas des allégements de cotisations. Invoquer une « réduction significative des dépenses publiques » dans le contexte actuel est une attaque frontale contre les dépenses sociales et la clause « autant que possible » signifie que le modèle social doit être, dans l’esprit du patronat, la variable d’ajustement.

Cette orientation conduirait à une triple spirale : récessive, anti-sociale et anti-coopérative. Elle est de plus complètement à côté de la plaque, parce qu’elle ignore la tendance au recentrage sur le marché intérieur qui s’esquisse en Chine et en Allemagne, les deux premiers exportateurs mondiaux. Au lieu de s’aligner sur le pacte de compétitivité, il faudrait s’appuyer sur la nécessité de réorientation du modèle allemand. La majorité de l’excédent commercial allemand est réalisé sur l’Europe et les déficits des pays voisins en sont donc la contrepartie. En outre, la population en âge de travailler baisse en Allemagne, et cette baisse finira par peser sur les revendications salariales et mettre un terme à la dégradation du modèle social qui a été l’une des plus marquées en Europe.

La seule perspective cohérente est un projet européen coopératif, s’appuyant sur une harmonisation des normes sociales (par exemple un salaire minimum indexé sur la productivité de chaque pays), une convergence vers le haut de l’imposition du capital, des investissements publics financés par un budget européen élargi. En votant le principe d’une taxation des transactions financières (que Sarkozy ne défend qu’à la tribune du G20), le Parlement européen a montré qu’une telle orientation est possible, à condition de remettre en cause la « préférence pour la finance » (1).

(1) pour de plus amples développements, voir : http://hussonet.free.fr/missioncp.pdf. Les éléments du débat sont ici : http://hussonet.free.fr/ecofran.htm

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