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Le traitement chirurgical des ruptures traumatiques de l’urèthre postérieur

Rachid ABOUTAIEB, Ismail SARF, Mohammed DAKIR, Ali EL MOUSSAOUI, Abdennabi JOUAL, Fathi MEZIANE, Saad BENJELLOUN

Service d’Urologie, C.H. Ibn Rochd, Casablanca, Maroc

Les traumatismes de l’uréthre masculin sont en aug- mentation du fait de l’accroissement du trafic routier et de l’accélération des véhicules. Les victimes sont essentiellement les piétons et les conducteurs de moto- cyclettes. Ces traumatismes sont graves par leurs conséquences néfastes sur l’activité sociale, la fertilité et la fonction érectile, surtout quand ils touchent des sujets jeunes et actifs.

L’uréthre postérieur est profondément enchâssé dans le pelvis, il est cependant exposé par sa situation au contact des os du bassin. Son atteinte est en régle asso- ciée à une fracture du bassin. Ce sont les fractures de

Manuscrit reçu : mai 1998, accepté : septembre 1999.

Adresse pour correspondance : Dr. R. Aboutaieb, Service d’Urologie, C.H. Ibn Rochd, Casablanca, Maroc.

RESUME

Buts : Comparer les résultats thérapeutiques du traitement chirurgical en urgence différé et du traitement tardif des ruptures traumatiques de l’urèthre postérieur.

Matériel et Méthodes : 35 patients sont opérés pour traumatisme de l’urèthre posté- rieur. Leur âge moyen est de 25 ans (extrêmes : 7 à 79 ans). Il s’agit dans la majorité des cas d'un traumatisme secondaire à un accident de la voie publique, entraînant une fracture du bassin. Une fois le diagnostic de rupture de l’urèthre postérieur rete- nu, l’attitude ultérieure dépend de l’état du patient et des lésions associées. En l’ab- sence de lésions viscérale ou squelettique graves, le patient est opéré dans les 3 semaines suivant le traumatisme après un bilan radiologique. Ceci a concerné 16 patients du Groupe I. Dans le cas contraire, il n’est opéré qu’au sixième mois après stabilisation de toutes les lésions traumatiques. Cette attitude a été pratiquée chez 19 patients (Groupe II).

Résultats : Ils sont jugés sur la qualité du jet mictionnel, la continence urinaire et l’impuissance sexuelle. Ainsi, le jet était jugé bon dans 93,75% des cas (Groupe I) et 78,8% des cas du Groupe II. La continence a été parfaite dans 100% des cas (Groupe I), contre 89,4% (Groupe II). L’impuissance sexuelle a été observée dans 18,7% des cas du Groupe I contre 5,3% des cas du Groupe II.

Conclusion : Les traumatismes de l’urèthre postérieur sans lésions associées graves peuvent être opérés en urgence différée avec d’excellents résultats du point de vue mictionnel (80% de bons résultats) mais avec une fréquence plus élevée d’impuis- sance sexuelle. Chez les patients porteurs de lésions associées graves, la prise en char- ge thérapeutique des traumatismes de l’urèthre n’est effectuée que dans des délais de 3 à 6 mois, au stade de sténose uréthrale. La chirurgie consiste alors en la résection du callus fibreux suivie d’anastomose uréthrale. Les résultats de cette intervention sont bons, au prix de sténose itérative traitée par endoscopie, mais avec moins d’im- puissance sexuelle.

Mots clés : Urèthre, traumatisme, sténose de l’urèthre, incontinence urinaire, impuissance sexuelle, uréthrorraphie.

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l’arc antérieur qui sont les grandes pourvoyeuses des lésions uréthrales [8]. Ce type de lésion explique par ailleurs en partie la fréquence de l’impuissance sexuel- le par atteinte traumatique vasculaire mais surtout par lésion des nerfs érecteurs. Ces derniers ont en effet un trajet qui passe sous les branches pubiennes [5].

La prise en charge thérapeutique des ruptures de l’uré- thre postérieur reste encore controversée. En effet, ils peuvent être traités par voie endoscopique ou chirurgi- cale, en urgence immédiate, différée ou tardivement après le traumatisme.

L’intervention chirurgicale en urgence est abondonnée par la majorité des auteurs. En effet, l’importance de l’infiltration hémorragique des tissus et l’énorme perte sanguine par le périnée rend difficile l’identification des structures, et expose à des lésions surajoutées res- ponsables de taux élevés d’impuissance sexuelle et d’incontinence urinaire [7].

L'intervention chirurgicale en urgence différée consiste à opérer les patients entre la premiére et la troisiéme semaine, après tarissement du saignement mais avant l’installation de la fibrose [3, 10, 16].

L’intervention chirurgicale tardive, est effectuée après des délais de 3 mois [19], 6 mois [20, 21, 22] voire 9 mois selon l'importance de l'hématome et de l’écarte- ment des deux extremités uréthrales [6]. Ces délais auront permis de réparer toutes les autres lésions asso- ciées prioritaires. Cependant, sur le plan local, l’héma- tome s’est organisé en un callus fibreux d’étendue variable et qui maintient les deux extrêmités uréthrales en décalage.

Nous rapportons une série rétrospective de 35 patients opérés pour traumatisme de l'uréthre postérieur en comparant les résultats thérapeutiques en fonction de la date de l’intervention par rapport au traumatisme.

MATERIEL

De janvier 1987 à décembre 1997 trente-cinq patients présentant une rupture de l’urètre membraneux ont été opérés dans notre service. Tous les malades sont de sexe masculin avec un âge moyen de 25 ans (7 à 79 ans) . Les accidents de la voie publique représentent l’étiologie la plus fréquente, rencontrée dans 80% des cas. Il s’agit dans la majorité des cas de conducteurs de motocyclette ou de piétons heurtés par un véhicule.

Par ailleurs, tous ces patients présentent une fracture du bassin, et plus de la moitié ont d’autres lésions asso- ciées : cranio-cérébrales (15 cas), abdominales et/ou thoraciques (11 cas), et fractures des membres (10 cas).

Le diagnostic cl inique a été posé devant des signes urinaires : uréthrorragies, associées au globe vésical.

Dès leur admission au service des urgences, tous ces malades ont bénéficié d’une cystostomie sus pubien- ne.

Nous avons réparti nos patients en 2 groupes :

Le Groupe I

Ce groupe comporte 16 malades ne présentant pas de lésions associées sévéres et ne nécessitant par consé- quent aucun gest e chirurgical associé. Pour ceux là, un bilan urologique comportant une urographie intraveineuse et une uréthrocyst ographie rétrograde et mictionnelle (UCRM) est effectué les premiers jours aprés l’accident. Ce bilan a montré une extra- vasation du produit de contraste typique d’une ruptu- re compléte de l’uréthre membraneux (Figure 1), accompagné d’une surélévation de la vessie par l’hé- matome pelvien.

Le Groupe II

Ce groupe est composé de 19 malades présentant des lésions associées sévéres nécessitant un séjour dans les Figure 1. Extravasation du produit de contraste au cours d’une uréthrocystographie témoignant de l’existence d’une rupture uréthrale.

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différents services pour traitement des lésions priori- taires. La cystostomie est effectuée dés l’admission aux urgences et gardée jusqu’à l’hospitalisation du patient au service d’urologie 3 à 6 mois plus tard. Un bilan est effectué à cette date. Il comporte une urographie intra- veineuse et une uréthrocystographie rétrograde couplée à une cystographie mictionnelle (UCRM). Dans tous les cas, cet examen a mis en évidence une sténose de l’uréthre membraneux, dont l’étendue varie entre 3 et 5 centimètres (Figure 2).

METHODES

L’intervention a consisté dans tous les cas en une ana- stomose termino-terminale des 2 extremités uréthrales rompues. La voie d’abord, et le délai opératoire sont différents dans les 2 groupes.

Groupe I : (16 cas )

Le patient est opéré entre J7 et J21 après l’accident.

La voie d’abord est périnéale en Y renversé. On pro- céde à l’évacuation de l’urohématome, l’ablation des sequestres osseux puis la dissection des bouts distal et proximal jusqu’en zone saine, en essayant de préser- ver les art éres bulbai res. Le bout proximal est en général repéré par un béniqué introduit par la cysto- tomie. Au delà du 15éme jour, nous avons remarqué l’installation de l’hémostase, les tissus sont plus fermes rendant les sut ures plus aisées sans qu’il y ait de véritable fi brose. Enfin la suture termino-termina- le par 4 à 6 points de Vicryl 4/0 est effectuée en pre- nant soi n de bien prendre la muqueuse. L’ a d o s s e m e n t des deux bouts est facile, car il n’ya pas encore d’ins- tallation de phénoméne fibreux. Une sonde tutrice est immédiatement mise en place et gardée pendant 2

s e m a i n e s .

Groupe II (19 cas)

Ces patient sont opérés au delà du 3ème mois. La voie d’abord est soit périnéale (16 cas) soit transsymphysai- re (3 cas). Au cours de l’abord par la voie périnéale, on procéde à la dissection premiére de l’uréthre périnéal, la résection du cal fibreux et le repérage du bout proxi- mal par l’introduction d’un béniqué par l’orifice de cystostomie. Le manque entre les 2 bouts peut être important nécessitant alors quelques artifices tech- niques tels que la dissection lointaine de l’uréthre anté- rieur ou la séparation des corps caverneux sur la ligne médiane. Enfin l’anastomose termino-terminale permet l’adossement muco-muqueux.

La voie transsymphysaire a été utilisée pour les Tableau 1. Résultats thérapeutiques, comparaison entre la réparation en urgence différée (groupe I) et la réparation tar - dive (groupe II).

Groupe I Groupe II (16 cas) (19 cas) Bon 13 cas (81,25%) 9 cas (47,3%) Jet mictionnel Moyen 2 cas (12,5%) 6 cas (31,5%) Mauvais 1 cas (6,25%) 4 cas (21,2%) Continence Bon 16 cas (100%) 17 cas (89,4%)

Mauvais - 2 cas (10,6%)

Erection Bon 13 cas (81,25%) 18 cas (94,7%) Mauvais 3 cas (18,75%) 1 cas (5,3%) Le jet mictionnel :

- bon : absence de dysurie clinique et une débitmétrie > 15 ml/seconde, - moyen : une dysurie modérée ou une débitmétrie entre 10 et 15 ml/seconde, - mauvais : dysurie importante et débitmétrie inférieure à 10 ml/seconde. Dans ces cas la radiologie a confirmé l’existence d’une sténose post-opératoire.

La continence :

- bonne : absence d’incontinence, - mauvaise : incontinence totale.

La fonction érectile :

- bonne en présence d’une érection permettant la pénétration,

Tableau 2. Résultats thérapeutiques comparant la réparation tardive et la réparation en urgence différée.

Nombre de Sténose Incontinence Impuissance

cas sexuelle

Réparation en urgence différée

Koratim [6] 4 2 - 2

Mundy [16] 17 3 - 12

Notre série 16 5 0 5

Réparation tardive

Morey [15] 82 9 4 31

Koratim [7] 73 71 2 9

Ennemoser [5] 31 0 0 3

Notre série 19 4 2 1

Figure 2. Uréthrocystographie rétrograde couplée à une cysto - graphie mictionnelle. Noter l’arrêt net du produit de contraste au niveau de l’urèthre membraneux témoignant de la sténose et indiquant son étendue.

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patients présentant un bout proximal fixé en position haute rétropubienne associé à un diastasis important de la symphyse pubienne. Aucune pubectomie n'a été pra- tiquée. Dans ces cas, le premier temps consiste en un repérage premier de l’uréthre membraneux en s’aidant d’une cystotomie. Le deuxième temps est une résection du cal scléreux puis repérage du bout distal par voie périnéale. Enfin, on effectue une anastomose termino- terminale en prenant soin de suturer la muqueuse.

Dans tous les cas, un drainage par sonde uréthrale et sonde de cystostomie est gardé pendant 2 à 3 semaines.

RESULTATS

Le recul varie de 4 ans pour les malades les plus anciens à un an. En effet, les premiers patients de la série qui sont guéris ne reviennent plus en consultation.

Le recul moyen est alors de 2 ans dans les deux groupes.

Les complications locales comprennent : un abcés péri- néal (1cas), un abcès de paroi (1 cas), un hématome périnéal (1 cas). Il n'a pas été observé de fistules uri- naires.

L’analyse des résultats a pris en considération la quali- té de la miction, la continence et la fonction érectile (Tableau 1).

Le jet mictionnel a été jugé bon dans plus de 80% des cas du groupe I, alors qu’il n’était que de 47% dans le groupe II. De même, le taux de resténose a été, dans le groupe I, de 6,25% des cas, alors qu'il a été de 21,2%

des cas dans le groupe II. Ce taux plus élevé serait pro- bablement en rapport avec la difficulté d'exciser toute la fibrose constituée. En effet, plus la fibrose est éten- due, moins les résultats sont satisfaisants. Ces sténoses apparaissent au dela de la premiére année et répondent bien aux uréthrotomies endoscopiques à un rythme d’une intervention par an en moyenne.

Le taux d'incontinence est de 0% dans le Groupe I contre 10,6% dans le groupe II. Cette incontinence peut être expliquée par l'importance du traumatisme, détrui- sant le sphincter interne et les fibres nerveuses. Aucun patient n’a rapporté d’incontinence urinaire à l’effort.

L'impuissance sexuelle est difficile à évaluer chez nos patients. L’évaluation a été effectuée par l’examen cli- nique seul sans autre examen paraclinique. Les patients du groupe I rapportent une impuissance sexuelle dans 18,7% des cas, alors que seulement 5,3% des patients du groupe II ne sont pas satisfaits de leur activité sexuelle. Ceci est à l’origine de problémes médico- légaux. Il est en effet difficile de faire la part de l’inter- vention et du traumatisme dans la genése de cette impuissance, de même qu’il est difficile de connaître exactement l’état de l’érection avant l’accident.

DISCUSSION

Les ruptures de l’urèthre postérieur sont de plus en plus fréquentes avec l’augmentation des accidents de la cir- culation. La majorité des patients de notre série sont des piétons ou des conducteurs de motocyclette heurtés par un véhicule.

Les traumatismes de l’urèthre s’observent en général dans le cadre d’un polytraumatisme, associant des lésions squelettiques et une atteinte viscérale. L’atteinte de l’uréthre postérieur est observée dans 10% des cas de fractures du bassin. En effet, l’uréthre postérieur est bien protégé car il est profondément enchâssé dans le pelvis. Il reste cependant vulnérable du fait de ces rap- ports avec l’aponévrose périnéale moyenne.

Le diagnostic de rupture traumatique de l’uréthre est retenu cliniquement en présence d’une rétention vési- cale associée à l’uréthrorragie chez un traumatisé du bassin. Dans le cadre du bilan lésionnel, l’échographie authentifie la rétention vésicale, et permet de guider le cathétérisme sus pubien. Ce dernier représente un geste primordial. En l'absence de globe vésical, il faut se méfier d'une rupture vésicale associée qui s'observe dans 10% de cas [22]. Il faudrait alors mettre en condi- tion ce traumatisé, effectuer un remplissage et des transfusions en fonction de sont état, et refaire l’exa- men clinique et echographique. La réapparition du globe vésical signe l’intégrité de la vessie.

Le reste du bilan lésionnel va conditionner la modalité de la prise en charge thérapeutique ultérieure.

L'intervention en urgence immédiate n'est justifiée que s'il ya une lésion traumatique d'un organe pelvien comme une rupture traumatique du rectum ou une rup- ture vésicale. L'intervention est effectuée par une lapa- rotomie qui répare les lésions pelviennes.

En l’absence de lésion associée intrapelvienne ou vis- cérale grave, une UIV et une UCRM sont effectuées entre la 1ére et la 3ème semaine. L’existence d’extra- vasation d’urine sur l’UCRM pose le diagnostic de lésion uréthrale. La réparation chirurgicale est effec- tuée dans ces mêmes délais. Cette intervention a l'avan- tage d'éviter la morbidité liée à l'intervention immédia- te, tout en réglant le probléme uréthral rapidement.

Nous utilisons toujours la voie périnéale. Elle a l'avan- tage d'être simple, peu délabrante et donne un bon jour sur l’uréhre. Cette voie d'abord préserve les artéres périnéales et les nerfs érecteurs tout en permettant l’ex- position correcte de l’uréthre [5]. Elle permet une ana- stomose simple avec une morbidité opératoire faible par rapport à la laparotomie. Elle a l'inconvénient de ne pouvoir être utilisée chez certains traumatisés du bas- sin qui ne peuvent être placés en position de lithotomie quelques jours après le traumatisme [22].

L’accès au foyer de fracture, trouve alors l’hémorragie

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bien contrôlée, l' hématome qui est circonscrit est éva- cué, de même que les fragments osseux et les débris tissulaires. La rupture uréthrale est encore fraiche avec des extrémités uréthrales souples. L'anastomose termi- no-terminale est effectuée en s'assurant que la suture prend bien la muqueuse uréthrale des 2 côtés. Les résultats concernant la qualité du jet mictionnel sont supérieurs à 80% [10, 16]. Dans notre série, ce résultat était de 81,25%.

Dans les cas de traumatismes graves avec instabilité hémodynami que, ou lésion viscérale ou cutanée importante, la réparation uréthrale n'est pas une priori- té. Ces malades sont pris en charge tardivement au delà du 3ème mois. Cette attitude que nous adoptons de nécessité est suivie de principe par un ensemble d’au- teurs [12, 13, 14, 15, 19, 20, 21, 22]. Le délai d'attente permet la réparation des autres lésions associées mais aussi la cicatrisation locale et la résorption de l’héma- tome pelvien, ce qui prend 3 à 4 mois [19].

A ce stade, la rupture uréthrale s'est alors transformée en une sténose uréthrale avec décalage des deux extré- mités. En effet, les deux extrémités uréthrales sont séparées par un cal fibreux, dû à l' organisation de l'hé- matome. La longueur de ce cal dépend de l'importance de la résorption de l'hématome, du degré de la descen- te du bloc vesico-prostatique et de l’importance du déplacement osseux. La distance entre les deux extre- mités n'est ainsi pas dûe à une perte de substance mais à un déplacement vers le haut de la prostate et une rétraction vers le bas de l'uréthre bulbaire. Si l'hémato- me est massif et l’écartement des deux extrêmités uré- thrales est important, il est peu probabale d'avoir une descente spontanée vers une position normale, et il faut s'attendre à une sténose longue [20]. Pour juger l’éten- due de la sténose, et l'importance du décalage, l’uré- throcystographie rétrograde combinée à l’uréthrogra- phie mictionnelle est d' un grand apport. Des artifices techniques pourraient être utilisés chez les patients qui ont des difficultés à uriner durant l'examen [4].

La majorité de ces sténoses sont réparées par une voie d’abord périnéale. Dans les cas difficiles cependant, lorsque le manque est étendu, et l'uréthre proximal est fixé en position haute par rapport à la symphyse pubienne, il devient nécessaire d'associer une voie d'abord transsymphysaire, afin d'avoir un jour sur le bout proximal de l'uréthre. La voie transsymphysaire est plus simple et ne nécessite pas de pubectomie quand il y a un diastasis pubien important. C'est le cas de nos trois malades. En l'absence de diastasis de la symphyse pubienne, une symphysiotomie ou une pubectomie est effectuée classiquement par voie haute.

La possibilité de lésion des nerfs érecteurs augmentant le pourcentage des dysérections a été soulevée [6].La voie périnéale permet d'effectuer une pubectomie infé- rieure qui donnerait moins de complications et moins de déperdition sanguine [20, 21]. Dans tous les cas, il

faut résequer tout le callus fibreux, disséquer les deux extrémités uréthrales puis effectuer une anastomose termino-terminale sans tension. Dés que la sténose dépasse 2,5 cm., il y aurait un risque de suture sous ten- sion de l'uréthre avec raccourcissement et déviation de la verge [5]. Aucun de nos patients n'a présenté une telle complication. D’autres techniques chirurgicales ont été effectuées dans les cas de sténose étendue ou complexe : uréthroplastie cutanée en un ou deux temps [20].

Les résultats de la résection-anastomose des sténoses traumatiques de l’uréthre membraneux sont dans l'en- semble satisfaisants avec un jet mictionnel correct dans 85 % (15) à 87% [1]. Le taux d’incontinence est faible et de 2,7% [7]. Les sténoses itératives sont observées dans 11% des cas (15) et répondent avec succés à l’uré- throtomie endoscopique dans 72% [17]. Les taux de succés élevés de l’uréthrotomie optique comme com- plément à une uréthrorraphie termino-terminale sont expliqués par le fait qu’il s’agit de sténoses courtes réa- lisant un anneau fibreux fin au niveau de l’anastomose.

Deux complications majeures peuvent s'observer après traitement chirurgical des ruptures traumatiques de l'urèthre : les dysfonctionnements érectiles et l'inconti- nence urinaire. Leur origine dûe au traumatisme ou à l'intervention est controversée.

Le dysfonctionnement érectile est observé dans 11,6%

à 44% [20]. Il est d'origine nerveuse et vasculaire.

L'origine nerveuse serait la plus fréquemment en cause puisque les taux de succés par traitement pharmacolo- gique sont élevés [11]. Les études anatomiques ont par ailleurs montré que les les branches de l’artére honteu- se interne, ainsi que les nerfs érecteurs cheminent de part et d’autre de l’uréthre membraneux. Ces éléments peuvent être lésés au cours de la fracture du bassin ou au cours d’une intervention chirurgicale [2]. Les taux les plus élevés sont observés après intervention chirur- gicale en urgence immédiate par suture termino-termi- nale alors que les taux les plus faibles sont observés après cystostomie sus pubienne seule. Ceci suggére la responsabilité de la mobilisation intempestive du bloc vésicoprostatique dans la genése de l'impuissance sexuelle [8]. C’est d’ailleurs la mobilisation prosta- tique qui rend compte du taux élevé d’impuissance sexuelle après réparation en urgence différée dans notre série et non la voie d’abord. Dans les cas où aucun geste n'a été effectué, l'impuissance sexuelle serait alors directement en rapport avec la sévérité du traumatisme [9]. Ainsi, dans les cas nécessitant une intervention en urgence immédiate, il faut éviter une ouverture du fascia endopelvien, et la mobilisation de la région périprostatique.

L'incontinence urinaire est observée dans 0 à 44%. La aussi, les taux les plus faibles sont rapportés après cys- tostomie sus pubienne seule, alors que les taux les plus

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élevés sont observés après alignement en urgence [20].

Cette incidence élevée serait en rapport avec un col vésical rendu non fonctionnel par le traumatisme lui même [18], l'acte chirurgical ou par la fibrose secon- daire [20]. En effet, le sphincter externe étant automa- tiquement lésé au cours de la rupture totale de l'uréthre membraneux, la continence est alors assurée par le sphincter interne et la prostate. Les destructions du col vésical suppriment ce mécanisme de continence et vont entraîner une incontinence chez ces patients [22].

En conclusion, aucune attitude chirurgicale n'est vérita- blement satisfaisante. La réparation en urgence différée donne de bons résultats concernant la qualité du jet mictionnel, le délai d'attente n'est pas astreignant, mais le taux d'impuissance sexuelle est légérement élevé. La réparation tardive permet de laisser un délai aux traite- ments des lésions associées. Cependant, la constitution d'un cal fibreux parfois important, rend le geste chirur- gical difficile, ce qui explique les taux de resténoses qui sont plus élevés.

Il paraît donc logique de proposer une réparation en urgence différée chez un traumatisé ne présentant pas de lésions associées sévéres, ayant une fracture du bas- sin stable accompagnée d’un hématome pelvien impor- tant qui risque de se transformer en une sténose longue.

Cependant, la possibilité d’installation d’une impuis- sance sexuelle est plus importante, au cours de ce type de chirurgie, du fait du risque de mobilisation prosta- tique excessive et par conséquent de lésion nerveuse iatrogéne à l’origine d’une impuissance sexuelle.

La réparation tardive est d’emblée préconisée chez le sujet présentant des lésions traumatiques associées sévéres, orthopédiques ou viscérales, nécessitant une prise en charge prioritaire. La réparation tardive a l’avantage de ne pas compromettre la sexualité de cette population formée en majeure partie de patients jeunes et soucieux de garder leur sexualité.

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SUMMARY

Surgical treatment of traumatic rupture of the posterior urethra.

Objectives : To compare the therapeutic results of deferred urgent surgical treatment and late treatment of traumatic rup - tures of the posterior urethra.

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Material and Method : 35 patients with a mean age of 25 years (range: 7 to 79 years) were operated for trauma of the posterior urethra. In most cases, trauma was secondary to a road accident, associated with fracture of the pelvis. When rupture of the pos - terior urethra was diagnosed, the subsequent management depended on the patient's general condition and associated lesions. In the absence of serious skeletal or visceral lesions, the patient was operated within 3 weeks following trauma, after radiological assessment. This approach was applied in 16 patients (Group I). The other 19 patients (Group II) were only operated at the sixth month, after stabilization of all traumatic lesions.

Results : Results were assessed in terms of the quality of the uri - nary stream, urinary continence and sexual impotence. The stream was considered to be good in 93.75% of cases (Group I) and 78.8% of cases (Group II). Continence was perfect in 100%

of cases (Group I), versus 89.4% (Group II) and sexual impo - tence was observed in 18.7% (Group I) versus 5.3% (Group II).

Conclusion : Trauma of the posterior urethra, without any serious associated lesions, can be operated as a deferred emer - gency with excellent results in terms of voiding (80% of good results), but with a higher frequency of sexual impotence. In patients with serious associated lesions, the therapeutic mana - gement of the urethral trauma is performed after an interval of 3 to 6 months, at the stage of urethral stricture. In this case, sur - gery consists of resection of the fibrous callus, followed by ure - thral anastomosis. The results of this operation are good, at the cost of repeated stricture, treated endoscopically, but with a lower incidence of sexual impotence.

Key-words : Urethra, trauma, urethral stricture, urinary incon - tinence, sexual impotence, urethrorraphy.

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