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Biomatériaux et angiogenèse : Utilisation dans les métastases et la reconstruction osseuses
Hervé Oscar Nyangoga
To cite this version:
Hervé Oscar Nyangoga. Biomatériaux et angiogenèse : Utilisation dans les métastases et la recon- struction osseuses. Physiologie [q-bio.TO]. Université d’Angers, 2009. Français. �tel-00556598�
UNIVERSITÉ D’ANGERS ANNÉE 2009
N° D’ORDRE 1033
Biomatériaux et angiogenèse : Utilisation dans les métastases et la reconstruction osseuses
THÈSE DE DOCTORAT
Spécialité : Physiologie et physiopathologie humaine
ECOLE DOCTORALE BIOLOGIE-SANTE NANTES-ANGERS Présentée et soutenue publiquement
Le : 16 Décembre 2009 à : Angers
par : Hervé Oscar NYANGOGA Devant le jury ci-dessous :
Maurice AUDRAN,
examinateur, Professeur des Universités, Praticien Hospitalier, Angers
Pascal GUGGENBUHL,rapporteur, Professeur des Universités, Praticien Hospitalier, Rennes
Georges WERYHA,rapporteur, Professeur des Universités, Praticien Hospitalier, Nancy
Éric AGUADO,membre invité du jury, Maître de conférences des Universités, Ecole Nationale Vétérinaire, Nantes
Directeur de thèse : Daniel CHAPPARD,
Professeur des Universités, Praticien Hospitalier, Angers
Laboratoire INSERM, U922 « Remodelage Osseux et Biomatériaux » UFR de Médecine, ANGERS. 1 rue Haute de Reculée
49045 ANGERS CEDEX
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UNIVERSITÉ D’ANGERS ANNÉE 2009
N° D’ORDRE 1033
Biomatériaux et angiogenèse : Utilisation dans les métastases et la reconstruction osseuses
THÈSE DE DOCTORAT
Spécialité : Physiologie et physiopathologie humaine
ECOLE DOCTORALE BIOLOGIE-SANTE NANTES-ANGERS Présentée et soutenue publiquement
Le : 16 Décembre 2009 à : Angers
par : Hervé Oscar NYANGOGA Devant le jury ci-dessous :
Maurice AUDRAN,
examinateur, Professeur des Universités, Praticien Hospitalier, Angers
Pascal GUGGENBUHL,rapporteur, Professeur des Universités, Praticien Hospitalier, Rennes
Georges WERYHA,rapporteur, Professeur des Universités, Praticien Hospitalier, Nancy
Éric AGUADO,membre invité du jury, Maître de conférences des Universités, Ecole Nationale Vétérinaire, Nantes
Directeur de thèse : Daniel CHAPPARD,
Professeur des Universités, Praticien Hospitalier, Angers
Laboratoire INSERM, U922 « Remodelage Osseux et Biomatériaux » UFR de Médecine, ANGERS. 1 rue Haute de Reculée
49045 ANGERS CEDEX
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REMERCIEMENTS
A Monsieur le Professeur Daniel CHAPPARD
Je tiens à vous remercier pour m’avoir fait confiance en acceptant de m’accueillir au sein de votre unité, de m’avoir encadré tout au long de ces trois années. J’ai toujours trouvé auprès de vous une bonne écoute et l’assurance dans les moments de doute. J’ai beaucoup appris grâce à vous, sur le plan scientifique et sur le plan humain et acquis plus de maturité. Encore une fois je vous adresse mes remerciements.
A Monsieur le Professeur Maurice AUDRAN
Je vous remercie d’avoir accepté d’être membre du jury de ma thèse. Je vous remercie aussi pour des remarques pertinentes que vous avez eu à nous donner sur la rédaction d’un article.
A Monsieur le Professeur Gorges WERYHA
Je vous remercie d’avoir accepté d’être rapporteur de ma thèse et de porter vos appréciations sur mon travail.
A Monsieur le Professeur Pascal GUGGENBUHL
Je vous remercie d’avoir accepté d’être rapporteur de ma thèse et pour les encouragements que vous m’avez adressés
A Monsieur Eric AGUADO, Maître de conférences des Universités
Je vous remercie d’avoir accepté d’être membre invité du jury de ma thèse. Je vous remercie aussi de m’avoir accueilli au sein de l’école nationale vétérinaire de Nantes. Nos discussions furent instructives.
A Monsieur le Professeur Michel-Félix BASLÉ
Je vous remercie pour vos encouragements et de m’avoir permis de travailler dans votre
service commun d’imagerie et d’analyses microscopiques.
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A Madame Marie-Françoise MOREAU
Je vous remercie pour vos conseils et encadrements en histologie et culture cellulaire. Vous avez toujours veillé à ce que rien ne manque dans le cadre de mon travail.
A Monsieur Eric GOYENVALLE
Je vous remercie pour l’accueil à l’Ecole Nationale Vétérinaire de Nantes et pour avoir été toujours disponible ; je vous remercie pour les moments de détente entre deux coups de scalpel, à travers vous et Eric Aguado, je remercie le personnel de l’animalerie de Nantes pour leur aide volontaire et précieuse.
A Monsieur Robert FILMON
Je vous remercie pour votre encadrement en microscopie, vos conseils, vos encouragements et pour vos discussions. Je vous remercie aussi de m’avoir aidé au sein de votre laboratoire de Chimie.
A Romain et Astrid MALLET
Chers amis je vous remercie d’avoir été toujours avec moi. A Romain, au laboratoire tu as été plus qu’un collègue et j’ai toujours apprécié tes conseils. A Astrid pour toutes ces soirées où j’ai toujours été bien reçu par vous deux et aux discussions pertinentes que nous avons eu sur beaucoup de sujets.
A Hélène LIBOUBAN
Pour tout le travail que nous avons fait ensemble, tes conseils et tes expériences que tu m’as fait partager m’ont été utiles. A travers toi je remercie Idriss AYMEN, collaborer à son travail sur les inhibiteurs des IKK m’a été instructif.
A Florence PASCARETTI
Je te remercie pour l’encadrement technique et tes conseils précieux. Je te remercie en particulier pour ton aide pour les inclusions en méthyle méthacrylate.
A Christine GAUDIN
Je te remercie pour ton aide et tes conseils tout au long de ma thèse particulièrement pour ton
assistance lors des opérations sur les animaux et ton travail sur la GFP.
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A Laurence LECHAT
Je te remercie pour tes encouragements, le café du matin. Je te remercie en particulier pour toutes les démarches administratives que tu as entreprises pour moi et pour la patience dont tu as fait preuve.
A toute l’équipe de l’Animalerie hospitalo-universitaire d’Angers,
Je vous adresse mes remerciements, vous m’avez été d’une grande assistance, lorsque je n’étais pas présent vous avez veillé sur mes animaux et passer un coup de fil en cas de nécessité. Merci Pierre, Jérôme, Dominique et Laurent.
A Stéphane, tu t’es occupé de moi à mon arrivée au laboratoire, tu m’as prodigué tes conseils et chaque fois que j’ai eu à te solliciter tu étais toujours disponible.
A Aline, je te remercie pour tes conseils innombrables pour les techniques d’histologie que tu m’as apprises.
A Guillaume aussi, je te remercie pour tes conseils.
A Johanne, je te remercie pour les moments partagés dans nôtre expérience de thésards, comme tu te diriges aussi à la fin de ta thèse, je t’adresse mes encouragements.
A Sonia, je te remercie pour ton aide au MET et microscope confocal A Fatima je te remercie aussi et je t’encourage pour ton travail de thèse.
A Elodie je te remercie pour tes nombreux encouragements et pour les discussions que nous avons eues ensemble.
A Emilie et Mathias, par le biais d’Astrid j’ai fait votre connaissance et j’espère qu’on aura
l’occasion de se revoir, merci pour vos encouragements.
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A toute ma famille je vous remercie beaucoup, vous êtes plus qu’une famille et je compterai toujours sur vous. Merci à tous, Papa, Maman, Olivier et Claire, Laurence et Bernard, Constance, René Janvier, Hortense et Providence. A toi aussi Diane et tous les autres amis de la famille qui m’ont encouragé. A Marie-Liesse, je n’ai pas encore eu l’occasion de venir te voir mais j’espère que c’est pour bientôt, ta venue au monde est pour nous une bénédiction.
A Monsieur et Madame MALASSINET et vôtre famille je vous remercie pour votre accueil chaleureux à mon arrivée à Tours ; Geneviève je vous remercie pour tout ce que vous avez fait pour que je puisse m’inscrire à l’université, cette thèse en est l’aboutissement.
A Mme de PAS, vous m’avez soutenu à la Bergeonnerie pour que je puisse faire ma première année d’université dans de bonnes conditions, Je vous en suis très reconnaissant.
A Monsieur et Madame JONET, je vous remercie pour tous les encouragements que vous m’avez témoignés
A tous mes amis de la Faculté de l’Université de Tours, je tiens à vous remercier beaucoup après tant d’années d’éloignement.
Je te remercie cher Yao tu as toujours été un grand frère pour moi je te remercie.
Merci aussi chers amis Adrien et Sébastien nous avons toujours été solidaires à la Faculté de l’Université de Tours.
Merci à Vanessa, Massar, Evariste pour les moments que nous avons passé ensemble à l’Université de Tours.
A TOUTES CELLES et TOUS CEUX que j’aurais oublié, je vous prie de m’en excuser et de trouver ici mes remerciements.
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TABLE DES MATIERES
TABLE DES MATIERES ... - 7 -
TABLE DES ILLUSTRATIONS ... - 9 -
INTRODUCTION ... - 11 -
- Le remodelage osseux ... - 13 -
a) Le système RANK/RANK-L/OPG ... - 13 -
b) La voie Wnt/β-catenin ... - 14 -
1. Ostéolyse au cours des maladies bénignes : cas de l’ostéoporose ... - 18 -
1.1 L’ostéoporose chez la femme ... - 18 -
a. Rôle des œstrogènes dans le remodelage osseux ... - 18 -
1.2 L’Ostéoporose chez l’homme ... - 19 -
1.3 Traitements des ostéoporoses ... - 20 -
2. Ostéopathies au cours des maladies malignes ... - 21 -
2.1 Le myélome multiple. ... - 21 -
2.2 Métastases des tumeurs solides ... - 22 -
a) Mécanismes des métastases ostéolytiques ... - 23 -
b) Mécanismes des métastases ostéocondensantes ... - 26 -
3. La vascularisation osseuse ... - 28 -
3.1 La vascularisation osseuse normale ... - 28 -
3.2 Relation entre la vascularisation osseuse et le remodelage osseux ... - 31 -
3.3 Modification de la vascularisation au cours des pathologies malignes ... - 32 -
3.4 L’angiogenèse ... - 32 -
a) L’angiogenèse tumorale ... - 33 -
La voie VEGF et ses récepteurs ... - 33 -
La voie Notch-Deltalike ligand 4 ... - 34 -
b) Les inhibiteurs de l’angiogenèse ... - 34 -
c) Les immunomodulateurs à effet anti angiogénique : le thalidomide et ses dérivés ... - 35 -
3.5 Caractéristiques du réseau vasculaire dans les tumeurs malignes ... - 36 -
4. Biomatériaux dans les pathologies osseuses ... - 38 -
4.1 Définition d'un biomatériau ... - 38 -
a) La biocompatibilité ... - 38 -
b) La bioactivité ... - 38 -
4.2 Périmètres actuels de l’utilisation des biomatériaux ... - 38 -
- 8 -
4.3 Biomatériaux et ingénierie tissulaire osseuse ... - 39 -
4.4 Substituts utilisables dans les pathologies osseuses (comblement osseux) ... - 39 -
a) Les greffes osseuses ... - 39 -
L’autogreffe ... - 39 -
Les xénogreffes ... - 40 -
b) Substituts osseux alternatifs de la greffe ... - 40 -
Les matériaux naturels ... - 40 -
Les métaux ... - 40 -
Les biocéramiques ... - 41 -
Les polymères ... - 41 -
- Le poly(2-hydroxyéthyl méthacrylate) pHEMA ... - 42 -
4.5 Les polymères dans le ciblage de l’angiogenèse ... - 43 -
a) Les polymères et l’effet EPR (enhanced permeability retention) ... - 43 -
5. TRAVAUX PERSONNELS ... - 45 -
ARTICLE 1 ... - 46 -
ARTICLE 2 ... - 53 -
ARTICLE 3 ... - 64 -
ARTICLE 4 ... - 71 -
6. CONCLUSIONS ET PERSPECTIVES ... - 79 -
Perspectives envisageables ... - 80 -
7. RÉFÉRENCES ... - 82 -
8. ANNEXE ... - 99 -
ARTICLE 5 ... - 100 -
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TABLE DES ILLUSTRATIONS
Figure 1 : Interactions entre les ostéoblastes et les ostéoclastes au sein de l’unité multicellulaire de remodelage osseux (Page 16)
Figure 2 : Le système RANK/RANKL/OPG en présence d’OPG qui se lie sur RANKL, les cellules stromales ne peuvent plus se lier aux précurseurs ostéoclastiques = inhibition de l’ostéoclastogenèse (Page 17)
Figure 3 : Le cycle vicieux dans les métastases ostéolytiques : Les cellules cancéreuses produisent du PTHrP et d’autres facteurs qui augmente la résorption osseuse. Celle-ci libère des facteurs de croissance de la matrice dont le TGFβ qui stimule la production du PTHrP par les cellules cancéreuses. Du collagène dégradé exerce du chimiotactisme sur les cellules cancéreuses (Page 25)
Figure 4 : Déroulement d’une métastase ostéocondensante. Au départ la métastase comporte une phase ostéolytique qui progressivement diminue (inactivation de PTHrP), alors que les cytokines et les facteurs de croissance libérés amplifient progressivement la phase ostéoblastique (Page 27)
Figure 5 : Schéma de la vascularisation artérielle d’un os long (Page 29) Figure 6 : Schéma de la vascularisation veineuse d’un os long (Page 30)
Figure 7 : Comparaison entre le réseau vasculaire normal (a) et le réseau vasculaire tumorale. Dès la formation et la maturation les vaisseaux tumoraux sont désorganisés (Page 37)
Figure 8 : Protocole illustratif de fabrication de microbilles de pHEMA (Page 48)
Figure. 9 : microcrobilles de pHEMA injectées et mises en évidence dans les macrophages hépatiques chez le rat (microscopie confocale, contre coloration des noyaux au DAPI).
(Page 49)
Figure 10 : Reconstruction en 3D des cellules endothéliales sur lesquelles les microbilles de pHEMA ont été déposées. (A) Sans transparence, seules les microbilles de pHEMA à l’extérieur des cellules sont visibles (B) Les microbilles internalisées par les cellules endothéliales deviennent visibles grâce à la fonctionnalité « transparence » du logiciel Ant. (Page 51) Figure 11 : récapitulatif du processus du mode opératoire jusqu’à l’euthanasie des animaux (Page 55) Figure 12 : Granules de β-TCP (Kasios) en microscopie électronique à balayage (Page 56)
Figure 13 : Images en 2D des fémurs de lapin. On voit les defects osseux comblés par le β-TCP. (A) groupe D8K-, (B) groupe D8K+, un pore interne du biomatériau (flèche), (C) groupe D28K- (D) groupe D28KL, (E) groupe D28K+
Figure 14 : Image d’une coupe histologique colorée au bleu de toluidine/borax. Le β-TCP est au contact de l’os, beaucoup d’ostéoblastes sont présentes et des fragments de β-TCP sont phagocytés par des macrophages (flèche) (Page 61)
(Page 59)
Figure 15 : Mesure de BV/TV, de Tb.Th et du nombre de microbilles (Mb.N) dans les différentes zones, évolution au cours du temps et en fonction du traitement par kétoprofène (Page 62)
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Figure 16 : Technique pour visualiser simultanément le tissu osseux et son le réseau vasculaire en 3D.
Les vaisseaux sanguins sont perfusés avec un agent contrastant le microfil. (A) modèle non décalcifié, seuls les gros vaisseaux sont visualisés avec l’os. (B) modèle décalcifié, seul le réseau vasculaire est visible. (C) Les 2 modèles précédents sont superposés. L’artère nourricière sert de repère. Les 3 images montrent l’architecture vasculaire dans un fémur sain (Page 67)
Figure 17 : Hypervascularisation dans les métastases ostéolytiques de rat. (A) à 26 jours post- inoculation des cellules W256/B les lésions osseuses sont importantes. (B) Les fémurs sont hypervascularisées à l’intérieur de l’os et au niveau du périoste. Les vaisseaux ont une architecture désorganisée et sont tortueux (Page 69)
Figure 18 : Formule chimique développée de l’acide zolédronique (Page 72)
Figure 19 : Effet préventif de l’acide zolédronique, modèles 3D obtenus en micro CT. (A) Groupe SHAM, la zone radioclaire (↓) correspond au cartilage de croissance (B) Groupe ZOL une ostéocondensation dans la spongiose primaire (modèle de Schenk) était visible (↓).
(Page 74)
Figure 20 : Effet préventif de l’acide zolédronique, modèles 3D obtenus en micro CT. (A) Groupe MLL, une importante ostéolyse a été observée, l’extension de la tumeur dans les tissus mous donnait une image en « feu d’herbe » (↓) (B) Groupe MLL+ZOL une ostéocondensation importante dans la spongiose primaire (modèle de Schenk) et dans la spongiose secondaire était visible (↓) (Page 75)
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INTRODUCTION
Le tissu osseux est composé d’une matrice extracellulaire rigide comportant une phase organique et une phase inorganique. La phase inorganique ou minérale est principalement constituée de calcium et de phosphore, stockés sous forme de cristaux d’hydroxyapatite (Ca
10[PO
4]
6[OH]
2Le tissu osseux est constitué par le tissu dense (80%) localisé dans la diaphyse des os longs et les corticales des os plats et par le tissu trabéculaire (20%) situé à l’intérieur des épiphyses des os longs, des corps vertébraux et des os plats (par exemple l’os iliaque). De par sa composition, le tissu osseux assure plusieurs fonctions : il est le principal réservoir de calcium dans l’organisme et assure une fonction métabolique en libérant ou absorbant cet ion dans l’organisme selon les besoins ; il est l’hôte de la moelle hématopoïétique essentielle à la différenciation des cellules du sang et de l’immunité ; il joue un rôle de protection des organes essentiels vis à vis des contraintes mécaniques (cerveau, cœur, poumon, moelle épinière) ; il remplit enfin une fonction mécanique en supportant tout le poids du corps et en s’adaptant aux diverses contraintes mécaniques auxquelles il est soumis. L’os trabeculaire forme un réseau tridimensionnel avec une microarchitecture caractéristique constituée d’une interconnexion de plaques et de piliers, libérant des espaces où se trouvent la moelle hématopoïétique et des adipocytes (Whitehouse et coll., 1971). Les travées osseuses sont orientées selon les lignes de contraintes qu’exercent la gravité et les tensions musculaires ; une telle adaptation est connue sous le nom de loi de Wolf. La microarchitecture du réseau trabéculaire est maintenant reconnue comme un des signes révélateurs de la qualité osseuse (Chappard et coll., 2008).
) (HAP), de carbonate de calcium et de phosphate de magnésium. La phase organique est quant à elle constituée par des fibres de collagène (principalement de type I) agencées en lamelles, de protéoglycanes, ainsi que de nombreuses autres protéines non collagéniques (ostéopontine, ostéonectine, ostéocalcine…) synthétisées par les cellules osseuses ou pouvant provenir d’autres tissus (le foie par exemple pour la fétuine).
Pour s’adapter aux différentes contraintes qui s’exercent sur lui, l’os est en perpétuel
renouvellement (ou remodelage) avec 1) une phase de résorption, où une partie de l’os est
détruite par les ostéoclastes, 2) une phase de quiescence et 3) une phase de formation où les
ostéoblastes élaborent une nouvelle unité de structure mieux adaptée mécaniquement ou
métaboliquement. En dehors de toute pathologie osseuse, le remodelage aboutit à un équilibre
entre résorption et formation osseuses. En réalité, cet équilibre est théorique ; il est en
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fonction du vieillissement des individus et d’autres facteurs génétiques, mécaniques, nutritionnels ou toxiques. Chez les sujets jeunes, la phase de formation osseuse domine jusqu’au pic de la masse osseuse (18 à 20 ans). Après une période de consolidation jusqu’à l’âge de 30 ans où le pic de masse osseuse est atteint, la formation osseuse est toujours légèrement déficitaire entraînant une perte osseuse responsable d’un amincissement trabéculaire (Heaney et coll., 2000). La perte osseuse peut être accélérée par plusieurs facteurs, génétiques, hormonaux, ou en cas de dérèglement du remodelage osseux secondaire suite à un processus tumoral primitif ou secondaire. L’hérédité représente un facteur déterminant pour l’acquisition d’un capital osseux suffisant en fin de croissance. Les apports nutritionnels en calcium et en protéines sont aussi fondamentaux (Rizzoli et coll., 2007).
L’ostéoporose a plus de chances de se constituer chez les sujets dont le capital osseux de départ sera faible, le risque s’aggravant en cas de carence hormonale (en particulier chez la femme lors de la ménopause ou en présence d’une réduction des androgènes chez l’homme) et lors du vieillissement. D’autres facteurs favorisant la constitution de l’ostéoporose peuvent être liés aux modes de vie et à l’environnement. Dans les pathologies tumorales, (par exemple métastases osseuses du cancer de la prostate ou du sein), des cellules cancéreuses métastasent de préférence dans l’os car elles y trouvent un microenvironnement favorable à la greffe tumorale et au développement d’une tumeur secondaire. Ce phénomène a été pressenti depuis longtemps par Sir James Paget qui a énoncé la théorie « the seed and the soil » (Fidler, 2003;
Guise and Mundy, 1998). Un cycle vicieux se met en place : la résorption osseuse libère les
facteurs de croissance nécessaires (séquestrés dans la matrice osseuse) à la prolifération des
cellules cancéreuses. A leur tour, les cellules cancéreuses libèrent des facteurs qui influencent
les cellules osseuses en particulier et provoquent une ostéoclastogenèse (cas des métastases
ostéolytiques) ou une apposition osseuse accrue (cas des métastases ostéocondensantes). Une
des particularités des métastases osseuses est leur caractère hypervasculaire avec une mise en
place des vaisseaux sanguins à l’architecture anormale.
- 13 - - Le remodelage osseux
Le remodelage résulte d’un couplage entre les ostéoclastes et les ostéoblastes qui agissent de façon cohérente pour maintenir la masse osseuse. Ce couplage est connu depuis les années ‘70 sous le nom de BMU (basic multicellular unit) ou unité multicellulaire de remodelage osseux (Frost, 1989). Les ostéoclastes sont des cellules multinucléées qui dérivent d’un précurseur commun avec la lignée granulocyte-macrophage d’origine hématopoïétique (CFU-GM ; colony forming unit-granulocyte macrophage). Les ostéoblastes quant à eux, sont des cellules mononucléées dérivant d’une cellule souche mésenchymateuse ou cellule stromale. En élaborant la matrice osseuse, les ostéoblastes synthétisent d’abord la phase organique (protéines collagéniques et non collagéniques) et la minéralisent dans un second temps. Les ostéoblastes incorporent ainsi plusieurs facteurs de croissance sous forme inactive, TGF-β (transforming growth factor -
β), BMP (bone morphogenetic proteins), insulin-like growthfactors (IGF)… Lorsque les ostéoclastes résorbent la matrice osseuse, ils libèrent de nombreuses enzymes protéolytiques (cathepsine K, matrix métalloprotéase…) qui vont hydrolyser les protéines collagéniques, libérant ainsi les facteurs de croissance qui deviennent activés localement. Ces facteurs agissent sur les cellules stromales pour permettre à nouveau la différenciation des ostéoblastes ; le TGF-β inhiberait aussi la différentiation des précurseurs des ostéoclastes en ostéoclastes matures. Ce couplage est possible grâce à un certain nombre de mécanismes moléculaires dont les deux les plus connus sont, la voie RANK/RANK- L/OPG et la voie Wnt (Chappard et coll., 2003; Manolagas and Jilka, 1995; Robling et coll., 2006; Roodman, 2004).
a) Le système RANK/RANK-L/OPG
Le récepteur RANK (récepteur pour l’activation du facteur de transcription NF-κB) est exprimé à la surface des précurseurs des ostéoclastes (Hsu et coll., 1999; Nakagawa et coll., 1998). Son ligand RANK-L est une protéine membranaire exprimée dans les cellules stromales de la moelle, les ostéoblastes et les cellules bordantes ainsi que dans les lymphocytes activés. Les précurseurs ostéoblastiques peuvent libérer dans le microenvironnement une cytokine, le M-CSF (macrophage colony stimulating factor).
L’expression de RANKL est induite par les cytokines ou hormones stimulant la résorption
osseuses telles que l’hormone parathyroïde (PTH) ou la PTHrp (parathyroid hormone related
protein), la vitamine D (1,25-(OH)
2D
3) et les prostaglandines (Boyle et coll., 2003; Hofbauer
and Heufelder, 1998; Yasuda et coll., 1998). En présence de M-CSF et lors du contact entre
- 14 -
les précurseurs ostéoblastiques et ostéoclastiques, une prolifération puis une fusion des précurseurs ostéoclastiques surviennent en donnant des précurseurs ostéoclastiques tardifs qui se rapprocheront des surfaces osseuses pour donner des ostéoclastes actifs : c’est le processus d’ostéoclastogenèse (Roodman, 2007). Cependant un troisième acteur intervient dans cette voie, l’ostéoprotégérine (OPG) qui est un récepteur leurre de RANKL. L’OPG est membre de la superfamille des TNF (de même que RANK) et est produite par les ostéoblastes (Lacey et
coll., 1998). Elle bloque la liaison RANK/RANK-L en s’attachant à RANKL qui ne peut plusse lier aux précurseurs ostéoclastiques, inhibant ainsi l’ostéoclastogenèse. Le rapport OPG/RANKL détermine le nombre d’ostéoclastes formés sur les surfaces osseuses ; il est faible chez les sujets normaux mais un déséquilibre entraine une ostéoclastogenèse puis une perte osseuse (Kong et coll., 1999; Simonet et coll., 1997).
b) La voie Wnt/β-catenin
La voie Wnt/β-catenin joue un rôle dans la formation osseuse car elle favorise la prolifération, l’expansion et la survie des précurseurs et des ostéoblastes immatures (Westendorf et coll., 2004). La β-caténine est une glycoprotéine de la famille des cadhérines qui jouent un rôle majeur dans l’adhésion cellulaire. La voie Wnt favorise aussi l’expression d’OPG par les ostéoblastes et inhibe l’expression de RANKL (Glass Ii et coll., 2005; Spencer et coll., 2006).
La signalisation de Wnt se fait principalement par la voie canonique (des voies non canoniques sont en cours d’investigation en biologie osseuse) (Krishnan et coll., 2006). En absence de molécules Wnt dans le microenvironnement, un complexe de destruction de la β- caténine est formé. Le complexe phosphoryle la β-caténine qui est reconnue et dégradée par les protéases. Dans la voie canonique, les glycoprotéines Wnt se lient aux récepteurs de la famille frizzled (FZD). L’ensemble Wnt-FZD s’attache aux protéines LRP 5 ou LRP6 (low- density lipoprotein receptor-related protein). Le complexe Wnt-FZD-LRP 5 (ou 6) active la protéine dishevelled qui empêche la formation du complexe de destruction de la β-caténine.
La
β-caténine peut ainsi aller dans le noyau et s’attache au facteur de transcription T-cellfactor 4 pour activer l’expression des gènes cibles (Pinzone et coll., 2009). Les ostéoblastes expriment aussi plusieurs facteurs solubles qui inhibent la voie canonique de Wnt comme Dickkopf-1 (DKK1), secreted frizzled-related protein (sFRP2).
Une première partie du travail sera consacrée à la synthèse des connaissances actuelles sur la
perte osseuse au cours des maladies bénignes ou malignes. Nous aborderons la vascularisation
osseuse normale et son rôle dans le remodelage osseux, de la modification de la
- 15 -
vascularisation au cours des tumeurs et des biomatériaux pouvant être utilisés pour traiter les
pertes osseuses. Dans une deuxième partie nous présenterons nos résultats sous forme
d’articles. Nous avons étudié les effets d’un bisphosphonate utilisé de façon préventive dans
un modèle de métastases chez le rat. Nous avons mis au point les microbilles fluorescentes et
fonctionnalisées pouvant être utilisées pour caractériser l’angiogenèse. Nous décrirons
l’utilisation d’un polymère radio-opaque à base de silicone pour caractériser la vascularisation
tumorale chez le rat. Nous évaluerons aussi l’effet d’un anti-inflammatoire non stéroïdien sur
l’incorporation d’un biomatériau dans un modèle de comblement osseux chez le lapin. Enfin
la troisième partie exposera les conclusions et les perspectives de ce travail.
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Figure 1 : Interactions entre les ostéoblastes et les ostéoclastes au sein de l’unité multicellulaire de remodelage osseux
- 17 -
Figure 2 : Le système RANK/RANKL/OPG en présence d’OPG qui se lie sur RANKL, les cellules stromales ne peuvent plus se lier aux précurseurs ostéoclastiques = inhibition de l’ostéoclastogenèse.
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1. Ostéolyse au cours des maladies bénignes : cas de l’ostéoporose
L’ostéoporose est une maladie systémique se caractérisant par une perte osseuse et une désorganisation de la microarchitecture osseuse responsable d’une susceptibilité accrue aux fractures. Au cours de l’ostéoporose, la perte osseuse peut s’observer dans tous les os ; certaines pièces osseuses comme le crâne sont moins facilement impliquées, au niveau de la la mandibule et du maxillaire, les facteurs locaux prédominent sur les facteurs systémiques (Bodic et coll., 2005). Les fractures les plus fréquentes rencontrées dans l’ostéoporose concernent le poignet (fracture de Pouteau-Colles), les vertèbres et la hanche (Holroyd et
coll., 2008). L’ostéoporose touche particulièrement les femmes après la ménopause en raisonde la carence en œstrogène, mais le nombre d’hommes ayant une fracture de la hanche un grand indice révélateur de l’ostéoporose n’est pas négligeable, environ 25%. Depuis que l’espérance de vie augmente, l’ostéoporose représente un vrai problème de santé publique car entrainant chez les patients fracturés une réduction de la qualité de vie, de façon particulière les fractures de la hanche laissent une morbidité élevée nécessitant fréquemment une aide ou un placement en institution (Chappard and Chapurlat, 2009).
1.1 L’ostéoporose chez la femme
Chez la femme, l’ostéoporose post-ménopausique se déroule en deux phases : une phase rapide déclenchée à la ménopause (suite à la carence en œstrogènes). Il y a induction d’une perte osseuse accélérée sur une période allant de 4 à 8 ans suivie d’une phase où la perte osseuse redevient plus lente. Des estimations prévoient qu’une femme va perdre au cours de sa vie 30 à 50% de masse osseuse. Deux enquêtes épidémiologiques réalisées aux Etats-Unis et au Royaume-Uni émettent l’hypothèse qu’une femme sur deux ayant plus de 50 ans, a le risque d’avoir au moins une fracture ostéoporotique pour le reste de sa vie (Holroyd et coll, 2008).
a. Rôle des œstrogènes dans le remodelage osseux
Il est communément admis que les ostéoblastes, les ostéocytes et les ostéoclastes interagissent
avec les œstrogènes dont ils expriment les récepteurs fonctionnels. L’action possible des
œstrogènes dans le remodelage osseux pourrait se traduire par un effet sur la production des
cytokines par les lymphocytes T ; un effet sur la production de RANKL et de l’OPG par les
ostéoblastes ; un effet direct sur les ostéoclastes différenciés (Raisz, 2005). L’adaptation de
l’os aux différentes contraintes exercées sur lui, requiert que le récepteur ERα soit fonctionnel
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dans les ostéoblastes et cette condition dépend de la concentration en œstrogène. Dès lors la fragilité osseuse survenant lors de la ménopause pourrait s’expliquer par une activité réduite du récepteur ERα consécutive d’une déficience en œstrogène (Lee et coll., 2003). La déficience en œstrogène conduit à une augmentation dans l’os des unités de remodelage, à une expansion de la zone de remodelage, à une porosité corticale et à un élargissement de la zone de résorption à la surface des travées. La durée de la phase de résorption est augmentée car l’apoptose des ostéoclastes est réduite. Par ailleurs la déficience en œstrogène augmente l’apoptose des ostéoblastes ainsi que la production des cytokines pro inflammatoires TNF (facteur de nécrose tumorale) et l’IL-7 (interleukine 7) qui perturbent l’activité des ostéoblastes matures (Pacifici, 2008).
Lors de la ménopause, les taux d’œstrogènes sériques diminuent sensiblement pour tomber à 10-15 % pour l’œstradiol et 25-35% pour l’œstrone, comparés aux niveaux observés en pré ménopause (Khosla et coll., 1997). Les concentrations d’œstradiol post ménopausiques sont généralement inférieures à 30 pg/ml. Une concentration en œstradiol supérieure à 10pg/ml entraine une diminution de 0,1% de densité minérale osseuse au niveau de la hanche et 8 fois plus de pertes osseuses si la concentration sérique en œstradiol est inférieure à 5pg/ml (Stone
et coll., 1998). Les marqueurs biochimiques de résorption osseuse augmentent de 90% alorsque ceux de la formation osseuse augmentent de moitié (45%) entrainant une perte osseuse visible en histomorphométrie et densitométrie biénergétique. La densité minérale osseuse basse prédit assez bien le risque de fracture ostéoporotique mais un important chevauchement entre les valeurs normales et pathologiques existe (McCreadie et coll., 2006).
1.2 L’Ostéoporose chez l’homme
Il a été longtemps considéré que l’ostéoporose était une maladie exclusivement féminine or
25% des fractures de la hanche (extrémité supérieure du fémur) surviennent chez l’homme
avec un taux de mortalité (à 1 mois post fracture) 2 à 3 fois supérieur à celui des femmes
(Legrand et coll., 2002) Les autres fractures rencontrées dans l’ostéoporose masculine
concernent les vertèbres et dans une moindre proportion l’humérus, le pelvis, l’extrémité
inférieure du radius. Un homme sur huit, âgé de plus de 50 ans, aura au moins une fracture
ostéoporotique avant la fin de sa vie et la mise en institution reste élevée pour les hommes. La
moindre prévalence de l’ostéoporose et des fractures chez l’homme s’explique par l’absence
d’équivalent de la ménopause mais également un capital osseux initial plus élevé, une
meilleure qualité osseuse et des chutes moins fréquentes. Cependant l’incidence des fractures
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s’accroit de façon exponentielle avec l’âge à la fois chez l’homme et la femme. La différence entre ostéoporose masculine et ostéoporose féminine est que le seuil d’intervention est mal connu et qu’il y a très peu d’études spécifiques chez l’homme. Les formes secondaires d’ostéoporose sont plus fréquentes chez l’homme que chez la femme en raison notamment du mode de vie sociétale et les facteurs étiologiques sont multiples. Ils peuvent être liés à l’alcoolisme, le tabagisme, l’hypogonadisme, l’hypercalciurie, l’hyperthyroïdie, l’inactivité physique mais aussi aux traitements comme les glucocorticoïdes. En l’absence de tout facteur étiologique on parle d’ostéoporose idiopathique (Audran et coll., 2000; Bilezikian, 1999;
Boonen et coll., 2007; Bouvard et coll., 2009; Gennari and Bilezikian, 2007; Olszynski et
coll., 2004).1.3 Traitements des ostéoporoses
Si les agents pharmacologiques ont été bien étudiés chez la femme, les études sont plus rares chez les hommes. Une reprise prudente des exercices physiques pourrait permettre de maintenir la masse osseuse et ainsi limiter les risques de chutes. Chez les personnes âgées une alimentation riche en calcium, en protéines et en vitamine D est conseillée, au moins 1200 mg de calcium et 400 à 800 UI de vitamine D par jour. Les bisphosphonates sont utilisés pour freiner la perte osseuse et sont devenus des agents de première ligne dans l’ostéoporose postménopausique. Chez l’homme, les premières études ont montré des améliorations significatives de la densité minérale osseuse au rachis lombaire et à la hanche (Orwoll et coll., 2000; Ringe et coll., 2009). Les bisphosphonates couramment utilisés dans le traitement des ostéoporoses sont l’alendronate, le risédronate et l’acide zolédronique. D’autres traitements disposant de l’AMM font appel au ranélate de strontium qui favorise la formation osseuse et limite la résorption, au tériparatide qui augmente le niveau de remodelage osseux en favorisant l’apposition ostéoblastique et aux SERM (selective estrogen receptor modulators).
Dans les ostéoporoses secondaires, l'arrêt des intoxications tabagiques et alcooliques est à
encourager.
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2. Ostéopathies au cours des maladies malignes
Les ostéopathies malignes sont des complications cliniques survenant dans l’évolution de nombreux types de tumeurs solides et dans des hémopathies comme les lymphomes B et le myélome multiple. Les métastases osseuses ont comme conséquences, des douleurs sévères, un risque accru de fractures pathologiques et leurs conséquences (compression médullaire), l’anémie et l’hypercalcémie (Chappard et coll, 2003; Debiais and Martin, 2009). L’ostéolyse au cours des maladies malignes est liée à une hyperrésorption osseuse dans l’environnement proche des cellules métastatiques (métastases ostéolytiques du cancer du sein et nodules plasmocytaires) (Roodman, 2004). Cependant, certaines tumeurs au contraire favorisent l’apposition ostéoblastique et induisent une ostéosclérose (cas des cancers prostatiques).
2.1 Le myélome multiple.
L’ostéolyse au cours du MM est liée à une hyperrésorption osseuse dans l’environnement
proche des cellules métastatiques et plasmocytaires (Roodman, 2004). Le myélome multiple
(MM) est une hémopathie maligne provoquée par une prolifération et une accumulation de
plasmocytes tumoraux à l’intérieur de la moelle osseuse. Il représente 1% des tumeurs
malignes et sa prévalence est de 1 sur 10000 et le délai de survie est d’environ 3 ans
(Angtuaco et coll., 2004). Bien que il ait une part faible dans les tumeurs malignes, le MM est
le cancer le plus fréquemment associé avec des lésions osseuses ostéolytiques qui peuvent
survenir jusqu’à 90% des cas (Roodman, 2009). Les patients avec un MM ont plus de risques
de développer les fractures en comparaison avec les patients ayant un cancer du sein, de la
prostate ou du poumon. Aussi les patients avec un MM et des fractures pathologiques ont une
mortalité de 20% supérieure à ceux sans fracture pathologique (Saad et coll., 2007). Les
lésions ostéolytiques se présentent sous formes de foyers « à l’emporte pièce » au voisinage
des plasmocytes tumoraux. La destruction osseuse n’est pas directement provoquée par les
cellules plasmocytaires tumorales mais à une stimulation de l’ostéoclastogenèse par les
cytokines produites par les plasmocytes tumoraux. D’autre part, des facteurs de croissance
produits dans le processus de remodelage (IL-6 et IGF-I) vont stimuler en retour la croissance
des plasmocytes tumoraux, créant ainsi un cycle vicieux dans lequel la résorption osseuse va
stimuler les cellules myélomateuses qui à leur tour vont favoriser la destruction osseuse
(Edwards et coll., 2008). Les plasmocytes tumoraux dérégulent le remodelage en sécrétant
RANK-L (ou en provoquent une augmentation de RANK-L dans les cellules de la lignée
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ostéoblastique), la chimiokine MIP-1α (macrophage inflammatory protein), IL-6 et IL-3 (Roodman, 2009). La voie RANK/RANKL/OPG joue un rôle important dans l’ostéolyse liée au MM. Le rapport RANKL/OPG qui détermine le nombre d’ostéoclastes est déséquilibré en faveur de RANKL qui est exprimé par les cellules du MM. La protéine MIP-1α est produite dans 70% des patients du MM et peut activer l’ostéoclastogenèse indépendamment de RANK-L. La voie Wnt intervient aussi dans le MM car les inhibiteurs de cette voie, DKK1 et sFRP2 sont produits au cours du MM par les plasmocytes (Oshima et coll., 2005; Politou et
coll., 2006).2.2 Métastases des tumeurs solides
La plupart des tumeurs solides peuvent métastaser dans l’os. Beaucoup de patients meurent non à cause de l’évolution de la tumeur primitive, mais suite à sa dissémination dans d’autres organes (Mundy, 2002). 70% des patients atteints de cancer du sein ou de prostate ont un risque de développer des métastases osseuses. Les conséquences liées aux métastases osseuses sont nombreuses : douleurs osseuses sévères, risque de fracture, hypercalcémie, anémie ou compression médullaire (Coleman, 2006). L’établissement préférentiel des cellules métastatiques dans l’os s’explique par le chimiotactisme exercé sur elles par le microenvironnement osseux riche en facteurs de croissance nécessaire à leur prolifération et la libération de collagène dégradé (fragments αCTX). Il existe aussi une adhérence sélective des cellules métastatiques sur la surface des cellules endothéliales des capillaires de la moelle osseuse.
Du point de vue radiologique, deux types de métastases sont caractérisées : des métastases
ostéolytiques et des métastases ostéocondensantes. Mais un tel aspect n’est pas strict, dans le
cancer du sein, des foyers atypiques de condensation sont observés chez certains patients
(métastases mixtes). Les métastases ostéolytiques et ostéocondensantes représentent deux
extrêmes d’un continuum dans lequel une dérégulation du remodelage a lieu (Coleman,
2006). Dans le cas des métastases ostéolytiques, le remodelage est déséquilibré en faveur de
la résorption osseuse mais des foyers d’ossification sont fréquemment observés sur les coupes
histologiques si des territoires larges sont analysés. Les métastases ostéocondensantes sont
dues à une activation des ostéoblastes suffisamment importante pour contrebalancer et
dépasser la résorption ostéoclastique ; il s’ensuit un déséquilibre en faveur de l’apposition
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ostéoblastique (Chappard et coll, 2003; Guise et coll., 2006; Guise and Mundy, 1998;
Roodman, 2004).
a) Mécanismes des métastases ostéolytiques
Les métastases ostéolytiques sont rencontrées de façon fréquente dans l'évolution des cancers du sein ou du poumon. L'adénocarcinome mammaire est le plus souvent utilisé comme modèle. La plupart des cellules cancéreuses, dont celles des adénocarcinomes mammaires produisent des facteurs qui stimulent la résorption osseuse: PTHrP (parathyroid hormone related protein), les interleukines IL-11, IL-8, IL-6, RANK-L, le TNFα. La PTHrP, de par son homologie structurale avec l'hormone parathyroïdienne, se fixe au récepteur de la PTH, PTH1R présent à la surface des ostéoblastes pour stimuler l’expression RANK-L. La PTHrP est exprimée dans 50 à 60% des adénocarcinomes mammaires chez la femme et son expression est plus importante dans les métastases osseuses que dans les sites primaires (Mundy, 2002). La PTHrP peut agir aussi de façon autocrine en faisant produire les cellules cancéreuses un facteur pro-ostéoclastique le CTGF/CCN2 (connective tissue growth factor) (Shimo et coll., 2006). L’interleukine IL-6 est un stimulant de l’ostéoclastogenèse et peut renforcer les effets de la PTHrP. La production de RANKL se traduit par une diminution d’OPG dans le microenvironnement et les protéines RANKL activent les précurseurs ostéoclastiques qui vont se différencier en ostéoclastes. Lors de la résorption les ostéoclastes libèrent des facteurs de croissance séquestrés dans l’os, comme le TGF-β, l’IGF-1 et 2, et les protéines BMP. Or le TGF-β est un puissant promoteur de la croissance tumorale.
Ainsi dans les métastases ostéolytiques un cycle vicieux se met en place : Une fois que ; les
cellules cancéreuses sont immobilisées dans la moelle osseuse elles produisent du PTHrP qui
stimule l’ostéoclastogenèse qui, à son tour, libère du TGF-β agissant comme stimulant de la
croissance tumorale, en effet le TGF-b libéré sous forme active agit à travers la voie des
protéines smad, notamment les protéines smad 4 (Kang et coll., 2005), pour induire la
sécrétion du PTHrP par les cellules cancéreuses. La PTHrP libérée stimulant de nouveau la
résorption de l’os. La résorption osseuse libère aussi des fragments peptidiques de collagène
qui ont un pouvoir chimiotactique sur les cellules tumorales comme l'αCTX (télopeptique C
terminal) (Mundy et coll., 1981). Il a aussi été montré que les cellules tumorales induisaient
dans le microenvironnement osseux, une libération d’acide lysophosphatidique (LPA) par les
plaquettes sanguines qui exercent à leur tour, une action mitogène sur les cellules tumorales
favorisant donc en retour la production de facteurs ostéoclastogéniques (Boucharaba et coll.,
2006; Clézardin, 2009). On voit donc qu'il existe un cercle vicieux entre remodelage osseux et
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croissance tumorale. Les cellules tumorales produisent également des protéines qui inhibent
l’activité des ostéoblastes comme la protéine DKK1 qui intervient dans la voie Wnt ou la
protéine Noggin (Voorzanger-Rousselot et coll., 2007). Noggin est une protéine soluble qui
bloque la différenciation des ostéoblastes en inhibant l’action des BMP 2 et 4. L’action des
cellules cancéreuses, pro-ostéoclastique et inhibitrice de l’activité des ostéoclastes, conduit à
une dérégulation du remodelage osseux en faveur de la résorption osseuse.
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Figure 3 : Le cycle vicieux dans les métastases ostéolytiques : Les cellules cancéreuses produisent du PTHrP et d’autres facteurs qui augmente la résorption osseuse. Celle-ci libère des facteurs de croissance de la matrice dont le TGFβ qui stimule la production du PTHrP par les cellules cancéreuses. Du collagène dégradé exerce du chimiotactisme sur les cellules cancéreuses.
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b) Mécanismes des métastases ostéocondensantes
Les métastases ostéocondensantes sont rencontrées principalement au cours de l'évolution du cancer de la prostate. Les cellules de l’adénocarcinome prostatique synthétisent du PTHrP, de l’IL-1, de l’IL-6 et du M-CSF, ces facteurs sont responsables de l’ostéoclastogenèse entrainant une ostéolyse toujours associée au cancer de la prostate. Les cellules synthétisent aussi des facteurs de croissance qui favorisent la formation osseuse comme l’ET-1 (endothéline-1), les IGF-1 et 2, les BMP, l’OPG, le TGF-β (sous forme inactive), les protéases uPA (urinary plasminogen activator) et PSA (prostate specific antigen), les FGF (fibroblast growth factors), PDGF (platelet derived growth factors) et le facteur de croissance de l et coll., 2005; Virk and Lieberman, 2007).
L’endothéline-1 stimule la prolifération des ostéoblastes, inhibe la motilité des ostéoclastes
(Yin et coll., 2003). L’ET-1 inhibe aussi l’expression de DKK1,inhibiteur de la voie Wnt
(Tian et coll., 2003). Comme dans les métastases ostéolytiques, un cycle vicieux se déroule
lors des métastases ostéocondensantes. Une fois que les cellules cancéreuses arrivent dans
l’os, elles secrètent dans le microenvironnement des facteurs de croissance (ET-1, VEGF,
FGF, BMP). En même temps, elles produisent du PTHrP qui va stimuler l’activité
ostéoclastique entrainant une ostéolyse conduisant à une libération dans le
microenvironnement de facteurs de croissance en particulier le TGF-β. Le
microenvironnement ainsi enrichi en facteurs de croissance, favorise la différenciation des
ostéoblastes et leur activité. Les protéases PSA et uPA (Achbarou et coll., 1994; Cramer et
coll., 1996), produites par les cellules tumorales vont agir sur plusieurs niveaux : diminutiondes taux de PTHrP produits dans le microenvironnement ; clivage des complexes formés par
les protéines de transport et les facteurs de croissance notamment le complexe IGF-IGFBPs
(IGF binding protein), favorisant ainsi la biodisponibilité des IGFs actifs. Ils augmentent
l’activité mitotique des ostéoblastes. Les protéases uPA et PSA activent aussi le TGF-β
synthétisé par les cellules cancéreuses ou par les ostéoclastes pour le transformer en TGF-β
actif sur les ostéoblastes, sur les cellules cancéreuses mais inhibiteur de la différenciation
ostéoclastique. Une métastase d'un cancer prostatique comporte toujours les deux aspects,
composant ostéolytique et réaction ostéocondensante (Chappard et coll, 2003; Clézardin,
2009; Fili et coll., 2009; Guise et coll, 2006). Certaines métastases des cancers prostatiques
sont parfois révélées par des lésions ostéolytiques pures.
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Figure 4 : Déroulement d’une métastase ostéocondensante. Au départ la métastase comporte une phase ostéolytique qui progressivement diminue (inactivation de PTHrP), alors que les cytokines et les facteurs de croissance libérés amplifient progressivement la phase ostéoblastique.
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3. La vascularisation osseuse
L’os est très vascularisé, la vascularisation dans les différents niveaux d'organisation de l'os ainsi que dans ses différentes fonctions : mécanique, réserve de calcium, de sodium et de phosphate et hématopoïèse. Le développement des os dépend de la vasculogenèse dans les tissus embryonnaires. Par exemple, l’ossification enchondrale n’est possible que si les épiphyses fœtales sont vascularisées grâce aux canaux intrachondraux. (Chappard et coll., 1983).
3.1 La vascularisation osseuse normale
Le rôle de la vascularisation dans l’ostéogenèse et la réparation osseuse a été évoqué pour la première fois au 18
èmesiècle par Haller et Hunter en 1763 (Haller, 1763; Hunter, 1794) et depuis, la place majeure de la vascularisation est bien décrite dans le modelage osseux.
Cependant la vascularisation osseuse et son rôle dans le remodelage osseux restent mal
connus. Il existe un lien étroit entre vascularisation et remodelage osseux. Chez l’homme
adulte, on peut voir sur des coupes histologiques que les vaisseaux sanguins jouxtent les
travées osseuses en remodelage et sont présents dans les BMU proches des lacunes
d’Howship (Laroche, 2002). L’anatomie de la vascularisation intraosseuse est en fonction du
type d’os (long ou plat). Chez l’homme adulte, la vascularisation des os longs se compose
d'artères de moyen calibre qui pénètrent les corticales osseuses au niveau de trous nourriciers
et se ramifient en artérioles puis en capillaires (Ficat and Arlet, 1977). Il y a six groupes
d’artères selon leur localisation : artères diaphysaires ou nourricières, au nombre de 1 ou 2 par
pièce squelettique, artères métaphysaires supérieures, artères métaphysaires inférieures,
artères épiphysaires supérieures, artères épiphysaires inférieures, et les vaisseaux périostés
formant un réseau constitué d’anneaux vasculaires autour de la diaphyse et de la métaphyse
(Brookes, 1971; Brookes et coll., 1961; Laroche, 2002; Trueta, 1957). Le retour veineux est
assuré par un sinus veineux central de taille variée pouvant aller du simple au quintuple se
drainant dans des veines parallèles aux artères : veines épiphysaires, métaphysaires et
centromédullaires (Oni and Gregg, 1987; Pooley and Pooley, 1987). Au niveau de la moelle
osseuse, on trouve de multiples capillaires sinusoïdes qui permettent les échanges entre les
cellules et le sang (Pugsley and Tabrizchi, 2000). La vascularisation des os plats comporte un
réseau artériel comparable à celui des os longs mais la différence se situe au niveau du retour
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veineux où il y a de multiples sinusoïdes veineux se drainant directement dans les veines corticales.
Figure 5 : Schéma de la vascularisation artérielle d’un os long (Laroche, 2002)
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Figure 6 : Schéma de la vascularisation veineuse d’un os long (Laroche, 2002)
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3.2 Relation entre la vascularisation osseuse et le remodelage osseux
La présence des vaisseaux sanguins dans les unités de remodelage est maintenant prouvée et
ces vaisseaux jouent un rôle dans le remodelage (Parfitt, 2000). Dans l’os cortical, il a été
montré chez l’homme et le chien qu’au sein d’une unité de remodelage, le vaisseau sanguin
est constitué d’une seule couche de cellules endothéliales ; il est localisé à moins de 100µm
des sites où la résorption osseuse se termine et des sites où les ostéoblastes sont requis (Parfitt,
1994). Le remodelage osseux se déroule dans l’os trabéculaire et dans l’os cortical, dans des
compartiments spécialisés désignés sous le nom de BRC (bone remodeling compartment. Ces
BRC sont vascularisés et tapissés par des cellules au profil ostéoblastique (théorie de la
canopée) (Eriksen et coll., 2007; Hauge et coll., 2001). Les capillaires sinusoïdes participent à
la régulation de l’hématopoïèse en contrôlant le gradient de la pression artérielle en oxygène
au sein de la moelle. Plusieurs études montrent qu’il existe des communications entre cellules
osseuses et cellules vasculaires. En ingénierie tissulaire
in vitro, une coculture entre unelignée de cellules endothéliales humaines et des ostéoblastes humains a conduit à une
formation de structures ressemblant à des microcapillaires (Unger et coll., 2007). Si la
coculture était effectuée sur un support 3D d’amidon et de polycaprolactone, ces structures
évoluaient pour devenir plus complexes avec une forte synthèse du collagène de type 1 par les
ostéoblastes et une matrice dense riche en collagène de type 1 (Santos et coll., 2009). Dans
une étude chez le rat, au niveau de la zone spongieuse secondaire, une corrélation linéaire
positive a été mise en évidence entre le taux de formation osseuse et le nombre de vaisseaux
sanguins marqué à l’encre de Chine, suggérant une relation fonctionnelle entre l’activité
ostéoblastique et l’activité vasculaire (Barou et coll., 2002). Il est bien connu que le VEGF,
promoteur majeur de l’angiogenèse stimule la migration et la différentiation des ostéoblastes
mais exerce aussi un chimiotactisme sur les ostéoclastes et stimule leur activité (Street et coll.,
2002).
In vitro, une des isoformes de VEGF, VEGF-A est aussi exprimée par des cellulessouches mésenchymateuses issues de l’os trabéculaire et exerce un effet autocrine (permettant
la différenciation des ostéoblastes) et un effet paracrine permettant la formation vasculaire
(Mayer et coll., 2005). L’endothéline-1 est un autre facteur angiogénique impliqué dans la
signalisation entre cellules endothéliales et ostéoblastes durant les processus de modelage et
de remodelage osseux. Il induit une baisse d’expression de VEGF-A par les ostéoblastes
in vitro (Veillette and Von Schroeder, 2004; Von Schroeder et coll., 2003). Chez le rat,- 32 -
l’exercice physique par la course induit à la fois un gain osseux et une angiogenèse. Mais si une administration d’anticorps anti VEGF est réalisée en même temps que l’exercice physique, il y a perte à la fois du gain osseux et de l’angiogenèse (Yao et coll., 2004). De nombreuses études montrent ainsi le lien étroit entre angiogenèse et remodelage osseux : les vaisseaux nouvellement formés peuvent servir comme moyen de transport pour les précurseurs ostéoblastiques et ostéoclastiques vers les sites de remodelage osseux (Eriksen et
coll, 2007). Un autre lien entre vascularisation et remodelage osseux concerne le débit intra-osseux qui régule l’action vasodilatatrice et l’ouverture des sphincters pré-capillaires. L’oxyde nitrique (NO) est une molécule qui est impliquée dans la vasodilatation au niveau de l’endothélium vasculaire, mais qui exerce aussi un double effet sur l’activité ostéoclastique. A faible concentration, Le NO a un effet stimulant sur la résorption osseuse et à forte concentration, un effet inhibiteur sur la résorption osseuse (Ralston, 1997). Les fortes concentrations de NO inhibent aussi la différentiation et la croissance des ostéoblastes alors que les faibles concentrations de NO régulent la croissance normale des ostéoblastes et l’action des œstrogènes dans la formation osseuse (Ralston, 1997). Les péricytes, ou cellules de Rouget, sont des cellules d’origine mésenchymateuse qui entourent les cellules endothéliales des capillaires présentes dans les BRC. Elles peuvent se différencier en ostéoblastes au niveau des BRC dans l’os cortical et y constituent une partie de la réserve d’ostéoprogéniteurs. (Mödder and Khosla, 2008).
3.3 Modification de la vascularisation au cours des pathologies malignes
L’hypervascularisation observée au cours des maladies cancéreuses s’accompagne d’une réorganisation architecturale et anatomique du réseau vasculaire qui est régie par l’angiogenèse. Le caractère hyper vascularisé d’une métastase doit faire objet d’une attention particulière lors des traitements nécessitant un geste chirurgical pour éviter toute complication hémorragique difficile à contrôler (Rosset et coll., 2006).
3.4 L’angiogenèse
L’angiogenèse est définie comme étant la formation et la croissance de nouveaux vaisseaux à
partir de vaisseaux préexistants (Risau, 1997). Chez l’adulte l’angiogenèse intervient dans des
phénomènes physiologiques comme le cycle ovarien ou dans la réparation des tissus lésés
(Papetti and Herman, 2002). Globalement l’angiogenèse reste un phénomène limité chez
l’adulte sauf si elle est induite suite à un événement pathologique comme c’est le cas dans le
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cadre des tumeurs malignes où l’angiogenèse tumorale est à la base de la prolifération des cellules cancéreuses ou dans d’autres pathologies vasculaires (Folkman, 1995).
a) L’angiogenèse tumorale La voie VEGF et ses récepteurs
L’angiogenèse est régulée par un certain nombre de cytokines dont les principales sont celles
de la famille VEGF et leurs récepteurs VEGFR-1 et VEGFR-2. VEGF a plusieurs isomères
(de VEGF-A à VEGF-D) (Ferrara, 2002). Cependant c’est VEGF-A qui intervient
principalement dans l’angiogenèse tumorale et il est simplement désigné VEGF. La voie de
signalisation de VEGF se fait principalement par liaison à son récepteur VEGFR-2 qui est
exprimé à des niveaux élevés par les cellules endothéliales engagées dans le processus
d’angiogenèse ou leurs précurseurs situés dans la moelle osseuse (Shibuya and Claesson-
Welsh, 2006). Bien que l’affinité entre VEGFR-1 et VEGF soit 10 fois plus élevée que
l’affinité VEGFR-2/VEGF, le rôle de VEGFR-1 dans l’angiogenèse reste mal connu (Kerbel
and Folkman, 2002). Beaucoup de cellules cancéreuses humaines expriment VEGF et souvent
à des niveaux élevés qui sont associés à un pronostic défavorable chez le patient. L’expression
de VEGF est induite suite à plusieurs facteurs épigénétiques ou génétiques. Parmi ces
facteurs, le plus important est l’hypoxie. L’hypoxie est une oxygénation insuffisante dans les
tissus et elle est une caractéristique des tumeurs solides ; son induction est régie par les
facteurs de transcription HIF1α et HIF2β (hypoxia-inducible transcription factors). Suite à
une baisse de la pression en oxygène dans le microenvironnement, la prolyl hydroxylase 2
(PHD2, enzyme sensible aux variations oxygéniques) ne peut plus hydroxyler HIF1α et HIF2β (Fong, 2009). Ainsi, ces deux facteurs s’assemblent et sont transloqués dans le noyauoù ils contribuent à la transcription d’un certain nombre de gènes responsables de la survie, du
métabolisme et de l’angiogenèse. (Semenza, 2003). Les autres facteurs épigénétiques
favorisant l’expression de VEGF sont, la baisse du pH dans l’environnement tumoral, les
cytokines pro inflammatoires comme l’IL-6, les facteurs de croissances (bFGF), les hormones
sexuelles (androgènes et œstrogènes), les chimiokines (en particulier SDF-1, stromal-cell-
derived factor 1) (Kerbel, 2008). Quant aux facteurs d’ordre génétique favorisant l’expression
de VEGF, on peut citer l’expression d’un certain nombre d’oncogènes ou des mutations
induisant l’inactivation d’une partie des gènes suppresseurs des tumeurs (Yu et coll., 2005). Il
est communément admis que l’action de VEGF se déroule à travers un mécanisme paracrine :
les cellules cancéreuses produisant du VEGF mais pas ses récepteurs. Cependant du VEGF,
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en quantité suffisante pour déclencher l’angiogenèse, peut provenir de différentes cellules comme les cellules stromales associées aux tumeurs (Liang et coll., 2006). Certaines cellules cancéreuses expriment à la fois le VEGF et ses récepteurs en particulier VEGFR-1, mettant en lumière une possible action autocrine. Egalement, les cellules des adénocarcinomes du sein expriment VEGF et VEGFR-1 en intracellulaire ce qui conduit à un mécanisme intracrine qui contribuerait à la survie cellulaire (Lee et coll., 2007).
La liaison entre VEGF et VEGFR-2 conduit à une cascade de signalisations impliquant plusieurs voies. La voie de la phospholipase C gamma (PLCγ) passant par la PKC (protéine C), par la kinase Raf, par MEK (mitogen-induced extracellular kinase) et MAPK (mitogen- activated protein Kinase) conduit à la prolifération des cellules endothéliales. La voie du PI3K ( 1-phosphatidylinositol 3-kinase) et de l’Akt conduit à la survie des cellules endothéliales.
D’autres voies favorisent la perméabilité vasculaire, la migration et la mobilisation des précurseurs des cellules endothéliales (Kerbel, 2008).
La voie Notch-Deltalike ligand 4
b)
Une autre voie de signalisation dans l’angiogenèse et qui y joue un rôle crucial est la voie Notch-cell deltalike ligand (Dll) (Sainson and Harris, 2007). Les récepteurs de Notch sont exprimés à la surface de diverses cellules et sont généralement impliqués dans le devenir des cellules, différenciation et prolifération. Ces récepteurs interagissent avec des ligands transmembranaires, jagged 1, jagged 2, Dll1, Dll3 et Dll4 (Thurston and Kitajewski, 2008).
Seul Dll4 est exclusivement exprimé par les cellules endothéliales. L’interaction entre Notch- Dll4 est considérée comme un mécanisme qui a pour but d’atténuer une angiogenèse excessive et de favoriser l’apparition d’une vascularisation suffisamment bien organisée pour approvisionner la tumeur. VEGF induit l’angiogenèse qui augmente l’expression de Dll4 dans les cellules endothéliales.
Les inhibiteurs de l’angiogenèse
Plusieurs médicaments ciblant l’angiogenèse ont émergé depuis une dizaine d’années passant
de la recherche fondamentale à la recherche clinique même si leur bénéfice clinique reste
modeste et que des cas de résistance sont évoqués (Casanovas et coll., 2005). La plupart de
ces médicaments ciblent la voie VEGF/VEGFR-2 comme le bevacizumab, un anticorps
monoclonal de type IgG1 qui ciblent VEGF l’empêchant de se lier à ses récepteurs VEGFR-1
et VEGFR-2. Le Bevacizumab fut le premier médicament antiangiogénique approuvé. Il est
utilisé dans le traitement du cancer métastatique du colon en combinaison avec la
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chimiothérapie (Ferrara, 2004). Pour la voie Notch-Dll4, le potentiel thérapeutique existe même s’il va à contre courant car le blocage de Dll4 induit une plus grande vascularisation cependant incapable de favoriser la croissance tumorale. Il faudra aussi savoir en quelle mesure la thérapie anti Dll4 pourra être combiné avec la chimiothérapie ou d’autres antiangiogénique, pour éviter des effets contreproductifs (Kerbel, 2008).
c) Les immunomodulateurs à effet anti angiogénique : le thalidomide et ses dérivés