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Gérard D. Khoury, Louis Massignon au Levant. Écrits politiques (1907-1955), préface d’Henry Laurens, Paris, Albin Michel (Bibliothèque histoire) 2019, 473 pages, dans BCAI 34 130 III. HIstoIre

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Gérard D. Khoury, Louis Massignon au Levant. Écrits politiques (1907-1955), préface d’Henry Laurens, Paris,

Albin Michel (Bibliothèque histoire) 2019, 473 pages, dans BCAI 34 130 III. HIstoIre

Julie d’Andurain

To cite this version:

Julie d’Andurain. Gérard D. Khoury, Louis Massignon au Levant. Écrits politiques (1907-1955), préface d’Henry Laurens, Paris, Albin Michel (Bibliothèque histoire) 2019, 473 pages, dans BCAI 34 130 III. HIstoIre. 2020, pp.130-132. �hal-02872832�

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BCAI 34 130 III. HIstoIre

Khoury Gérard D.

Louis Massignon au Levant.

Écrits politiques (1907-1955) préface d’Henry Laurens

Paris, Albin Michel, (Bibliothèque histoire) 2019, 473 pages.

ISBN : 9782226314956

Publié à titre posthume, le dernier ouvrage de Gérard D. Khoury (1938-2017) s’inscrit dans la lignée de ses précédents livres. Le sujet porte sur le monde arabe, sur la rencontre entre l’Orient et l’Occident à la fin du xixe siècle, sur la manière dont les Occidentaux ont d’abord perçu, puis façonné le Levant et, enfin, sur la façon dont certaines communautés, en parti- culier des chrétiens d’Orient, ont perçu et vécu cette rencontre.

Avant de commencer une carrière de chercheur, Gérard D. Khoury s’était essayé à la traduction et au roman qu’il affectionnait particulièrement, mais quand en 1993 il achève sa thèse sous la direction d’Henry Laurens (auteur de la préface de ce der- nier livre), il est désormais pleinement convaincu de l’importance des archives pour comprendre l’histoire d’un pays, et particulièrement le Liban.

Ayant eu le bonheur de découvrir un accord que tout le monde croyait n’avoir jamais existé (l’accord Fayçal-Clemenceau du 6 janvier 1920), il avait saisi la possibilité de mettre au jour des documents encore rares. Assuré qu’ils permettaient d’éclairer un Orient toujours très compliqué, il s’était fait une spécialité de l’histoire du Levant, côtoyant le milieu des chercheurs professionnels avec beaucoup de bonheur.

Cette fascination pour l’archive ne l’a jamais quitté. Il aimait aller aux archives du ministère des Affaires étrangères. Plus que les archives elles-mêmes, c’était la qualité de l’information trouvée dans les échanges épistolaires qui avait fini par devenir l’une de ses spécialités de recherche. Il s’est d’abord beaucoup intéressé à la personne fort complexe de Robert de Caix (1869-1970), publiciste colonial fameux en son temps, collaborateur de nombreux journaux conservateurs tels que le Journal des Débats et Le Temps. Après avoir publié chez Belin en 2006, Une tutelle coloniale, le mandat français en Syrie et au Liban, écrits politiques de Robert de Caix, il était logique que Gérard D. Khoury en vienne à étudier un autre des grands spécialistes français du monde arabe, Louis Massignon (1883-1962), dont il avait découvert l’existence dans le cadre de son DEA. De 15 ans le cadet de Robert de Caix, Louis Massignon apparais- sait comme une figure en miroir. Alors que Robert de Caix avait incarné la politique coloniale de la France par sa volonté d’imposer son impérialisme à travers

le système des protectorats ou des mandats, Louis Massignon faisait figure d’intellectuel, représentant un groupe libéral, qualifié généralement indigéno- phile, soucieux de comprendre et d’accompagner le développement du monde arabe. Mais, en ces temps où l’institution militaire dominait les états-majors politiques, il ne fut pas surprenant de retrouver Louis Massignon, comme Robert de Caix auparavant, dans les allées du pouvoir, soit auprès des officiers colo- niaux, soit à la Commission interministérielle des affaires musulmanes après 1927, afin de continuer à produire des études pour comprendre le monde arabe et les musulmans. Connaissant bien le parcours de l’un, il devenait intéressant pour Gérard D. Khoury de comparer avec l’autre, afin de s’inscrire dans une histoire toujours plus large du monde arabe, une

« histoire enchevêtrée dont la trame se complique à chaque époque de nouveaux fils » (p. 13).

Le livre de Gérard D. Khoury se décompose en deux grandes parties essentielles : d’une part un essai sur les missions politiques de Louis Massignon en Orient qui constitue à peu près un quart de l’ouvrage, suivi d’une série de rapports de missions pour la période allant de 1907 à 1954. On y découvre un Louis Massignon savant, qui devient un des islamologues français les plus importants, et cherche à établir un dialogue entre l’islam et l’église chrétienne. Il n’est pas un intellectuel de salon ; comme nombre de ses collègues, il est un homme de terrain, envoyé en mission par le ministère des Affaires étrangères, celui du ministère des Colonies, ou le ministère de l’Instruc- tion Publique. Très vite, il décide de se battre pour la reconnaissance de la langue arabe comme langue de civilisation, mais, également, pour la reconnaissance des nationalistes arabes, certain que l’absence de reconnaissance sera à l’origine de l’exaspération des musulmans vis-à-vis du monde occidental. De ce point de vue, la pensée de Louis Massignon semble prophétique et c’est la raison pour laquelle il doit être lu au début du xxie siècle, quand bien même son témoignage apparaît parfois comme partiel sur certains points, à défaut d’être partial, comme on le verra plus loin.

Le grand intérêt du livre de G. D. Khoury se trouve dans la publication de rapports, jusque-là iné- dits, qui mettent en valeur l’analyse de L. Massignon sur l’Orient et permettent de prendre conscience de la qualité du savoir accumulé dans des instances comme la Commission interministérielle des affaires musulmanes ou le Comité France-Islam créé par Massignon en 1946. Parmi l’ensemble des documents inédits consultés, Gérard D. Khoury a fait le choix de commencer par le voyage à Bagdad de 1907, moment extrêmement important pour Louis Massignon, puisque sur fond de tensions sur son orientation

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BCAI 34 (2020) Khoury Gérard D.: Louis Massignon au Levant. Écrits politiques (1907-1955), préface d’Henry Laurens, recensé par Julie d’Andurain

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entre ce qui a appartenu à la pensée du général Gouraud et ce qui provient de celle de son adjoint politique (p. 88-89) en lien avec les ordres venus de Paris, mais cela aurait supposé de consulter d’autres archives pour comprendre que Massignon se trompe, à ce moment-là de sa vie, sur ce qui se passe en Syrie. Ses erreurs d’appréciation ne l’empêchent pas d’ailleurs de rester proche des militaires– au point de devenir chef de bataillon de l’infanterie coloniale en 1940 – quand il participe à la construction de la Légion arabe, et quand il multiplie les rapports de mission en Orient durant toute la sortie de guerre.

Mais, et c’est là le grand intérêt de la publica- tion de ces rapports sur la longue durée, on voit Massignon prendre ses distances avec les différentes structures ministérielles qui l’envoient en Orient pour adopter une vision du monde arabe très personnelle, avec quelques points qu’il convient de relever : cet homme a, constamment, frénétiquement, recherché des documents-sources destinés à forger une masse documentaire permettant de mieux comprendre le monde arabe. En ce sens, il a agi comme un intellec- tuel. À partir du milieu des années 1920, on perçoit son souci, bien réel, de construire, dans le monde arabe, un réseau de savants français arabisants, capables de comprendre ce monde en perpétuelle évolution et d’y mener des enquêtes, des inventaires méthodiques à la manière des surveys britanniques.

Sa connaissance des élites arabes lui permet, dans un premier temps, de réunir des matériaux intéressants sur les villes et les campagnes du Levant après la crise de 1926. Dans les années suivantes, si ses rapports dressent un Who’s who du monde intellectuel arabe, ils apparaissent cependant un peu à la surface des choses tant les sujets étudiés sont variés, comme si ses rapports servaient de matrice à son Annuaire du monde musulman. Il est donc important de ne pas se contenter des rapports, mais de les compléter par d’autres publications de Louis Massignon. Après la Deuxième Guerre mondiale enfin, devenu un personnage très important dans le monde arabe, ses rapports semblent survoler les problèmes, les dominer. Il revient constamment à la question de la langue arabe dont il estime nécessaire de la trans- former en une langue de civilisation. Il accompagne le mouvement de développement des universités arabes, s’en félicite, mais s’inquiète, malgré tout, du remplacement de la rivalité franco-britannique par celle entre les Américains et les Russes qui n’attend pas la crise de Suez (1956) pour se manifester.

L’importance des thématiques posées par Louis Massignon, la manière impressionniste dont il aborde certains sujets en avançant en âge, le style de ces rap- ports, rebuteront peut-être le grand public ou les étu- diants les plus jeunes qui n’auraient, pas encore, une sexuelle et après « sa visitation de l’étranger » il se

découvre profondément catholique. À partir de là, il développe une pensée mystique l’amenant à avoir un parcours spirituel complexe, entre catholicité et islam.

Fort de ses diplômes d’arabe classique et d’arabe dialectal (1906) et d’une thèse (1922) sur al-Hussayn Manṣūr al-Hallāj, prédicateur soufi et premier mar - tyr de l’islam, il sillonne le monde arabe, devenant progressivement un personnage incontournable de ce que l’on a appelé « la politique musulmane de la France ».

Globalement, Louis Massignon se défend de représenter l’institution militaire et il n’est pas très à l’aise dans sa position d’officier de renseignements durant la Première Guerre mondiale. C’est sans doute en grande partie pour cela aussi qu’il est critique vis-à-vis du Haut-Commissariat installé à Beyrouth en 1919. Jeune et intégré dans l’état-major dans un grade subalterne, il n’a pas une vision globale de la situation. Or, il est un de ceux qui accrédite, par la suite, l’idée d’une opposition frontale entre le Haut- Commissaire, le général Gouraud et les nationalistes arabes incarnés par Fayçal, fils d’Hussein, mais, sur- tout, qui affirme que Gouraud a appliqué la politique du « diviser pour mieux régner » (p. 88 et p. 240).

Or, ce point est historiquement faux. Il relève non seulement du cliché mais aussi de la propagande britannique. Telle qu’elle a été conçue – la conception pouvant être différente de la réalisation in fine –, la création du Grand-Liban avait pour but de donner une indépendance économique à un territoire, for- mellement et fonctionnellement, amené à intégrer la Syrie. La division en plusieurs régions avait simple- ment pour objet de forger les cadres administratifs d’une Fédération de Syrie laquelle ne s’opposait pas, a priori, à une Grande-Syrie qui répondait autant aux attentes de Fayçal qu’à celles de la SDN et à celles de Gouraud. Mais, dès que Fayçal a jugé que les « Conseillers étrangers » risquaient de devenir les maîtres, il a refusé l’emploi du terme mandat et s’est opposé progressivement à l’organisation du système mandataire. N’ayant plus la possibilité de se prévaloir de Clemenceau et ayant perdu ses soutiens britan- niques après la proclamation de mars 1920 qui le fait roi de Syrie, Fayçal perd une bataille politique avant de perdre une bataille militaire à Khan Meissaloun (juillet 1920) : Millerand, successeur de Clemenceau, ordonne au général Gouraud de marcher sur Damas, sous couvert d’une directive secrète. Ainsi, ce n’est pas le général Gouraud qui aurait désobéi aux ordres de Clemenceau, mais Fayçal qui n’a pas attendu les décisions de la Conférence de la Paix.

Dans l’ouvrage de Gérard D. Khoury, on aurait pu attendre de la connaissance fine des archives de Robert de Caix une analyse faisant la part des choses

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BCAI 34 (2020) Khoury Gérard D.: Louis Massignon au Levant. Écrits politiques (1907-1955), préface d’Henry Laurens, recensé par Julie d’Andurain

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vision globale des évolutions du monde arabe. Mais, pour les spécialistes qui voudraient comprendre les interactions, les rencontres des intellectuels occiden- taux avec le monde arabe, ce livre est une véritable mine d’or. Réserve faite de quelques clichés évoqués plus haut et apparaissant encore çà et là, le travail d’édition qui a été réalisé par la maison Albin Michel est de grande qualité. Presque à chaque page, on note les efforts de l’équipe éditoriale pour identifier les individus, ce qui fait de cet ouvrage une source biographique de premier ordre. Un index aurait encore facilité la lecture, mais ce sont là des détails de spécialistes qui, de toute façon, ne reculeront pas devant un tel ouvrage-source.

Julie d’Andurain, Université de Lorraine (Metz)

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