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Submitted on 1 Jan 1962
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Dispersion diélectrique en très basse fréquence dans la heulandite
Henri Boutin, J.R. Guillaume
To cite this version:
Henri Boutin, J.R. Guillaume. Dispersion diélectrique en très basse fréquence dans la heulandite. J.
Phys. Radium, 1962, 23 (11), pp.893-897. �10.1051/jphysrad:019620023011089300�. �jpa-00236714�
DISPERSION
DIÉLECTRIQUE
EN TRÈS BASSEFRÉQUENCE
DANS LA HEULANDITEPar HENRI BOUTIN
(*)
et J. R.GUILLAUME,
École de Physique et Chimie Industrielles de Paris, Laboratoire de Minéralogie-Cristallographie.
Résumé. 2014 Une méthode de mesure de la constante diélectrique et des pertes diélectriques est présentée pour des fréquences inférieures à 500 cycles/sec. La méthode a été appliquée à la Heulan-
dite (Ca, Na2)Al2Si7O18, 6H2O qui présente une structure de tectosilicate très lacunaire avec des
canaux parallèles à [001] et [100] où les molécules d’eau et les cations Ca2+ et Na+ sont très mobiles. Deux dcmaines de dispersion diélectrique ont été mis en évidence dans la heulandite
avec des fréquences critiques respectives de 1 kc/s et 10 c/s. Ces domaines peuvent être attri- bués à la mobilité des cations Na+ et Ca++. Cependant les temps de relaxation (1,6 1020144 s
et 1, 6 1020142 s) correspondant à ces fréquences critiques sont suffisamment proches de celui qui
a été déterminé pour les molécules d’eau dans la Heulandite (4 10 20145 s) pour laisser un doute
quant à l’origine de ces domaines, surtout dans des substances comme les zéolites où l’on trouve
une forte interaction entre les cations et les molécules d’eau.
Atstract. 2014 A method of measurement of the dielectric constant and dielectric losses is presented
for frequencies lower than 500 cycles/s. The method has been applied to heulandite which has
a very open structure of tectosilicates with canals parallel to [001] and [100] where the water molecules and cations Na+ and Ca++ are very mobile. Two domains of dielectric dispersion
have been found in heulandite with critical frequencies of 1 kc/s and 10 c/s respectively.
These domains may be attributed to the mobility of Na+ and Ca+ + cations. However, the rela- xation times corresponding to these critical frequencies (1.6 1020144 s and 1.6 1020142 s) are sufficiently close to the one which has been determined for the water molecules in heulandite
(4 1020145 s) to leave a doubt as to the origin of the first of these domains,particularly in substances like zeolites where one finds a strong dipole-cation interaction.
1. Introduction. - Une
large
bande dedisper-
sion
diélectrique
a été mise en évidence dans laplu- part
des alumino-silicateshydratés
de la familledes zéolithes. Les cristaux ont fait
l’objet
d’étudesnombreuses pour essayer de
préciser
ladynamique
des molécules d’eau et des cations à l’intérieur du
squelette
cristallin[1].
La constante
diélectrique complexe
peut êtrereprésentée
defaçon
satisfaisante dans la,bande dedispersion
par lediagramme
de Cole et Cole[2]
etdans la plupart des cas semble
indiquer
unelarge
dispersion des temps de relaxation. Dans le cas de la heulandite la bande dedispersion apparaît
à trèsbasses
fréquences.
Or laplupart
des ponts demesure ne
permettent
pas de descendre au-dessousde 200
cycles/sec.
L’arc de cercle de Cole et Cole nepeut donc pas être tracé de
façon complète
et celalaisse une indétermination sur la valeur de la cons-
tante
diélectrique statique qui
estgénéralement
déterminée par
extrapolation
de l’arc de Colejusqu’à
l’axe des abscisses. Cette indéterminationest d’autant
plus grande qu’à partir
de 500cycles
par seconde et
plus
bas la conductibilité en courant continu devientimportante
et des corrections doivent être effectuées sur le termed’absorption
F-"qui
sont du même ordre degrandeur
que le terme àmesurer. Une correction doit aussi être effectuée
sur le terme de
dispersion
&’ si la conductibilité en courant continu de la substance à étudier estimpor-
tante. Une
augmentation
de la valeur mesurée de s’FIG. 1. - Diagramme de Cole et Cole. Les
corrections
de conductibilité en courant continu peuvent aider à choisir entre deux cas possibles : un seul domaine de dispersion diélectrique ou deux domaines qui chevauchent. Les cercles noirs représentent les points expérimentaux. Les cercles ouverts représentent ces points après corrections effectuéessur les deux termes de la constante diélectrique complexe.
(*) Actuellement à Brookhaven National Laboratory, Upton, New-York.
Article published online by EDP Sciences and available at http://dx.doi.org/10.1051/jphysrad:019620023011089300
894
et el
quand
lafréquence
diminuepeut
aussi s’ex-pliquer
par l’existence d’uneseconde bande
de dis-persion qui
chevauche avec lapremière bande,
etune distribution
apparemment
nongaussienne
des temps de relaxation peut être due à l’interaction deces deux domaines de
Debye.
Lafréquence
cri-tique fc, qui
est,plus
que e’ou
F-’ unepropriété intrinsèque
de la substanceétudiée,
n’estplus
alorscelle du maximum de e" en raison de cet effet de chevauchement. Les deux domaines dans leur par- tie commune se
superposent
linéairement (cequi
est naturel pour les
pertes
sinon pour lapartie
réelle de s). Dans ce cas on
peut
essayer de cons-truire les deux cercles
point
parpoint
defaçon
à ceque la somme de s’ à
chaque fréquence
donne lespoints expérimentaux.
Les deux caspossibles
sontreprésentés
sur lafigure
1.Le but de ce travail est donc
d’essayer
d’étendreles mesures de la constante
diélectrique
et des pertesjusqu’à
desfréquences
aussi basses quepossible
etd’envisager
les corrections nécessaires.Des mesures ont été effectuées sur la heulandite.
II. Pont de mesure. - Le schéma du
pont
estreprésenté
sur lafigure
2[3].
Ledispositif
de détec-FIG. 2. - Schéma du pont de mesure. Dans un premiers équilibre (C1,
R1) il
n’y a que la cellule de mesure (iden- tique à celle décrite par Ducros [1]) dans le bras BC dupont. Dans un second équilibre (CZ, R2) le diélectrique à
étudier est placé dans la cellule de mesure.
tion au-dessous de 50
cycles/s
se compose d’unamplificateur
à courant continu(précédé
d’unpré- amplificateur)
et d’ungalvanomètre.
Lafréquence
la
plus
basse àlaquelle
onpeut
descendre est alorsseulement limitée par la durée des mesures. De 50
cycles/s
à 500cycles/s
on utilise unamplifi-
cateur et un
oscilloscope cathodique.
Calcul de s’et s’ :
Ayant
obtenu Cx et R0153 satisfaisant les condi- tionsd’équilibre
du pont nous avons :Co est la
capacité
d’une lame d’air de mêmes di- mensions que le cristal étudié. Laprécision
sur s’est de 5
% et sur c" de 8 %.
III. Correction de E’ et e". - Au cours de la dis-’
persion
anormale une diminutionimportante
de laconstante
diélectrique s’accompagne
d’une forteabsorption
des ondesélectriques (augmentation
duterme de
perte)
avecdissipation
del’énergie
duchamp électrique
sous forme de chaleur : chaleur defrottement des charges liées et des
dipôles
au coursde leur mouvement sous l’influence du
champ appliqué
c’est-à-dire au cours de lapolarisation,
etaussi chaleur
produite
par effet Joule lors dudépla-
cement des électrons et des ions libres dans le
champ appliqué.
La chaleur totaledéveloppée
estdonc la somme de deux termes et cette somme est mesurée au pont avec le terme F-’. Dans un diélec-
trique
idéal iln’y
aurait pas de perte due aux ionslibres,
c’estpourquoi
nous devons faire une correc-tion. Le véritable terme de perte
diélectrique
estproportionnel
à la conductibilité en courant alter- natif (c. c.a.)
diminuée de la conductibilité encourant continu (c. c. c.). Cette c. c. a. est elle-même
complexe
dans la bande dedispersion
etpossède
une composante
dissipative
k’proportionnelle
à s"et une composante non
dissipative proportionnelle
à s’. La composante
dissipative k’
est propor- tionnelle à la chaleurdéveloppée
par seconde doncne passe pas par un maximuln
quand
lafréquence
varie mais tend vers une limite aux
fréquences élevées,
alors que s’ passe par un maximum car ceterme est
proportionnel
à la chaleurdéveloppée
par
cycle.
Si l’on considère les
équations d’équilibre
du pont, on voitqu’a partir
d’une certainefréquence
du
champ appliqué
pourlaquelle
il
n’y
aplus
de pertes dues à la c. c. a. Dans la for-mule
précédente,
les valeurs de dR =R1- Ra
etde
Cl
sont données par la résistance variable R et lacapacité
variable C dupont
de mesure(cf. fig.
2et
légende)
avec :N = Fréquence.
K = aki.
a = Constante.
ki = Conductibilité en courant continu du cristal.
Correction de s’. - Le courant
qui
traversel’échantillon
quand
la tension estappliquée
a deux895 composantes : l’une
dissipative,
l’autrecapacitive
et est donc
déphasé
par rapport à la tensionappli- quée.
Les défautsioniques jouent
le rôle de porteursde
charges
et sedéplacent
dans le milieu cristallin.Quand
ilsatteignent
les électrodesquelques-uns
ne peuvent pas
transporter
leurscharges
hors del’échantillon. Ils se
bloquent
donc aux électrodeset
produisent
des effetscapacitifs.
Lechamp
élec-trique
créé par eux empêchel’approche
d’autres porteurs et cela tend à uneaugmentation
de la résis- tance[7]
apparente. S’il y a deux types de porteurset si l’un est
bloqué
aux électrodes et l’autre trans-porte le courant aux
électrodes,
l’interaction de lacharge d’espace
et de lacharge bloquée
conduitaussi à un effet
capacitif.
Ces effets depolarisation
rendent la mesure de la constante
diélectrique
trèsimprécise
et Johnson[8]
aproposé
une correctionqui
tient compte de cesphénomènes :
Des valeurs
asymptotiques
constantes deG/Co
et s’ doivent être obtenues à basses
fréquences
parun choix convenable de
Zo
pour n donné[1].
IV.
Application
à l’étude de la Heulandite. -a)
STRUCTURE. -La Heulandite(Ca,Na2)Al2S’7018, 6 H 20 appartient
à la famille des Zéolithes[5].
Lastructure est conditionnée par
l’arrangement
destétraèdres
R04 (R
= Al ouSi)
formant des anneauxhexagonaux
en couchesparallèles
auplan
de cli-vage
(010).
D’autres tétraèdres lient entre elles les couches voisines et .forment à leur tour desanneaux
[6].
Ainsi l’on a une structure de tecto- silicates très lacunaire avec des canauxparallèles
aux
plans (100)
et(001).
Les cations sont situésdans ces anneaux et ils peuvent
prendre
un certainnombre de
positions correspondant
à des minimade
potentiel
dans lechamp
de force créé par lesquelette
cristallin. La mobilitédépend
du contenuen eau du cristal. Les molécules d’eau sont dans des
plans parallèles
auxplans
declivages [4].
b)
MESURE DE LA RÉSISTANCE APPARENTE. -Slune tension continue est
appliquée
au cristal à latempérature
ordinaire on constatequ’il
existe unedissymétrie
dans la valeur apparente de la résis-tance en courant continu suivant le sens de passage du courant.
La
première application
dupotentiel
déterminela
polarité
dans lesexpériences
ultérieures etimpose
une direction « facile » de conduction. Lafigure
3 montre la variation de la résistance appa- rente avec le temps àpartir
d’un minimum atteinten un temps très court et dû aux courants normaux
et anormaux de
charge
et dedécharge
du diélec-FIG. 3. - Variation dans le temps de la résistance appa- rente du cristal lorsque la tension est appliquée dans un
sens (cercles ouverts) et en sens inverse (cercles fermés).
Dans chaque cas la résistance apparente atteint assez rapidement une valeur limite.
trique
et à la mobilisation desimpuretés ioniques agissant
commeporteurs
decharges
à travers le réseau.Après
un temps suffisammentlong
etqui
varie avec
l’échantillon,
latempérature
et la valeurde la tension
appliquée,
la résistanceapparente
atteint un
palier.
Cepalier correspond
aupiégeage
de ces
impuretés ioniques
dans les défauts du réseauou à leur
migration
à la surface de l’échantillon.Ils ne servent
plus
dès lors àtransporter
lescharges.
h’IG. 4. - Variation"de la valeur"du palier de la figure 3 quand la tension est appliquée dans un séns (1) puis en
sens inverse (2) ; le cristal n’étant soumis à aucune ten- sion pendant plusieurs heures (3) et (4) la tension étant
appliquée à nouveau dans le sens (1). La résistance appa- rente tend à prendre la même valeur dans les deux sens
d’application de la tension.
(1) G)Co (y mho iyyf) : Conductance réduite, d’après la
relation k ({Lmho/cm) = 0,0885 G/Co, avec : Co capacité
de la lame d’air, k conductance spécifique, 0,0885 facteur de conversion dépendant des unités choisies.
Zo constante caractéristique de la région superficielle de séparation électrode-diélectrique qui intervient dans l’ex-
pression de l’impédance complexe d’électrode: Z = Zo( im)--n
avec n exposant numérique d’adaptation.
896
FIG. 5. - s’ mesuré en fonction de Rcc pour diverses fréquences.
Fie. 6. - e" mesuré en fonction de Rcc, pour diverses fréquences.
Ce «
trapping
» ou cettemigration
ne s’effectuent pas réversiblement. Lafigure
4 montre la variationde ce
palier lorsqu’on
inverse la tensionappliquée
ou
lorsqu’on, applique
la tension à nouveauaprès
avoir laissé le cristal reposer
pendant plusieurs
heures. Dans tous les cas la résistance tend vers une
valeur
asymptotique
que l’onprend
comme valeurde la résistance en courant continu Rcc pour un échantillon donné. Pour
chaque
valeur de Rcc nousavons fait une série de mesures de c’ et El! à diverses
fréquences.
Les résultats sontreprésentés
sur lafigure
5 et sur lafigure
6.La
figure
4 nous montre quelorsque
le courantest inversé dans un sens et dans
l’autre,
la Rcc du cristal tend vers une valeur limitequi
estUne droite verticale
correspondant
à cette va-leur de Rcc intersecte les réseaux de courbes des
figures
5 et 6 en despoints qui
nous donnent les valeurs de z" et e" à diversesfréquences.
Pour laHeulandite étudiée la valeur de .Rcc est suffisam- ment élevée nour rendre la correction de Johnson et Cole sur E’
négligeable.
La correction sur c" est montrée dans le tableau I.TABLEAU 1
c)
RÉSULTATS. -Lafigure
8 montre l’existence de deux domaines de relaxationdiélectrique
à trèsbasses
fréquences
pour la heulandite a étudiée. Les deux domaines chevauchentlégèrement.
Leurs fré-quences
critiques respectives
sont 1kc/s
et10
cfs
et le second domaine montre unedispersion
des temps de relaxation moins élevée que le pre- mier domaine. Ces deux domaines
pourraient
êtredus à la mobilité des cations Na+ et Ca2+ respec-
tivement,
comme parexemple
dans le cas de lachabasie
--cependant
le temps de relaxation pour la rotation des molécules d’eau(ou
te-nps de corré- lation dans la Heulandite a été évaluée par Ducros à(4
X 10-5s)
àpartir
de la relation d’Eins- tein[1].
Cette valeur est assez voisine de la valeurFIG. 7. - Variation du logarithme de la résistance appa- rente avec la température.
obtenue par le
premier
domaine To=1,6
X 10-4 sà
partir
de la relation :203C003C40 fe
==1, pour jeter
undoute sur
l’origine
dupremier
domaine de rela-xation. Le temps de relaxation du second domaine est "t’ (1 -
1,6
x 10-2 S etcorrespond proba-
blement à la mobilité des cations Ca2+.
Lorsque
laFIG. 8. - Diagramme de Cole et Cole d’une lame mono-
cristalline de Heulandite taillée p’arallèlement au plan (010) et montrant le chauchement des deux domaines de relaxation.
Heulandite est
placée
sous vide la résistance appa- rente augmente considérablement. Cette augmenta-tion est due à une diminution de la mobilité des cations avec la
déshydratation.
La diminution detempérature
rend le franchissement de la barrière depotentiel
par les cations deplus
enplus
diffi-cile et diminue encore
davantage
leur mobilitéainsi que le montre la
figure
7.Nous tenons à remercier bien vivement M. Nicolas de la G. S. F. pour. nous avoir commu-
niqué
l’idée du pont de mesure et MM.Wyart,
Ducros et Curien pour l’intérêt
qu’ils
nous onttémoigné
au cours de ce travail.Manuscrit reçu le 16 mai 1962.
BIBLIOGRAPHIE
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