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Sur les conditions d’excitation du spectre de l’azote dans
la haute atmosphère
Jean Cabannes, Rose Aynard
To cite this version:
LE
JOURN AL
DE
PHYSIQUE
ET
LE
RADIUM
SUR LES CONDITIONS D’EXCITATION DU SPECTRE DE L’AZOTE DANS LA HAUTE
ATMOSPHÈRE
Par JEAN CABANNES et ROSE AYNARD.
Sommaire. 2014 Les auteurs cherchent à
préciser les conditions d’excitation du spectre moléculaire de l’azote dans la lumière du ciel nocturne. Il s’agit d’expliquer pourquoi le niveau supérieur des bandes de
Vegard-Kaplan qui apparaissent avec la plus grande intensité dans le ciel a pour quantum de vibration
v = 2 ou v = 3. On fait intervenir l’énergie libérée par la recombinaison des atomes d’oxygène au cours
de la nuit. En admettant que cette recombinaison résulte d’un choc triple avec une molécule d’azote et que les molécules O2 et N2 se partagent l’énergie disponible, on discute les diverses formes que peut
prendre cette hypothèse et l’appui que lui apportent les expériences de laboratoire,
On explique ensuite l’exaltation remarquable de la bande 6500-6550 Å du premier système positif.
SÉRIE VII. - TOME X. N° 11. NOVEMBRE 1939.
La lumière très
complexe
du ciel nocturne estessentiellement caractérisée par les raies interdites
5577
et6300-636Q -À
de l’atomed’oxygène
et par un certain nombre de bandes de la molécule d’azoteappartenant
ausystème
deVegard-Kaplan [1].
Nous nous proposons de discuter ici les conditions
énergétiques
danslesquelles apparaît
cespectre
de l’azote et le mécanisme d’excitation.
L’énergie disponible
dans le ciel nocturne estl’énergie
de recombinaison des atomesd’oxygène
qui
ont été dissociéspendant le
jour
par lerayonne-ment ultraviolet solaire
[2] [3].
Les molécules
d’oxygène
de la hauteatmosphère
absorbent les radiations du
spectre
continuqui
fait suite aux bandes deSchumann-Runge,
en sedisso-ciant en un atome normal
(3P)
et un atome excité(’D).
La
longueur
d’onde dupoint
oùconvergent
lesbandes et où commence le
spectre
continu estenviron
I’~5I À,
cequi correspond
à uneénergie
dedissociation
équivalente
à7,05
V. Mais les atomes métastables(ID)
retombent assezrapidement
au niveau normal en émettant une des raies rouges63oo-636/t À :
lesprobabilités
d’émission de ces raies sontrespectivement
o,~5. Io-~
eto,~5
1 o-2 sec- 1. Onpeut
expliquer
ainsi l’exaltation des raies rouges del’oxygène
dans le cielpendant
lecrépuscule;
mais,
quelques
minutesaprès
la fin ducrépuscule,
lapresque totalité des atomes
d’oxygène
se retrouve auniveau normal et
l’énergie disponible pendant
la nuit n’estplus
quel’énergie
de recombinaison de deux atomes normaux, c’est-à-dire7,05
-1,96 =
5,og
~’.Le
premier problème qui
se pose
alors est celui dela recombinaison des atomes
(3P)
au cours de la nuit.Théoriquement
des molécules formées de 2 atomesidentiques (comme
les moléculesd’oxygène
ou d’azoteà l’état
normal),
etqui
n’ont pas de momentélec-trique,
nepeuvent
pas passer d’un niveau devibra-tion à un niveau
plus
élevé v’ en absorbant dela
lumière;
eneffet,
on ne trouve pas de bandes de vibration dans lespectre
d’absorption
de ces molécules et lesphotons
de5,og
Vn’agissent
pasdirectement sur elles pour les dissocier en 2 atomes normaux.
Inversement la molécule ne retombera pas
sponta-nément du niveau de vibration v’ au niveau moins
élevé v" avec émission de
lumière;
les niveaux devil7ration sont métastables. De
même,
à lalimite,
2 atomes normaux
(3P)
nepourront
pas se recombiner avec émission de lumière. La recombinaison n’aura lieuqu’en
présence
d’une troisièmeparticule,
poursatisfaire aux
principes
de conservation del’énergie
et de laquantité
de mouvement.io Si cette troisième
particule
est un atomed’oxygène
(3P),
cet atome pourra atteindre le niveau(1S), puisque l’énergie
d’excitation4~iSV
est inférieure àl’énergie disponible
5,og
V. On aura,par
exemple,
la réactionL’excitation de l’atome
d’oxygène prend
4, 18 V;
la vibration de la moléculeprend
c~,g3 V;
soit au456
total
5,il.
La recombinaison libère5,og.
L’énergies
cinétique
desparticules
avant le chocpeut
fournirla faible différence 0,02 V.
On
peut
expliquer
ainsi laprésence
dans leciel,
pendant
toute lanuit,
d’atomes métastablesd’oxygène
et l’émission des raies verte et rougeaprès
le coucher du Soleil. On a mesuré la radiance du ciel nocturne pour lalongueur
d’onde 55 77
La valeur donnée est en moyenne
1,5
ergs~sec,lm2;
elle
coirespond
à1,4. 1016
transitions au cours d’une nuit de 1o h. Admettons que chacune d’elles suivela recombinaison de 2 atomes
d’oxygène;
il y auraitainsi formation de
1,4. 1016
mold’oxygène.
Or,
au-dessus de Ioo km
d’altitude,
il y a encore dansl’atmosphère
environ I0~2 atomesd’oxygène.
On nepeut
donc observer aucune diminutionrégulière
de la brillance du. ciel
pendant
la nuit. La lumines-cence du ciel nocturne est unexemple
remarquable
dephosphorescence
delongue
durée dans unmélange
gazeux.
2~ Si la troisième
particule
est une moléculenormale d’azote
X 11‘),
l’énergie
nécessaire pour laporter
aupremier
niveau d’excitation A(3l:)
est de6,1{~
V.Or,
la recombinaison de 2atomes
normaux
d’oxygène
ne libère que5,og
V,
énergie
insuffisante pour exciter la molécule d’azote.
Nous sommes ainsi amenés à
envisager
la recom-binaison d’un atome normald’oxygène
avec un atome excité(’D), qui
fournit7,05
V,
et la réactionpeut
être ainsi formuléeLa molécule
d’oxygène
reste au niveau normalX (3i) j
la molécule d’azote estportée
au niveau A~31)
et le terme 8représente
l’excèsd’énergie disponible
après
le choc.Remarquons
immédiatementqu’il
n’est paspossible
d’envisager
une excitation simultanée de la moléculed’oxygène
et de la moléculed’azote,
car lepassage
du niveau
02 (X)
au niveau02(A)
exige
1,6,- V,
cequi
ferait au total6, 1 4
+ 1,62 ==
7,7 6
V,
c’est-à-dire uneénergie supérieure
aux7,05
V libérés par larecombinaison des deux atomes
d’oxygène.
Nous avons là une
possibilité
d’émission desbandes de
Vegard-Kaplan N2(A) -~ N2 (X),
mais ce n’est pas laseule;
onpeut
envisager
aussi larecom-binaison des deux atomes 0
(3P)
et 0(1~}
avecémission de lumière
U(3P)+(>jll» a
>2+fi».C’est la réaction inverse de celle
qui
dissociependant
le
jour
les moléculesd’oxygène.
Lequantum
h-,j pourra exciter ensuite une molécule d’azote sansqu’on
ait à faire intervenir un choctriple.
I,e résultatfinal est le même.
Que
nous admettions l’un ou l’autre de ces deux mécanismes(recombinaison
des atomesd’oxygène
dans un choc
triple
ou recombinaison avec l’émissiond’un
photon),
on nepeut
avoir,
en émission dansle
ciel,
que les bandes dont le niveausupérieur
(énergie électronique
+
énergie
devibration)
n’excèdepas
l,o~ V,
c’est-à-dire cellesqui
sont émises parla molécule N2
(A)
avec lequantum
de vibrationOr,
parmi
cesniveaux,
ceuxqui
donnent les bandesde
Vegard-Kaplan
lesplus
intenses dans le ciel(fig.
i)
sont les niveaux v =- 9- et v - 3. Il
s’agit
de trouver la cause de cette sélection.. Il~
Les bandes de Vegard-Kaplan dans le speclre du ciel nocturne.
(Cabannes et Dufay.)
Jusqu’ici
nous avonsnégligé l’énergie
de vibrationde la molécule
d’oxygène qui
se forme.Or,
il neparaît
pas raisonnable de faire intervenir des vibra-tions de la molécule d’azote sans faire intervenirégalement
des vibrations de la moléculed’oxygène,
et nous devons chercher comment se
partage
l’énergie
de vibration entre les deuxespèces
de molécules.Dans une Note récente
[21
l’un de nous a admisque l’excès
d’énergie
7,05
-~,14
=o,gi V se
parta-geait
en deuxparts,
aussi voisines quepossible,
entre les vibrations de la molécule N2 et celles de lamolécule
02,
on trouve ainsiet cette
hypothèse expliquait
bien le niveausupérieur
desprincipales
bandes observées.Mais on
peut
penser à une autreexplication.
Pourporter
la molécule normaled’oxygène qui
vient de se former au niveau de vibration v, il fautune
énergie
EI’o~,
et l’on nedispose plus,
pourl’exci-tation de la molécule
d’azote,
que de ladifié-rence D -
Et(>;,
1 entrel’énergie
de dissociation D de la moléculed’oxygène
etl’énergie
de vibra-tionE~o~l’
D’autrepart,
soit .1. +F’~«
l’énergie
nécessaire pour
porter
la molécule d’azote au niveau A~ à l’excitation A
+E ~~2),
faisant intervenir ainsiun
phénomène
de résonance.Étudions
dans cettehypothèse
laprobabilité
d’émission des différentes
progressions du système
de
Vegard-Kaplan.
°
Ce tableau montre que les transformations III et IV sont les
plus probables,
cequi expliquerait
l’exaltation des bandes v’ = 2 et v’ - 3 dans le
système
deVegard-Kaplan.
La
probabilité
d’un choc de secondeespèce
a étéétudiée
depuis longtemps.
Elle est d’autantplus
grande
que la différence estplus petite
entre lesénergies quantiques
mises enjeu.
Ainsi la réactiona une
probabilité plus grande
que la réactionparce que
l’énergie
d’excitation du mercure serapproche davantage
de cellc del’argon
que de celle du néon.Kaplan [41
a citéplus
tard àl’appui
de cette thèseles
expériences
de Bonhoeffer et de Mohler[5~
surla fluorescence sensibilisée par
l’hydrogène atomique.
D’après Kaplan,
la recombinaison de 2 atomesd’hydrogène
avec formation de la molécule normaledans un état de vibration v
exige
laprésence
d’un atomemétallique qui
absorberal’énergie
D-- ErÍ12)
libérée dans la
recombinaison;
d’oùpossibilité
d’unrayonnement
de cet atome. Lesexpériences
ont été faites surNa, K, Cs,
Mg,
Cd,
Tl et l’on a constatéque très souvent la raie du métal
n’apparaît
pasalors que
l’énergie
libérée dans le choctriple
estsuffisante pour l’exciter.
Ce tableau
paraît
satisfaisant : le chocinélastique
et l’excitation de l’atome du métal ne seproduisent
que si la différence entre
l’énergie disponible
etl’énergie
requise
pourl’excitation
nedépasse
pasquelques
centièmes de volt.Malheureusement,
si les niveaux de vibration de la molécule normaled’hydro-gène
sont bien connus(E’’
=4276 v
-114 v2
cm-1),
son
énergie
de dissociation est incertaine. La valeuractuellement admise n’est
plus
cellequi
avait servi de base àKaplan. Kaplan
avaitadopté
la valeur4,3w
Vdonnée à -~-o, ~
près
par Dieke etHopfield [6]
en 1927. Un anplus
tard,
Birge [7]
donnait4,42.
En 1929Richardson et Davidson
[8]
mesuraient avecprécision
le
potentiel
d’ionisation de la moléculed’hydrogène.
Appliquant
à cette valeur les calculsthéoriques
de Burrau[9],
ils trouvèrent uneénergie
de
dissociationde
4,{~65
±0104 v,
àlaquelle
s’est ralliéBirge.
La table laplus
récente,
celle deSponer,
indique
4, ~5,~.
Ainsi
l’énergie
de dissociation de la moléculed’hydro-gène
n’est paséquivalente
à4,3~[
V mais à~,46
environ
et les coïncidences deKaplan disparaissent.
Mais,
d’autrepart,
Kaplan
n’a pas tenucompte
de la rotation des moléculesd’hydrogène
formées. Soit J le nombrequantique qui
définit larotation;
l’énergie
totale de la moléculed’hydrogène
est11
suffirait,
pour que l’excitation de l’atomemétallique
ait
lieu,
quel’énergie
d’excitation fut assez voisined’une des valeurs
possibles
de D - E. Ainsi unchoc avec un
atome
de sodiumporterait
cet atome au niveau de résonance 2P(énergie
d’excitation,
2,°0
V),
tandis que la vibration et la rotation de lamolécule
d’hydrogène (v
=5;
J =3)
absorberaient uneénergie équivalente
à2,35
V. Lie, total2,on
+ 2,35
=4,f,4
n’estinférieur que de o,02 V à
l’énergie
de recombinaison. De même un choc avec un atome de cadmium leporterait
au niveau 3P(/.
^ 3 261 -k ;
3,78V),
tandis que la molPculed’hydro-gène {v
= i ; J =4)
absorberait uneénergie
équi-valente ào,6p
V;
3,78
+ o,65
=/i,43,
total inférieurde
o,03
V seulement àl’énergie
de recombinaison. Un choc avec un atome depotassium
leporterait
au niveau 2P(/. == 7665 B ;
1,61
V);
la moléculed’hydro-gène
seraitportée
au niveau v =6,
J == 5(2,82
V)
et
l’énergie
absorbée serait1,61 + 2,82
=4,43,
inférieure de
o,03
V àl’énergie
de recombinaison.Cette nouvelle
hypothèse
est malheureusement encore insuffisante. Eneffet,
si nous faisons intervenirles
énergies
derotation,
nousmultiplions
à telpoint
les
possibilités
d’excitation que des métaux comme lethallium,
le zinc et lemagnésium,
qui
n’ont rien donné dans lesexpériences
delVlohler,
devraient émettre leurradiation de résonance. Le
potentiel
de résonancedu zinc est de
4,0~ V;
celui dumagnésium,
de 2,70 V.Or,
si la moléculed’hydrogène
passe au niveauv == 0,
J = 7
on a D - E =4~o5,
si elle passe au niveauv = 3,
J = 6 on a 1) - E = 2,70. Maispeut-être
les diff érences4,05
-458
et
2,75
-2,70 ===
0,05
sont-ellesdéjà
trop
grandes
pour
qu’il
y ait excitation.Cependant,
dans la luminescence même duciel,
nous trouvons une confirmation de
l’hypothèse
quela
probabilité
d’excitation d’uneparticule,
par choc de deuxièmeespèce,
n’estimportante
que sil’énergie disponible
est sensiblement la même quel’énergie
requise
pour l’excitation.En
effet,
en dehors des bandes deVegard-Kaplan,
on observe dans lespectre
du ciel nocturne unesélection de bandes du
premier
système
positif
del’azote. Sur
plaque panchromatique,
laplus
intense-
et de
beaucoup
- est la bande 6500 -655o A
émise dans la transition B
(v
=7)
-+ A(o
=~).
L’excitation
X ~v
=o)
- B(v
=7) exige
uneénergie
équivalente
à8,71
Vqu’on
ne trouve pas dans leciel nocturne. On fera donc intervenir la double transition
X(v = o) - A (v = ~)
et A(v
=2) - B(v
=7).
Or,
cette dernière absorbe 2,22V,
c’est-à-dire uneénergie
àpeine
inférieure aux2, ~3
V que libère l’atomed’oxygène 1S
lorsqu’il
retombe au niveau ’D.On est ainsi tout naturellement conduit à
expliquer
l’exaltationexceptionnelle
de la bande 6500-6550 3i dans lespectre
du ciel nocturne par le choc desmolécules d’azote A
(v
=2)
et des atomesd’oxy-gène
1S,
choc danslequel
l’énergie
absorbée estégale (à
0,01 Vprès)
àl’énergie
disponible.
Manuscrit reçu le 8 juillet 19~9.
BIBLIOGRAPHIE.
[1] CABANNES et DUFAY, C. R. Acad. Sc., 1935, 200, p. 1504.
[2] CABANNES, C. R.
Acad.
Sc., 1939, 208, p. 1770.[3] CHAPMANN, Phil. Mag., 1930, 10, p. 369; 23, 1937, p. 657. [4] KAPLAN, Phys. Rev., 1928, 31, p. 997.
5] MOHLER, Phys. Rev., 1927, 29, p. 419.
[6] DIEKE et HOPFIELD, Phys. Rev., 1927, 30, p. 415.
[7] BIRGE, Nature, 1928, 121, p.
134.
[8] RICHARDSON et DAVIDSON, Proc. Roy. Soc., 1929, 123,
p. 466.
[9] BURRAU, Kgl. Danske Vid. Selsk., 1927, 7, p. 14.
ERRATUM
à l’article : Correspondance entre les changements d’état à deux et trois dimensions, par D. Dervichian, juillet 1939.
Page 337, Tableau I, colonne T,,, pour tous les o° lire o°.