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Etude des propriétés diélectriques d'une résine époxy chargée d'alumine sous contraintes électro-thermiques en régime continu

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Etude des propriétés diélectriques d’une résine époxy

chargée d’alumine sous contraintes électro-thermiques

en régime continu

Hanen Yahyaoui, Petru Notingher, Serge Agnel, Yannick Kieffel

To cite this version:

(2)

SYMPOSIUM DE GENIE ELECTRIQUE (SGE’14) : EF-EPF-MGE 2014, 8-10 JUILLET 2014, ENS CACHAN, FRANCE

Etude des propriétés diélectriques d’une résine époxy

chargée d’alumine sous contraintes

électro-thermiques en régime continu

H. Yahyaoui

1

, P. Notingher

1

, S. Agnel

1

, Y. Kieffel

2

1

Univ. Montpellier, IES, UMR 5214, Montpellier, France

2 Alstom Grid, Villeurbanne, France

RESUME - Le comportement diélectrique d’une résine époxy chargée en alumine est étudié en vue de son utilisation en tant qu’isolant dans le domaine de la haute tension continue. L’évolution de ses propriétés diélectriques à court et long terme est suivie et analysée durant des vieillissements réalisés sous l’effet conjoint de contraintes électriques continues (4 à 12 kV/mm) et de la température (105°C et 125°C).

Mots-clés— diélectrique, résine époxy, haute tension continue, vieillissement, charges d’espace

1. INTRODUCTION

Actuellement, le transport de l'énergie électrique se fait principalement en courant alternatif ; toutefois dans le cas du transport sur des longues distances, l’usage du courant continu est économiquement et techniquement plus avantageux. Afin de répondre aux nouveaux besoins énergétiques, le courant continu s'impose ainsi de plus en plus dans les grands projets de liaisons hautes tension. Les principaux verrous à ce développement se situent au niveau des câbles et des appareillages, qui doivent comporter des matériaux isolants possédant des propriétés adaptées. A la différence du régime alternatif, où la répartition du champ électrique est contrôlée par la permittivité, qui varie peu avec le champ et la température, la distribution du champ sous contrainte continue est principalement déterminée par la conductivité du matériau, qui dépend fortement de la température et du champ électrique. De plus, des charges électriques (charges d’espace) peuvent être injectées et piégées dans l’isolant. Ces charges peuvent constituer un facteur de vieillissement des matériaux à travers les distorsions de champ interne qu'elles provoquent, et être à l’origine de claquages prématurés.

Les résines époxydes sont utilisées depuis de nombreuses années dans les disjoncteurs à isolation gazeuse [1], où elles ont montré leur fiabilité en tant qu'isolants pour la haute tension alternative. Elles présentent de bonnes propriétés mécaniques et diélectriques dans la gamme de température de fonctionnement des disjoncteurs (jusqu’à 105°C [1]). Leurs propriétés mécaniques et thermiques peuvent être améliorées par l'ajout de charges minérales (alumine, silice...). Cependant, le comportement à long terme de ces isolants sous fortes

contraintes continues n'est pas encore suffisamment connu et nécessite des études approfondies si l'on souhaite les utiliser pour les applications en courant continu. Dans ce travail, nous nous intéressons ainsi à l'évolution des propriétés diélectriques de ces résines suite à l’application de contraintes électrothermiques continues de courte et longue durée. Les différentes conditions de vieillissement, les mises en œuvre expérimentales réalisées ainsi que les procédures et techniques de caractérisation sont présentées, et les résultats obtenus sont analysés et discutés.

2. MATERIAU ET ECHANTILLONS

Le matériau étudié est une résine époxyde composée d'une matrice de Diglycidyl éther de Bisphénol A (DGEBA), d’un durcisseur anhydride et d’une charge d’alumine (Al2O3). Le

taux de charge est de 66% en masse. Le profil des échantillons utilisés dans cette étude est celui de la Figure 1a. Il s'agit d’échantillons de type plaque carrée ou circulaire, qui, afin de limiter les effets liés au renforcement du champ électrique aux bords des électrodes, ont subi un usinage dans l’épaisseur pour obtenir un profil de la zone contrainte électriquement s’apparentant à un profil Rogowski. L’épaisseur au centre (zone « utile ») est de 0,7 mm. Toutes les éprouvettes ont été obtenues par usinage à partir de blocs de résines fabriqués pour des applications haute tension.

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En revanche, les échantillons utilisés pour des tests de vieillissement ont été munis sur chaque face d'électrodes identiques, en forme de disques pleins de diamètre 54 mm, tel qu’illustré dans la Figure 1c.

(a)

(b)

(c) Figure 1. Profil des échantillons utilisés (a) et photographies des deux

faces d’un échantillon pourvu d’électrodes utilisé pour la mesure des courants de conduction (b) et pour les vieillissements (c)

3. MISE EN OEUVRE EXPERIMENTALE

3.1. Courants de conduction et champ seuil

Des essais à court terme ont été effectués avant de procéder à des vieillissements. En particulier, des mesures courant-tension ont été réalisées. Le montage qui a servi lors de ces mesures est schématisé dans la Figure 2. Les tensions appliquées aux électrodes ont été délivrées par une source haute tension continue stabilisée (Fug HCP140-35000). Les mesures de courant ont été effectuées à l’aide d’un électromètre Keithley 6517A.

Figure 2. Mise en œuvre expérimentale pour la détermination des caractéristiques courant-tension

Les courants transitoires (d'absorption) ont été enregistrés à 25, 60, 85 et 105°C, pour des valeurs de la tension allant jusqu'à 27 kV. Pour tracer les caractéristiques courant-tension, nous avons utilisé les valeurs en régime « quasi-permanent », relevés après 10000 s de mise sous tension. Une fois le régime quasi-permanent atteint, l’échantillon est mis en court-circuit pendant une durée équivalente à celle de la mesure (résorption) afin d’assurer sa dépolarisation complète avant d’appliquer une valeur supérieure de tension.

3.2. Spectroscopie diélectrique

La capacité et le facteur de pertes des échantillons étudiés ont été déterminés à température ambiante à l’aide d’un spectroscope diélectrique composé d’un analyseur d'impédance Solartron SI 1260 pourvu d'une interface diélectrique type Solartron 1296 et d’une cellule de mesure adaptée. Les mesures ont été réalisées à température ambiante, dans une gamme de fréquences allant de 100 mHz à 1 MHz et sous une tension alternative de 2V efficace. Ce type de mesures a été régulièrement effectué pendant les vieillissements électrothermiques.

3.3. Mesures de charges d’espace

L'évolution de la charge d'espace accumulée durant le vieillissement a été suivie en utilisant la méthode de l'onde thermique (MOT) [2]. Cette technique permet de déterminer la répartition du champ électrique et de la densité des charges d'espace dans l'isolant. La MOT consiste en la mesure du courant capacitif qui apparait dans le circuit extérieur suite à l'application d'un échelon de température sur l'une des faces de l'échantillon. La diffusion du front thermique dans l’échantillon va engendrer une contraction du matériau, qui provoque un léger déplacement des charges d’espace dans le diélectrique et une variation inhomogène de la permittivité dans l’épaisseur. Ceci crée le courant d'onde thermique, dû au rééquilibrage des charges d’influence aux électrodes de mesure. Si on connait à chaque instant la valeur du courant expérimental et la distribution spatiale et temporelle de la température dans le matériau, on peut, par traitement mathématique, remonter à la distribution du champ électrique et par la suite à la distribution volumique des charges d'espace. Les mesures d'onde thermique ont été effectuées en conditions de court-circuit, avec un échelon thermique de -30°C (Figure 3).

Figure 3. Schéma de principe pour la mesure de charges d’espace par la méthode de l’onde thermique

3.4. Conditions de vieillissement et mise en oeuvre experimentale associée

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tension. Ainsi, dans chaque cellule comportant 15 échantillons, trois groupes de cinq éprouvettes de même épaisseur ont été soumis chacun à un champ différent (4, 8 ou 12 kV/mm). Chaque cellule a été placée dans une étuve afin de la porter à la température souhaitée. La pression d’azote dans les cellules a été réglée à 1 bar et contrôlée durant toute la durée des vieillissements. L'étude a été réalisée à deux températures : 105 et 125°C. Dans chaque cas, 15 échantillons (tels ceux illustrés dans la Figure 1c) ont été placés sous contrainte thermoélectrique, un échantillon supplémentaire subissant uniquement la contrainte thermique. La Figure 4 présente la cellule de vieillissement ouverte et la disposition des échantillons. Au cours du vieillissement, les éprouvettes ont été enlevés périodiquement des cellules afin de déterminer leurs propriétés diélectriques (capacités, facteur de pertes, charges d’espace).

Figure 4. Mise en œuvre des échantillons pendant le vieillissement électro-thermique 4. RÉSULTATS

4.1. Courants de conductions et champs seuils

Les résultats de mesures des caractéristiques courant/tension relevées à différentes températures ont été analysés à travers différentes représentations de la densité de courant de conduction J en fonction du champ électrique appliqué E. Chaque représentation permet d’obtenir des renseignements sur la présence prédominante d’un mécanisme de conduction. Elles nous ont permis également de définir, pour chaque température, les valeurs «seuils » du champ électrique à partir de laquelle la conduction passe d'un régime ohmique à un régime non ohmique. Etant donné qu'en industrie ce matériau est utilisé sans conditionnement préalable afin de gagner en temps et en consommation d'énergie, les mesures ont été d’abord effectuées sur des échantillons à l'état vierge. Dans un deuxième temps, les échantillons ont été séchés, puis caractérisés afin d'évaluer l'effet de l'absorption d'eau sur le comportement diélectrique du matériau.

Pour les échantillons à l'état vierge, la représentation en double échelle logarithmique de la densité du courant en fonction du champ appliqué (Figure 5) met en évidence, pour les faibles valeurs du champ appliqué et quelle que soit la température, une partie linéaire de pente 1, caractéristique d’une conduction de type ohmique. Les valeurs de conductivité volumique calculées à partir du regime ohmique sont de l'ordre de 10-16 S/m (à 20°C) à 10-13 S/m (à 105°C). A partir d’une certaine valeur du champ électrique appliqué (champ « seuil » de l’ordre de 4,5 à 9 kV/mm, selon la température), on observe

une transition vers des pentes de valeurs supérieures à 1, qui traduisent un régime non ohmique.

A 25°C, 60°C et 85°C on relève, à fort champ, des pentes égales ou légèrement supérieures à 2, caractéristiques d’un régime limité par charges d’espace (« Space Charge Limited Current – SCLC »), où la dépendance densité de courant/tension électrique est donnée par la loi de Mott et Guerney [4] :

𝐽 =9 8𝜀𝑟𝜀0𝜇

𝑉𝑙+1

𝑑2𝑙+1 (1)

avec

𝑙

un nombre variant entre 1 et 3 et dont la valeur dépend de la distribution énergétique des pièges, μ mobilité des porteurs de charge,

ε

r permittivité relative du diélectrique,

ε

0 permittivité du vide, d épaisseur de l’échantillon et V = E*d tension appliquée.

A 105°C, l’analyse des données a fait ressortir un mécanisme majoritairement contrôlé par l’interface métal/isolant, à savoir une injection de charge de type Schottky. La densité de courant due à l’effet Schottky s’écrit :

𝐽𝑆= 𝐴𝑠𝑇2exp( −

∅0− 𝛽𝑆 𝐸𝐶

𝑘𝑇 ) (2)

avec 0 hauteur de la barrière en l’absence du champ appliqué,

As constante de Richardson pour l'émission thermoélectronique, βS = q3 4πε

0εr constante de Schottky, k constante de

Boltzmann et 𝐸𝐶 champ électrique à la cathode.Le champ à la

cathode EC pouvant être modifié par la présence de charge d'espace, sa valeur n'est pas toujours égale à V/d. On peut rendre compte de l'état électrique du contact par un paramètre sans dimension 𝛾 tel que [5] :

𝐸𝑐 = 𝛾 𝑉 𝑑 (3)

avec 𝛾 < 1 si homocharge dominante au contact et 𝛾 > 1 si hétérocharge dominante au contact. Les paramètres reliés à l’effet Schottky calculés à partir des données expérimentales à 105°C, et qui mettent en évidence une hétérocharge à l’interface métal/isolant, sont donnés dans le tableau 1.

Tableau 1. Grandeurs relatives à un mécanisme de type Schottky à 105°C pour le matériau vierge

Pente de (𝐿𝑛𝐽𝑠)=f ( 𝑉 𝑑 1/2) 𝛽𝑆 kT γ ∅𝟎 (eV)

710-4 5,410-4 1,63 1,37

(5)

le poids de l’échantillon s’est stabilisé, la perte de masse constatée étant 0,07%. Des mesures de courants de conduction ont été ensuite effectuées à 60°C, 85°C et 105°C. Les résultats ont été comparés à ceux obtenus sur le matériau à son état vierge. Ainsi, les valeurs de résistivité volumique, calculées à partir du régime ohmique avant et après séchage, sont données dans le Tableau 2. Afin d’identifier les mécanismes de conduction dominants dans le matériau séché, différentes représentations de J(E) ont été analysées, comme pour les échantillons non séchés. La Figure 6 concerne ainsi la caractéristique J(E) relevée pour un échantillon séché et représentée en doubles coordonnées logarithmiques.

Figure 5. Représentation des caractéristiques J-E en double échelle logarithmique pour un échantillon à l’état vierge

Figure 6. Représentation des caractéristiques J-E en double échelle logarithmique pour un échantillon séché pendant 24 h à 100°C

En analysant la Figure 6, on constate que, après un régime ohmique présent pour des champs inferieurs à quelques

kV/mm, quelle que soit la température (pente 1), un mécanisme de type « courant limité par charges d’espace » (pente 2) régit la conduction volumique à 60 et 85°C. Le seuil de passage entre les deux régimes est de 6 à 9,4 kV/mm, en fonction de la température. Les données obtenues à champ fort pour une température de 105°C ont été comparées aux autres théories de conduction : le mécanisme de type Schottky a été identifié comme prédominant, avec les paramètres caractéristiques indiqués au Tableau 3.

Tableau 2. Résistivité volumique du matériau vierge et après séchage

Résistivité volumique Température

60°C 85°C 105°C

A la réception (Ωm) 8.24×1013 3×1012 1.5×1013 Après séchage

à 100°C pendant24 h (Ωm) 4.62×10

15 1015 4×1013

Tableau 3. Grandeurs relatives à un mécanisme de type Schottky à 105°C pour le matériau séché

Pente de (𝐿𝑛𝐽𝑠)=f ( 𝑉 𝑑 1/2) 𝛽𝑆 kT γ ∅0 (eV)

7,9210-4 5,410-4 2,1 1,3

On conclut ainsi que le séchage à 100°C n’a pas influencé les mécanismes de conduction de manière significative, mise à part une faible augmentation du champ seuil. En revanche, une comparaison des valeurs du Tableau 2 met en évidence une augmentation de la résistivité volumique pour les échantillons ayant subi un conditionnement à 100°C pendant 24h d’un facteur allant de 10 à 100, suivant la température.

Pour interpréter ce résultat, il convient de rappeler que la résine est un matériau hydrophile, qui a tendance à absorber l’eau facilement. Il a ainsi été observé qu’une absorption d’eau de 0,1% conduit à une diminution de la résistivité de deux ordres de grandeur [8]. Rappelons que la perte de masse des échantillons séchés a été de 0.07% : l’augmentation de la résistivité volumique après séchage confirme donc bien cette hypothèse. Il en ressort qu’un pré-conditionnement thermique des pièces en résine avant montage dans l’appareillage, en permettant d’éliminer au moins une partie de l’eau du matériau, aurait un impact positif sur ses propriétés diélectriques.

4.2. Evolution des propriétés diélectriques durant le vieillissement DC

Les mesures courant/tension ont permis de déterminer les « champs seuils », à partir duquel le régime de conduction change dans le matériau. Les valeurs mesurées (4,5 à 9,4 kV/mm) nous ont permis de choisir des champs de vieillissement en-dessous et au-dessus de ces « seuils », à savoir 4, 8 et 12 kV/mm. Afin de déterminer et comprendre l’évolution des propriétés diélectriques du matériau pendant des longues durées, des vieillissements électrothermiques ont ainsi été réalisés à des températures de 105°C et 125°C, selon le protocole expérimental décrit au paragraphe 3.4. Les résultats de ces tests, réalisés pendant 200 à 300 jours, sont présentés et analysés ci-après.

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facteur de pertes durant 295 jours de vieillissement à 125°C. Afin d'obtenir des résultats statiquement représentatifs, chaque courbe représente l'évolution de la valeur moyenne des capacités (et respectivement des facteurs de pertes) obtenues sur les cinq échantillons soumis au même champ de vieillissement. Une diminution du facteur de pertes est observée en basse fréquence juste après l'application de la contrainte. Cet effet est sans doute de nature thermique, car les spectres oscillent par la suite légèrement autour de la même valeur et il n’apparaît pas une évolution significative en relation avec le champ appliqué ou la durée de vieillissement. La variation de la mobilité moléculaire, la poursuite de réticulation et/ou l’élimination d'eau dans le matériau après la mise sous contrainte en sont sans doute responsables.

Une diminution significative de la capacité apparaît à partir de 110 jours à 12 kV/mm et 8 kV/mm. Après étude, il s’est avéré qu’elle est essentiellement provoquée par la détérioration des électrodes des échantillons placés au bord de la cellule, proches de l’entrée du gaz, et soumis aux champs les plus élevés (12 et 8 kV/mm), plutôt qu’à une évolution du matériau. En effet, malgré les précautions prises dans la mise en œuvre expérimentale, des décharges surfaciques, se produisant à cet endroit, provoquent l’arrachement de particules d’or des électrodes déposées en surface des échantillons, en engendrant ainsi une diminution de la surface des électrodes (Figure 8). La capacité étant proportionnelle à la surface des électrodes, elle diminue en conséquence. Malgré cette diminution de la surface des électrodes, la valeur de la capacité et la forme des spectres peuvent toujours être déterminés par spectroscopie diélectrique : le vieillissement a donc été poursuivi afin de tirer des informations relatives à l’évolution morphologique du matériau et de la charge d’espace accumulée. Il est à noter qu'aucun claquage n'a été observé.

La polarisation interfaciale ou les effets de dispersion peuvent être mis en évidence à des fréquences basses. Ce type de comportement, dont l’évolution sous l’effet du champ continu est susceptible d’apporter des informations d’un point de vue électrique, est difficilement identifiable sur les caractéristiques mesurées, sans doute parce qu’il devient observable dans notre matériau à des fréquences plus basses (10-2 à 10-4 Hz). Etant donné les durées importantes que nécessitent des mesures à ces fréquences et le nombre d’échantillons nécessaires pour obtenir des résultats statistiquement significatifs, un suivi de l’évolution de nos spectres dans le domaine [10-4 Hz…10-2 Hz] était difficilement compatible avec une durée raisonnable de l’étude. En revanche, le suivi de l’accumulation de charges d’espace, qui est la principale responsable des problèmes de fiabilité sous fort champ continu, est nettement moins contraignant en termes de temps de mesure. Des mesures ont donc été effectuées en utilisant la méthode de l'onde thermique (MOT). Le signal MOT est représentatif de la quantité de charges d’espace présente dans le matériau après application de la contrainte. Le profil des échantillons (épaisseur non constante) ne permettant pas de déterminer avec suffisamment de précision la répartition du champ électrique dans l’épaisseur, nous avons utilisé l’amplitude des courants d’onde thermique pour rendre compte

de l’évolution de la charge d’espace piégée. Figure 7. Evolutions des spectres diélectriques

pendant les vieillissements réalisés à 125°C

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Figure 8. Effets des décharges superficielles sur des échantillons vieillis à 125°C sous 12 kV/mm

Figure 9. Exemple de courants d’onde thermique (charges d’espace) observés sur des éprouvettes vieillies à 125°C

La Figure 9 ci-dessus montre quelques exemples d'évolution du courant d’onde thermique durant les différents vieillissements réalisés à 125°C. Les allures des courbes étant similaires, il est possible de comparer leurs amplitudes afin d’obtenir une idée sur l’évolution de la charge d’espace durant le vieillissement. Ceci est illustré dans la Figure 10. Le courant d’onde thermique étant cependant proportionnel à la capacité de l’échantillon, son amplitude doit être normalisée afin d’assurer une bonne comparaison des données obtenues sur les

différents échantillons. Pour cette raison, les courbes représentées dans la Figure 10 ont été obtenues à partir des données représentant le rapport entre l’amplitude IMax du courants MOT mesuré divisée par la capacité C de l’échantillon en question (IMax /C). Afin d’assurer une représentativité statistique, chaque point figurant sur la Figure 10 représente la moyenne des valeurs de IMax/C correspondant aux cinq échantillons soumis au même champ de vieillissement.

Figure 10. Evolutions des amplitudes moyennes normalisées des courants d’onde thermique pendant le vieillissement à 125°C Il ressort que l’évolution de IMax/C n'est pas monotone avec le temps de vieillissement. Une évolution croissante est ainsi visible jusqu’à 150 jours sous 8 et 12 kV/mm. Les valeurs mesurées sous 8 kV/mm diminuent par la suite, puis une nouvelle tendance à l’augmentation apparaît après 215 jours de conditionnement, mais avec une pente plus faible. En revanche, une tendance à la stabilisation est observée pour 4 kV/mm à partir de 215 jours. Concernant le vieillissement à 12 kV/mm, le niveau moyen du courant augmente quasi-continuellement jusqu’à 175 jours, puis des oscillations sont observées, avec une tendance pourtant claire à l’augmentation. Ces oscillations sont vraisemblablement reliées à des accumulations puis à des dépiégeages successifs de charges, bien connus dans la physique des diélectriques. Néanmoins, la tendance croissante de la courbe permet de déduire que l'accumulation de charges d'espace continue globalement (création et remplissage de pièges), sans qu’un niveau stable d’équilibre soit atteint, comme à 4 kV/mm.

Les résultats concernant l’évolution de la résine durant le vieillissement à 105°C sont représentés dans les Figures 11-13. Comme à 125°C, une diminution du facteur de pertes apparaît en basse fréquence après la mise sous contrainte quel que soit le champ appliqué. Cette baisse semble néanmoins moins importante qu’à 125°C, faisant état d’un moindre effet de la température sur la structure du matériau et/ou sur l’évacuation d’eau, ce qui paraît tout à fait cohérent. Si les spectres correspondant au vieillissement réalisé sous 4 kV/mm restent par la suite très peu évolutifs, des changements ponctuels et réversibles sont observables dans les spectres relevés à 12 kV/mm (à 130 jours et après 195 jours) et à 8 kV/mm (à 90 jours et après 195 jours).

0 5 10 15 -200 -150 -100 -50 0 50 E14 - 4kV/mm - 125°C t [S] C o u ra n t [p A] 0 15 30 50 70 110 130 150 175 215 235 255 275 295 0 5 10 15 -250 -200 -150 -100 -50 0 50 E6 - 8kV/mm - 125°C t [S] C o u ra n t [p A] 0 15 30 50 70 110 133 150 175 215 235 255 275 295 0 5 10 15 -400 -300 -200 -100 0 100 E5 - 12kV/mm - 125°C t [S] C o u ra n t [p A] 0 15 30 50 70 110 130 150 175 215 235 255 275 295 0 0,5 1 1,5 2 2,5 3 3,5 4 4,5 0 100 200 300 400 IMax /C [ A/F]

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Figure 11. Evolutions des spectres diélectriques pendant les vieillissements réalisés à 105°C

Ces variations dans les spectres ne sont en aucun cas à relier à des effets liés aux électrodes tels ceux observés à 125°C, car on n’a pas mis en évidence des détériorations

importantes des dépôts d’or, et les variations observées des capacités sont réversibles. Par ailleurs, les baisses de la capacité sont accompagnées de l’apparition de pics du facteur de pertes dans la même gamme de fréquences : on est donc bien en présence de vrais pics de relaxation. Il est très probable que ces évolutions témoignent de processus de relaxation réversibles, impliquant des charges et liés à la transition vitreuse. Ceci paraît d’autant plus vraisemblable si l’on prend en compte le fait que la température de transition vitreuse de notre matériau se situe autour de 110°C, que les pics n’apparaissent qu’aux champs forts et que leur placement dans le spectre, leur amplitude et leur moment d’apparition dépendent du champ de vieillissement.

Figure 12. Exemple de courants d’onde thermique (charges d’espace) observés sur des éprouvettes vieillies à 105°C

Les données représentées dans les Figures 12 et 13 montrent que la dynamique d’évolution de la charge d’espace est différente à 105°C de celle observée à 125°C. Ainsi, les niveaux de courant MOT sont plus importants à 105°C ; les champs internes apparaissent donc plus élevés. Les courbes de la Figure 13 montrent que le niveau moyen du courant augmente avec le champ et la durée de vieillissement jusqu’à

(9)

150 jours, ce qui permet de déduire que l’accumulation de charges d’espace devient de plus en plus importante. Cette évolution est d’autant plus marquée pour les valeurs les plus élevées du champ appliqué (12 et 8 kV/mm). Néanmoins, une tendance à la stabilisation pour les trois champs apparait tôt dans la durée de vieillissement (150 jours) par rapport à 125°C (215 jours). Comme la charge accumulée est un équilibre entre les porteurs injectés et ceux évacués par conduction, les évolutions observées peuvent être interprétées comme le résultat de l'évacuation périodique d'une fraction des charges accumulées sous l'effet du champ interne. Ainsi, tant que les charges sont accumulées dans des pièges peu profonds, elles peuvent être facilement dépiégées pour des valeurs plus basses du champ interne. En revanche, les charges stockées dans des pièges profonds vont être dépiégées plus difficilement. Une plus grande valeur du champ sera nécessaire pour faciliter la libération de ces pièges. Par conséquent, les charges continueront à s'accumuler jusqu'à ce que le champ interne atteigne des valeurs capables de favoriser l'extraction des charges des pièges profonds. Ainsi, on en déduit une accumulation des charges pendant les 130 premiers jours ; ensuite, les charges sont évacuées et les courants MOT diminuent, avec une tendance à la stabilisation reflétant un équilibre entre la charge injectée et la charge évacuée.

Figure 13. Evolutions des amplitudes moyennes normalisées des courants d’onde thermique pendant le vieillissement à 105°C En comparant les courbes des Figures 10 et 13, on s’aperçoit que la dynamique d’évolution de la charge d'espace est sensiblement différente selon la température de vieillissement. Il ressort en effet que le rapport IMax/C présente des valeurs plus élevées à 105°C qu’à 125°C : la température de 105°C favorise donc davantage l’accumulation de charges. Ceci peut être corrélé à l’augmentation significative de la conduction observée entre 105°C et 120°C (plus d’une décade), que met en évidence la Figure 6 : la conduction étant plus importante à 125°C qu’à 105°C, le bilan net de charges est plus faible.

Les résultats présentés ci-avant montrent que l’évolution du matériau étudié sous champ continu est, dans la gamme étudiée, fortement dépendante de la valeur du champ et de la température. Afin de mieux évaluer l'effet à long terme de la charge d'espace sur le matériau et d'en tirer des informations approfondies pour la conception de composants pour la haute

tension à courant continu, il apparait donc utile de continuer à surveiller l'accumulation de charges pendant des périodes plus longues afin de déterminer si une valeur d'équilibre est atteinte pour ces températures, et de corréler cette valeur avec une éventuelle défaillance. De même, une étude plus étendue du comportement diélectrique du matériau dans la gamme de températures 100-120°C permettra de mieux comprendre les effets mis en évidence au voisinage de la transition vitreuse.

5. CONCLUSIONS ET PERSPECTIVES

Dans ce travail, le comportement diélectrique d’une résine époxyde chargée d’alumine (66% en poids) a été étudié sous fort champ continu en vue de son utilisation pour des applications haute tension à courant continu.

Les caractéristiques courant-tension ont permis de mettre en évidence des comportements non–linéaires au-delà de 4,5 à 9,5 kV/mm, en fonction de la température et de l’absorption d’eau. Il a été montré que le seuil de non-linéarité diminue lorsque la température et le et le taux d’absorption d’eau augmentent, et qu’un faible contenu en eau (< 0,1%) peut provoquer une diminution de la résistivité volumique de une à trois décades.

Suite à un vieillissement thermoélectrique effectué durant 300 jours à 125°C pour des valeurs de champ appliqué choisies en-dessous et au-dessus du seuil ohmique suite aux mesures courant-tension (4, 8 et 12 kV/mm), des évolutions des niveaux de charges d’espace ont été mises en évidence avec la durée de vieillissement d’autant plus marquées que le champ électrique était élevé. Par ailleurs, si à 4 kV/mm l’accumulation des charges d’espace semble atteindre un niveau d’équilibre après 150 jours, elle continue à augmenter pour les valeurs du champ situés au niveau et au-dessus du champ « seuil », bien que cette augmentation se fasse avec une pente plus faible au-delà de 200 jours.

Le conditionnement pendant 200 jours à 105°C sous les mêmes valeurs de champ a fait apparaître une évolution différente, avec un « pic de charge » observé après 90 jours, suivi d’une tendance à la stabilisation, voire à la baisse, quelle que soit la valeur du champ. En revanche, le niveau de charge accumulée a été bien plus élevé qu’à 125°C, en mettant en évidence la compétition « injection-piégeage-conduction » dans le matériau et en montrant la nécessité d’approfondir l’étude et la compréhension des propriétés diélectriques du matériau entre 100°C et 120°C.

Suite aux résultats obtenus, il apparait utile de continuer à évaluer et analyser les effets à très long terme de la charge d’espace sur ce matériau afin de conclure quant à ses applications pour les dispositifs de puissance sous fort champ continu, et de permettre la mise au point de critères nécessaires à une conception appropriée des pièces isolantes intégrés dans des appareillages haute tension à courant continu.

6. REMERCIEMENTS

Les auteurs souhaitent remercier la société Alstom Grid (Villeurbanne, France) pour le soutien technique et financier apporté à ce travail. 0 0,5 1 1,5 2 2,5 3 3,5 4 4,5 0 100 200 300 400 IMa x / C [A/F]

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REFERENCES

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Références

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