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Autour du paon et du phénix : étude d'une iconographie cultuelle et funéraire dans le Bassin méditerranéen (IVe-XIIe siècle)

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Academic year: 2021

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Texte intégral

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cultuelle et funéraire dans le Bassin méditerranéen

(IVe-XIIe siècle)

Raphaël Demès

To cite this version:

Raphaël Demès. Autour du paon et du phénix : étude d’une iconographie cultuelle et funéraire dans le Bassin méditerranéen (IVe-XIIe siècle). Art et histoire de l’art. Université Bourgogne Franche-Comté, 2017. Français. �NNT : 2017UBFCH019�. �tel-01761773�

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UFR Sciences Humaines, Département Histoire de l’Art et Archéologie École Doctorale SEPT (Sociétés, Espace, Pratiques, Temps)

Centre Georges Chevrier UMR 7366 – CNRS uB

THÈSE

Pour obtenir le grade de

Docteur de l’Université de Bourgogne Discipline : Histoire de l’Art médiéval

par

Raphaël DEMÈS

le 18 novembre 2017

Autour du paon et du phénix. Étude d’une iconographie cultuelle

et funéraire dans le Bassin méditerranéen (IV

e

-XII

e

siècles)

Sous la direction de Monsieur le Professeur Daniel RUSSO

Jury

Madame Claire SOTINEL, Professeure d’histoire ancienne, Université Paris-Est Créteil

Val-de-Marne, rapporteur et présidente du jury.

Monsieur François BOUGARD, Professeur en histoire médiévale, Université Paris-Ouest La Défense Nanterre, Directeur de l’IRHT, rapporteur.

Monsieur Stéphane RATTI, Professeur en histoire ancienne Antiquité tardive, Université de Franche-Comté, ISTA.

Monsieur Simone PIAZZA, Maître de conférences HDR en histoire de l’art médiéval, Université

Paul Valéry – Montpellier 3.

Monsieur Daniel RUSSO, Professeur d’histoire de l’art médiéval, Université de Bourgogne Franche-Comté, directeur.

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Je tiens tout d’abord à exprimer mes plus sincères remerciements à mon directeur de thèse, M. le professeur Daniel Russo pour m’avoir fait confiance, et ce, depuis le master. Je ne saurais assez le remercier pour son aide, son soutien et ses précieux conseils.

Je souhaiterais ensuite exprimer ma gratitude à la direction, aux membres et au personnel de l’École Française de Rome, plus particulièrement à M. Stéphane Gioanni, directeur des études médiévales de l’École, ainsi qu’à Mme Grazia Perrino pour sa disponibilité au cours de mes deux séjours de recherche à Rome. Les deux bourses de recherche obtenues en 2011, puis en 2012, m’ont, en effet, été très profitables. La constitution du corpus documentaire a largement été facilitée par l’exploitation des ressources de la bibliothèque de l’École et des musées romains. Je remercie également la direction de la Casa de Velázquez de Madrid de m’avoir octroyé une bourse de recherche en 2013. Mes remerciements s’adressent en particulier à M. Daniel Baloup, directeur des études anciennes et médiévales de la Casa, ainsi qu’à Mme Flora Lorente, pour avoir facilité le déroulement de mes recherches dans plusieurs bibliothèques à Madrid et Barcelone. Je tiens également à remercier la direction de l’École Française d’Athènes pour m’avoir également accordé une bourse de recherche en 2014 et de m’avoir ainsi permis d’approfondir l’étude d’un autre versant de mon corpus documentaire. Je voudrais exprimer ma reconnaissance à M. Julien Fournier, directeur des études Antiquité et Byzance, aux membres de l’École, en particulier à M. Sylvain Perrot pour son aide et ses conseils, ainsi qu’à Mmes Sophia Zoumboulaki et Evi Platanitou pour l’organisation de mon séjour de recherche à Athènes.

Je remercie les directeurs et les membres des laboratoires de recherche auxquels j’ai été successivement rattaché, l’UMR ARTeHIS (UMR 6298) et le Centre Georges Chevrier (UMR 7366) pour leur soutien.

Par ailleurs, je tiens à remercier la Mairie de Dijon notamment pour l’obtention de plusieurs bourses municipales.

J’exprime toute ma reconnaissance à Mme Françoise Lecocq, Maître de conférences en latin à l’université de Caen, pour l’intérêt qu’elle a porté à mes travaux. Je la remercie sincèrement pour le temps qu’elle a accordé à la lecture et aux corrections de plusieurs chapitres de ma thèse portant notamment sur le versant littéraire du phénix. Son soutien, sa bienveillance

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Mes remerciements s’adressent également à Mme Alessandra Coen de l’università degli studi della Campania Luigi Vanvitelli, à M. Pierre-Olivier Leroy, Docteur en langues et littératures anciennes de m’avoir communiqué leurs travaux. Je tiens aussi à remercier celles et ceux qui ont participé, de différentes manières, à l’avancée de mes travaux. Parmi eux figurent les étudiants de Licence en Histoire de l’Art et Archéologie de l’université de Bourgogne avec qui j’ai pu éclaircir plusieurs points par l’intermédiaire des cours que j’ai eu la chance d’assurer en parallèle de la thèse, grâce à M. Daniel Russo. Par ailleurs, ce travail n’aurait pu être mené à bien sans les conseils, les encouragements et le soutien sans faille de plusieurs collègues, doctorants et jeunes docteurs, et amis. Mes plus sincères et chaleureux remerciements vont à Mourad Asfoure, Marie Charbonnel, Julie Mercieca et Pauline Nuviala pour leurs conseils et Pauline Duclos-Grenet pour nos riches discussions. Je remercie Élodie Guilhem de m’avoir transmis ses photographies des mosaïques de pavement de la basilique alla Beligna d’Aquilée. Je tiens à remercier Mathieu Beaud de m’avoir permis de travailler sur ses images du pavement de l’église arménienne de Jérusalem. Je le remercie également pour ses précieux conseils sur la structuration de ma base de données. Ma « volière » informatique n’aurait pu (re)naître sans l’aide de Nicolas Perreaux, qui a souvent éclairé ma lanterne sur l’analyse des données et m’a offert de nombreuses pistes de réflexion. Une pensée également à celles et ceux qui ont gentiment « chassé » le paon et le phénix ainsi qu’à celles et ceux qui m’ont accompagné durant ce long parcours.

Cette thèse a pu aboutir grâce au soutien, à la compréhension et à la confiance de mes proches, mes parents, mes frères, mon oncle et ma grand-mère. Je remercie également, et particulièrement, mes beaux-parents et beaux-frères, Brigitte, Denis, David, Vivien ainsi que Jean-Michel et Arlette pour leur présence et la patience dont ils ont fait preuve. Je les remercie sincèrement toutes et tous de m’avoir suivi et épaulé au cours de cette belle aventure vécue aux côtés d’Angélique. Les mots sont insuffisants pour exprimer tout ce que je lui dois. Ce travail n’aurait pu être mené à terme sans nos échanges, ses encouragements et son soutien indéfectible. C’est à elle que je dédie cette thèse.

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Cette thèse porte sur la signification du paon et du phénix dans des contextes cultuels et funéraires, autour du Bassin méditerranéen entre le IVe et le XIIe siècle. L’étude est basée sur un corpus de 490 documents dans lesquels apparaissent un ou plusieurs paons, mis en parallèle avec 68 témoignages figurés du phénix. Ces oiseaux ont été mis en image de différentes manières et selon différents contextes, aussi bien sur des pièces de monnaie, des fresques catacombales, des sarcophages, des décors mosaïqués (pavements, coupoles, absides, …), des manuscrits ou bien encore sur des clôtures de chœur. L’observation des documents révèle que des liens ont été tissés entre les deux oiseaux associés tous deux à l’idée de renaissance bien avant le IVe siècle. En effet, la notion de renaissance est transversale dans l’étude de la figuration du paon et du phénix entre Antiquité et Moyen Âge, et entre paganisme et christianisme. Les premières références à ces deux oiseaux, connues dans les textes et l’iconographie antiques, ont été analysées afin de réfléchir sur l’imaginaire construit autour du paon et du phénix, liés aux rythmes cycliques, à la mort et à la résurrection. La fonction du paon comme psychopompe et plus largement comme intermédiaire entre terre et ciel et entre l’humain et le divin, s’affirme progressivement. Entre le IIIe et le IVe siècle, le paon et le phénix entrent dans le répertoire visuel funéraire des premiers chrétiens et commencent à être mis en relation avec la conception du baptême comme une renaissance. Entre le IVe et le VIe siècle, ils sont introduits dans l’espace ecclésial et resserrent leurs liens avec le Christ et le baptisé. Les deux oiseaux offrent au fidèle un espoir de salut en témoignant du triomphe du Christ sur la mort et en annonçant la résurrection des Élus. Entre le VIIe et le IXe siècle, la figuration du paon est notamment étudiée sur des clôtures de chœur et d’autres éléments de décors sculptés, en lien avec le rituel eucharistique, avec l’idée de passage entre charnel et spirituel. Le corpus réuni met en évidence le rôle du paon comme gardien du seuil, d’un point de vue matériel et spirituel. La présence récurrente du paon et du phénix entre le VIe et le IXe siècle dans des espaces ecclésiaux romains est également mise en perspective vis-à-vis des réalisations papales et selon des enjeux liés à la mémoire des saints et de l’Église. L’étude s’ouvre au XIIe siècle avec le décor monumental de Saint-Clément à Rome comme un témoignage charnière dans la signification du paon.

Mots-clés : paon ; phénix ; iconographie ; Antiquité ; Haut Moyen Âge ; art paléochrétien ; renaissance ; résurrection.

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This dissertation deals with the meaning of the peacock and the phoenix within contexts of worship and funerary contexts in the Mediterranean area, between the IVth and the XIIth centuries. The study is based on an iconographic documentation meeting 490 items of the peacock and 68 items of the phoenix. These birds were imaged in various ways as well as coins, paintings of catacombs, sarcophagi, mosaics (pavements, domes, apses, …), manuscripts, and even chancel screens. The analysis of the documentation indicates that links were weaved between both birds associated with the idea of revival long before the IVth century. The idea of revival, indeed, is a cross-cutting concept in the study of the iconography of the peacock and the phoenix between Antiquity and Middle Ages, between paganism and christianity. The first references to the these birds in the antique texts and the iconography are studied in order to reflect on the imagination about the peacock and the phoenix, both associated with cyclic rhythms, death and resurrection. The peacock was seen as a psychopomp, more generally like an intermediary between earth and sky, as well as between the human and the divine. Between the IIIth and the IVth centuries, the peacock and the phoenix were inserted into the funerary iconography of the first Christians and begin to be linked with the conception of the baptism as a revival. Between the IVth and the VIth centuries, they were inserted into the ecclesial space and they tightened their links with the Christ and the baptized. The peacock and the phoenix offer to the believer a hope of being healed. They show the triumph of the Risen Christ and announce the resurrection of the dead at the end of days. Between the VIIth and the IXth centuries, the iconography of the peacock is studied in particular on chancel screens and on the other sculptures linked with the eucharistic rite and with the idea of a connection between caro and spiritus. The documentation highlights the role of the peacock as the guard of the threshold, from a material and spiritual point of view. The recurring presence of these birds between the VIth and the IXth centuries in Roman ecclesial spaces was also put in perspective towards the papal realizations and according to stakes strongly bound to the memory of the saints and the Church. The study opens to the XIIth century with San Clement’s monumental decoration in Rome as a pivotal testimony in the evolution of the meaning of the peacock.

Keywords : peacock ; phoenix ; iconography ; Antiquity ; Early Middle Ages ; Early Christian Art ; revival ; resurrection.

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• AAAHP : Acta ad Archaeologiam et Artium Historiam Pertinentia.

• AISCOM : Colloquio dell'Associazione Italiana per lo Studio e la Conservazione del Mosaico.

• BAV : Biblioteca Apostolica Vaticana.

• BCH : Bulletin de Correspondance Hellénique. • CA : Cahiers archéologiques.

• CARB : Corso di Cultura sull’Arte Ravennate e Bizantina.

• CBCR : Corpus Basilicarum Christianorum Romae, R. KRAUTHEIMER (dir.), Vatican,

PIAC, 1937-1977.

• CChrSL : Corpus Christianorum, Series Latina. • CIL : Corpus Inscriptionum Latinarum.

• Coll. EFR = Collection de l’École Française de Rome. • CSEL : Corpus Scriptorum Ecclesiasticorum Latinorum.

• CSA : Corpus della Scultura Altomedievale, Spolète, Centro Italiano di Studi sull’Alto Medioevo, 1959-2015.

• DACL : Dictionnaire d’Archéologie Chrétienne et de Liturgie, F. CABROL et H.

LECLERCQ (éd.), Paris, Letouzey et Ané, 1913-1953.

• DOP : Dumbarton Oaks Papers. • HAM : Hortus Artium Medievalium.

• ICUR : G. B. DE ROSSI, Inscriptiones Christianae Urbis Romae septimo saeculo antiquiores, Rome, 1857-1915, 3 vols. ; « Nova Series » (NS), 1922-1992, 10 vols.

• ILCV : E. DIEHL, Inscriptiones Latinae Christianae Veteres, Berlin, Weidmann,

1925-1985, 4 vols.

• LP : Liber Pontificalis, L. DUCHESNE (éd. et trad.), Paris, De Boccard, 1886-1892.

• LPER : AGNELLUS, Liber Pontificalis Ecclesiae Ravennatis, D. MAUSKOPF DELIYANNIS

(éd.), Turnhout, Brepols, 2006.

• MEFRA : Mélanges de l’École Française de Rome. Antiquité.

• MEFRIM : Mélanges de l’École Française de Rome – Italie et Méditerranée modernes

et contemporaines.

• MEFRM : Mélanges de l’École Française de Rome. Moyen Âge.

• MMAI : Monuments et Mémoires publiés par l’Académie des Inscriptions et

Belles-Lettres (Fondation Piot).

• PIAC : Pontificio Istituto di Archeologia Cristiana. • PG : Patrologia Cursus completus. Series Graeca. • PL : Patrologia Cursus completes. Series Latina. • RAC : Rivista di Archeologia Cristiana.

• RIC : H. MATTINGLY, E. A. SYDENHAM et C.H.V. SUTHERLAND, The Roman Imperial coinage, Londres, 1923-1994, 10 vols.

• RQ : Römische Quartalschrift. • RM : Römische Mitteilungen.

• Settimane di Spoleto : Actes des Settimane di studio del Centro Italiano di Studi

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REMERCIEMENTS ...5

RÉSUMÉ ...7

ABSTRACT ...8

SIGLES ET ABRÉVIATIONS ...9

TABLE DES MATIÈRES ... 11

INTRODUCTION ... 17

PARTIE I:PRÉSENTATION ET DÉFINITION DES ENJEUX DU SUJET... 27

CHAPITRE I.PARCOURS HISTORIOGRAPHIQUE ... 29

I. L’étude du paon dans l’iconographie antique et médiévale ... 30

A. Enjeux, apports et limites de Der Pfau in der altchristlichen Kunst d’Helmut Lother (1929) ... 30

A. 1. Le parcours d’Helmut Lother et la genèse de l’étude ... 30

A. 2. L’horizon d’étude ouvert par Helmut Lother ... 32

Dans le sillon d’Helmut Lother. Mise en perspective de Der Pfau : Mythologie und Symbolik d’Ernst-Thomas Reimbold (1983) ... 38

B. 1. Un nouvel éclairage sur la signification du paon jusqu’à la fin du XIXe siècle ... 38

B. 2. Bilan d’études ciblées sur des ensembles documentaires ... 41

II. Les différentes lectures du mythe du phénix dans l’historiographie au cours du XXe siècle ... 44

Synthèse des principaux travaux sur le sujet avant la thèse de Roelof van den Broek (1971) ... 44

A. 1. Bilan historiographique avant la monographie de Jean Hubaux et Maxime Leroy (1939) ... 44

A. 2. Regard de la recherche sur le mythe du phénix de 1939 à 1965 ... 48

A. 3. La lecture du phénix littéraire proposée par Marialuise Walla en 1965 ... 52

The Myth of the Phoenix de Roelof van den Broek (1971) ... 53

B. 1. Présentation de la démarche adoptée par Roelof van den Broek ... 53

B. 2. Réflexions sur les mécanismes de la transmission d’un héritage littéraire et iconographique du Ve siècle av. J.- C. au IXe siècle ... 55

La récurrence du phénix comme sujet de recherche depuis 1971 ... 61

C. 1. Du benu au phénix. Regard sur les origines égyptiennes du mythe ... 61

C. 2. La mise en lumière de composantes essentielles du mythe du phénix... 66

C. 3. Les études sur la mise en image d’un oiseau extraordinaire du Ier au IXe siècle ... 70

CHAPITRE II.PRÉSENTATION DU CORPUS, PROBLÉMATIQUES ET PERSPECTIVES ... 83

I. Du corpus à la base de données. Réflexions sur la formalisation des informations ... 84

La constitution du corpus documentaire ... 84

Pourquoi une base de données ? ... 85

Présentation d’une fiche ... 87

II. Le traitement des données ... 97

(13)

C. 1. Du I siècle av. J.-C. au IV siècle ... 116

C. 2. Du IVe au VIe siècle ... 122

C. 3. VIIe-IXe siècle ... 126

C. 4. IXe-XIIIe siècle ... 130

III. Résultats et pistes de réflexions... 133

CHAPITRE III.SOURCES ET RESSOURCES LITTÉRAIRES ET ICONOGRAPHIQUES DU PAON ET DU PHÉNIX (XE SIÈCLE AV.J.-C.-IIE SIÈCLE AV.J.-C.) ... 137

I. La désignation du paon et du phénix. Problèmes et enjeux ... 138

Le paon dans les sources littéraires à l’est du Bassin méditerranéen (Xe-VIe siècle av. J.-C.) ... 138

Du benu au phénix, du mythe égyptien au récit d’Hérodote... 142

L’inde, l’Égypte et leur faune fantasmée ... 148

II. L’introduction du paon en Grèce (VIe-Ve siècle av. J.-C.) ... 153

L’association avec la figure d’Héra et le thème de la renaissance ... 153

L’importation des paons à Athènes au Ve siècle av. J.-C. ... 158

III. Les cortèges et les processions autour du paon et du phénix... 162

Le phénix et la division du temps ... 162

Le paon et les cultes dionysiaques au IIIe siècle av. J.-C... 167

Le paon psychopompe d’Ennius ... 172

PARTIE II:LA MIGRATION DU PAON ET DU PHÉNIX DANS LA SPHÈRE FUNÉRAIRE VERS L’ÉDIFICE DE CULTE CHRÉTIEN (IER SIÈCLE AV.J.-CIVE SIÈCLE APR.J.-C.) ... 179

CHAPITRE IV.LE PAON SUR UN SEUIL ENTRE LA VIE ET LA MORT DANS LA BAIE DE NAPLES ET À ROME (IER SIÈCLE AV. J.-C.-IVE SIÈCLE APR.J.-C.) ... 181

I. Un médiateur entre terre et ciel. Rome et la baie de Naples (Ier siècle av. J.-C.-IIe siècle apr. J.-C.) ... 181

Le paon dans une « image de mémoire » à Oplontis (Ier siècle av. J.-C.) ... 181

Hermès guide des âmes et le paon psychopompe (Ier-IIe siècle) ... 190

Le paon, psychopompe de l’impératrice divinisée (Ier-IIIe siècle)... 196

Une lecture eschatologique de l’enseigne de la caupona d’Euxinus à Pompéi (Ier siècle) ... 198

II. Réflexions sur la dynamique du paon dans l’iconographie dionysiaque à Rome (Ier siècle av.J.-C.-IVe siècle apr. J.-C.) ... 202

La répartition des éléments figurés autour de la niche funéraire à Rome (Ier siècle av. J.-C.-IIe siècle apr. J.-C.) ... 202

Luttes, tensions et renovatio sur le sarcophage de Saint-Laurent-hors-les-murs à Rome (IIIe siècle) 206 Le mausolée de Constance à Rome (milieu IVe siècle). Visions du temps et de l’éternité ... 209

III. Le paon et le thème ambigu du « Bon Pasteur » à Rome et Aquilée (IIIe-IVe siècle) .... 220

Le paon, le pasteur et le défunt au sein de l’arcosolium. Une proximité signifiante ... 220

La gravitation des paons autour du pasteur sur la voûte ... 225

(14)

L’ICONOGRAPHIE CHRÉTIENNE (IIIE -IVE

SIÈCLE) ... 235

I. Mise en série des témoignages figurés en contextes funéraire et cultuel chrétiens entre le IIIe et le IVe siècle ... 236

II. Le triomphe sur le temps et sur la mort dans la sphère funéraire romaine (IIIe-IVe siècle) ... 238

Le phénix et les flammes régénératrices ... 238

A. 1. L’introduction du feu dans le mythe du phénix ... 238

A. 2. L’avis unica dans la Cappella greca (IIIe siècle) ... 245

A. 3. La purification par le feu chez Lactance (IVe siècle)... 252

L’intégration du paon dans des décors à dominante chrétienne à Rome et Thessalonique (IIIe-IVe siècle) ... 256

B. 1. Un espoir de salut dans le cubiculum A2 (milieu IIIe siècle) ... 256

B. 2. Le véhicule de l’esprit : la tombe 52 dans la nécropole de Thessalonique (milieu IVe siècle) ... 261

B. 3. L’incarnation du triomphe sur la mort dans le cubiculum « d’Hercule et Alceste » (fin IVe siècle) ... 264

III. Résonances de l’iconographie funéraire dans les décors ecclésiaux au IVe siècle ... 268

Réflexions sur le phénix dans la scène dite de « Traditio Legis » (IVe-Ve siècle) ... 268

A. 1. Définition de la « Traditio Legis » et bilan historiographique... 268

A. 2. Les témoignages figurés en contexte funéraire ... 270

A. 3. Le décor absidal de la basilique Saint-Pierre à la fin du IVe siècle ... 275

La fontaine de la basilique Saint-Pierre à la fin du IVe siècle ... 279

B. 1. L’évolution de la fontaine de la Pigne (IVe-XVIIe siècle) ... 279

B. 2. La composition d’une formule visuelle efficace ... 281

B. 3. Le paon et les eaux vives du canthare ... 283

L’introduction du paon et du phénix dans l’espace ecclésial à Aquilée à la fin du IVe siècle ... 287

C. 1. Réflexions sur le pavement du chœur de la basilique alla Beligna ... 287

C. 2. Aquilée : une cité chrétienne renaissante au cours du IVe siècle ... 289

PARTIE III:DE LA RENAISSANCE À LA RÉSURRECTION.L’INCARNATION D’UN ESPOIR DE SALUT (VE-VIE SIÈCLE) ... 295

CHAPITRE VI.LA MISE EN SCÈNE DU PAON, DU PHÉNIX ET DU FIDÈLE COURONNÉ DE LUMIÈRE À NAPLES,RAVENNE ET THESSALONIQUE AU VE SIÈCLE ... 297

I. Modes de présentation et de représentation du paon et du phénix (Ve-VIe siècle). ... 298

II. Le paon, le phénix et le fidèle revêtu de lumière dans le baptistère de Naples (Ve siècle) ... 302

L’empreinte du phénix radieux et la croix « imprimée » dans le firmament ... 302

L’escorte de l’avis unica et le couronnement du néophyte ... 309

Le triomphe sur la mort et la purification charnelle par la lumière ... 317

III. Le Christ, l’oiseau éternel et le fidèle à Ravenne et à Thessalonique au milieu du Ve siècle ... 325

(15)

La clôture ajourée et le paon relai des sacrements ... 332

L’oiseau incorruptible et la mise en scène de la lumière dans l’église Saint-Georges de Thessalonique ... 342

CHAPITRE VII.LA GRAVITATION DES PAONS AUTOUR DE LA CROIX-ARBRE DE VIE (VE -VIE SIÈCLE) ... 353

I. La croix, le chrisme et le thème du triomphe sur la mort à Ravenne (Ve-VIe siècle) ... 354

Un discours visuel centré sur la Croix-Arbre de Vie ... 354

« Caro salutis cardo est » ... 361

Réflexions sur la notion de théophanie à Saint-Apollinaire-in-Classe de Ravenne ... 367

II. Le paon et les « rinceaux habités » sur le pavement et la voûte au VIe siècle ... 380

Le baptistère de Butrint et la dimension eschatologique du baptême... 380

Les rinceaux habités et la notion de renovatio sur les pavements du VIe siècle ... 389

PARTIE IV:LE PAON, LE PHÉNIX ET L’INTRODUCTION DU FIDÈLE DANS LE ROYAUME DE DIEU (VIE -IXE SIÈCLE) ... 403

CHAPITRE VIII.LE PAON AU SEUIL DU CHŒUR DE L’ÉGLISE ET AU CŒUR DU MANUSCRIT (VIIIE -IXE SIÈCLE) ... 405

I. L’introduction du paon dans la sculpture lombarde (VIIIe -IXe siècle) ... 405

II. La délimitation du seuil entre l’humain et le divin dans la sculpture lombarde (VIIIe-IXe siècle) ... 411

La mise en arc des oiseaux sculptés autour de l’autel ... 411

Mise en série et mise en ordre du paon dans la sculpture lombarde (VIIIe-IXe siècle) ... 426

III. Le paon dans l’univers visuel du manuscrit ... 444

Réflexions sur la figuration du paon dans les manuscrits... 444

Variations et déclinaisons de la figure du paon dans les Évangiles de Gundohinus (milieu VIIIe siècle) ... 446

La Fontaine de Vie de l’Évangéliaire de Godescalc (781-783) ... 455

CHAPITRE IX.LE PAON ET LE PHÉNIX DANS LA BASILIQUE « ILLUMINÉE » PAR LE PAPE (VIE -IXE SIÈCLES) ... 469

I. Le pape mis en lumière et le phénix radieux à Rome (VIe-VIIe siècle) ... 470

Le phénix et la naissance d’un lieu de culte chrétien sur le forum : la basilique Saints-Cosme-et-Damien à Rome (526-530) ... 470

Des « formules » visuelles enchâssées (IVe-VIe siècle) ... 476

Le phénix perché au-dessus du pape mis en lumière à Saints-Cosme-et-Damien ... 486

La figure du pape, le paon coloré et le phénix à Sainte-Agnès-hors-les-murs (625-638) ... 493

II. La réapparition du phénix et l’empreinte de Pascal Ier (817-824) dans l’espace urbain de Rome ... 504

La composition de la nouvelle basilique Sainte-Praxède (817-818) ... 504

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(817-820) ... 527

CHAPITRE X.UN NOUVEAU SOUFFLE (XE -XIIIE SIÈCLE) ... 541

I. Mise en série des témoignages figurés relatifs au paon et au phénix entre le Xe et le XIIIe siècle ... 541

II. Réflexions sur le paon et la notion de renouveau dans le décor de Saint-Clément à Rome (1118)... 551

Le discours visuel de l’Église renouvelée dans le nouveau titulus clementis au XIIe siècle ... 551

Le paon à Saint-Clément : de l’exemplum à une éventuelle mise en garde pour le fidèle et le clerc.. 557

CONCLUSION ... 569

BIBLIOGRAPHIE ... 580

ANNEXE ... 600

LISTE DES TABLEAUX ... 634

LISTE DES CARTES ... 634

LISTE DES GRAPHIQUES ... 635

TABLE DES FIGURES ... 636

INDEX DES AUTEURS ... 645

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17

Introduction

« En faisant la roue, cet oiseau, dont le pennage traîne à terre, apparaît encore plus beau, mais se découvre le derrière »1. Guillaume Apollinaire (1880-1918) caractérise avec humour le paon dans son Bestiaire ou Cortège d’Orphée (1911). Au XIIe siècle, Hugues de Fouilloy se servit de la dualité de l’apparence de cet oiseau lorsqu’il fait la roue pour mettre en garde le prélat2. Selon lui, l’oiseau admiré pour sa beauté est comparable au clerc assoiffé de louanges et de vaine gloire. Or, la laideur, qui est le revers de sa beauté, enseigne l’humilité3. L’image du paon est ainsi tiraillée entre ce qui l’élève et l’abaisse. Cette tension est également sensible dans la beauté de sa queue ocellée, opposée à son cri disgracieux dont il tirerait son nom selon Isidore de Séville (v. 560-636)4. Aujourd’hui, l’oiseau est plus simplement associé à la fierté, au narcissisme et à l’orgueil5.

En ce qui concerne le mythique phénix, l’unique représentant de son espèce est associé, de nos jours, à la cyclicité et à la régénération par le feu, puisqu’il renaît de ses cendres. La créature réapparaît régulièrement dans l’art et la littérature, jusque dans la publicité, sous la forme d’un rapace aux plumes flamboyantes6. Or, pour illustrer le décalage entre l’image actuelle du phénix et celle(s) produite(s) par l’imaginaire antique et médiéval, on peut citer l’exemple du pavement en mosaïque de Daphné au VIe siècle, sur lequel il prend la forme d’un échassier au plumage gris, perché sur un monticule7. Le phénix de Daphné porte un nimbe radié

1 GUILLAUME APOLLINAIRE, Œuvres poétiques, Paris, Gallimard, coll. « Bibliothèque de la Pléiade » 121, 1956,

Le bestiaire, « Le paon ».

2 HUGUES DE SAINT VICTOR, De Bestiis, I, 55, De pavonis natura, PL 177, 53C, repris dans A. ZUCKER,

Physiologos : le bestiaire des bestiaires, Grenoble, Jérôme Millon, 2004, p. 267-269, n°52, Le paon, p. 268.

3 « Nota etiam quod pavo, dum laudatur, caudam erigit quando praelatus quilibet adulantium laudibus per vanam

gloriam mentem levat […] cum autem cauda erigitur, posteriora nudantur, et sic quod laudatur in opere, deridetur in elatione », HUGUES DE SAINT VICTOR, De Bestiis, I, 55.

4 « Pavo nomen de sono vocis habet », ISIDORE DE SÉVILLE, Étymologies. Livre XII, Des animaux, A. JACQUES

(trad.), Paris, Belles Lettres, 1986, VII, 48. Dans l’une des fables de Phèdre, le cri dissonant du paon est opposé au chant harmonieux du rossignol (Fables, III, 18).

5 V. BAR, Dictionnaire iconologique : les allégories et les symboles de Cesare Ripa et Jean Baudoin, Dijon, Faton,

1999, p. 269.

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Parmi les travaux les plus récents sur la réappropriation du phénix aux XXe et XXIe siècles, voir F.LECOCQ, « Un

bilan de la recherche contemporaine sur le mythe du phénix », Roda da Fortuna. Revista Eletrônica sobre

Antiguidade e Medievo, Electronic Journal about Antiquity and Middle Ages, 4-1, 2015, p. 257-273 [mis en ligne

le 17/06/15] http://media.wix.com/ugd/3fdd18_547a25199a384e0ab5f8a313098d4f09.pdf ; ead., « The Dark

Phoenix. Rewriting an Ancient Myth in Today’s Popular Culture », dans Ancient Myths in the Making of Culture,

M. BUDZOWSKA et J. CZERWINSKA (éd.), Vienne, Peter Lang, coll. « Warsaw Studies in Classical Literature and Culture », 3, 2015, p. 341-354.

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qui, semble-t-il, n’a pas été transmis à l’aigle au plumage rouge et or. Le profil de l’oiseau imaginaire dans l’iconographie antique et médiévale sera à définir, étant donné que sa mise en image a évolué au cours du temps. Par ailleurs, il peut sembler difficile de concevoir que le paon ait pu être, à un moment donné, lié au mythique phénix. Leur apparence et leur signification actuelle les opposent plus qu’elles ne les rapprochent l’un de l’autre.

Néanmoins, des points de contact ont été établis entre les deux oiseaux. Au cours de nos recherches de master, nous avons étudié certains aspects de l’iconographie du paon dans l’actuelle Italie entre le IVe et le XIIe siècle8 et relevé que le paon et le phénix apparaissent, côte à côte, au sein de plusieurs compositions réparties dans des lieux de cultes chrétiens. Les deux oiseaux sont également liés, tous deux, à la notion de renaissance, ce qui doit, d’ores-et-déjà, retenir notre attention. Une étude comparée devrait permettre de mieux comprendre les circonstances de leur rapprochement, autant que visuel que sémantique, et de leur christianisation. Comment s’est opéré le glissement de l’attribut d’Héra/Junon vers l’incarnation de la renaissance puis de la vanité ? Que produit leur mise en regard dans certaines compositions que n’apporte pas la figuration seule du paon ou du phénix ? Nous répondrons notamment à ces questions en analysant les témoignages figurés du paon et du phénix ainsi qu’en examinant les compositions qui les réunissent comme révélatrices de leurs liens sous-jacents. C’est par l’intermédiaire du paon et du phénix que nous proposons de mener une réflexion, plus générale, sur la notion de renouveau et de renaissance dans les sociétés antiques et médiévales. Le croisement des informations issues de ressources textuelles et visuelles sur chacun des deux oiseaux s’avère nécessaire, en particulier pour le phénix dont le versant littéraire ne peut être mis à l’écart.

Un double point de vue constant sur l’iconographie du paon et du phénix n’a, semble-t-il, pas encore été adopté dans l’historiographie. Roelof an den Broek a seulement relevé les auteurs qui ont comparé, voire mis en concurrence, ces deux oiseaux synonymes de contrées lointaines9. Le chercheur a survolé la question des figurations paléochrétiennes et médiévales

8 R. DEMÈS, Le thème iconographique du paon entre les IVe-Ve siècles et le XIIe siècle à Rome et dans l'espace urbain des grandes basiliques romaines, mémoire de Master 1 sous la direction de M. Daniel RUSSO, université de Bourgogne, 2009 ; id., Le thème iconographique du paon entre les IVe-Ve siècles et le XIIe siècle à Rome, Ravenne et dans l’espace italo-lombard, mémoire de Master 1 sous la direction de M. Daniel RUSSO, université de Bourgogne, 2010.

9 R. VAN DEN BROEK, The Myth of the Phoenix according to Classical and Early Christian Traditions, thèse,

Theological Faculty of the University of Utrecht, 1971 ; I. SEEGER (trad.), Leiden, Brill, coll. « Études préliminaires aux religions orientales dans l'Empire romain », t. 24, 1972, en part. p. 251-253.

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du phénix abordées ponctuellement depuis 1979 par Fabrizio Bisconti10. De manière générale, les recherches portant sur le thème du phénix ont été centrées sur le pan littéraire de son histoire et dans une moindre mesure, sur l’iconographie monétaire impériale romaine. Concernant le thème du paon, l’étude de référence demeure la monographie d’Helmut Lother (1898-1970) publiée en 192911. Néanmoins, le propos est limité à l’art paléochrétien et devait être actualisé.

Les ensembles documentaires réunis par R. van den Broek et H. Lother ont constitué la base de notre corpus. Ce dernier a largement été étoffé en doctorat par le dépouillement de nombreux catalogues, répertoires et recueils dans des bibliothèques françaises et européennes. Nos bourses de recherche à l’École Française de Rome, à la Casa de Velázquez et à l’École Française d’Athènes nous ont permis de poursuivre ce travail de collecte des occurrences et de réunir une bibliographie spécialisée. Notre corpus compte cinq-cent-soixante-dix témoignages figurés, soit quatre-cent-quatre-vingt-dix documents dans lesquels apparaissent un ou plusieurs paons, soixante-huit phénix mis en parallèle avec quatre benu, ainsi que huit créatures hybrides. Les témoignages relatifs au benu ont été pris en compte étant donné que l’oiseau légendaire, issu de la cosmogonie héliopolitaine, est l’ancêtre du phénix latin. Quelques figurations de créatures hybrides ont rejoint notre documentation du fait de leurs liens visuels avec le paon et le phénix, avec qui elles partagent certaines caractéristiques. La diversité des contextes, des supports et des éléments figurés situés en périphérie du paon et du phénix reflète toute la richesse d’une iconographie complexe, qui nous a conduit à concevoir une base de données informatique. Cet outil offre diverses possibilités de traitement des informations rassemblées et mises en parallèle au sein d’une structure assez souple pour être adaptée à la documentation. La distribution des occurrences dans le temps et dans l’espace a défini le cadre géographique et chronologique du sujet. La figuration quasi continue du paon et du phénix et la diffusion de leurs images autour et au-delà du Bassin méditerranéen nous invitent à réfléchir sur la transmission, la circulation et la réappropriation de ces oiseaux du répertoire visuel antique et tardo-antique vers l’iconographie médiévale, sans tenir compte de la délimitation Orient/Occident.

De fait, les bornes chronologiques des IVe et XIIe siècles ont été fixées par la répartition des occurrences. La charnière culturelle et religieuse des IIIe et IVe siècles marque une étape déterminante dans le développement de l’iconographie du paon et du phénix qui migrent vers

10 F. BISCONTI, « Aspetti e significati del simbolo della fenice nella letteratura e nell’arte del cristianesimo

primitivo », Vetera Christianorum, 16, 1979, p. 21-40.

11 H. LOTHER,Der Pfau in der altchristlichen Kunst : eine Studie über das Verhältnis von Ornament und Symbol,

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le répertoire visuel des premiers chrétiens. Les phases des Ve et VIe siècles et du IXe siècle seront distinguées car représentant des moments de renouveau pour les deux oiseaux, tout comme le XIIe siècle. Le terme de notre parcours a aussi été déterminé par la documentation. Le décor absidal de la basilique Saint-Clément (1118) à Rome sera envisagé par le biais de la figure du paon inscrite dans un discours visuel articulé autour du thème du renouveau. Au cours de notre enquête, nous aurons l’occasion d’examiner différents témoignages figurés issus, principalement, de contextes cultuels et funéraires. Ces derniers regroupent plusieurs ensembles, à commencer par celui d’environnements liés aux cultes rendus à Héra et Dionysos auxquels la figure du paon a été associée. L’oiseau a également été intégré dans le répertoire visuel du pouvoir impérial, et il en est de même du phénix. Les deux oiseaux ont ensuite été introduits dans l’espace ecclésial, au terme d’un processus dont il s’agira de souligner les grandes lignes en nous basant, notamment, sur l’iconographie des catacombes romaines. Le terme « autour » de l’intitulé de notre thèse désigne d’abord, les éléments figurés en périphérie du paon et du phénix. Il s’agit par exemple, de figures humaines, d’animaux et d’objets qui entrent en dialogue avec les deux oiseaux et participent, ensemble, à une composition faisant sens sur un support, dans un lieu défini. Ces éléments figurés donnent corps au discours visuel et apportent, par là-même, de précieux indices sur le processus de christianisation du paon et du phénix en contexte funéraire. Chaque document porte l’empreinte d’un contexte politique, culturel et religieux que nous chercherons à saisir à travers les figurations du paon et du phénix réparties autour du Bassin méditerranéen. Cette amplitude géographique s’est imposée au vu de la distribution des témoignages au sein d’un ensemble cohérent, correspondant aux territoires de l’ancien empire romain.

Nous proposons ainsi de mener une réflexion sur la signification du paon et du phénix dans des contextes cultuels et funéraires autour du Bassin méditerranéen entre le IVe et le XIIe siècle. Notre enquête débutera au Xe siècle av. J.-C., durant le règne du roi Salomon (970-931 av. J.-C), qui aurait, selon le Livre des Rois, rapporté de l’or, de l’argent, de l’ivoire, des singes et des paons sur des navires revenus de Tarsis. De fait, on ne peut comprendre la signification de ces oiseaux dans la pensée chrétienne sans revenir sur leurs racines antiques. Les témoignages figurés du paon et du phénix jalonneront notre parcours et en marqueront les grandes étapes. La dimension eschatologique du paon et du phénix sera examinée à partir d’une documentation variée, en suivant une approche interdisciplinaire. La longue vie des figures du paon et du phénix est rythmée par des phases de renouveau dont nous chercherons à rendre compte en resituant la plupart des productions dans leurs contextes de création.

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Devant l’abondance de la documentation réunie, des choix ont dû être opérés afin de clarifier notre propos, et éviter de noyer nos réflexions dans le flot des nombreux exemples du corpus. Nous avons choisi de jouer sur la profondeur de champ dans l’examen des témoignages figurés rassemblés dans notre base de données. Celle-ci nous a permis de réaliser plusieurs types de mises en série des occurrences de manière à « faire parler » les documents par la confrontation, en réduisant le rôle du facteur interprétatif. Un certain recul sera pris par exemple, avec l’ensemble des documents relatifs entre le Ve et le VIe siècle, à plusieurs types de supports inscrits dans différents lieux de culte chrétiens dispersés sur les péninsules italique, grecque et dans la partie orientale du Bassin méditerranéen. Une attention particulière sera accordée à certains témoignages, qui, selon nous, cristallisent un contexte historique, culturel et religieux déterminant pour la compréhension de la signification du paon et du phénix. Nous nous arrêterons notamment sur le décor absidal de la basilique Sainte-Praxède au IXe siècle afin de réfléchir sur la question de la mise en présence du Christ, du phénix et du pape Pascal Ier (817-824) associé à une phase de renouveau de l’Église romaine.

Nous avons choisi de suivre un parcours chronologique divisé en quatre parties, telles des étapes. Dans la première partie, nous définirons les principaux moments de l’historiographie relative à ces deux sujets, du début du XXe siècle à nos jours. Les diverses études traitant du thème du paon seront présentées vis-à-vis de la monographie pionnière d’Helmut Lother publiée en 1929 puis de l’ouvrage d’Ernst-Thomas Reimbold. Nous chercherons ainsi à nous situer par rapport à cet édifice historiographique en tentant d’évaluer les apports et de définir les limites de ces travaux. La présentation de l’abondante bibliographie sur le phénix sera articulée autour de la thèse de Roelof van den Broek, soutenue et publiée en 1971. Nous chercherons d’une part, à évaluer les influences possibles entre les études de référence, et d’autre part, à souligner les apports de travaux restés dans l’ombre de ces études phares. Nous comparerons ainsi les angles d’approches d’un sujet aux multiples facettes. Les étapes de la composition du corpus seront ensuite exposées, avant de procéder à une description de l’architecture de notre base de données. Chaque document répertorié fait l’objet d’une fiche détaillée, à partir de laquelle nous entrerons dans le vocabulaire visuel de compositions marquées par la présence du paon ou du phénix. Plusieurs types d’analyses sérielles seront réalisées, de manière à prendre un certain recul sur la documentation réunie. Nous réaliserons notamment un examen des modes de présentation du paon et du phénix jusqu’au XIIIe siècle afin de mettre en exergue les caractéristiques de leurs figurations et d’évaluer leur stabilité dans

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le temps. La répartition des occurrences d’un point de vue géographique, chronologique et en fonction de certains contextes sera observée puis analysée. Nous reviendrons sur ces mises en série des occurrences et les examinerons de façon plus détaillée, au cours de notre démonstration. La présentation du parcours historiographique et celle du corpus documentaire dirigeront notre regard vers les ressources mises à notre disposition. Les premières mentions, évocations et traductions visuelles connues du paon et du benu-phénix seront relevées et mises en parallèle. Il s’agira de réfléchir sur ce qui définit un paon dans les textes antiques et sur ce qui compose le légendaire phénix avant le IIe siècle av. J.-C. Nous chercherons ainsi à définir les principales étapes du parcours de l’oiseau de la Mésopotamie vers la péninsule italique, afin de déterminer si la présence attestée du paon sur un territoire a influé sur sa mise en image. Nous nous arrêterons notamment sur les circonstances de son intégration dans des contextes cultuels en Grèce et de sa mise en image dans la sphère funéraire étrusque. Entre le VIe et le IIIe siècle av. J.-C., le paon franchit un seuil entre profane et sacré en se rapprochant de la déesse Héra puis de Dionysos. En parallèle, il se rapproche du défunt jusqu’à être perçu comme un psychopompe, un intermédiaire entre la vie et la mort, entre la terre et le ciel, entre l’humain et le divin.

Dans la deuxième partie, la question de la christianisation du paon et du phénix sera envisagée en termes de migration des sépultures collectives romaines vers l’espace ecclésial entre le Ier siècle av. J.-C. et le IVe siècle apr. J.-C. Notre parcours nous mènera d’abord dans la baie de Naples, en particulier à Pompéi. Une lecture de l’enseigne de la caupona d’Euxinus sera notamment proposée, en articulant notre propos sur la proximité de la première mise en image du phénix en contexte latin avec un couple de paons affrontés. Nous poursuivrons ainsi le cours de nos réflexions sur la question de la figure du paon placée sur un seuil entre deux univers et perçu comme un médiateur, voire un guide de l’âme. Durant les trois premiers siècles, le paon est également jugé digne de transporter l’âme de l’impératrice divinisée. Nous examinerons ensuite les liens étroits tissés entre la figure du paon, la vigne dionysiaque et le corps du défunt au travers d’une série d’exemples. Le décor intérieur du mausolée impérial de Constance à Rome au milieu du IVe siècle fera l’objet d’une étude détaillée en raison du contexte culturel et religieux dans lequel il est inscrit. L’insertion de la figure du paon au cœur d’un discours visuel empreint d’une iconographie dionysiaque christianisée résulte d’un processus dont nous chercherons à définir les grandes lignes. Par ailleurs, nous porterons notre attention sur les rapports établis entre le paon, le « Bon Pasteur » et le défunt sur les fresques des catacombes romaines entre le IIIe et le IVe siècle avant de nous arrêter sur le pavement dit

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« du Bon Pasteur à l’habit singulier » à Aquilée au milieu du IVe siècle. La période charnière des IIIe et IVe siècles sera ensuite envisagée au travers d’une seconde série de témoignages issus de contextes funéraires romains. Au cours de ce chapitre, nous nous concentrerons sur les premiers cas de mises en rapport du paon et du phénix avec des figures bibliques dans les catacombes romaines au IIIe siècle. Sur les fresques de la Cappella Greca dans les catacombes de Priscille, le phénix majestueux renaît de ses cendres, selon une version du mythe dont nous observerons les phases de composition. Comme dit précédemment, la christianisation du phénix est étroitement liée à la conversion des éléments situés dans sa proche périphérie, ce qui est le cas de son support. La christianisation du palmier-dattier (phoenix) sur lequel il trône dans la scène de Traditio Legis sera analysé avant de diriger notre regard vers le décor perdu de l’ancienne basilique Saint-Pierre. Nous formulerons alors des hypothèses sur une possible mise en image du paon et/ou du phénix au sein de la basilique vaticane dès la fin du IVe siècle, au moment de leur introduction dans l’espace ecclésial à Aquilée.

Dans la troisième partie, nous poursuivrons notre enquête en centrant notre propos sur les liens tissés entre le paon, le phénix porteur de lumière et le baptisé, dans des contextes cultuels chrétiens entre le Ve et le VIe siècle. Les deux oiseaux se rapprochent davantage de Jésus-Christ et du fidèle jusqu’à incarner un espoir de salut, en tant que signes de renaissance et de résurrection. Dans un premier temps, nous procéderons à une mise en série des occurrences et présenterons leur répartition géographique et leur distribution par type de lieu de culte et de de support. C’est à la lumière de ces deux oiseaux, liés tous deux au triomphe sur la mort, que nous étudierons les discours visuels de trois édifices ornés de mosaïques datant de la première moitié du Ve siècle. Nous mènerons une série de réflexions sur les rapports du paon et du phénix vis-à-vis du passage entre charnel et spirituel dans le baptistère San Giovanni in Fonte de Naples, le baptistère des Orthodoxes à Ravenne et de l’église Saint-Georges de Thessalonique. Les trois décors réalisés durant la première moitié du Ve siècle matérialisent à la fois un seuil et un lien entre l’individu purifié, comme revêtu de lumière grâce au baptême, et Dieu. Dans un second temps, nous nous concentrerons sur la question de la répartition des paons en périphérie de la croix, reproduite et déclinée sur des sarcophages, des clôtures de chœur et des mosaïques de pavement réalisés entre le Ve et le VIe siècle. Les liens tissés entre le couple de paons et le signe christique, autour duquel ils sont réunis, seront examinés afin de mieux comprendre ce que représente le schéma des paons affrontés autour du calice et/ou de la Croix assimilée à l’Arbre de Vie. Au IVe siècle, le paon et le phénix franchissent le seuil de l’église et se rapprochent progressivement au cours des siècles suivants, du Christ et du fidèle dont la

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chair est spiritualisée par les sacrements dispensés par l’Église, médiatrice privilégiée entre l’humain et le divin.

Dans la quatrième partie, les rapports entre le paon, le phénix et le fidèle seront observés à travers le thème de l’introduction du fidèle dans le Royaume de Dieu par l’intermédiaire des sacrements. Nous mettrons en série les occurrences du paon dans la sculpture lombarde datée entre le VIIe et le IXe siècle avant de nous concentrer sur deux types de supports, les clôtures de chœur et les baldaquins (ciboria) placés au-dessus de l’autel, autrement dit des plaques sculptées situées sur des zones liminaires. Le schéma des paons réunis autour du calice et/ou de la croix sera examiné, dans plusieurs décors sculptés, entre le VIIIe et le IXe siècle. Leur mise en arc sur ces supports, placés au seuil du chœur et autour de l’autel, sera notamment analysée, en regard de l’incorporation de l’individu au Fils de Dieu grâce aux sacrements. Comme nous le verrons, les paons affrontés reproduits sur ces supports répartis autour de l’autel font obstacle à la progression du fidèle dans l’espace ecclésial tout en accompagnant son élévation spirituelle. La deuxième partie du chapitre sera articulée autour du thème de la transformation de ces oiseaux, en particulier de leur mise en arc, en tant que reflet de la purification du corps grâce au rituel. Nous envisagerons ensuite, cette notion de transformation à travers les déclinaisons formelles de la figure du paon dans les lettrines des Évangiles de Gundohinus (milieu du VIIIe siècle), avant de diriger notre regard vers la Fontaine de Vie de l’Évangéliaire de Godescalc (781-783). Le second versant de la quatrième partie sera consacré à la présentation du phénix dans des décors absidaux à Rome, entre le VIe et le IXe siècle. Notre porterons ainsi notre attention sur les décors monumentaux des basiliques Saints-Cosme-et-Damien (526-530), Sainte-Agnès-hors-les-murs (625-638) et Sainte-Praxède (817-818), trois édifices construits ou reconstruits et ornés de mosaïques sous les pontificats de Félix IV (526-530), d’Honorius Ier (625-640) et de Pascal Ier (817-824). La mise en présence du pape dans ces décors sera discutée en fonction de la présentation, voire de la re-présentation du phénix désigné par le Christ encadré de martyrs. C’est à travers ces discours visuels produits par l’Église renaissante, que nous réfléchirons sur le rapprochement du pape avec le corps martyrial, avec le Christ ainsi qu’avec le phénix.

Dans le dernier chapitre, nous réaliserons une mise en série des occurrences datées entre le Xe et le XIIIe siècle en nous concentrant sur le XIIe siècle, en tant que moment de renouveau pour l’iconographie du paon et du phénix. Nous proposerons enfin une série de réflexions sur la réactualisation du paon dans le décor absidal de la basilique Saint-Clément à Rome, au XIIe siècle, durant l’une des principales phases de renouveau de l’Église romaine. L’oiseau nous

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introduira au cœur d’un décor complexe et d’un discours visuel particulièrement ordonné. Les mosaïques du chœur de Saint-Clément marqueront le terme de notre parcours et semblent révéler une évolution dans la signification de l’oiseau. Au XIIe siècle, l’image du paon faisant la roue pourrait commencer à incarner une mise en garde pour le fidèle et le clerc, souhaitant parer leur âme de multiples vertus.

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Partie I :

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Chapitre I. Parcours historiographique

Il convient dans un premier temps de présenter un aperçu des recherches sur l’iconographie du paon et du phénix afin de nous situer par rapport à l’édifice historiographique. Sa construction pourrait être mis en rapport avec la composition de la signification du paon et du phénix (ré)apparaissant régulièrement dans la littérature ancienne, dans le vocabulaire visuel antique et médiéval jusqu’à devenir un sujet de recherche récurrent. Le bilan que nous proposons n’est pas exhaustif, mais permet de mettre en évidence les principales étapes d’un parcours historiographique centré sur le XXe siècle. Un découpage chronologique et une organisation en fonction d’études phares sur le thème du paon, puis du phénix vont structurer notre propos tel un parcours ponctué d’étapes. L’itinéraire intellectuel de chaque grande figure de la recherche sera brièvement présenté afin de tenter de comprendre la genèse des principales études portant sur ces deux thèmes. Les liens tissés entre les chercheurs et les rapports de filiation intellectuelle seront notamment examinés dans le but d’évaluer les enjeux, les apports et éventuellement les limites de travaux proposés sur des sujets aussi riches et complexes. La documentation mise à leur disposition, la méthodologie adoptée et les principales ressources bibliographiques utilisées vont être mis en parallèle en vue de faire apparaître les sillons qu’ils ont pu suivre ou tracer. Notre parcours historiographique sur le thème du paon va débuter avec l’ouvrage d’Helmut Lother (1898-1970) puis se poursuivre avec les travaux inscrits ou non dans le sillon qu’il a tracé en 1929. Dans un second temps, nous proposerons une présentation des différentes études portant sur le thème du phénix en les articulant autour de charnières historiographiques. Celles-ci sont formées par les ouvrages de Jean Hubaux et Maxime Leroy (1939), des thèses de Marialuise Walla (1965) et de Roelof van den Broek (1971) jusqu’aux récents travaux de Françoise Lecocq. Bien que la pertinence de certaines pistes de réflexion soit discutable, les études de J. Hubaux et M. Leroy ainsi que de R. van den Broek s’imposent, aujourd’hui encore, comme des références pour l’étude des versants littéraires et iconographiques du phénix.

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I. L’étude du paon dans l’iconographie antique et médiévale

A. Enjeux, apports et limites de Der Pfau in der altchristlichen Kunst d’Helmut Lother (1929)

A. 1. Le parcours d’Helmut Lother et la genèse de l’étude

Les réflexions présentées en 1929 par H. Lother (1898-1970) dans l’ouvrage Der Pfau

in der altchristlichen Kunst12 sont le fruit de recherches débutées au début des années 1920 pendant ses études à l’université de Greifswald13. Sa formation lui permit de prendre connaissance des travaux sur l’art paléochrétien de l’archéologue Victor Schultze (1851-1937) qui enseignait à Greifswald depuis 188314. La seconde figure importante dans le parcours d’H. Lother est son directeur de recherche, l’archéologue, théologien et historien de l’Église Hans Achelis (1865-1937). Ce dernier chercha à comprendre dans quelles circonstances l’image sacrée émergea dans des contextes funéraires italiques entre les IIIe et IVe siècles15. Ces pistes balisées ont été suivies par son élève qui s’appuya principalement sur des documents figurés dans les catacombes romaines, napolitaines et syracusaines pour étudier la signification du paon dans l’art paléochrétien. Le fait qu’H. Lother ait été l’assistant personnel d’H. Achelis durant ses voyages d’études en Italie a certainement contribué à renforcer les liens entre les deux chercheurs et à orienter de futurs travaux16. La filiation intellectuelle apparaît également dans la méthode adoptée par H. Lother, puisque chaque témoignage figuré est situé dans son contexte avant d’être comparé. Les documents iconographiques ainsi répertoriés et analysés constituent un prisme par lequel le chercheur tente d’observer la piété des communautés judéo-chrétiennes entre le IIIe et le IVe siècle notamment à Rome. La dédicace du texte et les fréquentes références aux travaux de son directeur de recherches confirment qu’H. Lother s’inscrit dans le sillon d’H.

12 H. LOTHER, Der Pfau in der altchristlichen Kunst: eine Studie über das Verhältnis von Ornament und Symbol,

Leipzig, Dieterich, coll. « Studien über christliche Denkmäler », 18, 1929.

13 Le contexte religieux de la ville de Greifswald au XVIIe siècle fut d’ailleurs étudié par H. Lother dans sa thèse

portant sur les controverses piétistes en Poméranie. (H. LOTHER, Pietistische Streitigkeiten in Greifswald. Ein

Beitrag zur Geschichte des Pietismus in der Provinz Pommern, Gütersloh, Carl Bertelsmann, 1925).

14 V. Schultze est remercié dans l’avant-propos de l’ouvrage d’H. Lother. Voir V. SCHULTZE, Archäologische

Studien über altchristliche Monumente, Vienne, Wilhelm Braumüller, 1880 ; Id., Archäologie der altchristlichen Kunst, Münich, C. H. Beck, 1895 ; Id., Altchristliche Städte und Landschaften, Leipzig, Deichert, 1913–1930.

15 H.ACHELIS, Die Bedeutung der Katakomben von Neapel für die christliche Kunstgeschichte (Rektoratsrede)

Leipzig, Edelmann, 1932 ; Id., Römische Katakombenbilder in Catania, Berlin, De Gruyter, coll. « Studien zur spätantiken Kunstgeschichte », vol. 5, 1932 ; Id., Die Katakomben von Neapel. 6 Lieferungen, Leipzig, Hiersemann, 1935-1936.

16 H. Lother le précise dans son avant-propos (daté du 26 mai 1929), tout comme il souligne l’influence des

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Achelis17. L’influence de ce chercheur est en outre perceptible dès le titre de l’ouvrage que l’on peut rapprocher de la thèse d’H. Achelis – soutenue à l’université de Marburg en 1887 – portant sur le poisson dans les catacombes romaines18. La prise en compte d’un seul motif étant la seule démarche valable pour proposer une étude exhaustive selon H. Achelis, H. Lother appliqua ce principe sur un sujet analogue. Il est également possible que la connotation péjorative du paon et sa réappropriation dans les arts décoratifs européens dans le premier tiers du XXe siècle aient également favorisé ce choix19.

À travers son ouvrage paru en 1929, H. Lother pose la question suivante : dans quelle mesure l’observation des rapports entre « Ornament » et « Symbol » peut-elle éclairer l’étude du thème iconographique du paon dans l’art paléochrétien ? Pour H. Lother, le premier terme est synonyme de « décoration ». Il désigne un élément vide ou vidé de sens qui ne peut être étudié pour lui-même parce qu’appartenant à un ensemble, un décor. Symbol désigne quant à lui un élément porteur de signification par lui-même, que cette dernière ait perduré dans le temps ou qu’elle ait été ravivée dans un certain contexte. Bien que le titre de l’étude précise que la démonstration concerne la période dite « paléochrétienne », la recherche des origines de l’espèce de l’oiseau ainsi que des racines du motif et du symbole qui lui sont associés l’obligent à prendre en compte des documents antérieurs au IIIe siècle. En dressant un inventaire de la documentation réunie par le chercheur, nous constatons que la chronologie couverte par l’étude s’étend du Xe siècle av. J.-C. au XIIe siècle20. L’essentiel du corpus iconographique s’inscrit dans un intervalle chronologique compris entre le IIIe et le VIe siècle et concerne l’espace italique, mais des parallèles sont effectués avec des documents provenant de la partie orientale du Bassin méditerranéen. La considération d’un large cadre spatio-temporel et le croisement de témoignages archéologiques, littéraires et iconographiques permettent au chercheur de percevoir des continuités et d’observer la transmission de schémas visuels. La démarche interdisciplinaire adoptée et l’exploitation d’un riche corpus documentaire lui offrent alors la

17 Parmi les références les plus citées par H. Lother figurent H.ACHELIS, « Altchristliche Kunst », Zeitschrift für

die neutestamentliche Wissenschaft und die Kunde der älteren Kirche, 12-4, 1911, p. 296-320 ; id., « Die gnostiche

Katakombe am Viale Manzoni in Rom », Kunst und Kirche. Zeitschrift für religiöse Kunst in den evangelischen

Kirche, II, mars 1926, p. 65-71 ; id., Das Christentum in den ersten drei Jahrhunderten, Leipzig, Quelle & Meyer,

1912.

18 H. ACHELIS, Das Symbol des Fisches und die Fischdenkmäler der römischen Katakomben, Dissertation,

Marburg Philosophische Fakultät vom 29. November 1887, Universitäts-Druckerei Marburg, 1887 ; Marburg, Elwert, 1888.

19 Infra, n. 65.

20 L’étude en tant que telle s’arrête cependant à des objets ravennato-byzantins du VIe siècle (p. 78-83), puisque

les décors ecclésiaux de Sainte-Agnès-hors-les-murs à Rome (p. 23) et de Saint-Clément également à Rome (p. 85) ne sont cités qu’en guise d’ouverture.

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possibilité d’une part, de mieux cerner les grandes étapes de l’importation du paon de l’Inde vers la péninsule italique. D’autre part, le faisceau d’indices recueillis enrichit sa démonstration visant à évaluer les liens entre l’animal, le motif et le symbole dans des contextes civils, cultuels et funéraires jusqu’au VIe siècle. Ainsi, la recherche des articulations entre ces trois éléments lui sert à approfondir ses réflexions sur les circonstances dans lesquelles le paon migra d’un répertoire visuel « païen » vers une iconographie « paléochrétienne ». Les perspectives ouvertes en 1929 l’ont conduit deux ans plus tard à considérer les notions de « réalisme » et de « symbolisme » dans l’art paléochrétien21. Le chercheur se consacra ensuite jusqu’à la fin des années 1930 à la rédaction d’une histoire de l’Église et de la chrétienté22.

A. 2. L’horizon d’étude ouvert par Helmut Lother

La monographie d’H. Lother est pionnière sur le sujet et demeure la référence pour l’étude de l’iconographie du paon durant la période dite « paléochrétienne ». Ce terme est d’ailleurs défini dès les premières pages de même que les circonstances de l’émergence de l’« art paléochrétien ». Bien que les découvertes de l’archéologie chrétienne romaine en aient situé le berceau à Rome, H. Lother revient sur les travaux controversés de Josef Strzygowski (1862-1941)23. Dans son ouvrage intitulé Orient oder Rom, ce dernier adopta une méthode comparatiste façonnée par des préjugés racistes pour tenter d’expliquer que les arts du IVe siècle n’auraient pas d’origine romaine, mais auraient été influencés par des courants « orientaux » et « sémitiques »24. On ne peut aujourd’hui soutenir le discours téléologique et l’histoire formaliste de l’École de Vienne à laquelle se rattache ce chercheur. H. Lother présente également les recherches de Franz Xavier Kraus (1840-1901)sur le rôle de la cité d’Alexandrie dans le développement du catéchisme et d’une théologie chrétienne à partir de la fin du IIe siècle25. H. Lother est quant à lui convaincu d’une permanence de la culture gréco-romaine dans

21 H.LOTHER, Realismus und Symbolismus in der altchristlichen Kunst, Tübingen, Mohr, coll. « Sammlung

gemeinverständlicher Vorträge und Schriften aus dem Gebeit der Theologie und Religionsgeschichte », 1931.

22 H. LOTHER, Neugermanische Religion und Christentum. Eine kirchengeschichtliche Vorlesung, Gütersloh,

Bertelsmann, 1934 ; Id., Die Christusauffassung der Germanen, Gütersloh, Bertelsmann, 1937 ; id., Geschichte des Christentums, Leipzig, Quelle & Meyer, 1939.

23 J. STRZYGOWSKI, Orient oder Rom? Beiträge zur Geschichte der spätantiken und frühchristlichen Kunst,

Leipzig, J. C. Hinrich, 1901 ; Id., Kleinasien ein Neuland der Kunstgeschichte, Leipzig, Hinrich, 1903. D’un point de vue historiographique, voir S. MARCHAND, « The Rhetoric of Artifacts and the Decline of Classical Humanism : the Case of Josef Strzygowski », History and Theory, 33-4, 1994, p. 106-130 ; J.ELSNER, « The Birth of Late Antiquity: Riegl and Strzygowski in 1901 », Art History, 25-3, 2002, p. 358-379.

24 J. STRZYGOWSKI contredit ainsi les travaux de F. WICKHOFF sur la genèse de Vienne (1895), prolongés par

A. RIEGL dans Spätrömische Kunstindustrie (1901).

25 F. X. KRAUS, Geschichte der christlichen Kunst, Fribourg, Herder, 1895-1897, 2 vol. Voir également

E. LEFEVRE-PONTALIS, « Franz-Xaver Kraus, Geschichte der christlichen Kunst (compte-rendu) », Bibliothèque

Figure

Figure 1. Exemple d’une fiche de la base de données (p.1).
Figure 2. Exemple d’une fiche de la base de données (p.2).
Figure 3. Exemple d’une fiche de la base de données (p.3).
Tableau 1. Liste des identifiants du paon et du phénix.
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