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Fragmentation et aménagement polynomique de tamazight

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« Fragmentation et aménagement polynomique de tamazight »

Par / Ramdane TOUATI Docteur en linguistique berbère Aix-Marseille Université

Aux yeux d’une grande partie de berbérisants et des militants amazighs, les aires dialectales paraissent linguistiquement homogènes

; et le dialecte est considéré comme l’unité de base d’une tamazight fortement dialectalisée et fragmentée. Ainsi la quasi-totalité des démarches d’aménagement de tamazight proposées, depuis les années 1980 à nos jours, se basent sur les blocs dialectaux. C’est le cas de la thèse de la « normalisation convergente » proposée par Chaker (1983

& 1985). Le modèle de standard compositionnel de Castellanos (1998) est également fondé sur la convergence de dialectes amazighs, en sélectionnant les plus dynamiques et les plus importants démographiquement (Kabyle-rifain-chleuh), qu’il considère comme une aire gravilectale. Les amazigho-statalistes marocains, dont un grand nombre des chercheurs-aménageurs à l’Institut Royal de la Culture Amazighe (IRCAM), « optèrent » aussi pour l’élaboration d’une norme par l’unification de blocs dialectaux marocains (rifain- tamazight du Maroc Central-chleuh).

Or, l’unité linguistique de base n’est pas le « dialecte » (cf. Basset 1959, Chaker 1995), mais le « parler ». Et ce n’est qu’au plan sociolinguistique que l’unité des blocs dialectaux est tangible. La variation intradialectale de chaque aire est souvent très importante ; tamazight, de façon générale, est configurée par un extraordinaire enchevêtrement d’isoglosses entre parlers appartenant à différents groupes dialectaux. Il faudrait donc reconsidérer cette « base » et mieux exploiter le potentiel en matière d’aménagement convergent que permet la configuration dialectologique de tamazight.

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Un aménagement par assemblage des grandes parties, en

« laissant tomber » les dialectes considérés comme moins importants, impliquerait la disparition totale des aires amazighophones LED (Langue En Danger). Et c’est une démarche qui n’exploite pas toutes les possibilités que la linguistique pourrait offrir comme éclairage en matière de revitalisation et de normalisation linguistiques.

La polynomie s’impose comme solution plus réaliste et consensuelle.

Elle est plus facilement applicable dans un niveau restreint, mais elle peut aussi être appliquée pour un aménagement panamazigh.

Cependant, l’adoption de la notion de la ‘’langue polynomique’’ au domaine amazigh nécessite une discussion quant à son applicabilité à celui-ci.

De nombreux berbérisants et sociolinguistes catégorisent cette langue comme polynomique ou proposent son aménagement en adoptant cette approche. Mais peut-on qualifier tamazight de langue polynomique ? La polynomie est-elle la catégorisation d’une situation de diversité interne d’une langue ou bien une approche aménagiste de la gestion de cette fragmentation dialectale ?

Il faut rappeler que le concept de la « langue polynomique » a évolué depuis sa première formulation par le sociolinguiste corse J.-B.

Marcellesi (1984), notamment lors des travaux du colloque de Corte en 1990 (cf. Chiorboli, 1990). L’usage de celui-ci dans le domaine amazigh est, à notre avis, parfois lapidaire, souvent peu argumenté.

« Déclarer » tamazight comme langue polynomique s’avère difficilement conforme au concept, tel qu’il a été élaboré, en se basant sur la situation du corse : une langue beaucoup moins fragmentée que la nôtre. Quant aux aménageurs de tamazight proposant l’application de cette approche, nous constatons, qu’eux aussi, ne considèrent pas suffisamment cette fragmentation linguistique ; et parfois ils ignorent le volet glottopolitique de cette approche.

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A. Langue polynomique : de la sociolinguistique descriptive à la sociolinguistique appliquée

Le concept de la langue polynomique est proposé par J.-B. Marcellesi en 1983, à l’occasion du 17eme Congrès des romanistes d’Aix-en- Provence, pour rendre compte de l’existence des langues fortement dialectalisées, comme le corse. Celles-ci sont définies ainsi : « langues dont l’unité est abstraite et résulte d’un mouvement dialectique et non de la simple ossification d’une norme unique, et dont l’existence est fondée sur la décision massive de ceux qui la parlent de lui donner un nom particulier et de la déclarer autonome des autres langues connues » (Marcellesi, 1984, p.314).

J. B. Marcellesi, dans sa première définition de la notion de polynomie, insiste sur le processus de leur naissance, en mettant l’accent sur la (re)connaissance-naissance des langues et leur individuation qu’il considère comme plus importantes que la cohésion linguistique (interne). L’émergence de ces langues se fait non pas par l’individuation linguistique mais par l’affirmation de l’unité sociolinguistique, laquelle est définie à son tour comme : « Le processus par lequel une communauté ou un groupe social tend à systématiser ses différences, à les sacraliser, à les considérer comme déterminantes, à en faire un élément de reconnaissance » (Marcellesi, 1986, p. 24).

Si l’on se contente de cette première définition, la renfermant dans un descriptivisme expliquant la naissance « sociolinguistique » de langues, la notion de polynomie devient alors quasiment inapplicable dans la plupart des régions amazigophones. Au niveau panamazigh, la conscience de l’unité de tamazight concerne d’abord les berbérisants et les militants (développant toute une terminologie panberbériste : Tamazɣa (territoires) amazighophones, timuzɣa (berbéritude), tamazight (la langue tamazight) …) et les étrangers : ethnographes français, arabophones, etc. Cette unité ethnolinguistique était souvent absente même au niveau intradialectal. Dans de nombreux blocs amazigophones (Rif, domaine touareg, Nefoussa, Moyen Atlas,

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Kabylie...), nous trouverons des régions qui y sont géographiquement incluses mais dont les membres ne s’identifiaient pas comme faisant partie du groupe régional.

Mais depuis l’émergence et la massification du mouvement amazigh, les dynamiques sociolinguistiques vont dans le sens inverse de l’individuation. Au lieu de « la systématisation des différenciations », comme ce qu’a connu le corse à l’égard de l’italien, le mouvement amazigh, en s’appuyant sur les travaux d’ethnographie et de berbérologie, agissait dans le sens du rapprochement des différents groupes amazigophones, en mettant l’accent sur les points de convergence plutôt que sur leurs différenciations. Cela concerne le niveau aussi bien panamazigh que régional. L’unité de blocs régionaux actuelle en est le résultat. A titre d’exemple, en Kabylie – le bastion même de ce mouvement –, il y a quelques décennies, les amazighophones des régions comme Ait Khelfoun (extrême Ouest- Kabylie), dans les Babors et des environs de Amoucha (Est-Kabylie), dans les régions Sud-Kabylie (comme Mansoura), ne s’identifiaient pas comme appartenant au groupe kabyle. Ils étaient plutôt dans une position d’individuation. Cette attitude subsiste encore chez quelques locuteurs. Mais les dynamiques sociolinguistiques vont dans le sens de la convergence régionale, et l’écrasante majorité des locuteurs, malgré les spécificités linguistiques distinguant leurs parlers, s’identifie au bloc kabyle et tend à réduire les divergences.

À la fin des années 1980, le concept de la langue polynomique est développé et orienté davantage vers une conception plurielle de la diversité linguistique à l’intérieur d’une même aire, allant à l’encontre des idéologies linguistiques normatives, ne pouvant concevoir l’unité linguistique sans koinè ou formes standardisées rigides, comme nous pouvons le comprendre à travers ces passages de J. B. Marcellesi :

« Les utilisateurs d’une langue polynomique lui « reconnaissent plusieurs modalités d’existence, toutes également tolérées sans qu’il y ait entre elles hiérarchisation ou spécialisation des fonctions. Elle s’accompagne de l’intertolérance entre utilisateurs de variétés

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différentes, sur les plans phonologiques et morphologiques » (Marcellesi, 1988, p.170), ou encore dans cette nouvelle définition : « Une langue polynomique est un ensemble de pratiques langagières dont le mouvement échappe à l’encadrement normatif et aux hiérarchisations internes » (Marcellesi, 1990, p.321).

Le changement le plus important dans la (re)définition et la (re)construction de ce concept surviendra aux cours du Colloque de Corte « les langues polynomiques » en 1990. Le concept est introduit dans une sociolinguistique appliquée à l’aménagement des langues connaissant une grande diversité interne, en soutenant notamment la non-hiérarchisation des variétés des langues fortement fragmentées comme le corse, et le refus du préalable de la norme unique. Ainsi la POLYnomie est portée comme une alternative à l’aménagement UNInomique. La polynomie devient alors quasiment un synonyme de l’« intertolérance » des dialectes ou variantes d’une même langue, dans le cadre d’un aménagement linguistique.

B. Application au domaine amazigh

Comme le signale Chaker : « C’est peut-être en matière de lexique que la divergence entre les dialectes berbères est plus marquée et la plus immédiatement apparente » (Chaker, 1984). Car il subsiste déjà une grande convergence syntaxique ; et même les divergences existantes, elles posent rarement de sérieux obstacles à l’intercompréhension. Quant à la variation phonétique : la graphie à base latine et la version néo-tifinagh de l’IRCAM neutralisent déjà (à l’écrit) l’essentiel des divergences.

Quelles sont les chances de réussite de la revitalisation de tamazight se basant sur un aménagement uninomique statalistique (marocain, algérien, nigérien, libyen…) ou régionale (Kabylie, Moyen Atlas, Rif…) ? Les conflits linguistiques résultant de l’Amazigh Marocain Commun, quoiqu’il ne soit pas encore uninomique, sa non- implantation sociolinguistique nous donne déjà une idée sur le risque de rejet de toute véritable forme uninomique amazighe standardisée à l’échelle étatique.

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C’est seulement au niveau régional qu’une forme uninomique peut avoir de minces chances de s’implanter. Mais comme nous l’avo signalé, il n’existe pas une réalité linguistique dialectale dans ce qui est considéré comme dialectes amazighs. Unifier les dialectes en fonction des blocs amazighophones causerait à la fois beaucoup de sentiment d’exclusion et de mécontentement, comme

option (de l’Amazigh Marocain Commun)

seront marginalisés comme les aires dialectales périphériques, et surtout cela créera davantage de fragmentation linguistique.

L’intérêt de montrer l’enchevêtrement des isogl la réflexion sur l’aménagement de tamazight géographique de la région amazighophone

« rationnel » de tamazight doit nécessairement prendre en considération la réalité dialectologique de cette langue

linguistique doit être considéré en fonction de sa répartition et diffusion géographique.

À titre d’exemple, comment gérerions-nous le /t/ ([

substantifs dans le chaoui ?

L’étude de Boujellal (2015) montre : son maintien dans la zone du Belezma et les régions qui lui sont adjacentes (c’est

régions proches de la Kabylie) ; son affaiblissement en /h/, traitement majoritaire (36 points au total sur 62), concerne essentiellement les parlers

hautes Némem

disparition totale / t / d’autres régions chaoui Si on se fie à la

et « majorit

« imposer chaouïa

on laisse les choses telles qu’elles : Fragmentation et aménagement polynomique de tamazight

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C’est seulement au niveau régional qu’une forme uninomique peut avoir de minces chances de s’implanter. Mais comme nous l’avons , il n’existe pas une réalité linguistique dialectale dans ce qui s. Unifier les dialectes en causerait à la fois beaucoup de sentiment d’exclusion et de mécontentement, comme la précédente : les parlers périphériques seront marginalisés comme les aires dialectales périphériques, et

fragmentation linguistique.

des isoglosses est essentiel pour tamazight, quel que soit l’étendue ophone ciblée. Un aménagement doit nécessairement prendre en de cette langue. Chaque trait en fonction de sa répartition et de sa nous le /t/ ([ɵ]) initial des

: son maintien dans la zone du Belezma et les régions qui lui sont adjacentes (c’est-à-dire dans les

; son affaiblissement en /h/, traitement majoritaire (36 points au total sur concerne essentiellement les parlers de la zone centrale et des hautes plaines, ainsi que les Némemcha. Et enfin sa disparition totale / t /  [] dans d’autres régions chaouias.

Si on se fie à la forme dominante majoritaire », il faudrait donc imposer » à tous les parlers ouïas le /h/ à la place de /t/. Si on laisse les choses telles qu’elles

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sont, on aura plusieurs chaouïas formels, et surtout on ne fera que renfoncer la fragmentation du chaouïa et celle de tamazight en général. Puisque, l’écrasante majorité des autres parlers amazighs ne connaissent pas cette évolution phonétique. La meilleure solution, dans l’usage formel, comme à l’écrit, sera d’adopter pour l’ensemble du chaouïa la forme /t/, parce que majoritaire ailleurs. Cela n’empêchera pas la tolérance de [ɵ] et /h/ à l’oral. D’autant plus que cela ne pose pas un problème à l’intercompréhension.

L’aménagement linguistique de tamazight doit donc nécessairement prendre en considération ces données fondamentales de la dialectologie amazigh. Un aménagement se basant véritablement sur ces données est celui où chaque fait linguistique doit être considéré seul.

La polynomie doit être ainsi adoptée comme une démarche glottopolitique globale. Le choix de l’aménagement polynomique reste valable à tous les niveaux :

• Une même aire dialectale (Kabylie) ; petites localités (voir même tribales) ;

• Niveau macro-régionale (tamazight nord, aire touareg);

• Toute l’amazighophonie.

Cette approche polynomique consiste à garder la pluralité des formes lors de l’aménagement linguistique. Celui-ci nécessite préalablement le décryptage de la situation linguistique afin de mieux penser le décloisonnement des variétés et la connexion des différents parlers.

La polynomie consiste, concrètement, à préserver les usages réels, même des traits linguistiques qui semblent être minoritaires, voire marginaux à l’échelle régionale (comme kel en kabyle, ddu en rifain :

« marcher ») et d’éviter d’imposer à l’ensemble de la région des traits comme lḥu en Kabylie, et uggur en rifain, qui par ailleurs minoritaire ou complétement inconnu ailleurs.

Cela permettra de garder les formes qui subsistent au niveau microlectales, sous forme « d’ilets » linguistiques ; donc de préserver

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la richesse et la diversité interne de tamazight permettra de ne pas sacrifier les formes pan

convergence locale (parce que ddu, minoritaire au Rif, reste majoritaire à l’échelle panamazigh, kel

notamment dans l’aire touareg et sous d’autres forme amekli…. (Cf. les deux cartes représentant l’étendu

déférentes variantes du verbe « marcher » au Rif et en Kabylie) Au Rif :

En Kabylie (cf. la carte, à droite, ci-après de

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tamazight. Mais, surtout, cela de ne pas sacrifier les formes panamazighes pour la , minoritaire au Rif, reste aussi est très répandu, l’aire touareg et sous d’autres formes lexicales : tikli, les deux cartes représentant l’étendue de l’usage des

au Rif et en Kabylie) :

après de S. Guerrab, 2014, p. 236)

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Rappelons aussi que le système orthographique par sa nature « polyphonique » facilite l’élaboration

polynomique. À titre d’exemple, dans les règles de l’orthographe actuellement utilisées, les différentes formes de

(ww) en (ggw), (bbw)…majoritaires en Kabylie ( la carte ci-après, S. Guerrab, 2014, p. 232) et ailleurs etc.), sont neutralisées à l’écrit, mais préservées à l’oral

Certes, l’application d’un aménagement polynomique dans le domaine amazigh ne manquera pas de susciter des résistances de la part des adeptes de l’idéologie de l’unilinguisme, qui revendiqueraient une forme amazighe uninomique. Cette idéologie (quasi

réagir et résister à toute action allant à l’encontre de sa conception de la diversité linguistique. Comme dans le cas corse, «

l'attitude polynomiste a pu passer aux yeux de certains pour une trahison de l'idéal militant » (Thiers, 1993, p

réaction d’une certaine frange de la militance

quand les chercheurs de l’IRCAM ont publié des manuels scolaires en fonction des aires dialectales ; une frange du mouvement

marocain » les dénonça en les accusant de vouloir fragmenter « langue amazighe » en « dialectes régionaux

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ons aussi que le système orthographique amazigh, à base latine, facilite l’élaboration d’un tamazight . À titre d’exemple, dans les règles de l’orthographe actuellement utilisées, les différentes formes de labio-vélarisation de en Kabylie (cf. comme le montre ) et ailleurs (domaine chleuh, , mais préservées à l’oral.

ménagement polynomique dans le domaine de susciter des résistances de la part des adeptes de l’idéologie de l’unilinguisme, qui revendiqueraient une omique. Cette idéologie (quasi-universelle) peut l’encontre de sa conception de la diversité linguistique. Comme dans le cas corse, « Au début, l'attitude polynomiste a pu passer aux yeux de certains pour une , p.5). Cela rappelle aussi la la militance amazighe au Maroc, uand les chercheurs de l’IRCAM ont publié des manuels scolaires en une frange du mouvement « amazighe accusant de vouloir fragmenter « la ». L’idéologie linguistique

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de cette militance est de même nature que celle de l’État-nation, qui peut donner naissance et motiver différents projets de standardisation :

« une langue amazighe standard pour la nation amazighe » ; « une langue kabyle standard pour la nation kabyle » ; « une langue tamazight-algérienne standard pour la nation algérienne » etc., mais qui restent identiques et partagent la même idéologie de la norme standardisée, ne pouvant concevoir l’aménagement de la diversité linguistique interne des langues dans la pluralité des formes.

Cependant sur le terrain, cette approche est déjà « naturellement » mise en pratique dans l’enseignement de tamazight en Algérie. C’est ce que nous avions constaté lors de nombreuses observations de terrain dans des classes d’enseignement de tamazight en Kabylie, dans les régions Chaouies (dans le Massif), dans le Mzab (Legrara) et le touareg (In Gezzam).

D’après nos observations et nos entretiens, dans la majorité des classes de tamazight en Algérie, les enseignants, qui souvent, ne connaissant même pas « théoriquement » le concept sociolinguistique de polynomie, pratiquent spontanément l’intertolérance des parlers et n’imposent pas d’autres parlers étrangers à leurs apprenants, parce que c’est l’unique solution raisonnable. La majorité des enseignants exerçant hors de leurs régions d’origines fournissent d’importants efforts individuels pour la maitrise des parlers locaux de leurs élèves ; que ce soit dans la même aire dialectale ou à l’extérieur.

Pour une meilleure mise en application de cette approche polynomique, au moins dans l’enseignement, il est nécessaire de former les enseignants à cette approche durant leurs cursus universitaires. Cela améliorera et réglera l’essentiel des difficultés pédagogiques que pose l’enseignement d’une langue fortement fragmentée comme tamazight.

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