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Les autorités fédérales d'arbitrage et d'exécution de tâches publiques

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Les autorités fédérales d'arbitrage et d'exécution de tâches publiques

GRODECKI, Stéphane

GRODECKI, Stéphane. Les autorités fédérales d'arbitrage et d'exécution de tâches publiques.

In: Bellanger, François ; Tanquerel, Thierry. Les autorités administratives indépendantes : Journée de droit administratif 2010. Genève : Schulthess, 2011. p. 85-103

Available at:

http://archive-ouverte.unige.ch/unige:46726

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Les autorités fédérales d'arbitrage et d'exécution de tâches publiques

STÉPHANE GRODECKI

Chargé de cours à l'Université de Genève Docteur en droit

1.

Introduction

Le concept d'autorité indépendante vise la création d'une autorité, liée ou non à l'administration centrale, qui bénéficie d'une indépendance par rapport au pouvoir politique pour mener à bien la mission qui lui est confiée'. Leur existence doit reposer sur une base légale (art. 178, al. 3 de la Constitution fédérale de la Confédération suisse du 18 avril 1999').

Parmi les autorités indépendantes fédérales, il existe plusieurs autori- tés d'exécution de tâches publiques. Certaines, comme l'Institut fédé- ral de la propriété intellectuelle (IFPI), sont indépendantes, autonomes et bénéficient d'une personnalité juridique propre. D'autres, comme le Préposé fédéral à la protection des données et à la transparence, sont, administrativement rattachées à l'administration centrale mais se sont vues garantir une certaine autonomie et indépendance. Peu étudiées, ces autorités méritent un examen afin de déterminer les traits communs qui peuvent en être dégagés.

Plusieurs lois fédérales Ont en outre institué des autorités spécifiques qui ont été dénommées « autorités d'arbitrage». Nous examinerons ainsi ces différentes autorités afin d'en déterminer, notamment, la nature juridique.

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II. Les autorités publiques fédérales d'arbitrage

Fondamentalement, l'arbitrage implique, d'une part, que les parties conviennent de faire trancher leur litige par un tiers en qui elles ont confiance et, d'autre part, d'en respecter la décision'. En droit public, avec l'importance du principe de la légalité (art. 5 Cst.), il est paradoxal qu'une collectivité publique confie à des particuliers la tâche de trancher des litiges relevant du droit public, alors qu'il appartient en premier lieu à des organes étatiques d'assumer la juridiction administrative'.

Cela étant, plusieurs arrêts récents sont venus confirmer que l'arbitrage existait en droit public. Le 3 février 2010, le Tribunal administratif ge- nevois a confirmé qu'une convention conclue entre la Ville de Genève et une société anonyme de droit privé en relation avec l'utilisation priva- tive de la place de Cornavin5 pouvait valablement contenir une clause d'arbitrage'. Le 26 juin 2007, un tribunal arbitral institué dans le can- ton de Vaud a estimé qu'une convention conclue entre des particuliers et une commune portant sur l'équipement de terrains pouvait être soumis à une procédure d'arbitrage '. L'admissibilité de l'arbitrage au sens strict -soit la création d'un Tribunal arbitral ad hoc - n'a toutefois que peu in- téressé la doctrine'. Les choses ont récemment changé et deux contribu- tions importantes ont été consacrées au sujet par THIERRY TANQUEREL ET ELEANOR MCGREGOR', d'une part, et AUGUST MACHLERJO, d'autre part. La jurisprudence et ces contributions doctrinales démontrent l'im- portance souvent méconnue de l'arbitrage en droit public interne.

3 GABRIELLE KAUFMANN-KoHLERI ANTONIO RIGOZZI, Arbitrage international - Droit et pratique à la lumière de la LDIP, Berne, 2006, N. 9.

, RDAF 2008 1 361, c. La (Sentence arbitrale, 26.06.2007).

Cette place est située au dessus de la gare de Genève.

ATAIGE du 3 février 2010 (ATA/67/2010), non publié.

, 'RDAF 2008 1 361 (Sentence arbitrale, 26.06.2007).

s Voir J'une des rares contributions sur le sujet: ADRIAN STAEHELlN, « Das ôffent·

liche·rechtliche Schiedsgericht », in: Privatrecht Offentliches Recht Strafrecht: Gnmz(m und Grc1tzüberschreitungen: Festgabe zum Schwizerischen juristentag 1985, Bâle, Francforr-sur-Ie-Main, 1985, p. 381 ss.

9 THIERRY TANQuERELIELEANOR MCGREGOR, « L'arbitrage en droit public suisse », in: L'arbitrage en droit public, Bruxelles, 2010, p. 227 ss.

10 AUGUST MAcHLER, Vertrag und Verwalttmgsrechtspflege, Zurich, Bâle, Genève, 2005.

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Les autorités fédérales d'arbitrage et d'exécution de tâches publiques

Les autorités d'arbitrage abordées dans la présente contribution sont toutefois bien différentes. Il s'agit d'instances publiques d'arbitrage créées par différentes lois fédérales, par exemple, la Commission d'arbi- trage fédérale pour la gestion de droits d'auteur et de droits voisins ou les différents tribunaux arbitraux existants en matière d'assurances so- ciales. Nous déterminerons tout d'abord s'il s'agit véritablement de tri- bunaux arbitrauxl lNous essayerons également de voir les similitudes sur les compétences et les compositions de ces diverses instances". Nous en définirons finalement la nature juridique ".

A. L'arbitrage en droit public

La notion d'arbitrage ne découle pas du droit public, mais provient du droit privé. Pour définir l'arbitrage en droit public, il se justifie dès lors de partir de la définition usuelle retenue en droit privé 14: «l'arbitrage est un mode conventionnel de résolution des litiges par des particuliers (les arbitres) choisis par les parties et investis de juger à la place des juridic- tions étatiques» 1.).

Stricto sensu, l'arbitrage en droit public a été défini par trois éléments essentiels: son mode conventionnel, la présence de particuliers comme arbitre et le fait que la sentence arbitrale soit reconnue comme un jugement". L'un des critères essentiel est, selon la doctrine unanime, son caractère conventionnel. C'est en effet au travers de ce fondement que l'arbitrage se distingue de la justice étatique 17.

11 Voir infra Il, A et C.

12 Voir infra II, B et C.

L1 Voit infra II, D.

14 TANQUEREL/McGREGOR (n. 9) p. 230.

15 KAUFMANN-KOI-JLER/RIGOZZI (n. 3) N. 20.

16 TANQUEREL/McGREGOR (n. 9) p. 230.

17 TANQUEREL/McGERGOR (n. 9) p. 231; MXCHLER (n. 10) p. 569; MINH SON NGUYEN, Le contrat de collaboration en droit administratif, Berne, 1998, p. 312.

Voir toutefois BLAISE KNAPP, Précis de droit administratif, Bâle et Frandort- sur-le-Main, 1991, p. 445 qui considère que l'élément essentiel à l'arbitrage est le caractère définitif de la sentence arbitrale. Cet élément n'est toutefois pas déter- minent, car même en droit privé, des recours exceptionnels existent sans que le caractère arbitral du litige soit nié. Voir à ce sujet, MACHLER (n. 10) pp. 569-570.

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En revanche, lorsque la loi institue des instances d'arbitrage, il ne faut pas se fier aux mots. Conformément à la définition précitée de l'arbi- trage, ces instances ne sont pas des tribunaux arbitraux au sens étroit - faute de fonder leur compétence sur une convention entre les parties-, mais des autorités indépendantes spécialisées fondées par le législateur

1" .

Il s'agit donc de tribunaux arbitraux improprement dits 19.

B. Quelques autorités publiques fédérales d'arbitrage

Le droit fédéral connaît plusieurs autorités d'arbitrage instituées par le législateur. Il s'agit donc de tribunaux arbitraux improprement dits que nous allons passer en revue afin de déterminer s'il s'agit véritablement d'autorité judiciaire.

1. La Commission d'arbitrage fédérale pour la gestion de droits d'auteur et de droits voisins (CAF)

L'article 55 de la loi fédérale sur le droit d'auteur et les droits voisins du 9 octobre 1992 (LDA) 20 institue une Commission d'arbitrage fédérale pour la gestion de droits d'auteur et de droits voisins (CAF). Elle est compétente pour approuver les tarifs des sociétés de gestion (art. 46 cum art. 55, al. 1 LDA). Les sociétés de gestion sont au nombre de cinq:

SUISA, ProLitteris, Suissimage, Société suisse des auteurs et Swissper- form. Elles sont tenues, dans leur domaine d'activité respectif, de négo- cier avec les associations représentatives des utilisateurs les indemnités perceptibles du fait de l'utilisation d'une œuvre protégée par le droit d'auteur ou d'une prestation protégée par les droits voisins. Les sociétés de gestion soumettent ensuite les tarifs négociés à la CAF pour appro- bation (art. 55, al. 1 LDA). Il peut s'agir soit de tarifs individuels concer- nant une seule société de gestion, soit de tarifs communs à plusieurs ou à l'ensemble des sociétés de gestion lorsque différents répertoires sont concernés 21.

18 NGUYEN (n. 17) p. 313; TANQUERELlMcGREGOR (n. 9) p. 232; ALFRED KOLZ/

ISABELLE HANER, Verwaltungsverfahren und Verwaltungsrechtspflege des Bun- des, Zurich, 1998, p. 280; KNAPP (n. 17) p. 445.

19 MACHLER (n. 10) p. 569; TANQUEREL/McGREGOR (n. 9) p. 231.

20 RS 231.1.

21 Rapport annuel 2008 de la Commission arbitrale fédérale pour la gestion des droits d'auteur et des droits voisins, p. 4.

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Les autorités fédérales d'arbitrage et d'exécution de tâches publiques

Les membres de la Commission sont nommés par le Conseil fédéral (art. 55, al. 2 LDA), qui doit veiller que sa composition soit équilibrée et représente équitablement les milieux concernés, les quatre commu- nautés linguistiques, les régions du pays ainsi que les deux sexes (art. 1, al. 1 de l'ordonnance sur le droit d'auteur et les droits voisins du 26 avril 199322). La Commission rend ses décisions dans la composition de cinq personnes (Chambre arbitrale), à savoir la présidente, deux membres assesseurs indépendants et un représeutant ou une représentante pour chacun des deux gronpes formés des sociétés de gestion et des associa- tions des utilisateurs (art. 57, al. 1 LDA).

La Commission ne doit prendre en considération aucune instruction (art. 55, al. 3 LDA), ce qui semble lui octroyer une indépendance accrue.

Toutefois, pour les membres choisis en raison de leur connaissance du domaine concerné, le fait d'appartenir à une société de gestion ou à une association d'utilisateur ne constitue pas à lui seul un motif de récusation (art. 57, al. 3 LDA). Un membre d'une société, susceptible d'être partie à la procédure" (art. 48 de la loi fédérale sur la procédure administrative du 20 décembre 196824), pourrait aiusi statuer sur l'affaire saus devoir se récuser. Cet élément pose un sérieux problème d'indépendance. La doctrine a d'ailleurs relevé que la garantie de l'indépendance «n'est pas vraiment recherchée par la loi ,,25. Il faut toutefois préciser que selon la pratique de la CAF, un membre d'une société qui a activement participé à une négociation tarifaire ne peut ensuite plus siéger dans la Chambre arbitrale chargée d'approuver ce tarif26.

Ce nonobstant, le Tribunal fédéral reconnaît pourtant la Commission d'arbitrage fédérale pour la gestion des droits d'auteur et de droits voi- sins comme uue autorité judiciaire27Nous y reviendrons.

22 ODAu - RS 231.11.

23 Voir ATF 135/2009 II 172, Schweizetische Radio· und Fernsehgesellschaft (SRG) und Union des Associations Européennes de Football (UEFA).

24 PA - RS 172.021.

25 DENIS BARRELET/WILLI EGLOFF, Le nouveau droit d'auteur, Berne, 2000, p. 255; Dans Je même sens, ERNST BREM/VINCENT SALVADÉlGREGOR WILD,

«article 56 », in: MÜLLER/OERTLI (éd.), Ul'hebel'rechtsgesetz - Handko111111entar, Berne, 2006, ad art. 56, n" 2, p. 465.

26 Rapport annuel 2008 (n. 21) p. 5, citant une décision non publiée de la CAF du 22 août 2000.

27 ATF 133/2007 II 263, SWICO et consorts, c. 4.1.

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La CAF ne se saisit enfin pas d'elle-même d'une cause mais statue uni- quement SUI requête (art. 59, al. 1 LDA). Ses décisions peuvent être por- tées par devant le Tribunal administratif fédéral (art. 33, let. f LTAF).

2. La Commission d'arbitrage dans le domaine des chemins de fer (CA CF)

La CACF a été créée par l'article 40a de la loi fédérale sur les chemins de fer du 20 décembre 1957 (LCdF) 28 et a pour but de statuer sur les litiges concernant l'accès au réseau de chemins de fer ainsi que le calcul de la redevance d'utilisation de l'infrastructure (art. 40a LCdF). La Commission statue également sur tous les litiges entre des entreprises de transports et règle les conflits entre les gestionnaires de l'infrastructure et les utilisateurs du réseau en ce qui concerne ['autorisation d'accès au réseau et la fixation des prix des sillons (art. 12 de l'Ordonnance du DETEC sur la Commission d'arbitrage dans le domaine des chemins de fer du 5 mars 200729). A la demande du gestionnaire de l'infrastructure ou de l'entreprise de transport, elle statue sur tous les litiges en cas de violation de la clause de non-discrimination, qu'il s'agisse de mesures tarifaires (prix du sillon) ou non tarifaires (par exemple, attribution des sillons) 30.

Le Conseil fédéral nomme le Président et le Vice-président de la Com- mission, les autres membres étant nommés par le Département fédéral de l'environnement, des transports, de l'énergie et de la communication (art. 6 de l'Ordonnance du DETEC sur la Commission d'arbitrage dans le domaine des chemins de fer). Les autorités de nomination doivent veiller à assurer une représentation équilibrée des sexes, des langues et des régions du pays (art. 6, al. 2 de l'Ordonnance du DETEC sur la Commission d'arbitrage dans le domaine des chemins de fer).

L'indépendance de la Commission est, à tout le moins implicitement, cqnsacrée par l'article 25 alinéa 3 de l'ordonnance sur l'accès au réseau ferroviaire du 25 novembre 1998 (OARF)", qui prévoit qu'elle n'est

28 RS 742.101.

19 RS 742.122.7.

)0 Rapport de gestion 2009 de la Commission d'arbitrage dans le domaine des che- mins de fer, p. 2.

31 RS 742.122.

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Les autorités fédérales d'arbitrage et d'exécution de tâches publiques

soumise que sur le plan administratif à l'Office fédéral des transports (OFT). L'indépendance ressort également de l'article 4 de l'Ordonnance du DETEC sur la Commission d'arbitrage dans le domaine des chemins de fer, qui interdit aux membres de la Commission d'exercer une activité qni porte atteinte, notamment, à l'indépendance de la Commission.

La CACF est saisie par voie d'action (art. 40a LCdF cum art. 15 de l'Ordonnance du DETEC sur la Commission d'arbitrage dans le do- maine des chemins de fer). Elle applique généralement les dispositions de la PA, sauf pour l'intervention accessoire, le cumul des actions, le consortage et la demande reconventionnelle où les dispositions de la loi fédérale sur la procédure civile fédérale du 4 décembre 1947 (PCF)"

sont applicables (art. 15 de l'Ordonnance du DETEC sur la Commis- sion d'arbitrage dans le domaine des chemins de fer). Ses décisions sont susceptibles de recours au Tribunal administratif fédéral (art. 33, let. f LTAF).

3. Les Tribunaux arbitraux en matière d'assurances sociales

Plusieurs lois d'assurances sociales instituent des Tribunaux arbitraux.

L'article 59 de la loi fédérale sur l'assurance-vieillesse et survivants du 20 décembre 1946 (LAVS) n institue un Tribunal arbitral de la Commis- sion fédérale de l'AVS/AI qui est compétent pour trancher les différents relatifs à l'établissement d'un règlement d'une caisse de compensation paritaire (art. 54, al. 3 LAVS et art. 1 du règlement du Tribunal arbi- traI de la Commission fédérale de l'A VS/AI du 11 octobre 197234). Les membres de ce tribunal sont choisis en son sein par la Commission fédé- rale de l'AVS/AI (art. 54, al. 3 LAVS). Ce tribunal est saisi par voie d'ac- tion et la PA est applicable (art. 7 du règlement du Tribunal arbitral de la Commission fédérale de l'A VS/AI). Ses décisions sont sujettes à recours devant le Tribunal administratif fédéral (art. 54, al. 3 in fine LAVS).

Les articles 57 de la loi fédérale sur l'assurance-accidents du 20 mars 1981 (LAA)35, 27h" de la loi fédérale sur l'assurance-invalidité du 19 juin

31 RS 273.

n RS 831.10 .

.

14 RS 831.143.15.

35 RS 832.20.

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1959 (LAI)36 et 89 de la loi fédérale sur l'assurance-maladie du 18 mars 1994 (LAMaI) 37 instituent des tribunaux arbitraux chargés de trancher des litiges entre assurances et fournisseurs de prestations. Ces tribunaux se composent d'un président neutre et de représentants des parties, en nombre égal (art. 57, al. 3 LAA; art. 89, al. 4 LAMaI; art. 27bi" al. 4 LAI). Outre le président, il existe ainsi des groupes de juges, dans les- quels chaque partie à un litige choisit un arbitre appeler à siéger (art. 43, al. 1 de la loi genevoise d'application de la loi fédérale sur l'assurance- maladie du 29 mai 1997)38.

Ces tribunaux arbitraux sont saisis par voie d'action" et leurs jugements peuvent faire l'objet d'un recours par devant le Tribunal fédéral (art. 57, al. 5 LAA; art. 91 LAMaI; 69, al. 3 LAI).

4. J;Autorité indépendante d'examen des plaintes en matière de radio-télévision (AIEP)

L'Autorité indépendante d'examen des plaintes en matière de radio-télé- vision (autorité de plainte) est composée de neuf membres (art. 82, al. 1 de la loi fédérale sur la radio-télévision du 24 mars 200640), nommés par le Conseil fédéral (art. 82, al. 2 LRTV). Elle est, notamment, char- gée de traiter les plaintes concernant le contenu des émissions rédaction- nelles (art. 83, al. 1, let. a LRTV).

Son indépendance et son autonomie par rapport à l'Assemblée fédérale, le Conseil fédéral et l'administration fédérale sont garanties (art. 84 LRTV).

L'autorité est saisie sur plainte, soit par une personne touchée par une émission, soit par vingt personnes (art. 94, al. 1 LRTV). L'autorité statue ensuite par la voie de la décision (art. 97 LRTV), sujette à recours directement devant le Tribunal fédéral (art. 86, al. 1, let. c de la loi fédé- rale sur le Tribunal fédéral du 17 juin 200541). Dans la mesure où cette

36 RS 831.20.

37 RS 832.10.

38 LaLAMaliGE-RS/GEJ 305.

39 ATF 13212006 V 18, PHILOS, Caisse maladie-accident, c. 2; ATF 114/1988 V 319, Schweizerische Unfallversicherungsanstalt, c. 4b.

40 LRTV - RS 784.40.

41 LTF - RS 173.110.

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Les autorités fédérales d'arbitrage et d'exécution de tâches publiques

autorité indépendante statue sur des litiges entre unldes particulier(s) et un diffuseur de radio-télévision, on peut admettre qu'il s'agit, au sens large, d'une autorité d'arbitrage. La doctrine a cependant qualifié cette entité d'autorité de surveillance formalisée".

5. La Commission de l'électricité (EICom)

L'article 21 de la loi sur l'approvisionnement en électricité 23 mars 2007 (LApEl) 43 institue une commission de l'électricité (ElCom), formée de cinq à sept membres désignés par le Conseil fédéral. Son indépendance est garantie (art. 21, al. 2 LApEl). Elle n'est soumise à aucune directive du Conseil fédéral ou de l'administration fédérale (art. 21, al. 2 LApEl).

Selon le Conseil fédéral, l'E1Com est «une autorité indépendante qui re- vêt une fonction judiciaire ,,44. Elle est en effet compétente pour statuer sur les litiges entre particuliers relatifs à l'accès au réseau, les conditions d'utilisation du réseau, sur les tarifs et la rémunération du réseau ainsi que sur les tarifs d'électricité (art. 22, al. 2, let. a LApEL). Elle peut être saisie par des particuliers ou se saisir d'un cas d'office (art. 22, al. 2 LApEL). L'E1Com expose ainsi avoir des tâche de régulateurs ainsi que d'arbitre, car elle doit «arbitrer" les litiges sur l'accès au réseau 45. Les décisions de l'ElCom peuvent faire l'objet d'un recours auprès du Tribu- nal administratif fédéral (art. 23 LApEl).

Le Tribunal fédéral a toutefois jugé qu'il ne s'agissait pas d'une autorité judiciaire, mais d'une autorité administrative indépendante".

42 MARTIN DUMERMUTH, Die Programmaufsicht bei Radio und Fernsehen Î1l der Schwâz unter besonderer Berücksichtigung der Entscheidpraxis der tfnabhangi- gen Beschwerdeil1stanz für Radio und Fernsehen, Bâle et Francfort-sur-le-Main, 1992, p. 17l.

4.1 RS 734.7.

44 Message du Conseil fédéral du 3 décembre 2004 relatif à la modification de la loi sur les installations électriques et à la loi fédérale sur l'approvisionnement en élec- tricité, FF 2005 1493, p. 1544.

4S Résumés des tâches de l'EICom consulté le 2 juin 2010 sur www.elcom.ad •• ûn.

ch/org/00022/index.ht111/!/ang=(r.

411 ATF 131/2005 II 13, Swisscom Fixnet AG, c. 3.2. Voir aussi CAROLINE CAVALERI RUDAZ, L'accès aux réseaux de télécommunication et d'électricité, Berne, 2010, p.231.

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6. La Commission fédérale de la communication (ComCom) La Commission fédérale de la communication (ComCom) est composée de cinq à sept membres nommés par le Conseil fédéral (art. 56 de la loi sur les télécommunications du 20 avril 199747). Il s'agit d'une autorité indépendante des autorités administratives, qui n'est soumise à aucune directive du Conseil fédéral ou du département en ce qui concerne ses décisions (art. 56, al. 2 LTC).

La ComCom peut être saisie par des fournisseurs à propos des condi- tions d'accès au réseau (art. lla, al. 1 LTC). A l'instar de l'E1Com, elle va ainsi" arbitrer» des litiges entre particuliers sur l'accès au réseau et sa décision sera susceptible d'un recours au Tribunal administratif fédé- ral (art. 33, let. f LTAF).

C. Une synthèse

On peut ainsi constater que les autorités publiques d'arbitrage ont de nombreuses caractéristiques communes:

leur existence et leurs compétences sont fondées sur une norme de droit public;

leurs membres sont nommés par le Conseil fédéral; les parties à un litige - l'exception de certains tribunaux en matière d'assu- rances sociales - n'ont ainsi aucune influence sur la nomination des

« arbitres» ;

il s'agit d'un contentieux - de droit public - par voie d'action desti- nés à trancher des litiges entre particuliers;

les décisions de ces autorités ne sont pas définitives et peuvent faire l'objet d'un recours ordinaire auprès d'un tribunal supérieur.

En matière administrative, le recours à la voie de l'action pour le conten- tieux est normalement l'exception; la voie ordinaire étant le recours contre une décision de l'administration". Les différentes autorités fédé- rales d'arbitrage instituent toutefois tout un contentieux par voie d'ac- tion destiné à trancher des litiges entre particuliers" et non pas, comme

47 LTC - RS 784.10.

48 PIERRE MOOR, Droit administratif, Vol. II «Les actes administratifs et leur contrôle», Berne, 2e éd., 2002, pp. 530-531.

49 KNAPP (n. 17) p. 445.

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Les aurorités fédérales d'arbitrage et J'exécution de tâches publiques

d'ordinaire en matière de contentieux de droit public, des litiges entre l'Etat et un particulier.

En définitive, les autorités publiques d'arbitrage sont instituées pour ap- pliquer des normes de droit public afin de trancher un litige entre deux particuliers. En l'absence de tout caractère conventionnel, il ne s'agit pas d'arbitrage stricto sensu. Ces différentes autorités d'arbitrage sont donc des autorités de première instance spécialisées'·. Reste toutefois à déterminer s'il s'agit d'autorités judiciaires.

D. La nature juridique des autorités fédérales d'arbitrage

Dans plusieurs arrêts, le Tribunal fédéral a jugé que ces autorités d'ar- bitrage étaient des autorités judiciaires". La doctrine semble aller dans le même sens"', tout en s'interrogeant sur l'indépendance de ces com- missions d'arbitrage, notamment en raison de leur nomination par le Conseil fédéral 53.

Pour être reconnue de type judiciaire, une autorité doit, avant tout, être indépendante et impartiale (art. 30 et 191c Cst, art. 6 CEDH H).

L'indépendance d'une aurorité se détermine, notamment, par son mode de désignation, la durée du mandat de ses membres, l'existence d'une protection contre les pressions extérieures et le point de savoir s'il y a ou non apparence d'indépendance'S, L'impartialité, dans sa dimension objective, signifie que l'autorité n'est pas elle-même partie au litige et

50 KOLz/HANER (n. 18) p. 281.

SI ATF 133/2007 II 263, SWICO et consorts, c. 4.1; ATF 119/1993 lb 447, Stato dei Cantone Ticino, c. 1.

52 KOLz/HilNER (Il. 18) p. 285.

53 RAINER]. SCHWEIZER, Die ersinstanzliche Verwaltungsgerichtsbarkeit des Bun- des durch Rekurs - und Schiedskommissionen -aktuelle Situation und Reform- bedürfnisse, Bâle et Francfon-sur-la-Main, 1998, p. 68 ss.

H RS 0.101.

55 PASCAL MAHON, «Article 30 )), in: JEAN-FRANÇOIS AUBERT/PASCAL MAHON, Pe- tit commentaire de la Constitution fédérale de la Confédération misse du 18 avril 1999, Zurich, 2003, ad art. 30, n° 7, p. 281; GEROLD STEINMANN, "Article 30 )), in: EHRENZELLER/MASTRONARDI/SCHWIZER/VALLENDER (éd.), Die schweizeri- sche Bundesverfassung - Kommentar, Saint-Gall, 2e éd., 2008, ad art. 30 n" 6, p.624.

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qu'elle n'a pas de préférence pour une des parties. Elle ne doit en outre pas avoir de prévention".

S'agissant de la composition, le Tribnnal fédéral a, dans nn premier temps, semblé exclure des autorités judiciaires celles dont les membres étaient désignés par l'exécntif". Dans sa jurisprudence récente, notre

Haute Cour a toutefois estimé qu'une commission nommée par un gou- ·1 vemement cantonal pouvait être une autorité judiciaire lorsqu'elle jouit

"d'une indépendance propre qui la distingue d'un service de l'adminis- tration

,,5 " .

Pour examiner cette indépendance, le Tribunal fédéral a no- tamment relevé que cette commission disposait de son propre secrétariat et que la loi lui garantissait le droit d'instruire les dossiers librement".

En revanche, une instance qui est, de par son organisation et sa posi- tion hiérarchique, avant tout une autorité de surveillance ne peut être qualifiée d'autorité judicaire car si la fonction primaire d'une antorité est d'exécnter des tâches de surveillance, l'apparence d'indépendance est insuffisante pour lui reconnaître le statut d'autorité judiciaire'o.

Les autorités d'arbitrage fédérales sont nommées par le Conseil fédéral, mais leur indépendance est garantie par la loi et elles disposent d'un secrétariat indépendant, si bien qu'elles se distinguent d'nn service de l'administration.

Cela étant, plusieurs éléments s'opposent, à notre sens, à leur reconnais- sance comme autorité judiciaire.

Premièrement, plusieurs autorités, comme l'AIEP, l'ELCom et la Com- Corn, sont avant tout des antorités de régulation". Leur fonction prin-

56 MAHON (n. 55) n' 8 p. 281. STEINMANN (n. 55) n" 9 p. 627.

57 ATF 11511989 Il 366, Gebriider G.

" ATF du 30 avril 2008 (2C_ 491/2007), c. 1.3.

" ATF du 30 avril 2008 (2C391/2007), c. 1.3. Dans le même sens, voir ALAIN

WURZBURGER, «article 86» in: CORBOZ/WURZBURGER/FERRARI/FRÉSARD/

AUBRY GIRARDIN (éd.), Commentaire de la LTF, Berne, 2009, ad art. 86, n° 21,

p. 844; JEAN~CLAUDE LUGON 1 ETIENNE POLTIER ITHIERRY TANQUEREL, «Les

conséquences de la réforme de la justice fédérale pour les cantons .. in: BELLANGER/

TANQUEREL (éd.), Les nouveaux recours fédéraux en droit public, Zurich, Bâle, Genève, 2006, p. 115. Contra, YVES DONZALLAZ, Loi sur le T,"ibunal fédéra/- Commentaire, Berne, 2008, pp. 1132-1133.

60 ATF du 27 mars 2008 (2C_ 49512007), c. 1.1.

61 Voir CAVALERl RUDAZ (n. 46) p. 232.

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Les autorités fédérales d'arbitrage et d'exécution de tâches publiques

cipale est de surveiller un domaine ou un marché. Ce n'est qu'à titre ac- cessoire qu'elles peuvent être saisies comme autorité d'arbitrage par des particuliers. En absence d'une fonction primaire d'autorité judicaire, la jurisprudence précitée" s'oppose à ce qu'elle soit reconnue comme suf- fisamment indépendante pour être qualifiée d'autorité judiciaire.

Deuxièmement, l'absence de prévention - nécessaire à la reconnaissance de l'impartialité - ne peut être retenue pour une autorité comme la CAF au motif que le fait pour un de ses membres d'appartenir à une société de gestion ou à une association d'utilisateur - susceptible d'être par- tie à la procédure - ne constitue pas à lui seul un motif de récusation (art. 57, al. 3 LDA). Cet élément pose un sérieux problème d'indépen- dance nonobstant la pratique de la CAF selon laquelle un membre d'une société qui a activement participé à une négociation tarifaire ne peut ensuite plus siéger dans la Chambre arbitrale chargée d'approuver ce tarif". D'un point de vue objectif, la présence d'un membre d'une partie dans la composition d'une autorité s'oppose en effet à ce que celle-ci soit totalement impartiale. La doctrine, que nous avons déjà citée dans cette contribution, a d'ailleurs relevé que la garantie de l'indépendance" n'est pas vraiment recherchée par la 10i,,64.

La majorité des autorités d'arbitrage fédérales doit ainsi être qualifiée d'autorités spécialisées de première instance et non d'autorités judi- ciaires. Seuls les tribunaux arbitraux en matière d'assurances sociales"

et la CACF peuvent être reconnus comme autorités judiciaires de 1 re instance.

III. Les autorités fédérales indépendantes d'exécution de tâches publiques

Selon une organisation hiérarchique, l'administration fédérale est en principe soumise aux instructions du Conseil fédéral (art. 2, al. 1 de la

62 ATF du 27 mars 2008 (2C_ 495/2007), c. 1.1.

63 Rapporr annuel 2008 (n. 21) p. 5, citant une décision non publiée de la CAF du 22 août 2000.

64 BARRELET/WILLl (n. 25) p. 255. Dans le même sens, BREM/SALVADÉ/WILD

(n. 25) ad art. 56 n" 2 p. 465.

65 Dans ce sens, WURZBERGER (no 59) ad art. 86 nO 21 p. 844.

97

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loi sur l'organisation du gouvernement et de l'administration du 21 mars 199766). L'administration peut toutefois comprendre des unités admi- nistratives décentralisées (art. 178, al. 3 Cst.; art. 2, al. 3 LOGA). De telles unités peuvent être ainsi indépendantes du pouvoir hiérarchique de l'administration centra le 67. De telles autorités indépendantes peuvent également être créées par le biais de structure juridique autonome de l'administration centrale (art. 2, al. 4 LOGA). L'indépendance de ces autorités peut ainsi être garantie soit par leur autonomie, soit par une base légale spécifique. Le législateur l'a d'ailleurs rappelé de manière générale à l'article 8, alinéa 2 de l'ordonnance sur l'organisation du gou- vernement et de l'administration du 25 novembre 1998 (OLOGA) 68: les unités rattachées administrativement sont en règle générale, en ce qui concerne la gestion des ressources, assimilées à l'administration fédérale centrale; elles exécutent leurs tâches sans être liées par des instructions.

L'indépendance des autorités d'exécution de tâches publiques n'est ainsi pas une indépendance au sens de l'article 30 Cst., mais une indépen- dance par rapport aux instructions de l'administration centrale.

A.

La forme juridique

Les autorités fédérales indépendantes d'exécution de tâches pnbliques peuvent donc soit être rattachées administrativement à l'administration, soit être intégrées dans une entité autonome.

L'instrument classique pour les autorités fédérales indépendantes est celui de l'établissement autonome de droit public, qui est une organisa- tion administrative disposant d'un ensemble de moyens (en personnel et en matériel) affectés durablement à l'exécution d'une tâche déterminée, consistant en général à fournir des prestations".

La Confédération dispose à cet égard d'un très large choix, qui a été rappelé par le Conseil fédéral dans son rapport sur l'externalisation et la gestion des tâches de la Confédération. La forme de l'autorité indépen-

66 LOGA - RS 172.010.

67 BELLANGER (n. 1) pp. 247-248.

68 RS 172.010.1

69 PIERRE MooR, Droit administratif, Vol. III, « L'organisation des activités admi- nistratives - Les biens de l'Etat », Berne, 1992, p. 67.

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Les autorités fédérales d'arbitrage et d'exécution de tâches publiques

dante rattachée à l'administration doit être employée lorsque l'autorité nécessite une certaine indépendance mais que l'octroi d'une autonomie juridique n'est pas conseillée au niveau de l'entité - par exemple en rai- son d'une taille insuffisante - ni au niveau du regroupement de plusieurs entités - par exemple en raison d'interdépendances indésirables ou d'ab- sence de potentiel de synergies 70. Si le choix doit se porter sur une en- tité autonome, le Conseil fédéral préconise l'utilisation de la forme de l'établissement de droit public autonome car la Confédération peut éla- borer le droit organisationnel de l'entité en fonction des besoins. Les autres formes juridiques, en particulier celle de la société anonyme de droit privé devrait être réservée aux entités qui fournissent la majorité de leurs prestations sur le marché, qui remplissent les conditions néces- saires à leur autonomie économique et dont l'activité ne relève pas de la puissance publique 71.

En définitive, le choix entre une entité d'exécution de tâches publiques autonomes et une entité indépendante rattachée à l'administration ne s'effectue pas avec des critères impératifs; le législateur dispose, au contraire d'une très grande marge de manœuvre. En pratique, plusieurs formes juridiques ont ainsi été mises sur pied.

1. Les entités dotées de la personnalité juridique

L'Institut suisse des produits thérapeutiques (Swissmedic) et l'Institut fédéral de la propriété intellectuelle (IFPI) sont des autorités d'exécution de tâches publiques qui ont été instituées sous la forme d'établissements de droit public, doté de la personnalité juridique (art. 68 de la loi fé- dérale sur les médicaments et les dispositifs médicaux du 15 décembre 200072 et art. 1 de la loi fédérale sur le statut et les tâches de l'Institut fédéral de la propriété intellectuelle du 24 mars 199573).

Ces deux établissements ont des compétences étendues (art. 2 UPI et art. 2 LPTh) et peuvent prendre des décisions au sens de l'article 4 PA (art. 16 et 66 LPTh, art. 30 de la loi fédérale sur la protection des

70 Rapport du Conseil fédéral sur l'externalisation et la gestion de tâches de la Confé- dération (Rapport sur le gouvernement d'entreprise), FF 2006 7799, p. 7834.

71 Rapport sur le gouvernement d'entreprise (n. 70) pp. 7834-7835.

72 LPTh - RS 812.21.

73 LIPI - RS 172.010.31.

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(17)

marques et des indications de provenance du 28 août 199274, art. 50 ss de la loi fédérale sur les brevets d'invention du 25 juin 195475 et art. 24 ss de la loi fédérale sur la protection des designs du 5 octobre 200176).

Leur autonomie dans ce contexte est garantie par la loi (art. 1, al. 2 UPI et art. 68, al. 3 LPTh), si bien qu'ils peuvent notifier des décisions sans recevoir d'instruction de la Confédération. Ces deux entités, bien qu'exécutant des tâches publiques, doivent s'autofinancer (art. 1, al. 3 UPI et art. 68, al. 3 LPTh).

Il existe également un exemple où la Confédération a employé la forme de la société anonyme pour une autorité chargée d'exécuter des tâches publiques. L'article 40 de la loi fédérale sur l'aviation du 21 décembre 1948 (LA) 77 autorise ainsi le Conseil fédéral à confier le service civil et le service militaire de la navigation aérienne, en tout ou en partie, à une société anonyme d'économie mixte sans but lucratif dont la majorité du capital appartient à la Confédération et dont les statuts sont approu- vés par le Conseil fédéral. C'est ainsi que la société Skyguide, Société Anonyme Suisse pour les Services de la Navigation Aérienne civils et militaires, a été crée avec pour but: «fournir des prestations dans le domaine de la navigation aérienne civile et militaire, dans les secteurs qui lui sont attribués par la Confédération".

2. Les entités indépendantes rattachées à l'administration

La majorité des autorités indépendantes d'exécution des tâches publiques sont toutefois rattachées à l'administration. Il en va ainsi du Préposé fédéral à la protection des données et à la transparence, qui est rattaché administrativement à la Chancellerie fédérale, mais dont l'autonomie est garantie (art. 26, al. 2 de la loi fédérale sur la protection des données du 19 juin 1992 78). Le même système existe pour le Contrôle fédéral des finances qui est rattaché administrativement au Département fédéral des finances, mais dont l'autonomie et l'indépendance sont explicite- ment garanties par la loi (art. 1, al. 2 de la loi fédérale sur le Contrôle

74 LPM - RS 232.11.

7\ LB! - RS 232.14.

76 LDes - RS 232.12.

77 RS 748.0.

78 LPD - RS 235.1.

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fédéral des finances du 28 juin 1967"). Il en va enfin de même pour le Bureau d'enquête sur les accidents d'aviation (art. 25 LA) et le Service d'enquête sur les accidents de transports publics (art. 15 LCdF80), dont l'indépendance est également garantie par le législateur (art. 8, al. 1 de l'ordonnance relative aux enquêtes sur les accidents d'aviation et sur les incidents graves du 23 novembre 1994'1; art. 15 LCdF et art. 3, al. 4 de l'ordonnance sur les déclarations et les enquêtes en cas d'accident ou d'incident grave survenant lors de l'exploitation des transports publics du 28 juin 200082).

Toutes ces autorités sont ainsi rattachées administrativement à l'admi- nistration, mais exécutent leurs tâches, principalement des enquêtes, de manière indépendante. Elles n'ont ainsi pas à recevoir d'instructions de l'administration centrale (art. 8, al. 2 LOGA).

Il arrive aussi que des entités disposent d'une grande autonomie sans toutefois être une véritable autorité indépendante. C'est le cas du Sur- veillant des prix, qui est nommé par le Conseil fédéral et qui relève du Département fédéral de l'économie publique (art. 3, al. 1 et 2 de la loi fédérale concernant la surveillance des prix du 20 décembre 198583).

Le législateur a toutefois explicitement refusé de lui accorder une indé- pendance au motif qu'il" est une partie de la politique économique de l'Etat ,,84, tout en relevant qu'une grande autonomie lui est accordé car il n'est soumis qu'à la haute surveillance du département85

B. Une synthèse

Il ressort des différentes autontes exammees que la creatIOn d'une entité avec une personnalité juridique n'est pas employée, au premier chef, pour garantir l'indépendance d'une autorité. Plusieurs autorités importantes, avec des compétences d'enquêtes, comme par exemple le

79 LCF-RS 614.0.

80 RS 742.101.

81 OEAA - RS 748.126.3.

82 OEATP - RS 742.161.

83 LSPr - RS 942.20.

84 Message du Conseil fédéral du 30 mai 1984, FF 198411 781, pp. 797-798.

85 Message du Conseil fédéral (n. 84) pp. 797-798.

101

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Contrôle fédéral des finances ou le Bureau d'enquête sur les accidents d'aviation, sont ainsi rattachées administrativement à l'administration alors que la loi leur garantit une indépendance d'action.

En revanche, les autorités qui ont été créées sous la forme d'établisse- ment public l'ont avant tout été pour des motifs économiques; le légis- lateur souhaitant amener l'IFPI et Swissmedic à s'autofinancer". Dans son rapport sur l'externalisation, le Conseil fédéral a d'ailleurs confirmé que l'autonomie juridique n'était pas indispensable pour garantir l'indé- pendance et que le choix de l'entité autonome devait, avant tout, se faire sur des critères rationnels comme la synergie ou la taille critique". La doctrine relève en outre que le choix d'une entité autonome ne garantit pas, à elle seule, une indépendance effective de l'autorité, qui doit être examinée de cas en cas Bi.

En définitive, la forme juridique n'offre que peu d'indication sur l'in- dépendance. C'est bien la loi qui va garantir cette indépendance et la pratique qui doit la confirmer. Une autorité soumise à forte pression risque en effet bien, en cas de doute, d'interpeller, formellement ou in- formellement, l'autorité politique avant de prendre des décisions aux conséquences importantes. A titre d'exemple, l'Autorité fédérale de sur- veillance des marchés financiers (FINMA), qui est un établissement de droit public autonome (art. 4, al. 1 de la loi sur l'Autorité fédérale de surveillance des marchés financiers du 22 juin 2007"), dont l'indépen- dance est garantie (art. 21, al. 1 LFINMA), a obtenu «l'autorisation» du Conseil fédéral avant de prendre une décision relative à la transmission de documents aux Etats-Unis en dehors de toute procédure d'entraide administrative:

«Die Vorinstanz [la FINMA] habe aile zustiindigcn Bundesbehiirden seit dem Frühling 2008 regelmiissig über die Bedrohungslage gegenüber

86 La mise en place de telles autorités ne s'est toutefois pas toujours faice sans pro- blème: voir le rapport de la Commission de gestion du Conseil d'Etat du 25 août 2004, «Problème lors de la mise en fonction de SWiSSlrl.edic et évaluation de la situation actuelle II, FF 2005 259.

87 Rapport sur le gouvernement d'entreprise (n. 72) p. 7834.

88 Voir VALÉRIE JUNOD, ( Les conflits d'intérêts dans l'administration, en particulier à l'OFSP et chez Swissmedic If, in: GUILLOD (éd.), Conflits dJintérêts dans le sys- tème de santé, Neuchâtel, 2009, p. 89 ss.

89 LFINMA - RS 956.1.

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Les autorités fédérales d'arbitrage et d'exécution de tâches publiques

der Beschwerdegegnerin und indirekt den Rechtssraat Schweiz Înfor- miert. Der Gesetzgeber habe sie im Rahmen von Art. 25 und 26 BankG verpflichtet, zurn GHiubigerschutz bei begründeter Besorgnis ernsthafter Liquiditatsprobleme Schutzmassnahmen anzuordnen, weshalb sie sich für den Edass der angefochtenen Verfügung entschieden habe. lhr Ent- scheid sei yom Bundesrat gutgeheissen worden, denn dieser habe sie mit Beschluss vom 19. Dezember 2008 darum ersucht, die zur Abwendung der drohenden Gefahren notwendigen Schritre zu unternehmen »90.

IV. Conclusion

Il existe de plus en plus d'autorités d'arbitrage - chargées de trancher des conflits entre particuliers en application du droit public - ou d'autorités indépendantes en charge de l'exécution de tâches publiques.

L'indépendance, souvent garantie par le législateur, ne l'est pas toujours en pratique. La majorité des autorités dites d'arbitrage n'est ainsi pas suffisamment indépendante pour se voir reconnaître la qualité d'autorité judiciaire. Il n'en demeure pas moins que leur importance est réeUe et va croissante. Est-ce une véritable volonté d'attribuer des compétences à des autorités indépendantes ou est-ce une manière pour les autorités po- litiques de transférer leur responsabilité à d'autres organes. La réponse à cette question est délicate et doit sans doute être faite tout en nuance.

Nous nous permettons à cet égard de renvoyer le lecteur à la contribu- tion de FRÉDÉRIC VARONE dans cet ouvrage.

90 ATAF du 5 janvier 2010 (B-l092/2009), p. 15.

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