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Représentation et perception du handicap Par les cadres de l’administration et les autorités Locales dans la ville de Brazzaville pp. 76-88.

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Academic year: 2022

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RÉSUMÉ

Les perceptions et représentations sociales admises de la personne en situation de handicap diffèrent pendant une période donnée et dans un espace culturel donné. Les manifestations de ces représentations se retrouvent à différents niveaux dans toutes les couches sociales qui souvent adoptent des attitudes de stigmatisation et d’exclusion et des pratiques de marginalisation à l’endroit des personne en situation de handicap. Elles infl uencent la considération, le respect et l’acceptation de la personne en situation de handicap en dépit des efforts déployés par les Organisations aussi bien internationales que nationales.

Aussi, les principes élémentaires de la promotion des droits sociaux, économiques, culturels et politiques des personnes en situation de handicap sont-ils souvent ignorés. A Brazzaville, les personne en situation de handicap subissent passivement les discriminations liées à leur défi cience et sont confrontées à d’énormes diffi cultés dans leur vécu quotidien. Quel est l’état des lieux, quelle action menée pour quel résultat ?

MOTS-CLÉS : PERCEPTIONS ET REPRÉSENTATIONS SO-

CIALES, PERSONNE EN SITUATION DE HANDICAP, COUCHES SOCIALES, DISCRIMINATION.

ABSTRACT

Allowed perceptions and social representations of the person in situation of handicap differ for a given period and in a given cultural space. The demonstrations of these representations are found at various levels in all the social layers which often adopt attitudes of stigmatization and of exclusion and practices of marginalization at the place of the person in situation of handicap. They infl uence the consideration, the respect and the acceptance of the person in situation of handicap in spite of the efforts made by the international Organizations as well as national. Also, the elementary principles of the promotion of the social, economic, cultural rights and policies of the person in situation of handicap are often ignored. In Brazzaville, the person in situation of handicap passively undergo discriminations related to their defi ciency and are confronted with enormous diffi culties in their lived daily. Which is the inventory of fi xtures, which action taken for which result ?

KEYWORDS : SOCIALPERCEPTIONSANDREPRESENTATIONS,

PERSON IN SITUATION OF HANDICAP, SOCIAL LAYERS,

DISCRIMINATION.

REPRESENTATION ET PERCEPTION DU HANDICAP PAR LES CADRES DE L’ADMINISTRATION ET LES AUTORITES

LOCALES DANS LA VILLE DE BRAZZAVILLE

Gertrude NDEKO Maître Assistant Université Marien Ngouabi

Brazzaville - Congo

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INTRODUCTION

La considération, le respect et l’acceptation de la Personne en Situation de Handicap (PSH)11 comme toute autre personne ayant les mêmes droits sont fonction des perceptions et représentations sociales admises pendant une période et dans un espace culturel donnés. Les manifestations de ces représentations se retrouvent à différents niveaux dans toutes les couches sociales qui souvent adoptent des attitudes de stigmatisation et d’exclusion et des pratiques de marginalisation à l’endroit des Personne en Situation de Handicap.

Dans la ville de Brazzaville, l’état des lieux sur la situation des Personne en Situation de Handicap révèle qu’en dépit des efforts déployés par les organisations aussi bien internationales que nationales, les principes élémentaires de la promotion des droits sociaux, écono- miques, culturels et politiques des Personne en Situation de Handicap ne sont pas appliqués. Ce non respect des droits des Personne en Situation de Handicap est dû à plusieurs facteurs tels que la faible connaissance des PSH de leurs droits, l’indisponibilité des informations sur la situation des PSH et l’accès diffi cile aux informations existantes, les informations ou perceptions erronées sur les PSH, l’inégalité dans les rapports sociaux… Pour cela, les PSH subissent passivement les discriminations liées à leur défi cience et sont confrontées à d’énormes diffi cultés dans leur vécu quotidien.

C’est donc dans la perspective d’augmenter la quantité, la qualité et l’accessibilité des informations pertinentes sur la situation des PSH, leurs droits et les associations qui les représentent, de trouver une solution durable à ces attitudes de marginalisation et d’exclusion à l’égard des PSH, que cette étude sur la représentation et la perception du handicap par les cadres de l’administration publique et des autorités locales est menée. En effet, l’approfondissement des connaissances et des représentations liées au contexte culturel est indispensable pour le processus d’intégration et de promotion des PSH.

L’approche méthodologique que nous proposons pour mener à bien cette recherche est à la fois qua- litative et participative.

1 Tout au long de cet article, nous utiliserons le terme PSH pour exprimer les Personnes en Situation de Handicap.

Pour une exhaustivité des informations secondaires à collecter, nous avons eu recours à la documentation de toutes les institutions aussi bien étatiques, internationales que non gouvernementales qui interviennent dans la promotion et la protection des droits des personnes handicapées et aux enquêtes de terrain.

Les enquêtes de terrain ont été menées dans les sept arrondissements de la ville de Brazzaville à savoir Makélékélé, Bacongo, Poto-Poto, Moungali, Ouenze, Talangaï et Mfi lou.

L’échantillon est composé des cadres de l’administration publique de toutes les couches socio-professionnelles. En effet, selon FERREOL G., (1995), dans le Dictionnaire de Sociologie, les cadres désignent les actifs dont les niveaux de diplôme et de revenus sont élevés. A ce titre, ils ont des responsabilités dans les sociétés et entreprises et disposent de pouvoir de décisions sur le plan national et local. La catégorie des autorités locales est composée de toutes celles qui exercent le gouvernement dans les préfectures, les communes, les cantons, les villages et les quartiers.

A partir de ces deux acceptions de cadres et d’autorités locales, un échantillon de 52 personnes constitué de 47 hommes et 5 femmes à été enquêté.

Ces 52 individus se composent de parlementaires, de directeur et d’attaché de cabinet, de directeurs de services et chefs de service, de magistrat, de médecin et d’assistant médical, de chefs de quartiers et leurs notables, d’ inspecteurs de l’éducation et de la jeunesse et de loisirs, d’enseignants et de sages-femmes.

L’outil utilisé pour la collecte des données primai- res est un guide d’entretien commun à toutes les personnes ciblées. Il est semi structuré en quatre rubriques à savoir la connaissance sur le handicap, la perception et représentation, les attitudes et les pra- tiques et enfi n les recommandations pertinentes.

Les données réunies nous ont permis un état des lieux sur la politique de l’insertion des PSH et de cerner dans quelle situation elles vivent.

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ETAT DES LIEUX SUR LA POLITIQUE DE L’INSERTION DES PERSONNES HANDICAPÉES (PH)

Le mot « handicap » vient du mot anglais « Hand in cap » (la main dans le chapeau). Il situe un dé- savantage pour l’individu en égard à son incapacité physique ou morale. Il existe plusieurs types de handicap : physique (sensoriel, moteur, la maladie chronique, etc.), mental (neuropsychologique, dys- lexie), primitif.

Dans cette rubrique, il s’agira de présenter toutes les actions menées aussi bien par l’Etat que par les organisations non gouvernementales en faveur des personnes vivant avec un handicap.

1.1 SITUATION DES PERSONNES HANDICAPÉES À BRAZZAVILLE

Selon les estimations, le nombre des PSH est estimé à 10 % de la population totale, ce qui représente environ 10.000 personnes handicapées à Brazzaville en 2008. Une frange importante de la population des PSH vit dans des conditions socio-économiques précaires et se retrouvent dans l’incapacité de subvenir à ses besoins humains essentiels. Cependant, pour leur insertion, certaines actions sont menées par des structures étatiques et non gouvernementales.

1.2. QUELQUES ACTIONS MENÉES À L’ENDROIT DES PERSONNES HANDICAPÉES AU CONGO

Sur le plan sanitaire, les maladies invalidantes sont prises en charge au centre hospitalier universitaire, dans les hôpitaux secondaires de la ville dotés de services de rééducation. De même, le Centre National d’Appareillage Orthopédique et de Rééducation fonctionnel offre des services d’appareillage, de rééducation et d’orthopédie.

Sur le plan éducatif, pour les personnes présentant des déficiences visuelles, il existe un institut ; les enfants présentant des défi ciences mentales sont pris en charge par un centre ; les personnes présentant des défi ciences auditives sont accueillies par une école spécialisée.

Sur le plan de l’emploi et des activités génératrices de revenus, des ONG, des bailleurs de fonds, des personnes physiques et des institutions privées

allouent à quelques personnes handicapées des subventions et des aides matérielles pour leur installation après une formation.

Cependant, en dehors de ces efforts fournis pour l’amélioration des conditions de vie des PSH, elles se retrouvent confrontées à des diffi cultés d’intégration et d’insertion sociale : inadaptation des lieux de travail aux différentes situations de handicap (escaliers, absence d’ascenseurs, portes étroites, diffi cultés d’accès aux moyens de transport, installations sanitaires inadaptées aux utilisations de certaines personnes handicapées, tant dans le secteur public que privé).

De plus, la gêne ou la compassion qu’inspire la PSH sur son lieu de travail, la diffi cile promotion dans la hiérarchie administrative, la réticence dans l’embauche de personnes en situation de handicap autant dans les secteurs public que privé, l’exclu- sion des PSH des écoles et instituts de formation inadaptée, l’inexistence de spécialistes capables de dispenser l’enseignement représentent quelques-uns des obstacles auxquels font face les PSH dans leur vécu quotidien.

La présentation des résultats est faite à partir des questions posées dans le guide d’entretien qui a servi à la collecte des informations. Il s’agit de rapporter pour chaque question les renseignements livrés par les personnes interviewées.

2. CONNAISSANCE DU HANDICAP AU CONGO

La connaissance du handicap par les cadres de l’administration publique et les autorités locales est évaluée par la défi nition et la typologie qu’ils ont données du handicap.

Le handicap comme une absence ou un manque d’un ou des membres et/ou des sens pouvant en- traîner des diffi cultés dans la réalisation de certaines activités. Elles le considèrent également comme une défi cience, une insuffi sance ou une limite au niveau des facultés physiques et intellectuelles. Ainsi, la personne handicapée est :

«Une personne limitée dans ses projets»

«C’est encore quelqu’un à qui il manque un organe pour mieux faire face à la vie» ;

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«C’est encore quelqu’un qui est défi cient sur le plan physique, qui a quelque chose de moins que les hommes normaux, quelqu’un dont un sens ne répond pas normalement».

Par contre, celui qui est en possession de toutes ses facultés et qui dispose de tous ses organes, membres et sens n’est pas handicapé. Certains utili- sent l’adjectif «normal» pour désigner cette catégorie de personnes.

2.1 LES CAUSES DU HANDICAP

A la question relative aux causes du handicap, deux approches dans les explications du handicap se dégagent. Il s’agit de l’approche traditionaliste d’une part et de l’approche moderne de l’autre.

L’approche traditionaliste est soutenue par quel- ques autorités locales et certains cadres. Selon cette approche, basée fondamentalement sur les croyan- ces culturelles (us et coutumes, religions…), la venue d’un enfant handicapée est interprétée comme :

- l’effet d’une malédiction ou la conséquence d’un acte posé par un parent proche ou lointain : le han- dicap d’un enfant nouveau-né est considéré comme une sanction divine due à la méchanceté d’un parent à l’endroit d’un tiers ;

- le non respect des traditions et interdits et l’infi délité de la mère : la relation entre la mère et l’enfant pendant la grossesse est dynamique, c’est- à-dire que chaque attitude ou maladie de la femme peut se transmettre à l’enfant. Aussi elle se doit de respecter un ensemble de règles tout au long de sa grossesse afi n de protéger son enfant des génies malveillants. En transgression des règles, la mère peut être tenue pour responsable d’un éventuel handicap de son enfant.

- le résultat d’un sort jeté par envoûtement ou par sorcellerie : la plupart du temps, cette situation est attribuée à la jalousie du sorcier qui veut rendre un compte à la famille de l’enfant, ou bien parce qu’il a vu l’avenir de l’enfant qui semble radieux.

- le retour d’un ancêtre handicapé ou pas : c’est ce que les personnes interviewées désignent par le phénomène de réincarnation.

- la visite d’un esprit/génie à la famille : au cours de la recherche des causes, dans les représentations

populaires, les handicaps sont parfois attribués à la malveillance des génies : soit parce qu’il y a eu une transgression d’un interdit du génie, soit parce que le génie voudrait qu’on lui fasse des cérémonies cultuelles.

- l’action de la volonté de Dieu.

Pour l’approche moderne (les cadres surtout), basée sur les résultats de la science (sciences biologiques, médicales…), la défi cience est consi- dérée comme une malformation ayant pour causes, plusieurs facteurs dont :

- l’absence des consultations prénatales ; - la carence nutritionnelle ;

- les maladies maternelles pendant la grossesse ; - la conséquence des tentatives d’avortement/

automédication ;

- la transmission du handicap par hérédité ; - la poliomyélite ;

- les erreurs médicales (accouchement, injection).

2.2LES TYPES DE HANDICAP

Trois catégories de handicap se distinguent dans notre secteur d’étude. Il s’agit de la défi cience physique, de la déficience sensorielle et de la défi cience mentale.

- La défi cience physique plus connue sous le terme de handicap moteur regroupe les paralytiques, les manchots, les boiteux, les estropés, les perclus et les lépreux ;

- La défi cience sensorielle par contre comprend les personnes mal et non voyantes ou aveugles, les borgnes, les personnes malentendantes ou les sourds et les muets ;

- La défi cience mentale pour sa part, se caractérise par une défi cience intellectuelle. Elle se compose des personnes atteintes de la trisomie, des fous, des défi cients mentaux et des aliénés mentaux.

Généralement, les enquêtés n’arrivent pas à mettre la différence entre défi cience mentale et défi cience psychologique. Ainsi, les «fous» relèvent, pour eux, de la même catégorie des personnes présentant une trisomie 21 communément appelé mongolien.

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De l’analyse des différentes défi nitions d handicap avancées, il ressort que les personnes interviewées ont une connaissance médicale de la notion du handicap. A travers les différentes appréhensions du handicap par les cadres et les autorités.

Rares sont ceux qui connaissent l’existence des instruments juridiques nationaux et internationaux qui protègent les PSH et promeuvent leurs droits.

Cette attitude qui fait passer au second plan les informations sur la situation des PSH n’a rien d’étonnant quand on sait la promotion des PSH, dans un contexte socio-économique général très diffi cile, n’est pas la première préoccupation des cadres et des autorités.

La représentation est considérée comme un élément essentiel dans la compréhension des déterminants des comportements et des pratiques sociales. Elle «fonctionne comme un système d’interprétation de la réalité qui régit les relations des individus à leur environnement physique et social, elle va déterminer leurs comportements ou leurs pratiques. La représentation oriente les actions et les relations sociales» (HERAUD M, 2005).

En réalité, dans la conception des cadres et des autorités locales ciblés par l’étude, le handicap est synonyme d’incapacité et de différence. Toutes les personnes interviewées ont tendance à assimiler la défi cience à l’ensemble de la personne et à la discréditer globalement. A cet effet, elles prêtent à la PSH des incapacités qui ne sont pas les siennes. En effet, elles sont dans la logique que quand un organe est affecté d’une défi cience, c’est tout l’organisme qui devient défi cient. Par exemple, on pense et agit comme si celui qui a des diffi cultés motrices est aussi immédiatement diminué sur le plan intellectuel.

Et malheureusement, c’est sur la base de cette représentation que les cadres de l’administration publique et les autorités posent leurs actes et opèrent leurs choix.

Dans le Préambule de la Convention relative aux droits des PH, il est fait allusion au Pacte International relatif aux droits économiques, sociaux et culturels (ECOSOC) et à celui relatif aux droits civils et politiques qui doivent être garantis à tous citoyens.

De même, les objectifs de la Politique Nationale de Réadaptation consistent d’une part à amener les pouvoirs publics et la communauté à prendre conscience du statut des personnes handicapées

dans le pays en vue d’améliorer la santé, l’éducation, la formation professionnelle et l’intégration économique des personnes handicapées et d’autre part à promouvoir l’insertion sociopolitique et économique des PSH. Cependant, dans l’analyse des propos des cadres et des autorités, il ressort clairement que les différents droits des PSH ne sont pas respectés conformément aux dispositions légales.

3. REPRÉSENTATION ET PERCEPTION SUR LE HANDICAP

Dans la conception de toutes les catégories de personnes ciblées par l’étude, le handicap est synonyme d’incapacité d’une part, et de différence d’autre part. De ce fait, pour 9 % d’entre elles, il n’est nullement souhaitable d’être un handicapé quel que soit sont degré contre 79 % qui redoutent la défi - cience visuelle (perte totale de vue) et la tétraplégie parce que ces défi ciences limitent énormément les actions et les rendent totalement dépendants des autres. Dans le même temps, 12 % des personnes enquêtées redoutent de leur part, le handicap mental puisqu’il constitue une gêne et une honte pour la famille et les personnes présentant cette forme de handicap s’insèrent diffi cilement dans la société.

A ces représentations s’ajoute celle relative au mariage puisqu’à la question «Pouvez-vous contracter le mariage avec une PSH ? » ou

« Accepteriez-vous de vous marier ou de marier un de vos enfants à une Personne handicapée ? », les réponses obtenues sont très divergentes.

La première réponse est un refus catégorique exprimé par 4,44 % des enquêtés et soutenu par trois types de raisons sociales et professionnelles que sont :

- «Je mène plusieurs activités et je suis membre de beaucoup d’associations ; je ne suis pas souvent à la maison ; je ne peux pas m’occuper d’elle».

- «Chez nous, on épouse une femme pour qu’elle serve l’homme ; mais au foyer, si je dois me mettre à servir la femme, je ne vois l’intérêt de l’épouser».

- Selon les chefs coutumiers : On ne doit pas se marier à une paralytique. A la cour du roi, il y a des invités et si la femme n’a pas les pieds, elle ne peut pas les recevoir. Peut-être que son handicap est une malédiction de sa famille ; si on l’épouse et elle donne naissance à un enfant qui devient handicapé».

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La seconde réponse, bien que positive, est conditionnée par le degré du handicap selon 47,3

% de l’échantillon. Cela signifi e qu’une personne en situation de handicap peut se marier dans la mesure où elle peut remplir l’ensemble des tâches qui lui incombent. S’il s’agit d’une femme, elle doit être en mesure de procréer et de s’occuper de toutes les tâches domestiques (nourriture, maisonnée, puiser de l’eau, piler, etc.). S’il s’agit d’un homme, il devra avoir une activité suffi samment rémunératrice pour qu’il puisse fi nancièrement prendre en charge la famille.

D’une manière générale et comme le déclarait une sage-femme : «Si son handicap ne l’empêche de me satisfaire sur tous les plans, je peux le prendre comme époux».

La troisième réponse qui est une réponse affi rmative est basée sur l’amour. Cette position exprimée par 48,26 % des personnes enquêtées est soutenue par les arguments suivants :

- «Tant qu’il y a l’amour, je l’épouse et nous ferons ensemble notre vie».

- «Si je l’aime, je ne vois pas ce qui va m’empêcher de l’épouser».

- «L’amour n’a pas de considérations physiques ; ma femme est boiteuse».

Au regard de ces différents points de vue exprimés par les uns et les autres sur le sujet, hormis la minorité qui a affi ché un refus catégorique à une telle union, toutes les autres ne voient pas la raison pour laquelle elles s’opposeraient au mariage de leur enfant avec une PSH.

En effet, on relève à travers ces attitudes, un clivage traditionnel, un respect du choix de l’enfant et des relations basées uniquement sur les sentiments.

Sans préjuger des faits, il est probable que le choix d’un(e) conjoint(e) pour un enfant devra avoir l’aval des parents. Dans ce cas, il est probable que les représentations traditionnelles dictent les décisions de ces derniers.

De ce fait, la réaction des parents à l’annonce de l’union de son enfant avec une personne handicapée est très contrastée comme le témoigne ce propos d’un parent : «Cela va être diffi cile à supporter à l’annonce ; mais c’est arrivé, il faut l’accepter et tout remettre à Dieu».

Le handicap est considéré dans ce cas comme une fatalité ; il est alors accepté avec résignation malgré la convention relative aux droits au mariage des PSH, en son article 23, reconnaît à «toutes les personnes handicapées, à partir de l’âge nubile, le droit de se marier et de fonder une famille sur la base du libre et plein consentement des futurs époux».

Généralement, les PSH n’ont pas la chance de se marie facilement parce qu’on pense qu’elles ne sont pas capables d’assumer leur responsabilité au foyer. Pour des considérations socio-économiques (la PSH, si elle est une femme, elle doit être en mesure de procréer et d’accomplir certaines tâches domestiques et si c’est un homme, il doit assumer ses responsabilités fi nancières), certains cadres et autorités locales ne peuvent permettre aux PSH de jouir de leur droit au mariage. Or, en milieu africain, le mariage est un désir ardent pour toute personne parce qu’il constitue l’un des facteurs fondamentaux d’intégration sociale.

La personne handicapée est une personne comme tout le monde. Il n’y a pas de différence entre les PSH et les personnes valides, car elles font tout comme nous et sont parfois très appréciées. Dans l’explication de la défi cience innée, les personnes interviewées ont réellement dit ce qu’elles pensent ; mais nous constatons qu’il existe un écart entre ce que les gens pensent et ce qu’ils disent pour «dire comme tout le monde» ou «pour ne pas choquer une idée exogène unique, concept de pensée unique».

Dans cette acception de l’analyse, l’accent est plus mis sur ce qui constitue l’essence de la personne handicapée et non sur les composantes extérieures.

Cette se traduit à travers les propos suivants : - «Si quelqu’un fait du mal à une PSH, les autres membres de la communauté réagissent ; cela veut dire qu’on la considère comme toute personne ayant des droits à respecter».

- «C’est le même sang qui coule dans nos veines ; elle tombe malade, elle a les mêmes droits».

- «Le handicap touche une partie du corps et n’altère pas l’humanité ou la personnalité ; elle a les mêmes droits».

A la question : « Si vous aviez un ami qui vient d’avoir un enfant handicapé, quels conseils pour- riez-vous lui donner ? » tous sont unanimes que les

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enfants handicapés sont comme les autres enfants et méritent d’être aimés et soutenus. Cette position est également soutenue par les propos ci-dessous :

- «Il faut le considérer comme tous les autres, l’aimer, le soutenir et lui donner la chance de réussir en le scolarisant».

- «Il faut l’amener à l’hôpital pour que les méde- cins l’examinent pour voir si le handicap peut être corrigé».

Vu sous cet angle, il n’est pas question de ne développer aucune crainte envers une personne handicapée à moins qu’elle ne soit un handicap mental, violent et agressif.

Les personnes handicapées sont généralement une charge pour leur famille et leur communauté puisque pour 89 % des enquêtés, ces PSH ne peu- vent absolument rien faire ou ne veulent rien faire.

En effet, il existe des PSH pour qui, leur handicap constitue un alibi pour être à la charge des autres et ne cherchent pas initier des activités susceptibles de leur générer des revenus. Les propos avancés par les interviewés pour justifi er leur position sont tous similaires à ceux-ci : «Quand la présence de la PSH exige que l’on soit tout le temps à son service et si les activités professionnelles des membres de la famille sont limitées, il arrive que ceux-ci se lassent parfois et les PSH pensent qu’elles sont des poids».

Seuls 11 % reconnaissent qu’une minorité des personnes handicapées ne sont pas des char- ges puisque selon eux, il y existe : «des non-voyants qui vont au champ pour travailler ; des paralytiques qui sont des informaticiens et d’autres qui suivent des formations et qui se prennent elles-mêmes en charge».

En voulant savoir si « les personnes handicapées se sentent marginalisées voire rejetées par leur so- ciété ? », deux tendances se dégagent :

La première est qu’elles ne sont ni prises en compte par les institutions professionnelles et édu- catives ni dans les constructions des édifi ces publics et privés. Car déclarent-ils :

- «Au niveau professionnel et éducatif, elles sont marginalisées parce qu’on pense qu’elles ne sont pas aussi effi caces que les personnes valides ; on ignore leur capacité en axant le raisonnement sur leur handicap».

- «Elles ont raison parce que la politique nationale d’intégration des PSH n’est pas mise en application».

- «Parce que l’accès aux structures est diffi cile aux PSH ; on construit les bâtiments comme si tout le monde était valide. Parfois aussi, le fait de les mettre dans des écoles spécialisées est une marginalisation».

- «Dans une certaines mesure, parce qu’on les voit comme des personnes inutiles à la société».

- «Parce que si vous allez dans certains milieux, on pense que la PSH a reçu une punition, une malédiction divine, ils sont en train de purger ce qu’ils ont fait et par conséquent on doit les marginaliser».

- «Car certaines fois, le droit à la parole leur est refusé, et on ne les considère pas pleinement».

La seconde tendance est qu’il existe des PSH qui se sont valorisées et qui se sont socialement et professionnellement insérées. En effet, il est re- connu que : «Quelqu’un qui travaille à l’école, a des diplômes ou qui a appris un métier, qui gagne sa vie ne peut jamais être marginalisé, à condition qu’il se marginalise lui-même. Il y a des PSH cordonniers, couturières, tailleurs qui sont appréciés et qui parfois ont plus de clientèle que les personnes valides» ; et que «Souvent, c’est eux qui sont complexés, et se mettent en retrait. Il y en a qui mettent leur handicap devant et deviennent exigeants».

Ces attitudes s’expliquent par le fait qu’elles ont intégré depuis des années les limites que la commu- nauté et la société leur ont attribuées. Peu à peu, elles se les ont approprié et se sentent donc diminuées, inu- tiles et en conséquence adoptent des comportements qui tendent à les marginaliser bien que la Convention relative aux personnes handicapées leur reconnaît, en son article 9, le droit d’accès aux infrastructures. Ce droit d’accessibilité s’applique aux bâtiments, à la voirie, aux transports et autres équipements intérieurs ou extérieurs, y compris les écoles, les logements, les installations médicales et les lieux de travail. Si les cadres posent les conditions sur les défi ciences des PSH avant de les recruter, nous déduisons qu’in- directement ils ne pensent pas à une adaptation des infrastructures environnementales pour faciliter aux PSH l’accès aux services en vue de l’exécution des tâches. On comprend alors pourquoi dans plusieurs services tant publics que privés, l’architecture est uniquement adaptée aux personnes valides.

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4. ATTITUDES ET PRATIQUES FACE AUX PERSONNES EN SITUATION DE HANDICAP : LA MISE EN APPLICATION DES DROITS

Les relations qu’entretiennent les Personnes en Situation de Handicap et les non handicapées dans leur lieu de travail (public comme privé) ne sont pas toujours cordiales. D’après les résultats obtenus, les deux groupes de personnes entretiennent de très bonnes relations professionnelles et sociales dans 67 % des cas contre 33 % des cas où des attitudes d’agressivité et de violence verbale à l’encontre des PSH ont été enregistrées.

Les responsables des services dans lesquels on a constaté l’absence de PSH ont avancé qu’il ne leur revient pas de recruter du personnel et que cela relève du domaine de l’Etat. Cette attitude de la part des cadres et autorités dénote une fuite de responsabilité pour se cacher derrière l’Etat que les personnes considèrent très souvent comme celui qui doit prendre en charge les personnes vulnérables («L’Etat sauveur»).

4.1 LES DROITS ÉCONOMIQUES, SOCIAUX ET CULTURELS

Ce sont des droits qui portent sur la qualité de vie menée par une personne et qui permettent donc à celle-ci de pouvoir satisfaire ses besoins humains essentiels.

Nous avons dans ce cas de fi gure, le droit à l’em- ploi. En réalité, les PSH sont quasi absentes dans les services publics et si elles y sont présentes, elles occupent souvent le poste de renseignements, d’opé- rateur de saisie, de secrétaire, d’aide comptable. Or, dans la mentalité professionnelle, ces activités sont considérées comme féminines et donc sans trop de considération. Certains cadres veulent embaucher les PSH sans aucune condition, cependant d’autres, pour les engager, ont posé des conditions qui ne sont pas celles de compétences mais portant sur des capacités physiques. C’est une preuve que les PSH subissent la marginalisation par rapport à leur handicap. Pire, encore, certains pensent recruter des PSH parce qu’ils ont pitié d’elles. Dans cette situation, on ne tient pas compte de ce qu’est la personne mais plutôt de ses défi ciences et limites. C’est cette per- ception qu’on met en exergue pour le recrutement.

Dans ces circonstances, la personne handicapée est complètement dévalorisée. Et d’ailleurs, on constate que, même si les cadres interviewés se disent prêts à engager des personnes handicapées, ceci reste trop souvent au niveau du discours. En effet, dans la pratique, leurs conceptions et représentations, qui considèrent la PSH comme diminuée et donc limitée, constituent des obstacles pour le recrutement des PSH. Il y a contradiction entre leurs discours, leurs attitudes et leurs actions. Or, pour les personnes handicapées, l’exercice d’une activité professionnelle représente un facteur important de survie, d’autono- mie, de reconnaissance au sein de sa famille et de sa communauté. En travaillant, la personne handicapée joue un rôle et acquiert un statut social ; à partir de cela, elle est reconnue comme membre actif de la société. Mais lorsque la PSH n’a pas d’activité, elle se sent doublement marginalisée : d’abord par le fait de son handicap et ensuite par le fait qu’elle n’ait pas de statut social conféré par l’occupation d’un poste.

Même sur le plan social, les PSH sont laissées pour compte lorsqu’il y a certaines activités sociales, sportives et communautaires dans les quartiers et villages. Pour les activités communautaires dans les quartiers, certains jugent qu’il est gênant d’inviter les PSH à y participer ; ils sont peinés parce qu’ils pensent que les associer aux activités est une sorte de corvée qui leur est imposée. Ainsi, déclarait une sage- femme : «Nous préférons les laisser tranquilles car nous sommes parfois gênés quand nous les voyons en train de travailler avec d’énormes diffi cultés. Nous manifestons d’égards à leur endroit».

Toutefois, certains affi rment que les PSH sont impliquées dans les manifestations des fêtes nationales et traditionnelles par la participation aux défi lés et aux danses folkloriques respectant ainsi, leur droit à la participation à la vie culturelle. La non implication des PSH dans les activités culturelles n’est qu’une suite logique des représentations que les cadres et les autorités se font du handicap ; parfois on les considère comme des gens qui doivent réaliser des programmes élaborés sans leur participation.

Le fait de décider à la place des PSH et de ne pas les impliquer dans les activités est une violation fl agrante du droit à la participation reconnu par la loi à tous les citoyens. On mesure une insertion ou une «non insertion» à partir de la participation de l’individu à des activités socialement valorisées et à la place occupée au sein du système social.

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Dans les représentations, on pense que la PSH a reçu une punition et une malédiction ; elle est en train de purger ce qu’elle ou ce que ses parents ont fait et par conséquent on doit la marginaliser, on a peur de s’approcher d’elle. Nous pensons que cette attitude est contradiction avec la Convention Internationale qui recommande d’«encourager et de promouvoir la participation, dans toute la mesure possible, des personnes handicapées aux activités sportives et récréatives qui leur soient spécifi ques et d’y participer, et, à cette fi n, encourager la mise à leur disposition, sur la base de l’égalité avec les autres, de moyens d’entraînements, de formations et de ressources appropriés ; et de faire en sorte que les personnes handicapées aient accès aux lieux où se déroulent des activités sportives, récréatives et touristiques».

Bien que la présence de Personnes handicapées dans un groupe social ne constitue pas une gêne pour 76 % des enquêtés, qui ont déclaré : «Non, on n’est pas gêné » mais « on est plutôt animé de sentiment de pitié quand on voit la personne handi- capée surtout dans des situations déplorables», 24

% éprouve de la pitié et se sentent gênés face à leur

«impuissance devant sa situation».

Concernant les enfants handicapés, ils sont tous unanimes à n’avoir aucune gêne à les aborder ou à les laisser les toucher en faisant référence à leur statut de père ou de mère de famille et qu’ils comprennent le langage d’un enfant quel que soit son état. Les propos ci-dessous tenus à ce sujet le démontrent :

- «Si c’était mon enfant, cela n’allait pas me gêner.

Je vais plutôt l’accueillir».

- «En approchant, certainement il a trouvé que je peux l’aider en quelque chose ; je pense que je vais l’écouter et lui apporter une solution».

Sur le plan professionnel et de recrutement à un poste de travail, les critères de recrutement dépen- dent du type de travail à faire.

84 % des personnes enquêtées acceptent de recruter une PSH si le travail à exécuter est celui de bureau. Lorsqu’il s’agira de recruter un secrétaire, un opérateur de saisie, un comptable ou un aide comptable, ou une personne pour une tâche qui ne nécessite pas de déplacement, les cadres et les

autorités préféreraient la PSH. A cet effet, un cadre Agronome déclare : «Si c’est pour le secrétariat, la PSH est préférée ; mais si c’est pour le terrain où il faut aller traverser les buttes et contrôler les cultures des paysans, la PSH est défavorisée».

De façon générale, seule les personnes souffrant de la défi cience motrice sont privilégiés dès que l’on évoque le handicap en situation professionnelle. En effet, pour eux, les personnes présentant des défi - ciences visuelles et auditives sont déjà exclues de la fonction publique et par conséquent leur problème d’emploi ne se pose pas.

Selon 11 %, le poste à pourvoir est lié aux in- convénients que le poste en question peut avoir sur la PSH. C’est donc sur ce critère qu’elle sera embauchée.

Les 5 % restants ont exprimé leur refus catégo- rique pour d’éventuel recrutement de la personne handicapée justifi ant leur point de vue par la lenteur et le manque d’effi cacité dans la réalisation des tâ- ches dues à la défi cience. Ils soutiennent leur thèse par le propos suivant : «La personne handicapée n’est pas très prompte dans l’accomplissement de ses tâches».

Il faut noter que ceux qui acceptent de recruter la PSH estiment le faire pour plusieurs mobiles :

- par pitié et pour l’aider ;

«Parce qu’elle a eu des diffi cultés pour réussir et parce que j’ai pitié des PSH, elle sera en première position».

«Sur le plan social et humanitaire, la préférence irait à la PSH ; il faut compatir avec elle» selon une enseignante interviewée :

- pour sa conscience professionnelle et sa pré- sence effective au bureau.

«Une PSH est bien pour l’administration, elle est plus consciencieuse que la personne valide qui peut quitter son poste à tout moment», déclarait un Proviseur de Lycée.

«Ma préférence irait à la PSH car si elle arrive au bureau, ce n’est qu’à la fi n qu’elle part».

- pour promouvoir les PSH et encourager les autres PSH qui sont en train de fréquenter.

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A ce niveau intervient l’égalité des chances.

Quand la majorité des cadres et des autorités disent être animés de sentiments de pitié à la vue des PSH en train de mendier dans la rue et aux feux tricolores, nous pouvons comprendre que selon eux, les PSH ne pouvant rien faire, ne peuvent pas bénéfi cier du principe de l’égalité de chances. Elles méritent pitié et doivent être traitées avec charité, soins et assistance ; elles doivent vivre de l’aumône ou de la mendicité. C’est aussi une manière de les stigmatiser et de les considérer comme des «incapables». Ces sentiments de pitié et de charité envers les PSH sont renforcés par des enseignements religieux qui incitent les fi dèles à faire des dons et aumônes aux PSH. Ces dons sont pour ceux qui le font source de bénédiction. Les cadres et les autorités, étant tous des fi dèles des religions traditionnelle, chrétienne, musulmane, ils ne peuvent ne pas appliquer cette recommandation divine.

Cette représentation se prolonge par la mentalité des communautés selon laquelle la personne han- dicapée est un «incapable» et par conséquent, elle est une charge pour la famille et la société. Et si les personnes interviewées partagent ce sentiment, c’est qu’elles ont aussi adopté la représentation sociale selon laquelle la PSH n’est capable de rien et qu’il faut tout lui faire. Mais, il est une réalité qu’il ne faut pas négliger à savoir que la prise en charge d’un enfant handicapé à Brazzaville peut être un poids étant donné la situation économique de certaines familles. Parfois, ces familles se retrouvent seules face aux diffi cultés afférentes à la situation de l’enfant, les structures de soutien étant quasi inexistantes. Toutefois, cette attitude n’est pas à interpréter comme un dénigrement de l’enfant handi- capé, mais comme le simple constat d’une réalité bien pesante pour ces familles.

Dans les rues de la ville de Brazzaville comme partout ailleurs dans les autres pays d’Afrique subsa- harienne, on croise dans la circulation et surtout au niveau des feux tricolores, des personnes handicapées qui mendient. Face à cette réalité des villes africaines et spécialement de Brazzaville, trois types de sentiment animent les personnes enquêtées. Il s’agit de la pitié et de désolation, de la révolte et un sentiment mitigé.

Les sentiments de pitié et de désolation exprimés par 43 % des enquêtés se dégagent à travers les déclarations suivantes :

- «Cela me fait pitié. La mendicité est liée à l’état de la personne handicapée. On comprend et on fait des gestes», s’exprimait un Agroéconomiste.

- «J’ai toujours le temps de donner une pièce aux PSH. Parfois il m’arrive de me mettre à leur place et de me dire mendier n’est pas facile ; et si on arrive là, c’est qu’on n’a plus d’autres possibilités».

Alors que celui de la révolte est exprimé par 22 % d’entre eux se résument par les trois décla- rations ci-après :

- «Cela m’énerve : des gens qui peuvent être utiles à la société préfèrent s’exposer dans la rue pour mendier».

- «Il y en a qui peuvent bien travailler mais préfè- rent rester au bord de la route. Certains mettent tout sur leur handicap. Cela fait la honte de la famille. Il y en a qui sont bien pris en charge à la maison mais préfèrent aller mendier».

- «La mendicité n’est pas humaine. Quel que soit le handicap, l’homme doit se débrouiller pour manger.

Aucun handicap ne justifi e la mendicité».

Compte tenu du type de handicap, certaines personnes interviewées déclarent qu’elles comprennent les PSH qui mendient mais ne les excusent pas (cas des non-voyants). Cependant, elles fustigent l’attitude des autres catégories de PSH qui s’adonnent à la mendicité. C’est à ce niveau qu’interviennent les sentiments mitigés évoqués par 35 % et qui se lisent à travers les déclarations suivantes :

- «Cela dépend du handicap : il y en a qui peuvent travailler, ceux-là sont des paresseux ; mais certains ont véritablement besoin d’aides à l’instar des non- voyants».

- «Il existe deux catégories de PSH : il y en a qui sont capables de travailler, je suis furieux contre elles lorsque je les vois en train de mendier», répondait une des personnes interviewées.

Pour ce qui concerne les décisions à prendre en faveur des personnes handicapées, l’éducation, la formation professionnelle et l’intégration professionnelle sont les idées forces qu’ont déclaré les enquêtés. Ils les ont exprimées en ces termes :

- «La première décision c’est que les PSH qui ont un diplôme et qui ont appris un métier soient recrutées et la deuxième, que celles qui ne sont

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pas qualifi ées soient formées pour préparer leur intégration», propos d’un Inspecteur Central du Trésor.

- «Je vais décider en première position de la scolarisation gratuite et construction de gymnases pour PSH et deuxièmement œuvrer pour l’intégra- tion socioprofessionnelle à raison de 1/5 des places disponibles», répondait un Directeur Régional de la Jeunesse et des Sports.

- «D’abord, les soins gratuits à toutes les PSH et ensuite l’intégration professionnelle de toutes les PSH ayant un diplôme», s’exprimait une sage- femme.

Dans la mesure où certains enquêtés sont dans les mêmes services avec les PSH et se côtoient fré- quemment, leurs sujets d’échange ont souvent trait aux activités à mener dans le service. Pour d’autres sui vivent avec les PSH à la maison et parfois ce sont leurs propres parents, enfants, neveux et nièces, les échanges ont trait à tous les problèmes quotidiens et donc de la vie.

Pour les autorités locales par contre, en l’occurrence les chefs de quartier, ils ont la possibilité de parler avec les PSH quand ces dernières se rendent chez eux pour des problèmes ou pour demander de l’aide.

La représentativité des personnes handicapées à un grand poste administratif tel que la mairie ou le parlement (Assemblée Nationale) est très partagée.

77 % des personnes interrogées sur ce sujet acceptent de voter pour une PSH si elle remplit les conditions d’éligibilité, si son programme est cohérent et convaincant et si elle est capable de défendre les intérêts de la population. Toutes les réponses évoquées s’apparentent à celles-ci :

- «Si le programme est bien présenté, la politique pertinente et réaliste, je lui donne ma voix».

- «Oui, l’essentiel c’est qu’elle remplisse les conditions. Tout le monde est libre de se positionner comme il veut. Parmi elles, il y en a qui sont effi caces».

- «Cela dépend de sa compétence, de sa popularité et de son dynamisme. Si elle est capable de défendre les intérêts de la population».

Lorsque quelques cadres et autorités acceptent de mettre leurs enfants dans les mêmes établisse- ments que les PSH, on comprend qu’ils approuvent la nouvelle thématique émergente de l’éducation inclusive : le droit d’être intégré dans les structures ordinaires.

Par contre, il y en a aussi qui proposent des structures spécifi ques comme les seules solutions à la situation des enfants handicapés. Et pourtant, la convention des droits des PSH recommande que tous œuvrent pour que «les personnes handicapées puissent, sur la base de l’égalité avec les autres, avoir accès, dans les communautés où elles vivent, à un enseignement primaire inclusif, de qualité et gratuit, et à l’enseignement secondaire» (Art. 24).

En principe, l’évolution qu’a connue la notion du handicap devrait permettre aux cadres et aux auto- rités de commencer par adopter des attitudes posi- tives à l’endroit des PSH. Or, la réalité est tout autre chose. Ceci nous fait dire avec HERAUD M., qu’il existe un mouvement paradoxal dans la conception de la PSH, puisque d’une part, la société a tendance à maintenir à l’écart les personnes handicapées (dévalorisation de l’autre, manques, incapacités, défi ciences…), et d’autre part, elle a tendance à œuvrer à leur réintégration dans les rapports sociaux (égalité des chances, respect de la différence, droit à la participation…). Nous sommes confrontés ici à une situation sociale et psychologique.

Alors que pour 33 %, la PSH n’est pas habilitée à être maire ou député parce que sa défi cience la limite dans l’accomplissement des tâches. Par ailleurs, selon certaines autorités locales traditionnelles, le handicap constitue un obstacle pour quelqu’un d’oc- cuper des postes de direction, d’être représentant de toute une population. Certaines de leurs réponses sont les suivantes :

- «Non, parce que le maire ou le député doit avoir la facilité de déplacement pour aller à la rencontre des populations».

- «Non, parce qu’il n’a pas de force. Le député doit visiter les localités de sa circonscription, mais une PH n’est pas capable de le faire».

S’il ya un point où les PSH se sentent intégrées, c’est le plan de la réligion.

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Bien que les enquêtées pratiquent différentes religions dont la religion chrétienne (48 %), la religion musulmane (24 %) et la religion traditionnelle (28 %).

Elles ont toutes déclaré qu’il est vivement recommandé, dans leurs différentes religions, de venir en aide aux personnes nécessiteuses parmi lesquelles se trouvent les PSH

Selon les adeptes de la religion traditionnelle, «il est conseillé d’avoir une attitude de solidarité envers les PH surtout quand elles nous visitent, peut être que c’est un esprit qui s’est transformé pour venir nous voir. C’est une bénédiction» ; au moment où celles de la religion musulmane affirmaient que

«c’est même une nécessité d’aider les PSH, c’est une bénédiction».

4.2 LES DROITS CIVILS ET POLITIQUES : LE DROIT D’ÉLIGIBILITÉ

La représentation négative sur les PSH ne permet pas de les nommer à des postes de décision ou de les élire comme maires et députés. En disant qu’ils ne peuvent pas donner leur voix à une PSH qui veut être maire ou député, certains cadres et autorités sont en train de violer les droits politiques des citoyens qui sont libres et égaux devant la loi et à ce titre sont éligibles et électeurs. Alors qu’il est demandé aux Etats de «faire en sorte que les personnes handicapées puissent effectivement participer à la vie politique et à la vie publique sur la base de l’égalité avec les autres, que ce soit directement ou par l’intermédiaire de représentants librement choisis, notamment qu’elles aient le droit et la possibilité de voter et d’être élus».

Cette attitude trouve son explication dans la représentation qui identifi e toute la personne handicapée à sa défi cience en lui prêtant même des capacités qu’elle n’a pas : quelles sont les raisons valables et convaincantes qui empêchent une personne handicapée motrice ou sensorielle de devenir maire ou député ?

A la suite de l’analyse des données collectées, il apparaît qu’il existe des cadres et autorités locales qui ont une appréhension négative des droits des PSH. Il convient d’engager des actions à l’endroit de cette cible pour améliorer leur vision du handicap et partant, changer leurs attitudes et pratiques envers les personnes handicapées.

Hormis ces aspects qui relatent les conceptions négatives qu’ont les autorités locales et les cadres du

handicap, il convient de noter quelques représenta- tions qui sont des facteurs favorables constituant des bases pour la stratégie de sensibilisation à l’endroit des populations.

En effet, les autorités locales et les cadres recon- naissent des droits fondamentaux aux PSH à savoir :

- le droit au mariage et à constituer des foyers : à part certains qui ont dit non ou posé des conditions, on enregistre un nombre non négligeable qui accepte d’épouser une PSH ;

- le droit au travail : même si les personnes inter- viewées veulent offrir aux PSH une certaine catégorie d’emploi, il est à reconnaître que d’autres n’ont pas posé de conditions ; en tous les cas, il existe une prédisposition à accueillir des PSH dans des servi- ces. Nous supposons qu’avec les sensibilisations, il peut avoir des transformations de mentalités chez les autorités locales et les cadres ;

- le droit à l’éducation : l’intérêt que tous les interviewés ont porté à l’éducation scolaire et à la formation professionnelle est un indicateur sur lequel on peut bâtir des éléments de sensibilisation en la faveur des PSH ;

- le droit d’éligibilité : une grande partie d’inter- viewés a accepté de voter pour une PSH si son programme est convaincant ; c’est aussi un point important qui peut faciliter ou encourager les efforts de réadaptation des PSH.

CONCLUSION

Les attitudes d’exclusion et de marginalisation qui ont été relevées chez les cadres et les autorités sont consciemment ou inconsciemment engendrées par des représentations sociales. La mission a constaté une insuffi sance d’information chez les cadres et autorités locales. Tous les propos tenus et toutes les pratiques adoptées par les personnes interviewées ne peuvent être compris que dans la logique de cette insuffi sance d’information.

En effet, il peut être surprenant d’obtenir ces résultats auprès d’une population enquêtée issue des cadres et des autorités locales. Ceci est une preuve que les «croyances traditionnelles» sont encore très présentes à Brazzaville, même si elles sont sensiblement en diminution. Ces croyances font partie des consciences collectives des Brazzavillois, mais ne

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sont pas en soi un obstacle aux changements. A cet effet, la mission a constaté la présence d’une bonne volonté chez certaines personnes interviewées pour contribuer aux processus d’intégration des PSH.

Les recommandations qu’ils ont faites prouvent clairement cette volonté et pour cela, il convient de développer des actions en synergie avec ces autorités et cadres pour susciter leur adhésion à la politique nationale d’inclusion.

BIBLIOGRAPHIE

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