• Aucun résultat trouvé

Comment accompagner les patients obèses dans un processus de changement à long terme?

N/A
N/A
Protected

Academic year: 2022

Partager "Comment accompagner les patients obèses dans un processus de changement à long terme?"

Copied!
7
0
0

Texte intégral

(1)

Article

Reference

Comment accompagner les patients obèses dans un processus de changement à long terme?

LOCATELLI, Loïc, et al.

Abstract

Il est illusoire de penser perdre du poids de manière efficace en agissant uniquement sur la diététique ou l'activité physique. Pour perdre du poids de manière satisfaisante et pour maintenir cette perte de poids, il faudrait davantage s'orienter sur des modifications du mode de vie, à savoir des changements de comportement sur plusieurs axes. A travers des exemples concrets illustrant un patient obèse voulant perdre du poids, nous verrons quelles compétences celui-ci doit acquérir pour atteindre son objectif et quels outils le thérapeute peut utiliser pour l'aider.

LOCATELLI, Loïc, et al . Comment accompagner les patients obèses dans un processus de changement à long terme? Revue médicale suisse , 2016, vol. 12, p. 584-90

Available at:

http://archive-ouverte.unige.ch/unige:99744

Disclaimer: layout of this document may differ from the published version.

(2)

Comment accompagner

les patients obèses dans un processus de changement à long terme ?

Il est illusoire de penser perdre du poids de manière efficace en agissant uniquement sur la diététique ou l’activité physique.

Pour perdre du poids de manière satisfaisante et pour maintenir cette perte de poids, il faudrait davantage s’orienter sur des mo- difications du mode de vie, à savoir des changements de compor- tement sur plusieurs axes. A travers des exemples concrets illus- trant un patient obèse voulant perdre du poids, nous verrons quelles compétences celui-ci doit acquérir pour atteindre son objectif et quels outils le thérapeute peut utiliser pour l’aider.

How to support obese patients in a long term process of change ?

It is illusory to think losing weight effectively by acting only on diet or physical activity. To lose weight satisfactorily and to maintain that weight loss, we should move more on lifestyle changes, namely changes in behavior on several axes. Through concrete examples of an obese patient wanting to lose weight, we will see what skills he must acquire to achieve its objective and what tools the therapist can use to help.

IntroductIon

Ces dernières dizaines d’années, de nombreuses méthodes de traitement de l’obésité ont émergé de façon concomitante à l’augmentation de la prévalence de celle-ci dans nos sociétés.

Concernant les traitements conservateurs, à savoir non chi- rurgicaux, de nombreuses méthodes d’amaigrissement ont été développées. Tant dans le domaine médical que non médical, on peut retrouver n’importe quel régime drastique déséquilibré ainsi que d’innombrables programmes de réentraînements physiques intensifs. Difficile alors pour un patient souffrant d’obésité, mais aussi pour le médecin, de s’y retrouver. Qu’en est-il de l’état des connaissances médicales actuelles ?

Approches multIdIscIplInAIres versus régImes « sImples »

Dans une méta-analyse datant de 2014, Johns et coll.1 ont com- paré les programmes de perte de poids se ciblant sur la diété-

tique ou l’activité physique séparément de ceux se ciblant sur les deux axes. Ils démontrent que les programmes combinés comprenant des modifications de comportement à la fois sur la diététique et l’activité physique sont les plus efficaces pour perdre du poids sur douze mois.

De plus, une autre méta-analyse 2 datant de la même période indique que ces mêmes programmes sont également plus ef- ficaces pour maintenir cette perte de poids sur le long terme, entre 12 et 24 mois.

Ces études confirment qu’une approche plus globale que des régimes diététiques restrictifs est indiquée dans le cadre d’un patient obèse souhaitant perdre du poids. Ce processus peut sembler long, flou et contraignant, tant pour le patient que pour le médecin.

En effet, le patient obèse est abreuvé de messages contradic- toires concernant une cure amincissante miracle, voire des pilules amaigrissantes. En France, l’Agence nationale de sécu- rité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (ANSES) a émis des recommandations en matière de régimes hypocaloriques sévères. Selon l’ANSES, les risques liés aux régimes concernent des perturbations osseuses, musculaires, hépatiques et rénales, des modifications profondes du méta- bolisme énergétique ainsi que des perturbations psychologi- ques.3 Ces mêmes régimes restrictifs peuvent induire des troubles du comportement alimentaire.

D’autre part, le médecin peut se sentir inconfortable avec un pa tient souhaitant perdre du poids sans réaliser les nom- breuses modifications comportementales que cela devra engendrer.

Pour aider le praticien dans cette démarche, plusieurs orga- nisations ont rédigé des guidelines au fil du temps. Par exemple, la Société américaine de l’obésité et le Collège amé- ricain de cardiologie ont sorti un ensemble de guidelines structurées (figure 1) pour pouvoir s’y retrouver.4 Dans celles-ci, on retrouve des recommandations très pra tico- pratiques (mesure de l’indice de masse corporelle, évalua- tion des facteurs de risque cardiovasculaires et des compli- cations de l’obésité) combinées à des recommandations ciblé es sur les modifications du mode de vie (comprehensive lifestyle intervention), la diététique et l’activité physique. En revanche, il n’y a pas d’information sur comment accom- pagner au mieux un patient obèse dans ces processus de changement.

Drs LOÏC LOCATELLI a, ZOLTAN PATAKY a, CATHERINE JOLY a et Pr ALAIN GOLAY a Rev Med Suisse 2016 ; 12 : 584-90

a Service d’enseignement thérapeutique pour maladies chroniques, Centre collaborateur de l’OMS, Département de médecine communautaire, de premier recours et d’urgences, HUG, 1211 Genève 14

loic.locatelli@hcuge.ch | zoltan.pataky@hcuge.ch | catherine.joly@hcuge.ch alain.golay@hcuge.ch

(3)

REVUE MÉDICALE SUISSE

WWW.REVMED.CH 23 mars 2016

586

enseIgnement thérApeutIque du pAtIent – une réponse Aux mAlAdIes chronIques

Dans la suite de cet article, nous évoquons via une vignette clinique, des situations que le praticien peut rencontrer au cours de la prise en charge d’un patient obèse.

Une méthode d’approche pour accompagner un patient obèse dans un processus de changement de comportement est l’en- seignement thérapeutique du patient (ETP). Selon la défini- tion de l’OMS, il s’agit d’une méthode permettant aux malades

d’acquérir et de maintenir des compétences qui leur permet- tent de gérer de manière optimale leur traitement afin d’arriver à un équilibre entre leur vie et leur maladie. Le but de l’ETP est de maintenir ou d’améliorer la qualité de vie des patients souf- frant de maladies chroniques.5 C’est une approche globale, centrée sur le patient et sur l’individu. Initialement élaboré dans le cadre du traitement du diabète,6 l’ETP s’est élargi de- puis plusieurs dizaines d’années à de nombreuses autres ma- ladies chroniques, notamment l’obésité. Il est actuellement reconnu comme la pierre angulaire du traitement de l’obésité.7,8 Appliqué au traitement de l’obésité, il permet au patient d’iden- fig 1 Guidelines pour le traitement du surpoids et de l’obésité chez l’adulte

FRCV : facteurs de risque cardiovasculaires.

(Selon les guidelines de l’AHA / ACC / TOS pour l’obésité de 2013 4).

Faire la connaissance

du patient

Evaluation Traitement

Conseils pour éviter la prise de poids ; adresser ou traiter les

autres FRCV

Interventions sur les habitudes de vie

uniquement ou avec des thérapies

adjuvantes

IMC ≥ 30 ou IMC ≥ 27 avec des comorbidités : possibilité d’ajouter une aide

pharmacologique pour renforcer les interventions

sur le mode de vie IMC ≥ 40 ou IMC ≥ 35 avec

des comorbidités : proposer une évaluation

par un chirurgien bariatrique pour renforcer les interventions sur le mode

de vie Poursuivre la prise en

charge des FRCV et des problèmes en lien

avec l’obésité

Suivi et maintien de la perte de poids

Traitement comportemental intensif ;

réévaluer et réadresser les facteurs contributifs médicaux ou autres ; considérer, ajouter ou réévaluer une pharmaco-

thérapie contre l’obésité et / ou référer à la chirurgie bariatrique

Intervention intensive sur le style

de vie Autres conseils sur le style de vie Mesurer le poids

et la taille ; calculer l’IMC

Mesurer le poids et calculer

l’IMC 1 x / an ou plus fréquemment

Perte de poids

≥ 5 % et amélioration suffisante des cibles

de la santé

Evaluer le besoin de perdre du poids :

IMC ≥ 30 ou IMC 25-29,9 avec des FRCV

Evaluer la disposition à modifier les habitudes de vie pour

perdre du poids

Déterminer la perte de poids, les objectifs de santé

et les stratégies d’intervention Evaluer l’histoire

du poids et les habitudes de vie Evaluer et traiter

les FRCV et les comorbidités en lien avec l’obésité

IMC : 18,5-24,5Non IMC : 25-29,9 : surpoids 30-34,9 : obésité I 35-39,9 : obésité II

≥ 40 : obésité III

IMC ≥ 25Oui

Non / pas prêt à changer

Oui, prêt Non / risque insuffisant

Oui

Non

Non Perte de poids

≥ 5 % et amélioration suffisante des paramètres de santé

Oui

(4)

et de gonalgies. Son obésité impacte fortement sa qualité de vie et son image de soi.

Concernant ses représentations, elle se considère en bonne santé, hormis son diabète, et affirme également qu’il est normal de prendre du poids avec l’âge. Elle at- tribue la majorité de sa prise de poids à un médicament prescrit par son ancien généraliste il y a dix ans. Elle dit actuellement ne pas comprendre son poids et manger en très petites quantités ; elle ajoute que, sans la prise de ce traitement par le passé, elle n’aurait pas de problème de poids.

Dans cet exemple, Madame X attribue son poids à une cause externe (médicament prescrit par son généraliste). On peut retrouver ce genre de représentations de la maladie où un pa- tient attribue une / des causes extérieures à ses problèmes. On parle alors d’un locus of control externe, qui peut rendre la perte de poids plus difficile.15 Dans ce cas, une recherche des motivations profondes à la perte de poids peut aider à impli- quer la responsabilité du patient dans son projet. L’évaluation de ses connaissances diététiques peut initier une remise en question de ses représentations.

Un travail autour de l’évolution de son poids en lien avec son histoire de vie (événements marquants) peut l’aider à interna- liser ses représentations. Pour ce faire, on peut utiliser un gra- phique permettant une réflexion autour des événements de vie et des corrélations entre les fluctuations de poids (figure 2).

fig 2 Graphique de l’histoire du poids : exemple de Madame X 12 ans : 63 kg, entrée dans la puberté. Poids dans la norme.

18 ans : 77 kg, entrée dans l’obésité. Prise de 14 kg en 6 ans qu’elle contextualise dans une période de stress liée aux études.

27 ans : 97 kg, fin de sa première grossesse. Période de stabilisation pondérale entre l’âge de 18 et 25 ans puis prise de 20 kg dans le contexte de son mariage et sa première grossesse.

29 ans : perte de 7 kg en quelques mois puis stabilisation : dans le contexte de l’accouchement et de son congé maternité.

38 ans : après sa deuxième grossesse : problème de santé pour lequel un traite- ment est instauré : prise de 10 kg, passage de la barre symbolique des 100 kg R problématique pour la patiente.

48 ans : poids maximal de 102 kg, après 10 ans de période de yo-yo comprenant des prises et pertes pondérales de ± 10 kg.

Périodes de prises pondérales importantes :

Etudes à l’adolescence

Mariage, première grossesse

Problème de santé

Yo-yo

Evènements de vie exprimés comme

« marquants » par la patiente :

Obtention de son diplôme

Ses 2 grossesses

Son problème de santé à 38 ans

Les 10 ans d’alternance de régimes / craquages

Temps (en années) 45 ans

30 ans 15 ans

63 kg IMC : 24,6 kg / m2

77 kg IMC : 30,1 kg / m2

90 kg IMC : 35,2 kg / m2

100 kg IMC : 39,1 kg / m2

102 kg IMC : 39,8 kg / m2 97 kg

IMC : 37,9 kg / m2 160

140 120 100 80 60 40 20 Poids (en kg) tifier ses comportements l’ayant amené à l’obésité afin de pouvoir envisager des modifications constantes à long terme.

Selon une revue de la littérature, l’ETP permet une améliora- tion nette des maladies dans 64 % des articles analysés.7 Ce- pendant, lorsque l’éducation est complexe et structurée, avec des indicateurs très précis et un groupe contrôle sans éduca- tion thérapeutique, l’ETP montre une grande efficacité dans toutes les maladies chroniques considérées.

Un programme de perte de poids mené dans notre service aux HUG a pu démontrer qu’une approche globale, multidiscipli- naire et basée sur l’ETP, peut être efficace chez 63 % des pa- tients.9

L’ETP est une approche pouvant être aussi utilisée dans un cabinet de médecine générale10 et son succès dépend à la fois de la motivation du patient et du médecin.11 A travers une série d’exemples que peut rencontrer un médecin généraliste face à un patient obèse souhaitant perdre du poids, nous pouvons voir comment l’ETP peut aider à faire face à la situation.

complexIté de l’obésIté

Un patient obèse venant consulter pour une perte de poids vient avec ses conceptions concernant son poids, ses expé- riences passées et ses attentes qui lui sont propres.

représentations du patient

Il est important d’explorer les représentations du patient sur son excédent pondéral,12 les facteurs responsables de son poids actuel et les effets attendus d’une perte de poids. Le soignant doit comprendre les représentations personnelles de son pa- tient sur l’obésité.

expériences passées du patient

Les expériences passées du patient par rapport à la perte de poids sont importantes.13 Par exemple, un régime alimentaire drastique ayant entraîné une perte de poids peut avoir marqué un patient obèse tant ce mode de vie ne correspond pas au sien.

Attentes du patient

Les attentes d’un patient obèse sont de plusieurs ordres.14 Elles peuvent s’orienter sur le processus de perte de poids en lui-même (la méthode utilisée, régime, efforts nécessaires), sur les objectifs de celle-ci en termes de chiffre, de temps ainsi que des bénéfices attendus (amélioration / guérison des com- plications de l’obésité, impacts psychique et social, etc.).

La vignette clinique ci-après illustre ces trois aspects.

Vignette clinique

Madame X, 48 ans, mariée, 2 enfants, comptable, vient consulter pour perdre du poids. Elle présente une obésité de grade II (indice de masse corporelle : 39 kg / m2) évo- luant depuis dix ans, compliquée d’un diabète de type 2

(5)

REVUE MÉDICALE SUISSE

WWW.REVMED.CH 23 mars 2016

588

Grâce à ce graphique, nous parvenons mieux à comprendre l’évolution de l’obésité de Madame X qui date de longtemps.

En discutant avec son médecin, celle-ci peut faire des liens entre certains événements de vie et ainsi réfléchir sur sa rela- tion avec son poids. Par exemple, le fait qu’elle ne décrive un problème de poids que depuis dix ans amène à penser qu’elle se considérait jusque-là en bonne santé. L’idée que l’obésité est une maladie n’est pas encore très répandue. Ce sont souvent les conséquences qui sont perçues comme problématiques et qui amènent le patient à consulter.14 Faire ressortir le côté pa- thologie métabolique de l’obésité peut modifier les représen- tations d’un patient et l’aider à mieux adhérer au traitement (tableau 1).

A ce stade, il est important de prendre du temps pour détailler ces périodes de régimes, comment la patiente explique la va- riation de son poids à une période de vie donnée et comment elle a émotionnellement vécu les restrictions. Des régimes trop drastiques peuvent être mal vécus, ce qui peut rendre la perte de poids angoissante et faire émerger des réticences au changement. A l’instar, des expériences de régimes sans effet sur le poids peuvent renforcer le sentiment d’impuissance face à l’obésité.

Il s’agit ici d’attentes irréalistes qu’il est important de recher- cher et de clarifier avec le patient. Ce point sera repris par la suite dans l’élaboration des objectifs thérapeutiques.

AccompAgnement du pAtIent dAns un processus de chAngement

L’entretien motivationnel (EM) est une approche thérapeu- tique largement utilisée depuis quelques dizaines d’années, d’abord dans le domaine des addictions, puis plus largement lorsqu’un changement de comportement est indiqué.

Un des buts de l’EM est d’aider le patient à explorer son am- bivalence face au changement, pour en favoriser secondaire- ment sa résolution.16 Tant l’EM que l’ETP utilisent l’émergence des motivations internes du patient comme catalyseurs de changement comportemental.

Un outil utilisé pour effectuer un état des lieux de la motivation à changer de comportement est la balance décisionnelle éla- borée par Janis et Mann. Il est utile à la fois pour le patient, pour explorer son ambivalence, et au médecin, pour repérer les obstacles aux changements. D’un côté de la balance sont élaborés les éléments favorisant le statu quo (avantage à ne pas changer de comportement) et de l’autre sont énumérées les moins bonnes choses au comportement actuel. Il s’agit d’un

outil intéressant pour donner aux patients une image complète de leur situation.16 Cette réflexion peut se faire également pour les avantages et les inconvénients à changer de compor- tement, afin d’induire une première réflexion autour du chan- gement.

En poursuivant la réflexion « Quelle serait la prochaine étape dans l’idée d’effectuer un changement ? » (figure 3), on peut renforcer l’expression de discours changement et donc la pro- babilité qu’un changement s’effectue.

renforcer lA motIvAtIon Au chAngement

La motivation au changement, interne au patient, peut être influencée par des éléments extérieurs et les entretiens avec le médecin peuvent stimuler le patient dans la réflexion du changement. Avant donc de commencer à aborder un change- ment avec un patient, il faut s’assurer que celui-ci soit prêt à l’envisager. Lorsque le patient est d’accord, il est utile d’ex- plorer trois éléments fondamentaux que sont l’importance du changement, la confiance en soi pour l’effectuer et enfin la dis- position au changement. Le médecin peut demander au patient de coter ces éléments entre 0 et 10 puis élaborer une réflexion sur les résultats. Premièrement, il faut demander au patient pour chaque élément la raison pour laquelle il a attribué cette

Elle a effectué ces dernières années plusieurs régimes alimentaires restrictifs et déséquilibrés avec une perte de poids de courte durée suivie d’une reprise de poids à chaque fois plus importante (phénomène de yo-yo).

Elle exprime son vécu ainsi :

« Mes régimes ont été à chaque fois plus difficiles à suivre »

« Je reprends à chaque fois davantage de poids, ce qui me décourage » Concernant ses attentes, elle demande à son médecin de lui prescrire un traitement lui permettant sans trop d’efforts de perdre 10 kilos en 2 mois.

Tableau 1 Vécu du poids de la patiente et de ses attentes

fig 3 Slalom motivationnel des deux balances décisionnelles Les « bonnes choses »

au comportement initial

« Je ne me prive de rien »

« Les restos avec mes amis sont importants pour moi »

« Je n’aime pas perdre du temps

à cuisiner » Les « moins bonnes choses »

au comportement initial

« Je suis essoufflée à cause de mon poids »

« Je ne peux pas m’habiller comme je le souhaiterais »

« J’ai peur pour ma santé »

Le coût du changement

« Je n’ai pas envie d’affronter un nouvel échec »

« Je ne sais pas comment je pourrais trouver du temps pour cuisiner autrement »

« Je devrais me couper de mes amis en refusant leurs invitations »

Le gain du changement

« Je serais moins essoufflée »

« Je pourrais m’habiller comme je le souhaite »

« Je m’aimerais mieux »

« Je serais fière de moi »

« Je pourrais peut-être me passer de mon médicament contre la tension »

« Si vous deviez vous engager dans un changement ? »

Quelle serait la prochaine étape dans l’idée d’effectuer un changement ?

(6)

cotation et non une inférieure, afin de renforcer l’importance du changement par les propos du patient lui-même (figure 4).

Par la suite, et là encore pour favoriser une réflexion dyna- mique sur le changement de comportement, le médecin peut questionner le patient sur les conditions qui augmenteraient cette cotation.

L’exemple de Madame X révèle que sa confiance en elle est fortement diminuée. Cet élément est pourtant fondamental pour entreprendre un changement de comportement et fait souvent défaut chez des patients ayant par le passé effectué sans succès d’autres tentatives de perte de poids. Cette con- fiance en soi doit être entretenue tout au long du processus et elle devrait être renforcée à chaque objectif réussi.17

des objectIfs thérApeutIques réAlIsAbles

Pour définir un objectif thérapeutique, il ne faut pas être d’em- blée trop ambitieux pour éviter la rechute. En effet, un objectif trop ambitieux, d’emblée voué à l’échec, ne servirait qu’à ren- forcer le sentiment d’échec.

L’acronyme SMART peut être utilisé pour élaborer un objectif thérapeutique.18 En effet, un objectif doit être Spécifique, Me- surable, Atteignable, Réaliste et défini dans le Temps. Bien entendu, celui-ci doit être en accord avec les attentes du pa- tient et acceptable pour le médecin. Il peut se déterminer en posant au patient la question : « Qu’est-ce-que vous pouvez faire qui ne vous demande pas trop d’efforts ? »

Le travail sur les objectifs peut se compliquer si le patient a tendance à raisonner sur un mode « tout ou rien ». Travailler la notion de flexibilité devient alors indispensable.

Dans le cas pratique de l’obésité, les deux axes de changement de comportement principaux concernent les domaines de la diététique et de l’activité physique.

1. Sur le plan diététique, on peut explorer les habitudes ali- mentaires du patient : par exemple, des aliments riches en énergie consommés fréquemment (soda, graisses et alcool).

2. Sur le plan de l’activité physique, on peut évaluer sa manière de bouger dans son quotidien (la sédentarité est définie par l’OMS comme une activité quotidienne inférieure à 30 mi- nutes de marche par jour).

Peu importe la démarche, le but étant de créer un déficit éner- gétique en fonction des objectifs pondéraux fixés d’environ 500 kcal / jour. Par exemple, en visant une perte de 5 à 10 % du poids corporel en six mois, créer un déficit énergétique d’en- viron 500 kcal / jour induira une perte d’1-2 kg par mois.19

référer Au spécIAlIste

Il est également utile de rechercher la présence de troubles du comportement alimentaire (grignotages, binge eating disorder, ou l’alimentation « émotionnelle ») pouvant venir entraver la réussite des différents objectifs thérapeutiques définis et né- cessiter une prise en charge spécialisée. Cependant, l’identifi- cation de ces troubles ainsi qu’un travail d’auto-observation du patient peut se faire avec l’accompagnement du généraliste.

conclusIon

A l’heure actuelle, il n’est plus recommandé de prescrire au patient obèse voulant perdre du poids un simple régime. Grâce à l’ETP, le médecin praticien peut aider son patient à identifier les changements comportementaux à effectuer pour perdre du poids et l’aider à s’autonomiser pour stabiliser le poids perdu en conservant les changements effectués.

Conflit d’intérêts : Les auteurs n’ont déclaré aucun conflit d’intérêts en relation avec cet article.

fig 4 Echelles

« Madame X, sur une échelle de 0 à 10, à combien évalueriez-vous l’importance de perdre du poids ? »

« Madame X, sur une échelle de 0 à 10, à combien avez-vous confiance en votre capacité de perdre du poids ? »

« Madame X, sur une échelle de 0 à 10, à combien vous diriez-vous être prête à perdre du poids ? »

« Pourquoi 1 et pas 0 ? »

« Qu’est-ce-qui ferait que ce chiffre augmente de1 à 3 ? »

« Pourquoi 9 et pas 7 ? »

« Qu’est-ce-qui ferait que ce chiffre augmente de 9 à 10 ? »

« Pourquoi 5 et pas 3 ? »

« Qu’est-ce-qui ferait que ce chiffre augmente de 5 à 7 ? » 0

Pas du tout important Extrêmement important

Extrêmement confiante Pas du tout confiante

Pas du tout prête Extrêmement prête

10

0 10

0 10

Pour un patient obèse, les régimes seuls devraient être proscrits en faveur d’une approche multiple individualisée

L’enseignement thérapeutique du patient est une approche-clé dans la prise en charge d’un patient obèse et peut être appliqué dans un cabinet de médecine de premier recours

Un soin important doit être porté à la définition des objectifs thérapeutiques afin de maximiser leur chance de réussite

implicaTions praTiques

(7)

REVUE MÉDICALE SUISSE

WWW.REVMED.CH 23 mars 2016

590

1 johns dj, hartmann-boyce j, jebb sA, Aveyard p for the behavior Weight mana- gement review group. diet or exercise interventions versus combined behavioral weight management programs : A syste- matic review and meta-analysis of direct comparisons. j Acad nutr diet 2014;

114:1557-68.

2 dombrowski su, Kittle K, Avenell A, Araujo-saores v, sniehotta ff. long-term maintenance of weigh loss with non-sur- gical interventions in obese adults. bmj 2014;348:g2646.

3 Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail. rapport d’expertise collective.

evaluation des risques liés aux pratiques alimentaires d’amaigrissement. france, 2011 : www.adssa.fr/documents/nut2009 sa0099.pdf

4 the obesity society and American college of cardiology / American heart Association task force on practice guide-

lines. based on a systematic review from the obesity expert panel, 2013. executive summary : guidelines (2013) for the management of overweight and obesity in adults. A report of the American college of cardiology / American heart Association task force on practice guidelines and the obesity society. jAcc 2014;63:2985-3023.

5 therapeutic patient education. report of a Who Working group. genève : Who, 1998.

6 Assal jp, mühlhauser I, pernet A, et al.

patient education as the basis for diabetes care in clinical practice and research. dia- betologia 1985;28:602-13.

7 * lagger g, pataky Z, golay A. efficacity of therapeutic patient education in chronic disease and obesity. patient educ couns 2010;79:283-6.

8 Albano mg, golay A, de Andrade v, crozet c, d’ Ivernois jf. therapeutic patient education in obesity : Analysis of the 2005–

2010 literature. educ ther patient / ther

patient educ 2012;4:s101-10.

9 ** gaillard s, barthassat v, pataky Z, golay A. un nouveau programme d’édu- cation thérapeutique pour les patients obèses. rev med suisse 2011;7:695-9.

10 * lasserre moutet A, chambouleyron m, barthassat v, et al. education théra- peutique séquentielle en mg. rev prat med gen 2011;869:32-4.

11 durrer-schutz d, schutz Y. comment aborder l’éducation thérapeutique d’un patient obèse ? la motivation du patient…

et du médecin : une des clefs du succès thérapeutique ? obésité 2009;4:204-9.

12 barthassat v, lagger g, golay A. repré- sentations, comportements et obésité. rev med suisse 2008;4:848-53.

13 ** charmillot m, lagger g, lasserre moutet A, golay A. comprendre l’expé- rience de vie des personnes obèses : un apport pour l’éducation thérapeutique du patient. rev med suisse 2011;7:686-90.

14 chambouleyron m, reiner m, gaillard

s, et al. education thérapeutique du patient obèse, une approche de la complexité.

obésité 2012;7:199-204.

15 gormanus gK, lowe Wc. locus of control and obesity. psychol rep 1975;37:

30.

16 lukasiewicz m, benyamina A, frenoy- peres m, reynaud m. l’entretien motiva- tionnel : 1. les bases théoriques. Alcoolo- gie Addictologie 2006;28:155-62.

17 golay A, lagger g, giordan A. motiva- ting patients with chronic diseases. j med person 2007;5:57-63.

18 Kirby peterson b rrt. leading with problem solving. can j respir ther 2010;46:

11-3.

19 quilliot d, roché g, mohebbi h, et al.

prise en charge de l’obésité de l’adulte.

press med 2010;39:930-44.

* à lire

** à lire absolument

Références

Documents relatifs

Il faut en consommer suffisamment pour s’assurer que vous disposez des ressources nécessaires afin de maintenir votre masse musculaire et satisfaire les divers

Nous savons que nos ancêtres, nos propres grands-parents et nos parents même, dépensaient des sommes colossales d’énergie pour gagner leur maigre pitance; alors

Utilisez une assiette plus petite, vous serez obligé de réduire les quantités, mais surtout, ces quantités vous paraitront malgré tout plus importantes et

Au sein des réseaux DEPHY, différentes modalités sont mises en œuvre pour accompagner les ingénieurs réseaux dans l’acquisition de nouvelles compétences : des formations à

Vérifier les performances d’un composant de la chaîne d’énergie (réducteur)dans une phase d’utilisation statique (à l’aide du

- si la dépendance est plus importante et pour les populations particulières évoquées, l’investissement des professionnels de premier recours de- mande plus de temps et

Grâce aux progrès de la recherche médicale, nous appréhendons de mieux en mieux les mécanismes qui entraînent tant de maladies et de morts prématurées, mais

Il est recommandé de perdre du poids de façon progressive car la perte de poids rapide était un facteur de risque pour un regain de poids plus rapide et plus important.. Cette notion