UNIVERSITÉ DU QUÉBEC
MÉMOIRE PRÉSENTÉ À
L'UNIVERSITÉ DU QUÉBEC
À
TROIS-RIVIÈRESCOMME EXIGENCE PARTIELLE DE LA MAÎTRISE EN PSYCHOLOGIE
PAR
ANNY BOISVERT-CLERMONT
ÉTUDE DE LA MÉMOIRE VERBALE
À
L'AIDE DU CYL T-CÀ
LA SUITE D'UN TRAUMATISME CRANIOCÉRÉBRAL LÉGERCHEZ DES JEUNES DE SEPT À QUINZE ANS.
Université du Québec à Trois-Rivières
Service de la bibliothèque
Avertissement
L’auteur de ce mémoire ou de cette thèse a autorisé l’Université du Québec
à Trois-Rivières à diffuser, à des fins non lucratives, une copie de son
mémoire ou de sa thèse.
Cette diffusion n’entraîne pas une renonciation de la part de l’auteur à ses
droits de propriété intellectuelle, incluant le droit d’auteur, sur ce mémoire
ou cette thèse. Notamment, la reproduction ou la publication de la totalité
ou d’une partie importante de ce mémoire ou de cette thèse requiert son
autorisation.
Ce document est rédigé sous la forme d'un article scientifique, tel qu'il est stipulé dans les règlements des études avancées (art. 16.4) de l'Université du Québec à Trois-Rivières. L'article a été rédigé selon les normes de publication d'une revue reconnue et approuvée par le Comité d'études avancées en psychologie. Le nom du directeur de recherche pourrait donc apparaître comme coauteur de l'article soumis pour publication.
Remerciements
Je désire expnmer ma profonde reconnaIssance à mon directeur de recherche, Monsieur Pierre Nolin, Ph. D., pour son soutien moral et technique. Sa présence et son aide ont permis d'agrémenter les moments difficiles de cette recherche.
Je remercie tout spécialement Stéphane Sylvestre, mon ami de cœur, pour m'avoir encouragée et soutenue tout au long de la réalisation de cette recherche. Je tiens aussi
à
remercier Christine Bertrand, Carol Hudon et Catherine Dagenais, des amis précieux. Christine et Carol ont eu la gentillesse de prendre le temps de lire mon mémoire avec un esprit critique et de me transmettre leurs commentaires. Catherine a eu l'amabilité de corriger mon sommaire en anglais.Finalement, j'exprime ma gratitude au FCAR pour son soutien monétaire. Cela m'a permis de me consacrer plus intensément
à
cette recherche.Table des matière
Sommaire
...
....
.
..
...
...
...
...
...
.
...
.
...
iv
Abstract
...
.
.
.
.
. . .
.
. .
.
. . . .
.
.
. .
.
.
.
. . .
. .
. . .
.
.
.
. .
. .
. .
. . .
.
.
.
. . .
.
.
.
.
. .
. .
. .
. .
.
..
vi
Contexte théorique
... .
.
.
. .
. .
.
. . .
. . .
.
. . .
.
.
.
.
.
.
. .
.
.
.
. .
. .
.
.
.
.
. .
.
.
. .
.
.
.
.
.
.
.
.
.
1Introduction
..
...
....
...
...
....
...
..
...
1Position du problème.
...
.. ..
..
...
..
...
.
3Controverse en regard du TCL
...
6Sensibilité des instruments de mesure
...
7Objectifs et questions de recherche
...
.
.
. . . .
. .
.
.
.. .
.
. . .. .
.
. . .
.
. . .
. . . ...
9Méthode
... ...
... ... ... ... ... ... ...
..
.
... ... ... ...
...
...
...
...
.
..
13
Sujets
...
.
...
...
13
Procédure et matériel
... . .
.
.
.
. .
. .
.
.
.
.
.
.
.
.
.
.
. .
.
.
.
.
. .
.
. .
.
.
.
. . . .
. .
. .
15
Analyses statistiques
...
...
...
..
...
...
...
16
Résultats
...
..
.
.. .
..
. .. .
..
.
.. .
.. .
.. .
..
.
..
.
.. . .. .. .. .. . .. . .. . .. .
..
.. .. .. .
.. ....
17
Apprentissage verbal
,
maintien
àlong terme et
récupération .
18
Stratégies de rappel
...
...
...
.
...
..
...
..
.
.
22
Indices sensibles aux atteintes cérébrales
... .
.
. . .
.
. . .
. .
. . .
.
.
. .
24
Discussion
...
...
...
..
.
30Apprentissage verbal
...
...
..
.
30M
amtlen
O. etrecuperatlon
" ....
...
..
... .
31S
trategtes mneslques
,
.
, .
...
....
...
...
....
...
....
...
...
.
33Indices sensibles aux atteintes cérébrales
... .
34Hypothèse d'une saturation de la mémoire de travail
... ..
35
Controverse en regard du TCL
...
....
....
....
...
.
36Sensibilité des instruments de mesure
...
..
... .
37Conclusion
...
...
...
...
.
38Remerciements
...
..
...
... .
41Références
..
...
..
...
.
...
..
...
..
.
42
Tableau 1
...
...
...
...
.
..
...
.
...
.
53
Sommaire
Cette recherche explore le fonctionnement mnésique verbal à l'aide du Test d'Apprentissage Verbal de Californie pour enfants (CVLT-C) chez 19 jeunes traumatisés craniocérébraux légers (TCL), au-delà de trois mois après leur accident et chez 19 jeunes sujets témoins. Les résultats obtenus soutiennent l'hypothèse qu'un TCL perturbe l'apprentissage de nouvelles informations, sans toutefois altérer le maintien et la récupération des informations une fois que celles-ci sont bien encodées et emmagasinées. Une hypothèse de saturation de la mémoire de travail, associée aux difficultés attentionnelles déjà documentées chez cette population, est émise pour expliquer cette perturbation. Il serait toutefois nécessaire de vérifier cette hypothèse dans de prochaines recherches. Par ailleurs, cette recherche a également démontré que les jeunes TCL, tout comme les jeunes sujets témoins, utilisent spontanément la stratégie de
regroupements sémantiques. Par contre, l'utilisation de cette stratégie s'avère moins efficace chez les jeunes TCL car elle est parasitée par la présence d'intrusions et de persévérations. En effet, il a également été mis en évidence qu'un TCL entraîne la production d'intrusions et de persévérations qui altèrent la qualité du rappel mnésique. De plus, une légère difficulté à discriminer
adéquatement les informations préalablement apprises lorsque celles-ci sont distribuées parmi des stimuli distrayants est observée. Finalement, cette
recherche souligne l'importance d'utiliser des instruments de mesure permettant une analyse subtile et détaillée dans l'évaluation des jeunes TeL.
Mots clés
:
Mémoire verbale, apprentissage, traumatisme craniocérébralléger,enfants, adolescents.
Abstract
The present study explores verballeaming processes using the California Verbal Learning Test for Children (CVLT-C). The subject group included a sample of 19 young mild head injury (MIll) at three months post injury
comparing with 19 young controls subjects. Results support the hypothesis that MIllleads to deficits in learning new information while maintaining encoding and information stocking abilities. A hypothesis of working memory saturation, associated with attention deficit documented before in this population, is
proposed. Further research would be necessary to documented this hypothesis. Moreover, this study has been demonstrated that young MIll spontaneously utilise semantic clustering strategie but this utilisation is less efficient than for young controls subjects because the presence of intrusions and perseverations. Indeed, this study have been indicated that MIll provides the production of intrusions and perseverations who alter the quality of recall. It has been also found that young MIll show little difficulty with discrimination of informations when many distractors are present. Finally, this study has been underlined the importance of tests who allow subtlety and analysing processes in the evaluation ofthis population.
Contexte Théorique
Introduction
La mémoire est une fonction cognitive très importante dans le
fonctionnement de tous les jours et dans les apprentissages scolaires des jeunes
(Mazau
,
1997
;
Reynolds &
Bigler
,
1997)
.
Cette recherche vise à explorer la
mémoire verbale chez les jeunes ayant subi un traumatisme craniocérébralléger
(TCL), au-delà de trois mois après leur accident.
Environ 62% de tous les traumatismes craniocérébraux surviennent chez
les jeunes
de24-81lS etmolns (Ileers~
1992).Ces traumatismes se subdivisent en
trois catégories
,
selon un continuum de sévérité
:
1) les TCL
,
2) les traumatismes
craniocérébraux modérés
,
et 3) les traumatismes craniocérébraux sévères.
Les TCL
sont toutefois beaucoup plus fréquents que les traumatismes des deux autres
catégories (Levin
&al.
,
1987
;
Mahalick, Koller
, &
Pleim, 1996
;
Moss
&Wade
,
1996; Schmidt &
Grady, 1995
;
Schunk
,
Rodgerson, &
Woodward, 1996).
Certains auteurs ont d'ailleurs constaté que plus de 90% des traumatismes
craniocérébraux sont classifiés TCL chez les jeunes de moins de quinze ans (Krauss
,
Fife
, &
Conroy, 1987
;
Masson, Maurette
, &
al.,
1996
;
Masson, Salmi
, &
al.,
1996
;
Savage
,
1991).
Un TCL est induit par un coup direct à la tête ou par une accélération et une
décélération rapides (Ale
x
ander
,
1995) qui produit une perturbation du
Fonctionnement mnésique verbal à la suite d'un TeL chez des jeunes 2
résultat se situant entre 13 et 15 à l'Échelle de coma de Glasgow. Au moins un des éléments suivants doit également être associé: perte de conscience de moins de 30 minutes, avec ou sans amnésie post -traumatique de moins de 24 heures, avec ou sans altération de l'état mental (confusion, désorientation ou obnubilation) au moment de l'accident (Mild Traumatic Brain Injury Subcommittee, 1993).
Malgré le qualificatif léger, les patients ayant subi un TCL devraient tous recevoir une attention médicale particulière (Schapiro & Sacchetti, 1993). Même si les résultats aux examens physiques, neurologiques et radiologiques se révèlent souvent normaux, il n'en demeure pas moins que des altérations
neurologiques subtiles peuvent exister (Boll & Barth, 1983 ; Johnson, 1992 ; Levin & al., 1987) telles des lésions axonales diffuses (Beers, 1992; Binder, 1986; Binder & Rattok, 1989; Dixon, Taft, & Hayes, 1993), des dérèglements au niveau des neurotransmetteurs (Dixon, Taft, & Hayes, 1993 ), ou des
dysfonctionnements électrophysiologiques (Ford & Khalil, 1996). D'ailleurs, des lésions microscopiques à la suite d'un TCL ont été documentées chez les rats (Binder & Rattok, 1989 ; Schmidt & Grady, 1995) ainsi que chez les humains (Rimel, Giordani, Barth, Boll, & Jane, 1981).
À la suite de lésions cérébrales, même lorsqu'il y a apparence d'un rétablissement complet, la clientèle pédiatrique est sujette à plusieurs séquelles discrètes (Klonoff, Low & Clark, 1977; Levin & Eisenberg, 1979). Les enfants ne sont pas moins vulnérables aux séquelles laissées par les accidents impliquant le
Fonctionnement mnésique verbal
à
la suite d'un TeL chez des jeunes 3cerveau comme le prétendait faussement l'ancienne croyance en la plasticité cérébrale (BoIl, 1983 ; Levin & Eisenberg, 1979; Middleton, 1989; Satz, Zaucha, McCleary, Light, Asamow, & Becker, 1997 ; Schapiro & Sacchetti, 1993). Or, malheureusement, aucun instrument de mesure n'a encore été développé pour établir avec certitude s'il y a présence ou absence de lésions diffuses à la suite d'un TCL (Ruff, Camenzuli, & Mueller, 1996). Dans la pratique, c'est par l'examen des fonctions cognitives que le clinicien peut contribuer à ce diagnostic. Plusieurs auteurs ont affirmé que certaines fonctions cognitives telles la mémoire, l'attention et la vitesse du traitement de
l'information pouvaient être altérées à la suite d'un TCL (Beers, 1992; Beers, Goldstein, & Katz, 1994 ; Dikmen & Levin, 1993 ; Mandel, 1989 ; Mathieu & Nolin (article soumis pour publication) ; Middleton, 1989; Packard, Weaver, & Ham, 1993). Conséquemment, un TCL peut perturber le développement cognitif des enfants et par extension, leurs relations interpersonnelles (Middleton, 1989 ; Schapiro & Sacchetti, 1993) et leur rendement scolaire (Hux & Hacksley, 1996).
Position du problème
Malgré que le TCL soit de loin le plus fréquent des traumatismes craniocérébraux, il est pourtant le moins bien compris (Dicker, 1989 ;
Segalowitz & Brown, 1991) et le moins étudié (Asamow, Satz, Light, Lewis, & Neumann, 1991). TI n'existe pas encore de consensus clair sur la nature et la durée des séquelles cognitives attribuables à un TCL (Leininger & Kreutzer,
Fonctionnement mnésique verbal
à
la suite d'un TeL chez des jeunes 41992 ; Newcombe, Rabbitt, & Briggs, 1993), ni sur les effets possibles de ces séquelles dans la vie de tous les jours (Masson, Maurette, & al., 1996).
Plusieurs questions demeurent donc sans réponse (Levin & al., 1987). Par
ailleurs, les séquelles provenant d'un TCL ne sont pas facilement détectables.
De plus, elles ne sont pas toujours prises au sérieux et elles sont souvent associées à des causes secondaires, telles que la paresse ou la perte de
motivation (Beers, 1992 ; Johnson, 1992). En ce sens, la Fondation nationale
des traumatisés crâniens a surnommé ce phénomène l'épidémie silencieuse
(Gouvier, 1986).
Pour l'ensemble des traumatismes craniocérébraux, les difficultés
mnésiques sont les séquelles les plus fréquentes chez les jeunes (Dalby & Obrzut, 1991 ; Jaffe & al. 1992) ainsi que chez les adultes (packard, Weaver, & Ham, 1993; Schapiro & Sacchetti, 1993). En ce qui concerne les traumas légers, ceux-ci perturbent surtout la récupération des apprentissages nouveaux
sans affecter les connaissances anciennes (Schapiro & Sacchetti, 1993). Ceci est
vrai pour l'adulte, mais la réalité de l'enfant est plus sévère. Chez l'enfant, le
TCL risque de réduire sa capacité à acquérir de nouvelles informations, alors
que ses connaissances sont déjà très limitées (Middleton, 1989) ou qu'elles sont
en voie de consolidation.
Malgré l'importance de la fonction mnésique durant la période de
Fonctionnement mnésique verbal
à
la suite d'unTeL
chez des jeunes 5jeunes (Asarnow, Satz, Light, Lewis, & Neumann, 1991 ; Ferron, 1991 ; Harris, 1996; Jaffe & al, 1992; Levin, Eisenberg & Benton, 1989). En général, les résultats obtenus auprès de la population adulte sont généralisés à la population pédiatrique. Pourtant, d'importantes différences distinguent ces deux
populations (Gulbranson, 1984; Satz & al., 1997) tant au niveau de l'étiologie que de la symptomatologie. Entre autres, les chutes représentent la principale cause de TeL chez les jeunes alors que chez les adultes les accidents de voiture prédominent (Masson, Salmi, & al., 1996; Segalowitz & Brown, 1991). Par ailleurs, la fréquence de l'épilepsie post-traumatique à la suite d'un TeL, ainsi que la détérioration secondaire de l'état de conscience, sans hématome
intracrânien, sont aussi beaucoup plus importantes chez les jeunes que chez les adultes (Snoek, Minder Houd, & Wilmink, 1984). Les plaintes personnelles de séquelles cognitives sont moins fréquentes chez les jeunes étant donné leur faible capacité d'introspection comparativement aux adultes (Mahalick, Koller, & Pleim, 1996; Masson, Salmi, & al., 1996). Enfin, puisque les connaissances et les stratégies cognitives préalablement acquises facilitent les nouveaux
apprentissages (Shaffer, 1996; Vasta, Haith, & Miller, 1995), les jeunes se retrouvent défavorisés comparativement aux adultes en raison de leurs acquis moins nombreux. Par conséquent, il s'avère pertinent et essentiel de vérifier directement auprès des jeunes quels sont les effets d'un TeL sur leur
Fonctionnement mnésique verbal
à
la suite d'un TCL chez des jeunes 6Controverse en regard du TeL
Les recherches sur le TCL ont débuté vers les années 1960 (Schapiro, Sataloff, & Mandel, 1993) auprès de la population adulte. Dès ce moment, une controverse s'est installée entre les chercheurs. En effet, il a été postulé qu'un dommage cérébral serait responsable des plaintes persistantes et des
manifestations comportementales et cognitives observées à la suite d'un TCL (Binder, 1986 ~ Binder & Rattok, 1989 ~ BoIl, 1983 ~ Boll & Barth, 1983 ~ Levin & Eisenberg, 1979 ~ Gronwall & Wright son, 1981 ~ Gulbrandsen, 1984 ~ Rimel, Giordani, Barth, BoIl, & Jane, 1981 ~ Winogron, Knights, & Bawden, 1984). En opposition, une autre hypothèse avance que la réaction émotionnelle face ~u TCL pourrait expliquer les séquelles remarquées (Gentilini & al., 1985) ou encore que ces difficultés seraient déjà présentes avant l'incident (Dikmen, McLean, & Temkin, 1986 ~ Rutter, Chadwick, Shaffer, & Brown, 1980).
Néanmoins, vers le début des années 1990, plusieurs chercheurs
s'intéressant à la population pédiatrique (Bassett & Slater, 1990 ~ Bijur, Haslum, & Golding, 1990 ~ Jaffe & al., 1992, 1993), ainsi qu'à la population adulte (Beers, Goldstein, & Katz, 1994 ~ Dikmen & Levin, 1993 ~ Dixon, Taft & Hayes, 1993 ~ Evans, 1992 ~ Guillemette & Rasile, 1995 ~ Hall & Bomstein, 1991a, 1991b~ Levin & al., 1987 ; Marsh & Smith, 1995), ont conclu leurs recherches en soutenant qu'un TCL peut produire de légères séquelles mnésiques au cours des jours ou des semaines suivant l'accident.
Fonctionnement mnésique verbal à la suite d'un TeL chez des jeunes 7
Aujourd'hui, une polémique sépare toujours les chercheurs (Satz & al., 1997). La persistance des séquelles mnésiques chez les jeunes, après deux ou trois mois, est réfutée par plusieurs (Asarnow, Satz, Light, Zaucha, Lewis, & McCleary, 1995 ; Jaffe & al., 1993) alors que d'autres soutiennent qu'elles perdurent même après quatre à cinq ans chez certains individus (Gross, Kling, Henry, Herndon, & Lavretsky, 1996; Roberts, Manshadi, Bushnell, & Rines, 1995).
Sensibilité des instruments de mesure
Les séquelles résultant d'un TCL, incluant les séquelles mnésiques, peuvent passer inaperçues lors des tests de mesure globale tels les tests d'intelligence (Goodman, 1989). Des déficits subtils peuvent être présents même lorsque les rendements obtenus se situent à l'intérieur des normes (Levin, Eisenberg, & Benton, 1989; Middleton, 1989). À cet effet, Zappala et Trex1er (1992) ont soutenu que plusieurs chercheurs devraient interpréter leurs résultats non pas comme une preuve de l'absence d'altérations mnésiques à la suite d'un TCL, mais bien comme le résultat de tests insensibles à la subtilité des troubles. Des séquelles mnésiques, même légères, peuvent entraver le fonctionnement habituel d'un individu et ce changement peut s'avérer significatif pour ce dernier (Lord-Maes & Obrzut, 1996). Par conséquent, le choix des instruments de mesure est une condition essentielle et déterminante dans l'étude de la mémoire auprès des individus ayant subi un TCL. L'importance d'aller au-delà des scores
Fonctionnement mnésique verbal à la suite d'un
TeL
chez des jeunes 8
globaux obtenus aux épreuves traditionnellement utilisées en neuropsychologie, et de pouvoir décrire les composantes d'une même fonction, est d'ailleurs clairement démontré dans les travaux de Mathieu et Nolin (soumis pour
publication) portant sur l'évaluation des processus attentionnels chez les jeunes TCL.
Cette recherche a utilisé le Test d'Apprentissage Verbal de Californie pour enfants (California Verbal Learning Test for Children :CVLT-C ~ Delis, Kramer, Kaplan, & Ober, 1994). Ce test a été construit pour mesurer
l'apprentissage verbal, ainsi que la mémoire verbale différée chez les jeunes. TI s'agit d'une liste (A) de 15 mots, appartenant à trois catégories sémantiques (vêtements, jouets, fruits), que l'expérimentateur doit lire au sujet à raison d'un mot à la seconde. Le sujet doit alors mémoriser la liste, puis la réciter à voix haute. Cette liste est présentée à cinq reprises, ce qui permet d'obtenir une courbe d'apprentissage. À la suite de ces cinq essais, une seconde liste (B) de 15 mots est présentée au sujet. Celle-ci est administré dans le but de créer de l'interférence avec la liste A et n'est présentée au sujet qu'une seule fois.
Immédiatement après, le sujet doit rappeler spontanément la liste A et ensuite la rappeler à l'aide d'indices catégoriels. Une vingtaine de minutes plus tard, le sujet est invité à redire les mots de la liste A selon les deux conditions
précédentes (rappels différés). Finalement, le sujet doit reconnaître les 15 mots de la première liste parmi 36 stimuli (tâche de reconnaissance). Cet instrument
Fonctionnement mnésique verbal
à
la suite d'un
TeL
chez des jeunes
9de mesure procure donc des indications sur les stratégies d'apprentissage et sur
la facilitation du rappel par des tâches indicielles et de reconnaissance. De plus,
il permet d'obtenir des indices sensibles aux atteintes cérébrales de différents
types telles les persévérations, les intrusions, l'interférence pro active et la
difficulté à discriminer adéquatement des informations préalablement apprises
parmi des stimuli distrayants. Or donc, le CVL T -C permet de mesurer plusieurs
habiletés présentes dans le fonctionnement mnésique des jeunes. La sensibilité
du CVLT-C a d'ailleurs été démontrée dans l'étude de plusieurs populations
pédiatriques tels les traumatisés craniocérébraux modérés et sévères (Yeates,
Blumenstein, Patterson, & Delis, 1995), les autistes (Minshew & Goldstein,
1993) et les jeunes ayant un myéloméningocèle (Yeates & al., 1995).
Objectifs et questions de recherche
La recension des écrits scientifiques permet difficilement de se
positionner clairement sur l'impact qu'un TCL peut produire sur le
fonctionnement mnésique des jeunes, trois mois après le trauma (Satz & al.,
1997). En effet, certaines lacunes méthodologiques des recherches sur le TCL
viennent altérer la consistance des conclusions de celles-ci (Beers, 1992; Dikmen &
Levin, 1993 ; Middleton, 1989; Satz & al., 1997). Entre autres, la définition du
TCL et les critères de sélection des sujets varient d'une recherche à l'autre. De plus,
les caractéristiques préexistantes des sujets ne sont pas toujours prises en
Fonctionnement mnésique verbal
àla suite d'un
TeL
chez des jeunes
10les sujets ayant subi un TCL à des traumatisés craniocérébraux sévères.
L'objectif principal de cette recherche est donc de vérifier si un TCL entraîne des altérations du fonctionnement mnésique verbal chez les jeunes, au-delà de trois mois après leur TCL. Cette recherche vise également à préciser si les difficultés potentiellement découvertes perturbent isolément ou
simultanément l'apprentissage verbal, le maintien de cet apprentissage ou la capacité de récupération des informations. En raison de l'aspect essentiellement exploratoire de cette recherche, il est jugé préférable de formuler des questions plutôt que des hypothèses de recherche. Cinq questions de recherche découlent de ces premiers objectifs:
QI : Les jeunes du groupe expérimental démontreront-ils un rendement significativement inférieur à celui du groupe témoin aux cinq essais du CVLT-C, représentant la capacité d'apprentissage?
Q2 : La constance des mots rappelés d'un essai à l'autre sera-t-elle équivalente chez les deux groupes, celle-ci étant un indice d'un apprentissage efficace?
Q3 : Le maintien des informations verbales à court terme, représenté dans le CVL T -C par la comparaison entre le cinquième essai et le rappel immédiat, sera-t-il équivalent chez les deux groupes? Q4 : Le maintien des informations verbales à long terme, représenté dans
Fonctionnement mnésique verbal
à
la suite d'un TeL chez des jeunes
11rappel différé, sera-t-il équivalent chez les deux groupes? Q5 : La capacité de récupération des informations, mesurée par la
comparaison entre le rappel immédiat et la tâche de
reconnaissance, sera-t-elle équivalente chez les deux groupes? Diverses habiletés caractérisent le fonctionnement mnésique et
optimisent la quantité et l'exactitude du rappel de l'information (Spreen, Risser, & Edgell, 1995). Par exemple, l'utilisation spontanée de stratégies mnésiques favorise un meilleur apprentissage (Van Der Linden, 1997 ; Vasta, Haith, & Miller, 1995). Ainsi, le second objectif de cette recherche vise à examiner deux stratégies mnésiques que le CVLT-C permet de mesurer.
li
s'agit de l'utilisation de regroupements sémantiques et de regroupements selon l'ordre. Le CVLT-C permet également de comparer les rendements des sujets lorsque des indices catégoriels favorisant l'utilisation de la stratégie de regroupements sémantiques sont mis à leur disposition. Trois questions de recherche s'ajoutent auxpremières :
Q6 : Les jeunes du groupe expérimental utiliseront-ils significativement moins de regroupements sémantiques que ceux du groupe témoin ? Q7 : L'influence des indices catégoriels donnés explicitement, mesurée
par la comparaison entre le rappel indicé et le rappel libre, sera-t-elle équivalente pour les deux groupes ?
Fonctionnement mnésique verbal
à
la suite d'un TeL chez des jeunes 12Q8 : L'utilisation de la stratégie mnésique de regroupements selon
l'ordre sera-t-elle équivalente chez les deux groupes? Finalement, le dernier objectif de cette recherche est d'examiner la présence de certains indices sensibles aux atteintes cérébrales de différents types
et pouvant altérer la qualité des apprentissages verbaux. Ces indices sont les
intrusions, les persévérations, la sensibilité à l'interférence pro active, de même
que la capacité à discriminer adéquatement des informations préalablement
apprises parmi des stimuli distrayants. Les dernières questions de recherche sont
donc les suivantes :
Q9 : Les jeunes du groupe expérimental effectueront-ils significativement
plus d1
intrusions que les jeunes du groupe témoin ?
Q10 : Les jeunes du groupe expérimental effectueront-ils significativement
plus de persévérations que les jeunes du groupe témoin ?
Q Il : La sensibilité à l'interférence pro active, mesurée dans le CYL T -C
par la comparaison entre le rappel de la liste B et le premier essai de la liste A, sera-t-elle plus élevée pour le groupe expérimental que pour le groupe témoin ?
Q12 : Les jeunes du groupe expérimental auront-ils plus de difficulté que
les jeunes du groupe témoin à discriminer adéquatement parmi des stimuli distrayants les mots appris préalablement ?
Fonctionnement mnésique verbal
à
la suite d'unTeL
chez des jeunes 13Méthode Sujets
Trente-huit jeunes de sept
à
quinze ans ont été recrutés selon des critères précis et ont été assignés selon le cas au groupe expérimental ou au groupe témoin. Le groupe expérimental (n = 19) était composé de Il garçons et de 8 filles ayant subi un TCL depuis trois à dix-huit mois (M = 7.82±
5.01). Fait à noter, la proportion plus élevée des garçons ayant subi un TCL comparativement aux filles est d'ailleurs rapportée dans plusieurs recherches (Mahalick, Koller, & Pleim, 1996 ; Mahalick, McDonough, & Levitt, 1996 ; Krauss, Rock, & Hemyari,1990). L'âge moyen pour le groupe expérimental était de Il ans 6 mois
±
2 ans 9 mois. Tous les sujets de ce groupe répondaient aux critères de la définition d'un TCL, établis par le Mild Traumatic Brain Injury Subcommittee (1993). Treize de ces 19 jeunes avaient un résultat de 15/15 à l'Échelle de coma de Glasgow, cinq avaient un résultat de 14/15 et un seul avait un résultat de 13/15.La sélection des jeunes du groupe expérimental s'est effectuée de deux façons : 1- soit par l'entremise des archives médicales du Centre hospitalier régional de Trois-Rivières, pavillon Ste-Marie, ou celles du Centre universitaire de santé de L'Estrie, 2- soit par l'entremise des intervenants de l'Institut de réadaptation en déficience physique de Québec, site Cardinal-Villeneuve. Un premier triage des sujets a été effectué en vérifiant les dossiers médicaux. Ce premier triage permettait de s'assurer du respect des critères diagnostiques et
Fonctionnement mnésique verbal à la suite d'un
TeL
chez des jeunes 14d'éliminer toutes complications médicales à la naissance et tous problèmes
connus d'ordre neurologique.
Compte tenu que certains chercheurs (Dikmen, McLean, & Temkin,
1986; Rutter & al., 1980) ont avancé que les séquelles retrouvées à la suite d'un
TCL ne seraient pas attribuables à celui-ci, mais à des difficultés déjà présentes avant l'accident, un second triage des sujets sélectionnés initialement a été
effectué afin d'éliminer les sujets présentant des difficultés prémorbides. Les
critères d'exclusion supplémentaires, vérifiés par un questionnaire de
renseignements remplis par les parents, correspondaient à un profil
développemental anormal, un redoublement scolaire, la fréquentation d'une
classe non régulière, un diagnostic de déficit de l'attention avec ou sans hyperactivité, une déficience intellectuelle ou tout autre trouble d'ordre
neurologique ou psychiatrique. Cette rigueur dans la sélection des sujets
procure une validité accrue en regard du lien entre le TCL et les résultats
obtenus dans cette recherche.
Le groupe témoin (n
=
19) était composé de Il garçons et de 8 filles,mais sans atteinte cérébrale. L'âge moyen de ce groupe était de Il ans 2 mois
±
2 ans Il mois. Un test t de Student a été effectué afin de comparer l'âge moyen
des deux groupes et aucune différence significative n'a été retrouvée (t(36) =
.31,p >.05). La sélection des sujets de ce groupe a été effectuée avec l'aide des
Fonctionnement mnésique verbal
à
la suite d'un TeL chez des jeunes 15enseignant(e)s ayant refusé de collaborer. Les critères orientant le jumelage étaient l'âge (± six mois), le sexe, le niveau académique, le rendement scolaire, le niveau socio-économique (selon trois niveaux : faible, moyen et élevé) et la dominance manuelle. Par ailleurs, les critères d'exclusion du groupe des jeunes TCL, vérifiés par le questionnaire de renseignements ont également été
appliqués aux sujets du groupe témoin.
Procédure et matériel
Une lettre expliquant la recherche et sollicitant une collaboration a été transmise
à
tous les sujets ciblés par un intervenant des milieux associés au projet. Après avoir obtenu l'autorisation écrite des parents, une vérification du dossier médical a été effectuée afin de permettre le premier triage. Une première rencontre avec les parents permettait de préciser la nature de la recherche, de répondre à leurs questions, de faire signer un consentement éclairé à participer à la recherche et de demander le bulletin scolaire de l'année en cours et celui del'année précédente. Deux rencontres d'une heure étaient prévues pour
administrer un ensemble de dix instruments de mesure. Le CVL T -C était
toujours présenté au début d'une des deux rencontres, de façon contrebalancée.
Ces rencontres se déroulaient à l'université du Québec à Trois-Rivières, à l'école que fréquentait le jeune ou à son domicile. Celles-ci nécessitaient un endroit calme, où l'expérimentatrice pouvait être seule avec le jeune.
Fonctionnement mnésique verbal
à
la suite d'un TeL chez des jeunes 16Analyses statistiques
Les analyses statistiques qui vont suivre comparent les deux groupes (sujets TeL et sujets témoins) sur la base d'analyses de covariance. Ainsi, l'influence potentielle de la variable âge a été extraite en raison du fait que celle-ci peut fortement être liée à la quantité de mots pouvant être mémorisés chez les jeunes (Shaffer, 1996; Vasta, Haith, & Miller, 1995). La courbe
d'apprentissage, l'influence du rappel indicé immédiat, l'influence de la tâche de reconnaissance, le nombre de persévérations et d'intrusions ainsi que les
interférences pro active et rétroactive ont été analysés statistiquement à partir des résultats bruts obtenus par chacun des sujets. Les autres variables ont été transformées en pourcentage pour permettre une comparaison des sujets indépendamment du nombre de mots qu'ils ont rappelés. Le tableau 1 présente les résultats moyens et les écarts-types des deux groupes pour l'ensemble des variables.
Fonctionnement mnésique verbal
à
la suite d'un TeL chez des jeunes 17Résultats
La présentation des résultats sera divisée en quatre sections. Les trois premières sections correspondent aux trois objectifs de cette recherche. Ainsi, la première section examine l'apprentissage verbal, la constance des mots rappelés d'un essai à l'autre, le maintien de cet apprentissage à court et à long terme ainsi que la capacité de récupération des informations
à
l'aide de la tâche dereconnaissance. La seconde section analyse les stratégies de regroupements sémantiques et de regroupements selon l'ordre utilisées spontanément lors de l'apprentissage verbal ainsi que l'influence des indices catégoriels donnés explicitement lors du rappel indicé immédiat. La troisième section examine la présence d'indices sensibles aux atteintes cérébrales de différents types et pouvant altérer la qualité des apprentissages verbaux. Ces indices sont les intrusions, les persévérations, la sensibilité à l'interférence pro active ainsi que la capacité à discriminer adéquatement des informations préalablement apprises parmi des stimuli distrayants. Finalement, la dernière section explore,
a
posteriori, un autre mode de correction utilisé pour analyser les regroupements sémantiques et les regroupements selon l'ordre. Cette dernière section explore également les effets de primauté et de récence relatifs à l'emplacement des mots dans la liste à apprendre.
Fonctionnement mnésique verbal
à la suite d'un TCL chez des jeunes
18Apprentissage, maintien et récupération des informations verbales Courbe d'apprentissage
La figure 1 présente les résultats moyens des deux groupes, en résultats bruts, pour les cinq essais d'apprentissage du CVLT-C. Comme cette figure en témoigne, les sujets TCL ont un rendement inférieur aux sujets témoins pour
l'ensemble des cinq essais. Ces résultats moyens ont été analysés à l'aide d'une
analyse de covariance à mesures répétées correspondant à un schème mixte
comportant deux groupes (sujets TCL et sujets témoins) et cinq essais. Comme
prévu, l'analyse révèle un effet significatif de l'âge en faveur des jeunes plus
âgés, F(1, 35) = 5.31,p< .05. L'analyse révèle également une différence
significative entre les deux groupes F(l, 35) = 14.32,p< .001 après extraction
de l'effet relié à l'âge. Le groupe témoin rapporte plus de mots que le groupe
des jeunes TCL. Une différence significative est aussi obtenue entre les essais
F( 4, 144) = 86. 17, p< .0001, mais l'interaction Groupe x Essai est non
significative, F(4, 144) = 1.02,p>.05. Cette analyse confirme donc que les
sujets TCL obtiennent des résultats inférieurs aux sujets témoins et que les deux
groupes profitent des essais pour s'améliorer.
Fonctionnement mnésique verbal à la suite d'un TCL chez des jeunes 19
Constance des mots rappelés d'un essai à l'autre
La constance est le nombre de mots identiques rappelés à deux essais
consécutifs. Étant donné que le CVL T -C comporte cinq essais, quatre
pourcentages de constance ont été calculés. Pour ce faire, le nombre de mots identiques d'un essai à l'autre a été divisé par le nombre total de mots rappelés à l'essai subséquent, puis multiplié par cent. Ces pourcentages de constance ont été soumis à une analyse de covariance à mesures répétées correspondant à un schème mixte bifactoriel2 x 4 (Groupe x Constance). Cette analyse indique que la variable âge n'a aucun effet sur la constance F(l, 23) = .00,p>.05. Cette analyse révèle également que les deux groupes sont significativement différents F(l, 23) = 5.76,p< .025 et qu'il y a un effet d'un essai à l'autreF(3, 72) = 5.73, p< .001. Toutefois, et il n'y a pas d'interaction entre les facteurs Groupe et Constance F(3, 72) = .38,p>.05. Cela signifie que les sujets témoins rappellent plus de mots identiques d'un essai à l'autre que ne le font les sujets TCL. Maintien des informations à court terme
Le maintien des informations à court terme a été évalué en comparant le nombre de bonnes réponses émises au rappel libre immédiat à celui du cinquième essai de la liste A. Une analyse de covariance
à
mesures répétées correspondant à un schème bifactoriel2 x 2 (Groupe x MCT) a été effectuée pour comparer les rendements des deux groupesà
ces deux rappels. L'analyse révèle un effet significatif de l'âge sur ces rendements, F(I,35) = 6.16, p< .05. Par contre,Fonctionnement mnésique verbal
àla suite d
'un
TeLchez des jeunes
20l'analyse ne démontre aucune différence significative entre les deux groupes
quant à cette variable, F(1,35) = 1.68,p>.05. Par ailleurs, l'analyse révèle une
différence significative entre les deux rappels lorsque les deux groupes sont
considérés conjointement, F(1,36) = 24.59, p< .001, mais aucune interaction
entre ces facteurs n'est retrouvée, F(1,36) = 2.68,p>.05. Ainsi, une légère perte
d'informations est observée quelques minutes après l'apprentissage, mais celle-ci
est similaire pour les deux groupes.
Maintien des informations à long terme
Un pourcentage de maintien à long terme a été calculé en prenant le nombre de bonnes réponses rapportées en rappel libre différé, divisé par le nombre de bonnes réponses rapportées en rappel libre immédiat, puis multiplié par cent. Un pourcentage en dessous de 100 équivaut à une perte
d'informations, alors qu'un pourcentage au-dessus de 100 équivaut à un gain
d'informations. Ces pourcentages ont été soumis à une analyse de covariance
unifactorielle à deux groupes. Cette analyse révèle que l'âge n'a pas d'effet sur
le maintien des informations à long terme, F(1,35) = .365,p>.05. Elle indique
aussi que les deux groupes ne se distinguent pas l'un de l'autre pour cette
composante du fonctionnement mnésique, F(1,35) = .801,p>.05. Ainsi, les
informations verbales encodées se maintiennent dans le temps aussi bien chez les
Fonctionnement mnésique verbal
à
la suite d'un TCL chez des jeunes 21Capacité de récupération des informations
La capacité de récupération est le processus qui amène
à
la conscienceles informations préalablement encodées et emmagasinées (Delis, & Lucas,
1996). Une nette augmentation du rendement obtenu lors de la tâche de
reconnaissance, comparativement à celui obtenu en rappel libre, indique une
difficulté du processus de récupération (Rao, 1996).
Une analyse de covariance à mesures répétées correspondant à un schème bifactoriel 2 x 2 a été effectuée pour comparer les rendements des deux
groupes au rappel libre immédiat et à la tâche de reconnaissance. L'analyse
révèle que l'âge a un effet significatif sur ces rendements, F(1,31) = 3.78,p<
.05, mais que les deux groupes ne se distinguent pas l'un de l'autre quant à cette
variable, F(1,31) = 1.36,p>.05. Une différence significative est néanmoins
trouvée entre les rendements au rappel libre immédiat et à la tâche de
reconnaissance et ce, lorsque les deux groupes sont considérés conjointement,
F(l,32) = 102.89,p< .001. Toutefois, l'interaction entre ces variables n'est pas
significative, F(1,32) = 1.43,p>.05. Ainsi, une augmentation similaire du
rendement est observée chez les deux groupes lorsque ceux-ci bénéficient des
indices que procure la tâche de reconnaissance. Cela signifie que la capacité de
récupération des informations encodées et emmagasinées est similaire chez les
Fonctionnement mnésique verbal à la suite d'un TeL chez des jeunes 22
Stratégies de rappel Regroupements sémantiques
Les mesures de regroupements sémantiques ont été obtenues en attribuant un point à chaque fois qu'un mot de la liste A était rappelé pour la première fois à la suite d'un autre mot de la même catégorie sémantique.
Ensuite, comme il a été suggéré par Crosson, Novack, Trenerry & Craig (1988), ce nombre de points a été divisé par le nombre maximum de regroupements
sémantiques possibles pour la quantité de bonnes réponses émises par le sujet,
puis multiplié par cent. Ainsi, cette technique a permis de comparer les rendements réels des sujets indépendamment du nombre de mots qu'ils ont
rappelé. Ces mesures de regroupements sémantiques ont été soumises à une
analyse de covariance à mesures répétées correspondant à un schème mixte bifactoriel2 x 5 (Groupe x Essai). Cette analyse indique que l'âge n'a pas d'effet significatif sur l'utilisation de la stratégie de regroupements sémantiques, F(1,23) = .14, p>.05. Par contre, une différence de groupe est démontrée, F(1, 23) = 4.72,p<.05. Un effet est également retrouvé d'un essai à l'autre, F(4, 96) = 4.73,p< .005, et il n'y a pas d'interaction entre les deux facteurs, F(4, 96) = .24,p>.05. Par conséquent, les sujets témoins utilisent davantage la stratégie des regroupements sémantiques que les sujets TCL.
Influence des indices catégoriels lors du rappel indicé immédiat
Fonctionnement mnésique verbal à la suite d'un TeL chez des jeunes 23
une analyse de covariance à mesures répétées, correspondant à un schème
bifactoriel2 x 2 (Groupe x Rappels), a été effectuée pour comparer les
rendements des deux groupes au rappel libre immédiat et au rappel indicé immédiat. L'analyse révèle que l'âge a un effet significatif sur ces rendements,
F(1,35) = 7.42,p< .05. Par contre, les deux groupes ne se distinguent pas l'un de l'autre pour cette variable, F(1,35) = .14,p>.05. L'analyse ne dévoile aucune différence significative entre les rendements au rappel libre immédiat et au rappel indicé immédiat, F( 1,36) =.79, p>. 05, lorsque les deux groupes sont considérés conjointement. De plus, aucune interaction n'est retrouvée entre les facteurs,
F(1,36) =.00,p>.05. Par conséquent, les deux groupes se comportent d'une manière équivalente en n'augmentant pas leurs rendements de manière significative lorsque des indices catégoriels leur sont fournis.
Regroupements selon l'ordre
D'une manière similaire aux mesures de regroupements sémantiques, le
nombre de regroupements selon l'ordre a été calculé en attribuant un point à
chaque fois qu'un mot était rappelé selon l'ordre qu'il occupe dans la liste. Toujours selon la procédure de Crosson et al. (1988), ce nombre a été divisé par
le nombre maximum possible de regroupements selon l'ordre pour la quantité de
bonnes réponses émises par le sujet, puis multiplié par cent. Ces mesures de regroupements selon l'ordre ont été soumises à une analyse de covariance à mesures répétées correspondant à un schème mixte bifactoriel 2 x 5 (Groupe x
Fonctionnement mnésique verbal
à la suite d'un
TeL chez des jeunes 24Essai). Les résultats n'indiquent aucun effet de l'âge, F(l ,23) = 2.00, p>. 05,
aucune différence de groupes, F(I, 23) = 2.30,p>.05, aucun effet d'un essai à l'autre, F(4, 96)
= .75,p>.05, et aucune interaction entre les deux facteurs,
F(4, 96) = 1.60,p>.05.Indices sensibles aux atteintes cérébrales Intrusions
Dans le CYL T -C, les mots ne faisant pas partie de la liste à mémoriser,
mais qu'un sujet rappelle spontanément se qualifient d'intrusions. Une analyse de covariance unifactorielle a été utilisée pour comparer le nombre total d'intrusions retrouvées dans les rendements des sujets TCL et des sujets témoins. L'analyse révèle que l'âge n'a pas d'effet sur la production des intrusions, F(l,35) = .161, p>.05. Elle indique cependant qu'il existe une différence significative entre les deux groupes, F(I, 35) = 11.656, p< .005. Par conséquent, les jeunes TCL produisent significativement plus d'intrusions que les jeunes sujets témoins.
Persévérations
Les persévérations, au CYLT-C, correspondent aux mots qu'un sujet rappelle plus d'une fois dans un même essai. Une analyse de covariance a été utilisée pour comparer le nombre total de persévérations retrouvées dans les rendements des sujets TCL et des sujets témoins. L'analyse montre que l'âge n'a pas d'effet sur la présence des persévérations, F(1,35)
=
1.851,p>.05. ElleFonctionnement mnésique verbal à la suite d'un TCL chez des jeunes 25
indique cependant une différence significative entre les deux groupes, F(l, 35) =
6.342, p< .05. Ainsi, les jeunes TCL produisent significativement plus de
persévérations que les jeunes sujets témoins.
Sensibilité à l'interférence proactive
L'interférence pro active consiste en une difficulté
à
effectuer undeuxième apprentissage lorsqu'un premier, de nature similaire, a été réalisé
antérieurement. Le CVL T -C permet de vérifier la sensibilité à l'interférence
proactive en comparant le nombre de bonnes réponses rappelées à la liste B à
celui du premier essai de la liste A. Une analyse de covariance à mesures
répétées correspondant à un schème bifactoriel 2 x 2 a été effectuée pour
comparer les rendements des deux groupes à ces deux essais. L'analyse révèle
que l'âge n'a pas d'effet significatif sur ces rendements, F(l,35) = .02,p>.05.
De plus, elle ne démontre aucune différence significative entre les deux groupes,
F(1,35)
=
3.34,p>.05, ni entre les deux essais lorsque les deux groupes sontconsidérés conjointement, F( 1,36) = 3.52, p>. 0 5 et aucune interaction entre les
essais n'est retrouvée, F(1,36) =.07,p>.05. Ainsi, la sensibilité à l'interférence
pro active ne permet pas de distinguer les deux groupes.
Capacité de discrimination
La capacité à discriminer adéquatement des informations préalablement
apprises parmi des stimuli distrayants a été calculée à partir d'une formule
Fonctionnement mnésique verbal à la suite d'un
TeL
chez des jeunes 26nombre de mots de la liste de reconnaissance. Les faux-négatifs sont les mots inclus dans la liste A, mais que le sujet omet d'identifier dans la liste de
reconnaissance. Les faux-positifs sont des mots ne faisant pas partie de la liste A, mais que le sujet identifie comme appartenant à celle-ci. Cette formule est la suivante : (l-«faux-positifs
+
faux-négatifs) /nombre de mots de la liste)) x 100. Les pourcentages de discrimination obtenus ont été soumis à une analyse de covariance unifactorielle. L'âge ne s'est pas révélé une variable significative pour la capacité de discrimination des sujets, F(l,31) = .045,p>.05. Cependant, des différences significatives sont retrouvées entre les deux groupes, F(I,31) = 9.900,p< .005. Ainsi, les sujets TCL discriminent d'une manière moinsadéquate les informations préalablement acquises parmi des stimuli distrayants. Analyses a posteriori
Quatre analyses complémentaires ont été effectuées dans cette section pour répondre aux questionnements soulevés par les résultats obtenus aux sections précédentes.
Regroupements sémantiques
La première analyse complémentaire a été réalisée dans le but
d'expliquer pourquoi les résultats obtenus précédemment démontrent que les deux groupes sont équivalents et qu'ils ne s'améliorent pas lorsque des indices d'utilisation de la stratégie de regroupements sémantiques leur sont fournis explicitement (rappel indicé) alors qu'une différence significative entre ces deux
Fonctionnement mnésique verbal à la suite d'un TeL chez des jeunes 27
groupes est trouvée dans l'utilisation spontanée de cette stratégie.
En examinant attentivement la méthode de correction utilisée dans le CVLT-C pour calculer les mesures de regroupements sémantiques, il s'avère que celle-ci élimine la possibilité d'obtenir un score lorsque le sujet répète un mot (persévération) ou lorsqu'il en invente un (intrusion). Ainsi, les sujets produisant des persévérations et des intrusions se retrouvent pénalisés quant au nombre de regroupements sémantiques qu'ils peuvent avoir utilisés. Or, les jeunes TCL produisent significativement plus de persévérations et d'intrusions que les jeunes sujets témoins. La première analyse a posteriori consiste à vérifier si la différence entre les deux groupes, concernant l'utilisation spontanée de la stratégie des regroupements sémantiques persiste lorsqu'une nouvelle méthode de correction est effectuée. Cette nouvelle méthode permet l'obtention d'un point même si les sujets émettent des persévérations ou des intrusions. Pour ce faire, le nouveau résultat aux nombres de regroupements sémantiques a été divisé par le nombre de mots rappelés, puis a été multiplié par cent. Ensuite, les nouveaux pourcentages de regroupements sémantiques ont été soumis à une analyse de covariance à mesures répétées correspondant à un schème mixte bifactoriel2 x 5 (Groupe x Essai). Tout comme pour la première méthode de correction, l'effet de l'âge ne s'est pas révélé significatif F(1, 23) = .51, p>.05. Par contre, avec la nouvelle méthode de correction la différence entre les deux groupes n'existe plus, F(I, 23) = 3.35,p>.05. Par ailleurs, un effet significatif
Fonctionnement mnésique verbal
à
la suite d'unTeL
chez des jeunes 28est retrouvé d'un essai à l'autre, F(4, 96) = 10.3,p< .0001 et il n'y a pas
d'interaction entre les deux facteurs, F(4, 96) = .4,p>.05. Par conséquent, cette
analyse précise que les deux groupes ne se distinguent pas significativement l'un de l'autre pour l'utilisation spontanée de la stratégie de regroupements
sémantiques lorsque les intrusions et les persévérations sont prises en
considération.
Regroupements selon l'ordre
Étant donné que les sujets produisant des persévérations se retrouvent également pénalisés pour les mesures de regroupements selon l'ordre, un nouveau mode de correction permettant l'obtention d'un point à la suite d'une
persévération a aussi été employé. Ainsi, le nombre de regroupements selon
l'ordre a été divisé par le nombre de mots rappelés, puis a été multiplié par cent. Ces nouveaux pourcentages de regroupements selon l'ordre ont été soumis à une analyse de covariance à mesures répétées correspondant à un schème mixte
bifactoriel2 x 5 (Groupe x Essai). L'interprétation des résultats demeure
similaire à la première méthode de correction. C'est-à-dire que l'analyse
n'indique pas d'effet de la variable âge, F( 1, 23) = 2.1, p>. 05, ni de différence de
groupes, F(l, 23) = l.62,p>.05, ni d'effet d'un essai à l'autre, F(4, 96) = l.18,
Fonctionnement mnésique verbal à la suite d'un TeL chez des jeunes 29
Effet de primauté et effet de récence
Les deux analyses complémentaires qui suivent ont pour objectif
d'explorer une nouvelle façon de comprendre pourquoi l'apprentissage des
jeunes TCL se révèle significativement plus faible que celui des jeunes témoins.
Ces analyses examinent la position sérielle initiale des mots rappelés par les deux
groupes.
Pour effectuer ces analyses, la liste de mots a été divisée en trois parties.
Les cinq premiers mots de la liste ont été associés à l'effet de primauté, alors que
les cinq derniers mots de la liste ont été associés à l'effet de récence. L'effet de
primauté et l'effet de récence correspondent respectivement au fait que le rappel
des mots du début et de la fin d'une liste est généralement supérieur au rappel
des mots du centre. Un pourcentage de mots reliés à l'effet de primauté et un
pourcentage de mots reliés à l'effet de récence ont été calculés à partir du
nombre de bonnes réponses émises par chacun des sujets. Ces pourcentages ont été soumis à deux analyses de covariance à mesures répétées correspondant à un
schème mixte bifactoriel2 x 5 (Groupe x Essai). La première analyse portant
sur l'effet de primauté démontre un effet significatif de l'âge, F( 1, 23) = 7.42, p<
.01. Elle révèle aussi que l'effet de primauté ne se manifeste pas de la même
manière chez les deux groupes, F(l, 23) = 6.66,p< .01, et qu'un effet du facteur essai est remarquéF(4, 96) = 2.77,p< .05. li n'y a cependant pas d'interaction significative entre les deux facteurs, F(4, 96) = 1.84,p>.05.
Fonctionnement mnésique verbal à la suite d'un
TeL
chez des jeunes 30En ce qui concerne la comparaison des deux groupes pour l'effet de récence, les résultats n'indiquent pas d'effet de la variable âge, F(l, 23) = .15, p>.05, pas de différence significative entre les deux groupes, F(l, 23)
= 1.36,
p>.05., pas d'effet d'un essai à l'autre, F(4, 96) = .14,p>.05 et pas d'interactionentre les essais, F(4, 96) = 1.75,p>.05. Discussion Apprentissage verbal
Le principal objectif de la présente recherche était de vérifier si un TCL entraîne des séquelles dans le fonctionnement mnésique verbal des jeunes
au-delà de trois mois après le diagnostic. Les résultats obtenus soutiennent
l'hypothèse qu'un TCL provoque des séquelles lors d'une étape bien particulière
du fonctionnement mnésique, à savoir l'encodage des nouvelles informations. Par contre, une fois que les informations verbales sont bien encodées et emmagasinées, celles-ci se maintiennent et se récupèrent aussi bien chez les
jeunes TCL que chez les jeunes témoins.
Cette recherche a pu mettre en évidence que la courbe d'apprentissage des jeunes TCL était significativement moins élevée que celle des jeunes sans
atteinte cérébrale. Ces résultats sont en accord avec ceux obtenus par Nolin
(1996) ainsi que par Basset et Slater (1990) qui avaient également remarqué une capacité initiale d'apprentissage verbal significativement plus faible chez de jeunes TCL comparativement à de jeunes sujets témoins, et ce malgré une
Fonctionnement mnésique verbal à la suite d'un TeL chez des jeunes 31
courbe ascendante pour les deux groupes. De plus, la constance des mots retrouvés d'un essai à l'autre est significativement plus faible pour le groupe des jeunes TCL que pour le groupe des jeunes témoins. Or, la constance constitue un indice en faveur d'un apprentissage efficace (Clodfelter, Dickson, Newton-Wilkes, & Jonhson, 1987). Ainsi, les jeunes TCL sont capables d'apprentissage verbal, mais cet apprentissage est plus lent et moins constant que celui des jeunes sans atteinte cérébrale.
Maintien et récupération des informations
Les deux groupes se comportent d'une manière similaire au niveau du maintien et de la récupération des informations. Plus précisément, le rendement des deux groupes diminue légèrement lors du rappel libre immédiat pour ensuite se maintenir lors du rappel libre différé. La légère diminution du rendement, retrouvée quelques minutes après les cinq essais d'apprentissage, pourrait s'expliquer par un estompage normal de la trace mnémonique associé à un effet d'interférence rétroactive (Baddeley, 1992; Fortin et Rousseau, 1989). En effet, l'apprentissage de la liste B, se situant entre l'apprentissage de la liste A et le rappel immédiat, provoque une réduction de l'accessibilité à un contenu récemment mémorisé en raison d'un second apprentissage de même nature. Or donc, l'évaluation du maintien des informations à court terme que permet le CVLT-C combine simultanément l'oubli normalement observé et une mesure de sensibilité à l'interférence rétroactive. Malgré tout, la similitude retrouvée entre
Fonctionnement mnésique verbal
à
la suite d'un TeL chez des jeunes 32les deux groupes permet de supposer qu'un TCL n'affecte pas le maintien des informations à court terme, une fois que celles-ci sont encodées et
emmagasinées.
Le maintien des informations
à
long terme est également similaire pour les deux groupes. TI peut paraître étrange à prime abord de constater que les pourcentages moyens pour les deux groupes indiquent un léger gaind'informations avec le temps. Ceci peut cependant s'expliquer par la façon dont le CYL T -C est construit. En effet, tout de suite après le rappel libre immédiat, un rappel indicé est effectué incitant les sujets à prendre conscience des trois catégories sémantiques incluses dans la liste à mémoriser. Ainsi, étant donné que le rappel libre différé survient après le rappel immédiat indicé, les sujets peuvent profiter des indices catégoriels divulgués par l'expérimentatrice pour augmenter leur rendement au rappel subséquent. Ceci constitue d'ailleurs un biais du test pour l'évaluation du maintien de l'information à long terme. Toutefois, la similitude retrouvée entre les deux groupe permet de supposer qu'un TCL n'affecte pas le maintien normal des informations à long terme.
Parallèlement, les deux groupes améliorent aussi leurs rendements d'une manière similaire lorsqu'ils bénéficient des indices que procure la tâche de reconnaissance. Ces observations permettent donc de postuler que l'accès aux informations verbales, une fois que celles-ci sont bien encodées et
Fonctionnement mnésique verbal
à
la suite d'un TeL chez des jeunes 33mois après leur accident.
Stratégies mnésiques
Le deuxième objectif de cette recherche était d'examiner l'utilisation de
stratégies mnésiques. La première stratégie étudiée était l'utilisation spontanée
de regroupements sémantiques. Deux analyses de l'utilisation de cette stratégie
ont été réalisées dans cette recherche. La première analyse ne tenait pas compte
des intrusions et des persévérations lors du dénombrement des regroupements sémantiques. La deuxième ajoutait aux nombres de regroupements sémantiques générés par les bonnes réponses ceux générés par les intrusions et par les
persévérations. La première analyse a démontré une différence significative
entre les deux groupes. En opposition, la deuxième analyse a précisé que
lorsque les persévérations et les intrusions étaient considérées, les deux groupes
ne se distinguaient plus l'un de l'autre. Ces deux analyses peuvent paraître
contradictoires à première vue, mais en fait, elles se complètent. La première
analyse indique qu'il y a une différence entre les deux groupes dans l'utilisation
de la stratégie de regroupements sémantiques. Quant à la deuxième analyse, elle
souligne que la différence retrouvée entre les deux groupes n'est pas attribuable
à une moins grande utilisation de cette stratégie, mais plutôt à une utilisation
moins efficace car ponctuée de persévérations et d'intrusions. Ainsi, les jeunes
TCL, tout comme les jeunes du groupe témoin, utilisent spontanément la
Fonctionnement mnésique verbal à la suite d'un TeL chez des jeunes 34
intrusions fréquentes des jeunes TCL altèrent l'efficacité de ce type de stratégie.
Cette explication est aussi appuyée par le fait que les TCL s'améliorent de façon
comparable aux sujets témoins lorsqu'ils bénéficient de l'aide des indices
catégoriels du rappel indicé immédiat.
La deuxième stratégie étudiée a été l'utilisation de regroupements selon
l'ordre de présentation de la liste. Aucune différence entre les deux groupes n'a
été démontrée pour cette stratégie, que les persévérations soient prises en
considération ou non. En fait, l'analyse qualitative des réponses indique que
cette stratégie n'est pratiquement pas utilisée par les sujets des deux groupes.
D'ailleurs, l'utilisation de la stratégie de regroupements sémantiques limite la
possibilité d'utiliser celle des regroupements selon l'ordre. Fait intéressant à
noter, il a déjà été démontré que la stratégie de regroupement sémantiques était
plus efficace que celle des regroupements selon l'ordre (Shaffer, 1996; Vasta,
Haith, & Miller, 1995).
Indices sensibles aux atteintes cérébrales
Le dernier objectif de cette recherche était d'examiner la présence de certains indices sensibles aux atteintes cérébrales et pouvant altérer le
fonctionnement mnésique. Les résultats obtenus démontrent que les jeunes TCL
produisent significativement plus d'intrusions et de persévérations que les jeunes
témoins. Les jeunes TCL discriminent aussi d'une manière moins adéquate les
Fonctionnement mnésique verbal
à
la suite d'unTeL
chez des jeunes 35stimuli distrayants. Par contre, ils ne sont pas plus sensibles à l'interférence proactive que les jeunes témoins. Ces différences entre les jeunes TCL et leurs
témoins aux trois premiers indices renforcent l'hypothèse qu'un TCL provoque des altérations neurologiques pouvant persister jusqu'à trois mois après celui-ci.
En effet, ces indices se retrouvent fréquemment lors de lésions cérébrales (Lesak, 1995).
Hypothèse d'une saturation de la mémoire de travail L'analyse détaillée de l'apprentissage verbal des jeunes TCL ad' abord révélé que ceux-ci utilisaient spontanément la stratégie de regroupements sémantiques, tout comme les jeunes témoins. Toutefois, les fréquentes
persévérations et intrusions produites par les jeunes TCL altèrent l'efficacité de cette stratégie. De plus, l'analyse de l'effet de primauté, ainsi que l'analyse
qualitative des oublis lors de la tâche de reconnaissance, amènent à poser l'hypothèse d'une saturation de la mémoire de travail. En effet, malgré qu'ils rapportent moins de mots au total, l'analyse de l'effet de primauté indique que le pourcentage de mots reliés à cet effet est significativement supérieur chez les jeunes TCL. Bien que la taille de l'échantillon incite à la prudence quant à la généralisation des résultats, ces observations suggèrent que les jeunes TCL mémorisent convenablement les mots du début de la liste, mais que les mots suivants sont appris moins facilement que pour les jeunes témoins. Une saturation rapide de la mémoire de travail ne favorisant pas la répétition des
Fonctionnement mnésique verbal à la suite d'un TCL chez des jeunes 36
nouveaux mots entendus est postulée. Ceci pourrait donc ralentir le transfert en mémoire à long terme et par le fait même l'apprentissage. Par ailleurs, l'analyse qualitative des faux-négatifs retrouvés à la tâche de reconnaissance indique que ce ne sont que les six derniers mots de la liste qui sont omis par les jeunes TCL. En effet, les neufs premiers mots de la liste sont reconnus par la totalité des jeunes TCL. TI serait donc intéressant que des études ultérieures explorent cette hypothèse de saturation de la mémoire de travail.
Les difficultés attentionnelles rapportées dans plusieurs autres recherches portant surlesjeunes TCL (BoIl, 1983 ; Gulbransen, 1984; Ferron, 1991 ; Mathieu & Nolin, soumis pour publication; Wright son, McGinn, & Gronwall, 1995) ont probablement aussi un impact sur l'apprentissage de nouvelles connaissances. En effet, le processus de mémorisation nécessite d'abord de l'attention afin de pouvoir encoder de nouvelles informations.
Controverse en regard du TCL
Les résultats de la présente recherche supportent l'idée qu'un TCL entraîne des répercussions dans la capacité d'apprentissage des jeunes au-delà de trois mois après l'accident. De plus, la présence d'indices fréquemment
retrouvés lors d'atteintes cérébrales est significativement plus élevée chez les jeunes TCL que chez leurs témoins.
Concernant la controverse existant en regard du TCL, cette recherche tend à soutenir qu'un TCL peut engendrer des séquelles neurologiques subtiles