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Modulation nicotinique des neurones dopaminergiques de l'aire tegmentale ventrale : une approche optogénétique et opto-pharmacologique

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Academic year: 2021

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HAL Id: tel-02410193

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Submitted on 13 Dec 2019

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Modulation nicotinique des neurones dopaminergiques

de l’aire tegmentale ventrale : une approche

optogénétique et opto-pharmacologique

Romain Durand-de Cuttoli

To cite this version:

Romain Durand-de Cuttoli. Modulation nicotinique des neurones dopaminergiques de l’aire tegmen-tale ventrale : une approche optogénétique et opto-pharmacologique. Neurosciences [q-bio.NC]. Sor-bonne Université, 2018. Français. �NNT : 2018SORUS421�. �tel-02410193�

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TH`ESE DE DOCTORAT DE SORBONNE UNIVERSIT´E Sp´ecialit´e Neurosciences

´

Ecole doctorale Cerveau – Cognition – Comportement Pr´esent´ee par

Romain DURAND-de CUTTOLI Pour obtenir le grade de

DOCTEUR DE SORBONNE UNIVERSIT´E

Sujet de la th`ese :

Modulation nicotinique des neurones

dopaminergiques de l’aire tegmentale ventrale : une

approche optog´

en´

etique et opto-pharmacologique

Soutenue publiquement le 25 Octobre 2018 devant le jury compos´e de :

Prof. Camilla BELLONE Rapporteur

Dr Jacques BARIK Rapporteur

Dr Fran¸cois GEORGES Examinateur

Dr Pierre PAOLETTI Examinateur

Dr Jocelyne CABOCHE Pr´esidente du jury

Dr Alexandre MOUROT Directeur de th`ese

Dr Philippe FAURE Invit´e

Sorbonne Universit´e Secr´etariat : 01 42 34 68 35

Bureau d’accueil des doctorants Fax : 01 42 34 68 40

Institut de formation doctorale pour les ´etudiants de A `a EL : 01 42 34 68 41 Escalier G, 2e´etage pour les ´etudiants de EM `a MON : 01 42 34 68 41 15 rue de l’´ecole de m´edecine pour les ´etudiants de MOO `a Z : 01 42 34 68 51 75270 - PARIS CEDEX 06 e-mail : scolarite.doctorat@sorbonne-universite.fr

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Remerciements

Dans un premier temps, je tiens à remercier chaleureusement Camilla Bellone et Jacques Barik pour avoir accepté d’être rapporteurs de ma thèse et d’avoir évalué ce travail avec bienveillance et expertise. Je remercie aussi Jocelyne Caboche, Pierre Paoletti et François Georges qui complètent mon jury de soutenance. Votre présence à tous les cinq m’honore beaucoup. Un immense MERCI à Alexandre « Alex » Mourot, mon directeur de thèse, mon boss pendant ces quatre années. Merci de m’avoir fait confiance, il y a plus de cinq ans maintenant (!), pour embarquer avec toi dans cette folle aventure de la pharmacologie optogénétique in vivo. Merci d’avoir été un soutien de tous les instants, un guide avisé et un super compagnon de boulot. Animés « même quand les jours furent durs, d’une furieuse envie de rire », nos discussions scientifiques (et toutes les autres), nos centres d’intérêt communs, notre amour pour les bons (et mauvais) jeux de mots et nos interminables fou-rires resteront longtemps avec moi et ont grandement contribué à mon évolution scientifique et humaine. Je suis extrêmement reconnaissant de t’avoir eu tour à tour comme formateur, mentor, directeur de thèse, que tu m’aies laissé tellement de libertés pour progresser, mais surtout, de te compter aujourd’hui parmi mes amis. A l’heure du bilan, je ressens avant tout une très grande fierté d’avoir partagé un bout de chemin à tes côtés et d’être le premier représentant de la lignée de tes thésards (que j’espère prolixe).

Merci, bien sûr, à Philippe « big boss » Faure ! Tu es incontestablement le talus de cette magnifique équipe et j’ai appris tellement en travaillant près de toi. Ton encadrement, ton exigence scientifique et l’affection que tu portes à chaque personne font de toi une sorte de « gourou » et je dois reconnaître que j’ai parfois trouvé un supplément d’énergie pour ne pas te décevoir. Bon, ce n’est pas forcément un choix en revanche si je commence à t’imiter sur le plan capillaire…Sache que chacune des discussions que nous avons partagées a été pour moi à l’image du dernier carré de la tablette de chocolat : trop vite terminée, mais jamais décevante. Et Sarah « qué connasse » Mondoloni ! Merci d’avoir été mon binôme pendant la deuxième moitié de cette thèse et surtout mon amie (et je l’espère, pour de nombreuses années encore). Quand j’y pense, tu es venue en sifflant, mais c’est assez difficile d’exprimer tout ce que je te dois. Alors merci pour tout. Je ressens une grande fierté de t’avoir « enseigné » les rudiments de l’électrophysiologie en tranche, maintenant que tu es une « patcheuse » aguerrie je dois admettre que tu étais déjà une étudiante très douée. La richesse et la qualité de nos discussions,

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ton honnêteté intellectuelle, ta franchise, cet humour acide (même si je suis probablement trop bon publique), les interminables soirées au laboratoire et/ou aux « sciences » et ton humanité m’ont donné énormément de force et d’espoir. Et puis, il y a cette origine commune : deux

sartinesi qui se retrouvent par hasard dans un laboratoire de neurosciences à Paris, c’est juste

dingue ! Mais ça compte énormément, parce que je pense qu’on partage le meilleur de cet héritage. Tu as toutes les qualités pour devenir une super chercheuse, je n’ai aucun doute sur ce point !

Merci mille fois à Fabio Marti pour tout ce que tu m’as appris et pour cette sagesse qui semble venir des âges. Ton talent pour apparaître et disparaître dans un nuage de fumée, toujours au bon moment, m’impressionne ! Même si je n’ai pas toujours tout compris, nos discussions et ton exigence ont été pour moi des repères fondamentaux. Tu m’as formé à l’électrophysiologie

in vivo avec enthousiasme et patience. J’espère avoir fait honneur à cet enseignement. Savoir

que tu n’étais jamais loin de moi pendant ces quatre années m’a énormément rassuré.

Jérémie Naudé, merci de supporter, comme moi, l’Olympique de Marseille. Merci aussi et surtout pour la qualité et la pertinence de ton aide tout au long de cette thèse. Tu as été parfois impressionnant par tes connaissances, rassurant par ta présence et toujours nécessaire par ton soutien. Nous partageons aussi l’amour du débat. Et même si je continue de penser que je n’ai ni le niveau, ni les connaissances pour interagir totalement avec toi sur tous les sujets : la force des discussions que nous avons partagées et ton intégrité intellectuelle resteront pour moi une grande source d’inspiration. Merci à Nicolas Torquet et Stefania Tolu qui, s’ils m’ont tous les deux impressionné par leurs qualités scientifiques ont surtout fais preuve à tous les instants d’une gentillesse et d’une bienveillance incroyables à mon égard. Steve Didienne, mon pote, tu m’impressionnes ! Apprendre à te connaître, découvrir toutes tes qualités, scientifiques et humaines, ont énormément contribué à mon évolution. Tu as été, et reste pour moi, un modèle de courage et de sensibilité (eh oui !). Merci pour ton aide, que tu m’as souvent proposée et que tu ne m’as jamais refusée et qui a grandement contribué à mon apprentissage. J’ai aimé les anecdotes sur les Quatre Chemins, sur tes mille vies et les comptes rendus de documentaires animaliers ou sur les théories du complot (en revanche, j’ai moins aimé te voir gober ce surimi et mimer la « poterie selon Steve ») … Moi aussi, je t’aime. Merci Damien Lemoine pour ton aide continue, toutes tes connaissances et les franches barres de rire. Merci aux copains thésards de l’équipe ! Merci à Claire Nguyen, ta force de travail et de caractère et ta gentillesse de tous les instants m’impressionnent. Merci de m’avoir aidé pour de nombreuses manips, et de m’avoir parfois harcelé pour faire certaines choses que je rechignais à faire. Merci à Elise Bousseyrol

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pour toutes ces discussions, ces bons moments et ces chansons entonnées devant des souris qui tournent dans une bassine. Et plus récemment merci à Joachim Jehl de m’avoir supporté comme « encadrant » de manips pendant ton stage de master, j’espère t’avoir apporté et transmis de mes connaissances. Je n’ai pas de doute sur le fait que la suite dans l’équipe soit aussi agréable qu’elle le fut pour moi, tant vous êtes tous pleins de qualités humaines et scientifiques. Merci aussi à ceux qui sont passés dans l’équipe et qui sont partis avant moi. Thank you Malou ! Ton enthousiasme et toutes nos discussions m’ont beaucoup apporté. Merci aussi de nous avoir embarqué dans ce projet « Dance your PhD » qui reste dans ma mémoire comme un des meilleurs souvenirs de ces quatre années. Merci à Samir Takillah ! Ton appétit, aussi bien intellectuel que dans tous les évènements où la nourriture était offerte, m’a impressionné ! Plus sérieusement, j’ai rarement eu le sentiment de pouvoir autant compter sur quelqu’un. Alors merci pour toute ton aide et pour tes conseils précieux. Merci à Carole Morel, qui a accompagné mes premiers pas au laboratoire et qui fut une compagnie de soirée de grande qualité. De tes conseils (toujours avisés) à ton accueil à New York plus récemment tu as grandement contribué à mon évolution. Merci à Etienne Duranté et Ammar Benallaoua pour avoir été des stagiaires de qualité, drôles parfois, intéressants toujours et pour avoir été différents. Merci à tous ceux qui fréquentent, ou qui ont fréquenté, le riche écosystème du B5 : un merci particulier à Benjamin « Gwengamp » Le Gac, Bruno « presque Corse » Cauli, Bertrand Lambolez, Gabrielle Devienne, Juliette Piquet, Antoine Bergel, Sébastien Valverde, Kasia Pietrajtis, Jérôme Tange, Arturo Torres Herraez, Mehdi Fallahnezad, Tom Watson, Mickael Quiquempoix, Sophie Fayad, Nathalie Leresche, Marco Diana, Thomas Bessaih, et à tous ceux que je n’ai pas la place de citer, mais qui ont clairement animé mes journées de travail avec des discussions passionnantes. Un grand merci aussi à celles sans qui rien n’arriverait : Bernadette Hannesse pour ton aide constante et ta bonne humeur (quasi)permanente, Sylvie Faivre-Weber, puis Tatiana Christine plus récemment, pour votre patience et votre dévouement.

Alors que je termine ici mon parcours étudiant à l’université, j’ai une pensée pour ceux qui y furent mes maîtres durant toutes ces années : Nicolas Catz, Yoh’i Zennou-Azogui, Francesca Sargolini et Laurent Pézard particulièrement à Aix-Marseille Université puis Stéphane Charpier, Régis Lambert, Mariano Casado, Boris Barbour, Alain Trembleau et Clément Léna à Sorbonne Université. Je vous remercie pour tous vos enseignements et pour avoir su entretenir chez moi un intérêt constant pour la biologie du cerveau. Merci à Claire Wyart, qui a suivi mon évolution et l’avancée de mon travail avec un regard bienveillant et éclairé lors des comités de suivi de thèse. Merci aussi à nos collaborateurs : particulièrement Deniz Dalkara, Stéphanie

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Pons, Uwe Maskos, Benoit Forget, Dirk Trauner, Rich Kramer, Vincent Vialou, Sébastien Parnaudeau et François Tronche pour m’avoir offert de magnifiques collaborations et fourni tous les éléments nécessaires à la réussite de mes différents projets. Un grand merci à Guillaume Dugué qui m’a soutenu depuis mon stage de master 2 à l’Ecole Normale Supérieure pour ses conseils précieux et les discussions toujours passionnantes que nous avons partagées aux détours d’un couloir ou autour d’une bonne bière. Jean Mariani, ti ringraziu tanti, pour les longues discussions toujours passionnantes et pour avoir été un autre Corse face à l’adversité. Tu sais comme moi que plus nous nous éloignons de notre île, plus nos cœurs y font retour. Ainsi, chacun de nos échanges avec toi fut aussi mémorable qu’un coucher de soleil sur les îles Sanguinaires.

Un immense merci à mes amis de toujours, à qui je demande aussi pardon de les avoir sûrement délaissés pour me consacrer à cette thèse. Je pense particulièrement à Vincent Vigorito (le seul Marseillais qui puisse réellement dire « à jamais le premier »), l’équipe des Campomorais (cousins et amis), Camille Pouchol, Victor Laratte, Pauline Jay, Pierre Savonet, Julien Poulos, Julien Corbo, Sabria Lagoun, Maxime Donadieu-Sanguinetti, Romain Giraud, Cédric Girou, Jocelyn Farge, Yannick Passarelli et tous ceux que j’ai oublié de remercier ici (considérez maintenant que c’est chose faite !). Les souvenirs que nous partageons restent au creux de moi et l’impatience de vous revoir tous m’ont aidé à tenir dans les moments les plus difficiles. Merci aussi bien sûr à mes frères Pierre Chirsen et Romain Bourboulou pour tout ce que nous avons partagé ces dernières années. L’aventure IS a souvent été un grand bol d’air frais pour moi. Je remercie aussi tous ceux qui ont participé de près ou de loin à cette aventure, particulièrement Karine, Pauline, Anais, Suzanne, Clément, Mathilde et tous les autres. Vous êtes tous géniaux. Merci bien sûr à toute ma famille pour tout le soutien qu’ils m’ont apporté à chaque instant, qu’ils puissent, ou non, lire ce manuscrit. Merci particulièrement à ma mère et à ma grand-mère deux femmes de ma vie qui m’ont tant donné par leur amour et leur confiance. J’espère aujourd’hui les rendre fières.

Et enfin, merci à Charlotte, la femme de ma vie, qui a supporté tout ça et à qui je dois ma réussite ! Tu as été un soutien patient et inconditionnel depuis toujours. Merci d’avoir été mon refuge, de m’avoir porté, de m’avoir sauvé parfois, de m’avoir fait découvrir tant de choses et d’avoir construit ce foyer : le seul endroit où je me sens chez moi. J’ai hâte de partager mes mille prochaines aventures avec toi.

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Table des matières

Remerciements 1

Résumé 9

Abstract 11

Liste des abréviations 13

Liste des publications 17

Liste des formations et congrès 19

Liste des figures 21

Introduction 23

Avant-propos 25

Chapitre 1 - Le système cholinergique 29

1.1 L’acétylcholine 29

1.2 Anatomie des voies cholinergiques 29

1.3 Biosynthèse de l’ACh 31

1.4 Les récepteurs de l’acétylcholine 32

1.4.1 Les récepteurs muscariniques (mAChR) 33

1.4.2 Les récepteurs nicotiniques (nAChR) 33

1.5 Les différents états du récepteur : modèle allostérique 36

1.6 Diversité des nAChR et localisation anatomique 37

1.7 Propriétés biophysiques et pharmacologiques des différents nAChR 38 1.8 Effet de la nicotine sur les récepteurs nicotiniques 38

1.9 Conclusion 39

Chapitre 2 - Le système dopaminergique 41

2.1 La dopamine et les récepteurs dopaminergiques 41

2.2 Anatomie du système dopaminergique 42

2.3 Hétérogénéité de la VTA 44

2.4 Activité spontanée des neurones dopaminergiques de la VTA 46

2.5 Dopamine et renforcement 48

2.6 Corrélats neurophysiologiques du renforcement 50

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Chapitre 3 - Modulation nicotinique de la VTA et renforcement 53

3.1 Anatomie de la transmission nicotinique dans la VTA 53

3.2 Effets de l’ACh endogène 54

3.3 Effets aigus de la nicotine sur le système DAergique 54

3.4 Apports des modèles génétiques 57

3.4.1 La sous-unité b2 57

3.4.2 Les sous-unités α4 et α6 58

3.4.3 La sous-unité α7 59

3.4.4 La sous-unité b4 60

3.4.5 La sous-unité α5 61

3.5 Effets de l’exposition chronique à la nicotine sur le système DAergique 61 Chapitre 4 - Modulation nicotinique de la VTA : stress et prise de décision 63

4.1 Stress social et modulation nicotinique 63

4.1.1 Effets du stress 63

4.1.2 Impact d’un stress sur le système DAergique 65

4.1.3 Le protocole de défaite sociale chronique pour évaluer le stress social chez la souris 67

4.1.4 Stress et drogues d’abus 69

4.1.5 Stress et nicotine 70

4.2 Prise de décision et modulation nicotinique 70

4.2.1 Théories de la prise de décision 70

4.2.2 Les nAChR et la balance exploitation/exploration 73

4.2.3 Effets de la nicotine sur la prise de décision 77

Chapitre 5 - Contrôle optique des récepteurs neuronaux : le cas des nAChR 79

Résultats 97

Chapitre 6 – Première publication 99

6.1 Résumé 99

6.2 Publication : « Chronic nicotine and social stress alter exploratory behaviors in mice by increasing midbrain dopamine neuron activity » M. Dongelmans, R. Durand-de

Cuttoli & al, in preparation. 100

Chapitre 7 – Deuxième publication 137

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7.2 Publication : « Manipulating midbrain dopamine neurons and reward-related behaviors with light-controllable nicotinic acetylcholine receptors » R.Durand-de

Cuttoli, S. Mondoloni & al, eLIFE, 2018. 138

Discussion 167

Chapitre 8 – Discussion générale 169

8.1 Nicotine, Stress et exploration 169

8.2 Activité du système DA et vulnérabilités aux maladies psychiatriques 172

8.3 Pharmacologie optogénétique des nAChR 174

8.4 Amélioration de la boîte à outils de la pharmacologie optogénétique des nAChR 178

8.4.1 Photo-inhibition des b4*nAChR dans la voie mHb-IPN 178

8.4.2 Développement de lignées knock-in b2E61C et b4E61C 182

8.4.3 Développement de nouveaux photoswitchs 182

Annexes 185

Annexe 1 – Lemoine & al, 2016 187

9.1 Résumé 187

9.2 Publication : « Optogenetic Control of Mammalian Ion Channels with Chemical Photoswitches » D. Lemoine, R. Durand-de Cuttoli, A. Mourot. Methods in Molecular

Biology vol. 1408 (2016) 187

Annexe 2 – Forget & al, 2018 207

9.3 Résumé 207

9.4 Publication : « A human polymorphism in CHRNA5 is linked to relapse to nicotine seeking in transgenic rats » B. Forget, ..., R. Durand-de Cuttoli et al. Current Biology

(2018). 207

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Résumé

L’addiction à la nicotine est une pathologie qui concerne un tiers de la population adulte mondiale et qui est souvent associée avec d’autres troubles psychiatriques tels que la dépression, la schizophrénie ou encore les troubles liés au stress. Chaque année, près de 8 millions de personnes décèdent des conséquences de la consommation de tabac. Cette pathologie constitue la première cause de morts évitables dans le monde. Ce phénomène de dépendance au tabac est induit par la nicotine, principale substance addictive et psychoactive du tabac, qui va agir sur les récepteurs nicotiniques de l’acétylcholine (nAChR) et ainsi détourner le fonctionnement normal de différents circuits neuronaux. De manière aigüe, la nicotine agit directement sur les nAChR ce qui va globalement activer les réseaux neuronaux. A plus long terme, elle va induire une plasticité synaptique et perturber la transmission nicotinique endogène. La nicotine va notamment détourner le système dopaminergique, acteur majeur de l’apprentissage par renforcement, de la motivation et de l’évaluation de la récompense. Ces modifications neuronales conduisent non seulement au renforcement mais entrainent aussi une perturbation de différents traits comportementaux (prise de décision, exploration, vulnérabilité au stress, etc.). Ces relations entre symptômes et traits pourraient expliquer les fortes comorbidités observées entre la dépendance aux drogues d’abus, et particulièrement au tabac, et d’autres manifestations pathologiques telles que les troubles liés au stress.

Au cours de cette thèse j’ai tout d’abord abordé les bases neurophysiologiques qui sous-tendent ces comorbidités, en proposant la dopamine comme un substrat commun aux effets du stress social, de la nicotine et des perturbations de la prise de décision associées (impulsivité, sensibilité à la récompense, évaluation du risque, etc.). J’ai pu montrer que l’augmentation de l’activité des neurones dopaminergiques observée après une exposition à la nicotine ou à un stress social est responsable des perturbations des comportements de choix chez la souris. En effet, nous avons pu reproduire ces altérations comportementales en élevant artificiellement le niveau d’activité des neurones dopaminergiques à l’aide de stimulations optogénétiques.

La dissection des mécanismes par lesquels la nicotine détourne les circuits neuronaux se heurte aujourd’hui à un manque d’outils permettant une manipulation sélective, réversible et avec une résolution spatio-temporelle suffisante des acteurs moléculaires impliqués. Une deuxième partie de mon travail de thèse a consisté en l’implémentation in vivo chez la souris, de la pharmacologie optogénétique pour les nAChR. La photo-inhibition des nAChR contenant la sous-unité b2 nous a permis de mettre en évidence l’impact de la modulation cholinergique endogène sur l’activité des neurones dopaminergiques. Nous avons pu, en outre, inhiber la réponse de ces mêmes neurones à l’injection intraveineuse aiguë de nicotine et le renforcement associé dans une tâche de préférence de place conditionnée pour la nicotine.

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Abstract

Nicotine addiction is a condition that affects one third of the world's adult population and is often associated with other psychiatric disorders such as schizophrenia, mood- and stress-related disorders. Every year, nearly 8 million people die from the consequences of tobacco use. This pathology is the leading cause of preventable death in the world. This phenomenon of tobacco dependence is induced by nicotine, the main addictive and psychoactive substance in tobacco, which acts on nicotinic acetylcholine receptors (nAChRs) and thus hijacks the normal functioning of various neuronal circuits. Acute nicotine directly acts on nAChRs and activates neural networks. In the longer term, it will induce synaptic plasticity and disrupt endogenous nicotinic transmission. In particular, nicotine disrupts the dopaminergic system, a key player in reinforcement learning, motivation and reward evaluation. These neural changes not only lead to reinforcement but also to a disruption of different behavioral traits such as decision-making, exploration, vulnerability to stress, etc. These relationships between symptoms and features could explain the strong comorbidities observed between substance abuse, and particularly tobacco addiction, and other pathologies such as stress-related disorders.

During this thesis, I first addressed the neurophysiological bases underlying these comorbidities, by proposing dopamine as a common substrate for the effects of social stress, nicotine and associated decision-making disorders (impulsivity, reward sensitivity, risk assessment, etc.). I have shown that the increase in dopamine neuron activity observed after exposure to nicotine or social stress is responsible for disrupting choice behavior in mice. Indeed, we could reproduce these behavioral maladaptations by artificially increasing the activity level of dopaminergic neurons using optogenetic stimuli.

The dissection of the mechanisms by which nicotine diverts neuronal circuits is currently hampered by a lack of tools for selective, reversible, spatially and temporally precise manipulation of the molecular players involved. A second part of my thesis work consisted in the in vivo implementation in mice of optogenetic pharmacology for nAChR. The photoinhibition of b2-containing nAChRs revealed the impact of endogenous cholinergic modulation on the activity of dopaminergic neurons. We could optically inhibit the response of these same neurons to acute intravenous injection of nicotine and the associated reinforcement in a task of conditioned place preference for nicotine.

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Liste des abréviations

AAV Virus adéno-associé

Ac-CoA Acétyl-Coenzyme A

ACh Acétylcholine

AChE Acétylcholinestérase

ACTH Hormone corticotrope

AMPA Acide α-amino-3-hydroxy-5-methyl-4-isoxazolepropionic

AMPAR Récepteur glutamatergique type AMPA

AMPc Adénosine monophosphate cyclique

aopl Tractus optique accessoire

AVP Vasopressine

aVTA Aire tegmentale ventrale antérieure

aopl Tractus optique accessoire

b Température inverse

bX*nAChR Récepteur nicotinique de l’acétylcholine contenant bX

BDNF Brain derived neurotrophic factor

BNST Noyau basal de la strie terminale

CA1/CA3 Corne d’amon 1 et 3

CaTCh Calcium translocating channelrhodopsin

CoA co-enzyme

Ch Choline

ChT Transporteur de la choline

ChAT Choline-Acétyl Transférase

ChR2 Channelrhodopsin2

CIN Interneurones cholinergiques

CLi Noyau linéaire caudal

CNS Système nerveux central

CPP Conditioned Place Preference

Cre Cre-recombinase

CRH Corticotropin releasing hormone

CSD Défaite sociale chronique

DA Dopamine

DAergique Dopaminergique

DAG Diacylglycérol

DAT Transporteur de la dopamine

DATiCre Souris transgéniques exprimant la Cre-recombinase codon-optimisée

sous le contrôle du promoteur DAT

DHβE Di-hydro-β-érythroïdine

DS Striatum dorsal (caudate putamen)

eGFP enhanced Green Fluorescent Protein

EPSC Courants post-synaptiques excitateurs

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FSCV Fast-scan cyclic voltammetry

G Gamble

GABA Acide g-amino-butyrique

GABAA Acide g-amino-butyrique de type A

GABAB Acide g-amino-butyrique de type B

GAD Acide glutamique decarboxylase

GC Glucocorticoïde

GIRK Canal potassique rectifiant activé par les protéines G

Glu Glutamate

GR Récepteurs aux glucocorticoïdes

GWAS Genome-wide association study

HCN Hyperpolarisation-activated Cyclic-Nucleotid modulated Cation

Non-selective Channel

HDB Noyau des limbes horizontales de la bande de Broca

HFHB High firing, high bursting

HFLB High firing, low bursting

HPA Hypothalamic-Pituitary-Adrenal

iCre Cre-recombinase codon-optimisée

ICSS Auto-stimulation électrique intra-crâniale

IF Noyau interfasciculaire

IP3 Inositol-triphosphate

IPSC Courant post-synaptiques inhibiteurs

IPSP Potentiels post-synaptiques inhibiteurs

IRES Internal ribosome entry site

ISI Intervalle inter-spike

IPN Noyau interpédonculaire

IVSA Auto-administration intraveineuse

Kv Canal potassique voltage-dépendant

L-DOPA L-dihydroxyphenylalanine

LDT Noyau latérodorsal du tegmentum

LED Diode électro-luminescente

LFHB Low firing, high bursting

LFLB Low firing, low bursting

LGIC Ligand-gated ion channel

lHb Habénula latérale

LiGABAR Récepteur GABA photo-contrôlable

LiGluR Récepteur glutamate photo-contrôlable

LinAChR Récepteur nicotinique photo-contrôlable

LTP Potentialisation à long-terme

MAACh Maléimide Azobenzène AcétylCholine

mAChR Récepteur muscarinique de l’acétylcholine

MAHoCh Maléimide Azobenzène Homocholine

MATMA Maléimide Azobenzène Triméthylammonium

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MFB Faisceau médian du télencéphale

mHb Habénula médiale

ml Lemnisque médian

MLA Méthyllycaconitine

Mp Pédoncule mammilaire

MR Récepteurs aux minéralocorticoïdes

MS Septum médian

MT Noyau Médial terminal du tractus optique accessoire

NAc Noyau accumbens (striatum ventral)

nAChR Récepteur nicotinique de l’acétylcholine

NBM Noyau basal magnocellulaire ou noyau de Meynert

NMDA N-methyl-D-aspartate

NMDAR Récepteur glutamatergique type NMDA

OFC Cortex orbito-frontal

PA Potentiel d’action

PBP Noyau parabrachial pigmentosus

PFC Cortex préfrontal

PKA Protéine kinase A

PLC Phospholipase C

PN Noyau latéral paranigral

PNU-120596 Modulateur allostérique positif des nAChR a7*

POMC Pro-opio-mélanocortine

PPN Noyau pédonculopontin du tegmentum

PSTH Peri-stimulus time histogram

PVN Noyau para-ventriculaire de l’hypothalamus

pVTA Aire tegmentale ventrale postérieure

R Noyau Rouge

RCPG Récepteurs couplés aux protéines G

RLi Noyau linéaire rostral

RPE Erreur de prédiction de la récompense

SD Social defeat

sgRNA Small guide RNA

SK small conductance calcium-activated potassium channels

SNc Substance noire pars compacta (Striatum ventral)

SNL Partie latérale de la substance noire

SNP Single nucleotide polymorphism

SNR Partie réticulée de la substance noire

SPNs Striatal projecting neurons

scp Pédoncule cérébelleux supérieur

SubSD Sub-threshold social defeat

SWB Spikes within bursts

TANs Tonically active neurons

TH Tyrosine-3-Hydroxylase

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TM Domaine transmembranaire

TOC Troubles obsessionnels compulsifs

US Uncertain setting

V Valeur

VAChT Transporteur vésiculaire de l’ACh

VDB Noyau des limbes verticales de la bande diagonale de Broca

VGAT Transporteur vésiculaire du GABA

VGCC Canaux calciques voltage-dépendants

VGLUT Transporteur vésiculaire du glutamate

VMAT Transporteur vésiculaire des monoamines

VP Pallidium ventral

VTA Aire tegmentale ventrale

wt Wild-type

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Liste des publications

Ce travail a été effectué à Sorbonne Université (Campus Pierre et Marie Curie), au sein du laboratoire Neuroscience Paris-Seine (UMR 8246) dirigé par le Dr. Hervé Chneiweiss, dans l’équipe Neurophysiologie et Comportements (Dr. Philippe Faure et Dr. Alexandre Mourot) Ce travail devrait donner lieu à trois publications en tant que premier ou co-premier auteur :

- R. Durand-de Cuttoli, S. Mondoloni, A. Mourot. Dissection optique du rôle des récepteurs nicotiniques neuronaux à l’aide de récepteurs photo-contrôlables. Revue en français. Biologie Aujourd’hui (2017)

- R. Durand-de Cuttoli*, S. Mondoloni* & al. Manipulating midbrain dopamine neurons and reward-related behaviors with light-controllable nicotinic acetylcholine receptors. eLife (2018)

- M. Dongelmans*, R. Durand-de Cuttoli*, C. Nguyen* & al. Chronic nicotine and social stress alter exploratory behaviors in mice by increasing midbrain dopamine neuron activity. En préparation.

Ce travail m’a en outre permis de collaborer et devrait donner lieu à trois publications en tant que co-auteur :

- D. Lemoine, R. Durand-de Cuttoli, A. Mourot. Optogenetic Control of Mammalian Ion Channels with Chemical Photoswitches. Methods in Molecular Biology (2016) - B. Forget, …, R. Durand-de Cuttoli & al. A human polymorphism in CHRNA5

linked to relapse to nicotine seeking in transgenic rats. Current Biology (2018) - Zayed*, C. Baranowski*, R. Durand-de Cuttoli & al. Role of SWI/SNF chromatin

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19

Liste des formations et congrès

Au cours de ma thèse, j’ai eu l’opportunité de participer à différentes formations :

- Formation du CNRS à l’expérimentation animale de Niveau 1 – Concepteur « La connaissance et le bien-être de l'animal de laboratoire » N°I45CNRSCDTA F1-13, à Villejuif en mars 2016.

- Formation du CNRS à la chirurgie du rongeur « Connaissance de l'animal de laboratoire, spécialisation chirurgicale » N°R-13CNRS-Chir1-10 à Marseille en juin

2017.

J’ai aussi effectué une mission doctorale d’enseignement de 64h annuelles d’octobre 2014 à septembre 2017 en tant que CME (Chargé de Mission Enseignement) au sein de l’UFR 927 à l’Université Pierre et Marie Curie :

- 48h annuelles d’enseignement de travaux pratiques dans l’unité d’enseignement 2V415 « Physiologie des signalisations neuronale et hormonale » de la licence BGC de l’Université Pierre et Marie Curie. (Responsables A. Lohof et P. Serradas)

- 16h annuelles en tant qu’enseignant référent en Licence 1 BGC à l’UPMC

Participations à différents congrès internationaux :

- 2015 - Congrès de la Society for Neuroscience (SfN) à Chicago, USA (poster) - 2015 - Journées scientifiques des doctorants de 1ère année de l’ED3C (poster)

- 2016 - Congrès Dopamine à Vienne, Autriche (poster)

- 2016 - Journées scientifiques des doctorants de 2ème année de l’ED3C (présentation)

- 2017 - Retraite des doctorants de 3ème année de l’ED3C à Roscoff, France (Présentation)

- 2017 - Gordon research conference « Catecholamines » à Newry, USA (poster) - 2017 - Séminaire donné à UCSD San Diego, USA (Invité par Matthew Banghart) - 2018 - Séminaire donné à New York University, NYC, USA (Invité par Nicolas Tritsch) - 2018 - Séminaire donné à l’hôpital Mount Sinaï, NYC, USA (invité par Scott Russo)

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Liste des figures

Introduction

• Figure 1.1 – Anatomie des voies cholinergiques

• Figure 1.2 – Cycle biochimique de synthèse (1) et dégradation (2) de l’ACh et recapture

de la choline (3)

• Figure 1.3 – Structure des nAChR : l’exemple d’α4β2 • Figure 1.4 – Transitions allostériques des nAChR

• Figure 1.5 – Répartition des différents sous-types de nAChR dans le cerveau • Figure 2.1 – Biosynthèse des catécholamines

• Figure 2.2 – Anatomie du système dopaminergique et de l’aire tegmentale ventrale chez

le rat (VTA)

• Figure 2.3 – Activité spontanée des neurones DAergiques de la VTA

• Figure 2.4 – La DA et le codage de l’erreur de prédiction de la récompense • Figure 3.1 – Expression des nAChR au sein de la VTA

• Figure 3.2 – Réponses des neurones DA de la VTA in vivo à l’injection aiguë systémique

de nicotine

• Figure 3.3 – Rôle de la sous-unité b2 dans la réponse in vivo des neurones DA de la VTA à l’injection aiguë et systémique de nicotine

• Figure 4.1 – Schéma de l’axe HPA et des fonctions physiologiques associées • Figure 4.2 – Effets du stress social sur le système DAergique

• Figure 4.3 – Protocoles de Chronic Social Defeat (CSD) et Subtreshold Social Defeat

(SubSD)

• Figure 4.4 –Tâche de bandit-manchot pour souris avec ICSS et analyse basée sur le

modèle d’incertitude

• Figure 4.5 – La délétion de la sous-unité b2 dans la VTA affecte la prise de décision sous incertitude

Discussion

• Figure 8.1 – Expression conditionnelles de JAWS (Halorhodopsine) dans les neurones

DA de la VTA

• Figure 8.2 – Expression conditionnelle de b2E61C dans les neurones DA de la VTA

• Figure 8.3 – La voie mHb-IPN et la réponse des neurones de l’IPN à l’injection aiguë

de nicotine (i.v.) chez la souris anesthésiée

• Figure 8.4 – Photo-inhibition des b4*LinAChR ex vivo et in vivo

• Figure 8.5 – Photo-modulation de la transmission nicotine endogène in vivo dans

l’IPN

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(28)

25

Avant-propos

L’addiction à la nicotine tue plus de 7 millions de personnes chaque année dans le monde. L’organisation mondiale de la santé (OMS) estime qu’environ un tiers de la population adulte mondiale consomme du tabac1. Près de la moitié des fumeurs décéderont des conséquences

directes de la consommation de tabac et près d’un million de personnes succomberont des causes du tabagisme passif. L’addiction au tabac constitue la première cause de morts évitables dans le monde et, bien que les politiques gouvernementales de prévention et les tentatives pour endiguer cette épidémie se soient révélées partiellement efficaces dans les pays développés, la prévalence de cette pathologie, ses conséquences dramatiques en termes de santé publique et le coût immense pour la société en font toujours un sujet brûlant d’actualité.

La dépendance au tabac est une pathologie psychiatrique dont le diagnostic repose sur la concomitance de symptômes listés par le DSM-V américain2. Le nombre de symptômes

présentés définit le stade de dépendance et influe directement sur le pronostic. L’addiction aux drogues d’abus se caractérise par différentes phases : 1) le renforcement à la substance, 2) le développement d’une tolérance pour la substance et l’augmentation de la consommation, 3) une motivation accrue pour se procurer la substance (craving), 4) l’apparition de symptômes

de manque lors du sevrage et 5) une rechute quasi-systématique lors des tentatives de sevrage.

La fumée de tabac contient plusieurs milliers de composés chimiques, souvent toxiques, irritants ou cancérigènes. La nicotine en est la principale substance addictive et psychoactive. Une fois absorbée par voie aérienne, elle agit directement au niveau du cerveau sur les récepteurs nicotiniques à l’acétylcholine (voir chapitre 1 de l’introduction). La nicotine, en se fixant sur les récepteurs nicotiniques, va conduire d’une part à une activation aiguë des réseaux neuronaux et d’autre part à des modifications moléculaires et synaptiques à plus long terme. Au cours de ma thèse je me suis intéressé à cette action de la nicotine à deux niveaux, en étudiant la réponse aiguë du système dopaminergique et en évaluant l’impact de la nicotine sur la transmission cholinergique endogène. Ces perturbations entraînent un renforcement pour la substance et des comportements de consommation aberrants (voir chapitre 2 et 3 de l’introduction).

(29)

26

Il existe une forte comorbidité entre la dépendance, particulièrement au tabac, et de nombreux autres troubles psychiatriques (troubles liés au stress, anxiété, dépression, schizophrénie, troubles obsessionnels compulsifs, etc.). Ces différentes pathologies, complexes et multifactorielles, affectent de nombreux réseaux neuronaux parmi lesquels le système dopaminergique (voir chapitre 4 de l’introduction). De plus, les individus ne présentent pas tous la même vulnérabilité aux troubles psychiatriques et à l’addiction en particulier. Si une partie des différences interindividuelles s’explique par des prédispositions génétiques, de nombreux travaux récents dont ceux du laboratoire suggèrent que les traits de personnalité dans un environnement social reposent aussi sur une modification de « l’état neurophysiologique » des individus3,4. Ces études montrent notamment que les différences comportementales observées

dans un environnement social corrèlent avec des différences dans l’activité des neurones dopaminergiques de l’aire tegmentale ventrale. Ainsi, la première grande question qui m’a animé au cours de ma thèse était d’interroger les bases neurophysiologiques qui sous-tendent ces comorbidités en proposant la dopamine comme un substrat commun aux effets du stress, de la nicotine et des perturbations de la prise de décision associées (impulsivité, sensibilité à la récompense, évaluation du risque, etc.) (voir chapitre 1 des résultats).

Pour ce faire, nous avons mis au point au laboratoire une tâche comportementale (inspirée de la tâche de bandit-manchot à plusieurs choix) permettant d’évaluer chez la souris la prise de décision et la sensibilité à la récompense. Nous observons que le stress social et l’exposition chronique à la nicotine modifient de manière similaire : i) l’activité des neurones dopaminergiques de l’aire tegmentale ventrale et ii) les comportements de choix : cette modification des comportements passe par une augmentation de la sensibilité pour la valeur de la récompense. Nous avons ensuite pu récapituler ces effets comportementaux en manipulant artificiellement l’activité des neurones dopaminergiques de l’aire tegmentale ventrale par des techniques de stimulation optogénétique. Ces résultats posent les bases d’une neurophysiologie de la vulnérabilité aux troubles psychiatriques et suggèrent des mécanismes communs pour expliquer les comorbidités.

La dissection des mécanismes par lesquels la nicotine détourne les circuits neuronaux se heurte aujourd’hui à un manque d’outils permettant une manipulation sélective, réversible et avec une résolution spatio-temporelle suffisante des acteurs moléculaires impliqués. Une deuxième partie de mon travail de thèse a consisté en l’implémentation in vivo chez la souris, de la pharmacologie optogénétique pour les récepteurs nicotiniques à l’acétylcholine (voir chapitre

(30)

27

5 de l’introduction et chapitre 2 des résultats)5–8. L’idée est de modifier les récepteurs de

manière à y accrocher un photoswitch chimique photosensible qui va interagir avec le site de liaison des agonistes. J’ai ainsi pu montrer qu’il était possible de développer in vivo une pharmacologie cellule-spécifique des nAChR et que la photo-inhibition d’un sous-type précis (les nAChR contenant la sous-unité b2) dans un noyau dopaminergique (l’aire tegmentale ventrale) suffit à abolir le renforcement pour la nicotine. Cette stratégie offre aussi de nouvelles perspectives dans l’étude de la modulation cholinergique endogène dans le cerveau et les perspectives d’application aux différents sous-types de nAChR permettraient de résoudre les questions qui demeurent pour la compréhension de ces circuits.

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29

Chapitre 1 - Le système cholinergique

1.1 L’acétylcholine

L’acétylcholine (ACh) est identifiée pour la première fois en 1865, d’abord sous le nom de

protagon puis à nouveau en 1866, par Adolf van Baeyer, sous son nom définitif9,10. Cette

molécule est alors considérée comme l’unique composé chimique endogène du cerveau. En 1905, John Newport Langley propose l’existence d’un récepteur « chimique » impliqué dans la contraction musculaire11. A cette époque, l’idée d’une communication chimique entre les

neurones fait encore débat dans la communauté scientifique, qui reste convaincue que la communication neuronale est exclusivement électrique. Il faudra attendre 1914 pour que Henry Hallett Dale isole l’ACh à partir de l’ergot du seigle, un champignon ascomycète parasite du seigle, et montre que son application produit les mêmes effets qu’une stimulation électrique des fibres parasympathiques12. Otto Loewi, en 1921, viendra confirmer l’hypothèse de la

modulation cholinergique du système parasympathique avec ses études sur le nerf vague d’un cœur isolé de grenouille13. Dès les années 30, l’ACh est considérée comme un

neurotransmetteur endogène. Loewi et Dale reçoivent conjointement en 1936 le prix Nobel de physiologie et médecine pour leurs travaux.

On sait aujourd’hui que la transmission cholinergique transmet un signal global et diffus dans le cerveau14,15. L’ACh joue au niveau du système nerveux central (SNC) un rôle important dans

de nombreuses fonctions cérébrales telles que l’intégration sensorielle16, les processus

attentionnels17, le sommeil et les niveaux d’éveil18,19. Elle est en outre impliquée dans de

nombreuses pathologies neurologiques et psychiatriques telles que l’épilepsie, la schizophrénie, l’anxiété ou encore l’addiction à la nicotine20.

1.2 Anatomie des voies cholinergiques

Les études en immunohistochimie ont permis de déterminer que la plupart des neurones cholinergiques sont retrouvés dans des structures sous-corticales projetant largement dans le SNC et innervant de nombreuses régions parmi lesquelles le cortex, l’hippocampe, le thalamus et les noyaux limbiques17,21. Les études portant sur l’analyse de l’expression du transporteur

vésiculaire de l’ACh (VAChT) ont contribué à délimiter des foyers cholinergiques au sein du SNC21.

(33)

30

Les neurones cholinergiques sont distribués au sein de trois grandes régions : le tronc cérébral (hindbrain), le télencéphale basal (basal forebrain) et l’épithalamus. On retrouve aussi bien des neurones de projection qui vont libérer l’ACh à distance dans leurs structures cibles que des interneurones qui vont agir au niveau local au sein même des noyaux cholinergiques. Il existe dans le cerveau 8 noyaux cholinergiques (ch1 à ch8, voir Figure 1.1). Ces noyaux ne sont pas composés uniquement de neurones cholinergiques et leur proportion va varier d’une région à l’autre :

Figure 1.1 – Anatomie des voies cholinergiques : HDB = limbes horizontales de la bande

diagonale de Broca (ch3), IPN = noyau interpédonculaire, LDT = noyau tegmental latéro-dorsal (ch6), mHb = habénula médiale (ch7), MS = septum médial (ch1), NBM = noyau basal magnocellulaire (ou de Meynert, ch4), PPN = noyau tegmental pédonculo-pontin (ch5), VDB = limbes verticales de la bande diagonale de Broca (ch2), VTA = aire tegmentale ventrale. Le noyau parabigéminal (ch8) n’est pas représenté sur ce schéma.

- Le premier groupe de noyaux cholinergiques comprend : le septum médian (ch1, MS) qui est constitué de 10% de neurones cholinergiques, le noyau des limbes verticales

de la bande diagonale de Broca (ch2, VDB) est constitué à 70% par des neurones

cholinergiques, le noyau des limbes horizontales de la bande de Broca (ch3, HDB, 1% de neurones cholinergiques) et le noyau basal magnocellulaire ou noyau de

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31

- Un deuxième groupe de neurones cholinergiques est retrouvé au niveau du noyau

pédonculo-pontin tegmental (ch5, PPN), du noyau latéro-dorsal tegmental (ch6,

LDT) et, dans une moindre mesure, dans le locus coeruleus et la zone péri-acqueducale. - L’habénula médiale (ch7, mHb) et le noyau parabigéminal (ch8) constituent les deux

derniers noyaux identifiés comme étant cholinergiques.

Les neurones cholinergiques de projection innervent de nombreuses structures cérébrales impliquant une neuromodulation diffuse et globale au niveau de l’encéphale (Figure 1.1). Le striatum (aussi bien sa partie dorsale que sa partie ventrale) reçoit une forte innervation cholinergique. C’est aussi le cas des tubercules olfactifs, du noyau sous-thalamique et du noyau rouge. Le noyau interpédonculaire (IPN) reçoit de fortes afférences cholinergiques de la mHb et du PPN. Bien que très importante du point de vue fonctionnel, l’innervation cholinergique des grands noyaux dopaminergiques (DAergiques) que sont l’aire tegmentale ventrale (VTA) et la substance noire pars compacta (SNc) est moins dense. Enfin, la plupart des interneurones cholinergiques sont retrouvés au niveau du cortex et du striatum22. Au niveau du striatum, ces

interneurones sont appelés CINs (cholinergic interneurons) ou anciennement TANs (tonically

active neurons). Bien que peu nombreux, ils jouent un rôle majeur dans la modulation de

l’activité des neurones striataux de projection (SPNs) cibles importantes de la dopamine aussi bien dans le striatum dorsal (SNc-DS) que dans le Noyau Accumbens (VTA-Nac).

1.3 Biosynthèse de l’ACh

Du point de vue biochimique, l’ACh est synthétisée dans le cytosol des neurones par un transfert du groupement acétyl de l’acétyl-Coenzyme A (Ac-CoA) à la choline sous l’action d’une enzyme, la choline-acétyl transférase (ChAT, Figure 1.2). L’ACh ainsi produite est alors transportée dans des vésicules par action de l’enzyme de transport vésiculaire de l’ACh (VAChT, vesicular acetylcholine transferase)17. Suite à une dépolarisation de la membrane du

neurone, l’ACh est libérée par exocytose vésiculaire à la manière d’un neurotransmetteur (Figure 1.2). L’existence d’une synapse cholinergique fait aujourd’hui encore débat au sein de la communauté et, pour beaucoup, l’ACh est libérée de manière volumique et non synaptique14,15.

(35)

32

Figure 1.2 – Cycle biochimique de synthèse (1), libération et dégradation (2) de l’ACh et recapture de la choline (3) : A = acetyl, CoA = co-enzyme A, Ch = choline, (adaptée depuis

D. Won, Pasadena city college).

L’ACh va alors, au niveau extracellulaire, agir sur deux types de récepteurs membranaires : des

récepteurs muscariniques et des récepteurs nicotiniques que nous détaillerons dans les

paragraphes suivants. L’ACh en excès dans le milieu extracellulaire est hydrolysée en acétate et choline sous l’action de l’acétylcholinestérase (AChE, Figure 1.2). Un transport actif via le transporteur de la choline (ChT) permet la recapture de cette dernière dans la cellule23.

1.4 Les récepteurs de l’acétylcholine

Deux types de récepteurs lient l’ACh : 1) des récepteurs métabotropes appelés récepteurs

muscariniques (mAChR) et 2) des récepteurs ionotropes de la classe des récepteurs canaux

(36)

33

1.4.1 Les récepteurs muscariniques (mAChR)

Les mAChR sont des récepteurs métabotropes à sept domaines transmembranaires couplés aux protéines G (RCPG). Il en existe cinq types (M1 à M5). Les récepteurs M1, M3 et M5 sont couplés à une protéine Gq qui va activer la phospholipase C (PLC), ce qui induit une élévation de l’inositol-triphosphate (IP3), du diacylglycérol (DAG) et de la concentration intracellulaire

de Ca2+. Les récepteurs M2 et M4 quant à eux sont couplés à une protéine Gi/Go qui va inhiber

l’adénylate cyclase ainsi qu’à des canaux K+ rectifiants (GIRK) dont ils vont favoriser

l’ouverture.

Au niveau du SNC, ils sont largement distribués et sont impliqués dans de nombreuses fonctions végétatives, sensorielles, motrices et cognitives24. Chez l’animal, leur stimulation

favorise l’apprentissage, provoque une hypothermie, des tremblements et des convulsions. Au sein des neurones DAergiques du mésencéphale, on retrouve principalement le récepteur muscarinique de type M5 qui serait impliqué dans la modulation de l’excitabilité de ces neurones. Les autres récepteurs muscariniques y sont peu ou pas exprimés et ne seraient pas impliqués dans la modulation cholinergique du circuit dopaminergique24–26. Dans cette thèse,

nous n’aborderons pas la fonction des récepteurs muscariniques et nous nous focaliserons sur la dissection de la transmission nicotinique.

1.4.2 Les récepteurs nicotiniques (nAChR)

Les nAChR tirent leur nom de la nicotine, un alcaloïde lipophile présent en forte concentration dans le tabac, dont il est la principale substance addictive. Dès 1905, Langley montre que l’application de nicotine évoque une contraction des muscles squelettiques puis un blocage à plus long terme11. Suite à ces observations, il pose l’hypothèse qu’il existe un substrat chimique,

au niveau des muscles, sensible à la nicotine. Il faudra cependant attendre les travaux de Dale et Loewi pour que l’ACh soit impliquée au niveau de la jonction neuromusculaire12. Et ce n’est

que dans les années 1980 que les récepteurs à l’ACh liant la nicotine (nAChR) sont clonés27.

Ce sont des protéines membranaires qui, comme les récepteurs de la glycine, les récepteurs de la sérotonine (5HT3) et les récepteurs du GABA de type A (GABAA) font partie de la famille

des récepteurs à boucle cystéine (cys-loop superfamily). Ce sont des oligomères pentamériques (constitués de cinq sous-unités) assemblés en rosette. Les cinq sous-unités forment un canal ionique perméable aux cations28,20,29,30. On trouve chez les mammifères 17 gènes codant pour

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34

des sous-unités nicotiniques. Parmi ces gènes, 5 codent pour des sous-unités composant uniquement les récepteurs nicotiniques au niveau de la jonction neuromusculaire et 12 gènes codent pour des sous-unités composant les récepteurs nicotiniques neuronaux. On retrouve

donc, dans le SNC, 9 sous-unités a (2 à 10) et 3 sous-unités b (2 à 4). Plusieurs combinaisons

de récepteurs homopentamériques et hétéropentamériques aux propriétés biophysiques et pharmacologiques diverses existent dans le SNC (Figure 1.3A-C)28,20,29,30.

Les différentes sous-unités présentent une topologie identique, et sont constituées d’une chaîne polypeptidique de plus de 400 acides aminés présentant un large domaine amino-terminal extracellulaire (comprenant le site de liaison de l’ACh et la boucle cystéine Cys loop), 3 domaines transmembranaires (TM1, TM2 et TM3), une grande boucle intracellulaire, un quatrième domaine transmembranaire TM4 et une partie carboxy-terminale extracellulaire (Figure 1.3A et 1.3B).

Les sous-unités s’organisent en rosette autour d’un axe perpendiculaire à la membrane plasmique (Figure 1.3A). Les domaines TM2 des cinq sous-unités se font face pour constituer la paroi interne du canal ionique. De fait, les domaines TM2 et la boucle intracellulaire comprise entre TM1 et TM2 vont déterminer la sélectivité ionique du canal. Les sites de liaison de l’ACh (et autres agonistes) sont retrouvés dans le domaine extracellulaire à l’interface entre deux unités adjacentes. Lorsque l’agoniste se lie, il se place dans une poche formée entre une sous-unité principale (α) et une sous-sous-unité complémentaire adjacente (α ou β). Dans tous les cas, la face principale de la poche nécessite une paire de cystéines vicinales portée par une sous-unité α. Les résidus complémentaires sont portés par une sous-unité β2 ou β4 pour les récepteurs hétéropentamériques ou α7 dans le cas des récepteurs homopentamériques. Bien qu’elles aient un important rôle fonctionnel, les sous-unités α5 et β3 se positionnent en cinquième partenaire et ne participent pas à la liaison des agonistes. En effet, en dépit de sa classification ”α”, α5 a perdu un acide aminé crucial à la liaison de l’agoniste (la tyrosine 190, mutée en aspartate)31.

Cette machinerie moléculaire complexe permet ainsi la transduction d’un signal chimique (la liaison d’un agoniste) en un signal électrique (l’ouverture du canal, le passage d’ions et la dépolarisation de la membrane).

(38)

35

Figure 1.3 – Structure des nAChR : l’exemple d’α4β2 : (A) Structure tridimensionnelle aux

rayons X du récepteur nicotinique (α4)2(β2)3 (PDB ID 5KXI) vue de profil (gauche) et du dessus

(droite). Le ligand, ici la nicotine (rouge), se lie à l’interface de la sous-unité principale α4 (grise) et de la sous-unité complémentaire β2 (orange) ; (B) Structure tridimensionnelle d’une sous-unité α4. Trois domaines distincts sont présentés: le domaine extracellulaire qui contient le site de liaison de l’agoniste, le domaine transmembranaire (quatre hélices, M1 à M4), et le domaine intracellulaire (boucle M3-M4) dont une partie n’a pas été́ résolue par cristallographie (pointillés) ; (C) Représentation schématique des différents types d’assemblages des nAChR : en homopentamère (majoritairement α7), constitué de cinq sites

agonistes et en hétéropentamère (α)2(β)3 ou (α)3(β)2, avec deux ou trois sites agonistes (adaptée

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36

1.5 Les différents états du récepteur : modèle allostérique

La liaison d’un agoniste endogène (ACh) ou exogène (nicotine) au niveau du domaine extracellulaire du récepteur se fait à l’interface entre deux sous-unités. Elle va induire une réorganisation structurale du récepteur « à distance » : on parle d’allostérie. En effet, la distance entre le site de liaison et le canal (environ 50 Å) rend impossible une action directe de l’agoniste sur ce dernier. L’ouverture du canal est donc due à une transition conformationnelle du récepteur qui permet le passage des ions par gradient électrochimique. Ce type de transition a été décrit en 1965 dans le modèle Monod-Wyman-Changeux puis généralisé au récepteur nicotinique32,33. Le récepteur existe sous au moins trois états (Figure 1.4) : 1/ un état de repos

où le canal est fermé ; 2/ un état activé où le canal est ouvert et 3/ un état désensibilisé où le canal est fermé malgré la présence d’agoniste.

La liaison de l’agoniste provoque en une fraction de milliseconde une rotation du domaine extracellulaire et de TM2. Les résidus hydrophobes sont alors éloignés de la lumière du canal et laissent place aux résidus hydrophiles en parallèle d’un élargissement du canal33. Si

l’agoniste reste lié, le récepteur se désensibilise et le canal se referme. Les agonistes, comme l’ACh et la nicotine, ont une affinité préférentielle pour l’état désensibilisé. Cependant, pour une concentration élevée, l’ACh et la nicotine engendreront une activation puis une désensibilisation du canal du fait de la rapidité de la transition entre l’état de repos et l’état actif par rapport à la cinétique de désensibilisation.

Figure 1.4 – Transitions allostériques des nAChR : Il

existe trois états à l’équilibre du récepteur : repos,

(40)

37

1.6 Diversité des nAChR et localisation anatomique

Les différentes sous-unités de nAChR sont très conservées entre les espèces. En effet, l’homologie de séquence entre les différentes sous-unités nicotiniques varie chez l’humain entre 35 et 75%, et est conservée, pour une sous-unité donnée, à environ 90% entre le rongeur et l’humain34–36. Les éléments structuraux critiques, tels que les segments transmembranaires et

le site de liaison de l’agoniste, sont les plus préservés. Les travaux menés en immunohistochimie et hybridation in situ et les marquages à l’aide de radio-ligands ont permis d’établir la localisation anatomique des différentes sous-unités dans le cerveau (Figure 1.5). L’expression de ces différentes sous-unités offre une multitude de combinaisons possibles aux propriétés électrophysiologiques et pharmacologiques différentes20,29,30.

La densité de nAChR varie entre les structures cérébrales. Par exemple, on note que la VTA présente une expression dense et variée en sous-unités nicotiniques. Ces récepteurs peuvent être présents aussi bien au niveau présynaptique que postsynaptique, le long de l’arbre dendritique ou de l’axone, mais aussi au niveau somatique37,38. On note que les hétéropentamères contenant

α4 et β2 (α4β2*) sont parfois co-assemblés avec les sous-unités α5, α6 et β4 et sont abondamment exprimés dans le cerveau, de manière ubiquitaire. Les sous-unités α3 et β4 sont exprimées de manière discrète dans le cerveau. On les retrouve dans le cervelet, l’hippocampe, le thalamus, les noyaux du pont, la glande pinéale, le tractus solitaire et la rétine, mais surtout au niveau de la voie mHb-IPN (Figure 1.5).

Figure 1.5 – Répartition des différents sous-types de nAChR dans le cerveau, modifiée

(41)

38

1.7 Propriétés biophysiques et pharmacologiques des différents nAChR

Cette palette de sous-unités génère un grand nombre de combinaisons de pentamères qui présentent des propriétés pharmacologiques et électrophysiologiques diverses, rendant leur réponse, leur sensibilité à l’agoniste et leur désensibilisation variables d’un sous-type de nAChR à un autre39. Par exemple les hétéropentamères contenant les sous-unités α4 et β2 ont

une grande affinité pour la nicotine et l’ACh et présentent par conséquent une forte probabilité d’ouverture du canal. Alors que les homopentamères α7 de plus faible affinité, présentent une probabilité d’ouverture du canal moins grande. En revanche, les nAChR α7* présentent une forte conductance ionique, une importante perméabilité calcique comparée à leur perméabilité sodique et une désensibilisation rapide. Les récepteurs α3β4*, quant à eux, ont une affinité relativement faible pour les agonistes et désensibilisent beaucoup moins. Pour une même sous-unité α donnée, les oligomères contenant la sous-sous-unité β2 désensibiliseront plus rapidement que ceux contenant la sous-unité β439. La séquence protéique très conservée entre les différentes

sous-unités permet peu de sélectivité pharmacologique. Certaines molécules ne présentent ainsi que des affinités préférentielles pour certains types de nAChR40 : la méthyllycaconitine (MLA)

est un antagoniste préférentiel pour les homopentamères α7 ; la di-hydro-β-érythroïdine (DHβE) est un antagoniste faiblement spécifique pour les hétéropentamères comportant αβ ; la mécamylamine (MEC) est un antagoniste préférentiel pour les récepteurs hétéropentamériques α4β2, bien qu’elle puisse aussi agir sur les homopentamères α7 à fortes concentrations40.

1.8 Effet de la nicotine sur les récepteurs nicotiniques

Dans le cadre de la dépendance à la nicotine, une question fondamentale reste de comprendre les différences qui existent entre les effets de l’ACh et de la nicotine sur leurs récepteurs. L’ACh et la nicotine activent les différents nAChR avec des cinétiques d’activation et de désensibilisation différentes. De plus, l’ACh est rapidement dégradée par l’AChE dans l’espace extracellulaire ce qui évite une liaison répétée et/ou persistante et conduit à priori à peu de désensibilisation. En revanche, la nicotine est dégradée beaucoup plus lentement au niveau hépatique41 ce qui conduit à des liaisons répétées et persistantes avec comme conséquence

potentielle une plus forte désensibilisation des nAChR. Lors d’une exposition prolongée à la nicotine un phénomène d’up regulation a été décrit, c’est-à-dire une augmentation du nombre de récepteurs à la membrane des neurones41–45. En effet, des études post-mortem ont montré

une plus forte densité de nAChR α4β2* dans les cerveaux de fumeurs. Cet effet pourrait être une conséquence d’une stabilisation par la nicotine, qui agit au niveau intracellulaire comme

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une molécule chaperonne, des hétéropentamères α4β2 lors de leur maturation au niveau du réticulum endoplasmique46–49. On note que cette stabilisation s’opère préférentiellement sur les

hétéropentamères à stœchiométrie (α4)2(β2)3, qui sont par ailleurs plus sensibles aux agonistes

que les (α4)3(β2)246,49. Pendant la journée, le fumeur en consommant régulièrement du tabac,

maintient une concentration plasmatique élevée de nicotine (10 à 50 ng/ml) suffisante à priori pour saturer les nAChR, ce qui aurait pour effet de les maintenir dans un état désensibilisé. Au réveil ou lors du sevrage tabagique, cette concentration devient presque nulle et l’up regulation pourrait alors se traduire par une « hypercholinergie »50. En effet, l’augmentation de la densité

des nAChR, et plus particulièrement des nAChR α4β2*, implique une sur-activation de la transmission cholinergique nicotinique qui pourrait notamment être responsable des symptômes de manque et de rechute observés en clinique suite à un épisode de sevrage tabagique. Ce cycle up regulation/désensibilisation des nAChR pourrait ainsi jouer un rôle clé dans la régulation de la consommation de nicotine chez le fumeur51–54. Il a en outre été montré

que la surexpression des nAChR β2* se maintient jusqu’à 3 mois après l’arrêt du tabac55. Ces

modifications suivent donc l’évolution clinique du sevrage tabagique où les symptômes se dissipent au cours des premiers mois d’abstinence. Ces adaptations moléculaires induites par l’exposition à la nicotine perturbent ainsi la signalisation cholinergique endogène en modifiant le profil d’expression des différents nAChR dans les différents circuits.

1.9 Conclusion

La complexité de la transmission cholinergique dans le cerveau se traduit à plusieurs niveaux. En effet, l’ACh agit sur des récepteurs muscariniques et nicotiniques pour moduler de nombreux circuits cérébraux et des comportements aussi fondamentaux que l’apprentissage, la mémoire, les processus attentionnels, les comportements orientés vers un but ou encore la motivation. Les effets de la transmission cholinergique in vivo dans le cerveau restent cependant difficiles à étudier principalement à cause de limitations techniques. Notamment, mesurer les décours spatio-temporels de libération d’ACh in vivo reste une fiction et la fréquente superposition de la libération d’ACh avec la neurotransmission glutamatergique (co-release) rend les interprétations d’expériences optogénétiques in vivo délicates. Le développement récent de nouveaux indicateurs fluorescents offre de nouvelles perspectives et pourrait permettre des avancées dans la compréhension de la dynamique de la transmission cholinergique56. De plus, ACh et nicotine vont agir sur une très large palette de nAChR

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anatomiques variées renforcent la richesse et la complexité de cette transmission nicotinique. Les études menées sur les modèles génétiques, les approches classiques de pharmacologie et plus récemment la manipulation optogénétique de populations neuronales spécifiques ont permis de mieux disséquer la neuromodulation cholinergique. Malgré ces progrès, de nombreuses zones d’ombre demeurent dans notre compréhension de la neurobiologie des nAChR. Ces limites témoignent d’un réel besoin au sein de la communauté de disposer de nouveaux outils permettant d’une part d’apprécier la libération d’ACh in vivo et d’autre part de manipuler de manière sélective et avec une bonne résolution à la fois spatiale et temporelle la transmission nicotinique. Récemment, l’émergence des techniques d’édition de gènes a permis par exemple de développer des outils moléculaires autorisant une perte de fonction très localisée pour une sous-unité donnée de nAChR57. Ces outils, dont l’action est irréversible, reposent sur

l’utilisation de vecteurs viraux et n’offrent malheureusement pas une résolution spatio-temporelle compatible pour une dissection complète de la transmission nicotinique. Dans le but de combler ce manque d’outils sélectifs et suffisamment précis pour l’étude détaillée des nAChR, une partie de mon travail de thèse a été de tirer parti des avantages de la pharmacologie optogénétique, permettant de contrôler avec la lumière des récepteurs endogènes (voir chapitre 5 de l’introduction et chapitre 2 des résultats).

Figure

Figure 1.1 – Anatomie des voies cholinergiques : HDB = limbes horizontales de la bande  diagonale de Broca (ch3), IPN = noyau interpédonculaire, LDT = noyau tegmental  latéro-dorsal (ch6), mHb = habénula médiale (ch7), MS = septum médial (ch1), NBM = noyau
Figure 1.2 – Cycle biochimique de synthèse (1), libération et dégradation (2) de l’ACh et  recapture de la choline (3) : A = acetyl, CoA = co-enzyme A, Ch = choline, (adaptée depuis  D
Figure 1.3 – Structure des nAChR : l’exemple d’α4β2 : (A) Structure tridimensionnelle aux  rayons X du récepteur nicotinique (α4) 2 (β2) 3  (PDB ID 5KXI) vue de profil (gauche) et du dessus  (droite)
Figure  1.5  –  Répartition  des  différents  sous-types  de  nAChR  dans  le  cerveau,  modifiée  d’après Taly et al., 2009 20,8
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