Approche sociologique de l'organisation de la gestion.
L'exemple de la jussie
Marie-Jo MENOZZI
De quelle manière la jussie s’inscrit dans l’histoire locale
La jussie est devenue troublante quand elle a commencé à brouiller les frontières entre l’eau et la terre (déjà floues en zone de marais)
La jussie s’inscrit dans les problématiques locales la pollution des eaux par les pesticides
la fermeture des milieux et la déprise agricole le comblement des lacs
la désignation des acteurs de la gestion des sites…
Marais de Vilaine
Barthes de l’Adour
représentations et modalités de classifications
• invasive ou envahissante ?
• Étrangère ou locale
• Ambivalente (belle et nuisible !)
• Sauvage mais pas naturelle
(prédateur, incontrôlable, une pollution désordre de la nature)
• La nature = des marais travaillés par l’homme
Une ambivalence largement exploitée par la presse
Ouest France 30/08/01
«Alerte à la jussie dans le lit du Don. On la trouverait presque jolie, la jussie, avec ses petites fleurs
jaunes. Derrière cet aspect inoffensif, cette plante
exotique est en fait une fossoyeuse du milieu aquatique local».
Ouest France 10/03/05
« Non, la jussie n’est pas un alien, mais
c’est quand même un monstre capable en un rien de temps de se multiplier à l’infini.
»
En quels termes se pose la question des espèces invasives
Le critère de l'origine (exotique / locale)
Le critère de l'impact (cause des nuisances / n'en cause pas). (un critère favorable à la
relation scientifiques / gestionnaires?).
La construction d'un regard négatif sur ces espèces ?
Une espèce invasive ?
• Scientifiques :
– Exotique, introduite, naturalisée, induisant des modifications sur les écosystèmes ?
→ Et les « profanes », qu’en pensent-ils ? Invasive ?
Plutôt une plante envahissante.
Exotique ?
• Exotique, un critère pour certains écologues pour définir une IB
• Pose des problèmes, notamment distinguer plantes introduites et plantes locales
• Étrangère, certes, mais pas un trait discriminant en soi.
• Gênante parce que envahissante ET étrangère
• En opposition à des plantes locales
patrimonialisées
• (flûteau nageant,
«mâcres»…)
… /…
C’est plutôt une question d’équilibre
• Si une espèce reste à sa place, son origine
n’importe guère.
• Le problème : la jussie prend TOUTE la place!
• La fermeture des milieux par la jussie ou des
espèces locales, c’est un peu la même chose.
• Certains écologues jugent caduque la
distinction exotique / indigène
• Vont observer la compétition entre espèces
Impact = invasion biologique ?
• Pour certains écologues, un critère pour définir
une espèces invasive
• Pour d’autres, c’est trop subjectif.
• Une espèce envahissante est une espèce qui cause des nuisances ?
• Disparition des chroniques si on lui trouve un usage ?
• Le cas de la palourde japonaise
Pour questionner la gestion de ces espèces, il faut d'abord questionner notre relation à la nature, et ce que nous en attendons (la
maîtrise,la domination, valorisation de certains types de milieux (ouverts ?)...)
De la gestion d'une « bonne nature » contre une « mauvaise nature », incarnée par les espèces invasives ?
Souvent présentée sous forme de « lutte », de guerre »...
14
Une demande sociale de gestion...
gestion : « la production de règles sociales en vue de la maîtrise technique (Billaud,1999).
• Une « théorie de l'invasion » aussi impossible en sociologie qu'en écologie. Grande diversité des situations.
Quelle espèce gérer
Comment gérer
Qui doit gérer
Avec quelles techniques
Avec quels savoir
16
Les facteurs sociaux et culturels des difficultés de gestion
• Qui sont les acteurs impliqués dans la gestion
? (état des rapports sociaux)
• Quelles représentation des espèces et de leur dynamique, des techniques utilisées.
• Savoirs locaux sur les territoires
• Réflexions sur les temporalités
• Modalités d'organisation sociale dans les
milieux concernés ( d'une gestion individuelle à une gestion collective)
Les évidences de la gestion de la jussie (et des autres espèces ?)
Une nuisance collective qui appelle une gestion collective (= l'eau un bien collectif qui nécessite une gestion collective (Billaud).)
Une multitude d'acteurs de la gestion
La difficulté à identifier un acteur fédérateur (toutes catégories d'acteurs potentiels)
Une gestion qui nécessite la circulation et la partage de certaines connaissances (sur la
plante, sur les effets des actions techniques de gestion...)
Gestionnaires et experts : deux référentiels différents, ?
À qui de gérer ?
Usagers
Propriétaires (privés ou publics)
Administrations d’Etat
Structures territoriales (quête de légitimité)
Collectivités territoriales (communes, département, région)
Les limites d’une gestion dans les frontières du territoire que chacun à en gestion
Une multitude d'acteurs potentiels pour la gestion
Des choix effectués en fonction de nos attentes sociales et économiques.
L’arrachage mécanique
Rapide, efficace, mais arrache tout ?
Le traitement chimique
C’est le progrès, pas cher, efficace, rapide ?
La solution, que la science trouve un produit miracle… « un coup de pschitt, et on n’en parle plus ».
Traiter chimiquement dans les zones de marais, c’est cautionner la culture du maïs dans ces zones.
Le traitement manuel
C’est doux, traitement « jardinier » de l’espace. L’idéal ?
Une régression?
Qui veut encore mouiller la chemise?
Un travail d’intello manuel ?
Ou comment une technique
« archaïque » devient une
innovation sociale
Des manières variées de gérer les
espèces dites invasives
Espèces qui s'occupe motivations Niveau de prise en
charge Organisation collective connaissance scientifique
ragondin
structures
agricoles, fédé de chasse,
particuliers
Usages, préservation du milieu. Nécessité de la lutte jamais
questionnée
Décentralisée. Fragmentation des acteurs.
lutte orpheline. Abandon des scientifiques
Jussie
fédé pêche, eptb, syndicats rivières ou marais, administrations,
Usages, préservation
du milieu décentralisée
Groupes de travail technique, réseaux et têtes de réseau.
accompagnement par des experts, faible nombre. Aide à la gestion.
Prunus serotina
ONF, propriétaires privés, usagers, associations.
Espèce invisible pour les usagers. Pas de représentation commune
local
Fragmentation des acteurs. Impossibilité mise en œuvre plan national
(dysfonctionnement transfert information)
Quelques travaux scientifiques.
Peu connus du fait de l'absence de relations entre les différents acteurs et l'institution.
baccharis
Communautés Communes, gestionnaires natures
Envahissement milieux naturels
Organisation au niveau
intercommunal.
Groupes de travail technique
Ibis sacré Oncfs,RN, ONF,
administrations
Menace sur la
biodiversité (espèces patrimoniales)
centralisée ?
Groupe de travail régional.
problèmes éthiques posés par la décision de régulation.
cormoran
Oncfs, particulier professionnels, fédérations de pêche.
Nuisance usages (prédation dans les piscicultures)
centralisée Comité de suivi
Définition « scientifique » du nombre de tirs. Perspective universaliste des sciences exactes pour la gestion.
Ambrosia artemisiifolia L.
Collectivités locales, médecins, DRASS
Santé, adventice des cultures
Décentralisée. Locale et fragmentée ?
Arrêté préfectoral.
Obligation d'arrachage. ?
La relation
scientifiques -gestionnaires
Des attentes envers une cellule espèces invasives en Bretagne
Des gestionnaires en attente de solutions techniques opérationnelles
Une évidence, le caractère nuisible de ces espèces et la nécessité de les éradiquer.
Besoin d'interface entre la connaissance et la gestion
Des référentiels différents
Dimensions Scientifiques Gestionnaires
Perception espèces
Représentation pas forcément partagée
(prunus – scient lanceurs d'alerte / indifférence gestionnaires ?)
La définition des
objectifs Réguler Éradiquer
Le schéma de décision
Connaissance / diffusion de l'information / veille / évaluation / décision / action
Quand nuisance jugée trop importante ?
Le cadre spatial Global / gestion de l'écosystème Localisé / gestion de l'espèce
Le cadre temporel Long terme Court terme (sauver la
saison touristique)
Modalité
d'application des techniques
Expérimenter Appliquer une recette
échelle locale territoriale territoriale globale globale Sites
envahis
département/
BV région nationale supra nationale
acteurs
communes, privés,
associations pêche,
syndicat de marais, etc
Fédération de pêche,
conseil général, EPTB,
Administration départementale.
..
Administration régionale,
têtes de réseau départementales
Ministère, chercheurs
Commission européenne, organismes internationaux (UICN)
Type d'action
Action technique sur les sites
Action technique / organisation
Organisation Réglementat ion
Réglementation, recommandation s, directives
Observation / production de
connaissan ces
Production de connaissances scientifiques, d'expertises
À quelles échelles ?
La place réservée aux connaissances
Le besoin d'expertise.
Entre experts et gestionnaires, des référentiels différents
Temporalités différentes (agir de suite / réfléchir au protocole)
Réguler ou éradiquer ?
La lutte pour tous ?
Des priorités différentes (zones à gérer où des nuisances / où réservoir potentiel de boutures)
Question technique ou politique ?
Acteurs de terrain : ça nous dépasse, c'est à une échelle plus globale
Niveau national ou régional : c'est un problème de gestion technique, local. Ça ne nous regarde pas.
Problème technique = pas d'autre questionnement
Problème socio-technique = questionne l'organisation du territoire
Nécessité de débat éthique ?
Rôle et fonctionnement des groupes de travail
Quelles sont les demandes envers les groupes de travail aux différentes échelles
Quels apports à la gestion sur le terrain (enlèvement des espèces )
Création et gestion de listes d'espèces
Des groupes constitués à quelles échelles
(locale, territoriale, nationale, internationale...
?)
Analyser chaine de décision -action sur toute la chaine