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ACCEPTATION DE LA CLAUSE BÉNÉFICIAIRE ET DONATION INDIRECTE
MICHEL LEROY
Référence de publication : LEDA janv. 2020, n° 112j4, p. 1
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ACCEPTATION DE LA CLAUSE BÉNÉFICIAIRE ET DONATION INDIRECTE
L’acceptation du bénéficiaire du contrat d’assurance-vie ne constate pas l’existence d’une donation indirecte en l’absence de renonciation expresse de la part du souscripteur au droit de rachat.
Cass. 1re civ., 20 nov. 2019, no 16-15867, FS–PBI
Le souscripteur d’un contrat d’assurance-vie marié sous le régime de la communauté universelle, laisse pour lui succéder son épouse. Il avait souscrit plusieurs contrats d’assurance-vie dont sa maîtresse était bénéficiaire. Faute de pouvoir en réintégrer la valeur ou celle des primes, le conjoint et les enfants firent valoir l’existence d’une donation indirecte portant sur les primes.
Pour la cour d’appel, « un tel contrat peut être requalifié en donation si les circonstances dans lesquelles son bénéficiaire a été désigné révèlent la volonté du souscripteur de se dépouiller de manière irrévocable et que tel est le cas lorsque celui-ci a consenti à l’acceptation de sa désignation par le bénéficiaire dans la mesure où, en une telle hypothèse, il est alors privé de toute possibilité de rachat ».
Cette motivation ne pouvait être que censurée par la Cour de cassation. En effet, pour donner il faut se dépouiller. Et, il ne peut y avoir dépouillement que si le souscripteur est privé d’un droit et non simplement de son exercice.
Or, l’acceptation par elle-même ne produit pas cet effet. Cette manifestation unilatérale de volonté ne peut pas faire disparaître un droit dans le patrimoine du souscripteur.
En revanche, elle peut exprimer la volonté du bénéficiaire de recevoir la valeur dont le souscripteur se dépouille irrévocablement. Comment se dépouille le souscripteur ? En renonçant expressément à son droit de racheter. En effet, pour la Cour de cassation, dès lors qu’il est établi que le souscripteur « [...] avait renoncé expressément et irrévocablement à l'exercice de sa faculté de rachat des sommes versées au titre du contrat d'assurance sur la vie litigieux », il s’en déduit « que ce contrat a acquis un caractère non rachetable » (Cass. com., 12 déc. 2018, n° 17-20913).
Cette solution était déjà inscrite dans la célèbre décision de la Cour de cassation du 22 février 2008 (Cass. ch. mixte, 22 févr. 2008 : JCP G 2008, II, 10058), selon laquelle « en l’absence de renonciation expresse de sa part, le souscripteur d’un contrat d’assurance sur la vie mixte est fondé à exercer le droit de rachat prévu au contrat même en présence de bénéficiaires ayant accepté le bénéfice de ce contrat ».
L’arrêt de la première chambre civile de la Cour de cassation exprime la même idée que la chambre mixte : « en l’absence de renonciation expresse de sa part, le souscripteur d’un contrat d’assurance sur la vie mixte est fondé à exercer le droit de rachat prévu au contrat même en présence de bénéficiaires ayant accepté le bénéfice de ce contrat ». Or, en l’espèce, une telle clause n’existait pas.
En effet, une clause subordonnant le rachat à l’accord du bénéficiaire acceptant ne suffit pas, puisque, selon la Cour de cassation, pareille stipulation ne permet pas d’établir la renonciation expresse de son auteur au droit de racheter (Cass. 2e civ., 3 nov. 2011, n° 10-25364).
Il faut donc renoncer par avance à la créance de rachat.
Cette renonciation à l’exercice du droit constitue sans aucun doute une donation.