A NNALES DE L ’I. H. P.
G. C ASTELNUOVO
Sur quelques problèmes se rattachant au Calcul des Probabilités
Annales de l’I. H. P., tome 3, n
o4 (1933), p. 465-490
<http://www.numdam.org/item?id=AIHP_1933__3_4_465_0>
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Sur quelques problèmes
serattachant
au
Calcul des Probabilités
PAR
G. CASTELNUOVO
1. Sur le problème des moments. - I,a Théorie
analytique
desprobabilités,
oeuvre admirable de la matu- rité deLAPLACE,
est le fruit d’unelongue
méditationpoursuivie
pen- dantplus
de trente an s. On restesurpris
en effetlorsqu’on
remarque avecquelle profondeur
cegénie
avait dèssa jeunesse posé
et traitéquelques-
uns des
problèmes
lesplus
ardus de la Science. Sonpremier
travail surce
sujet, publié
enI780,
commence par cesparoles :
«Je
me propose« de traiter dans ce Mémoire deux
points importants
del’analyse
des« hazards
qui
neparaissent point
avoir été suffisammentapprofondis :
. « le
premier
a pourobjet
la manière de calculer laprobabilité
des« événements
composés
d’événementssimples
dont onignore
les pos-« sibilités
respectives ; l’objet
du second est l’influence des événements«
passés
sur lapossibilité
des événements futurs... ».Le
premier point
contient l’énoncé d’unproblème qui
attiredepuis
cette
époque
l’attention et les efforts desmathématiciens,
soit à causedes difficultés
analytiques qu’il
met enévidence,
soit à cause de l’intérêt dominantqu’il présente
pour le calcul desprobabilités.
En effet laloi
asymptotique qui
résout ceproblème
fournit en mêmetemps
laraison des succès que rencontre le Calcul des Probabilités dans
ses nombreuses
applications :
sous deshypothèses
trèslarges,
l’effetglobal qui
résulte de l’action d’un trèsgrand
nombre dephénomènes
°466
élémentaires suit une loi
indépendante
de cellesqui président
auxcauses initiales et
qui
d’ordinaire nous sont inconnues.LAPLACE a pu
préciser
la forme de cette loiasymptotique
seulementdans sa Théorie
analytique. Cependant
GAUSS avaitdéjà publié
à cetteépoque
sonpremier
Mémoire sur les erreursd’observation ;
la démons-tration
plus simple
et, en apparence,plus
satisfaisantequ’il
a donnéede la loi
qui porte
son nom, aprobablement
détourné l’attention desvues
plus larges
et des méthodesplus
élevées mais difficiles de LAPLACE.L/exposition
et lesapplications
que PoIssoN en a faites ne suffirent pas à vaincre l’indifférence des uns et lescritiques
des autres.C’est à un
géomètre
moins connu, àBIENAYMÉ,
que revient le mérite d’avoirrépondu
à cescritiques
etrappelé
l’attention sur le théorème de LAPLACE. Endéfendant,
enparticulier, l’usage
de lavaleur moyenne des carrés des erreurs,
employée
par LAPLACE d’unefaçon systématique,
BIENAYMÉ a fait une remarque extrêmementsimple,
qui
trouvecependant,
mêmeaujourd’hui,
de nombreusesapplications en statistique.
Il a montré quelorsqu’on
connaît la valeur moyenne d’une variable et la valeur moyenne du carré de sonécart,
onpeut préciser jusqu’à
un certainpoint
la loi deprobabilité
de la variable considérée.Cette remarque
frappa
l’attention d’ungéomètre
russeéminent,
TCHEBYCHEFqui généralisa
laquestion,
en formulant unproblème beaucoup plus important. Supposons
que les valeurs moyennes d’un certain nombre depuissances
de l’écart considéré soient connues ; com-ment
pourra-t-on préciser
ultérieurement la loi deprobabilité ?
Oubien,
si l’onpréfère employer
lelangage
de lamécanique :
avecquelle approximation
est-ilpossible
de déterminer une distribution de ma-tière sur une droite
quand
on en connaît les moments(par rapport
àun
point fixe) jusqu’à
un certain ordre ?Les ressources dont
disposait
legéomètre
russe et la finesse bien con- nue dont il faisait preuve dans toutes lesquestions d’approximation
luiont
permis
de résoudre ceproblème
difficile et de traiter enparticu-
lier le cas où les moments donnés
correspondent
à la loi deGAUSS,
ou
convergent
vers des momentsqui
suivent cette loi. C’est ainsi que TCHEBYCHEF réussit à donner lapremière
démonstrationrigoureuse
de la loi de GAuss en
partant
duprincipe
des erreursélémentaires,
formulé par LAPLACE.Cette démonstration a été
simplifiée
par la suite. On aproposé
d’autres démonstrations
plus
courtes et fondées sur desprincipes
dif-férents mais celle de TCHEBYCHEF me semble la
plus
directe et laplus
conforme aux buts de la
statistique. Quelques
mots me suffiront pourvous en faire
comprendre l’esprit.
Le
point
dedépart
est un faitremarquable qu’on
établit d’unefaçon élémentaire.
Considérons une succession illimitée de variables alé- toiresindépendantes
Xi, X2’ ... , a Xn, ... *
ayant, chacune,
la valeur moyenne nulle. Formons la somme des n pre-.
mières variables et posons , X1 + x9 + ... + xn
yn ^
V ~(~’~ + i~~ +....
+~n)’
’où
21,
est la valeur moyenne du carré de xi, etc. On démontre quesous des
hypothèses
trèslarges,
la valeur moyenne d’unepuissance quelconque
de yn tend vers la valeur moyennecorrespondante
d’unevariable
qui
suit la loi normale. Onpeut
écriresymboliquement
M (yrn) ~ I 03C0 f+oo tre - t2dt,
’
(r
= 0, I, 2, ...; n ~oo).
Une fois ce
point
établi lesquestions
suivantes seprésentent
spon- tanément àl’esprit :
1)
Démontrer que la loi de GAUSS est entièrement déterminée par les valeurs de ses moments ;2)
Démontrer la même chose pour la loi dont les moments sont écrits àgauche
de la dernièreformule ;
3)
Démontrer que si les moments d’une loi deprobabilité
variabletendent vers les moments de la loi
normale,
lapremière
loi tend versla
deuxième,
à savoir :Prob
(yn
~t) ~ I 03C0. t-~
XJ e-l2dt.Naturellement ces démonstrations ne sont pas
faciles ;
mais dumoins on voit à
chaque
pas le butqu’on
doitatteindre,
cequi
estun
avantage précieux
dans tout raisonnementmathématique.
468
Le
problème général
des moments formulé par TCHEBYCHEF a uneimportance beaucoup plus grande
et mérite d’être étudié à cause de l’intérêtqu’il présente
enl’Analyse indépendamment
de sesapplica-
tions au Calcul des
probabilités.
C’est à cepoint
de vue queSTIELTjES
l’arepris (1894-95)
dans son Mémoire célèbre consacré à la théorie des fractions continuesanalytiques ;
TCHEBYCHEF lui-même s’était servi de ces fractions pour sa démonstration.STIELTjES envisage
une distribution de matière sur une demi-droite x > o et considère les moments parrapport
àl’origine.
Si l’on dé-signe
par laquantité
de matière àgauche
dupoint
x, le momentd’ordre r est défini par
l’intégyale
deSTIELTJES
Cr
= ~oxrd03C6(x)
.Les cr étant données
(r
= o, 1, 2,...)
ils’agit
de déterminer unefonction de répartition 03C6(x),
monotone nondécroissante,
nulle à l’ori-gine
et satisfaisant auxéquations écrites, qui
sont en nombre infini. Un résultatimprévu
des recherches deSTIELTjES
c’est que si l’intervalled’intégration
estinfini,
leproblème peut
êtreindéterminé ;
onpeut
donc former une succession de nombres
positifs
co, ci, c2, ..., àlaquelle corresponde
un nombre infini de fonctions ; deux telles fonc- tions serontregardées
comme différentes si elles diffèrent au moins en unpoint
de continuité.Le
problème présente
de nouvelles difficultés si l’on suppose la matière distribuée sur la droiteentière,
et si l’onétend,
parconséquent,
les
intégrales
de - oo à + oo . Ce nouveauproblème
a été traité par de nombreuxgéomètres qui
ont fait ressortir ses liens avec les théories modernes del’Analyse : équations intégrales, développements
en sériede
polynômes orthogonaux,
matricesinfinies,
etc. C’est M. HAMBUR-GER
(1) qui
a obtenu les résultats lesplus précis
en établissant sous une forme assezsimple
les conditions nécessaires et suffisantes pour que ceproblème
soit déterminé.Je
me propose de montrer commenton
peut
retrouver ces conditions par une voieplus
directe etplus
élémentaire que celle suivie par M. HAMBURGER.
Je
tâcherai aussi d’éclaircirquelques points
par des considérations intuitives.(i) Ueber eine Erweiterung des Stieltjes Momentenproblems, Mathem. Annalen, vol. LXXXI- LXXXII (1920.)
Soit une succession illimitée de
quantités
réelles(moments)
co, ci, c2, ...données. On cherche une fonction réelle non
décroissante,
nullepour x = - oo , et telle que les
équations
soient satisfaites.
Si la fonction existe on voit tout de suite que les cr sont les coefficients d’une certaine forme
quadratique positive,
d’où résultent les condi- tions nécessairesLe cas où les ân s’annulent pour n
supérieur
à une certaine borne est dénué d’intérêt et sera laissé de côté.lorsque
les conditionsprécédentes
sontremplies,
onpeut,
en résol-vant un
problème algébrique,
d éterminer ~points xa (i
= r, 2, ...,n)
réels et
distincts,
et n massespositives P(Xi) qui
donnent lieu auxpremiers
2n moments :On voit immédiatement que les n
points
enquestion
sont les zéros del’équation
où le facteur constant est introduit dans le seul but de normaliser les
polynômes qui
forment une suiteorthogonale généralisée :
cp(x)
est ici une solution duproblème donné, qui,
comme nous le ver-rons, existe
toujours
si les conditions(2)
sontremplies.
Il convient
cependant
deremplacer
dansl’équation (3)
le momentC2n-l par un
paramètre
variable.1/ équation prend
alors la forme(4) Qn(x)
+ --- o~et
représente
unesimple
infinité de groupes de npoints,
c’est-à-direune invoiution d’ordre n sur la droite. Tout
point
xappartient
à unseul de ces groupes ; les autres
points
du groupe, que nousappelle-
rons les
~oints conjugués
dupoint
x, sont donnés parl’équation
en yque l’on
peut
écrire aussi sous la forme(5’) QoMQo(y)
+Qi(X)Qi(y)
+ ... ° + = o.Si l’on
applique
à unpoint x
la massepn(X)
déterminée par la for- muleon voit que
chaque
groupe de l’involution(4)
fournit une solution duproblème
relatif auxpremiers
2n-1 moments.Examinons maintenant comment varient les masses et leurs
points d’application lorsque n
croît. Fixons un de cespoints,
x. Il résulte de(6)
que la massecorrespondante
décroît et tend vers une limitepositive
ou nulle selon que la série.(7) I p(x) = Q20(x)
+Q21(x)
+ ...est
convergente
oudivergente.
On démontre d’ailleurs facilement que lespoints conjugués
de x serapprochent
de x, et tendent vers desposi-
tions
limites,
tandis quechaque
fois que n croit d’une unité un nou-veau
point conjugué apparait,
situé à l’extérieur dusegment qui
con-tient les autres.
On
peut représenter
la solution d’ordre n par une courbe enescalier,
avec n
paliers,
dont l’ordonnée enchaque point 1
mesure la somme desmasses situées à
gauche de S ;
les ndegrés
de l’escaliercorrespondent
aux
points d’application
des masses. Si ncroît,
lalargeur
despaliers
et la hauteur des marches diminuent.
Imaginons
toues les courbes enescalier
qui correspondent
aux valeurs successives de n, lepoint
de dis-continuité x restant fixe ou non. A cette famille de courbes on
peut appliquer
leprincipe
de sélectionqui
rend tant de services à l’ana-lyse
moderne. Onpeut
donc extraire de la famille une succession de courbesqui
admet une courbelimite y = ~ (x) .
On démontre d’ailleurs que cette courbe fournit une solution duproblème
des moments. Onvoit ainsi que le
problème
atoujours
unesolution,
et même une solutionqui possède
en unpoint
arbitraire x, fixéd’avance,
la massep(x)
don-née par
(7).
Ils’agit
de décider si la solution estunique,
au sensconvenu
(Problème déterminé),
ou s’il y aplusieurs solutions,
c’est-à- dire d’unefaçon plus précise
une infinité de solutions(pyoblème
indé-terminé)
.Il résulte immédiatement de ce
qui précède
que si la série de po-lynômes (7)
estconvergente
en tous lespoints
d’un ensemble con-tinu,
leproblème
est indéterminé. En effet la méthodeindiquée
per- met de construire une solution(p(~) qui
admet une discontinuité > o en unpoint x
del’ensemble ;
si l’on fait varier x d’une manièrecontinue,
lafonction 03C6(x), qui
nepeut posséder qu’un
ensemble dé- nombrable depoints
dediscontinuité, changera
nécessairement. On démontred’ailleurs,
par d’autresconsidérations,
que si leproblème
estindéterminé on
peut
construire une solutionayant
une disconti- nuité en unpoint quelconque
donnéd’avance,
et l’on en conclutque la série
(7)
estconvergente
pour toute valeurréelle,
finie de x.On obtient ainsi une
première
forme de la condition cherchée : lepro-
blème des moments est indéterminé si la série
(7)
convergepour
tous lespoints
d’un ensemble continu etpar conséquent
en toutpoint
de l’axeréel situé à distance
finie ; et réciproquement.
Nous verrons
qu’en
ce cas la série estconvergente
sur tout leplan complexe
et que la fonction est une transcendante entière.Si,
aucontraire,
leproblème
estdéterminé,
la série(7)
seradivergente
sur l’axe
réel,
sauf auplus
enune , infinité
dénombrable depoints
deconvergence ; on démontre
qu’elle diverge
sansexception
en toutpoint imaginaire.
On a réussi à donner un
exemple
intéressant de ces différents cas.Envisageons
une distribution de matière ayant la densité en toutpoint x
réel. Si a est un nombrepositif,
les moments d’une telle dis-tribution seront
finis,
et donneront lieu à unproblème
déterminési a
>
i. et indéterminé si a l(1).
Onpeut
aussi démontrer que leproblème
reste encore déterminé si l’onpart
d’une distribution discon- tinue de matière obtenue enplaçant
la masse avec 0:>
l,en tout
point
d’abcisse entière x = o, + l, ± 2, ... et ensupposant
la densité nulle
partout
ailleurs. Si l’onparvenait
à écrire sous uneforme
simple
lespolynômes
relatifs à ce dernierexemple,
onverrait que la série
(7)
estdivergente partout,
sauf auxpoints
entiersoù elle a la somme e|x|03B1.
La condition de détermination ou
d’indétermination,
fondée surl’examen de la série
(7),
n’est pas d’uneapplication
aisée. On a donccherché à
distinguer
les deux cas, enpartant d’expressions qui
ne conte-naient pas la variable. M. HAMBURGER y est parvenu en associant au
problème (principal)
relatif aux moments donnés co, ci, c2, ..., le pro- blème(secondaire) qui
consiste à chercher une distribution de ma-tière donnant lieu aux moments
co’ ==- Ça, Ci’ = C3, C2’ == C4, ..
A toute solution
drp
duproblème principal correspond
une solutionx2d’f
duproblème
secondaire avec une masse o(ou
infinimentpetite)
à
l’origine.
Si lepremier problème
estindéterminé,
le second l’estégalement.
Maisalors,
la masse limite dupremier problème
P(x)
= limPn(x)
n~~
et la masse limite du second
= ~~ lim
p’n’x)
--~ 00
sont
supérieures
à zéro en toutpoint.
En considérant enparticulier
l’ori-gine x -
o, et en ayant recours à la formule(6)
et à sonanalogue
pour (i) Voir par exemple la note : Proo f o f the generalised second-limit Theorem..., par MM. FRÉCHET et SHOAT (Transactions of the Mathematical Society, vol. XXXIII).473
le
problème secondaire,
on trouve les conditions nécessaires d’indé- termination(8) p~o) =
limj
~ o,~’(o)
= lim‘~r~~_,
> o~où
0394n’-1
etdn"-2
sont les déterminantsqu’on
obtient de 0394n en sup-primant
lapremière ligne
et lapremière colonne,
ou les deuxpremières lignes
et les deuxpremières
colonnes.M.
HAMBURGER, auquel
on doit cesconditions,
a démontréqu’elles
sont aussi
suffisantes. Je
peux vousesquisser
ici la voiebeaucoup plus rapide qui
apermis
à M. Marcel RIESZ(1)
de retrouver le même ré- sultat.Par une
simple
transformation du déterminantqui
entre dans laformule
(6)
on déduitl’égalité
est un
polynôme
dont les zéros sont les n-Jpoints conjugués
de l’ori-gine
dans leproblème principal
d’ordre n, tandis quepn(X)
etp’n(X) désignent,
commeci-dessus,
des masses serapportant
auproblème principal
et auproblème
secondaire. M. RIESZ cherche àmajorer
lesecond membre de
(9)
enremplaçant
dans lapremière
fraction lepolynôme Rn_i (,~)
par une fonctiontranscendante,
dont onpuisse
connaître le
comportement asymptotique
pour ncroissant,
et dans laseconde fraction le dénominateur
(x)
par uneexpression
dé-pendant
de(o).
On atteint ce second but en établissant l’iné-galité
où
l’expression
entreparenthèses désigne
leplus grand (en
valeurabsolue)
desrapports
obtenus en divisant lepolynôme Rn-1 (x)
par chacun des facteursqui
lecomposent (la
valeur de x étantfixée) .
(1) Sur le problème des moments, Arkiv för Matematik, Astronomi och Fysik (Svenska Vetens- kaps Akademien) vol. XVI, XVII (1922-23).
474
D’autre
part,
en tenantcompte
des sommes des valeursréciproques
des racines
%1, 03BE2,
... et de leurscarrés,
M. RIESZ établitl’inégalité Rn_,(t)
1 ~2 + un 1 t ~où
n
= co-pn(0) p’n-1(0)
est une constante
positive
et t une variablecomplexe.
De ces iné-galités
et del’égalité (9),
on déduit(10)
- XI[j
I +I x 2 1
(I0)
pn(x)
qui
fixe une borne inférieure à la massePn(X)
d’unpoint x quelconque, lorsqu’on
connaît les massesPn(O)
etappartenant
àl’origine.
Faisons maintenant croître n et supposons vérifiées les
inégalités (8).
reste finie et la masse tend elle aussi vers une limite> o en tout
point
x. Leproblème
des moments est donc in-déterminé,
résultatqui
est en accord avec le théorème de M. HAM-BURGER.
De
(10), qui
s’étend immédiatement aux valeurscomplexes de x,
il résulte
qu’en
ce cas la série depolynômes
(7) I p(x)
=03A3 Q2i (x)
définit une transcendante
entière,
dont le genre ne surpasse pas 2.Une évaluation ultérieure a conduit M. RIESZ à démontrer que pour toute valeur réelle de x on a
I p(x)
Ce|x|~x
où C est une constante
positive
et ot1 ex tend vers zéro pourlxl
- oc.En ce cas
d’indétermination,
la sérieplus générale
(II) > 03A3 Qi(x)Qi(y)
i=0
converge absolument et uniformément
lorsque
chacune des variables x, yparcourt
un domaine borné. Si l’on fixe la valeur de x,(II)
re-présente
une fonction entière de y ; ; si x est réel tous les zéros de cette fonction serontréels,
et le genre de la fonction sera 1.475
Il convient maintenant de mettre en lumière un autre côté de notre
problème,
celuiqui
concerne laposition
despoints d’application
desmasses. Nous savons
déjà
que si l’on suppose connus les moments co, ci, ...jusqu’à
c2n_~, et si l’on fixe unpoint
xo, les n-Ipoints conjugués qui, chargés
de massesconvenables,donn
ent lieu à ces mo-ments, sont déterminés. Les
points
sont les racines del’équation Q0(x0)Q0(x)
-+-Q1 (x0)Q1 (x)
+ ... ° +Qn-1 (x0)Qn-1 (x)
= oDésignons
parx~n~, x2n~, ~ ~ .
lespoints
que l’on rencontre enpartant
de x0
et en suivant le senspositif,
et parx(n)-2
... lespoints
situés à
gauche
de xo. Nous avons affirmédéj à
que si ncroît, ces points s’ap- prochent de x0
et tendent vers despositions limites x~I, x~2 ,..., x°° I, ...
Or,
il y a ici différents cas àdistinguer.
Ilpeut
se faire quex~
coïn-cide avec xo ; on démontre alors
qu’on
aaussi xo
=x~ === x:
- ...Le
point x0 attire,
pour ainsidire,
lespoints conjugués x(n)2,...
qui
se trouvent à sadroite ;
d’unefaçon plus précise
si l’on fixe unintervalle dont une des extrémités coïncide avec xo, il est
toujours
pos- sible de choisir n suffisammentgrand
pour que cet intervalle con-’
tienne un nombre arbitraire de
points x(n)I, x(n)2...
Naturellement lepoint
xopourrait
êtrepoint
d’attraction àgauche,
ou des deux côtésà la fois. ,
Le cas contraire où xo est un
point isolé,
xox~°° ,
se sub-divise lui aussi en
plusieurs
autres. Ilpeut
se fairequ’un point
yoqui parcourt
l’intervallex~ ~,
extrêmesexclus,
ait sesconjugués
y~-I, y~I
fixes enx~-I
etx~I
; oubien,
aucontraire,
cesconjugués y~I peuvent
varier avec yo. Ce dernier cas est leplus
intéressant. On démontre alors que la fonctiony~
= est croissante sur toute la droite etunivoquement invertible ;
la différencey~
admet unminimum
supérieur
à zéro en tout intervalle fini.lorsque
y~varie,
le groupe ’ ’ ’
y~-2, y~I , y0, y~I , y~2
... varie aussi etdécrit,
pour ainsidire,
une involution d’ordreinfini, qui peut
êtreregardée
comme lalimite,
pour n - oo, de l’involution(4)
dont nous avonsparlé
à propos duproblème algébrique. Chaque
groupe de l’involution d’ordre infini donne une solution duproblème
des momentslorsqu’on applique
au476
point yi
la masse > o, donnée par(7).
Leproblème
estindéterminé en ce cas, et en ce cas seulement. Les ~1 solutions dont
nous venons de
parler
sontappelées
par M. RIESZ solutions extré- males(1).
Il y a une infinité d’autressolutions,
parexemple
cellesqu’on
obtient en combinant linéairement deux ou
plusieurs
solutions extré- males au moyen deparamètres positifs ayant
une sommeégale
à J.Pour me rendre
compte,
par unprocédé intuitif,
des différentes circonstances queprésentent
lespoints conjugués
d’unpoint
variable
xo, j e
me suis servi d’unereprésentation géométrique que je
vais
indiquer
dans cequi
suit(2) .
Pour cela reprenonsl’équation algébrique. qui permet
de résoudre leproblème
d’ordre n.Rappelons
que si xo, xi,..., xn-i sont les
points d’application
des massesprodui-
sant les moments co, ci,..., deux
quelconques
de cespoints,
par ex. xo, xi, seront liés par
l’équation
Or,
si l’on pose(12)
xo + x, = 2 x , xo x1 = y cetteéquation
se transf orm e en lasuivante
Le
premier
membre est le discriminant d’une formequadratique
à~c - r variables
.
12
-2xf1
+ylo,
où
f 2
etfo
sont des formes définiespositives.
(i) Au point de vue analytique, on forme une solution extrémale en recourant à la série de polynômes (n) qui, en ce cas, pour x réel donné, représente une fonction transcendante entière de y, ayant tous les zéros réels. Ces zéros donnent avec x un groupe de l’involution d’ordre infini.
(2) Sul problema dei momenti, Giornale dell’ Istituto Italiano degli Attuari, anno I, 1930.
1/équation (13),
que nous écrirons brièvement . .(13’)
_ ~~’
représente
une courbealgébrique
d’ordre n - i reliée d’une manière trèssimple
à notreproblème. Traçons,
en effet laparabole
(14)
~
,
’y
= x2et
transportons
surelle,
parprojection parallèle
à l’axe v, lespoints
xo, xi, ..., xn-i formant notre groupe sur l’axe x. A
chaque
groupe de l’involution(4) correspond
un groupe d’une involutiond’ordre n,
sur la
parabole. Or,
on voit tout de suite que lestangentes
à lapara-
bole aux
points
d’un groupequelconque de
cette involution serencontrent deux à deux sur la courbe
Fn-1.
Celle-ci est donc lelieu des sommets de ~1
polygones
circonscrits à laparabole.
-Les
propriétés
bien connues du discriminant d’une formequadra- tique permettent
d’établirquelques
caractèrestopologiques
de lacourbe
Fn-1.
On voit ainsi que la courbe se compose de n2014I branches distinctes dupoint
de vuemétrique (comme par exemple,
pour n=3, les deux branches d’une
hyperbole).
Ces branches ne secoupent
pas et ne rencontrent la
parabole
en aucunpoint
réel. Une de cesbranches,
que nousappellerons Fn-I’
contient danssa
concavité laparabole
et laisse du côtéconvexe
les autres branches de la courbeFn-1.
Faisons maintenant croître n et suivons les variations de la branche
~n _ I ;
on voit facilementqu’elle
serapproche
de laparabole.
Maislorsqu’on
passe àla limite,
il y aplusieurs
cas àdistinguer.
Voici lesplus remarquables.
;Si le
problème
des moments est déterminé et donne lieu à une dis- tribution continue dematière,
la courbe limiteF~
coïncide avec laparabole.
Si leproblème,
tout en restantdéterminé,
est satisfait par une distribution discrète de massessituées aux points’ ’ ’
xo, x1,.., la courbe limiteF~
seréduit à
unepolygonale
circonscrite àla
pa- rabole auxpoints ci’ abciss ...
~Enfin,
si leproblème
est
indéterminé,
la courbeF~
n’a aucunpoint
commun avec laparabole
etrenferme
celle-ci dans sa concavité. Onpeut
construirealors
une infinité depolygonales
circonscrites à laparabole
et ins-crites dans la courbe
F~ ;
lespoints
de contact d’unequelconque
de ces
polygonales
donnent(par
leursabscisses)
lespoints d’appli-
478
cation des masses d’une solution extrémale du
problème
desmoments
(1).
On
peut
se baser sur ces considérations pour retrouver les conditions de M.HAMBURGER,
sans recourir à la fonction transcendante intro- duite par M. RIEsz.Je
me borne ici à unesimple
remarquequi
mettramieux en lumière la
signification
de ces conditions.Reprenons
leproblème principal
relatif aux moments co, CI Cs, C4, . ,.. et leproblème
secondaire relatif aux moments c2, c8, c~- ’ ’J’ai déjà remarqué
que si lepremier problème
estindéterminée
le secondl’est
également ;
etqu’on peut
alors trouver une solution extrémalede l’un et de
l’autre, ayant
parexemple,
une massesupérieure
àzéro,
à
l’origine.
Nous en avons déduit les conditions nécessaires8) p(o)
= lim 0394n 0394’n-1 > o,p’(o)
= lim0394’n-1 0394"n-2 >
o.Supposons
maintenant que ces conditions soientremplies :
Dans cecas le
problème
secondaire est certainementindéterminé,
car une solu-tion
dcp
duproblème principal
nous fournit d’abord une solutionrdcp
duproblème
secondaireayant
la masse o àl’origine,
tandisqu’une
autresolution de ce dernier
problème présente
àl’origine
lamasse P’ (o)
> o.Le
problème principal
est aussi indéterminé.Considérons,
eneffet,
toutesles distributions de matière sur la
droite, qui
ont les moments d’ordre> 2
égaux
à c2,c 3, ~ ~ ~ , tandis que les deuxpremiers
moments ont toutes(i) Une autre représentation géométrique plus élégante mais moins intuitive, parce qu’elle a
lieu dans l’espace (affin) à une infinité dénombrable de dimensions, est la suivante. Considérons la quadrique (du point de vue formel)
et la courbe rationnelle.
xo = I, x, = t, x~ = t~, ...
Dans le cas d’indétermination, il y a une infinité de polygones, ayant un nombre infini de som- mets... t-h t , t,..., qui sont inscrits dans la courbe et sont autopolaires par rapport à la quadrique ;
à chacun de ces polygones correspond une solution extrémale... t-i, t , t,... Si l’on applique à chaque
sommet ti la masse P(ti) qui lui appartient, le barycentre du polygone coïncide avec le centre
de la quadrique (xo = o étant l’hyperplan de l’infini).
Si, au contraire, le problème des moments est déterminé, la quadrique tend à dégénérer lorsque
le nombre n des dimensions de l’espace croît et l’analogie avec le cas de n fini s’évanouit.
les valeurs
c’o, c’1 compatibles
avec l’existence d’une solution. On voit que la seule condition àlaquelle c’o
doit satisfaire estc’0 ~ c0 - lim 0394 0394’.
-
n-i
Parmi ces
distributions,
il y en a une infinitépossédant
àl’origine
la masse o, et différant par les valeurs de
c’o
etc’1.
En combinant li- néairementplusieurs
de ces solutions à l’aidede paramètres positifs ayant
une sommeégale
à l, onpeut
obtenir une distribution de matièrequi
donne lieu aux moments co, cl, c2, c3 . . . etqui
ait lamasse o à
l’origine.
Il y a d’ailleurs une autre solutionqui possède
à
l’origine
la masse > o. Leproblème
est donc indéterminé.Les conditions de M. HAMBURGER, dont nous venons de
parler,
sont assez
simples,
au moins dupoint
de vuethéorique.
Elles ont ce-pendant
le défaut d’attribuer un rôleprivilégié
àl’origine
des abcisses.Envisageons
une distribution de matièrequi
parrapport
àl’origine
0produise
les moments co, cl, C2,... . Si l’ontransporte l’origine
en0’,
cette même distribution conduira aux moments
c/ ’ ’ ’
. que l’on calcule très facilement. Leproblème
relatif aux moments co, CI’ c2, ...ne diffère évidemment pas du
problème
relatif aux momentsc’o, cB, c’‘, ... ,
mais les conditions de HAMBURGER ne sont pas les mêmes pour les deuxproblèmes.
Eneffet,
tandis que le déterminantân
nechange
pas
lorsqu’on remplace
lesmoments c;
par les momentsc’i,
il n’en estpas de même pour les mineurs
~~ _ I
etqui figurent
dans lesdites conditions. Il conviendrait donc
d’exprimer
ces conditions aumoyen
d’égalités
oud’inégalités
formées à l’aided’expressions
invariantes par
rapport
à undéplacement
del’origine.
Un tel invariant est par
exemple,
lerapport 0394n+1 0394n
de deux déter-minants,
dont le dénominateur est obtenu àpartir
du numérateuren
supprimant
la dernièreligne
et la dernière colonne. Onpeut
dé-montrer que dans le cas
d’indétermination l’expression
I n
0394n+1 0394n
reste
supérieure
à une borneplus grande
que zérolorsque n
croîtindéfiniment. On déduit de là une condition
suffisante,
maisprobable-
ment non
nécessaire,
pour que leproblème
soit déterminé.480
Une condition
également
suffisante et nonnécessaire, qui
al’avantage
d’une
grande simplicité,
a été donnée par MM.J.
POLYA et Rysz : :pour
la détermination duproblème
ilsuffit
que lerapport I nc2n
soitborné
supérieurement
;d’après
M.CARLEMAN,
il suffit mêmeque la série I 2 nc2n diverge.
-
Ces conditions
permettent
facilement de construire des distribu- tions de matière continues oudiscontinues,
donnant lieu à desproblèmes
déterminés. Il serait utile d’avoir aussi de nombreux
exemples
de dis-tributions conduisant à des
problèmes
indéterminés. Raisonner surdes
exemples
concrets,permet
souvent enmathématiques,
de saisirdes
particularités qui échappent
facilement à uneanalyse
abstraite.2. . Sur
quelques questions
de géométrie etd’arithmétique asymptotiques
M. dans un
chapitre
de son livre Introduction àquelques
théoriesphysiques,
aexposé quelques
résultats inattendus sur le volume et la surface d’unehypersphère appartenant
à un espaceayant
un trèsgrand
nombre de dimensions.
Je vais
examineraujourd’hui quelques
pro-prié.tés asymptotiques
del’hypercube, que j’appellerai
cube tout court.Ces
propriétés
vous semblerontétranges,
presqueparadoxales. J’en parle
volontiersici, parce
que lasimple application
d’uneproposition
du calcul des
probabilités
nouspermettra
de les découvrir sans effort.~
La
proposition
àlaquelle j e
fais allusion est le théorème limite deLAPLACE- TCHÉ13YCHEFF, dont j’ai déjà. parlé
dansma première
con-. fèrence.
Je
vais maintenant l’énoncer sous une tonneprécise.
Considérons une succession illimitée de variables aléatoires indé-
pendantes
xi, x2, ... , xn, ...ayant
chacune la valeur moyenne nulle.Désignons par ~,i
la valeurmoyenne de xi
et parml
la valeur moy-enne
de xi ~3,
et formons lavariable
somme normalisée48I
Le théorème affirme que la
probabilité
del’inégalité 03BEn ~ 03BE (où 03BE
. est
donnée)
tenduniformément,
si ~ncroît,
vers la limite(I) I 03C4 03BE-~ e-t2dt,
pourvu que les variables ’vérifient des
conditions
assezlarges.
Ilsuffit par
exemple
que lerapport
(2)
03BBn =m31 + m32 + ... +m3n ( 21 + 2 + ... + 2n)3/2
tende vers
zéro, lorsque
croît. M. CRAMER a démontré alors que l’er-reur que l’on commet en
prenant l’intégrale (1)
comme valeur de laprobabilité
cherchée est inférieure à 3),n log
n.I/application
du théorème estplus
aiséelorsqu’on
l’utilise sous laforme différentielle. Au
point
de vuecritique,
le passage de l’une à l’autre iormeexige quelques
restrictionssupplémentaires
relativesaux variables x~. Mais le cas que nous avons à traiter est si
simple
que la discussion
peut
se faire directement. Nous dirons donc que pour ncroissant,
et sous la condition.03BBn~0,
laprobabilité
desinéga-
lités
~ ~ ~i -- ~2 -~- ’ ’ ’ tend,
vers la limite(3)
I 203C0 e- x2 203C32 dx 03C3où
~2= f~i + ~2 ~ ~ ~ ;
on suppose quex/a
reste constantequand n
varie.
Le théorème-limite s’étend sans difficulté aux
systèmes
deplusieurs
variables
aléatoires,
ou, comme onpourrait dire,
aux vecteurs aléa-toires ;
il faut naturellementremplacer
la loi de GAUss par la loi deBRAVAIS. Bornons-nous aux
couples
de variables que l’onpeut
envi-sager comme
composantes
de vecteurs dans unplan.
Soit(X2,
-", , ... °une succession illimitée de tels