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Submitted on 1 Jan 1912
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Désagrégation des métaux sous l’action de la chaleur
G. Reboul, E. Grégoire de Bollemont
To cite this version:
G. Reboul, E. Grégoire de Bollemont. Désagrégation des métaux sous l’action de la chaleur. J. Phys.
Theor. Appl., 1912, 2 (1), pp.559-568. �10.1051/jphystap:019120020055901�. �jpa-00241778�
559 tion entre les pouvoirs diffusifs dont il a été question ne soit pas sa- tisfaite. Or cette relation peut être étudiée par l’expérience ainsi que
quelques autres conséquences du principe du retour inverse sur les- quelles j’insiste dans un mémoire qui sera publié ailleurs (1).
DÉSAGRÉGATION DES MÉTAUX SOUS L’ACTION DE LA CHALEUR;
Par MM. G. REBOUL et E. GRÉGOIRE DE BOLLEMONT
L’étude de la désagrégation du platine sous l’influence de la cha- leur et aux basses pressions a été faite par Berliner (2), Ester et
Geitel (1), Nahrwold (4) et Stewart (~). Ils ont montré que : -.
a) La valeur de la désagrégation produite dans un temps donné par l’incandescence d’un fil de platine diminue après un échauffement
prolongé. Il y a épuisement du métal.
b) La valeur de cette désagrégation, très faible dans l’hydrogène
et l’azote, est fortement augmentée par la présence d’oxygène ; il
semble même qu’il n’y aurait pas désagrégation du fil de platine,
si toute trace d’oxygène pouvait être éliminée de son voisinage.
Cette désagrégation du fil est mise en évidence par sa diminution de poids et par un dépôt de platine ou d’un composé de platine qui
se forme sur les parois du tube dans lequel on fait le vide. La cri-
tique que l’on peut faire à ces expériences est la suivante : il peut y avoir distillation partielle de platine du fil chaud sur les parois froides
du tube à vide.
Dans les expériences qui vont suivre, cette désagrégation est
mise en évidence dans divers gaz à la pression ordinaire, le dépôt se
forme sur une lame à la même température que le métal étudié.
Au cours de ses expériences sur la conductibilité de l’air chaud, M. Blondlot (6) avait constaté que, lorsqu’on chauffe pendant quelques heures deux électrodes, l’me en platine, l’autre en cuivre, disposées en regard l’une de l’autre, il se produit sur l’électrode de
(i) Meozr 1912-1913.
(1) ltfé1noil’es de l’Académie de ltlontpelliel’, 1912-19I3.
(2) BERLIl’BEH, Wied. Ann. XXXIII (1888), 289 ; XYXIV (1888), 791.
(3) ELSTEK et GEITEL, Wiecl. Ann., XXXI (1881), 109.
(4) NAHRWOLD, lvied. Ann., XXXI (188 î); XXXV (1888), 107.
(5) SïEWART, Phil. Jiag., XLVIII (1889), 481.
(6) BLO~DLOT, C. R., CII (1886), 210.
Article published online by EDP Sciences and available at http://dx.doi.org/10.1051/jphystap:019120020055901
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platine un abondant dépôt noir. Ce fait a été le point de départ de
notre travail. D’autre part, JI. Le Chatelier a bien voulu nous
signaler qu’il avait, lui aussi, dans divers essais, observé un trans- port analogue, sans pouvoir le rattacher à la formation d’aucun com-
posé chimique défini.
Nous rappellerons d’abord rapidement la disposition et la marche
des expériences.
_
II. L’appareil de chauffage est un four à résistance qui donne
facilement une température élevée et constante, la simple modifica-
tion d’un rhéostat permet de la faire varier entre 200° C. et 1. ~00° C.
Le four est formé d’un cylindre en terre réfractaire disposé horizon- talement ; ses extrémités sont refroidies par un courant d’eau.
La température est donnée par un couple Le Chatelier. Cette pince thermo-électrique a été étalonnée par fusion de fils d’argent et d’or
et par comparaison jusqu’à 360" C. avec un thermomètre à mercure.
La lame de platine qui reçoit le dépôt est de forme carrée d’environ
2 centimètres de côté. La lame de cuivre, sous forme de bande de
de largeur, est placée vis-à-vis de la lame de platine et en est séparée par des cales de quartz ou de mica.
Les expériences exigent que les lames soient maintenues à tem-
pérature constante pendant un temps relativement court et bien dé- terminé ; il faut en outre pouvoir les introduire sans ouvrir le four,
soit qu’on y ait fait le vide, soit qu’on y ait introduit un gaz que son ouverture souillerait. Pour cela on a fixé l’ensemble L, formé par
une lame et une bande des métaux étudiés, à l’extrémité d’une tige
(1) GCNTZ, Joui’nal de Chirnie physique, 1 ,1903.
561
métallique dont l’autre extrémité est fixée au noyau de fer doux N d’un solénoïde S. La tige est placée dans un tube de verre disposé
horizontalement suivant l’axe du four. Il n’y a qu’à faire glisser le
solénoïde pour introduire dans la partie chaude du four l’ensemble des deux lames ou pour l’en retirer.
-
III. 1° Dans les :expériences de M. Blondlot, les dépôts étaient
obtenus après plusieurs heures de chauffe; dans les conditions expé-
rimentales que nous avons indiquées, si l’on chauffe t’ensemble des deux lames pendant plusieurs heures, on n’obtient rien ou presque rien. La différence tient sans doute à ce que, dans les expériences où
M. Blondlot a constaté ces dépôts (1 J. l’atmosphère était confinée.
Quoi qu’il en soit et quelle que soit la raison de ces diver gences, l’in
fluence du de chau Ife est excessivement nette. Le dépôt coin-
mence d’abord à aunmenter avec le temps, passe par un maximum, puis s’estompe et disparaît.
FIG. 2.
Le cliché ci-dessus (fig. 2) indique un maximum pour une minute,
au bout d’un quart d’heure le dépôt, a presque entièrement disparu ;
la température est de 800, C.
Que devons-nous conclure de l’existence de ce maximum que Fon
retrouve à toute température Le dépôt disparait au bout d’un certain temps, c’est donc qu’il ne se renouvelle pas sur la lame de platine;
la propriété qu’a la lame de cuivre d’émettre des particules s’épuise quand le temps de chauffe augmente ; nous exprimerons ce fait en
disant que le métal chauffé subit une latigue.
L’abondance du dépôt dépend aussi énormément de la préhistoire
(l~ BLONDLOT, J. cle Phys.. 2e série, t. p. t09 ; t887.
562
du métal, elle varie beaucoup d’un échantillon de cuivre à l’autre;
une lame qui a déjà été chauffée donne des dépôts beaucoup plus
faibles et bien moins nets.
Enfin l’abondance du dépôt dépend aussi de l’état de la surface de la lame de platine qui le reçoit, ainsi que de la préhistoire de cette lame ; nous verrons plus loin comment on peut déduire de ce fait la
généralisation du phénomène de désagrégation d’un métal sous
l’action de la chaleur, phénomène que nous n’étudierons actuellement
qu’avec le cuivre.
2° L’influence de la teJnpe’rature sur l’abondance du dépôt est éga-
lement considérable. La quantité du métal déposé en un temps donné augmente, mais en même temps la vitesse, avec laquelle le dépôt disparaît de la lame de platine, augmente aussi avec la tempé-
rature. Le résultat se traduit par un rapprochement du maximum
vers l’origine des temps, quand la température s’élève.
Voici à peu près la position de ces maxima pour des températures croissantes, les expériences étant toujours faites avec du cuivre et
du platine d’un même échantillon :
La position du maximurn donne une idée de la vitesse avec laquelle
le métal s’épuise suivant la température ; elle renseigne donc d’une
manière grossière sur l’intensité du transport du cuivre ; on voit
que cette intensité augmente très rapidement avec la température.
3° Le transport du cuivre sur la lame de platine a l’allure d’une projection. Si, vis-à-vis du platine, on place une lame de cuivre en
forme de croix, le dépôt reproduit les contours de la croix sur la
lame de platine.
Le cliché (fig. 3) montre le résultat obtenu pour une distance de i millimètre entre les deux lames, la température étant 850, C. et le
temps de chauffe trente secondes.
Cette expérience, ainsi que les faits établis plus haut, permettent
déjà d’écarter diverses hypothèses que l’on pourrait faire quant au
mécanisme de ce transport du cuivre sur le platine : il est difficile
563 d’admettre que des vapeurs de cuivre viennent se condenser sur la lame de platine, puisque les deux lames sont à la même tempé-
rature ; on conçoit d’ailleurs difficilement une atmosphère de cuivre
s’étendant à plusieurs millimètres et gardant exactement la forme de l’objet de cuivre.
,
FiG. 3.
On a l’impression que ce sont de petits projectiles lancés par la lame de cuivre : si l’on augmente la distance qui sépare les deux lames, le nombre des projectiles atteignant le platine diminue de plus en plus et, pour une distance suffisante, dépendant d’ailleurs de la température, il n’y a aucun dépôt sur la lame de platine.
Par exemple : à une température de 850, C., le dépôt est très net à
la distance de 5 millimètres, net pour 1 millimètre, plus vague à la
distance de 2 millimètres, et disparait à la distance de 3 millimètres.
Peut-on expliquer le dépôt par la formation d’un composé de cuivre, azoture (1) ou autre, qui se décomposerait au contact du platine ? Ce que nous venons de dire rend cette hypothèse difficile-
ment soutenable, les expériences qui suivent la condamnent égale-
ment : nous avons varié les conditions expérimentales en changeant
tour à tour la nature du métal récepteur, la nature de l’atmosphère
gazeuse et enfin celle du métal transporté.
.~° En remplaçant le platine par d’autres métaux, comme l’alumi- nium, le nickel, l’or et même de la porcelaine dégourdie, on obtient
des dépôts de cuivre présentant les mêmes caractères que ceux que l’on avait sur platine ; ce dernier ne joue donc pas un rôle essen-
tiel.
En remplaçant le platine par de l’argent, il est impossible d’ob-
tenir un dépôt de cuivre, la partie de la lame d’argent qui se trouve
(1 ) BLO-NDLO-l’, C. R., Cil (1886), 20.
564
vis-à-vis de la bande de cuivre se détache en brillant sur les parties environnantes, comme s’il y avait eu transport en sens inverse. Nous
verrons plus loin pourquoi l’argent n’a rien donné et ce que l’on peut
conclure des faits précédents.
5° Quel est le rôle joué par l’atmosphère ? Que se produira-t-il en
la supprimant ?
Le vide était fait au moyen d’une pompe Gaede et l’on avait, dans
les conditions de l’expérience, des pressions de 1/50 de millimètre.
On obtient encore sur le platine un dépôt de cuivre présentant les
mêmes caractères que dans l’air.
’
Les résultats indiqués par le cliché fig. 4, à une température de 8501, montrent leur analogie avec ceux obtenus dans l’air.
On voit que la présence de l’atmosphère gazeuse n’est pas indis-
pensable ; cette atmosphère joue cependant un rôle important. Si l’on remplace l’air par divers gaz, on constate que, sans changer les
caractères généraux du phénomène, l’abondance du dépôt varie
notablement : le dépôt est plus abondant avec J’oxygène qu’avec l’air, plus abondant avec l’air qu’avec l’azote, plus abondant avec ce
dernier qu’avec le gaz carbonique. Naturellement, avec ces derniers gaz, c’est un dépôt gris mat que l’ou obtient ; il suffit de chauffer à
l’air la lame de platine qui porte ce dépôt pour le transformer en
oxyde noir.
Le cliché fi g. 5 montre les résultats obtenus avec le gaz carbo-
nique, l’azote et l’oxygène, la température étant 825° C., et les temps de chauffe successivement : une demi-minute, une minute,
deux minutes et demie, cinq minutes.
On retrouve bien l’influence prépondérante exercée par l’oxygène
sur la désagrégation métallique du platine aux basses pressions.
Avec l’hydrogène, les résultats sont particulièrement curieux : en
chauffant deux lames de platine et de cuivre dans une atmosphère
565
d’hydrogène, on ne trouve aucun dépôt vis-à-vis de la bande de cuivre, il y a seulement un dépôt qui en dessine les contours, comme si l’émission avait eu lieu seulement à partir des bords de la lame de
cuivre.
Le cliché 6 montre la différence des dépôts obtenus dans Pair
et dans l’hydrogène, les conditions de l’expérience étant identiques.
F IG. 6.
Dans ces expériences, on commençait, avant d’introduire l’hydro- gène dans le four, par balayer l’air par un courant de gaz carbo-
nique, puis on introduisait l’hydrogène qui balayait ce dernier gaz,
il restait donc dans l’atmosphère des traces de C02.
566
Remarquons aussi que les bandes de cuivre étaient coupées avec
des ciseaux dans une bande plus large, de sorte que sur les arêtes de la bande le métal n’était pas physiquement identique à celui de la surface. Toujours est-il que dans l’hydrogène ce phénomène de
transport n’est pas le même que dans les autres gaz.
6" Le cuivre est-il le seul métal se comportant de cette manière ? Parmi les métaux essayés : nickel, fer, aluminium, etc., l’argent
seul a donné des dépôts aussi nets que le cuivre.
’L’expérience peut se faire très simplement avec une lame d’or
vis-à-vis de laquelle on a placé une lame d’argent. Après chauffage,
on constate sur la lame d’or un dépôt blanc d’argent, reproduisant
nettement la forme de la bande d’argent et montrant bien qu’il y a
eu projection de ce métal.
Ceci nous explique pourquoi le cuivre ne donnait pas de dépôt sur
une lame d’argent : le dépôt formé se volatilise en même temps que les parties superficielles de la lame.
Les caractères de ces dépôts d’argent sont analogues à ceux indi- qués pour le cuivre.
’ ’
.
Nous avons rappelé plus haut que le platine dans le vide se désa-
grégeait et pouvait donner lieu à des phénomènes de transport. Il
est infiniment probable que le phénomène se reproduit avec tous les
métaux, quoique nous n’ayons pu le mettre nettement en évidence que pour le cuivre et l’argent. Cela est rendu très vraisemblable, par l’existence du nlaximum dans l’abondance du dépôt en fonction du
temps. Le dépôt de cuivre formé sur la lame de platine ou d’un autre
métal disparaît t avec le temps, quand on chauffe la lame ; il est peu
probable qu’à une température de 400" à 500° C., il puisse y avoir,
dans les conditions ordinaires de pression, distillation du cuivre des
parties chaudes aux parties froides de l’appareil ; la disparition du dépôt tient à une autre cause. Cette cause semble résider dans la
généralité de ces phénomènes de transport : en même temps qu’il y
a formation du dépôt, il y a transport du métal récepteur dans le
sens inverse ; on conçoit que, grâce à la
«fatigue » éprouvée par le
"
métal transporté, le dépôt puisse disparaître.
La combinaison de cette formation et de cette disparition simul-
tanées donne lieu à ce maximum dont la position est d’ailleurs
variable avec la température. Une preuve de ceci semble résider
dans ce fait que la position du maximum en fonction du temps ne
dépend pas seulement de la température, mais aussi de la nature du
567 métal récepteur ; en particulier, il se produit beaucoup plus tard
avec de la porcelaine dégourdie qu’avec des métaux. Un autre fait qui paraît aussi confirmer notre hypothèse, c’est que la formation du dépôt dépend de la préhistoire du métal récepteur de la même
manière qu’il dépendait de la préhistoire du métal transporté ; la
,façon dont les lames ont été nettoyées, a sur la formation du
dépôt une influence énorme : l’apparition et la disparition du dépôt
’
semblent dues à des causes similaires. Elles s’expliqueraient simple-
ment en admettant cette désagrégation générale des métaux sous
l’influence de la chaleur.
IV. En résumé, quand on chauffe un métal, il se produit le phé-
nomène suivant :
Il y a transport du métal sur une lame placée vis-à-vis. Ce trans-
port ne peut s’expliquer par une condensation de vapeur sur la lame
réceptrice, il ne peut s’expliquer davantage par une combinaison
chimique du métal avec les gaz de l’atmosphère. Le métal n’inter-
vient d’ailleurs pas par sa constitution chimique, mais par sa struc- ture physique. Tout se passe comme s’il y avait eu projection.
Quelle est l’hypothèse qui, en les expliquant, rend compte des
particularités de ces projections? Elle paraît être la suivante :
Quand on chauffe un métal, les gaz occlus provoquent une explo--
sion superficielle du métal soit par rupture des poches microsco- piques qui les contiennent, soit par un autre processus que nous ver-
rons plus loin. Cette explosion est accompagnée d’une projection de petites particules métalliques, qui bombardent un obstacle faisant face à la lame et s’y incrustent, d’où l’allure de projection que pré-
sentent ces transports. Cette explication rend compte de l’impor-
tance capitale de la structure physique du métal chauffé ; certains échantillons donneront des dépôts très abondants et d’autres presque
rien ; après un échauffement prolongé, il y aura épuisement du mé- tal ; si l’obstacle qui reçoit le dépôt jouit de la même propriété, il
doit y avoir maximum, etc.
D’ailleurs, si l’on examine sur un fond sombre une lame de cuivre que l’on porte à température élevée, on voit se former un nuage de
particules métalliques incandescentes, comme s’il y avait eu éruption.
Après l’expérience, un examen de la lame, à la loupe ou au micros-
cope, montre un bouleversement de la surface comme s’il y avait eu
arrachement de particules.
En somme, quand on chauffe un métal, il se produit un effet ana-
568
logue à un
«rochage », On sait que ces effets de rochage sont parti-
culièrement intenses avec le cuivre et l’argent.
La présence de l’atmosphère gazeuse n’apparaît pas indispensable
à la production du phénomène ; on peut cependant expliquer assez
facilement son rôle de la manière suivante : parmi les gaz occlus dans les métaux, on rencontre surtout de l’hydrogène. Si, dans l’atmos-
phère environnante, il y a de l’oxygène, ce gaz pourra former, avec
~