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le Commissaire général aux réfugiés et aux apatrides

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Texte intégral

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n° 54 297 du 13 janvier 2011 dans l’affaire x / V

En cause : x

Ayant élu domicile : x

contre:

le Commissaire général aux réfugiés et aux apatrides

LE PRÉSIDENT F. F. DE LA Ve CHAMBRE,

Vu la requête introduite le 20 septembre 2010 par x, qui déclare être de nationalité béninoise, contre la décision du Commissaire général aux réfugiés et aux apatrides, prise le 24 août 2010.

Vu l’article 51/4 de la loi du 15 décembre 1980 sur l’accès au territoire, le séjour, l’établissement et l’éloignement des étrangers.

Vu le dossier administratif et la note d’observation.

Vu l’ordonnance du 5 novembre 2010 convoquant les parties à l’audience du 8 décembre 2010.

Entendu, en son rapport, B. LOUIS, juge au contentieux des étrangers.

Entendu, en leurs observations, la partie requérante assistée par Me Y. MBENZA loco Me V.

SEDZIEJEWSKI, avocats, et J. KAVARUGANDA, attaché, qui comparaît pour la partie défenderesse.

APRES EN AVOIR DELIBERE, REND L’ARRET SUIVANT : 1. L’acte attaqué

Le recours est dirigé contre une décision de refus du statut de réfugié et de refus du statut de protection subsidiaire, prise par le Commissaire général aux réfugiés et aux apatrides, qui est motivée comme suit :

«A. Faits invoqués

Selon vos dernières déclarations, vous êtes de nationalité béninoise et d’origine Fon et Yoruba. Vous êtes de religion musulmane. Vous résidez à Cotonou avec votre mère de religion musulmane également. Vous y exercez à Cotonou l’activité de vendeuse au Grand marché. Vos parents se sont séparés au milieu des années 80 car votre père s’est intéressé aux cultes des aieux en s’initiant au vaudou alors que votre mère voulait garder sa religion

Vous invoquez les faits suivants à l’appui de votre demande d’asile.

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Depuis sa conversion au vaudou il y a environ 25 ans, votre père vous a parlé des bienfaits du vaudou quand vous alliez lui rendre visite. Vénérant la divinité Agê, il est devenu il y a trois ans prêtre vaudou, appelé Hounon. Votre père vous a parlé souvent de vous mettre dans un couvent pour vous former au vaudou mais sans vous menacer. En juin 2009, vous lui avez rendu visite. Il vous a dit comme d’habitude que le vaudou vous ferait du bien et qu’il souhaiterait vous intégrer à son groupe pour votre initiation. Le 29 juillet 2009, vous vous êtes rendue chez lui où cinq individus vous ont fait part du souhait que vous preniez le dieu vaudou de votre père. Vous informé votre mère qui est venu lui signifier son refus catégorique. Le 1er août 2009, ces individus et votre père sont venus au marché pour vous inviter à les suivre. Vous avez refusé, tout comme votre mère. Le ton est monté et votre mère a décidé d’aller au commissariat du quartier Aïdjedo pour trancher cette affaire. Votre père et ses acolytes vous ont accompagnées. Après un conciliabule entre votre père et l’inspecteur de police, ce dernier a dit qu’il s’agissait d’une affaire familiale, à régler en famille. Votre père et ses collaborateurs vous ont emmenée de force avec eux tandis que votre mère est restée à Cotonou. Arrivée au village de votre père, vous l’avez dépassé avant d’être enfermée dans un couvent vaudou. Vous avez été frappée. On vous a obligée de subir des rituels. A la veille du 7ème jour de détention, quelqu’un est venu vous libérer avant de vous confier à une autre personne qui vous a conduit sur sa mobylette jusqu’à la route.

Là, un autre individu vous a embarqué dans son véhicule pour vous amener à Porto Novo ou vous êtes restée durant une dizaine de jours chez votre oncle maternel dénommé [A.] [L.]. Votre mère vous a appris que vous étiez toujours recherchée. Elle a organisé votre voyage. Le 16 août 2009, le passeur et votre oncle vous ont amenée à l’aéroport de Cotonou où, munie d’un passeport d’emprunt, vous avez embarqué à bord d’un avion en direction de l’Europe.

Vous déclarez être arrivée sur le territoire belge le 17 août 2009, et vous avez introduit une demande d’asile le lendemain.

B. Motivation

Dans le cadre de votre demande d’asile, il vous appartient de convaincre l’autorité administrative que vous avez quitté votre pays, ou en demeurez éloignée, par crainte de persécution au sens de l’article 1er, A, 2) de la Convention de Genève du 28 juillet 1951, ou qu’il existe dans votre chef un risque réel de subir des atteintes graves au sens de l’article 48/4 de la loi du 15 décembre 1980 sur l’accès au territoire, le séjour, l’établissement et l’éloignement des étrangers. Cependant, tel n’est pas le cas en l’espèce puisque aucun crédit ne peut être accordé à vos déclarations.

Tout d’abord, le Commissariat général constate que vous n’avancez aucun élément qui nous permette de penser que vous ne puissiez vous réfugier ailleurs, à l’intérieur du pays. En effet, vous avez déclaré n’avoir aucun problème avec les autorités béninoises (voir le rapport d’audition du 6 juillet 2010, p.9).

Vous dites également que les personnes que vous craignez en cas de retour au pays sont ces personnes qui veulent vous mettre dans le couvent vaudou, en l’occurrence les chefs vaudou (voir idem, p.4) ou les prêtres vaudous (voir idem, p.13). On vous a demandé pourquoi n’être pas restée dans une autre partie du Bénin pour y être tranquille. Vous avez répondu ne pas savoir où aller pour que vos agresseurs ne vous retrouvent pas. Invitée à expliquer comment ils pourraient vous retrouver, vous avez déclaré ne pas le savoir ; que ces gens du vaudou savent tout et qu’ils savent vous retrouver par leurs pratiques (voir idem, p.9). Vous n’avez apporté aucun autre argument à l’appui de vos dires. Il s’agit là de supputations non étayées et cet argument divinatoire, à savoir pour vos agresseurs de vous retrouver par les pratiques vaudous, est insuffisant pour convaincre le Commissariat général de l’impossibilité de vous installer ailleurs au Bénin. Le Commissariat général est d'autant plus convaincu de cette possibilité au vu de votre profil à savoir votre âge et votre situation indépendante (commerçante). Il constate que vous ne présentez pas la condition de base pour que votre demande d’asile puisse relever du champ d’application de l’article 48/3 et 48/4 de la loi du 15 décembre 1980 (voir l’article 48/5 §3).

Ensuite, le Commissariat général relève plusieurs éléments qui empêchent de croire à la vraisemblance de vos déclarations.

Le Commissariat général n’est pas convaincu par vos déclarations concernant le moment choisi de votre initiation.

En effet, si votre père ne vous a pas donné de formation sur le vaudou, vous avez déclaré que depuis sa conversion alors que vous aviez une dizaine d’année, il vous parlait des bienfaits du vaudou quand vous alliez chez lui. Vous avez déclaré également que votre père vous a parlé souvent de vous mettre

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dans un couvent pour vous former au vaudou (voir idem, p.5). Cependant, vous ignorez pourquoi cette initiation se fait à votre âge et pas avant (voir idem, p.5 et p.9), vous ignorez ce qu’il compte faire de vous après cette initiation, ses intentions de vous faire adepte ou prêtre comme lui. Vous avez pourtant reconnu être sa fille unique et son héritière (voir idem, p.9). Enfin, vous ne savez pas si dans votre famille, d’autres personnes ont été forcée de suivre une initiation au vaudou (voir idem, p.10).

Concernant votre plainte auprès des autorités, le Commissariat général observe diverses invraisemblances. Il constate la distorsion entre votre refus décidé et répété, tout comme votre mère qui s’est séparée pour cette raison, de suivre une initiation au vaudou proposée par votre père et votre résignation dans votre demande de protection à savoir le fait que vous n’avez entrepris aucune démarche afin d’obtenir la protection des autorités à un autre niveau que le commissariat de quartier.

Interrogée à ce sujet, vous avez répondu que vous n’êtes plus allée ailleurs à partir du moment où ils n’ont pas pu trouver une solution au problème. Vous avez précisé que devant ce refus, vous n’avez plus eu l’idée d’aller voir ailleurs, que ce soit auprès d’une autorité policière ou de la chefferie coutumière (voir idem, pp.8—9). Le Commissariat général estime que vos déclarations ne sont pas suffisantes pour démontrer que vous n'auriez pas accès à une protection effective de vos autorités. En outre, il relève que vous ne savez rien de l’identité du policier qui s’est adressé à vous au commissariat de quartier et vous a refusé sa protection - Vous ne l’avez d’ailleurs pas demandé - ce qui enlève encore la crédibilité de vos déclarations (voir idem, p.9).

Le Commissariat général remarque les imprécisions qui entourent les circonstances de votre évasion du couvent vaudou. Vous ne savez pas le nom de la personne qui vous a fait sortir du couvent, ni de celle qui vous a amené jusqu’à la route. Vous ne savez pas si on leur a promis ou donné quelque chose.

C’est tout ce que vous savez (voir idem, p.8 et p .10). A la lecture de vos déclarations, on peut remarquer que vous avez bénéficié d’une organisation pour sortir de ce couvent. On vous a demandé comment savait-on que vous étiez enfermée là et vous n’avez pu apporter aucune réponse. Vous avez encore déclaré que vous ne savez pas qui a organisé votre sortie du couvent. Vous avez dit que c’est peut être votre mère mais quand vous lui avez posé la question, elle vous a dit de laisser tomber (voir idem, p.9 et p .10). L’accumulation d’autant d’imprécisions ou de lacunes dans votre évasion ne peut que remettre en cause la réalité de votre détention puisqu’elle en est la conséquence directe.

Pour ce qui a trait à l’actualité de votre crainte, le Commissariat général relève plusieurs éléments qui remettent en cause sa réalité. D’une part, vous avez dit que selon vos informations, votre père et ses acolytes déposaient un panier remplis de divers objets au pied de votre portail. Cependant,vous avez eu cette information il y a trois mois et vous ne savez pas combien de fois ils sont venus. D’autre part, vous avez dit également que votre père venait régulièrement à votre maison avec ses acolytes mais vous ne vous vous êtes pas renseigné pour savoir combien de fois ils sont venus, vous ne savez pas qui est venu car vous n’étiez pas la. Vous avez déclaré ne pas avoir posé de question car vous étiez traumatisé de ne pas avoir votre fils près de vous (voir idem, p.3 et p.4). L’ancienneté des faits d’une part et le peu d’intérêt que vous avez pour vous renseigner sur des faits qui vous concernent personnellement empêchent de croire à la réalité d'une crainte actuelle.

En complément, le Commissariat général constate que vous ne savez rien concernant les circonstances de votre voyage alors que c’est votre mère l’a organisé. Ainsi, vous ne savez pas comment concrètement elle a organisé ce voyage et comment elle a pu se procurer un passeport d’emprunt ; vous ne savez pas si elle a payé quelque chose. Vous avez répondu que vous n’étiez pas avec votre mère pour le savoir (voir le rapport du 06/07/2010, p.3). De telles lacunes ne sont pas vraisemblables d’autant plus qu’il vous était aisément possible de vous renseigner à ce sujet auprès de votre mère qui est votre seul contact depuis que vous êtes en Belgique. Elles viennent s’ajouter comme indice supplémentaire aux carences de votre récit.

Vos déclarations sont d’autant plus invraisemblables qu’elles dans un contexte général de tolérance religieuse au Bénin (voir les informations à la disposition du CGRA et dont copie est jointe au dossier administratif).

Le fait que vous ayez donné des informations sur le vaudou ne rétablit pas la crédibilité de votre déclaration et ne peut renverser la présente décision car il s’agit d’informations, que toute personne, vivant dans une culture où le vaudou est important et pratiqué, est à même de donner ou de se procurer auprès de proches (voir les informations à la disposition du CGRA et dont copie est jointe au dossier administratif).

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Dans la mesure où les faits que vous invoquez pour vous voir reconnaître la qualité de réfugiée manquent de crédibilité, le Commissariat général n’aperçoit aucun élément susceptible d’établir, sur la base de ces mêmes faits, qu’il existerait de sérieux motifs de croire qu’en cas de retour dans votre pays d’origine, vous encourrez un risque réel de subir des atteintes graves visées dans la définition de la protection subsidiaire. Par ailleurs, le Commissariat général n’aperçoit dans vos déclarations aucune autre indication de l’existence de sérieux motifs de croire que vous seriez exposée, en cas de retour au pays, à un risque tel que mentionné ci-dessus.

Votre extrait d’acte de naissance à votre nom ne permet pas de restaurer la crédibilité de votre récit.

Tout au plus permet-ils d’appuyer vos déclarations concernant votre identité.

Concernant le courrier du 5 juillet 2010 de votre mère accompagné d’une copie de sa carte d’identité, aucune force probante ne peut y être attachée si ce n’est d’appuyer l’identité de l’expéditeur de cette lettre. En effet, il s’agit d’une pièce de correspondance privée dont, par nature, la fiabilité et la sincérité de son auteur ne peuvent être vérifiés. Le Commissariat général ne dispose d’aucun moyen pour s’assurer que ce document n’a pas été rédigé par pure complaisance et qu’il relate des événements qui se sont réellement produits. Ce document ne peut donc rétablir la crédibilité de votre récit.

C. Conclusion

Sur base des éléments figurant dans votre dossier, je constate que vous ne pouvez pas être reconnu(e) comme réfugié(e) au sens de l'article 48/3 de la loi sur les étrangers. Vous n'entrez pas non plus en considération pour le statut de protection subsidiaire au sens de l'article 48/4 de la loi sur les étrangers.»

2. La requête

2.1 La partie requérante invoque la violation de l'article 1ier, section A, § 2 de la Convention de Genève du 28 juillet 1951, modifiée par son Protocole additionnel du 31 janvier 1967, relatifs au statut des réfugiés (ci-après dénommés la Convention de Genève), de l’article 2 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales, signée à Rome le 4 novembre 1950 (ci-après dénommée la Convention européenne des droits de l'Homme), de l’article 62 de la loi du 15 décembre 1980 sur l’accès au territoire, le séjour, l’établissement et l’éloignement des étrangers (ci-après dénommée la loi du 15 décembre 1980), des articles 1, 2 et 4 de la loi du 29 juillet 1991 relative à la motivation formelle des actes administratifs ainsi que du principe général de bonne administration et du principe de proportionnalité et du raisonnable. Elle invoque encore une erreur manifeste d’appréciation dans le chef du Commissaire général, ou une erreur d’appréciation ainsi qu’un détournement et un excès de pouvoir. Elle invoque également une violation des formes substantielles ou prescrites à peine de nullité.

2.2 Elle conteste en substance la pertinence des motifs de la décision entreprise au regard des circonstances particulières de la cause.

2.3 Elle demande au Conseil de réformer la décision attaquée et d’accorder à la requérante la qualité de réfugiée.

3. Question préalable

3.1 La partie requérante mentionne la violation de l’article 2 de la Convention européenne des droits de l’Homme mais n’expose pas précisément en quoi la disposition citée, qui consacre le droit à la vie, aurait été violée en l’espèce ; le Conseil considère que cette allégation n’est manifestement pas fondée, la décision attaquée ne portant nullement atteinte au droit à la vie du requérant.

4. Documents nouveaux

4.1 La partie requérante joint à sa requête un rapport du 1ier mars 1999 de la Commission de l’immigration et du statut de réfugié du Canada,publié sur le site Internet du Haut Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés, intitulé : « Bénin : choix, initiation et formation d’un chef dans la religion vaudou et les conséquences d’un refus d’être désigné chef à cause d’une conversion à une autre religion ». Elle verse également au dossier de procédure par courrier du 29 septembre 2010 une lettre du 27 juillet 2010 de la mère de la requérante (pièce 5 du dossier de la procédure). Par courrier recommandé du 10 novembre 2010, elle verse enfin une photo, qui, d’après elle, établit la « preuve des menaces "vaudous" reçue (sic) par sa mère » (pièce 10 du dossier de la procédure).

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4.2 Indépendamment de la question de savoir si ces documents constituent de nouveaux éléments au sens de l’article 39/76, § 1er, alinéa 4, de la loi du 15 décembre 1980, ils sont produits utilement dans le cadre des droits de la défense, dans la mesure où ils étayent la critique de la partie requérante à l’égard de la décision attaquée concernant certains arguments factuels de la décision entreprise. Ils sont, par conséquent, pris en considération par le Conseil.

5. L’examen de la demande sous l’angle de l’article 48/3 de la loi du 15 décembre 1980

5.1 La décision entreprise refuse de reconnaître la qualité de réfugiée à la requérante au motif que le récit qu’elle présente à l’appui de sa demande de protection internationale n’est pas crédible en raison de l’inconsistance de ses déclarations quant à certains éléments de ce récit. Elle estime également que la requérante ne démontre pas l’impossibilité pour elle de s’établir dans une autre partie du pays ou d’obtenir la protection de ses autorités nationales. Elle considère également que l’actualité de la crainte de la requérante n’est pas établie.

5.2 La partie requérante soutient quant à elle qu’il n’était pas possible pour la requérante de s’installer ailleurs au Bénin. Le Conseil rappelle à cet égard que la notion d’installation dans une partie du pays d’origine où le requérant n’encourt ni crainte de persécution ni risque réel d’atteintes graves, est circonscrite par l’article 48/5, § 3 de la loi du 15 décembre 1980. L’application de cette disposition a clairement pour effet de restreindre l’accès à une protection internationale à des personnes dont il est par ailleurs admis qu’elles ont des raisons de craindre d’être persécutées ou, comme en l’espèce, pour lesquelles il existe des sérieux motifs de croire qu’elles encourent un risque réel d’atteinte grave dans la partie du pays où elles vivaient avant de fuir. L’esprit de cette disposition restrictive, tout comme la formulation choisie par le législateur indiquent qu’il revient dans ce cas à l’administration de démontrer ce qu’elle avance, à savoir d’une part, qu’il existe une partie du pays d'origine où le demandeur n’a aucune raison de craindre d'être persécuté ni aucun risque réel de subir des atteintes graves et, d’autre part, qu'on peut raisonnablement attendre de lui qu'il reste dans cette partie du pays. L’autorité compétente doit également démontrer qu’elle a dûment tenu compte des conditions générales prévalant dans le pays et de la situation personnelle du demandeur. Dans le cas d’espèce, la partie défenderesse n’a nullement procédé aux vérifications que suppose l’application de cette norme ; le Conseil ne retient dès lors pas ce motif de la décision entreprise.

5.3 La partie requérante reproche par ailleurs à la partie défenderesse d’avoir fait une évaluation incorrecte de la crédibilité du récit produit à l’appui de la demande d’asile. À cet égard, le Conseil rappelle que le principe général de droit selon lequel « la charge de la preuve incombe au demandeur» trouve à s’appliquer à l’examen des demandes d’asile (Haut Commissariat des Nations Unies pour les Réfugiés (ci-après dénommé HCR),Guide des procédures et critères à appliquer pour déterminer le statut de réfugié au regard de la Convention de 1951 et du Protocole de 1967 relatifs au statut des réfugiés, Genève, 1979, réédition, 1992, p. 51, § 196 (ci-après dénommé Guide des procédures et critères). Si, certes, la notion de preuve doit s’interpréter avec souplesse dans cette matière, il n’en reste pas moins que c’est au demandeur qu’il incombe de convaincre l’autorité qu’il remplit effectivement les conditions pour bénéficier du statut qu’il revendique.

5.4 L’obligation de motivation de la partie défenderesse ne la contraint, par conséquent, pas à démontrer l’existence d’éventuelles déclarations mensongères ou contradictoires, mais bien à exposer les raisons pour lesquelles le demandeur ne l’a pas convaincu qu’il craint avec raison d’être persécuté ou qu’il existe de sérieux motifs de croire qu’il encourrait un risque réel de subir des atteintes graves s’il était renvoyé dans son pays d’origine.

5.5 En l’espèce, la motivation de la décision attaquée est suffisamment claire et intelligible pour permettre à la partie requérante de saisir pour quelles raisons sa demande a été rejetée. En constatant l’absence de crédibilité des faits qu’elle présente à l’appui de sa demande de protection internationale et en démontrant l’absence de vraisemblance des poursuites prétendument engagées à son encontre, la partie défenderesse expose à suffisance les raisons pour lesquelles la partie requérante n’a pas établi qu’elle craint d’être persécutée en cas de retour dans son pays. À cet égard, la décision entreprise est donc formellement motivée.

5.6 Le Conseil considère que les motifs de l’acte attaqué, relatifs à l’invraisemblance du récit de la requérante, se vérifient à la lecture du dossier administratif et sont pertinents. Il estime qu’en l’absence du moindre élément de preuve de nature à établir la réalité des persécutions dont la requérante déclare avoir été victime, l’inconsistance de ses dépositions sur les points centraux de son

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récit, en particulier son initiation forcée au culte vaudou ainsi que son évasion, interdit de croire qu’elle a réellement vécu les faits invoqués.

5.7 Le Conseil relève ainsi à la suite de la décision entreprise que la requérante est incapable de préciser pourquoi son initiation s’est faite à son âge alors que son père lui parle des bienfaits du vaudou depuis qu’elle a dix ans et qu’elle ignore quel rôle veut lui confier son père après cette initiation ou si d’autres personnes de sa famille ont été forcées de suivre cette initiation. Les explications de la requête selon lesquelles les rites du vaudou sont secrets et que le Coran interdisait à la requérante de s’y intéresser, ne suffisent pas à expliquer l’inconsistance de ses déclarations par rapport à son initiation, et ce d’autant plus que la requête souligne que la requérante croit fermement au vaudou (requête, p. 5).

5.8 De même, il apparaît que la requérante ne sait rien des personnes qui l’ont aidée à s’évader du couvent où elle dit avoir été retenue pour son initiation. Si la requête soutient qu’après s’être renseignée, la requérante peut dire que c’est sa mère et son oncle qui ont organisé son évasion, la partie défenderesse relève à juste titre dans sa note d’observation que la requérante a séjourné dix jours chez son oncle après son évasion, de sorte qu’il n’est pas crédible qu’elle n’ait disposé d’aucune information à cet égard. Le traumatisme résultant de sa détention et présenté par la partie requérante comme à l’origine de son ignorance, ne suffit pas à expliquer un tel degré d’imprécision alors que la requérante affirme avoir séjourné dix jours chez son oncle qu’elle présente comme l’un des organisateurs de son évasion.

5.9 Ces motifs pertinents de la décision suffisent donc à fonder valablement le refus d’octroi de la qualité de réfugiée à la requérante. Il n’y a donc pas lieu d’examiner plus avant les autres motifs de la décision attaquée et les arguments de la requête qui s’y rapportent, cet examen ne pouvant, en toute hypothèse, pas induire une autre conclusion.

5.10 Il apparaît en conséquence que la partie défenderesse n’a pas fait une évaluation incorrecte de la demande de protection internationale de la requérante. Ce constat n’est pas infirmé à la lecture des documents qu’elle produit à l’appui de sa demande d’asile. S’agissant des documents figurant au dossier administratif, la partie défenderesse a valablement estimé qu’ils ne permettent pas de rendre au récit de la requérante la crédibilité qui lui fait défaut. Quant au rapport du 1ier mars 1999 de la Commission de l’immigration et du statut de réfugié du Canada, annexé à la requête, il est d’une portée tout à fait générale et ne permet pas d’établir l’existence d’une crainte fondée de persécution dans le chef de la requérante. La lettre du 27 juillet 2010 de la mère de la requérante est quant à elle une correspondance de nature privée, ce qui limite sensiblement le crédit qui peut lui être accordé puisque, le Conseil étant dans l’incapacité de s’assurer des circonstances dans lesquelles elle a été rédigée, sa fiabilité, sa sincérité et sa provenance ne peuvent pas être vérifiées. Elle ne dispose dès lors pas d’une force probante suffisante à rendre au récit de la requérante la crédibilité qui lui fait défaut. Quant à la photo de la requérante versée au dossier de la procédure, elle ne permet pas d’établir la réalité des faits invoqués par cette dernière et ne constitue en aucun cas un élément permettant d’invalider les constatations susmentionnées.

5.11 En conclusion, le Conseil considère que la partie requérante n’avance pas d’argument convaincant qui permette de soutenir sa critique, selon laquelle la partie défenderesse n’a pas suffisamment et valablement motivé sa décision, a commis une erreur manifeste d’appréciation ou une erreur d’appréciation, ainsi qu’un détournement ou un excès de pouvoir, pas plus qu’elle ne démontre en quoi la décision attaquée ne respecte pas le principe général de droit de bonne administration ou le principe de principe de proportionnalité et du raisonnable ; le Conseil considère au contraire que le Commissaire général a exposé à suffisance les raisons pour lesquelles il parvient à la conclusion que la partie requérante n’a établi ni la réalité des faits invoqués, ni le bien-fondé de la crainte alléguée.

5.12 Par conséquent, la requérante n’établit pas qu’elle a quitté son pays et en demeure éloignée par crainte de persécution au sens de l’article 1ier, section A, paragraphe 2, de la Convention de Genève.

6. L’examen de la demande sous l’angle de l’article 48/4 de la loi du 15 décembre 1980

6.1 L’article 48/4 de la loi du 15 décembre 1980 énonce que « le statut de protection subsidiaire est accordé à l’étranger qui ne peut être considéré comme un réfugié et qui ne peut pas bénéficier de l’article 9 ter, et à l’égard duquel il y a de sérieux motifs de croire que, s’il était renvoyé dans son pays d’origine (…), il encourrait un risque réel de subir les atteintes graves visées au paragraphe 2, […] »

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Selon le paragraphe 2 de l’article 48/4 de ladite loi, « sont considérés comme atteintes graves : a) la peine de mort ou l’exécution ; ou

b) la torture ou les traitements ou sanctions inhumains ou dégradants du demandeur dans son pays d’origine ; ou

c) les menaces graves contre la vie ou la personne d’un civil en raison d’une violence aveugle en cas de conflit armé interne ou international ».

6.2 En l’espèce, la requérante ne sollicite pas l’octroi de la protection subsidiaire ; elle n’invoque aucun moyen ou élément susceptible d’établir qu’il existe de sérieux motifs de croire qu’en cas de retour dans son pays d’origine la requérante encourrait un risque réel de subir des atteintes graves visées à l’article 48/4, § 2, de la loi du 15 décembre 1980.

6.3 En tout état de cause, le Conseil n’aperçoit dans les déclarations et écrits de la requérante aucune indication de l’existence de tels motifs.

6.4En conséquence, il n’y a pas lieu d’accorder à la requérante la protection subsidiaire prévue par la disposition légale précitée.

PAR CES MOTIFS, LE CONSEIL DU CONTENTIEUX DES ETRANGERS DECIDE : Article 1

La qualité de réfugiée n’est pas reconnue à la partie requérante.

Article 2

Le statut de protection subsidiaire n’est pas accordé à la partie requérante.

Ainsi prononcé à Bruxelles, en audience publique, le treize janvier deux mille onze par :

M. B. LOUIS, président f.f., juge au contentieux des étrangers,

Mme M. PILAETE, greffier assumé.

Le greffier, Le président,

M. PILAETE B. LOUIS

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