De l'unité du pouvoir exécutif éf de
la refponfabîlité
de fes agens.
Il
eft inutilede
cliercher à prouver ^quek
meilleureconftitution
de chaque
paysne pouvant
être Tefietdel’imagination
du
peuple qui l’habite,mais celui
de
la néceffité qui réfulte des diffé- rentes circonflances particulières à ce peuple, i’étenduedu royaume de
France, la diverfitéde
fes pofitions, fa fituation géographique, enfin le concours de toutesles circonfiances politiques qui luifont propres, en ontdû
faire Sc doiventle maintenirun gouvernement monarchique*
Cette véritén
eft point contefiée. Il eft encore horsde
douteque
le peuple François doit être libre.La
liberté eft la condition premièrepour
lebonheur
, (ans elle ilne
peuten
exifterpour i’homme honnête &
penfant,elledoit être i’appa-nage du
peuple François, quien
fe^it le prix&qui
veuten
jouir.Or
la liberté, telle qu’elle peut exifter dansune
fociété régulière, rendantl’homme
indépendantde
toutevolontéarbitraire,&
le fouijiettant avec pçceffitéaux
Lois, eftüe
Teflèncede
lamonarchie comme de
tout autregouvernement
,&
doiten
faireun
caraclère eflentiei.La
réparation dîflinéîe& prononcée
des diffe-*renspouvoirsaffure la liberté, car les meilleures Lois, fins l’appui
du pouvoir
exécutif,ne
pour-, roient jamais réprimer les vices qüî rempiilfènt la fociétéde
défordres.C’efl; lepouvoirexécutif, qui, dans fon unité
&
fa plénitude, conflitue lamonarchie, en
fait tous les avantages ; c’eft lui qui, réuriiflànt les intérêtsde
funiverlalité des fujets de l’empire, qui s’oppofant à l’indépendance, foit des indi- vidus,Toitdesprovinces, affurelaforce nationalej c’ert lui qu’il eft effeiitiel decon
ferver dansl’innégrité qui lui appartient, car s’il n’y étoit pas maintenu,ce
beau royaume
perdroiîprompte- ment
fon énergie&
toutes fes facultés. Ildeviendroit
une
confédération, plus
ou moins
durable, de provinces,que
les intérêts diftinélsde
leurs habitans,de
leurs chefs, mettroient continuellement dansun
étatde
défordre,de
guerre& de
malheur,&
bientôt il finiroit par'lè défunir entièrement.
,
Je
faisque
les comparaifons tiréesdu gouver-
tiemenî Angloisfontàpréfenlaffezmal
accueillies^;( 3
'
)
j’oferaî direcependanî
que
filepeuple Angloîsqui,
de
tous le? peuples de la terre, croit ctre le plus à l’abrides atteintesdu
derpotîfme, n’a pas penfié devoir retenirdans les mains les diverfesbranchesdu
pouvoir exécutif,que
les révolutions avoientfait paffer dans celles
du
Parlement; s’il a penféque
la nature de(esintérêtspolitiques exigeoitque
le
gouvernement
pûtagir fansaucune dépendance^
dans certaines circonftances-, iailfanî à la
Nation
repréleriiée le droit de fouîenir
ou
d’abandonner, dans (aiageffe, les projets formés dans le cabinetdu
Prince; s’il a penfé qu’il étoit néceffairede
diflinguerlespouvoirs,de manière qu’ils n’euffent riende commun
dans leurs fonélions, parceque
desfonélionscommunes, émanées
d’un (èul pouvoir,ne pou
voient appartenir qu’au de(po-tiline,
ou
qu’appartenant à des pouvoirs diffé- rens, elles fe croHeroient avec néceffité dans leur aftjon; (i dis-je, tel a été le calcul des Anglois, aveccombien
plusde
raifons, dans des circonftances bienmoins
avantageiftespour
affoibiir le pouvoir exécutif,
devons-nous
lemaintenir dans toutefou unité
&
dans toute Ton étendue, nous, dont la pofition rend indilpen-fabl/i l’entretien de grandes armées,
&
quine
pourrions les tenir dans* la fuhordination,
h
A
ij{
4
)difcipline, qui feules les rendent utiîes, ians cette unité
de
pouvoir* dont le défautentraîneroiî encore le défordre le pluscomplet
,même
dansles droits des citoyens’.
Le pouvoir
exécutifeft le premiermobile de
toutes les Lois; plus il feragrand &
aélif,plus les Lois,aurontde
force& de
vigueur, plus la fociété iera heureujfe.La
partiede
cepouvoir
confiéeaux Tribunaux, pour
rendre lajuftice, doitelle-même
êtrecontenue
dans les bornes parun
pouvoirfupérieur, quipuifîeporter obftacleaux
ligues ariftocratiques,
que
tous lesCorps
judiciaires chercheront toujours à former.
Le
terrible droit
de
juger, diûribiiéentreun
figrand nombre
d’agens, devient fufceptiblede
tant d'abus , <}u’il reffembleroît bientôt plus encore à la tyrannie qu'au defpotifme , s'il n'exiftoitune
fuprématie inflîtuéepour ramener
fans ceffe&
fins exception, tous les iujets
de
l'empire à la flriéie obfervatioii des Lois.Il convient
donc que
leMonarque
(bitrevêtude
tousles pouvoirs capables d'affurerrexéculioii des Lois,
qu'il foit l’Ordonnaîeur fbuverain
&
fAdminiflrateur
fuprême
de toutes les forces,de
tous lesmoyens
inüitués par laNation pour
la inaintenir dans lecalme &
la tranquillité défi-{ 5 )
rables au-dedans,
&
au-dehors dans l’indépen-dance
politique qui lui appartient.Toutes
ces conditions,donnant
au pouvoir executif l'entière poflibilité d’agircomplètement &
avec prompti- tude, forment, encoreune
fois, les grands avantages&
l’excellencedu gouvernement mo-
narchique.Ces
avantages feroîent cependant pleinsde
dangersfilatendancenaturelle d’unetelleréunionde
forces vers le defpoiifme, n’étoit pasrendue
îinpoflible dans fes effets.
Ces moyens
font fournis par le caraftèremême de
la monarchie.Le Defpote gouverne
parfavolonté, leMonarque
par les Lois. Cette démarcation eft fi certaine
&fifixe, que
la recherche, àqui veut la vérité, n’en el\ pas fufeeptibie d’erreur.Toute
aélion faiteen
vertude
l’autoritéque
la
Loi donne
auMonarque, ne
peut être ni recherchée ni blâmée.Toute
aétion faite contre laLoi
eft'uncrime^&
les fauteurs&
agens d’un crime,en
doiventêtre punis. C’efl ainü qu’une
Nation
doit être libre fousun gouvernement monarchique.
Le Monarque,
toujours uni d’intérêtavec
fon Peuple,ne
peut être, plusque
fon Peuple,
même
compris dansla pourfuite d’aucune aélioaA
iij(
^
)contraireà cet Intérêt
commun
, carilne
peut êtrefoupçonné
d’avoir voulu agir contre lui-même.Sa
pertonne ed, par ce principal motif, réputée facrée êk inviolable. D’ailleurs^ ce refpeél conf-^tarnment
rendu
à la perlonnedu Roi
, celte inviolabilité Hicrée dont elle jouit &: qui affure la durée&
la tranquillitéde
laMonarchie
, lui (ont encore d’autant plus légalement dus, qii’eut-il i’intention
du
mal, à lui feiil ilne
pourroit ropérer.-De-ià, i’étabiiffement
de
la refponfabiîité des M-inifires, voilà la condition qui affure la liberté desCitoyens
, voilà lemoyen
également avan- tageux auRoi &
à laNation,
qui n’ont, quine peuvent
avoir dansun bon
ordre dechofes,qu’un
intérêtcommun
, qui ont enfin celui réel&' permanent
de poffeffeiir&
de propriétaire, quand, les Minifires, dont le termede
l’autorité eil ficourt,n’agiflinten
conféquenceque comme
iffufiaiiliers;,
&
doivent, par la nature des foi-bleffes
&
des paffjonshumaines,
abider, s’ilsne
font pas févèrement contenus.
Nous
aurons des Lois conftiuuives,émanées
d’unebonne
déclaration' des droits nationaux.iVoilà des bornes dans lelquelles les Minifires doivent toujours fe reij^émier; s’ils
en
lortenî,^(
7
). i O
ils doivent être cites à l’AiTembiée nationale
&
jugés par fa réunion
complète
; car tous les difie- rens intérêts (è rénniffentpour
le maintiende
la conllitution,ou
par le tribunalqu
elle aura ciéé pour connoîlre des crimesde
cette hauteimpor-
tance.
li eftinutiled obrerver
que
lesLoisne
peuvent, fur-toutdansieurpremièreinrtitütion,toutprèvoii,
tout circoiifcrire; maisil
ne
peuty
avoirde
crimelà
où
il ify
apoint encore deLoi
; letemps &
laconnoiffance des oiTiiffionsrendront les Lois plus complètes.
La
légiilationla plus parfaite ,efl; celle quicomprend
en elle la faculté de fecouiger
par elle-même
,&
d’ajouter à fa perfeèfion par i’expèrience.C’eft
aux
feules actionscontraire.s,aux conven-
tions nationales
& aux
Lois conüitutivesdu royaume
, tellesqu’ellesaurontétéprononcées,que
doit&peutêtreflxéeiarefponfabiiité des Minifires.Une
aceufuion quine
porteroitque
furun
faitabfolument contraire au texte matériel de la Loi
(Se à la déclaration des droits, doit être rejetée.
Il fuffit ,
comme
déjà il a été dit,que
li laLoi
n’avoit pas prévu
un
cas vraiement important,
elle pût en
prononcer pour
l'avenir, lansque
Ion elfet fût rétroadif; carenün
xieü
de juftjce(
8
)«aO)e
,.,c ce<,„i ..efl
^ „
e^pceffémenteu
permis.La
refpon/Iibilité ainfi&ée.
aura fe précieuxJ 1 fT ,! fansque
laplé-
t/T M’
rinoyens exécutifs,
fi elfen- t:eJsalenfe.nb!e, à
la force, à f
exigence
enfin e xamonarchie
,en
foient altérées; Elleaffurera plus le ventabie
bonheur du Monarque,
qui, encoreune
fois, n’ad’intérét
que l’obfervaLn delà Loi
qui) a confenüe, „’ade
félicitéque
la tranquillité&
la profpérité publique.&
qui feraïï-
V
""
de
1 ambition envahilTante desiniftres
, qui , difpofant d’un
pouvoir
fanshomes, ne
penfentfouvent qu’à fervîr leurs paffions, grandes
ou
petites.&
facrifient à cet tntérét,premier pour eux,
lebiende
l’État qu’ils a rninifîrent, le
bonheur &
la confidérationdu Roi
qu’ils fervent.Je
Lisque
quelques perfonnespenfent
que
les
Mmiftres
rendus aufiifiriclement refpon- fables, leurs places
ne
feront plus recherchées,& que
léRoi
trouverapeu de gens
défirables àplacer dans les affaires, qui confenteiit à s’en charger.
J
avoue que
je n ^i jamaiscompris comment
(
J
)des places
où
le bien ieroit poffible à faire&
lemai
difficile, pourroient être fi décriées.
Le
pouvoir qu’auront les
Minières,
fera celuidu
Roi
,&
il n’aura de bornesque
celles des Loisfanélionqées,
qu
ilne
pourrafansdouteenfreindre;mais
qui font les limites néceffairesdu pouvoir
dans -toute focicté policée.Ce
pouvoirj d’une étendue illimitéepour
l’adminifirationfuprême
des forcesde
terre&
demer
,
pour
les néjjocia- tions politiques,pour
la proteéliondu dedans
par lesmoyens
légitimes,borné du
coté des financesaux
dépenfes confenties par laNation pour
1impôt
,&
à la fixation particulièrede chaque depaitement,
reunit tous lesmoyens de
tenir 1 Ltat dans la tranquillité nécefiaireau
reposde
tout citoyen honnête,de
le foiie fleurir dans tous les rapports de richeffies,de
grandeurde
profpérité,& de
faire face à tous lesévènemens
qui,ne pouvant
être prévus, pourroientou
aflbibiir l’empire,ou
le mettreen
danger silny
étoit paspromptement
portéremède. C
eflaux
Miniflres àne
jamais excéder lamefure
des dépenfes auxquelles leur dépar-tement
doit être fixé, puifqu’ils font affiijetis à la reddition publiquede
leurs comptes.Loin que
leursplacesfoient alorsmoins
recher-(
lO
)chceG, elles leront plus
vivement
defiréesde i’homme honnête
qui ne veut avoirrien àcacherde
fes projets& de
fes cfém arches; qui, loinde
to.ite intrigue,
ne
voudroit agir qu’en plein jour.L’homme ferme
&: éclairé verra les bornes de fautorité’ qui lui efl confiée,&
ilne
les pafiera' pas. Bien certainde ne
pouvoirêtremis en
Juge-ment que pour
des prévarications exprefiement articulées par la loi, aifuréque
fies intentions,que
les conféquences de fes aélionsne
pourront jamais être interprétées&
fervirde
titre àune
accufatlon,il marcherafanscraintedans lacarrièredu
bien public.C’efl; dans i’obfcurlté
que
lesméchans
tra- vaillent&
parviennent à nuire à la vertu.Le grand
jour la prélerve toujoursde
leur atteinte.Plus le
nombre
des jugesde l’homme
public feragrand
,&
plus il devra trouver defureté dans fa caufe. Celui qui en douteroit,
manquant de
la noble confianceque
la vertufait
donner,
prouveroit qu’il n’efl; pasl’homme
d’une grande place. Ils en feront encore écartés ceshommes
médiocres, dont le feui mérite feroitune
complaifaaîe facilité,&
dont le feul but/
( )
(croit i’intcrêtperfbnnei;
&
cette neceiïàireexclu-- fioane
feroit pas ini desmoindres
avantagesde
celte précieufe refponfabilité.Les hommes
d’Iionneur , d’inftruélion Scde
caraftère, pourront feuls prétendre au miniftere.Fiers
du compte
public qu’ils devront rendre de leur adminiilration, ils en ferviront avec plusde
fccurité leur Patrie Sc leurRoi
;&
fi, malgréleurs effors Sc leur droiture, les cabales fermoient cependant" abfolumentl’accès
du
trône àlavérité,&
rendoient inutile laferme
réfiftanced un
^Mîniftre refpeétueux
pour
ion Prince, mais efcl^vede
fon devoir, fon refus defigner 1ordre quine
feroit pasconforme
à l’intentionde
laLoi,
Sc l’abandondéfi
place, le mettroient à l’abride
tout reproche, le rendroient plus cherà fes concito.yens
&
prépareroîentun jugement
plus févère aufuccelfeur
imprudent
qui voudroitle remplacer.
La Nation
, en établiffant larefpon- fabilité dont l’ambition paroîtfi effrayée, appelleradonc
auprèsdu
trônele courage, le vrai talent,les vertus patriotiques; elle aura des Miniflres quile glorifierbiït
de
fèlre, parce quHl fera certain (ju’ilsne
pourront efpérerdo
gloire&
d avan-tages
,
que
dans la prüfpcritéde
IEtat. Enfin,
elle verra ou- pourra voir les places occupées
«
3
|(
12
)par des
hommes
qui les honoreront,&
qui nè/font rares
en France que
parceque
l’atmofphère qui environne le Souverain,ne
leurpermet
pasd en
approcher. .<
(
A VERSAILLES;
DE
L’IM P R
IM E R
IE ROYALE.
M.