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R. Thuret Mamzer , Bruneel Timsit , F. Kleinclauss ,M.F. M.-O. Living kidney donation Le donneur vivant de rein

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www.sciencedirect.com

Le donneur vivant de rein

Living kidney donation

M.-O. Timsit

a,b,∗

, F. Kleinclauss

c,d,e

, M.F. Mamzer Bruneel

f,g

, R. Thuret

h,i

aServiced’urologie,hôpitaleuropéenGeorges-Pompidou,AP—HP,20,rueLeblanc,75015 Paris,France

bUniversitéParisDescartes,75008Paris,France

cServiced’urologieettransplantationrénale,CHRUdeBesanc¸on,25000Besanc¸on,France

dUniversitédeFranche-Comté,25000Besanc¸on,France

eInsermUMR1098,25000Besanc¸on,France

fUnitéfonctionnelled’éthiquemédicale,hôpitalNecker,AP—HP,75015Paris,France

gEA4569,laboratoired’éthiquemédicaleetdemédecinelégale,universitéParisDescartes, 75006Paris,France

hServiced’urologieettransplantationrénale,CHUdeMontpellier,34090Montpellier,France

iUniversitédeMontpellier,34090Montpellier,France

Rec¸ule23aoˆut2016 ;acceptéle1erseptembre2016 DisponiblesurInternetle6octobre2016

MOTSCLÉS Doncroisé; Donneurvivant; Extractionvaginale; Néphrectomie donneur; Traficd’organes; Transplantation rénale

Résumé

Objectif.—Réaliserunemiseaupointsurlesaspectséthiques,réglementairesettechniques delachirurgiedudonneurvivantderein.

Matérieletméthodes.—Une recherche bibliographique exhaustive à partir de Medline (http://www.ncbi.nlm.nih.gov)et Embase (http://www.embase.com)aétéréalisée enuti- lisant les mots clés suivants seuls ou en combinaison : « Don croisé ; Donneur vivant ; Extractionvaginale; Néphrectomiedonneur;Néphrectomie cœlioscopique robot-assistée; Traficd’organes;Transplantationrénale».Lesdocumentslégislatifsfranc¸aisontégalement étéconsultés(http://www.legifrance.gouv.fr).Ainsi,6421articlesontétéidentifiés.Aprèséli- minationdesdoublonsetsélection desarticlessurleurpertinenceetdontletexteintégral étaitdisponibleparlesabonnementshospitaliersetuniversitaires,161articlesontétérevus etontétésélectionnés.

Cetarticlefaitpartieintégrantedurapport«Lesurologuesetlatransplantationrénale»du110econgrèsdel’Associationfranc¸aise d’urologierédigésousladirectiondeFranc¸oisKleinclauss.

Auteurcorrespondant.

Adressee-mail:marc-olivier.timsit@aphp.fr(M.-O.Timsit).

http://dx.doi.org/10.1016/j.purol.2016.09.054

1166-7087/©2016ElsevierMassonSAS.Tousdroitseserv´es.

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Résultats.—Ledébatéthiqueconcernantledondereinsefocaliseaujourd’huiautourdela pénuried’organes,delacompensationfinancièreounondudonneur,dutraficd’organesetdes donnéesrécentessoulignantlesur-risqued’insuffisancerénaleàlongtermedudonneur.Les aspectsréglementairesvisentàélargirlecercledesdonneurs,toutenassurantlaprotectiondes personnes;ledoncroiséestunexemplemaisdontl’efficacité,enFrance,estdiscutable.Lavoie cœlioscopiques’estviteimposéecommeunevoied’abordderéférenceetlavoierobotique est encours de développement sansbénéfice démontré parrapportaux autrestechniques mini-invasives.

Conclusion.—Lachirurgie dudonneurvivanta connude nombreusesévolutions techniques principalementmini-invasivesvisantàminimiserleseffetssecondaireschezledonneurtout enmaintenantlerisquedemorbiditéleplusfaiblepossiblepourcettechirurgieparticulière réaliséechezdespatientssainsdontlasurveillanceaulongcoursapparaîtessentielle.

©2016ElsevierMassonSAS.Tousdroitsr´eserv´es.

KEYWORDS Donornephrectomy;

Kidneypaired donation;

Kidney

transplantation;

Laparoscopic nephrectomy;

Livingdonor;

Organstrafficking

Summary

Objectives.—Toreviewethical,legalandtechnicalaspectsoflivingkidneydonorsurgery.

Material and methods.—An exhaustive systematic review of the scientific literature was performed in the Medline database (http://www.ncbi.nlm.nih.gov) and Embase (http://www.embase.com) using different associations of the following keywords: Donor nephrectomy; Kidney paired donation; Kidney transplantation; Laparoscopic nephrectomy;

Livingdonor;Organstrafficking;Roboticassistednephrectomy;Vaginalextraction.Frenchlegal documentshavebeenreviewedusingthegovernmentportal(http://www.legifrance.gouv.fr).

Articleswereselectedaccordingtomethods,languageofpublicationandrelevance.Atotal of6421articleswereidentified;aftercarefulselection,161publicationswereconsideredof interestandwereeligibleforourreview.

Results.—Theethicaldebatefocusesonorganshortage,financialincentive,organtrafficking andtherecentdatasuggestingasmallbutsignificantincrease riskforlate renaldiseasein donorpopulation.Legaldecisionsaimtoincreasethenumberofkidneysavailablefordonation, suchaskidney-paireddonationthatfacesseveralobstaclesinFrance.Laparoscopicapproach becamewidelyused,whilerobotic-assisteddonornephrectomyfailedtodemonstrateimproved outcomeascomparedwithotherminimalinvasivetechniques.

Conclusion.—Minimally invasive livingdonornephrectomy aimsto limitside effectsinthe donorwithoutincreasingthemorbidityinthisspecificpopulationofhealthypersons;longterm surveillancetopreventtheonsetofrenaldiseaseinmandatory.

©2016ElsevierMassonSAS.Allrightsreserved.

Introduction

Depuislapremièretransplantation rénaleàpartirdedon- neur vivantréaliséeà l’hôpitalNeckeren1952, plus d’un demi-milliondeces transplantationsontétéfaitesdansle monde,etchaqueannéeplusde27000nouveauxpatients enbénéficient[1].Aujourd’hui,l’utilitédelatransplanta- tionrénalepourlasantédesmaladesatteintsd’insuffisance rénalechroniqueaustadedel’épurationnefaitplusaucun doute,maismalheureusement,lenombredesorganesdispo- niblespourlatransplantationesttrèsinsuffisantpourfaire faceàlademandecroissante.Cettesituationaconduitàune augmentationdurecours auxreinsprovenantdedonneurs vivants,stratégieséduisantecarelleoffrel’opportunitéde transplanterdesreinsdemeilleurequalitéquelatransplan- tationdereinsprovenantdedonneursdécédés.

Matériel et méthodes

Une recherche bibliographique exhaustive à partir de Medline (http://www.ncbi.nlm.nih.gov) et Embase (http://www.embase.com) a été réalisée en utilisant les mots clés suivants seuls ou en combinaison : « Don croisé; Donneurvivant;Extractionvaginale ;Néphrecto- miedonneur;Néphrectomiecœlioscopiquerobot-assistée; Trafic d’organes ; Transplantation rénale ». Les docu- ments législatifs franc¸ais ont également été consultés (http://www.legifrance.gouv.fr). Les articles obtenus ont ensuite été sélectionnés sur leur méthodologie, leur langue de publication (anglais/franc¸ais), leur pertinence par rapport au sujet traité (rein exclusivement) et leur datedepublication.Lesétudesprospectivesetrétrospec- tivesenanglais eten franc¸ais, lesarticles de techniques

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chirurgicales(nécessairescomptetenusdusujet)etarticles derevueontétésélectionnées.Lesarticlespertinentscités dans les bibliographies des revues etnon identifiés préa- lablement ont aussi été analysés. Ainsi, 6421 articles ont été identifiés. Après élimination des doublons et sélectiondes articlessur leurpertinence etdont letexte intégralétait disponible par lesabonnements hospitaliers et universitaires, 161 articles ont été revus et ont été sélectionnés.

Aspect éthique et réglementaire de don du vivant

Les questions éthiques se posant autour de la trans- plantation rénale peuvent schématiquement se regrouper autourdedeuxgrands axes: celuide ladisponibilité des organes et celui des modalités d’application de la trans- plantationimpliquantnotammentlajusticedistributive[2].

Cette approche dichotomique, simple enapparence, per- met d’appréhender de nombreux sujets éthiques du don d’organesauxquelsiln’estparfois passiaiséderépondre demanière claire.Ces deux axessont naturellement liés carlapénurie d’organesamène àseposerla questionde ladisponibilité des organes. Latransplantation rénale est letraitementparexcellencedel’insuffisance rénalechro- nique terminale et il est en soi accepté par la société.

Comment alors augmenter le nombre de transplants en amont ? Jusqu’oùest-il possible d’aller dans la modifica- tiondenospratiquestoutenrespectantlesdonneurs,les receveursetleursproches?Commentêtreéquitabledans ladistributiondesgreffons?

Ne seront abordées ici que les questions relatives au donneurvivant(DV),cellesconcernantledonneur décédé faisantpartied’unchapitrespécifique.

Risques chez le donneur

La néphrectomie chez le DV est possible car les risques de complications per- et postopératoires sont connus et acceptésparlasociété.Parailleurs,l’espérancedeviedes donneursestaumoinsaussibonnequecelledelapopulation générale[3].Lamortalitédelanéphrectomiepourdonest estiméeà0,03%essentiellementparemboliepulmonaireou hémorragie[4].Lescomplicationschirurgicalesper-etpost- opératoiressontelles-aussibienconnuesetestimées[5—8].

Lessujetssont informésdes risques encourus demanière complèteetéclairéeetleurlibreengagementseravérifié àplusieursreprisesdanslalongueprocédurequilesattend (cf.Aspectsréglementaires).

Le dilemme médical initial résidant dans la diffi- culté d’accepterpour un chirurgien de porter atteinte à l’intégrité corporelle d’une personne saine vivante, sans bénéfice thérapeutique pour elle dans le but de trai- terune personne malade, semble dépassé.Une personne majeureetautonome,préalablementinforméedesrisques qu’elleencourt,peut déciderdedonnerl’undesesreins, sous réserve que la procédure s’inscrive dans le cadre d’unepratiquemédicosociétalestructurée,transparenteet qu’ellesoitconduiteselondesmodalitésautoriséesparle paysconcerné.Or,plusieurs étudesaméricainessuggèrent

désormaisquelasurvieprolongéeavecunreinuniqueacquis pourrait être associée à une faible majoration du risque desurvenued’uneinsuffisancerénalechronique[9—11].En parallèle,lenombredecestransplantationstendàdécliner dans lemondeentier [12]alors mêmeque danscertaines régionsdumonde,ellesreprésententleseulmoyendesur- vie pour ungrand nombre de patients. Le débat éthique se ravive à la faveur de l’aggravation de la situation de pénurie.

Les normes éthiques fondatrices de la transplantation à partir de donneurs vivants

Initialement développées en Europe(et plus particulière- mentenFrance)etauxÉtats-Unis,l’essordespratiquesde transplantationaucoursdeladeuxièmemoitiéduXXesiècle ad’embléeentraînéuneréflexionéthiqueautourdesprin- cipes et valeurs susceptibles de les fonder. Initié par les médecins pionniers en référence aux valeurs communes, à lamorale hippocratique,et àla déclarationuniverselle des droits de l’homme, le débat s’est ensuite étendu à l’ensembledelasociété.Laquestiondeladisponibilitédes organesetdesconditionsdecettedisponibilitéfutcentrale et son acceptabilité sociétale formellement conditionnée parsoninscriptiondans lerespectdesvaleursd’altruisme etde solidaritéinterhumaine, sous réserve du respectde l’autonomie.Lagratuitédel’acte,coupléeàlavolontéde donner,sontdepuislorscellesquilégitiment,danscespays, la compatibilitédes donsd’organes entrevivants avec le respectdeladignitéhumaine.Chargeestdésormaislaissée auxétatsquidésirentproposerlatransplantationàpartirde donneursvivantsdemettreenplacedesprocéduresappro- priéesgarantissantle respectdeces conditions.Pionnière dans cedomaine,aveclapromulgationdelois spécifiques encadrantlespratiquesdetransplantation(loiCaillaveten 1976, puis loi debioéthique de 1994, révisée en 2004 et en2011), la Francea retenuun principed’exception aux principesd’inviolabilitéetd’indisponibilitéducorpshumain inscritsdanssonCodecivil.Lesprélèvementssurpersonnes vivantesnesontautorisésquepardérogation,sousréserve durespectdesconditionssuivantes:finalitéthérapeutique pourautrui,consentementpréalabledelapersonnepréle- vée et gratuité du geste qualifié de don. Dans la plupart des pays,à l’exception de l’Iran qui organise un marché régulé parl’état [13], lesprogrammes detransplantation àpartir dedonneursvivantssesont initialementdévelop- pés selon une logiquede donsdirigésau sein d’un cercle familialtrèsrestreint,quis’estprogressivementélargiaux personnesnonapparentéesmaisaffectivementliées.Sousla doublepressiondelasociétéetdel’insuffisancenumérique des organes pour répondreaux besoins, certains paysont autorisélesdonsdits«altruistes»,provenantdepersonnes n’ayantaucun lien aveclesreceveurs [14].Cesdonssont alorsanonymesetnondirigés,allouésparlesorganisations desétats lesautorisantselondesrèglestransparentes,au seindeprogrammeslaissantunelargeplaceauxdonscroisés en chaîne[15]. Parallèlement,devant l’échec des straté- giesdecollectefondéessurledonàfairefaceauxbesoins, un véritable marché noir se développe dans le monde, à l’origine d’un trafic d’organeset d’un tourisme detrans- plantation[16].

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Trafic d’organes

L’OMSestimait, en2005,qu’environ10 %destransplanta- tions rénalesréaliséesdans le mondeutilisaientdesreins issusdutrafic[17].Lecommerceillégald’organespeutavoir diversesprésentations[16],aveccommeprincipalélément communlenon-respectdeladignitédelapersonneetdes droitsuniverselsdel’homme:

• réalisation des greffes par une organisation de type mafieuse,proposantàl’internationalunaccèsàlatrans- plantation.Classiquement,lesreceveursproviennentde paysdéveloppés,lesdonneurssontissusd’unepopulation défavoriséedepaysdutiers-mondeouenvoiededévelop- pementetlesinterventionssontréaliséesdansdespays tiers(Turquie,Kosovo,Azerbaidjan,etc.)[18];

• rémunération cachée au sein d’un programme légal de donneurs vivants altruistes ou non. Ce point évoque le débat éthique sur l’attribution d’une valeur mar- chande à l’organe et sur les subtiles distinctions entrerémunérationdédommagementetdéveloppement médicoéconomique [13,19,20]. Une étude canadienne provocatrice [21], publiée en 2013, avait montré que rémunérer le don de rein à hauteur de 10 000 USD en anticipantuneaugmentationde5%dunombredetrans- plantsdisponibles,réduiraitlecoûtdelamaladierénale chronique(340USDd’économiesincrémentielles)etamé- lioraitlaqualitédevieajustée(QUALY)de0,11points;

• purge ethniquecommecelaestsuspectéenRépublique populairedeChineoùlescentresdetransplantationsoffi- ciels ont doubléen quelquesannées avecune quantité de transplants disponibles importantes et des possibili- tésd’attributiondetransplantsassezsingulières,puisque corréléesauxsentencesetcondamnationsàmortdepri- sonnierspolitiques...[22—24].

Don, estime de soi et conséquences sociales

Leshommesconsidèrentquele donestvalorisantetqu’il augmentel’estimedesoialorsquelesfemmesvoientplutôt ledoncommeuneextensiondeleursobligationsfamiliales [25].La décisionde donnerest prise très rapidementpar ledonneurlorsquelereceveurestunparentouunenfant.

Par contre,lorsque le donneur estun frère,une sœur ou unconjoint,unedifficileréflexionconscientealieuenrai- sondelapressionmoraleetintrafamilialequisecombine avec l’altruisme du don. Nul don n’intervient dans une atmosphèreneutre[26]:«Donnersembleinstituersimulta- némentundoublerapportentreceluiquidonneetceluiqui rec¸oit.Unrapportdesolidarité,puisqueceluiquidonnepar- tagecequ’ila,voirecequ’ilest,avecceluiàquiildonne, etunrapportdesupériorité,puisqueceluiquirec¸oitledon etl’acceptesemetendettevis-à-visdeceluiquiadonné» [27].Toutdongénèrechezlereceveurlanécessitédefaire uncontre-don.Ilest difficilededistinguerl’obligation du librechoixetlaréponseàcettequestionestéthiquement importante.Ledonneura-t-ilsonlibrearbitre?Apriorioui, carledonneurasaproprecapacitéderéflexionquimérite qu’onlarespecte,notammentenluifournissantuneinfor- mationclaireetaccessiblepourqu’ilexercepleinementsa facultédedélibération.Sadécisionestautonomeetledon- neurrestesouveraindanssadécision,mêmesionnepeut nierquesadécisionprendcorpsdansunehistoirefamiliale

etaffective,etqueseloncettehistoire,lemêmegestedu donpeutavoiruncaractèresainoupathologique[26].

Enmargedescomplicationsdelanéphrectomie,ilexiste des conséquencessociologiques nonnégligeables. Àcourt terme, le donneur est en arrêt de travail et peut avoir unepertesalarialeimportante.Àlongterme,cedonpeut le gêner dans le cadre de primes d’assurance ou lors dela demande, notamment de prêt immobilier, même si l’article12delaloidebioéthiquede2011interdittoutedis- criminationconcernantl’accèsàdes contratsd’assurance pourlesDV(L.111,8duCodedesassurances)[28].

La question du dédommagement financier du don- neur se pose donc. Une règle majeure en France, et ce, contrairement à d’autres pays où il existe un droit de propriété de ses propres organes, est la non- patrimonialité du corps humain (position législative de 1994 résultant de l’avis du Conseil consultatif natio- nal d’éthique du 13 décembre 1990 qui prônait la non-commercialisation du corps humain) [29]. Cette non- patrimonialitéinduitl’inaliénabilité,l’imprescriptibilitéet l’intransmissibilité des droits que l’individu exerce sur son corps. L’inaliénabilité garantit que le corps ne sera pas cédé aveccontrepartie financière comme cela est le cas dans d’autres pays [13,20,30]. L’inaliénabilité pres- critl’impossibilité d’une prescription. Enfin, lesdroitsne peuventêtretransmis.Lesprélèvementsd’organesdansle cadredesDVsontautoriséscarilexisteunefinalitéthéra- peutique.

Enfin,ledon neperturbepasl’équilibrepsychologique dudonneuretvamêmejusqu’àconstitueruneexpérience très positive avec une amélioration de la qualité de vie [31—34].Lesdonneurssontreconnaissantsd’avoir pudon- neretconsidèrentqueleurestimedesois’est améliorée.

Le don renforce les relations entre donneur et receveur.

Par contre, des effets secondaires d’ordre psychologique ontétérapportés,mêmesipeudedonneursexprimentdes regrets(1à6%)[25].Certainsdonneursontunesensibilité accrueau stressetune priseencharge psychologiqueest quelquefoisnécessaire,notammentencasd’échecchezle donneuroulereceveur.Ledonpeutaussiêtrepourvoyeur deconflitsfamiliaux. C’estici que l’évaluationavant don estcapitale, s’attachantaussi à rechercherd’éventuelles pressionssociales,familialeset/oufinancières.

La décision de donner : un mélange complexe de choix autonome, de décision médicale et de devoir moral

Ladécisiondedonnerunreinestsouventprésentéecomme unedécision résultantdu choixindividuel d’unepersonne autonome. Néanmoins, l’acte de prélèvement impliqué nécessite l’intervention d’une équipe médicochirurgicale et exposele donneur à des risques pour sa santé. Ainsi, chaque décision de don est-elle nécessairement couplée avecla décision médicale d’une néphrectomie.Ce temps médical permet l’examen de la compatibilité de l’état de santé du donneur avec le geste, la vérification de l’absence de maladie transmissible au futur receveur et larecherched’éventuellesincompatibilitésimmunologiques entredonneuretreceveur.Ilincombeégalementauméde- cin ou au chirurgien de délivrer une information loyale,

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compréhensible, personnalisée et non catastrophiste à chaque donneur. Cette informationdoit porterautant sur lesrisquesphysiquesencourus,quesurlesdonnéesdequa- litédevie,lespossiblescoûtsfinanciersetleséventuelles conséquencessociétales.Enparallèle,denombreusespré- cautionssontprisespours’assurerdulibrechoixdechaque donneur.Eneffet,compte-tenusdesenjeuxvitauxpourles maladesenattentedetransplantation,etdelararetédes organesdisponibles,ilexisteunrisquededérivesdenature àremettreencauselaréalitédecelibrechoix,qu’ils’agisse depressionmoraleinterne,depressionsexternes(menaces, chantages,influencesdiverses),voiredecontractualisation pécuniaire. Pour toutes ces raisons, lesrecommandations internationales prévoient que tout donneur soit entendu sursesmotivations,puissebénéficierd’uneévaluationpsy- chosociale[35]etquedesstratégiessoientspécifiquement misesen placepourprotéger sonlibre arbitre. LesÉtats- Unis et l’Angleterre, par exemple, imposent l’assistance systématiquedu donneur par une personne indépendante de l’équipe de greffe dont le seul rôle est de veiller à ses intérêts [36], la France de son côté a mis en place un véritable parcours qui comprend le recueil de trois consentementssuccessifs,pardesreprésentantsd’instances complémentaires(médecin,juge, comitésdits« donneurs vivants»),dédiéàlavérificationdelaqualitédesinforma- tionsdélivréesaudonneur,deleurbonnecompréhensionet delajustessedel’évaluationbénéfice/risque.Laplupartdu tempsnéanmoins,lesdonneurssemblentdéjàavoirprisleur décision au momentoùils rencontrent l’équipede trans- plantation,aunomdevaleursmoralesquiprévalentsurles délibérationsrationnelles[12].Ilestvraisemblablequeces choixaientétééclairéspardesreprésentationscollectives, forgéesàpartird’élémentsdediscoursconvergents,véhi- culésparlesmédecins,lesassociationsdepatients etles organismesofficielsderégulationetfondéssurlesrésultats publiésetglobalementtrèsrassurantsdesconséquencesà courttermepour lesdonneurs.Lesdonnéesplusrécentes sur les risques à long terme sont encore parcellaires et imprécises[12],etcesnouvellesinformationsquidécrivent des risques aussi incertains que lointains sont aussi diffi- cilesà intégrer dans les informationsqu’appréhender par lespersonnesdésireusesdedonner,ced’autantqueladéci- sion d’un tel don est volontiers empreinte d’une grande chargeémotionnelle,surtoutlorsquecelui-ciestdirigé en faveurd’un proche [37]. Ces constatationsimpliquent de nouvellesresponsabilitéspourlesprofessionnelsdesanté, commepour lespolitiques desantépublique etinscrivent lespratiquesdeprélèvementsdanslespratiquesmédicales dontleseffetsàlongtermeméritentd’êtresoigneusement étudiés.

Les reins issus de donneurs vivants : une simple ressource sanitaire ?

Latransplantationrénaleàpartirdedonneursvivantsper- met à de nombreux malades de survivre dans de bonnes conditionsà leurinsuffisancerénale chronique terminale.

Sans remettre en cause le bien-fondé d’une information largesurl’intérêtdesprogrammesdetransplantationrénale àpartirdedonneursvivants,celle-cidevraitêtrenuancéeet préciserqueledond’unreinn’estpasseulementunactede

générositéautonomeetponctuel.Lesvaleursdesolidarité interhumaine etd’altruismequienontfondélalégitimité ne sauraient être remises en question. Elles doivent au contrairepermettredeproposerauxdonneurslapossibilité des’inscriredansunelogiquedesuivimédicaletdesoins aprèsle donafin depermettreà ceuxd’entreeux quien auraientbesoindebénéficierenretourdecettesolidarité enleurfaveur(gratuitédessoins,voireprioritésurlaliste detransplantation).Seulel’organisationd’untelsuiviper- mettraitdeconduirelesrecherchesencorenécessairessur leseffetsàlongtermedudon,enpermettantnotamment la définition de biomarqueurs précoces nécessaires pour affineretpersonnaliserl’informationpré-don,voirecontre- indiquerlanéphrectomie.Danstouslescas,cesdispositions souligneraientlecôtéinconvenantqu’ilyaàconsidérerles organes provenantdedonneursvivantscommedesimples ressourcessanitaires,rappelantlanécessitédeprendreen comptelapersonnesourcedanssaglobalité.Ellesseraient particulièrement intéressantes en Iran et permettraient peut-être derecentrer le débatéthique international qui s’égareaujourd’huienprônantl’extensiondumarchérégulé commelasolutionmiraclepermettantàlafoisderésoudre laquestiondelapénuriedesorganesetcelledumarchénoir etdutraficdesorganes.Lesétudesmontrenteneffetquela créationd’unmarchérégulé,enpervertissantladémarche généreusedudon,obèreledéveloppementdesprogrammes dedonneursdécédésetdedonneursvivantsnonrémunérés [19]. Les données déjà publiées par l’Organisation mon- dialede lasanté(OMS), en2007, démontraientd’ailleurs clairement que,quel quesoitle modèledemarché,qu’il soit réguléou non,les seulespersonnes quiconsentent à vendre leurs organes sonttoujours lesplus pauvres etles plusvulnérables.Danslessuitesduprélèvement,toutesces personnes,accusaientsubjectivementunedétériorationde leurétatdesanté,unediminutiondeleuraccèsàl’emploi etunebaissedel’estimed’elles-mêmes[38].

Aspects réglementaires en France

La transplantation rénale à partir de DV a été légalisée par laloi Caillavet du 22 décembre1976 (loi no 76-1181) qui en a donné la première réglementation [39] : « En vue d’une greffe ayant un but thérapeutique sur un être humain, un prélèvement peut être effectué sur une per- sonnevivantemajeureetjouissantdesonintégritémentale, yayantconsentilibrementetexpressémentconsenti.Sile donneur potentiel est un mineur, le prélèvement nepeut être effectué que s’il s’agit d’un frèreou d’une sœur du receveur.Danscecas,leprélèvementnepourraêtreprati- quéqu’avecleconsentementdesonreprésentantlégalet aprèsautorisationdonnéeparuncomitécomposédetrois expertsau moins etcomprenantdeuxmédecinsdont l’un doitjustifierde20annéesd’exercicedelaprofessionmédi- cale.Cecomitéseprononceaprèsavoirexaminétoutesles conséquencesprévisiblesduprélèvementtantauplanphy- siquequ’auplanpsychologique.Sil’avisdumineurpeutêtre recueilli,sonrefusd’accepterleprélèvementseratoujours respecté ».Fait amusant, en1994, les lois debioéthique ontaccrula protectiondudonneur vivant:leformalisme durecueilduconsentementaétérenforcéetlespossibili- tésdeprélèvementsd’organesrestreintes.Secondairement, au tout début des années 2000 et sous la pression de la

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pénuriedetransplants,unélargissementdespossibilitésde donentrevifsaétéinstauréavecuneextensiondescatégo- riesdedonneurssouscontrôleetprotectiond’uneinstance indépendante[40—45].Cettepositionlégislativeenfaveur d’un élargissement était, il y a 15ans, très controversée parmilesprofessionnelsdelatransplantation.

Il y a eu depuis naturellement une évolution de l’encadrementjuridique des DV parallèlement à laréelle augmentationdecetteactivitéquel’onconnaît.

Une révision importantede cettelégislation encadrant leDVaeulieuaveclaloino2004-800du6août2004rela- tive à la bioéthique [46] associé au décret 2005-443 du 10 mai2005 fixantles ressortsterritoriauxetla composi- tiondes comités d’experts. Cette révisionimportante est contemporainedela créationdel’agence dela bioméde- cine(ABM)quiremplac¸al’établissementfranc¸aisdesgreffes (EFG)etapermisl’élargissementdesdonsd’organesenvue detransplantationàla familleélargiedureceveuretà la personnevivantaveclereceveurdepuis2ansaumoins.Les missionsde l’ABM,énoncées dansl’article 2 decette loi, sont nombreuses avecnotamment « la promotion du don d’organes,de tissusetde cellulesissus ducorps humain, ainsiqueledondegamètesetdemettreenœuvreunsuivi de l’étatde santédes donneurs d’organeset d’ovocytes, afind’évaluerlesconséquencesduprélèvementsurlasanté desdonneurs».

Enfin, une dernière révision de la loi de bioéthique a eu lieu le 7 juillet 2011 [28]. Les lois relatives à la bioéthique de 1994 et de 2004 avaient prévu une loi de révisionobligatoire. Letexte de2011 estl’aboutissement de la clause de révision inscrite dans la loi de 2004. La principale innovation pour le donneur vivant de ce nou- veautexteportesurl’autorisationdudoncroiséd’organes intervenantencas d’incompatibilitéentreproches: deux personnes,candidatesau donpourunprochemaisincom- patiblesavecleurprochemalade,s’échangentleurreceveur respectif s’ils leur sont compatibles (cf. chapitre spéci- fique).

LesaspectsréglementairesduDVpeuventainsisediscu- teren7points.

Information du receveur

Ce point est capital aujourd’hui et beaucoup depatients en dialyse n’ont pas toujours bénéficié en temps et en heured’une informationéclairée sur les bénéficesatten- dusdelatransplantationrénaleetdesapossibleréalisation par le biais du DV. Or, ne pas informer sur cette possibi- litéthérapeutiquen’est pasungeste nulcariléquivaut à délibérer à la placedu donneur potentiel et du receveur ens’appropriantl’usagedeleur librearbitre[47].Ne pas informer, c’estcommuniquer enaffirmantque lesconvic- tionséthiquesetmoralesdumédecinprévalentàcellesdu patient.L’amélioration de l’information du receveur bien avant quelestraitementsdesuppléance nesoientmis en route estainsiune étapemajeurequipermettra le déve- loppementdecetteactivité.Cetteinformationdevraitêtre dispenséeparlenéphrologueréfèrentdupatientenmême temps que celle dispensée sur les autres traitements de suppléance (dialyse péritonéale et hémodialyse) [48]. Le néphrologue référent a une vision globale du traitement del’insuffisance rénale chroniquedupatient,connaît son

étatpsychologiqueetsasituationsocioprofessionnelleetil appréhendeaumieuxlecontextefamilial.

Cercle des donneurs

Un des soucis principaux pour le développement du don venait dufait quele cercle des potentielsdonneursétait restreint initialement au père ou à la mère du receveur.

Ledonneur doit êtremajeur etresponsable etil n’existe aucunelimite d’âgepourle donneur.Grâce aux dernières révisionsde2004et2011,lecercledespossiblesdonneurs s’estconsidérablementélargietconcernemaintenantleou laconjointe,lesparents,lesenfants,lesfrèresetsœurs,les grands-parents,leoulaconjointedupèreoudelamère,les onclesettantes,lescousins etcousinesgermaines, toute personneapportant la preuve de vie commune depuis au moins2ansaveclefuturreceveurainsiquetoutepersonne ayantapportélapreuved’unlienstableetaffectifavecle receveur.

Information du donneur

Leparcoursdudonneurestlongetpermetdevérifier,outre lefaitqu’iln’existeaucuneformedepressionpsychologique oufinancièreaudon,queledonneuraétéinforméaumieux surles possibles conséquences dudon. Cette information provientnaturellement essentiellementdel’équipemédi- cochirurgicalequileprendencharge.Lecomitéd’experts vérifieralabonnecompréhensiondesrisquesencourus.

Les comités d’experts (comité donneur vivant)

Ilexiste8comitésd’expertspourcouvrirtoutleterritoire (Nord, Est, Centre-Est, Sud, Ouest, Île-de-France-Centre, Antilles-GuyaneetlaRéunion).Chaquecomitéestcompose de5 membres (3 médecins, 1 psychologue et1 personne qualifiéeenscienceshumainesetsociales)et3suppléants sontnomméspourchaquetitulaire.

Ledonneurvavoirlecomitéd’expertsdontrelèveson domicile. Si le donneur doit se déplacer pour rejoindre le receveur dans un établissement de santé, le comité d’experts peut être celui correspondant à cet établisse- mentdesanté.Chaquedonneurdoitrencontrercecomité à l’exception du père et de la mère du futur rece- veur.

Encasd’urgencevitale,lesmembresducomitésontdési- gnésparl’ABMetl’autorisationdoitêtredélivréepartout moyen.

La mission des comités d’experts est une double mis- siond’informationetdevérification:missiond’information sur les risques encourus par le donneur et les possibles conséquencesphysiquesoupsychiques,familialeouprofes- sionnelle.Lesrésultats attendusdela greffedoiventêtre exposés,maisneremplacentévidemmentpasl’information délivréeparl’équipemédicochirurgicalequis’occuperadu prélèvementetdelatransplantation.Missiondevérification pourêtre sûrqu’iln’existepas de«réticenceinavouée» pourledon.

Lesdécisionsrenduesparlecomitéd’expertsn’ontpas àêtremotivées etsont conservéesparl’ABMquigarantit leursconfidentialités.

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Expression du consentement devant le Tribunal de grande instance (TGI)

Ledonneurdoitensuiteexprimersonconsentementdevant leTGIdontrelèvesondomicileetnonledomiciledurece- veur.Siledonneurrésideàl’étrangeroudansunDOM,leTGI peutêtreceluidulieudeprélèvement.Ceciestuneétape très importante permettantde vérifier que le don sefait avecunconsentementlibreetéclairéetqu’ilestconforme auxdispositionsdéterminantlafinalitéduprélèvement et lecercleadmisdesdonneurs.

Encasd’urgencevitale,leconsentementestrecueillipar leprocureurdelaRépublique.

Lerecueilduconsentementdudonneurdonnelieuàla rédaction d’un acte signé parcelui-ci etle magistrat. La minutedel’acte(l’original)estconservéeaugreffedutri- bunaletl’expédition (lacopie) transmiseau directeurde l’établissement de santé dans lequel le prélèvement est envisagé.Ce dernier communiquealors cette information aumédecinresponsableduservice,dudépartementoude lastructuredesoinsconcerné.

Lepassagedudonneurdevantle comitéd’expertetle TGIn’empêchenullementleconsentementd’êtrerévocable àtout momentparle donneursans aucune justificationà apporter.

Prise en charge financière de tous les frais liés au don

Cetteneutralitéfinancièrereposeévidemmentsurlanon- patrimonialitédu corps humain[29,49]. Le donneur n’est pasrémunéréettouslesfraisengagéspourledonsontpris encharge par l’établissement préleveur etson assurance maladie.Celaconcernetouslesfraisdessoinsentourantle prélèvementetlesuivi.Ledonneurestexonéréduforfait journalierhospitalieretduticketmodérateurpourtousles soins.Parailleurs,lesfraisdetransportpourlaréalisation desdifférentsexamenscomplémentaires,lepassagedevant leTGIetlecomitéd’expertssontprisenchargesurlabase dutarif lemoinsonéreuxdumoyendetransportlemieux adapté.Deplus,lesfraisd’hébergementhorshospitalisation enlienavecledonsontprisenchargedanslalimited’un montantjournalierégalà10foisleforfaitjournalier.Enfin, encasdepertederémunération,ledonneurpeutbénéficier d’une indemnité journalière versée parl’assurance mala- die.Si l’indemnitén’égale pasla pertede rémunération, l’établissementpréleveurverseunecompensation pourun montantmaximumégalà4foisl’indemnitéjournalière.

Touslesfraisengagéssontaussiprisenchargesiledon- neurn’estfinalementpasretenu.

Registre de suivi des donneurs

UnregistredesDVaétéouvertparl’ABMdepuis2004afin demieuxconnaîtreleurdevenir.Lesinformationssontréac- tualiséesannuellement.

Suivi des donneurs vivants

EnFrance,lestransplantationsàpartirdedonneursvivants représententaujourd’hui16%destransplantationsrénales

réaliséesdansl’héxagone[50]etlesrésultats dusuivides patientsdonneursd’unreinàpluslongtermerestentassez controversés.

Mortalité et morbidité chirurgicale

La mortalité de la néphrectomie donneur vivant a été historiquement évaluée à 0,03 % [51—54]. Plus récemment, ce résultat a été confirmé sur la cohorte nord-américaine de l’United Network for Organ Sharing (UNOS) retrouvant 25 décès sur plus de 80 000 don- neurs vivants [4]. Le développement de la laparoscopie n’a pas été associée à une augmentation de la morta- lité qui reste stable même si quelques cas décrits de complications peropératoires, notamment hémorragiques, fatales [53]. Deux méta-analyses récentes comparant les résultatsdes différentesapprocheschirurgicalesn’ontpas mis en évidence de différence en termes de mortalité [55,56].

Lamorbiditépériopératoireestvariableselonlesétudes du fait du mode de recensement et de classification des complications chirurgicales. Mjøen et al. rapportent, dans leur série de plus de 1000 donneurs vivants, un taux de 18 % de complications mineures et 3 % de ré- intervention [57]. Un taux de ré-intervention de 2,3 % et de complications sans reprise chirurgicale de 2,2 % a été rapporté dans une série issue de l’UNOS intégrant 10 828 néphrectomies pour don de rein [53]. Le taux de complicationsn’estpassignificativementdifférentselonla technique utilisée maisles complications rapportées sont différentes. Il a ainsi été observé des complications de parois (déhiscenceetinfection,emboliepulmonaire)dans lessériesdenéphrectomiesparvoieouvertealorsqueles complications décrites dans les séries de néphrectomies laparoscopiques concernaient des saignements peropéra- toires, perforationd’organe creuxetrisquedeconversion [56].

Survie et qualité de vie après don du vivant

L’espérance de vie des donneurs n’est pas altérée par la néphrectomie. Ainsi, Ibrahim et al. ont démontré que la survieàlongtermed’unecohorted’environ3800donneurs vivantsétaitidentiqueàcelledelapopulationgénérale[9].

Une étudeduregistre suédoisconfirme cesrésultats avec unesurvieàlongtermemeilleurechezlesdonneursvivants quedans lapopulationgénérale, dufaitdeleurexcellent étatgénéraletdel’absencedecomorbiditéaumomentdu don[10].Laqualitédeviedesdonneursn’estpasaltérée parlemécanismedudonetcelle-ciestcomparableàcelle delapopulation générale,voirelégèrementsupérieuredu faitdusentimentdemieux-êtreliéaudonàunepersonne proche[32,58—60].Quasimenttouslesdonneurs(97%pour Clemensetal.,100%pourGarciaetal.,99%pourFehrman- Eckhometal.)prendraientlamêmedécisionconcernantle don [32,58,59].Il semblenéanmoins selon le ressenti des patientsquelesinconvénientsetladuréedelapériodepost- opératoireaientétépeuanticipés,voireminimisésavantle don[59].

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Morbidité à long terme

Modification du débit de filtration glomérulaire (DFG)

UnediminutionduDFGestobservéeimmédiatementaprès lanéphrectomiepourdonduvivant[61].Uneméta-analyse regroupant48sériesincluantplusde5000donneursaévalué ladiminutionmoyenneduDFGàenviron25mL/min.LeDFG moyenpost-donétaitdanscetteméta-analysede86mL/min [62].Ibrahimetal.ontréaliséunemesureduDFGaprèsdon dans un sous-groupe depatients donneur vivant.Avec un reculde12,2±9,1ansaprèsledon,leDFGmesuréétaitde 76±12%duDFGmesuréaumomentdudon.Quatre-vingt- cinqpourcentdespatientsprésentaientunDFG>60mL/min etaucunpatientneprésentaitunDFGinférieurà30mL/min [9].

Une protéinurie peut apparaître après don de rein.

Elle est la plupart du temps modérée et inférieure à 1g/24heures [54].Safréquencevarie selonlesétudes de 0 à34 % [9,10,62].Cependant, laprotéinurie peut rester stable,voiredisparaîtreavecletempsetaucunlienavecle développementd’uneinsuffisancerénalechroniquen’aété misenévidencechezlesdonneursvivants.

Hypertension artérielle et risque cardiovasculaire

Plusieurs études ont montréune élévation de la pression artérielleaprèsdonderein[63,64]sansaugmentationdela fréquencedeshypertensionsniaccidentscardiovasculaires [9,62].Lesfacteursderisquededégradationdelafonction rénaleaprèsdonsontl’âgeavancéaumomentdudonetun BMIélevé[9].

Insuffisance rénale terminale

Lerisquededévelopper uneinsuffisancerénaleterminale aprèsdonestrelativementfaiblemaisnéanmoinsprésent [9,10,65]. En 2006, Fehrman-Ekholm et al. retrouvaient, dansunecohortede1112donneurs,5patientsprésentant uneinsuffisancerénalechroniqueterminale,soitunepré- valencede0,5%[10].Ibrahimestal.estimaientl’incidence del’IRCterminalechezlesdonneursà180parmillion,très inférieureàl’incidenceobservéede268parmilliondansla populationgénéralenord-américaine[9].

Le risque de développer une maladie rénale et une IRCterminale aprèsdon de reinsont donc rares et cette information a été apportée au patient pendant de nom- breusesannées.Cependanten2014,denouvellesétudesont été publiées comparantla survie, le risque d’insuffisance rénale chronique, depathologie cardiovasculairechez les donneurs à des groupes témoins non plus issus de la population générale mais composé de patients ayant des critères d’éligibilité à un don n’ayant pas été effectué [11,66].Ainsi,Mjøenetal.ontrapportéunrisquededécès (HR 1,3 ; 95 % CI [1,11—1,52], p<0,001), notamment de causes cardiovasculaires (HR 1,4 ; 95 % CI [1,03—1,91], p=0,03)significativement supérieuraugroupe témoin.Le risqued’insuffisancerénalechroniqueétaitlui-aussimajoré chez les donneurs (HR 11, 38 ; 95 % CI [4,37—29,43], p<0,001)[66].Cesrésultatssontconfirmésparl’étudede Muzaaleet al.qui retrouve,dans unecohorte de plus de

90 000 donneurs, un risque d’IRC terminale de 30,8/

10000comparéàunrisquede3,9/10000pourlescontrôles appariés[11].Cesur-risquesignificatifdoitcependantêtre modéréparlefaiblerisqueenvaleurabsoluededévelop- pementdel’insuffisancerénale chroniqueterminaleaprès donduvivant.

Les résultats de ces deux études ont entraîné de nombreuxcommentairesdanslalittératureetincitélespro- fessionnels à modifier l’information apporté au potentiel donneur[67—71]. Uneffort particulier doitêtre fait pour estimerleDFGprévisiblepost-don,àcourttermemaisaussi àlong terme. L’utilisation descores oumême desimples outilscommelamesuretomodensitométriquedesreinsdu donneurpermettentd’estimerlafonctionrénaleimmédiate post-don[72,73].

Le don croisé ; un exemple de stratégie d’élargissement du cercle des donneurs Objectifs du don croisé

Danscettedémarched’augmentationdudonduvivantsou- tenueparle plangreffe,laloidebioéthiquede2011,en plus d’élargirle cercle des donneurs,a proposé des nou- vellesmesuresdont l’autorisationdudoncroiséd’organes (laloino2011-814relativeàlabioéthiquedu7juillet2011et décret no 2012-1035 du 7 septembre 2012 relatif au pré- lèvement et à la greffe d’organes). Il est intéressant de noter queles estimations del’agence de biomédecineen 2013donnaientlechiffrede50à100transplantationssup- plémentairesannuellespermisesparceprogrammelorsqu’il sera à terme. Tout en reconnaissant la modestie de cet apport dans la lutte contre la pénurie d’organes, il faut reconnaîtrequecechiffrereprésenteautantquel’ensemble duprogrammededonneursdécédésd’arrêtcardiaquesnon contrôlésetquelamultiplicationdetelsprogrammesinno- vantsnepeutêtrequ’encouragéefaceàlapénurie.

Ainsi, leprogrammededon croiséviseà augmenterla proportiondedonneursvivants(versusdonneursdécédés), d’augmenter en valeur absolue le nombre de transplants rénauxdisponibles,maisaussiàdiminuerletempsd’attente pourlespatientshyper-immunisés[74—77].

Dans les pays où le coût et la complexité des trans- plantations ABO incompatibles ou avec DSA+ (anticorps anti-donneur)sont unfreinau développementdudonneur vivant,le doncroisé peut aussi représenterune stratégie

«médicalement»plussimple, avecdemeilleursrésultats ensurvieetmoinsdecomplicationsinfectieuses[76].

Defac¸onanecdotique,ilaétémontrédanslespaysparti- culièrementtouchésparlecommerceillégald’organes,que lapossibilitédedoncroiséétaitaussi unmoyendelutter contreletrafic[78].

Principe et attribution

Leprincipe dudon croiséest depermettre àdeux paires

«donneurvivant —receveur» quiprésentent uneincom- patibilité de pouvoir échanger les reins donnés lorsque le receveur du couple 1 est compatible avec le donneur du couple 2 et vice versa (Fig. 1) [75]. Comme nous le verrons plus loin, la notion d’incompatibilité n’est pas

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Figure1. Représentationschématiqueduprincipededoncroisé.

SelonDelmonicoetal.[75].

précisémentdéfinie parle cadreréglementairelaissant le champ d’application assez ouvert puisque les différentes incompatibilités immunologiques, mais aussi anatomiques peuventfairel’objetd’uneéligibilitépourledoncroisé.

Les couples éligibles sont inscrits dans un registre du don croisé et, pendant les quelques jours où le cycle d’appariement est lancé, les couples sont transitoire- ment placés en contre-indication pour un rein issu d’un donneur décédé. En effet, tous les trimestres ou quadri- mestres (selon le nombre d’inscrits) est réalisé un cycle d’appariement, utilisant l’algorithme mis au point par l’agence dela biomédecine(basé sur lesexpériences des autrespays,maissurtoutsurladémographiefranc¸aise,les caractéristiquesdespopulationsdedonneurs,lareprésen- tationdessous-groupesimmunologiquesdanslapopulation) et le retrait d’un groupe (suite à une transplantation d’un reinissu d’un donneur décédé)paralyserait le cycle d’appariement.

Ilestimportantdenoterquel’algorithmed’appariement a été testé par de nombreuses simulations permettant de rechercher le meilleur compromis entrela qualité de l’appariement (nombre de mismatch, différence d’âge, etc.) et la quantité de paires pouvant être appariées à chaquecycle.

Cecycled’appariementprendquelquesjourspourêtre réalisé enraison du contrôle humain et médicaldes pos- sibilités proposées par le programme ; il est idéalement nécessaire d’inscrire au minimum 50 paires donneur- receveurpourprocéderàuncycleoptimal.

Àl’issuedececycle,unecombinaisondegreffescompa- tiblesestretenue;lespairesnonretenueslorsducyclesont prévuespourunprochaincyclesiellessouhaitentpoursuivre ladémarcheetbienévidemment,lesreceveurssontdenou- veaurenduséligiblesauprogrammedonneurdécédés’ilsle souhaitentjusqu’auprochaincycle.

Cadre réglementaire et débats

Le mêmelien quelorsdu don«classique»,validépar le Tribunaldegrandeinstance,doitexister entrele donneur et le receveur ; la démarche médicale et administrative d’inscription est d’ailleurs assez similaire, tant du point devuedescontre-indicationsmédicalesquedesexigences éthiques(passagedevantlecomitédonneur-vivant,etc.).

Lescouplesdonneur-receveursontalorsinscritsdansun programmed’échangeavecdeslimiteséthiquesspécifiques àlaFrancepuisquelesdonneursaltruistessontinterditset parconséquent,seulslesdoubletssontautorisés(interdic- tion detriplets ou dechaînes ou «domino »comme aux États-Unis).Ainsi,leregistredespairesestprévupourins- crireundonneurpourunreceveuretnonplusieursdonneurs pourunreceveur.

Lorsquelespairessontdésignées,lesdossierssontsou- misauxéquipesconcernéesetl’organisationimposequela réalisationdesinterventionsdoitavoirlieudefac¸onsimul- tanée sur les deuxdonneurs, puis sur lesdeux receveurs (principalementpouréviterunerétractationvolontaireou involontairededernièreminute).

Le règlement prévoit tout de même une stratégie alternativeencasd’échecd’unprélèvementoud’unetrans- plantation;ainsi,pourundonneur,sisonprélèvementabien lieuavecl’impossibilitéd’êtregreffécommeprévuaurece- veurcroisé,legreffonrénalestmutualiséauplannational surleprogrammedonneurdécédé.Enrevanche,si«son» receveurnepeutêtregreffé,lapossibilitéderecoursàune prioriténationaleestprévue.

Unpoint importantconcerne levoyage dutransplant; eneffet,lavolontédel’agencedelabiomédecineétaitde privilégier le confort des patients, en particulier du don- neur, etdoncdenepas luiimposerde déplacementdans unautrecentrequesonreceveur.Ainsi,ilaétédécidéque ceseraitletransplantqui«voyagerait»unefois prélevé, versle centre réalisantla transplantation sur le receveur croisé.L’autreargumentenfaveurdecettestratégieétait defaciliterlagarantiedel’anonymat;onpeut effective- mentredouterquesiledonneurd’uncoupleetlereceveur de l’autre couple sont présents au même moment sur le même site,la rupture d’anonymat puisseêtre involontai- rementcauséeparunemaladresseouuneindiscrétiondes équipesmédicalesouparamédicales.

Cettedécision n’apas étéprise àl’unanimité, compte tenudel’oppositiondesurologuesprésentslorsduconseil médicalscientifique (plaidantpour unvoyagedu donneur verslecentredeprélèvementavecunetransplantationréa- liséesurle mêmesitesanstransfertdutransplant). Leurs arguments, rapportés en partie dans le procès-verbal du conseilmédicalscientifiquedatédu09octobre2012étaient [79]:

• réduction du délai avant transplantation puisque le voyage du transplant augmente forcément la durée d’ischémiefroide;

• contraintes organisationnelles puisque la réalisation d’unetransplantationenfind’après-midipeutposerpro- blèmedansdenombreuxblocsopératoiresdeshôpitaux publicsenraisondelamutualisationdesblocsd’urgence;

• contrainteschirurgicalespuisque quelquesdétails tech- niques du prélèvement (longueur des vaisseaux, de

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l’uretère,etc.)sontcorrélésàlatechniquechirurgicale opérateur-dépendant de la transplantation et qu’il est plus confortable, etprobablement plus sûrpour le chi- rurgien,deréaliserlui-même(ouaumoinsparlamême équipe)leprélèvementetlatransplantationd’unmême transplant;

• absencede bénéficepour ledonneur puisquede toutes fac¸ons, il est déjà très fréquent lors du don « clas- sique » que le donneur voyage d’une autre ville,voire del’étrangerpourdonneràsonreceveur;

• absence de bénéfice sur l’anonymat puisque de toutes fac¸ons la structure optimale d’un service hospitalier devrait permettre à tout patient de bénéficier d’une garantied’anonymatparrapportauxautrespatientsdu mêmeservice.

Notonsquelesprogrammeshollandais(ouverten2004) etcanadien(ouvert en2009)dedon croiséontintégré la décisiondenepasfairevoyagerletransplant(c’estledon- neurquiserendsurlesitedelatransplantationdureceveur quiluiaétéattribué).

Limites et perspectives du don croisé

Alorsque10pairesétaientinscritesen2013àl’ouverture,le développementduprogrammeapermisdelancerplusieurs cyclesd’appariementdepuismaissansjamaisatteindrele seuil des 50 paires inscrites par cycle — seuil nécessaire pour uneefficience ducycle.Enmoyenne, 17à 22paires étaientinscritessurles«run»de2014et2015.Parexemple, le 5 novembre 2014, le cycle d’appariement réalisé sur 17pairesapermislaréalisationd’uneseuleprocédure(donc deuxtransplantations).

La faibleinscription s’expliquepeut-être parune réti- cence malheureuse des équipes quant aux contraintes organisationnelles, mais aussi par une réalité immunolo- gique : le développement de la greffe ABO incompatible (grâceauxtechniquesd’immunoadsorptionplusspécifiques que les échanges plasmatiques) [80—83], et à moindre degré,les stratégiesdedésensibilisationHLA[84—87] ont permisdeminimisercette«incompatibilité»entredonneur etreceveuretdelalimiterauxcasdecrossmatchpositifs, c’est-à-direauxreceveurshyper-immunisés.

Cette conséquence a un effet pervers puisque de facto, l’existence de protocoles de transplantation ABO- incompatible dans les centres qui font du don croisé, détournelespatientsABOincompatiblesnonimmunisésvers dudonclassique...etaugmentele nombredepaires ABO incompatiblesavecreceveurshyperimmunisésinscritssurle programmededoncroisé;l’appariementdevientalorstrès compliquéàréaliser,surtout avecunevingtainedepaires inscrites,puisque lescombinaisonssontlimitées etque la chancedetrouverundonneuravecuncross-matchvirtuel négatifdevientfaible.

Lastratégiedudoncroiséprésenteaussil’inconvénient denepasaméliorerl’accèsàlagreffepourlesreceveursO immunisés;eneffet,lesdonneursdegroupeOnesontins- crits que parceque leurs receveurs sont hyperimmunisés.

Ainsi,lesreceveursquisontdegroupeOn’ontquepeude donneurspossibles...[74,77].

Par ailleurs, lalimite éthique deneréaliser exclusive- ment que des paires (etnon des triplets ouquadruplets,

nenécessitant pasnonplusdedonneuraltruiste)estéga- lementunfreinmathématiqueaunombredecombinaisons possibles[77].

Ainsi, sans même évoquer la possibilité de donneur altruistepour laquelle lasociété franc¸aiseest assez réti- cente[87],plusieurspistespourraientànosyeuxpermettre d’augmenter le nombre de patients inscrits dans le pro- grammefranc¸aisde doncroiséetd’augmenter lenombre depairesappariées[77]:

• autoriserlesstratégiesdites«unbalanced»:l’inscription surleprogrammededoncroisédecouplesABOcompati- blesmaispasABOidentiquespermettrait,parexemple, d’augmenter les possibilités de transplantation pour les receveurs O. Il s’agirait alors d’inscrire des paires

«altruistes»carcespairespourraientêtreinscritesdans unprogrammede donclassique aulieu d’êtreinscrites surleprogrammededoncroiséetdesouffrirdequelques moissupplémentairesderetard;

• autoriser l’inscription de couples ABO et HLAcompati- blesmaisavecunmismatchimportant,ouunedifférence d’âge significative, ce qui permettrait d’augmenter le nombredepairesinscritesetpourcespaires-là,deper- mettreundonvivantavecunmeilleur«matching»que dansundon«classique»;

• autoriser la réalisation, dans le cadre du don croisé, de transplantations ABO incompatibles (avec des taux d’anticorps faibles à modérés) permettant ainsi d’augmenter significativement le nombre de combinaisonspossibles[88].

Techniques chirurgicales du prélèvement rénal chez le donneur vivant

Prélèvement rénal par lombotomie

La néphrectomie par voie ouverte est la technique his- torique du prélèvement rénal donneur vivant décrite par Murrayetal.en1954[89,90].Cettetechniqueaétérégu- lièrementutilisée jusquedans le milieu des années1990.

Ledéveloppementdela néphrectomielaparoscopiquepar Claymanetal.[91]etsonapplicationaudonneurvivanten 1995parRatneretal.aentraînéunediminutionprogressive desonutilisation[92].

Latechniqueparvoieouvertelaplusutiliséepourledon duvivantestunetechniqueparincisiondelombotomieavec abord extrapéritonéalde laloge rénale. L’installation est uneinstallationclassiquedelombotomie,patientendécu- bituslatéralducôtéopposéaureinàprélever,avecunbillot sous le bassin permettant une légère cassure ayant pour objectifde«tendre»lafosselombaire(Fig.2).L’incision peutsefaireauniveaudela11eou12e côteselonlahau- teurdureinàprélever.Leplandedissectionestceluidela néphrectomiesimple.AprèsouverturedufasciadeGerota, etdissectiondelagraissepérirénale,onprendcontactavec le parenchyme rénal qui sera complètement libéré de la graissepérirénale.Cettemanœuvrepermetainsiunemobi- lisation durein qui facilite la dissection du hile rénalen évitantcependanttoutetractionexcessivesurlesvaisseaux rénaux. Le hile est alors complètement libéré et le rein pédiculisé sur ses vaisseaux qui seront disséqués sur une

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Figure2. Installationclassiquepourchirurgierénalegaucheparlombotomie.A.11ecôte.B.12ecôte.C.Pôleinférieurdureingauche.

longueuroptimum pour envisager la transplantation. Une bonneconnaissanceducoupledonneur-receveurestimpor- tantecarellepeutguiderlechirurgienlorsduprélèvement, notammentsurlalongueurdevaisseauxnécessaireselonles caractéristiquesdureceveur.Encasd’artèresmultiples,il estnécessairederespecter etdedisséquerlatotalitédes artèresàdestinéerénalequinécessiterontuneéventuelle reconstructionsurtablestérileavantlatransplantation.Une fois lesvaisseauxrénaux libérés,ils serontligaturés, puis sectionnés.Legreffonalorsextraitserarincéàl’aided’un liquidedeconservationavantpréparationpourlatransplan- tationrénale.

Actuellement,lanéphrectomiedonneurvivantparvoie ouverteestenpassededisparaître.Ainsien2014,88,8%des néphrectomiesdonneurvivantontétéréaliséesparlaparo- scopieetseules11,2%ayantétéréaliséeparvoieouverte [50]alorsqu’ellesreprésentaientencore60%desinterven- tionsen2004.

Lesrésultatsetlamorbiditédelanéphrectomiedonneur vivantparvoieouverteontlargementétédécrits,publiéset comparésàceuxdelanéphrectomielaparoscopiqueetont faitl’objetd’uneméta-analysedelaCochraneDatabaseen 2011.Lesconclusionsdecetteméta-analyseétaientlessui- vantes:lanéphrectomiedonneurvivantlaparoscopiqueest associéeàunemoindredouleurquelachirurgieouverte.Le nombredecomplicationsetlasurvenued’évènementspost- opératoiresnécessitantunepriseenchargesontidentiques.

Lestransplantsobtenusparlaparoscopiesontexposésàun tempsd’ischémiechaudepluslongsansconséquencesrap- portéesàcourtterme[56].Silafréquencedescomplications estidentique,ilaétérapportédestypesdecomplications différentesavecpourlavoieouvertedesrisquesdethrom- bophlébite,emboliepulmonaireetcomplicationspariétale [93]. Récemment, il a été montré dans une série mono- centrique de plus de 4000 donneurs que la voie ouverte étaitassociéeàuntauxderéhospitalisationmoindreàcourt etmoyentermecomparéaux techniqueslaparoscopiques.

Cependant,lasurvieà1ansdestransplantsrénauxobtenus

parnéphrectomieparvoie ouverte étaitsignificativement moindre[94].

Prélèvement rénal par laparoscopie

Lespremierscasontétérapportésànotreconnaissanceen 1994 et 1996 par des équipes coréenne [95] etjaponaise [96]parrétropérinéoscopieouparcœlioscopie(transpéri- tonéale)danslecadredecasereport.

Danslepapierjaponais,deuxpatientsavaientétéopé- résetl’extractionétaitfaiteparuneincisionsus-ombilicale réaliséeendébutdeprocédureetmaintenueparunécar- teursuspendu(Fig.3).Lesdétailssurlatechnique,hormis la miseen placedes trois trocarts, sont difficiles à obte- nirpuisquel’articleestdisponibleentexteintégralmaisen languejaponaise.

En 1997, l’équipe du John Hopkins publia une série [97]comparantleursdix premiersdonneursopérésconsé- cutivement par voie cœlioscopique (DV cœlio) avec dix lombotomies et montrait un bénéfice pour le patient en termesdeduréed’hospitalisationetdeconvalescence.En dépit de l’effet période (les lombotomies au John Hop- kins étaientpratiquéesjusqu’enjanvier 1995,puislavoie cœlioscopiques’estimposéeenfévrier1995),cesrésultats confirmaientlesrésultatspubliésàl’époquedespremières néphrectomies cœlioscopiques dans d’autres indications (cancer,reinsdétruits).Lemêmeauteurrapporta,en2001, les cinq premières années d’expérience [98] etconcluait quelavoiecœlioscopiqueallaitdevenirlestandardpourle donderein,soulignantladiffusionrapidedelatechnique puisqu’elle étaitalors déjàréaliséedans unecentaine de centresrépartissurlescinqcontinents.

Pourtant, la particularité de l’indication du donneur vivant(patientsain)etlavolontédeminimiserlesrisques opératoires,neplaidaientpasinitialementpourunedémo- cratisationdelatechnique:en2007,uneméta-analyse[99]

concluaitqueladiffusiondelacœlioscopiedanscetteindi- cations’étaitaccompagnéed’unerecrudescencedunombre

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Figure3. Unedespremièresnéphrectomiededonneurvivantpubliéeen1996paruneéquipejaponaiseavecunabordd’extraction sus-ombilicalmaintenuparunécarteurautostatique[96].

dedécèsparmilesdonneursetdutauxdenon-fonctionpri- maire,soulignantainsilanécessitéd’établirunregistreet probablementdelimiterleDVcœlioàdescentresexperts en chirurgie de la transplantation et en chirurgie mini- invasive.

Cesur-risquedecomplicationsaétéparlasuiteécarté; unerevuesystématique[100],puisunerevuedelaCochrane data-base[56]ayantmontrél’absencededifférencesentre voieouverteetvoiecœlioscopiquequantaurisqued’échec ouàl’incidencedescomplications.Sicesétudesn’ontpas permisdedémontrerladiminutiondutauxdecomplications (onseseraitattenduàunedémonstrationdeladiminution descomplicationspariétales),ilapparaîtcependantquela voie cœlioscopique était associée à une diminution de la douleur, de la durée d’hospitalisation etune reprise plus précoced’activité[56,100].Cesbénéficessonttrèsimpor- tantspourunepopulationdedonneurs«sains»,[56,101]et auraientmêmepermis defavoriser uneaugmentationdes donsderein[102].Ainsi,leprélèvementrénalparcœliosco- pieestaujourd’huilatechniquederéférencerecommandée [103—105].

Ilexistedenombreusesvariantesquantàladisposition destrocarts,ouàl’incisiond’extraction.

Lestrocartsutiliséssontgénéralementaunombrede4, en incluant le trocart vidéo, et l’utilisation d’une instru- mentation moderne permetde n’utiliserque des trocarts de 5mm en dehors decelui permettant la mise enplace desclips,etl’introductiondel’endobag.L’interventionpeut aussi êtreréaliséepar undispositifmono-trocart permet- tantuneLESS(laparo-endoscopicsinglesitesurgery)avec l’objectifdediminuerlesdouleurspostopératoires,sansque celanesoitdémontrédemanièrerobuste,etauprixd’une exigencetechniqueconsidérable[106].

Le dispositifmono-trocartpeut aussi êtreutilisé àtra- versun orificedit «naturel» commel’ombilic (quin’est cependantpasréellementunorifice)[107]oulevagin(qui

nécessitebienévidemmentunecolpotomiedoncunabord incisionnel)[108,109].

L’incision d’extraction peut se faire par une petite incisioninguinale, par un pfannenstiel, une incisionpéri- ombilicale,uneincisionsusousous-ombilicaleouunevoie transvaginale.Leprinciperestederéaliseroudepréparer l’incisionendébutdeprocéduredefac¸onàpouvoirprocé- deràl’extractiondureinleplusrapidementpossible,pour minimiserl’ischémiechaude. Ainsi,certaineséquipes réa- lisentuneincisionimmédiatementreferméeparunesuture en bourse le temps de l’intervention ; d’autres mettent d’emblée en place un dispositif d’étanchéité comme le GelPort®,initialementdestiné à lachirurgie«hand assis- ted » mais parfaitement adapté à la mise en place de trocartsopérateurs.

L’extraction par voie vaginale, initialement rapportée à Baltimore [110], est également une variante permet- tantde limiterles douleurs postopératoires (au prix d’un risquefaiblededyspareunie)sansavoirréellementdémon- trédebénéfice cosmétiquepuisquel’incision d’extraction estrarementcelleconcernéeparuneéventuelleinsatisfac- tiondespatientes (contrairement aux cicatricesde redon oudetrocartde5mm)[111].

L’installationdeladonneusenécessiteunepetiteadap- tationpourcombinerl’installationlatéraledenéphrectomie avecunepositiongynécologiquepermettantunabordvagi- nal dans le même temps : ainsi, le bassinde la patiente est laissé dans une position dedécubitus latéral moindre et les membres inférieurs écartés comme indiqué sur la Fig.4.

Certains auteurs introduisent directement un endobag dans le cul-de-sac postérieur ; d’autres préfèrent réali- ser une colpotomie transverse du cul-de-sac postérieur, souscontrôle dela vue(Fig.5). Cettedeuxièmeoption a notre préférence puisqu’elle permet unmeilleur contrôle del’expositionvaginaleetfacilitelarapiditéd’extraction.

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Figure4. Installationspécifiqued’unedonneusepourunenéphrectomiegaucheavecextractionvaginale.

Figure5. Préparation del’extractiontransvaginale.Lecolest tractéenavantparuneoudeuxpincesdePozzietl’incisiontrans- verseest réalisée dans lecul desac postérieur,éventuellement facilitéeparuneinjectiondexylocaïneadrénalinéepourdiminuer lesaignementetdécollerlepéritoinequel’onnesouhaitepasouvrir immédiatement.DespointsenXdeVicrylpeuventêtrelaissésaux extrémitésafind’éviterunedéchirure noncontrôlée delaparoi vaginalepuisquel’extractiondureinnécessiteraungestevigoureux dediscisiondigitaledelacolpotomie.

Dans notre expérience, afin de ne pas avoir de fuites de gazparlevaginpendantl’intervention,nouspréféronsréa- liser la colpotomie une fois que l’intégralité du rein est libérée,c’est-à-direjuste avant laclampage dupédicule.

Nousrecommandonsdeneréaliserlavoievaginalequechez desfemmesayantaccouchéparvoiebasse,sansvolumineux fibromeutérinniantécédentdechirurgielourdepelvienne, etavec,àl’examenclinique,uncolmobileetunvestibule laissant passer trois travers de doigts.Les autres auteurs évoquentégalementdansladiscussiondeleurspublications, la nécessité d’avoir une paroivaginale facilement expan- sible,sansdonnerplusdedétails[109,112].

Puis,leprélèvementrénalestréaliséselonlatechnique laparoscopiquehabituelle[113]aveclestempsopératoires classiques:

• àgauche:

◦ libérationdufasciadeToldtetducolongaucheleplus baspossiblepourfaciliterl’expositionetladissection del’uretèreendistalité,

◦ décrochage de l’angle gauche en libérant le bord externedelaratepourréaliser undécollement splé- nopancréatique monoblocexposantla surrénale etle pôlesupérieurdurein,

◦ dissectionetcontrôledelaveinesurlafaceantérieure del’aorteenavaldelaveinesurrénalienne,

◦ contrôle de l’artère parfois facilité par la dissection dupôleinférieurdureinpermettantdelesouleveret d’aborderplusfacilementl’artèreenprofondeur,

◦ hémostaseetsectiondes veinesgonadiquesetsurré- naliennes,

◦ dissection minutieuse du plan inter-rénosurrénalien pouréviterlespetitssaignementsveineuxetprendre gardeànepasléser desbranchesvasculairesrénales danslehilelorsquelasurrénaleestlittéralementcou- chéesurlerein,

◦ dissectiondelafacepostérieuredureinetcontrôlede laveineazygolombaire,

◦ libérationdel’ensembledureinenveillantànelaisser aucunestructureautourdesvaisseauxet,enparticu- lier,lespetitsfeuilletsnerveuxetlymphatiquesentre l’artèreetlaveine,

◦ clampageetsectiondupédicule(cf.plusloin);

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Figure6. Installationdupatientpourunprélèvementdureingaucheavecassistancerobotique.Lapositionà45dupatientpermetde passerrapidementàunevoiesous-costaleencasdeconversionrapide.

• àdroite:

◦ décollement del’angle droit et parfois d’adhérences péri-hépatiquesouépiploovésiculaires,

◦ mêmesprincipesdedissectionqu’àgauche,

◦ abord de l’artère par le bord droit de la veine cave(l’installationendécubituslatéralpermetd’aller contrôle l’artèreenarrière delaveine cave)ouplus rarement, lorsqu’il existe une bifurcation très pré- cocepost-ostiale,uncontrôledel’artèredansl’espace interaortico-cave.

Prélèvement rénal par laparoscopie robot-assistée

Avecledéveloppementrapidedelachirurgierobotiqueen urologieetlamaîtrisedelachirurgierénalecomplexe[114], plusieurs équipes ont réalisé des néphrectomies donneur vivantavecassistancerobotique[115,116].Lespremierscas rapportésontmontrélafaisabilité,lareproductibilitéetla sécurité de la technique pour le donneur comme pour le greffon.

Installation:l’installationclassiquedelanéphrectomie dudonneurvivantestidentiqueàcelled’unenéphrectomie laparoscopiquestandardparvoietranspéritonéale.Pourune néphrectomiegauche,lepatientestpositionnéendécubitus latéraldroit.L’installationdoitveilleraupointd’appuietla stabilitédupatientsurlatabledoitêtreméticuleusement vérifiée,toutmouvementdupatientaprèsl’installationdu robot étant particulièrement à risque [115,117,118]. Une

varianteaétédécrite[114,119].Lepatientestendécubi- tusdorsal,lecôtéàopérersurélevéà45pardesappuisen gel.Latableestalorsmiseenroulisversl’avant.Cetteposi- tionapouravantagelasimplicitéd’installationetunretour rapideàunepositionprochedudécubitusdorsalencasde conversionurgentedenécessité(Fig.6).L’installationpour unenéphrectomiedroiteestidentiqueenmiroir.

Encasd’extraction parvoie vaginale,l’installationest prochedecelledécriteprécédemment.[108,112].

Leplacementdestrocartsesttrèsdépendantdeséquipes etde la technique utilisée et notamment de l’utilisation d’uneassistancemanuelle.Danscecas,l’installationesten décubituslatéraleetuneincisionsous-ombilicalede6à7cm seraréalisée. Cette incisionpeut être remplacéeparune incisiontransversaledePfannenstielquial’avantaged’être moins délabrante et esthétiquement moins visible [120].

Aprèsinsertiondelamaindel’assistant,untrocartde12mm pourune caméra30 est positionné surla ligne médiane, quelquescentimètres au-dessus del’ombilic. Deuxautres trocartsrobotiquesde8mmsontplacéssurlalignemédio- claviculairepermettantainsiunetriangulationsatisfaisante [121].Underniertrocartde12mmpourl’aideopératoireest positionnéenfosseiliaquegauchepermettantlepassagede l’aspirationetdespincesàclips[115,118,120].

En cas de néphrectomie donneur vivant laparosco- piquerobot-assistée,sansassistancemanuelle,laposition des incisions et des trocarts est légèrement différente [114,115].Un trocartde12mmpourunecaméra0 etles deuxtrocartsrobot de8mm sont positionnéssur la ligne

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