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Les travaux du Conseil de l'europe dans le domaine. du droit de la médecine

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Texte intégral

(1)

f\ ~./(/D Ycl ·

1 02e ANNEE - N° 5259 2 JUILLET 19 8 3

.~--'

IRIBIJN&lJX

HEBDOMADAIRE JUDICIAIRE Edmond Picard

1881-1899 Léon Hennebicq

1900-1940

Charles Van }{eepinghen 1944-1966

Jean Dai 1966-1981

Les travaux du Conseil de l'Europe dans le domaine. du droit de la médecine

Adoption d'une recommandation sur la protection juridique des personnes atteintes de troubles mentaux

et placées comme patients involontaires

Dans le Joùrnal des Tribunaux du 5

· janvier 1980, l'un des signataires du présent texte a publié un article ( I) relatif

à

une résolution adoptée par l'organe du Conseil de l'Europe, le comité des ministres,

à

la suite des travaux d'un comité d'experts gouver- nementaux, de médecins et de juristes, placé sous sa présidence. Il s'agissait de la résolution n° 78 (29) sur l'harmoni- sation du droit des Etats membres relatif aux prélèvements, greffes et transplantations de substances d'ori- gine humaine ( 2). L'article traitait également d'un projet de résolution, établi par le même comité, relatif

à

l'insémination artificielle des êtres hu- mains; il reste en suspens, certains Etats

y

étant opposés pour diffé- rentes raisons (anticonstitutionnalité, éthique ... ). Le comité d'experts a aussi rédigé un troisième texte approuvé par le comité des ministres; il traite du transport des substances d'origine hu- maine et n'appelle pas ici de commen- taires.

Il en va autrement du quatrième texte issu des travaux de ce même comité qui vient d'être approuvé par le comité des· ministres le

2 I

février 1983; lors de son élaboration, l'autre signataire du présent article faisait partie de la délégation belge.

Voici les règles de la recommanda- tion n° R(83)2 :

Art. I e r . -r0 Les présentes règles con- cernent le placement involontaire des person- ( r) Suzanne Oschinsky, J. T., 5 jan v. r 980, p. I .

( 2)

La loi belge mettant en œuvre cette résolution n'est pas encore intervenue.

nes atteintes de troubles mentaux. Le place- ment décidé· en application d'une procédure pénale n'est pas visé par les présentes règles;

cependant, les règles 5, 9, ro et r r seront applicables à ce placement.

Le placement involontaire (ci-après dé- nommé (( placement >>) consiste à faire admet- tre et retenir, aux fins de traitement, une personne atteinte de troubles mentaux (ci- après dénommée (( le patient >>) dans un hôpital ou établissement de soins ou autre endroit approprié (ci-après dénommé (( établisse- ment») sans que ce patient en ait fait lui-même la demande.

3° L'admission d'un patient dans un éta- blissement aux fins de traitement n'entre pas dans le champ d'application des présentes règles si c'est le patient lui-même qui l'a demandée. Toutefois, ces règles s'appliquent aux cas dans lesquels un patient admis initiale- ment à sa propre demande doit être retenu dans l'établissement en dépit de sa volonté de le quitter.

Art. 2 . -Les psychiatres et les autres médecins doivent se conformer aux données de la science médicale lorsqu'ils ont à déterminer si une personne est atteinte d'un trouble mental nécessitant le placement. Les difficultés, d'adaptation aux valeurs morales, sociales, politiques ou autres, ne doivent pas être considérées, en elles-mêmes, comme un trouble mental.

Art. 3·-A défaut de tout autre moyen d'administrer le traitement approprié:

a) un patient ne peut faire l'objet d'un placement dans un établissement que si, en raison de ses troubles mentaux, il repré- sente un grave danger pour sa personne ou celle d'autrui;

b) les Etats peuvent, toutefois, prévoir que le patient pourra faire l'objet d'un placement lorsque, en raison de la gravité de ses troubles mentaux, l'absence de placement détériorerait l'état du patient ou ne per- mettrait pas de lui apporter le traitement approprié . .

Art. 4· - r0 La décision de placement doit être prise par un organe judiciaire ou toute autre autorité appropriée désignée par la loi.

En cas d'urgence, un patient peut être admis et

EDITEuRs: K.U. Leuven

MAISON FERD. LARCIE S.A.

R H A N

Rue des Minimes, 39

TienseShf{at 41

1000 BRUXELLES ._

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retenu sur le champ dans un établissement sur décision d'un médecin qui doit alors informer immédiatement l'autorité judiciaire ou l'autre autorité ·compétente qui rendra sa décision. La décision de l'autorité judiciaire ou autre visée dans le présent paragraphe doit être prise sur avis médical et selon une procédure simple et rapide.

2 ° Lorsque la décision de placement est' prise par une personne ou organe qui n'est pas judiciaire, cet organe ou cette personne doivent être différents de ceux ayant demandé ou recommandé le placement. Le patient doit être immédiatement informé de ses droits et doit avoir le droit d'introduire un recours devant un tribunal qui prendra sa décision selon une procédure simple et rapide. En outre, une personne chargée d'assister le patient à décider s'il convient d'exercer le droit de recours sera désignée par une autorité appropriée, sans préjudice du droit de recours de toute autre personne intéressée.

3

°

Lorsque la décision est prise par un organe judiciaire ou lorsqu'un recours est formulé devant une autorité judiciaire contre la décision de placement d'un organe administra- tif, le patient doit être informé de ses droits et doit avoir l'occasion effective d'être entendu par un juge personnellement sauf si le juge, eu égard à l'état de santé du patient, décide de l'entendre moyennant une certaine forme de représentation. Le patient doit être informé de ses droits de recours contre la décision de placement ou celle qui la confirme et, s'il le demande ou si le juge l'estime opportun, bénéficier de l'assistance d'un conseil ou d'une autre personne.

4

°

Les décisions judiciaires visées au § 3 doivent pouvoir faire l'objet d'un recours.

Art. 5 · -Tout patient faisant l'objet d'un placement a le droit d'être traité dans les mêmes conditions déontologiques et scienti- fiques que tout autre malade et dans des conditions matérielles comparables. Il a no- tamment le droit de recevoir un traitement et des soins appropriés.

Un traitement qui n'est pas encore généralement reconnu par la science médicale ou qui présente un risque sérieux d'entraîner des dommages irréversibles au cerveau ou de détériorer la personnalité du patient, ne pourra être administré que si le médecin l'estime indispensable et si le patient, dûment informé, y consent expressément. Lorsque celui-ci n'est pas capable de comprendre la portée du traitement, le médecin doit soumettre la

questi~n à une autorité indépendante appro- priée désignée par la loi qui entendra le représentant légal du patient, s'il existe.

3

°

Les essais cliniques de produits ou techniques médicales n'ayant pas un but thérapeutique psychiatrique sur des personnes atteintes de troubles mentaux et faisant l'objet d'une mesure de placement, doivent être interdits. Les essais cliniques ayant un but thérapeutique psychiatrique sont régis par les disposiûons juridiques nationales.

(2)

Art. 6 . -Les restrictions imposées à la liberté individuelle du patient doivent être limitées à celles nécessitées par son état de santé et l'efficacité du traitement; cependant, les droits du patient :

a) de communiquer avec toute autorité ap- propriée, la personne visée à l'article 4 et un avocat; et

b) d'envoyer toute lettre sans que celle-ci ait été ouverte;

ne peuvent être soumis à des restrictions.

Art. 1 · -Un patient ne peut être transféré d'un établissement à un autre que compte tenu de son intérêt thérapeutique et, dans la mesure qu possible, de ses désirs.

~ Art. 8 . - r0 Le placement doit être d'une durée limitée, ou, tout au moins, la nécessité du placement doit être réexaminée périodique- ment. Le patient peut, à des intervalles raisonnables, demander à une autorité judi- ciaire de se prononcer sur la nécessité du placement. L'article 4, § 3, sera alors applica- ble.

Le placement peut prendre fin à tout moment par une décision prise :

a) par un médecin; ou b) par l'autorité compétente;

soit de sa propre initiative, soit sur demande du patient ou de toute autre personne intéressée.

3° La fin du placement n'implique pas nécessairement la fin du traitement qui pourra continuer sur une base volontaire.

Art. J · -r0 Le placement, en lui seul, ne peut constituer de plein droit une cause de restriction de la capacité juridique du patient.

Toutefois, l'autorité décidant 1~ place- ment doit veiller à ce qu'au besoin les mesures appropriées soient prises en vue de sauvegarder les intérêts matériels du patient.

Art. I O . -Dans toutes circonstances, la dignité du patient doit être respectée et des mesures appropriées doivent être prises pour protéger sa santé.

Art. I I . -Les présentes règles ne limitent pas la faculté de chaque Etat d'adopter des dispositions accordant une protection juridique plus étendue aux personnes atteintes de trou- bles mentaux et faisant l'objet d'un placement.

* * *

Il convient de rappeler que cette recommandation (à l'état de projet) est longuement commentée dans un excel- lent article récent de B. Maingain etC.

Remon ( 3). Il nous semble utile de la situer dans son contexte, puis d'en commenter chaque artide et d'en tirer des conclusions.

Le comité d'experts qui élabora la recommandation avait été chargé par le comité des ministres d'étudier la situation juridique des malades men- taux, en particulier de ceux faisant l'objet d'un placement involontaire.

On a vu que, finalement, cette seule catégorie de malades est visée par l'instrument juridique international.

Les travaux se sont déroulés sous l'autorité du comité européen de coo-

(3) J.T., 26 févr. 1983, p. I45·

pération juridique et les textes ont été communiqués pour avis au comité européen de santé publique.

C'est notamment à la suite de la recommandation 8r8 (1977) de l'As- semblée parlementaire (4) et des tra- vaux de la Cour européenne des droits de l'homme dans l'affaire Winterwerp (Winterwerp contre les Pays-Bas) que le comité d'experts a reçu sa mission.

L'arrêt de la Cour en cette affaire, rendu le 24 octobre 1979, contient cette considération qu'il est utile de citer :

<< •••

il faut. que l'intéressé (le malade mental placé contre son gré) ait accès à un tribunal et l'occasion d'être entendu lui-irlême ou, au besoin, moyennant une certaine forme de représentation)). Il s'agit en l'espèce d'une interprétation de l'article 5, § 4 de la Convention de sauvegarde des droits de 1 'homme ( 5 ) . Le co mi té d'experts a attaché un intérêt particu- lier à cet arrêt qui s'impose à tous les Etats membres de la Convention.

Le comité a constaté qu'une ten- dance générale à améliorer le traite- ment et la protection juridique des malades mentaux se dessine dans les Etats membres. Au début des travaux, il avait été informé d'une réforme intervenue récemment en Italie et de projets de loi ou de réformes en cours dans plusieurs autres pays, 1 'Autriche, Chypre, l'Allemagne fédérale, la Grèce, le Luxembourg, les Pays-Bas, le Royaume:... Uni, la Suède et aussi dans notre pays. Le comité était d'avis

·qu'une harmonisation sur le plan international serait indiquée afin, no- tamment, de sensibiliser les Etats membres et de les guider.

Ils' agissait essentiellement de savoir dans quel esprit et moyennant quelles précautions un malade mental peut faire l'objet de mesures particulières sans qu'ille veuille.

Beaucoup d'anciennes lois ont con- sacré une tendance à donner aux

<<

aliénés )) un statut spécial limitant leur liberté d'aller et de venir, de décider des soins qui leur conviennent et de gérer leurs biens. Ils étaient considérés comme n'ayant pas, au même degré que les autres, la capacité de discerner et d'agir en connaissance

(4) Cette Assemblée n'a qu'une compétence d'avis.

( 5) cc Toute personne privée de sa liberté par arrestation ou détention a le droit d'intro- duire un recours devant un tribunal afin qu'i~

statue à bref délai sur la légalité de sa détention et ordonne sa libération si sa détention est illégale >>.

de cause. Ils étaient supposés poten- tiellement dangereux pour autrui - sans qu'on puisse leur en tenir rigueur - e t pour eux-mêmes. Leur état, vu souvent comme anormal et plutôt statique, s'est de plus en plus situé dans 'un processus pathologique évolutif;

ceci mettait l'acc.ent sur leur souffr-ance et comportait certains espoirs de guéri- son.

Les aspects médicaux du problème ont rendu insoutenable l'hypothèse selon laquelle les malades mentaux formeraient une classe homogène né- cessitant, dans son ensemble, des dis- positions légales et sanitaires propres.

Nul n'ignore plus que toutes les nuances existent entre ceux qui sont réputés normaux et ceux qui sont perçus comme malades. Les troubles psychiques sont très variés dans leur forme, leur intensité, leur durée; ils peuvent n'altérer le discernement que dans certains domaines et dans certai- nes circonstances; leurs causes et leurs traitements sont multiples et nécessi- tent une évaluation individuelle qu'il faut souvent renouveler. On approche les patients dans leur famille, en consultation, en service extra-hospita- _ lier, en hôpital général ou spécialisé, ailleurs encore. Ils ne sont plus locali- sés' dans des asiles; même s'ils sont hospitalisés, ils circulent d'autant plus que les contacts avec le monde sont devenus un des éléments du traitement.

A l'occasion de ce mouvement, le danger que le malade mental présente pour autrui s'est avéré moindre que la crainte de la société à son égard. Quant au danger qu'il court, c'est surtout celui de tronquer plus ou moins gravement sa vie mentale, d'appauvrir ses relations avec les autres et de perdre sa liberté interne. Des progrès sensibles sont intervenus dans la connaissance du fonctionnement psychique, si bien que de nouvelles perspectives théra- peutiques s'ouvrent constamment.

S'il est devenu habituel d'envisager la question des malades mentaux sous l'angle du droit et de la psychiatrie, il vaut d'être souligné que ces deux disciplines se rencontrent ici sur un terrain psychologique, culturel et social qui leur est commun. Elles savent que la société peut être oppressive, para- doxale, génératrice de troubles psy- chiques; il peut même arriver qu, elle considère comme insensé de ne pas adhérer à l'idéologie dominante.

Bref, les réformes en cours dans de

nombreux pays européens s'inscrivent

dans un contexte très large. Elles

(3)

doivent tenir compte d'un mouvement rapide de la science et des idées. Le comité d'experts était soucieux de la liberté et de la santé des personnes. Il n'ignorait pas les progrès dans le champ de la psychopathologie, ni le malaise des médecins qui, parfois, sont amenés à intervenir sans l'assentiment éclairé des patients, .alors même qu'ils cherchent à élargir la liberté intérieure et qu'ils sont moins démunis qu' aupa- ravant devant la souffrance psychique.

Le comité était attentif aussi à l'inquié- tude des juristes et de l'opinion devant des traitements qui comportent des atteintes à certaines libertés fondamen- tales de l'individu. Il a tenté de faire le point et d'établir certaines règles dont devront tenir compte les législateurs des Etats membres si leur droit natio- nal n'y est pas déjà conforme.

1

* * *

Notre commentaire s'inspire d'ob- servations formulées par le comité d'experts et de réflexions personnelles.

L'article

Ier

définit le champ d'ap- plication des règles : le placement involontaire des personnes atteintes de troubles mentaux.

La première condition d'applica- tion, nécessaire mais pas suffisante est donc l'existence de

cc

troubles men- taux

n.

Le comité a choisi cette expres- sion plutôt que d'autres telles que folie ou aliénation, jugées inadéquates ou périmées. Il a d'abord envisagé le vocable

cc

maladies mentales )) puis l'a écarté comme risquant de ne pas couvrir certains états d'insuffisance mentale qui imposent parfois place- ment et protection mais qui sont considérés souvent comme des handi- caps plutôt que· comme des maladies.

De plus, on a voulu utiliser la termino- logie de l'Organisation mondiale de la . santé, familière au niveau internatio- nal. Toutefois, pour ne pas alourdir le texte, nous parlerons de malades men- taux ou de patients. Le comité a estimé qu'il ne convenait pas d'en donner une définition : il appartient aux malades eux-mêmes et aux médecins de se situer, en psychiatrie comme ailleurs, dans. le contexte médical général et dans le cadre du droit national.

La deuxième condition est le place- ment involontaire, c'est-à-dire non voulu par le patient; il est défini dans ses modalités : faire admettre et retenir dans un but thérapeutique ..

Les règles ne s'appliquent . donc qu'aux patients faisant l'objet d'un tel

placement. Le comité d'experts, smv1 par le comité des ministres, a estimé que la réglementation européenne de- vait se borner à la protection du malade mental retenu contre son gré dans un établissement de soins ou dans un autre endroit approprié. C'est la liberté individuelle, un des premiers droits de l'homme, qui doit être assurée par priorité et d'une façon uniforme, conformément aux obligations souscri- . tes par les Etats membres de la

Convention de sauvegarde, ce que sont tous les Etats membres du Conseil de l'Europe.

Si le traitement et la protection éventuelle du malade mental libre de ses mouvements ne sont pas visés par l'instrument international, le maintien d'un malade contre sa volonté dans un établissement.où il s'était rendu de son plein gré tombe sous l'application des règles. Le comité a donc estimé et tenté de traduire dans le texte que la volonté du patient doit être respectée dans toute la mesure du possible malgré les troubles dont il souffre.

Le comité n'a pas utilisé exclusive- ment le mot

cc

hôpital)). En effet, il a;rrive que des patients soient placés dans des cliniques ou institutions di-·

verses, voire dans leur famille ou chez des particuliers.

Bien qu'elles ne s'adressent pas dans l'ensemble au placement du nialade mental ordonné dans le cadre d'une procédure pénale, certaines de ces règles doivent néanmoins s'appliquer en l'espèce : ce sont les prescriptions concernant le traitement (art. 5 ), l'absence de restriction automatique de la capacité juridique (art. 9), le droit à la dignité (art. ro) et la possibilité d'une protection plus étendue (art.

II). .

L'article

2

apporte des précisions sur les obligations des médecins qui ont à déterminer si une personne souffre de troubles mentaux et si le placement est nécessaire. Le comité a estimé que ceci s'adressait évidemment aux psychiatres mais pouvait concerner aussi d'autres médecins, selon les circonstances et le droit national. A la lumière des articles 4 et 8, la compétence médicale dans le champ du diagnostic et de l'indication de placement s'exerce en matière d'avis indispensable lors de la décision ini- tiale, en matière d'intervention en cas d'urgence et en matière de cessation de la mesure.

Les médecins doivent se conformer à des données scientifiques reconnues qui sont un facteur d'appréciation,

dans l'état des connaissances au mo- ment du diagnostic.

Bien que la référence obligée à un état mental pathologique empêche

a

priori tout placement psychiatrique pour des raisons politiques, il a été jugé utile de rappeler que ·des opinions et comportements différents de ceux de la majorité des citoyens au sujet des valeurs morales, sociales ou politiques ne constituent pas, en eux-mêmes, un / motif de placement. Les difficultés d'adaptation à ces valeurs peuvent être prises en compte dans la mesure où elles contribuent à traduire des troubles mentaux qui, par ailleurs, s'expriment par d'autres symptômes.

L'article 3 circonscrit les causes de placement involontaire d'un malade mental.

Il est tout d'abord affirmé qu'un tel placement ne peut être effectué qu'à défaut d'un autre moyen d'administrer le traitement. L'absence de toute autre solution thérapeutique disponible et efficace est une des conditions de la mesure.

1

De plus, il faut que le patient dont la·

volonté sera contrecarrée présente un danger. Ce danger doit être lié à ses troubles mentaux (la menace émanant d'un sujet sain d'esprit n'est pas prise en considération); il doit être grave (un risque léger n'est pas déterminant) et il doit s'adresser à la personne du malade ou à celle d'autrui (un danger pour les biens ne suffit pas à justifier le placement).

Alliée à celle de traitement, la notion de danger que le malade mental peut constituer pour lui-même couvre sans doute les situations dans lesquelles la santé physique et psychique du patient est en péril. Une partie du comité voulait que l'on en restât là.

Toutefois, la majorité des experts craignait qu'on n'interprétât le danger comme s'il ne comportait que le risque de suicide et que l'accent mis sur le danger ne détournât l'attention de l'intérêt primordial du malade. Pour obtenir le consensus, l'article a été complété par une disposition permet- tant aux Etats de préciser que le placement est légitimé par une pers- pective de détérioration de l'état du patient en l'absence de traitement.

Il résulte de ce texte que le patient

doit essentiellement être traité. Le

rapport explicatif et l'article 5 souli-

gnent que ceci comporte le devoir de le

soigner et de l'assister même si une

amélioration n'est pas en vue mais que

(4)

le placement ne doit pas être utilisé dans un but exclusif d'assistance.

L'article

4

est relatif à la prise de décision de placement et souligne la collaboration nécessaire entre méde- cins, ·magistrats et autorités adminis- tratives. Il prévoit que dans tous les pays, il faut une procédure qui

a) dans l'intérêt du patient, doit être simple et rapide;

b)

c~mporte

nécessairement un droit de recours contre la décision de placement.

Toutefois, chaque Etat peut conser- ver sa procédure nationale, en l'amen- dant si besoin est, ,pour respecter les garanties prévues par l'article 4·

La décision de placement peut être prise par un juge ou par· une autorité administrative qui peut être médicale.

De toute façon, l'avis préalable d'un médecin est nécessaire. Le malade doit être soit personnellement entendu, soit représenté (le projet du comité ne prévoyait pas la représentation mais cette possibilité fut ajoutée ultérieure- ment et es·t d'ailleurs conforme aux exigences de la Cour des droits de l'homme selon l'arrêt Winterwerp).

Pour ne pas différer le geste théra- peutique qui s'impose par priorité, en cas d'urgence, le médecin peut faire admettre et retenir le patient contre sa volonté mais doit avertir immédiate- ment l'autorité compétente pour pren- dre la décision (juge ou autorité administrative).

Des garanties particulières sont pré- vues au cas où la décision de placement est prise par une autorité non judi- Clalre :

a) cette autorité doit être différente de la personne qui a demandé le placement;

b) le patient a un recours devant un tribunal;

c) un conseiller ad hoc doit lui être désigné par le tribunal qui l'aidera à décider s'il convient ou non d'exercer un recours.

La décision de placement décidée par le·juge, qu'il agisse directement ou en qualité de recours de l'autorité administrative, doit être susceptible d'appel · devant une autre instance judiciaire.

L'article 5 est relatif aux traitements et aux soins.

Il affirme d'abord que le patient y a droit et doit les recevoir dans les mêmes conditions scientifiques, déon-

tologiques et matérielles que les autres malades. Le placement ne peut donc en aucun cas constituer uniquement une mesure d'isolement ou d'hébergement;

l'ancien asile, le simple hôme ou la famille d'accueil ne conviennent pas s'ils offrent un abri mais ne disposent pas d'équipement et de personnel qualifié ou ne permettent pas d'y recourir. Il est exclu que la société relègue ses patients puis ne les prenne pas en considération avec autant de respect que les autres malades et avec des moyens techniques équivalents.

Ensuite, l'article détermine les ga- ranties spéciales dont doit bénéficier le patient si le médecin estime devoir lui administrer un traitement non encore généralement reconnu par la science ou dangereux pour l'intégrit-é du cerveau ou de la personnalité; on ne po:urrait arguer de ce texte pour contester l'ablation d'une tumeur cérébrale ou l'apaisement d'un délire mais on l'in- voquerait, par exemple, pour discuter l'opportunité d'une leucotomie. Si une telle situation se présente, le patient doit être informé des bénéfices es- comptés et des risques et il doit consentir expressément au traitement.

Quand il n'est pas capable d'en évaluer la portée et le danger, la question doit être soumise à une autre instance, laquelle consulte le représentant légal du malade s'il existe. L'article 5 précise que cette autre autorité doit être indépendante et laisse à la loi nationale le soin de la désigner.

Le troisième alinéa de l'article traite des essais cliniques. Il se fonde sur le refus de réaliser ces essais, en général, sur des malades qui font l'objet d'une contrainte et qui, même s'ils y consen- tent, peuvent ne pas être en état de le faire valablement. Il admet cependant une exception à cette ligne de con- duite : elle porte, .dans l'intérêt des malades, sur les essais ayant un but thérapeütique psychiatrique et pouvant donc améliorer ou développer les moyens de traiter leurs propres trou- bles. Dans ce domaine, l'article 5 renvoie au droit national.

L'article 6 vise les restrictions de la liberté individuelle imposées au pa- tient, qui s'ajouteraient à l'admission et au maintien non volontaires dans un établissement aux fins de traitement. Il pourrait s'agir, par exemple, d'isole- ment ou de contraintes en cas d'agita- tion ... ces restrictions ne peuvent être dictées que par l'état de santé des malades et le souci de les traiter au mieux. En particulier, le comité a

souligné qu'elles ne peuvent être utili- sées avec une intention de répression ou de ségrégation.

Il existe, en outre, des droits indivi- duels qui ne peuvent être mis en cause quelles que soient les circonstances;

ainsi le patient doit-il toujours être .libre de communiquer avec toute auto-

rité appropriée, son avocat et son conseiller ad hoc (s'il en est pourvu en application de l'art. 4, 2°). D'autre part, les lettres qu'il envoie ne peuvent en aucun cas être censurées.

Le comité aurait voulu préserver aussi le droit de recevoir toutes lettres mais ce point de vue n'a pas été adopté en raison, notamment, du risque que pourraient faire .courir des enveloppes contenant des drogues. Quoi qu'il en soit, rien n'empêche une législation nationale plus stricte en matière de secret de la correspondance. Rappelons à ce sujet que nous sommes liés par l'article

2 2

de la Constitution et par l'article 8 de la Convention euro- péenne de sauvegarde des droits de l'homme.

Le comité a estimé que les droits ainsi préservés doivent être exercés de bonne foi et de manière hon abusive, évoquant par exemple, le cas d'un malade qui voudrait téléphoner

à son

avocat chaque nuit et le convoquer séance tenante.

L'article

7

concerne le transfert d'un établissement à un autre. Il énonce qu'un tel transfert ne peut avoir lieu que compte tenu dè l'intérêt thérapeu- tique du patient et, si possible, de ses désirs. Un changement d'institution ne pourra donc intervenir pour des rai..,.

sons administratives ou de simple commodité de la direction. Une telle disposition est particulièrement impor- tante dans les grands pays où le patient risque d'être'

cc

exilé

>)

loin de sa famille ou de ses amis.

L'article 8 est relatif à la durée et à la fin du placement.

Il est désormais interdit de le prévoir pour une durée illimitée sans réexamen systématique, comme cela existe dans certains pays. Il appartien- dra donc à la loi nationale de détermi- ner la période maximum de validité d'une décision de placement ou les conditions d'une révision périodique.

.Le patient a non seulement le droit d'exercer un recours auprès d'un juge après la décision de placement (art. 4,

3°) mais il a aussi ce droit, selon la

même procédure, pendant le place-

(5)

ment,

<<

à des intervalles raisonnables

>>

qui ne sont pas précisés par l'instru- ment international.

La procédure relative à la fin du placement est beaucoup plus aisée, et cela est naturel, que celle permettant de l'imposer initialement. Toutes les autorités compétentes pour décider l'application de la mesure le sont pour en décider la levée. De plus, une décision médicale peut ici être seule déterminante; en effet, la mesure cesse d'être fondée si elle ne s'appuie plus sur l'existence, constatée par un médecin, de troubles mentaux et de conditions particulières de danger et de nécessité thérapeutique telles que précisées à l'article 3. Le texte ne détermine pas quel médecin peut mettre fin au placement mais il est probable que la loi nationale donnera cette responsabi- lité au médecin qui traite le patient dans l'établissement où il se trouve.

Tout médecin ou toute autorité qui met fin au placement peut agir de sa propre initiative ou sur demande du patient lui-même ou de toute personne

intéressée. ,

La recommandation souligne 'que la fin du placement ne signifie pas la fin du traitement; il est clair que le malade ne doit pas être complètement guéri pour être libéré de la mesure. et que celle...:ci n'a plus de sens si un malade garde des troubles mais continue un traitement volontairement. Le comité a estimé qu'il convenait d'encourager la mise en place d'une relation libre entre le malade mental et le médecin, les saignants, l'hôpital, comme il en va pour les autres malades.

L'article

J)

est le seul article de la recommandation intéressant, non la personne du malade, mais sa capacité

j

uri di que et ses biens. Il n'a aucune prétention à régler la totalité de ces problèmes, ne les abordant d'ailleurs que par les effets du placement.

Néanmoins, il contient deux dispo- sitions précieuses :

r. --

-Le placement, en lui seul, ne peut constituer une cause automatique de restriction de la capacité juridique du patient. Il faut en déduire que, si cette capacité est mise en cause, ce ne peut être que sur base de décisions particulières ne pouvant pas être liées de plein droit à la décision de place- ment. Le comité d'experts pensait que ni le trouble mental, ni le placement ne doivent constituer, en soi, une cause d'incapacité civile, des restrictions en cette matière n'étant imposées que selon les cas, dans l'intérêt du malade,

par une autorité judiciaire et moyen- nant audition du malade ou de sa représentation. Ceci s'aventurait sans doute trop hors du champ précis de la

· recommandation pour être adopté sans autre développement.

2 . -

Mais_le placement peut avoir des conséquences sur les intérêts maté- riels immédiats du patient et il importe que l' autbrité qui le décide veille à leur sauvegarde : éventuellement par le trucheme1nt de la famille, des proches, d'un service social ou de toute autre personne~ les biens doivent être proté~

gés et m9me il faut peut-être fermer la maison, -[payer le loyer, nourrir les chats ou arroser les plantes ... Il ne faut pas perdre de vue qu'un placement se décide pkfois en catastrophe.

L'article .

I

o souligne, une fois de plus·, que la santé du patient doit être protégée et met en exergue sa dignité qui doit être respectée. L'expression

«

en toutes circonstances

»

indique que ceci s'applique non seulement dans l'établissement de soins mais dans toutes les situations possibles : trans- port, comparution devant le juge, etc.

L'article

I I

rappelle (ce qui était juridiquement superflu) que les Etats sont librJs de prendre des mesures encore plus protectrices que celles figurant

1

dans la recommandation : prévoir deux avis médicaux par exem- . ple, l'int~rvention obligatoire d'un

spécialiste: en psychiatrie, l'audition

personnel~e

par un juge du malade là·

où il se t-rouve, l'assistance d'un conseil dans tous

11

les cas ou l'interdiction de tout essai 'clinique ... La multiplication des

garan~ies

est concevable à con- dition de

~especter

l'esprit des règles qui est, nol

1

s semble-t-il, de liberté, de traitementr de dignité et de simplicité.

Il

* * *

Nos co~clusions seront d'ordre gé-

n~ral,

puis ,appliquées à notre pays.

Les Etats membres du Conseil de l'Europe obt établi des principes en matière d~ protection juridique de certains ·mjlades mentaux : ils expri- ment, sous forme de recommandation, une ligne d conduite à tenir à l'égard de ceux de tes malades qui font l'objet

d'~n

placeÏent sans le vouloir eux- memes.

Ceci indique tout d'abord que les personnes atteintes de troubles men- taux, dans leur ensemble et sauf exceptions précises, ont les mêmes droits que les autres citoyens et se

trouvent dans la même situation que les autres malades dans leurs rapports avec 'la -médecine et les établissements de soins. D'ailleurs, pour les malades mentaux qui requièrent une protection spéciale, la recommandation souligne · qu'ils doivent être traités dans les mêmes conditions scientifiques, déon- tologiques et matérielles que tous les autres malades. Il résulte notamment de l'absence de règles internationales propres aux malades mentaux en géné- ral que les actes thérapeutiques néces- saires en cas d'urgence doivent être accomplis pour eux conformément

au~

usages, même si le patient

n'~st

pas en état de le demander; par exemple, ce serait le cas, à notre avis, d'une personne admise inconsciente dans un hôpital après tentative de suicide par absorption de médicaments, . tout comme c'est le cas d'un accidenté en péril mais incapable de manifester sa volonté ou d'un diabétique en coma. Il en résulte, plus largement, que la pratique médicale ne fait pas l'objet d'un clivage par lequel la psychiatrie aurait un statut spécial.

Mais les Etats membres du Conseil

de l'Europe estiment- que certains

malades mentaux doivent encore faire

l'objet de dispositions juridiques parti-

culières, quelles que soient la rapide

évolution scientifique, l'amélioration

du dispositif sanitaire, la diminution du

nombre de cas justifiant ces disposi-

tions et aussi les craintes de perpétuer

une marginalisation au sein de la

psychiatrie. Cette discrimination s' im-

pose parce que des patients souffrant

de troubles mentaux sont parfois rete-

nus dans des établissements au nom de

leur propre intérêt ou de celui d'autrui

mais en dépit de ce qu'ils désirent et

expriment. Même si ces malades ne

sont pas aptes à décider en connais-

sance de cause, même si la volonté des

saignants est de les aider et si la société

a des motifs raisonnables de les crain-

dre, une situation équivoque est alors

créée où les meilleures initiatives en

faveur de la personne entrent en conflit

avec certaines de ses libertés fonda-

mentales. De plus, il y a risques d'abus,

notamment de la part de la sàciété qui

pourrait isoler ses malades mentaux

sans fournir les moyens de les traiter et

qui pourrait même les placer pour non

conformisme ou en invoquant la simple

nécessité d'assistance. Dès lors, on en

vient naturellement à faire intervenir

dans cette situation, outre les patients

et les médecins, des autorités qui

prennent la décision à la fois thérapeu-

tique et privative de liberté ainsi que

(6)

des instances judiciaires. Ce système n'est pas simple et n'évite pas toùjours une certaine confusion des rôles (l'autorité administrative ou le juge décide d'une forme de traitement, le médecin applique un traitement qui comporte privation de liberté) mais il peut fonctionner moyennant une claire définition légale des attributions de chacun, une procédure efficace et adaptée au patient, enfin une coopéra- tion de tous dans l'intérêt de la personne à soigner et à protéger.

Les pays européens formulent donc, en une dizaine de règles, un ensemble de dispositions juridiques _particulières concernant le placement involontaire des malades mentaux.

Il est réconfortant de voir que des juristes et médecins de nombreux pays se sont accordés malgré les différences

· de langue, de culture, de pratique du droit ou de la médecine et que le comité des ministres s'est rallié' à leur cons en- sus.

En ce qui concerne la Belgique, la situation est propice à un changement de législation avec mise en conformité à la recommandation de Strasbourg, puisque la loi sur le régime des aliénés . est plus que centenaire et fait l'objet depuis longtemps de travaux parle- mentaires en vue de son remplacement.

Cette loi tombe progressivement en désuétude. · Traitant notamment des malades dans ·les établissements psy- chiatriques, elle n'établit pas de dis- tinction entre ceux qui y séjournent librement et les autres, la

cc

colloca- tion

n

étant la règle. Ceci a été corrigé par des dispositions en marge de la loi de base, créant des servic;es ouverts et par la loi sur les hôpitaux qui a introduit la notion de services psychia- triques même dans les hôpitaux géné- raux. Cette notion est indépendante de celle

d~

collocation et permet la cohabitation de malades mentaux et d'autres malades; la loi sur les hôpitaux a aussi apporté des améliorations aux conditions de traitement prévues en

I

8 50 et

l

8 7 3 ·

La pratique quotidiennè confirme cette tendance à ne plus stigmatiser le malade mental et à le traiter quelles que soient les restrictions de liberté dont il fait l'objet, en respeCtant son indivi- dualité; elle suscite la mise en place d'une nouvelle législation.

Vu la volonté largement exprimée d'une réforme, nous ne nous attarde- rons pas à détailler les inadéquations de la loi en vigueur aux règles gue nous

venons de commenter : outre l'absence de mention des malades se soignant volontairement et le cloisonnement des établissements, citons la possibilité d'une. décision de placement par l'autorité communale sans demande émanant d'une autre personne, la durée illimitée de la mesure, la désignation automatique d'un administrateur pro- visoire des biens; ce ne sont là que des exemples.

Les projets à l'étude semblent se situer dans l'esprit de la recommanda- tion internationale. En particulier, les problèmes de la protection de la personne et des biens seront traités dans deux lois distinctes. On prévoit la décision de placement par le juge de paix sur avis médical, les recours' la limitation de la mesure dans le temps, la fin du placement par décision médicale ou judiciaire, le respect des opinions du patient et de ses contacts avec les autorités, l'avocat, la famille.

Du côté de la protection juridique des personnes, le projet étend les garanties jusqu'à l'assistance obliga- toire d'un conseil. Il n'y aurait pas de réserve à formuler, sauf si cela alourdit la procédure au point qu'elle ne soit pas simple et rapide comme le veut la recommandation et qu'elle devienne mal adaptée à une situation de maladie; . tel pourrait être le cas si, comme prévu

lors de certains travaux, on. faisait se

su~céder

rapidement un débat devant le juge avant l'observation et ùn second débat semblable avant le maintien de la mesure.

Il faut remarquer que le champ d'application du projet, à notre con- naissance, n'est pas limité au placement

·involontaire comme l'instrument in- ternational. Il concerne, par certains de ses articles, l'ensemble des malades mentaux hospitalisés, ce qui n'a pas été voulu par les Etats membres du·

Conseil de l'Europe.

Nous nous abstiendrons d'autres réflexions à ce sujet, les textes n'étant ni complets ni diffusés.

Une loi sur la proteçtion de la personne des malades mentaux . placés contre leur gré aux fins de traitement ne peut être pensée et appliquée ·que par la coopération d'autorités ayant compétence en matière de justice et de santé publique. Il nous reste à nous demander comment on va la m,ettre sur pied et la faire fonctionner, en· tenant compte de la réforme de nos institu- tions donnant aux communautés fran- çaise et_ flamande des compétences en

matière de santé, alors que le projet a été étudié jusqu'à présent au seul

nive~u

national.

Suzanne

ÜSCHINSKY

et Michel DUPONT.

LA VIE DU DROIT

L'arbitrage commercial

dans les relations belgo-soviétiqu:es

1. - L'accord bilatéral du 11 janvier 1983 1 . - Une délégation du Centre belge pour l'étude et la pratique de l'arbitrage national et international (Cepani) s'est rendue à Moscou du 8 au" 13 janvier pour conclure avec la chambre de commerce et d'industrie de l'U,R.S.S. un accord bilatéral « tendant à encourager et organiser le recours à l'arbitrage comme mode de règlement des litiges commerciaux pouvant survenir dans les relations entre des personnes physiques et morales belges et des organisations soviétiques ».

2. -Cet accord s'inscrit dans la ligne d'une tendance des centres d'arbitrage des pays. de l'Est de conclure des accords bilatéraux avec des centres de pays d'économie de marché. La chambre de commerce et d'industrie de l'U.R.S.S. a conclu de tels accords avec les · centres d'arbitrage de l'Inde, de l'Italie, du Japon et des Etats-Unis.

3 . - La· Convention belgo-soviétique du Il janvier 1, 9 8 3 puise ses racines dans l'article 1 0 du

Traité de commerce entre les gouvernements du Royaume de Belgique, du Grand-Duché de Luxembourg et du Royaume des Pays-Bas, membres de l'Union économique Benelux, et le gouvernement de l'U.R.S.S., du 14 juillet 19.71, qui prévoit la possibilité de régler par la voie de l'arbitrage les litiges en matière de contrats commerciaux conclus entre les organisations de commerce extérieur soviétiques et les personnes physiques et morales belges ( 1 ). On rappellera également que l'acte final de la conférence d'Helsinki formule en son point 3 la recomman- dation d'inclure des clauses d'arbitrage dans les

( l) « Le règlement des litiges pouvant surgir de l'exécution des contrats ayant trait aux échanges commerciaux entre les Pa.lties contractantes peut être effectué par voie d'arbitrage ». Art. l 0 ·du Traité de commerce entre les gouvernements du Royaume de Belgique, du Grand-Duché de Luxembourg et du Royaume des Pays-Bas, membres de l'Union écono- mique Benelux, et les gouvernements des républiques socialistes soviétiques, approuvé par la loi ·du 14 août

1972, Mon. b., Il mai 1973. ·

(7)

contrats commerciaux et de coopération indus- trielle, ou le cas échéant dans des conventions spéciales (2).

4. -Aux termes de l'accord du Il janvier 1983, le Cepani et la phambre de commerce et d'industrie de l'U.R.S.S. s'engagent à recommen- der respectivement aux personnes physiques et morales belges et aux organisations soviétiques qui participent à la réalisation des rapports économiques et commerciaux entre la Belgique et l'U.R.S.S., d'inclure dans leurs contrats là clause d'arbitrage suivante :

« Tout litige ou différend pouvant résulter du présent contrat ou en rapport avec celui-ci sera tranché par la voie de l'arbitrage etsoustrait à la compétence des tribunaux ordinaires.

» Si dans un tel litige ou différend la défende- . resse est une personne physique ou morale belge,

l'arbitrage se déroulera dans le cadre du Centre belge pour l'étude et la pratique de l'arbitrage national et international (Cepani) en conformité avec le règlement de conciliation et d'arbitrage de ce Centre. Si dans un tel litige ou différend la défenderesse est une organisation soviétique, l'arbitrage aura lieu à la commission d'arbitrage pour le commerce extérieur près la chambre de commerce et d'iQ.dustrie de l'U.R.S.S., conformé- ment aux règles de procédure établies par cette commission.

» La décision arbitrale prononcée conformé- ment à la présente clause d'arbitrage sera définitive et obligatoire pour les deux parties ».

5. -L'accord bilatéral n'oblige nullement de recourir à la procédure arbitrale. Dans la mesure toutefois où les parties souhaitent avoir recours à l'arbitrage pour régler leurs différends, celui-ci devra, dans les faits, nécessairement se dérouler suivant la procédure décrite dans l'accord, à l'exclusion de tout autre type d'arbitrage .. Si, en revanche, les parties préfèrent ne pas recourir à la procédure arbitrale, elles devront normalement accepter que les litiges éventuels soient soumis à la compétence exclusive des tribunaux de Mos- cou .. L'on remarquera à cet égard que l'U.R.S.S.

ne connaît pas de tribunaux de commerce pour le règlement des litiges commerciaux, lesquels sont déférés aux tribunaux civils ordinaires.

II. - La chambre de commerce et d'industrie de l'U.R.S.S.

et les organisations chargées du commerce extérieur . 6 . -L'accord fait référence aux «organisa- tions » soviétiques. Que recouvre cette notion ? La conduite du commerce extérieur de l'U.R.S.S. appartient en monopole à l'Etat qui l'exerce par l'intermédiaire d'organisations éta- tiques placées sous l'autorité du conseil des ministres et des administrations qui en dépen- dent, en particulier la commission pour les relations économiques avec les pays étrangers et le ministère du Commerce extérieur. C'est à ce dernier que doivent être rattachées les organisa- tions du commerce extérieur (O.C.E.) qui réali- sent approximativement 95 % du chiffre d'affai- res du commerce extérieur (3).

(2) Le point 3 intitulé « Provisions concerning trade and industrial cooperation», contient plusieurs disposi- tions relatives au recours à l'arbitrage comme moyen de rendre plus facile et de développer le commerce et la coopération entre les peuples. Il recommande en particulier "where appropriate", to organizations, enter- prises and frrms in their countries, to include arbitration clauses in commercial contracts and industrial Coopera- tion contracts, or in special agreements » (conference on security and cooperation in Europe, fmal act, August 1 , 1975, International/egal materials, 1975, 1292, 1305).

(3) Sur le statut de ces organisations, voy. V.S.

Ces organisations sont au nombre d'environ 50. Elles sont régies par une loi du 31 mai 1978.

Les O.C.E. sont créées par le ministère du Commerce extérieur pour exécuter le plan des importations et exportations pour une certaine catégorie de marchandises. D'une manière plus large, elles ont également pour fonction de développer le marché d'exportation des marchan- dises qui rentrent dans leur objet social, ainsi que de veiller à l'amélioration de leur qualité et de leur compétitivité sur le marché mondial. Les O.C.E. ont la personnalité juridique. Elles peu- vent conclure des marchés en U.R.S.S. et à l'étranger, louer ou acquérir des biens meubles et immeubles, établir des flliales, succursales et agences dans les limites de leur objet social. Elles acquièrent par ailleurs les droits et supportent les obligations afférentes à leurs activités .. Elles pourront dès lors agir tant en demandant qu'en défendant, devant ·les tribunaux ordinaires et arbitraux.

7. -Hormis les O.C.E., d'autres organisations ont le droit d'accomplir certaines opérations d'importation et d'exportation, à savoir notam- ment les associations industrielles (4), certaines organisations dans le domaine de la construc- tion (5), l'association Sovfracht dans le domaine du transport de frêt par bateau, les associations Aeroflot et Sovexportfllm, etc. (6).

Le droit de conclure des marchés dans le domaine du commerce extérieur appartient éga- lement à la chambre de commerce et d'industrie de l'U.R.s.s~ (C.C.I.U.) et aux chambres de commerce et d'industrie des républiques fédérées.

L'objet principal de la C.C.I.U. -qui est dotée de la personnalité juridique - est de promouvoir le développement du commerce extérieur et des relations économiques de l'U.R.S.S. avec les pays étrangers. En exécution de cette mission, elle prend contact avec les entreprises et organisa- tions étrangères, organise des expositions et des échanges de délégations. Ses fonctions sont très vastes et comprennent notamment. le dépôt' des marques et brevets, le contrôle de qualité, la vérification des quantités, la délivrance de certifi- cats d'origine, etc. C'est en outre au sein de la C.C.I.U. que sont établies les deux institutions arbitrales du commerce extérieur : la commission d'arbitrage du commerce extérieur et la commis- sion d'arbitrage maritime.

III. - La procédure arbitrale

8 . -Selon que la partie belge est défenderesse ou demanderesse, l'accord du Il janvier 1983 prévoit que l'arbitrage aura lieu suivant les règles du règlement d'arbitrage du Cepani ou de la commission d'arbitrage du commerce extérieur de l'U.R.S.S.

L'on renverra pour la première hypothèse aux développements consacrés à la procédure arbi- trale du Cepani dans l'excellent traité de MM.

Ruys et Keutgen (7).

Pozdniakov, «The legal status of ali-union foreign trade organizations and other soviet organizations authorized to conclude foreign trade transactions », Review of socialist law, 1982, 169-181.

1

(4) Pour les contrats portant sur la recherche scientifique et technologique et l'échange de know-how (C.D. U.S.S.R., 1973, n° 7, art. 32).

(5) En ce qui concerne 'tes contrats pour la réalisation en U.R.S.S. de projets de construction à grande échelle, tels les contrats relatifs à la construction du gazoduc transsibérien. ·

(6) Sur ces organisations, voy. Pozdniakov, op. cit.,.

169ets.

(7) L'arbitrage en droit belge et international, Bruxel- les, Bruylant, 1982, en particulîer les n°5 349 et s. et l'annexe VII.

Pour ce qui concerne les cas où l'arbitrage aura lieu suivant les règles de procédure de la C.C.I.U ., c'est-à-dire chaque fois· que la partie soviétique sera défenderesse, il nous paraît utile d'attirer l'attention des juristes sur les particulari- tés suivantes du règlement de procédure (8).

9 . -Les litiges sont en principe tranchés par un collège de trois arbitres. Chaque partie dispose pour désigner son arbitre d'un çiélai de 30 jours à dater de la notification de la demande d'arbitrage (art. 17). A défaut de désignation endéans ce délai, le ou les arbitres seront choisis par le président de la commission d'arbitrage. C'est ce dernier qui en tout état de cause nommera le président du tribunal arbitral, après avoir enté- riné le choix des parties.

10.- Les arbitres, y compris celui que dési- gnera la partie belge, seront nécessairement choisis sur une liste de quelque 25 arbitres établie par le présidium de la C.C.I.U. et mise à jour tous les 4 ans (art. 4). Cette règle peut, certes, étonner les juristes occidentaux. L'on rappellera cepen- dant, d'une part, que les organisations soviétiques ne se soumettront en principe à l'arbitrage qu'à la condition qu'il soit organisé suivant cette procé- dure; d'autre part, que les arbitres choisis par la C.C.I.U. comptent parmi les juristes les plus éminents de l'Uni on soviétique et peuvent se prévaloir, pour la plupart, outre d'une importante expérience des relations internationales dans leur pays et à l'étranger, d'une carrière scientifique ou académique et d'une connaissance très valable des droits étrangers. L'on ne perdra pas de vue enfin que dans l'hypothèse d'un arbitrage soumis aux règles du Cepani, deux des trois arbitres seront le plus souvent de nationalité belge.

11.- Les parties peuvent aussi, si elles le souhaitent, soumettre le litige à l'arbitrage d'un arbitre unique.

12. -Tout arbitre peut être récusé par une partie s'il existe des doutes sérieux quant à son impartialité, en particulier si l'on peut supposer qu'il a un intérêt personnel dans la solution du litige (art. 22). ·

13. - La sentence arbitrale doit être rendue en principe dans un délai de 6 mois. Les parties échangent leurs mémoires et peuvent se faire assister par. un représentant ou un avocat de leur choix, belge ou étranger. Elles peuvent le cas échéant recourir à l'assistance d'un juriste sovié- tique. Il existe en effet à Moscou un collège d'avocats spécialisés dans les litiges internatio- naux.

14.-La procédure arbitrale se déroulera normalement eh langue russe, mais les parties peuvent en décider autrement (art. 8). Il est donc conseillé de prévoir dans le contrat initial ou dans le compromis d'arbitrage que toute procédure se déroulera en langue anglaise. Les parties peuvent aussi s'adjoindre un interprète. Les mémoires peuvent en tout état de cause être rédigés dans la langue du contrat ou dans la langue utilisée dans la correspondance échangée par les parties (art. 7).

15.- Chaque partie doit fournir la preuve des faits dont elle se prévaut mais le tribunal peut ordonner la production de documents ou nom- mer un expert (art. 27).

(8) Règles de procédure de la commission d'arbitrage dans le domaine du commerce extérieur près la chambre de commerce et d'industrie de l'U.R.S.S., approuvées par décision du presidium de la chambre de commerce et d'industrie de l'U.R.S.S. en date du 25 juin 1975, amendées le 23 déc. 1981, Moscou, 1982.

(8)

16.- La sentence est prononcée par la com- mission d'arbitrage. Elle est rendue à la majorité des arbitres. Si un arbitre n'est pas d'accord avec la décision de ses .collègues, il peut exprimer une opinion dissidente qui Sera jointe au dossier de la procédure (art. 32). La sentence doit être motivée (art. 33). Elle est rendue en premier et dernier ressort (art. 36).

17. - La sentence arbitrale doit être exécutée sans délai ou, le cas échéant, endéans le délai fixé par les arbitres. A défaut d'exécution spontanée, celle.-ci peut être poursuivie devant les tribunaux ordinaires qui délivreront une. ordonnance d'exé- cution (9). L'on rappellera en outre que l'U.R.S.S., à l'instar de la Belgique, a ratifié la Convention de New York du 10 juin 1958 pour la reconnaissance et l'exécution des sentences arbitrales étrangères et la Convention de Genève du 21 avril 1961 sur l'arbitrage commercial international.

IV. ---:.Le droit applicable

18.-Conformément aux dispositions du Code de procédure civile soviétique, les arbitres ne peuvent jamais statuer en amiable composi- tion (10).

L'article 12 du règlement d'arbitrage de la commission d'arbitrage du commerce extérieur dispose que celle-ci tranche les litiges en se fondant sur les normes applicables du droit matériel et s'inspire, si le différend est issu de rapports contractuels, des clauses du contrat et en tenant compte des usages commerciaux. Ceci est conforme à l'article 7 de la Convention de Genève. La détermination de ces usages commer- ciaux rentre dans les prérogatives de la chambre de commerce et d'industrie d'U.R.S.S.

19.- Le droit soviétique des contrats est contenu dans les principes fondamentaux de la législation civile de l'U.R.S.S. et des républiques fédérées, adoptés en 1961.

En ce qui concerne le droit applicable aux contrats internationaux, l'article 126 reconnaît le principe du libre choix par les parties de la loi applicable à la convention. A défaut d'un choix exprès et explicite, les droits et obligations des parties seront déterminés par le droit de 1 'Etat où le contrat a été conclu. Le lieu de conclusion du contrat sera déterminé par le tribunal arbitral conformément au droit soviétique. En particu- lier, il résulte de l'article 162 du Code civil de la République de Russie et d'articles similaires dans les Codes civils des autres républiques, que le contrat est présumé avoir été conclu au lieu où l'offre a été acceptée.

20. - Si le droit soviétique est applicable, l'article 3 des principes fondamentaux dispose que les relations des parties seront régies par la législation spéciale relative au commerce exté- rieur - laquelle est peu abondante - et à défaut, par les règles ordinaires du droit civil. Celles-ci seront toutefois supplantées par les règles con- tenues dans les conventions internationales que l'U.R.S.S .. a ratifiées, par exemple la Convention

· de Paris de 18 8 3 sur la protection de la propriété intellectuelle ou la Convention de Genève de

1952 sur le droit d'auteur.

21.-Si le contractant belge souhaite que les rapports contractuels · soient régis par le droit belge, il veillera donc à le préciser de manière expresse dans la convention.

(9) Art. 338 et 339 du Code de procédure civile.

(1 0) Lebedev, Rozenberg et Pozdniakov, «The law of the Union of soviet socialist republics »; Digest of commercial Laws of the world, Oceana, 1980, 55.

Si, en revanche, les parties conviennent que le contrat sera soumis au droit soviétique, la partie belge veillera à s'informer de son contenu. Le droit soviétique relatif à la formation et l'exécu- tion des contrats est proche du droit français et du droit allemand. Il contient néanmoins des règles spécifiques dont le contenu ne peut être perdu de vue. Ainsi, le paiement de dommages-intérêts en raison de l'inexécution d'un contrat ne dispense pas pour autant, en principe, de son exécution par celui qui s'y est engagé (art. 221 des principes fondamentaux). Les dommages-intérêts peuvent être contractuellement .limités mais peuvent également, si les parties le prévoient, se cumuler a,.vec une clause pénale (art. 189). Le débiteur de l'obligation ne sera responsable de l'inexécution' que s'il a commis une faute, à moins que les parties n'en aient disposé autrement (art. 222).

Les intérêts sont calculés au taux de 3 % , sauf convention différente des parties (art. 226). La prescription est en principe de · 3 ans, mais il existe des prescriptions très courtes. Ainsi, les demandes fondées sur un vice de la marchandise vendue doivent être introduites endéans un délai de 6 mois.

22.- L'on notera enfin qu'un certain nombre de sentences arbitrales rendues par la commis- sion d'arbitrage du commerce extérieur ont été publiées (11) et permettent ainsi de se former une opinion quant à la manière dont les principes énoncés ci-avant sont mis en œuvre dans la pratique arbitrale.

23.- ll est certain que la conclusion d'un contrat très précis et très détaillé · dans ses spécifications (notamment quant à la qualité de la marchandise, aux obligations des parties, et aux modalités et détails d'exécution et d'agréation) est le meilleur moyen pour les parties de maîtriser la mise en œuvre de leurs rapports contractuels, et de limiter de la sorte l'éventuelle application supplétive d'un droit étranger dont l'une d'elles ignore souvent le contenu, au demeurant parfois très différent de son droit national.

Bernard HANOTIAU.

(11) Collected arbitration cases, Moscow, parts I, II, III, IV (en langue anglaise). Une dizaine de sentences mettent en présence une entreprise belge.

'J UR 1 ·S .p RU D E N C E

Cass. (3e ch.), 10 janvier 1983

Prés. : M. Delva, cons. ff. prés.

Rapp. : M. Lebbe, cons.

Min. publ.: M. Lenaerts, av. gén.

Plaid. : MMes De Gryse et Dassesse.

(Caulier c. s.a. Prayon-Rupel.)

CONTRAT D'EMPLOI. - PECULE DE VACANCES. - Mode de calcul. - Arrêté royal du 30 mars 1967, article 46, détermi- nant les modalités générales d'exécution des lois relatives aux vacances annuelles des travailleurs salariés. - Eléments à prendre en considération.- Rémunération en argent et avantages en nature.

Les articles de l'arrêté royal du 30 mars 1967 déterminant les modalités générales d'exécution des lois relatives aux vacances annuelles des travailleurs salariés font par- tie des dispositions du titre III, chapitre 1er

de cet arrêté, qui régissent le mode de calcul du pécule de vacances des employés.

Il ressort de l'ensemble de ces dispositions que, pour ce calcul, il y a lieu dè tenir compte non seulement de la rémunération en argent gagnée par l'employé, mais aussi des avanta- ges en nature dont il bénéficie.

(Traduction.)

Ouï M. le conseiller Lebbe en son rapport et sur les conclusions de M. Lenaerts, avocat général;

Vu l'arrêt attaqué, rendu le 26 octobre 1981 par là cour du· travail d'Anvers;

Sur le second moyen, pris de la violation des articles 38, 39 et 46 de l'arrêté royal du 30 mars 1967 déterminant les modalités générales d'exécution de.s lois relatives aux vacances annuelles des travailleurs sala- riés,

en ce que l'arrêt rejette, pour ce qui concerne les avantages en nature et la prime de fin d'année, la demande du demandeur, tendant au paiement, au terme de son contrat, du pécule de vacances sur la rémunération brute, y compris «toutes les autres prestations et avantages sous quel- que forme que ce soit», aux motifs

« qu'une expression qui est utilisée dans une même loi ne peut avoir qu'une seule signification; que le terme "rémunération", utilisé par l'article 46 de l'arrêté royal du 30 mars 1967 relatif aux vacances annuel- les, doit avoir la même signification que le terme "rémunération" utilisé par les arti- cles 38 et 39 du même arrêté royal, à savoir la rémunération mensuelle fixe ou la rému- nération variable; que les primes annuelles et les avantages acquis en vertu du contrat de travail sont exclus du champ d'applica- tion de ces articles 38, 39 et 46 »,

alors que, la «rémunération normale»

et la «rémunération brute» qui, aux termes des articles 38 et 46 de l'arrêté royal du 30 mars 1967 servent de base au . calcul du pécule de vacances, comprennent aussi les avantages en nature octroyés par l'employeur au travailleur, en plus de la rémunération en argent; qu'ainsi, en ne considérant pas les avantages en nature comme faisant partie de la «rémunération normalë »ou de la<< rémunération brute», l'arrêt viole lesdits articles 38 et 46 de l'arrêté royal du 30 mars 1967:

Attendu que les articles de l'arrêté royal du 30 mars 1967 cités au moyen font partie des dispositions du titre III, chapitre 1er de cet arrêté, qui régissent le mode de calcul du pécule de vacances des employés;

Qu'il ressort de l'ensemble de ces disposi- tions que, pour ce calcul, il y a lieu de tenir · compte non seulement de la rémunération en argent gagnée par l'employé mais aussi des avantages en nature dont il bénéficie;

Que le moyen est fondé;

Par ces motifs : LA COUR,

Casse l'arrêt attaqué.

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