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Etude relative au mécanisme de formation des prix négatifs de l’électricité en Allemagne | CREG : Commission de Régulation de l'Électricité et du Gaz

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(1)

Commission de Régulation de l’Electricité et du Gaz Rue de l’Industrie 26-38

1040 Bruxelles Tél.: 02/289.76.11 Fax: 02/289.76.09

COMMISSION DE RÉGULATION DE L’ÉLECTRICITÉ ET DU GAZ

ETUDE

(F)110908-CDC-1098

relative au

« mécanisme de formation des prix négatifs de l’électricité en Allemagne»

réalisée en application de l'article 23, § 2, deuxième alinéa, 2° et 19°, de la loi du 29 avril 1999 relative à l'organisation du marché de l'électricité

8 septembre 2011

(2)

TABLE DES MATIERES

INTRODUCTION ... 3

I ANALYSE DESCRIPTIVE ... 4

I.1. Fonctionnement du système des prix négatifs ... 4

I.2. Occurrence des prix négatifs ... 12

II CAUSES DE CES PRIX NÉGATIFS ... 15

III CONSÉQUENCES ... 19

IV IMPACT SUR LA COURBE D’OFFRE ... 21

V CONCLUSION ... 26

(3)

INTRODUCTION

1. La COMMISSION DE REGULATION DE L’ELECTRICITE ET DU GAZ (CREG) a réalisé cette étude relative au mécanisme de formation des prix négatifs de l’électricité en Allemagne sur la base des missions que lui confère l’article 23, §2, deuxième alinéa, 2°, de la loi du 29 avril 1999 relative à l’organisation du marché de l’électricité et aux modifications apportées à celle-ci via l’art 85 de la loi portant sur des dispositions diverses en date du 8 juin 2008.

2. La CREG a pour missions, parmi celles que lui confère la loi, de « surveiller la transparence et la concurrence sur le marché de l’électricité » et de « veiller à ce que la situation notamment technique et tarifaire du secteur de l'électricité ainsi que l'évolution de ce secteur visent l'intérêt général et cadrent avec la politique énergétique globale. » La loi demande à la CREG d’ « assurer le monitoring permanent du marché de l'électricité, tant sur le plan du fonctionnement du marché que sur le plan des prix.»

3. La CREG poursuit par cette étude l’objectif de décrire les mécanismes qui conduisent aux prix négatifs que l’on a pu constater à partir de 2008 sur la bourse de l’électricité EEX1. La deuxième section décrit la situation, c’est-à-dire le régime des tarifs d’achat, ainsi que la fréquence et la durée des prix négatifs. La troisième section aborde les causes menant à des prix négatifs. La quatrième section détaille les conséquences de ces prix négatifs. La cinquième section reprend l’impact des prix négatifs sur la courbe d’offre.

La dernière section conclut.

4. Cette étude a été approuvée par le Comité de direction lors de sa réunion du 8 septembre 2011.



1 Soulignons que depuis le 1er juillet 2009, EEX Power Spot a été intégré à EPEX Power Spot. Voy. le communiqué de presse à cet effet : http://www.epexspot.com/en/press-media/press- releases/details/press/EPEX_Spot_SE_On_the_way_towards_a_common_Spot_Market_

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I ANALYSE DESCRIPTIVE

I.1. Fonctionnement du système des prix négatifs

5. La bourse allemande de l’électricité EEX a été la première place boursière européenne à permettre des offres de prix négatifs, et cela à partir du 1er septembre 20082. Les prix peuvent en effet être compris entre -9.999 €/MWh et 9.999 €/MWh pour le marché intraday3. La réaction ne s’est pas fait attendre, puisqu’un mois plus tard, la bourse enregistrait les premiers prix négatifs.

6. Avant l’instauration de ce système, lorsque le marché répondait par des offres de prix inférieurs aux coûts marginaux à cause d’une faible demande et d’une production éolienne élevée, l’on faisait appel aux capacités de réserve afin d’assurer la sécurité du système électrique. La surproduction était ainsi suspendue4, et cela sans arrêter nécessairement les unités de production renouvelable.

7. Depuis l’instauration de prix négatifs, la situation est sensiblement similaire, si ce n’est que les prix négatifs constituent un signal supplémentaire pour les acteurs de marché leur permettant d’optimiser l’utilisation de leurs actifs. En d’autres termes, les capacités de réserves seront moins sollicitées du fait de l’augmentation de la demande d’électricité lors de la survenance de prix négatifs. D’une certaine façon, les prix négatifs influencent la demande afin d’assurer un équilibre pérenne entre l’offre et la demande.

8. En Belgique, les prix négatifs5 ont été instaurés le 9 novembre 2010 sur Belpex avec le couplage des marchés de la région CWE (Central West Europe). Jusqu’à présent, des prix négatifs n’ont pas encore été observés sur Belpex.

9. Les énergies renouvelables jouent un rôle essentiel dans l’apparition de prix négatifs, mais pas non plus primordial6. Il est donc nécessaire de mentionner que certaines sources

2 Fabio GENOESE, Massimo GENOESE et Martin WIETSCHEL, “Occurrence of negative prices on the German spot market for electricity and their influence on balancing power markets”, 7th international conference on the European energy market, 2010, p. 1.

3 http://www.eex.com/de/document/43455/faq.php, visité le 13 avril 2011.

4 Marco NICOLOSI, « Wind power integration and power system flexibility – an empirical analysis of extreme events in Germany under the new negative price regime”, Energy Policy, 2010, p. 7257 et Johannes VIEHMANN , “Risk premiums in the German day-ahead Electricity Market”, Energy Policy, 2011, p. 389.

5 Les prix sont compris entre -3.000,00 €/MWh et 3.000,00 €/MWh sur le marché day-ahead.

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d’énergie renouvelables spécifiées dans la loi allemande sur les énergies renouvelables, à savoir Erneuerbare-Energien-Gesetz ou EEG7, bénéficient de tarifs d’achat (feed-in tariffs).

10. En général, l’on peut admettre qu’à l’exception de l’électricité produite par des centrales hydrauliques de haute puissance, les autres formes d’électricité renouvelable jouissent de ces tarifs d’achat8. Voici un exemple pour des unités éoliennes installées en 20109 :

- 91,10 € / MWh pour l’éolien on-shore en 2010, et ce tarif sera réduit de 1% par an;

- 130,00 € / MWh pour l’éolien off-shore en 2010, et ce tarif sera encore valable jusque 2014. Au-delà de cette année, le tarif sera réduit de 5% par an.

Ces tarifs d’achat sont valables vingt ans, plus l’année de mise en service10.

11. Ces tarifs d’achat sont régis par cette loi EEG. La version actuellement en vigueur a été publiée le 31 octobre 2008 et est entrée en application le 1er janvier 2009. Elle a été amendée le 11 août 2010. Deux décrets détaillent davantage le mécanisme de compensation, à savoir le AugslMechV11 et le AugslMechAV12. Le premier décret est entré en vigueur le 1er janvier 2010, et amende les articles 34 à 44 de la loi EEG. Le second

6 Voy. ANDOR et al., Rethinking feed-in tariffs and priority dispatch for renewables, Universität Münster, Avril 2010, p. 3. Les auteurs y expliquent que les prix négatifs ne sont pas uniquement un phénomène dû à l’expansion des énergies renouvelables, mais également à la non-stockabilité de l’électricité. Il en résulte que pour certaines unités, il est plus rentable de produire à perte pendant de courtes périodes, sans possibilité de stocker cette électricité, que d’arrêter la production. En effet, il est plus coûteux d’arrêter cette centrale et de ne pas produire pendant le redémarrage que de subir ces pertes liées aux prix négatifs pendant de courtes périodes.

7 Pour le texte de loi en Allemand, voy. http://www.buzer.de/gesetz/8423/index.htm, et pour le texte de loi en Anglais, voy. http://www.bmu.de/files/english/pdf/application/pdf/eeg_2009_en_bf.pdf (visités tous les deux le 3 mai 2011).

8 Voy. la section 2 (§23 et suivants) de la loi EEG pour une énumération des technologies promues par la loi EEG.

9 Vergütungssätze und Degressionsbeispiele nach dem neuen Erneuerbare-Energien-Gesetz (EEG) vom 31 Oktober 2008 mit Änderungen vom 11 August 2010, pp. 10-11, http://www.erneuerbare- energien.de/files/pdfs/allgemein/application/pdf/eeg_2009_verguetungsdegression_bf.pdf et http://www.germanenergyblog.de/?page_id=965, visité le 7 avril 2011.

10 http://www.res-legal.de, visité le 16 août 2011.

11 AugslMechV : Verordnung zur Weiterentwicklung des bundesweiten Ausgleichsmechanismus. Pour le texte de loi en Allemand, voy. http://www.gesetze-im-internet.de/ausglmechv/index.html, et pour

celui en Anglais, voy.

http://www.bmu.de/files/english/pdf/application/pdf/englisch_ausglmechv_091019.pdf (visités tous les deux le 20 avril 2011).

12 AugslMechAV : Verordnung zur Ausführung der Verordnung zur Weiterentwicklung des bundesweiten Ausgleichsmechanismus. Voyez le texte législatif : http://www.gesetze-im- internet.de/ausglmechav (version allemande uniquement).

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décret implémente quelques règles bien spécifiques du décret AugslMechV. La première version du AugslMechAV est entrée en vigueur le 27 février 2010. La version actuelle est d’application depuis le 1er janvier 2011. L’AugslMechAV a été écrit en partie par le régulateur allemand.

12. L’on peut synthétiser la structure juridique en la représentant comme une pyramide (voir Figure 1) où la loi EEG constitue la base sur laquelle repose l’AugslMechV, sur lequel repose lui-même l’AugslMechAV.

Figure 1: Lien entre la loi EEG et les différents décrets détaillant son fonctionnement, ainsi que la date des différentes entrées en vigueur des versions actuellement d’application.

13. Le régime actuel prévoit que les producteurs d’électricité renouvelable ont la possibilité de recevoir le tarif d’achat par unité d’électricité produite, ou de revendre eux- mêmes l’électricité sur les marchés13. Les gestionnaires de réseau de transport ou de distribution doivent payer ce tarif d’achat aux producteurs14. Le gestionnaire de réseau de distribution revend l’électricité d’origine renouvelable au gestionnaire de réseau de transport15.

13 Voy. Section 3, §17 de la loi EEG sur la vente directe.

14 Voy. Section 3, §16, (1) de la loi EEG : “Netzbetreiber müssen Anlagenbetreiberinnen und - betreibern Strom aus Anlagen, die ausschließlich Erneuerbare Energien oder Grubengas einsetzen, mindestens nach Maßgabe der §§ 18 bis 33 vergüten”.

15 Voy. Section 1, §8, (4) de la loi EEG et la brochure du ministère fédéral de l’environnement : EEG the renewable energy sources act – the success story of sustainable policies in Germany, juillet 2007, http://www.gtai.com/uploads/media/EEG_Brochure_01.pdf.

AugslMechAV (janvier 2011) AugslMechV (janvier 2010)

EEG (janvier 2009)

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14. Depuis le décret sur le mécanisme d’équilibrage AugslMechV, qui est d’application depuis le 1er janvier 2010, le gestionnaire du réseau de transport revend cette électricité d’origine renouvelable sur EEX, sur le marché day-ahead, ou intraday16. Le gestionnaire de réseau de transport vend en priorité l’électricité sur le marché day-ahead en fonction des prévisions de production d’électricité d’origine renouvelable et effectue les ajustements nécessaires sur le marché intraday s’il y a des déviations par rapport aux prévisions.

15. Auparavant, le gestionnaire de réseau de transport refacturait à tous les fournisseurs d’électricité sur son territoire l’électricité d’origine renouvelable achetée aux différents producteurs17.

16. Rappelons donc qu’actuellement le gestionnaire de réseau de distribution ou de transport rémunère le producteur d’électricité d’origine renouvelable au tarif d’achat si ce dernier choisit de ne pas vendre lui-même l’électricité18. La différence entre le tarif d’achat et le prix de vente de cette électricité est couverte par une taxe sur l’énergie renouvelable, EEG-Umlage, qui s’élève à 35,30 €/MWhen 201119. Mentionnons qu’il existe jusqu’au 28 février 2013 un mécanisme par lequel le prix de vente du gestionnaire de réseau de transport est limité entre -150€/MWh et -350€/MWh lors de circonstances particulières. Nous renvoyons le lecteur à l’AugslMechAV afin de prendre connaissance des conditions fort spécifiques attachées à ce mécanisme20.

17. Afin de clarifier quelque peu la structure actuelle, il est bon de donner un exemple quantitatif. Nous reprendrons la situation qui a permis d’établir le tarif d’achat de 2010.

16 Voy. AugslMechV, §2, (2).

17 Voy. Section 4, §34 de l’EEG. Cet article a été amendé par l’AugslMechV. La brochure du ministère fédéral de l’environnement, précédemment citée explique que le coût de l’électricité EEG est reporté vers tous les fournisseurs de façon proportionnelle [à leurs livraisons]. Voy. également J.

DIEKMANN, “Economic Analysis and Evaluation of the Effects of the Renewable Energy Act”, DIW, Février 2008, Berlin, p. 13. Cette étude détaille que cette électricité EEG était vendue en tant qu’électricité baseload.

18 Des exemples pour ces tarifs d’achat ont été donnés pour l’éolien en 2010. Pour avoir la liste exhaustive de ces tarifs d’achat, voyez Vergütungssätze und Degressionsbeispiele nach dem neuen Erneuerbare-Energien-Gesetz (EEG) vom 31 Oktober 2008 mit Änderungen vom 11 August 2010, pp.

10-11, http://www.erneuerbare-

energien.de/files/pdfs/allgemein/application/pdf/eeg_2009_verguetungsdegression_bf.pdf http://www.germanenergyblog.de/?page_id=965, visité le 7 avril 2011.

19 En 2010, le montant était de 20,47 €/MWh. Certains consommateurs importants sont partiellement exemptés de cette taxe.

20 Voy. les articles §8 et §9 de AugslMechAV. Citons comme conditions que le régulateur fédéral allemand doit donner son accord pour que le gestionnaire de réseau de transport applique cet article et qu’un appel à des enchères secondaires doit être émis en cas de prix négatifs sur le marché spot.

Cette procédure a été introduite avec l’AugslMechAV, qui elle-même est d’application depuis le 1er janvier 2011 dans sa dernière version, et depuis le 27 février 2010 pour la première version de ce décret.

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18. Nous commençons par détailler les coûts. La production renouvelable pour l’exercice 2010 a été budgétée à 90.231.000 MWh ou 90,23 TWh. Le montant moyen du tarif d’achat pour toutes les technologies s’élève à 140,38 €/MWh. De ce montant, il faut déduire les coûts évités sur le réseau21. En effet, du fait de la production locale d’électricité, celle-ci peut être consommée localement et ne doit pas transiter par le réseau de transport. Dès lors, des coûts d’utilisation du réseau de transport sont évités pour le gestionnaire de réseau de distribution. Ceux-ci s’élèvent, au budget 2010, en moyenne à 3,70 €/MWh, soit un total d’environ 333,85 millions d’euros. Ce montant est perçu par le gestionnaire de réseau de distribution, car il est intégré dans ses tarifs, et devrait revenir au gestionnaire de réseau de transport.

19. Finalement, il faut ajouter les coûts pour l’équilibrage du réseau et la mise sur le marché de l’électricité22 : 384,50 millions d’euros. Le montant total net budgété à verser aux producteurs d’électricité renouvelable par le gestionnaire de réseau de transport revient à (140,38-3,70) x 90.231.000 + 384.500.000 = 12.717,84 millions d’euros23.

20. L’électricité d’origine renouvelable, une fois produite, va être injectée sur le réseau de distribution, ou de transport, et achetée par les gestionnaires de réseau de distribution ou de transport aux producteurs d’électricité renouvelable. Ensuite, les gestionnaires de réseau de transport achètent l’électricité aux gestionnaires de réseau de distribution, si celle-ci a été injectée sur le réseau de distribution.

21. Les gestionnaires de réseau de transport disposent de deux sources de revenus. La première correspond au produit de la vente de l’énergie sur le marché intraday et day ahead de l’électricité sur EEX. Le prix moyen de vente sur EEX a été budgété à 53,65 €/MWh. Les revenus issus de cette vente sont donc : 53,65 x 90.231.000 = 4.482,42 millions d’euros.

22. La deuxième source de revenus correspond aux montants perçus par l’EEG-umlage.

Certains grands consommateurs privilégiés ne doivent payer que 0,5 €/MWh24. Ceux-ci

21 Voy. Section 4 , §35, (2) de la loi EEG.

22 Profilservicekosten und Handelsanbindung.

23 Nous reprenons le chiffre utilisé pour le calcul de la taxe EEG. En effectuant le calcul repris ici, l’on obtient 12.717,27 millions d’euros. Il s’agit d’une erreur d’arrondis car l’on ne connaît pas plus précisément les quantités d’électricité EEG produite ainsi que les coûts évités par les GRD pour l’utilisation du réseau de transport.

24 Voy. http://www.erneuerbare-energien.de/inhalt/2675/ et

http://www.bmu.de/files/pdfs/allgemein/application/pdf/info_anwendung_eeg.pdf pour davantage d’informations à ce sujet. Il s’agit de clients dont le coût de l’électricité représente plus de 20% de la valeur ajoutée brute, et dont la consommation d’électricité dépasse 100 GWh. Voy. aussi Section 4,

§40-§44 de la loi EEG.

(9)

avaient une consommation budgétée de 67.886.310 MWh ou 67,89 TWh en 2010, et contribuent donc à hauteur de 33,94 millions d’euros au compte EEG. Les autres consommateurs finaux paient quant à eux le tarif plein. Ils avaient une consommation budgétée de 400.595.002 MWh ou 400,60 TWh en 2010.

23. Ils doivent donc verser 12.717,84 millions d’euros – 4.482,42 millions d’euros - 33,94 millions d’euros = 8.201,47 millions d’euros. Ceci donne une taxe EEG de 8.201,47 millions d’euros / 400.595.002 MWh = 20,47 €/MWh afin d’équilibrer le budget.

24. Il est important de souligner que le budget n’est pas nécessairement à l’équilibre en fin d’exercice. Ainsi, la taxe EEG de 2011 a été augmentée afin de corriger le manque à gagner qu’ont dû supporter les gestionnaires de réseau de transport du fait d’une production renouvelable plus importante que prévu en 2010.

25. Terminons en ajoutant qu’un mécanisme de compensation entre les différents GRTs doit compléter cette description. En effet, les lieux de production électrique d’origine renouvelable ne correspondent pas nécessairement aux endroits de consommation. Dès lors, un mécanisme de partage des coûts et des revenus entre les quatre GRTs allemands a été instauré. Chaque GRT perçoit la taxe EEG en fonction de la consommation sur son territoire. Si la consommation est moindre que la production sur un territoire donné (par exemple au Nord de l’Allemagne), le GRT sur le territoire duquel il est davantage consommé que produit (par exemple au Sud que l’Allemagne) reversera une partie des revenus de la taxe EEG à ce premier GRT.

26. Le schéma qui suit donne un aperçu des transferts financiers et des transferts de propriété lors de la production d’origine renouvelable subsidiée par le tarif d’achat prévu dans la loi EEG. Il existe d’autres alternatives aux transferts représentés, par exemple, celle où le producteur vend directement l’électricité à une tierce partie. Les unités de production peuvent également être connectées au réseau de transmission.

27. Ce schéma-ci est donc extrêmement simplifié, puisqu’il repose sur les hypothèses suivantes:

- Le producteur d’électricité renouvelable ne revend pas directement son électricité à un fournisseur ou sur EEX, mais encaisse le tarif d’achat (il n’utilise pas le opt-out) ;

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- L’électricité renouvelable transite par les GRDs, alors qu’elle peut être directement injectée sur le réseau des GRTs dans certains cas ;

- L’on passe sous silence le mécanisme d’équilibrage entre les différents GRTs, qui, rappelons-le, sert à compenser les pertes qu’engendrent les GRTs sur les territoires desquels les subsides à la production d’électricité renouvelable ne sont pas compensés par la taxe EEG à cause d’une consommation trop faible;

- Finalement, les fournisseurs disposent d’autres sources d’approvisionnement que l’électricité renouvelable disponible sur EEX. Les flèches intermittentes représentent cette électricité grise, dont l’origine n’est pas détaillée.

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€4.482,42 millions

90,23 TWh

€12.717,84 millions 90,23 TWh €4.482,42 millions

€8.235,42 millions 90,23 TWh

€-333,85 millions coûts de réseau évités

€13.051,69 millions * 90,23 TWh €8.235,42 millions €33,94 millions

67,89 TWh

400,60 TWh

* coûts pour l’équilibrage du réseau et la mise sur le marché de l’électricité (frais des GRDs) inclus €8.201,47 millions Transferts de propriété :

Transferts financiers :

Producteurs

GRDs

GRTs EEX

Compte EEG

Fournisseurs

ur

Consommateurs privilégiés

Autres

consommateurs

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I.2. Occurrence des prix négatifs

28. Cette section donne un aperçu de l’importance des prix négatifs. Elle détaille l’amplitude de ces prix négatifs, ainsi que leur durée. Soulignons que l’on peut prendre les prix intraday ou les prix day-ahead sur le marché allemand. Sur le marché intraday, il n’existe pas de prix unique par heure, c’est-à-dire que différentes parties peuvent acheter de l’électricité à un prix différent lors d’une même heure. Ceci n’est pas possible sur le marché day-ahead, où un prix unique est déterminé pour chaque heure un jour à l’avance. Nous nous concentrerons sur les prix day-ahead, conformément aux autres études que nous avons pu lire sur le sujet.

29. D’un point de vue descriptif, nous pouvons reprendre pour la période couvrant les prix affichés entre le 1er septembre 2008 et le 31 décembre 2009 l’analyse de GENOESE et al25. Les auteurs expliquent que durant cette période, il y eut un total de 86 heures sur EEX affichant des prix négatifs. Les prix sont négatifs exclusivement lors des périodes creuses : entre 20h00 et 8h00 en semaine, le week-end et les jours fériés, c’est-à-dire lorsque la demande est plus faible.

30. En ce qui concerne la durée de ces prix négatifs, elle varie d’une heure, jusqu’à dix heures, ce que l’on a pu observer pendant la période de Noël en 2009. La Figure 2 reproduit le prix des 86 heures où ceux-ci sont négatifs dans un ordre croissant. L’on constate que pour environ un tiers de ces mesures, les prix négatifs sont compris entre -0,01 €/MWh et - 0,99 €/MWh.

31. Pour ce qui est des volumes en 2009, la moyenne des volumes échangés entre minuit et 9h du matin s’élève à 14,55 GWh par heure pour toute l’année, et l’écart type est de 1,93 GWh. Les volumes lorsque les prix furent négatifs étaient en moyenne de 14,30 GWh par heure le 18 janvier 2009, de 12,80 GWh par heure le 8 mars 2009, de 12,11 GWh par heure le 4 mai 2009, et de 17,50 GWh le 26 décembre 2009. Lorsque l’on compare ces moyennes aux volumes lors des heures suivant et précédant ces prix négatifs, l’on ne constate pas de déviation notable lors des heures où les prix sont négatifs.

25 Fabio GENOESE, Massimo GENOESE et Martin WIETSCHEL, o.c., pp. 2-3.

(13)

Figure 2: Distribution des heures avec des prix négatifs. Source : GENOESE et al.

32. En 2010, des prix négatifs se sont produits pendant 12 heures. Ils ont tous eu lieu pendant la nuit, entre 1 heure et 8 heure du matin, hormis à deux reprises, le 16 mai 2010, entre 13h et 16h, où les prix ont atteint -0.03 €/MWh, et -0.04 €/MWh. Ces prix négatifs s’étendent sur des périodes de deux à trois heures : 2 heures le 10 janvier 2010, 3 heures le 1er mars 2010, 3 heures le 16 mai 2010 (2 heures avec des prix négatifs), 3 heures le 13 juin 2010, 2 heures le 12 décembre 2010. L’amplitude des prix négatifs est aussi bien moindre en 2010 qu’en 2009. Alors que les prix ont atteint -500,02 €/MWh le 4 octobre 2009, le prix le plus bas indiqué en 2010 s’élève « seulement » à -20,45 €/MWh le 12 décembre 2010, et sur les 12 heures négatives, seules 4 affichent des prix inférieurs à -3 €/MWh.

33. En ce qui concerne les volumes en 2010, la moyenne des volumes échangés entre minuit et 9h du matin s’élève à 20,99 GWh par heure. Les volumes échangés lors de la survenance des prix négatifs ont atteint : 21,38 GWh par heure le 10 janvier 2010, 29,59 GWh par heure le 1er mars 2010, 23,23 GWh par heure le 16 juin 2010 et 25,96 GWh par heure le 12 décembre 2010. Nous pouvons en déduire que les volumes d’échange à ces heures-là ne présentent rien d’excessif, et restent à moins d’une déviation standard de la moyenne. La déviation standard de l’échantillon de 2010 s’élève à 4,12 GWh.

34. Entre le 1er janvier 2011 et le 9 mai 2011, il y eut 8 occurrences de prix négatifs, soit une légère hausse proportionnellement par rapport à 2010. La durée des prix négatifs s’est aussi quelque peu allongée. L’on constate ainsi que le 1er janvier 2011 et le 5 février 2011, des prix négatifs se sont prolongés pendant des périodes de 4 heures (avec uniquement 3 occurrences le 5 février), voire plus longue encore, si l’on retient le prix de -36,82 €/MWh du

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4 février 2011 entre 23h et minuit. L’amplitude des prix négatifs a aussi augmenté, avec seulement trois prix se situant entre -1,00 €/MWh et 0,00 €/MWh. Le prix minimal atteint sur cette période s’élève à -36,82 €/MWh.

35. Les prix deviennent négatifs lorsque la charge résiduelle, c’est-à-dire la charge totale diminuée de la production d’électricité d’origine renouvelable (essentiellement d’origine éolienne), est faible. Dès lors, la possibilité de limiter davantage la production est réduite, puisque les unités en fonctionnement sont des unités de base peu flexibles dont il est coûteux d’interrompre la production pour la reprendre peu après. Bref, dans de telles circonstances, la flexibilité du système électrique, c’est-à-dire sa capacité à couvrir une demande fluctuante, est faible, puisqu’il est plus complexe de faire face à une diminution additionnelle de la demande. La flexibilité du système électrique dépend également du marché des réserves (négatives ou positives) de production électrique vu que ce marché requiert une certaine capacité de production en fonctionnement. Ce marché est responsable de la sécurité du système électrique en temps réel.

36. Lorsque la production d’électricité est sensiblement supérieure à la demande et qu’il est coûteux de réduire la production, nous avons vu que les prix négatifs permettent d’augmenter cette demande et donc de soulager cette situation de déséquilibre. Cependant, lorsque le déséquilibre persiste, la partie responsable de l’équilibrage du réseau, à savoir le gestionnaire de réseau de transport, fera appel aux capacités de réserve – c’est-à-dire qu’il va diminuer la production – afin d’équilibrer demande et production dans le but de garantir la sécurité du système.

37. Clôturons cette section en indiquant que les prix négatifs ne se produisent pas uniquement en Allemagne, mais également, par exemple, en Ontario26, au Texas27, au Danemark28, en Tasmanie29, et en Irlande30.

26 Par exemple, entre le 24 mars 2009 et le 19 avril 2009. Voy.

http://amherstislandwindinfo.com/ampco-negative-pricing-20090403.pdf et http://www.cleanairalliance.org/node/696, visités le 7 avril 2011.

27 I. HOROWITZ, J. MOORE, C.K. WOO, J. ZARNIKAU, “Wind generation and zonal market price divergence : Evidence from Texas”, Energy Policy, 2011.

28 http://energinet.dk/SiteCollectionDocuments/Engelske%20dokumenter/El/Market%20report%20-

%20February%202011.pdf, visité le 12 avril 2011.

29 http://electricityweek.wordpress.com/2007/10/08/sunday-7-october-tas-starts-week-with-negative- price-of-minus-765mwh-in-morning-interval/, visité le 20 avril 2011.

30 http://synergymodule.wordpress.com/2010/10/08/electricity-price-oes-negative/ et http://greenmonk.net/friday-green-numbers-round-up-11052010/, visités le 20 avril 2011.

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II CAUSES DE CES PRIX NÉGATIFS

38. Cette section aborde la question de savoir pourquoi un producteur accepte de vendre de l’électricité à un prix négatif. Comme l’écrivent Cyriel de JONG et Michael SEWALT, l’occurrence de prix négatifs signifie que la destruction de la commodité est plus rentable que sa création : l’électricité est considérée comme un « déchet »31.

39. Trois aspects méritent d’être analysés. Le premier concerne la production d’électricité d’origine renouvelable, le second se concentre sur la production d’électricité d’origine non renouvelable, le troisième aspect a trait aux capacités de réserve.

40. Pour ce qui est du producteur d’électricité d’origine renouvelable, celui-ci dispose de deux sources de revenus mutuellement exclusives. La première vient de la vente de l’électricité, la seconde vient du tarif d’achat, payé par le gestionnaire du réseau de transport. Le producteur a le choix, au début de chaque mois, de vendre tout ou une partie de sa production à une tierce partie ou au gestionnaire de réseau de distribution ou de transport au tarif d’achat fixe32. Ces tarifs dépendent de la technologie utilisée et de la puissance de l’installation.

41. En d’autres termes, même lorsque les prix sont négatifs, il est préférable pour le producteur d’électricité d’origine renouvelable de continuer à produire s’il a choisi de vendre l’électricité au tarif d’achat, étant donné que le gestionnaire de réseau de distribution ou de transport est obligé de la lui racheter. En d’autres termes, le prix de marché de l’électricité n’a pas d’influence sur le profit du producteur d’électricité d’origine renouvelable dans le cas d’un système de tarif d’achat33.

42. Le Tableau 1 reprend les statistiques de la production éolienne en Allemagne lors des cinq dernières années. Nous pouvons constater que celle-ci est de loin la source d’électricité intermittente la plus courante pour le marché allemand. Étant donné que les

31 C. de JONG et M. SEWALT, “Negative Prices in Electricity Markets”, Commodities Now, Juin 2003, p. 76.

32 La loi EEG accorde en quelque sorte une option put au producteur d’électricité renouvelable dans le sens où il se voit garanti un montant minimum pour la vente de son électricité. Voy. le §17 de la loi EEG qui explique les modalités de la vente directe par le producteur d’électricité d’origine renouvelable.

33 La situation est différente dans le cas de « prime d’achat » (feed-in premium), où un subside est accordé au producteur d’électricité renouvelable, alors que celui-ci reste propriétaire de l’électricité produite. Cette dernière situation s’apparente au système de certificats verts en vigueur en Belgique.

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panneaux photovoltaïques ne produisent que peu d’électricité lors des heures creuses (week-end non compris), c’est-à-dire lorsque la demande résiduelle est faible, l’on peut en conclure que l’éolien est un facteur important derrière les prix négatifs. Ce tableau permet également de constater le rôle encore marginal joué par l’éolien off-shore.

Tableau 1: Production d'électricité en Allemagne par des sources renouvelables intermittentes.

Sources : AGEB34, BEE35, BMU36, DIW37, VDEW38.

2006 2007 2008 2009 2010

Éolien On-shore (GWh) 30710 39500 40300 38600 37300

Éolien Off-shore (GWh) 38 166

Capacité éolienne (MW) 20622 22247 23897 25877 27214

Photovoltaïque (GWh) 2220 3500 4300 6600 12000

Capacité photovoltaïque (MW) 2899 4170 5979 9785 16914

43. En ce qui concerne les producteurs d’électricité d’origine non renouvelable, ils continuent de produire de l’électricité malgré des prix négatifs non plus pour des raisons de revenus, mais plutôt pour des raisons de coûts. En effet, les coûts pour interrompre la production pendant une courte période seraient supérieurs aux pertes encourues en subsidiant la consommation d’électricité.

44. En d’autres termes, ces producteurs sont disposés à vendre à perte leur électricité afin d’éviter de diminuer et de ré-augmenter la puissance de leur installation. La Figure 3 reprend les coûts de démarrage de différents centrales39.

34 Arbeitsgemeinschaft Energiebilanzen : Groupe de travail sur les bilans énergétiques.

35 Bundesverband Erneuerbare Energie : Association fédérale pour l'énergie renouvelable.

36 Bundesministerium für Umwelt, Naturschutz und Reaktorsicherheit : Ministère fédéral de l'Environnement, Conservation de la Nature et de Sûreté Nucléaire.

37 Deutsches Institut für Wirtschaftsforschung : Institut Allemand pour la Recherche Économique.

38 Verband der Elektrizitätswirtschaft : Association Allemande des Électriciens.

39 Il s’agit d’un démarrage à chaud (moins de 8 heures d’inactivité), puisque le coût d’un démarrage à froid (plus de 72 heures d’inactivité) est bien plus élevé selon un rapport de London Economics. Voy.

“ Structure and performance of six wholesale electricity markets in 2003, 2004 and 2005 – Appendix II”, p. 10, http://ec.europa.eu/competition/sectors/energy/inquiry/electricity_final_appendix2.pdf. Ces coûts sont utilisés dans les modèles du « Wilmar planning tool ».

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Figure 3: Coût de démarrage de différentes centrales. Source : DENNY et al.

45. Bref, pour les producteurs d’électricité d’origine non renouvelable, le coût d’opportunité d’arrêter la production est plus élevé que celui de vendre de l’électricité à un prix négatif pendant de courtes périodes. Ceci se vérifie spécialement pour les unités baseload, dont les coûts variables de production sont faibles et la flexibilité réduite. En Allemagne, il s’agit des centrales nucléaires et des centrales fonctionnant au lignite.

46. L’on constate cependant des prix négatifs pouvant atteindre -500,02 € / MWh (par exemple, le 4 octobre 2009 à 2h). Comme le reprend NICOLOSI, certains acteurs de marché estiment que des prix inférieurs à -100 €/MWh sont fondamentalement inexplicables40.

47. Le troisième point que nous souhaitons aborder concerne les capacités de réserve.

Dans le système ENTSO-E, il existe trois capacités de réserve, à savoir une réserve primaire, secondaire et tertiaire, chacune avec ses propres caractéristiques (temps de réaction, gestionnaires de réseau responsables).

48. En Allemagne, les réserves primaires et secondaires sont mises aux enchères une fois par mois, la réserve tertiaire l’est quotidiennement41. Le gestionnaire de réseau rémunère la capacité pendant la durée contractuelle, et l’énergie lorsque celle-ci est appelée (ou non appelée dans le cas de réserves négatives).

40 NICOLOSI, o.c., p. 7267 et BundesNetzAgentur,

http://www.bundesnetzagentur.de/cae/servlet/contentblob/152066/publicationFile/6190/Workshop150 32010pdf.pdf, p. 11, visité le 11 avril 2011.

41 Voy. KULeuven et Tractebel Engineering, “Study of the interactions and dependencies of balancing markets, intraday trade and automatically activated reserves”, February 2009, p. 20 pour un tableau comparatif des délais et rémunérations dans les autres pays du système ENTSO-E.

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49. Outre le fait qu’il peut se révéler plus coûteux pour les producteurs d’arrêter / démarrer ses centrales produisant de l’électricité d’origine non renouvelable, celui-ci souhaitera également laisser tourner ses centrales s’il s’est engagé à fournir une capacité de réserve. En effet, étant donné le temps de réponse fort court (de l’ordre de la seconde pour la réserve primaire, et de maximum 5 minutes pour la réserve secondaire), le producteur doit maintenir ses centrales en activité.

50. Les pertes engendrées par la vente de l’électricité lorsque les prix sont négatifs pourraient être intégrées au coût de la capacité, et seraient donc considérées comme un coût d’opportunité de cette capacité de réserve. Le manque à gagner dû à ces prix négatifs pourrait donc être inclus dans l’offre de services du producteur, et serait à son tour répercuté dans le coût du réseau42. Bien entendu, dans un marché libéralisé, rien n’assure que le producteur puisse répercuter effectivement ce manque à gagner dans le prix du réseau. En effet, la façon dont les tarifs du gestionnaire de réseau seraient modifiés suite à des prix négatifs dépend du cadre régulatoire, des offres de concurrents producteurs potentiels, et de la marge de négociation du gestionnaire de réseau.

51. Étant donné le temps considérable (environ 15 minutes) alloué aux réserves tertiaires, celles-ci ne nécessitent pas de tourner en permanence (contrairement aux réserves primaires et secondaires), et donc ne verront pas leur prix augmenter suite à la possibilité d’occurrence de prix négatifs.

42 Voy. Fabio GENOESE, Massimo GENOESE et Martin WIETSCHEL, o.c., p. 4. Les auteurs soulignent que ce coût d’opportunité sera considéré comme une prime de risque pour les opérateurs.

Ils ont pu constater une augmentation du prix de la capacité de réserve secondaire négative (capacity payment) depuis l’introduction des prix négatifs en Allemagne. D’un autre côté, le prix de l’énergie (energy payment) pour l’équilibrage du réseau lorsque la demande est trop faible a fort diminué, et est même devenu négatif à partir du 1er janvier 2009. Dès lors, l’impact des prix négatifs sur le prix de la réserve secondaire n’est pas très clair.

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III CONSÉQUENCES

52. Au-delà de l’impact des prix négatifs sur le prix des capacités de réserve, l’on peut s’interroger sur les conséquences de ces prix sur le parc de centrales.

53. Comme l’explique NICOLOSI, l’augmentation de la production renouvelable intermittente, qui reçoit un ordre préférentiel dans le merit-order du fait de son faible coût marginal et de l’obligation légale d’accès prioritaire au réseau décrite au §8, (1)43 de la loi EEG précitée, conduit, dans le long terme, à une réduction de l’utilisation des centrales conventionnelles. Dès lors, le nombre de centrales baseload devra diminuer, puisqu’elles n’ont plus la possibilité de fonctionner pendant de nombreuses heures. Ce phénomène est repris à la Figure 4.

54. Les prix négatifs présentent de nombreux avantages :

- ils encouragent les producteurs à équilibrer l’offre et la demande, étant donné que ces prix négatifs traduisent justement un déséquilibre entre cette offre et cette demande 44 ;

- ils permettent de valoriser la flexibilité du parc de centrales ;

- ils permettent de valoriser les systèmes de stockage d’électricité ;

- ils offrent davantage d’information sur les coûts d’opportunité d’arrêt et de démarrage d’une centrale.

43 “Netzbetreiber sind vorbehaltlich des § 11 verpflichtet, den gesamten angebotenen Strom aus Erneuerbaren Energien und aus Grubengas unverzüglich vorrangig abzunehmen, zu übertragen und zu verteilen.”

44 http://www.e-pages.dk/energinet/126/25, visité le 7 avril 2011.

(20)

Figure 4: Adaptation de parc de centrales électriques suite à l'augmentation de la production électrique d'origine renouvelable. Source : NICOLOSI.

(21)

IV IMPACT SUR LA COURBE D’OFFRE

55. Le merit order représente l’empilement des centrales en fonction de leurs coûts marginaux. La production des centrales affichant le coût marginal le plus faible vient en premier lieu. Par ailleurs, en compétition parfaite, l’offre est représentée par la courbe des coûts marginaux.

56. Cependant, nous avons pu voir que lorsque la production électrique d’origine renouvelable devient conséquente, la courbe d’offre peut devenir négative, comme le montre la Figure 5.

Figure 5: Courbe d'offre de l'électricité sur EEX entre 4h et 5h le 28 juin 2009 sur le marché day- ahead.

57. À partir du moment où la demande d’électricité est faible et la production d’électricité d’origine renouvelable est forte, l’offre cesse de se baser uniquement sur les coûts marginaux mais prend également en compte les coûts d’opportunité d’une diminution de la production de certaines unités must run, telles que les éoliennes et les centrales nucléaires.

Comme l’expliquent ANDOR et al., il faut considérer ces coûts d’opportunité, qu’ils appellent

« coûts marginaux intertemporels de production de court terme », car ils peuvent être négatifs pour certaines centrales dont les coûts de démarrage sont conséquents.

(22)

58. La Figure 6 représente l’empilement des centrales. L’ordre d’empilement des centrales suit leur coût marginal de production et est le suivant : renouvelable, centrales nucléaires, centrales au lignite et au charbon, centrales au gaz45. En temps normal, la demande est suffisamment importante pour que toutes les capacités baseload tournent à un régime suffisant. Cependant, lorsque la demande est trop faible, la production des centrales nucléaires est maintenue grâce à des prix négatifs qui ont pour objectif d’augmenter la demande.

59. Dans ce cas de figure, il faut tenir compte du coût d’opportunité de production (ou

« coût marginal intertemporel de production de court terme »). Les centrales renouvelables, du fait de le priorité d’accès au réseau, restent en première ligne dans le merit order. Suivent dans le merit order les centrales nucléaires, dont le coût marginal intertemporel de production de court terme est effectivement négatif . Ensuite viennent les centrales au charbon, dont la production est parfois vendue à prix négatifs, et encore après, c’est au tour des centrales au gaz naturel. En d’autres termes, l’offre est une courbe dynamique, qui ne dépend pas uniquement de l’état instantané du parc de production, mais également de la demande à un moment précis.

45 Le renouvelable reçoit la priorité d’accès au réseau grâce à la loi EEG en Allemagne (voy. Section 1, §8, (1) de la loi EEG), même si les coûts marginaux de ces énergies renouvelables sont supérieurs à d’autres technologies. La biomasse en est un très bon exemple. Nous n’avons cependant pas représenté les coûts marginaux de la biomasse sur la Figure 6. Néanmoins, si ceux-ci devaient être représentés, ils interviendraient au début du merit-order, et seraient supérieurs à ceux des centrales baseload. Voy. également la Directive 2009/28/CE du 23 avril 2009, article 16 §2c :

« les États membres font en sorte que, lorsqu’ils appellent les installations de production d’électricité, les gestionnaires de réseau de transport donnent la priorité à celles qui utilisent des sources d’énergie renouvelables, dans la mesure où la gestion en toute sécurité du réseau national d’électricité le permet et sur la base de critères transparents et non discriminatoires. Les États membres veillent à ce que les mesures concrètes appropriées concernant le réseau et le marché soient prises pour minimiser l’effacement de l’électricité produite à partir de sources d’énergie renouvelables. Si des mesures significatives sont prises pour effacer les sources d’énergie renouvelables en vue de garantir la sécurité du réseau national d’électricité ainsi que la sécurité d’approvisionnement énergétique, les États membres veillent à ce que les gestionnaires du réseau responsables rendent compte devant l’autorité nationale de régulation compétente de ces mesures et indiquent quelles mesures correctives ils entendent prendre afin d’empêcher toute réduction inappropriée. »

(23)

Figure 6: Offre en Allemagne. La courbe rouge correspond à une situation avec une faible demande et une forte production d’unités qui doivent produire (renouvelable, nucléaire, et centrales au charbon).

60. Une autre conséquence intéressante à analyser est l’impact de ces prix négatifs sur les prix à l’étranger, et plus spécifiquement sur Belpex. Les figures ci-dessous reprennent les prix de l’électricité lors de quelques dates clés.

-120 -100 -80 -60 -40 -20 0 20 40 60

0 10 20 30 40 50 60 70 80

Coût (€/MWh)

Production (GW)

Courbe d'offre résiduelle avec une demande résiduelle forte Courbe d'offre résiduelle avec une demande résiduelle faible

(24)

-600,00 -500,00 -400,00 -300,00 -200,00 -100,00 0,00 100,00 200,00

1 5 9 13 17 21 25 29 33 37 41 45 49 53 57 61 65 69

euros / MWh

heure

Prix du 3 au 5 octobre 2009

Belpex EEX

-40,00 -20,00 0,00 20,00 40,00 60,00 80,00 100,00 120,00

1 5 9 13 17 21 25 29 33 37 41 45 49 53 57 61 65 69

euros / MWh

heure

Prix du 12 au 14 décembre 2010

Belpex EEX

-30,00 -20,00 -10,00 0,00 10,00 20,00 30,00 40,00 50,00 60,00 70,00

1 5 9 13 17 21 25 29 33 37 41 45 49 53 57 61 65 69

euros / MWh

heure

Prix du 28 février au 2 mars 2010

Belpex EEX

-60,00 -40,00 -20,00 0,00 20,00 40,00 60,00 80,00 100,00

1 5 9 13 17 21 25 29 33 37 41 45 49 53 57 61 65 69

euros / MWh

Prix du 4 au 6 février 2011

Belpex EEX

(25)

61. L’on peut globalement constater deux types de situations. Le premier type correspond à une situation de convergence entre les prix sur EEX et Belpex. L’exemple du 28 février au 2 mars 2010 illustre parfaitement ce cas. En cas de prix négatifs en Allemagne, les prix sur Belpex sont limités à un prix minimum de 0 €/MWh. Le deuxième type de situation est celui où il n’existe pas de convergence entre ces deux prix. Le graphique reprenant les prix du 4 au 6 février reprend cette situation.

62. L’étude (F)110303-CDC-1045 relative à l’importante réduction de la capacité d’interconnexion les 4 et 5 février 2011 explique les raisons de cette absence de convergence des prix. Ces deux jours-là, les GRT de la région CWE (Central West Europe) ont réduit drastiquement leurs capacités d’interconnexion. La Belgique s’est ainsi retrouvée dépourvue de 96% de sa capacité d’interconnexion et a connu des prix supérieurs d’environ 9 € / MWh par rapport à ses voisins français et néerlandais.

63. L’étude explique que : « la réduction de capacité est probablement due à une production éolienne prévue élevée au Nord de l’Allemagne ». En effet, dans les deux zones avec de la capacité éolienne installée la plus élevée, la production prévue moyenne s’élevait à 18,3 GW, avec une pointe à 18,8 GW. Cependant, la production réelle n’a atteint que 17,3 GW, avec une pointe à 18,3 GW. Or, de tels niveaux de production effective (et non prévue) avaient déjà été atteints sans avoir entraîné une réduction de la capacité d’interconnexion.

Dès lors, la CREG dans cette étude (F)110303-CDC-1045 se demande si la réduction de la capacité d’interconnexion était justifiée et explique qu’elle va examiner la méthode de l’action coordonnée dans le cadre de la réduction de capacité.

64. Suite à cette baisse de 96% de la capacité d’interconnexion, l’algorithme gérant les réductions de capacité d’interconnexion est en phase de révision afin de mitiger les conséquences sur la capacité d’interconnexion disponible liées à une production renouvelable importante.

(26)

V CONCLUSION

65. La survenance de prix négatifs de l’électricité sur EEX est un phénomène récent et a été rendu possible à partir du 1er septembre 2008. Depuis lors et jusqu’au 9 mai 2011, l’on a pu dénombrer 106 heures affichant des prix négatifs sur le marché day-ahead d’EEX. Ces prix négatifs peuvent durer pendant plusieurs heures d’affilée. La période la plus longue enregistrée présentant des prix négatifs de façon continue s’élève à 10 heures.

66. Les prix négatifs peuvent atteindre des niveaux planchers importants, comme par exemple -500,02 €/MWh le 4 octobre 2009. En 2010 et 2011, les prix négatifs ont eu tendance à être moins importants (-20,45 €/MWh le 12 décembre 2010 et -36,82 €/MWh le 4 février 2011). En ce qui concerne les volumes échangés lors de ces périodes de prix négatifs, l’on ne constate pas de mouvements brusques par rapport aux périodes qui les précèdent ou les suivent. Les volumes échangés lors de ces périodes se situent en effet dans la moyenne.

67. L’Allemagne a mis sur pieds un système de tarifs d’achat de l’électricité d’origine renouvelable. La loi attribue un ordre préférentiel dans le merit order à cette électricité dans le sens où les gestionnaires de réseau de distribution ou de transport sont obligés d’acheter l’électricité produite à partir de ces sources renouvelables. Les gestionnaires de réseaux de transport revendent alors l’électricité sur la bourse EEX. La capacité éolienne constitue la source principale de source de cette électricité renouvelable en Allemagne, aussi bien en termes de capacité que de production. Cette production éolienne joue donc un rôle prépondérant dans l’apparition de ces prix négatifs.

68. Les prix de l’électricité peuvent devenir négatifs lorsque la charge résiduelle, c’est-à- dire la charge totale diminuée de la production d’électricité d’origine renouvelable (essentiellement d’origine éolienne), est faible.

69. Dans ce cas-là, la possibilité de limiter davantage la production est réduite et il devient parfois nécessaire de diminuer la production de centrales dites baseload.

Cependant, ces centrales coûtent cher à arrêter et redémarrer.

(27)

70. Pour cette raison, certains producteurs décident de continuer à produire de l’électricité par leurs centrales baseload et de la vendre à perte. Cela leur revient en effet moins cher que de suspendre la production. En ce qui concerne les producteurs d’électricité d’origine renouvelable, ils ne souffrent pas de ces prix négatifs étant donné qu’ils vendent leur électricité au tarif d’achat. Dès lors, il n’est pas étonnant de constater que les courbes d’offre sur les bourses EEX présentent des prix négatifs puisqu’elles prennent en compte le coût d’opportunité d’arrêt des centrales baseload.

71. L’augmentation de la capacité de production renouvelable a pour conséquence d’accroître les possibilités d’occurrence de prix négatifs et de diminuer la rentabilité des unités de production baseload. En effet, les unités baseload seront moins sollicitées et afficheront dès lors des coûts de production moyens supérieurs, et des revenus en baisse.

En outre, l’augmentation du parc d’unités renouvelables accroît le besoin en capacités de production flexible.



Pour la Commission de Régulation de l'Electricité et du Gaz

Guido Camps François Possemiers

Directeur Président du Comité de direction

(28)

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