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Le propriétaire du mur, si l auteur ne lui a cédé aucun droit, peut-il vendre une oeuvre?

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Academic year: 2022

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Michel vivant

Michel Vivant est juriste et enseignant spécialisé en droit de la propriété intellectuelle. Il a également écrit un article sur le street art.

L’équipe : Nous avons lu votre interview dans les Inrockuptibles à propos du statut juridique d’une oeuvre de street art. Comment et depuis quand vous êtes vous intéressé à la question du street art?

M. Vivant : Le juriste regarde les choses autour de lui, si il voit un dessin sur un mur il va se poser des questions. L’article n’a pas été un élément déclencheur mais c’était plutôt le fait de regarder autour de soi et de se dire “qu’est ce que cela implique ?”.

Le street art naît aux Etats Unis à la fin des années 60 et se répand en France dans les années 70-80, pour atteindre un pic à la fin des années 90.

A partir de quand a-t-on vraiment conscience que le street art peut constituer un problème juridique? Et à partir de quand peut-on constater la première apparition du terme “street art” dans le code pénal, le code civil ou dans des arrêtés ministériels en France?

Je ne sais pas, je pense que c’est la question de la création en conflit avec le propriétaire physique. Mais le dater précisément c’est difficile. Du point de vue de la création artistique il n’y a pas vraiment de problème spécifique en réalité.  En fait, le problème vient du fait que des gens vont réaliser cette création sur un support qui n’est pas le leur et pour lequel ils n’ont pas obtenu d’autorisation. Donc à partir de là il y a un conflit de droit. Au fond un graffiti pause déjà le même type de problème, et à la limite c’est la même chose quand c’est du street art même si c’est déjà plus coloré. En fait, il n’y a pas de frontière légale entre le formel et l’informel de l’art urbain du point de vue juridique. Et si on traite le street art différement du graffiti, c’est à ce moment là un traitement social plus que juridique.

J’ai lu que la mairie de Zurich restaurait les oeuvres d’un street artist zurichois. A-t-elle le droit de le faire sur des murs qui appartiennent au propriétaire? Ont-ils besoin d’une autorisation?

Le propriétaire est ravi d’avoir ça il ne va pas s’y opposer, et théoriquement il faut lui demander l’autorisation. Finalement le problème c’est toujours le conflit entre le statut du créateur et le statut du

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propriétaire du support que ce soit un mur ou autre. Si on choisit de restaurer, si le propriétaire, est d’accord c’est tant mieux.

Pensez-vous que le street art pose des problèmes nouveaux au juriste ou peut-on retrouver les mêmes implications juridiques dans d'autres domaines du droit?

Ce conflit dont on a parlé entre créateur et propriétaire du mur est un problème nouveau. Alors, cela existait déjà sous une autre forme, ce n’était pas vraiment du même ordre quand par exemple il faut un recours quand on estime qu’il est nécessaire de faire évoluer une oeuvre d’architecture. Cela s’est également posé quand il y a de la construction de zones architecturales, pour une sculpture qui est dans un lieu déterminé mais on veut repenser l’espace. Cela ferait disparaître la sculpture, et cela s’oppose au droit au respect de l’oeuvre. Normalement on ne doit pas y toucher. On a là déjà ce type de conflit entre celui qui a fait une création immatérielle, incorporelle et droit du corporel. La différence c’est que dans les exemple que je viens de donner, lorsque le propriétaire veut par exemple déplacer ou démolir la sculpture, il va porter atteinte à une oeuvre qui a été licitement faite. Tandis que là on est dans le cas d’une oeuvre qui est illicitement faite. Ce n’est pas la même situation mais c’est un rapport de force entre deux mêmes droits.

La dimension illégale de l'oeuvre, ampute-t-elle en partie l’artiste de ses droits d’auteur?

C’est très difficile de répondre, parce que dans l’abstrait, on peut dire que les droits de l’artiste existent toujours. Par exemple, supposez qu’il ait crée quelque chose sur un mur, des photos sont prises, il peut toujours contrôler ces photos. Cela n’empêchera pas par exemple que si le litige est porté devant un juge, le juge donnera la préférence au propriétaire des murs et acceptera qu’on repeigne. Si je m’arrête au premier point donc je vais dire non cela n’ampute pas ses droits car il peut toujours faire respecter son oeuvre à travers un jeu d’exploitation de photographies mais si vous prenez la deuxième partie de ma démonstration, oui cela ampute ses droits puisque le propriétaire pourra détruire l’oeuvre. Les droits naissent a priori de la même manière mais peuvent être paralysés ou réduits à néant si le juge décide de détruire l’oeuvre et de repeindre.

Le propriétaire du mur, si l’auteur ne lui a cédé aucun droit, peut-il vendre une oeuvre?

Là c’est délicat encore une fois, mais je pense qu’il ne peut pas. Il est évident qu’il peut vendre une partie du mur mais en revanche il ne peut pas disposer de la forme. Or ici la forme a été obtenue de manière illicite puisque comme nous l’avons dit précédemment celui qui l’a fait l’a fait sans droits. Même si les droits de l’autre sont amputés, lui ne peut pas exploiter les droits de l’autre à sa place. Il peut en fait se

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présenter devant un juge et dire je ne veux pas de ce dessins sur mon mur, je veux mon mur blanc. Mais en revanche s’il vend le support, il exploite quelque chose qu’il n’a pas le droit d’exploiter.

L’artiste pourrait-il engager une procédure du coup?

L’artiste pourrait effectivement engager une procédure. Il est évident que l’avocat du propriétaire pourrait créer la confusion en disant “vous ne pouvez revendiquer des droits sur cette oeuvre qui s’inscrit dans un cadre illicite”. Je ne suis pas juge mais il me semble que la réponse du juge pourrait être “il y a un problème de licité mais en toute hypothèse cela n’autorise pas à cette exploitation donc la poursuite de l’artiste est justifiée.” Mais je ne sais pas comment un juge pourrait dire il faut que je trouve une solution d’équilibre. Sûrement le propriétaire ne peut pas vendre  l’oeuvre donc l’artiste peut s’y opposer.

Je pense au Banksy qui a été volé en février 2013, qui avait été réalisé sur le mur d'un magasin londonien: on pense qu'une autorisation a été attribuée par le propriétaire de l'immeuble sur lequel il avait été peint. Est ce que cette autorisation s’inscrit dans un cadre légal?

Si le propriétaire du mur est d’accord pour ce qui est de l’aspect matériel il n’y a pas de problème mais celui qui veut vendre il faut qu’il ait l’autorisation de l’artiste.

Or, dans les articles que j’ai pu lire, il n’y a jamais eu d’autorisation de Banksy lui-même...

Oui c’est vrai. Mais là  ils ne sont plus en conflit : on veut vendre aux enchères une oeuvre décollée, on ne peut pas la vendre si on ne l’a pas acquise légitimement. L'ambiguïté c’est qu’en peinture on dit qu’il faut acheter la toile et la toile c’est la création artistique. Or ici le mur comme objet physique il faut l’autorisation du propriétaire du mur et le mur comme support de l’oeuvre dans la mesure ou c’est un support il faut l’autorisation de l’artiste, donc si on n’a pas les deux on est forcément dans une situation d’illicité.

Eux disaient qu’ils avaient un document qui prouvait de la légalité de la vente de cette oeuvre?

Dans un pays de copyright à mon avis il y a toujours une autonomie du copyright par rapport au support.

Les choses sont déjà différentes dans un pays copyright, on peut acquérir des droits de manière radicale dans un pays de droit d’auteur car il n’y a pas cette dimension de droit moral. Et cela suppose quand même au départ qu’il y ait un accord. Mais ici on est dans une situation ou ni le propriétaire ni l’artiste

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n’aient eu ces droits. Évidemment ils ont dû dire qu’ils avaient eu ces droits. Mais pour qu’ils les aient vraiment il aurait fallu qu’ils aient les autorisations des deux.

Peut-on parler de droits moraux des habitants du quartier, de la municipalité sur cette oeuvre? Peuvent-ils gagner s’ils engagent un procès contre l’association selon vous?

Non, si ils l’évoquent dans l’article des Inrocks c’est sûrement au sens courant. Les personnes ont du dire que cela enrichissait leur quartier. Mais c’est pas le droit moral au sens du droit d’auteur.

Donc même s’ils signent une pétition pour récupérer l’oeuvre, juridiquement ça n’aura pas de poids?

Non ils peuvent faire une pétition mais cela ne pèsera pas. Ce n’est pas du droit moral au sens technique.

Ça donne un cachet particulier au quartier c’est tout. A la limite il faudrait que l’association fasse valoir qu’elle représente les intérêts du quartier dans le droit français. Ils pourraient agir sur la base de l’article 1382 du code civil et dire il y a une faute qui soit rapportable à un préjudice, préjudice subit par qui? Il faudrait que l’association fasse valoir qu’elle représente les intérêts du quartier etc. Mais cela n’est pas du droit d’auteur de toute façon.

Il y a eu condamnation d'un anglais, qui aurait volé un Banksy en septembre 2012 (9 mois de prison avec sursis et 240 heures d'intérêt général) parce qu'il a cherché à le vendre sur e- bay. Pourquoi aucune condamnation pour l'Association? Qu'est-ce qui  change?

Le mot vol au sens strict suppose une chose corporelle: c’est celui qui détache le mur. Le vendre sur Ebay c’est tirer les conséquence du vol du support et exploiter l’oeuvre. En réalité on ne sait pas ce qui change, il faudrait savoir derrière s’il y a une poursuite.

Si par exemple un artiste fait une oeuvre dans le cadre d'une commande de la municipalité, qu'elle est démurée, peut-il alors prétendre à avoir des droits dessus?  

Il y a déjà des éléments de conflits dans le cas de Dubuffet, on veut détruire ou déplacer des statues, je crois que c’est la régie Renault. On veut déplacer ces totems très colorés, on veut les détruire ou les déplacer. La réponse théorique c’est non on ne peut pas le faire mais lorsqu’il s’agit d’aménager un espace, le juge peut dire oui mais attention vous avez des moyens plus légers en déplaçant les oeuvres.

Récemment il y a eu une affaire ou sur des considérations urbanistiques on a accepté la destruction d’une construction. Je comprends aussi bien la collectivité territoriale qui dit  on veut rénover tout cela que

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l’architecte qui dirait: la vision urbanistique est une chose la construction architecturale en est une autre et il faut protéger cette oeuvre. Tout cela ça montre que les gens ont une vision assez caricaturale du droit donnée par certains juriste: le droit n’est pas en fait noir ou blanc. C’est trouver le bon équilibre, sous réserve de la loi qui nous dit ceci est interdit ou permis. Donc a priori, pour revenir à la question, la municipalité n’aurait pas le droit .Mais ce n’est pas aussi simple, s’il y a un procès rien n’est sûr.

Que pensez-vous du nouveau positionnement de certaines mairies de la ville de Paris qui cherchent à conserver certaines oeuvres illicites, alors qu’elles appliquaient une politique de non tolérance depuis 2001?

C’est un problème de politique culturelle, le droit n’a rien à voir avec ça. Sauf si la mairie veut pérenniser cela et obtenir l’autorisation de propriétaires du mur. Elle peut dire nous on a ce projet, vous avez une oeuvre de street art sur votre mur, ne l’enlevez pas(moyennant une contre-partie financière). La mairie peut proposer d’en discuter. Le principe c’est que sauf règle d’ordre public, une chose interdite peut toujours être autorisée par le contrat. Le principe du contrat de licence c’est de permettre ce qui a priori ne serait pas permis. Ici ce ne serait pas de la licence puisque c’est la mairie qui a des droits. Ce qui est intéressant en fait ici c’est que se passerait-il si l’artiste veut porter atteinte à son oeuvre alors que la mairie veut la préserver? Car c’est un jeu qui se joue à trois. La mairie dit moi je veux le conserver car ça représente un état de création artistique, le propriétaire est d’accord et l’artiste dit finalement j’ai changé d’avis je ne veux plus.

Pensez-vous qu’il y a vraiment une évolution favorable aux street artists vis à vis des tribunaux? En 1999, la cour de cassation posait le principe selon lequel un artiste ne peut revendiquer de droit d’auteur sur une œuvre réalisée illégalement.

Évolution positive je ne sais pas, mais on peut très bien imaginer le même cas que pour les oeuvres d’architectures. au lieu de dire c’est interdit on peut toucher à rien, on va considérer l’architecture comme un lieu de vie et pas comme une oeuvre et on va en tirer les conséquences. Mais pour peu qu’il y ait une évolution culturelle qui permette de dire ici aussi ça change les cadres de vie, on peut le percevoir différemment. Très honnêtement je pense que là la subjectivité du juge jouera pour beaucoup: il y aurait quelque chose de la subjectivité du juge et de son appréciation de l’oeuvre qui interviendrait.

Le cadre culturel ferait évoluer le droit, qui n’est pas un monde clos. Le droit, moi je le vois comme un mécanisme de régulation de la vie sociale, forcément tout ce qui va porter sur cette vie sociale va en porter les conséquences sur la manière dont le droit va être pensé.

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L'acheteur doit-il avoir un document qui fait foi en matière d'originalité d'une oeuvre d'art qu'il viendrait d'acheter?

Je pense à un artiste JonOne de qui on a dupliqué 23 oeuvres, vendues 15 000 euros chacune: la maison de vente n’aurait-elle pourtant pas dû donner un document de certification?

Du point de vue du droit d’auteur la question se pose entre l’artiste et la création: droit de paternité. Est ce que ce tableau signé un tel ou même pas signé comme d’un tel est bien comme d’un tel? Sur le marché de l’art la question est celle de l’authenticité. L’affaire poussin d’il y a quelques décennies qui a duré des années car si c’est un poussin il y a telle cote si non c’est pas le même prix. Ce sont des questions d’authenticité mais pas sur le même plan. C’est pas une question de qualité artistique c’est savoir si ce que j’achète est ce que l’on me vend. La question est une question d’authentification mais par rapport à la nature convenue de l’objet; tandis que le reste est le rattachement à la personne de celle que l’on dit auteur.

Sur le marché de l’art on n’est pas obligé d’avoir un certificat mais on a intérêt à l’avoir pour connaître la valeur. on a plusieurs niveau de lecture pour poussin par exemple: attribué à Poussin , de Poussin, de l’atelier de Poussin.

Le prix n’est pas le même. En général ce qui sert pour tableau c’est la signature. Et là où cela devient intéressant c’est les peintre qui vont des toiles dites en brevet; je suis artiste et je décris une manière de peindre la toile comme je l’envisage, vous, vous suivez mes instructions. Ou ce que vous faites ne me satisfait pas, ou si cela me convient je signe un document qui montre que cette oeuvre est la mienne. La cour de Cassation dit que l’artiste ne peut pas se prétendre auteur de l’oeuvre en pareil cas de peinture à brevet: elle a une vision très traditionnelle de l’art.  

C’est finalement savoir si une personne peut être dite auteur de l’oeuvre ou pas: un élément d’authentification qui entre en jeu.

N’est-il pas problématique selon la juridiction française, d’exposer des oeuvres, pour des galeristes ou des musées, dont on n’est pas sûr de la provenance? (volées, non authentifiées par l’artiste…)

La galerie se rend coupable de recel si elle vend une oeuvre volée: le galeriste doit se demander si la toile qu’on lui a apporté n’a pas une origine douteuse.

Non authentification par l’artiste c’est différent, cela dépend comment il le présente: le galeriste ne peut pas dire c’est une peinture d’un tel s’il n’en est pas sûr. S’il l’annonce comme telle alors qu’elle ne l’est pas il engage sa responsabilité comme un expert qui trompe le public.

En principe les professionnels doivent faire filtre et ne pas exposer n’importe quoi. S’ils exposent quelque chose dont ils sont sûrs de la provenance ca ira.

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Il faudrait alors que la galerie fasse la distinction entre les oeuvres “attribuées à” et des oeuvres “de”?

En principe oui; mais si on est contemporain il n’y a pas besoin de faire cette distinction car l’artiste amène ses toiles. Et là le galeriste ne doit pas obligatoirement vérifier que l’artiste ne lui raconte pas d’histoires.

Mais si on prend des artistes comme la famille Brueghel, c’était de l’industrie; il faut mettre si c’est Brueghel l’ancien, le jeune, l’atelier de Brueghel etc, pour éviter une tromperie sur la marchandise.

Lorsque l’oeuvre d’un artiste est exposée dans une galerie ou dans un musée ou achetée par un collectionneur, qu’en est-il de la propriété intellectuelle de l’artiste? Ont-ils le droit de l’utiliser comme bon leur semble?

La Propriété intellectuelle de l’artiste reste entière, évidemment.

Donc il aurait le droit de refuser que le collectionneur prête son oeuvre pour une exposition?

Il a le droit, oui, tout à fait. Il y a des rapports de force. J’avais fait une consultation pour la réunion des musées nationaux. Il y avait un musée américain (très connu) qui lorsqu’on prêtait des oeuvres pour des expositions temporaires, faisaient des photographies systématiques pour des catalogues. Mais vous ne pouvez photographier qu’avec l’autorisation de l’artiste, si on est plus de 70 ans après son décès, voire, si c’est plus ancien, qu’en respectant ce qui est stipulé dans le contrat avec celui-ci.

Si vous êtes propriétaire même à titre privé d’une toile vous ne pouvez photographier cette toile qu’à usage personnel, mais sans l’autorisation de l’auteur vous ne pouvez photographier cette oeuvre car sinon vous seriez contrefacteur.

Donc aucune diminution dans les droits de propriété intellectuelle

Y a-t-il, à votre connaissance, une loi internationale qui pourrait être détournée pour inscrire la disparition de l’oeuvre de Banksy dans un cadre légal?

Ce vol a eu lieu dans un cadre particulier: une entreprise américaine qui vole l'oeuvre à une municipalité anglaise. Et qui prétend le faire en toute légalité.

Il n’est pas facile d’avoir une loi internationale, surtout sur des sujets comme cela qui impliquent une vision très culturelle des choses. La question de la colorisation des films: les américains disent que les droits appartiennent à ceux qui ont investi dans le film, si ils veulent que cela se vendent mieux ils peuvent le faire. Les français disent que les droits sont au réalisateur, qui a choisi du noir et blanc pour une

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raison. A partir de ces oppositions il serait difficile de penser une loi internationale qui impliquerait le droit d’auteur...

Ensuite, si il y a eu effectivement vol de l’oeuvre, cela relève du droit anglais, cela s’est déroulé en Angleterre. Quelle est l’attitude des EUA par rapport à un fait délictueux qui a eu lieu en Angleterre, il faudrait consulter le droit pénal américain. Il y a deux strates de droit: l’endroit où le vol a eu lieu et l’endroit où on va vouloir exposer.

Donc en fait l’Etat américain pourrait mettre en avant le fait que l’événement ne s’est pas déroulé sur leur sol et donc qu’ils n’ont rien à dire à l’association qui a volé le Banksy?

Les américains pourraient dire un citoyen américain on n’accepte pas qu’il soit jugé à l’étranger. A mon avis, mais là encore une fois à priori, ce serait considéré au Royaume Uni comme du vol, sauf que comme cela s’est passé au Royaume Uni, la juridiction américaine n’est pas directement concernée. Un français qui vole un objet au Canada, on va dire c’est du ressort des Canadiens et de la justice canadienne. Pour qu’il y ait une compétence sur des faits à l’international, il faut quand même qu’il y ait des situations particulières et c’est par exemple le cas de la poursuite des actes de pédophilie commis à l’étranger: un français qui se rendrait coupable d’actes de pédophilie en Thaïlande, peut être poursuivit en France. Mais s’il vole quelque chose en Thaïlande c’est différent.

Maitre Pierre Lautier, avocat en propriété intellectuelle, a donné cette définition du street art: le Street art est "un art éphémère qui est attentatoire à des biens privatifs"

Qu’en pensez vous? Le définiriez-vous autrement ?

Je ne sais pas s’il y a une définition juridique du street art, le street art serait pour moi l’art de la rue. La définition donnée ici est intéressante parce qu’elle va au-delà de cette définition: ce phénomène social existe en tant qu’il y a le conflit de normes dont on a parlé. Moi en tant que juriste je dirais que c’est une bonne définition du phénomène, puisqu’au fond c’est un art qui est lié au fait qu’il y a toute cette problématique du droit.

Justement, en visitant des galeries nous nous sommes aperçu qu’il y avait des oeuvres dites de “street art” qui sont réalisées sur des toiles et qui sont cotées comme des oeuvres de street art…Du coup ça pose un problème majeur puisque dans la définition le street art implique le vandalisme, du moins à son origine…

Oui c’est intéressant. Mais cela n’implique pas de définition juridique. On pourrait dire en fait que le street art implique un certain type de formes. Donc quand je retrouve une de ces formes, je peux qualifier l’oeuvre de street art. Mais il n’y a pas de définition juridique.

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Mais si demain on fait des dessins d’une autre nature dans la rue, ici on investit les mots de significations particulières qui sont variables avec le temps. Je pense par exemple aux muralistes mexicains, des peintures murales qui sont très didactiques, c’est de l’art de rue. Mais pas au sens du street art. Et supposez qu’un jour fasse ces peintures là est ce qu’on lui dirait non cela ne peut pas être du street art parce que ce n’est pas dans l’esprit? Est ce qu’on peut tirer une définition d’un phénomène qui a lieu dans certains contextes culturels? Et si le street art se comprend par une contextualisation comment le comprenez vous quand vous le décontextualisez? En droit, le street art n’est pas une catégorie juridique.

Parler de "tag" plutôt que de “pochoir” ou “street art” a permis de condamner l'artiste Mystic en 1999 à une amende maximum pour dommage léger. En 2007, lors du procès Space Invader /C SA Automobile Peugeot, le tribunal de Grande Instance de Paris a déclaré qu’il fallait prendre en compte les modalités de formalisation de l’idée de l’articles (tag, peinture, collage, pochoir…)

Tout n’est qu’une question de dénomination.

Que pensez-vous de la condamnation de Mystic? Est ce que ça veut dire qu'un jeu de mots peut aider à placer le street art hors du droit?

Comme en droit le seul mot est le mot “oeuvre”: pour moi dès qu’il y a une forme originale certains diront que c’est une oeuvre. Mais de toutes façons tag, pochoir etc ce n’est pas dans le vocabulaire juridique.

Mais en revanche comme il y a dans le droit une part de rhétorique pour convaincre le juge, on n’utilise pas les mêmes mots pour défendre une thèse ou une autre. Graffiti, ça veut dire quoi? on peut avoir des graffitis plus élaborés que d’autres...

Le choix des mots relève d’une intention rhétorique pour montrer qu’il y a quelque chose à protéger mais ce n’est pas une catégorisation juridique.

Avant la question de la forme ne se posait pas, est-ce que du coup on peut dire qu’il y a une meilleure prise en compte des différentes formes de cet art?

Oui mais il y a aussi la question de la contextualisation selon moi. Sur ma maison à M**** des tags ont été peints et les autorités locales m’ont dit de porter plainte. Mais ce n’est pas la même chose si on avait porté atteinte au patrimoine. La création prend une place différente selon le contexte.

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