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Questions critiques au sujet de l accord institutionnel (InstA)

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Academic year: 2022

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Questions critiques au sujet de l’accord institutionnel (InstA)

1. En quoi l’accord institutionnel compromet-il le fédéralisme et la démocratie directe de la Suisse?

La Suisse est un État fédéral. Cela signifie que le pouvoir est réparti entre la Confédération, les cantons et les communes. Chaque niveau a ses propres missions et ses propres compé- tences. La Constitution fédérale définit de manière contraignante les missions qui relèvent de la Confédération et des cantons. De leur côté, les cantons définissent les compétences des communes situées sur leur territoire. Si l’on donne plus de poids à la législation euro- péenne qu’à notre propre législation, cela sape notre système étatique et menace fonda- mentalement notre système politique très performant.

2. Que signifie cet InstA pour nos instruments de démocratie directe (initiatives populaires/référendums)?

La démocratie directe vit grâce à des instruments tels que l’initiative populaire ou le référendum facultatif et obligatoire. Une adoption automatique du droit européen vide ces instruments de leur substance. Si la Suisse s’oppose à l’adoption de la législation, elle doit s’attendre à de sévères mesures de rétorsion et à devoir accepter en permanence des com- promis à l’égard de l’UE. La marge de manœuvre démocratique s’en trouve réduite.

Concrètement, cela veut dire que les citoyennes et les citoyens suisses auraient en princi- pe la possibilité de lancer des initiatives populaires et des référendums et de s’exprimer par suffrage à leur sujet. Mais, en fin de compte, ce sont les mécanismes définis dans l’accord institutionnel qui établissent clairement si une initiative populaire menée avec succès est compatible, ou pas, avec le cadre institutionnel ou si elle peut être mise en œuvre de cette manière.

Voici quelques exemples de référendums et d’initiatives populaires pouvant mener à des conflits:

• Initiative contre les pesticides*

• Initiative de limitation

• Référendum concernant la directive de l’UE sur les armes

• Initiative pour l’autodétermination

• Souveraineté alimentaire*

• Initiative de mise en œuvre

Version du 04.01.2021

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• Économie verte*

• Initiative contre l’immigration de masse

• Ecopop

• Traités internationaux soumis au peuple

• Initiative sur le renvoi

• Initiative pour la réduction du trafic

• Initiative des Alpes

(* Uniquement problématique en cas d’extension matérielle à d’autres accords (p. ex. traités de protection de l’environnement))

Voici des exemples d’initiatives qui ne seraient plus possibles sous cette forme, car elles contreviendraient par nature à des accords existants ou futurs:

• Thèse: violation potentielle de l’accord agricole avec l’UE. Pour améliorer les conditions de vie des animaux d’élevage, seule la viande d’animaux disposant d’assez d’espace en plein air pourrait être vendue en Suisse. Les initiants veulent interdire l’élevage industriel en Suisse et l’import de produits provenant d’élevage industriel.

• Thèse: violation potentielle de l’accord sur les transports terrestres. Pour renforcer la lutte contre le réchauffement climatique, seuls des camions ne causant aucune émission de CO2 (piles à combustible, propulsion électrique, etc.) pourraient circuler en Suisse. Les ini- tiants veulent interdire la mise en circulation de camions qui émettent du CO2, ainsi que la circulation de tels véhicules à l’intérieur de notre pays et leur transit à travers celui-ci.

• Thèse: violation potentielle du futur accord sur l’énergie. Pour renforcer la lutte contre le réchauffement climatique, la Suisse ne devrait produire et utiliser que du courant prove- nant de sources renouvelables. Les initiants veulent interdire la production d’électricité de sources fossiles en Suisse, tout comme l’import en Suisse de courant de ce même type de sources.

• Thèse: violation potentielle du futur accord sur l’énergie. La Suisse doit renforcer son en- gagement en faveur de la démocratie et des droits humains dans le monde. Aux yeux des initiants, la Suisse ne pourrait donc importer ou transformer que des matières premières (aliments, fibres végétales, minerais, vecteurs énergétiques) provenant de pays dont le gouvernement respecte les normes démocratiques ainsi que les standards reconnus inter- nationalement en matière d’environnement et de droits humains. Des exceptions devraient être possibles si aucune autre matière première n’est disponible. L’initiative cible en parti- culier le courant; par exemple, l’électricité provenant de l’UE à base de gaz naturel russe ne pourrait plus être importée en Suisse.

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3. Dans différents domaines, la Suisse se sert de l’instrument éprouvé des aides d’État. Sont-elles menacées par l’accord institutionnel?

Oui! En Suisse, il existe différentes aides d’État qui ont fait leurs preuves et qui, d’une manière générale, s’avèrent incontestables. On pense notamment aux banques cantonales qui appar- tiennent aux cantons et qui profitent encore en partie de garanties de l’État. Si l’InstA entre en vigueur, l’UE pourrait exiger que les banques cantonales soient privatisées.

Parmi les autres aides étatiques qui pourraient être remises en cause par l’UE, citons par exem- ple les promotions des ventes (et leur étendue) sur certains produits. Par rapport à l’UE, les den- rées alimentaires suisses répondent à des normes environnementales, sociales et de bien-être animal plus élevées. Et cela a un prix. Par le biais de la promotion des ventes, la Confédération soutient la production de fruits, de légumes, de viande et de produits laitiers locaux en sensibi- lisant la population aux normes de production plus élevées afin de créer une préférence pour les produits suisses et l’acceptation des différences de prix.

On retrouve aussi un autre exemple dans le domaine de la promotion du tourisme: en Suisse, de nombreuses entreprises touristiques appartiennent à l’État (communes). La promotion des régions touristiques pourrait être interprétée comme une aide d’État faussant le marché et, à l’avenir, subir des pressions de la part de l’UE.

C’est le cas également des programmes de développement régionaux, des subventions à l’im- plantation ou des pratiques cantonales en termes de fiscalité des entreprises, dans la mesure où l’UE pourrait les considérer comme du «dumping d’implantation» et donc pertinents en ma- tière de politique de la concurrence ou de politique de marché intérieur.

4. Que peut craindre la Suisse de l’adoption dynamique du droit européen?

L’adoption de fait automatique de la législation européenne menace le fédéralisme et le cœur même de la démocratie directe. La Suisse deviendrait ainsi le jouet de la juridiction européenne sans avoir son mot à dire.

De plus, il faut noter que la Suisse serait contrainte d’adopter des modifications et/ou des adaptations législatives même si une procédure est toujours en cours devant la cour d’arbitrage (et, par conséquent, même si la Suisse s’oppose à une telle adaptation). Et cela, dans un délai de quelques mois. Dans la plupart des cas, c’est la CJUE qui aura son mot à dire. Comme les dé- cisions de la CJUE peuvent prendre plusieurs mois, voire des années (et peuvent aussi être gui- dées politiquement), cette insécurité juridique crée une situation dans laquelle la Suisse serait obligée d’appliquer le droit européen alors que la CJUE n’a pas encore statué à ce sujet. Cette situation soulève de nombreuses questions et compromet la sécurité juridique et de planifica- tion pour les acteurs concernés – notamment celle des entreprises. L’absence de bases juridi- ques contraignantes à moyen et à long terme entraînera dans la pratique la multiplication des interprétations, des appréciations et des recommandations d’action tant qu’il ne sera pas établi clairement si le droit suisse ou européen s’applique. Dans ce cas, il n’existerait plus d’application uniforme du droit.

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5. Pourquoi la Suisse ne doit-elle pas accepter la CJUE comme instance suprême dans les procédures de règlement

des différends?

L’accord institutionnel prévoit qu’en cas de litige concernant l’interprétation ou l’application du droit européen, la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) doit impérativement être saisie.

C’est elle qui décide de la manière dont le droit de l’Union européenne doit être interprété, et son interprétation est contraignante pour le tribunal arbitral. De fait, la CJUE devient l’instan- ce décisionnaire en cas de litige. Par conséquent, un tribunal de l’UE se retrouverait compétent pour trancher un litige entre un partenaire souverain et l’UE. Juge, demandeur et droit seraient dans ce cas issus de la même partie ce qui est contraire à l’ensemble des exigences interna- tionalement reconnues pour une procédure arbitrale équitable et impartiale entre deux parties souveraines en vertu du droit international.

La Suisse se trouve face à un dilemme: soit, en cas de litige, nous cédons dès le début, soit la CJUE nous contraindra ensuite à agir conformément à la volonté de l’UE.

6. Pourquoi l’accord institutionnel rend-il la Suisse vulnérable au chantage?

Par le biais de l’InstA, l’UE veut imposer à la Suisse une super-clause guillotine afin de pou- voir modifier à volonté l’InstA et son champ d’application. C’est ce qui ressort clairement des articles 21 et 22: si des situations qui ne correspondent pas à la lecture qu’en fait Bruxelles se présentent, l’InstA prévoit une clause de révision (article 21). Si la Suisse n’accepte pas les

«propositions» de révision de l’InstA, l’UE peut menacer en se servant de l’article 22 – c’est-à- dire menacer la Suisse de dénoncer l’accord institutionnel et par conséquent résilier tous les accords reposant sur l’accord institutionnel. Ce mécanisme équivaut bel et bien à un chantage dont la devise serait: «marche ou crève». Et si la Suisse n’obéit pas, l’UE fera en sorte que nous nous retrouvions le bec dans l’eau.

7. Quel est le sens de l’InstA pour la politique économique extérieure de la Suisse?

Le rapprochement de la Suisse avec l’UE par le biais de l’accord institutionnel est synonyme de moins de barrières commerciales avec l’UE, mais aussi d’un éloignement plus marqué pour ce qui est du commerce éventuel avec le reste du monde. L’économie suisse est orientée vers l’international et dépend de la qualité et de la stabilité des relations commerciales qu’elle ent- retient avec ses marchés d’exportation. La Suisse ne doit pas se focaliser unilatéralement sur un seul partenaire commercial et renoncer à sa liberté en termes de politique commerciale.

Le volume de ses échanges commerciaux avec le reste du monde est aujourd’hui déjà supérieur à celui qu’elle réalise avec l’UE. De plus, la tendance montre une progression bien plus positive sur ces marchés étant donné leur croissance beaucoup plus rapide. Pour la Suisse, les marchés hors de l’UE vont continuer à gagner en importance dans un avenir proche. Se laisser enfermer

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dans le carcan de l’accord institutionnel et renoncer à sa propre liberté d’action serait donc contraire aux intérêts de la politique commerciale de la Suisse. La Suisse a tout intérêt à entre- tenir un réseau dense et étendu de relations commerciales sur les différents marchés mondiaux.

En disposant d’un réseau largement diversifié de relations commerciales à travers le monde, la Suisse réduit sa dépendance à l’égard d’un seul partenaire commercial et résiste ainsi plus faci- lement aux tentatives de pression.

8. Sans cet accord institutionnel, les entreprises suisses devront-elles supporter des coûts d’accès au marché élevés?

Un exemple du secteur des technologies médicales circule depuis quelques temps. Comme l’UE ne veut plus mettre à jour les accords bilatéraux (sans accord institutionnel), les entreprises seraient contraintes de procéder à une double certification de leurs produits ce qui entraînerait des surcoûts considérables. Il s’agit là d’une manœuvre d’intimidation. Les entreprises suisses du secteur médical ont depuis longtemps commencé à faire certifier leurs produits auprès d’un organisme de certification reconnu par l’UE afin de garantir leur exportation dans l’EEE tout en permettant également leur commercialisation sur le territoire suisse. Cette démarche a pour but de garantir – d’ores et déjà, même sans l’InstA – la certification sur tous les marchés per- tinents. Cela montre bien que les soi-disant préjudices encourus ne sont que des exagérations d’ordre politique. On peut très bien se passer de l’InstA!

9. Que doit craindre la Suisse si elle s’oppose à l’accord institutionnel?

Rien! La valeur de l’accord institutionnel est surestimée. Les propos alarmistes sur les consé- quences économiques d’une interruption du projet sont largement exagérés.

Le refus de l’accord institutionnel n’entraînerait pas à lui seul la résiliation des accords bilaté- raux existants. En effet, l’UE a un intérêt important à entretenir des relations productives avec la Suisse – même en l’absence d’accord institutionnel. En outre, les accords de libre-échange constituent une base extensible.

Un «Non» à l’accord institutionnel dans sa version actuelle ouvrirait par ailleurs la voie à une nouvelle et meilleure alternative. La Suisse pourrait enfin élargir son économie extérieure, actuellement très tournée vers l’Europe. Cela aiderait à renforcer et à promouvoir les relations économiques et les échanges commerciaux avec le reste du monde. Boussole / Europe recher- che de manière proactive une solution optimale pour protéger et promouvoir l’économie suisse sur le plan international.

10. Quel est l’impact du Brexit sur l’accord institutionnel?

Avec le Brexit, l’UE perd un État-membre qui a toujours affiché son scepticisme à l’égard de ce que certains nomment l’«intégration européenne» et qui a toujours aspiré à une économie de marché libérale. Après le Brexit, l’UE modifiera sa politique économique dans une direction plus restrictive et plus uniforme. Le temps où le Royaume-Uni, puissant État-membre, agissait

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comme élément rectificateur de ces tendances sera révolu. L’acceptation de règlements parti- culiers propres à certains pays et la marge d’interprétation et de manœuvre dans les mécanis- mes du marché intérieur vont se réduire de manière drastique. Cela doit être pris en considéra- tion au regard de l’InstA. Aucun règlement particulier, ou le moins possible, serait accordé à la Suisse. Nos intérêts en termes d’économie libérale s’en trouveraient plus que menacés.

En même temps, le Brexit est source d’opportunités pour la Suisse. En effet, le Royaume-Uni a obtenu de la part de l’UE des concessions essentielles:

• Pas d’adoption automatique du droit;

• Pas d’examen matériel des litiges par la CJUE mais par un tribunal arbitral indépendant;

• Pas de clause guillotine pour suspendre ou même résilier des contrats.

Ces concessions englobent précisément les thématiques de la politique de souveraineté que le Conseil fédéral a toujours voulu éviter jusqu’à présent. Désormais, il paraît évident que la fer- meté est payante et qu’il existe des moyens de réglementer les relations avec l’UE sans renon- cer à sa souveraineté.

Certes, la situation du Royaume-Uni et celle de la Suisse ne sont pas totalement comparables.

Le Royaume-Uni s’éloigne du marché unique et dispose désormais d’un accord de libre-échan- ge avec l’UE. La Suisse quant à elle dispose de ce statut depuis les accords de libre-échange de 1972 et a continué depuis d’intensifier ses relations avec l’UE à travers les accords bilatéraux I et II. Dans certains secteurs, nous bénéficions donc d’un accès facilité au marché unique, sans en faire partie. Grâce à ces fondements juridiques en matière de droit commercial, à savoir les accords bilatéraux I et II et l’accord de libre-échange de 1972, nous disposons d’un ensemble d’accords sur mesure.

11. L’InstA crée-t-il des relations stables entre la Suisse et l’UE, et donc de la sécurité, même pour les entreprises?

L’InstA laisse de nombreuses questions essentielles sans réponse. Premièrement, l’InstA nous oblige à adopter une législation dans le domaine des accords subordonnés. Or, nous ne savons pas encore à quoi ressemblera la législation européenne de demain. Deuxièmement, le futur périmètre n’est pas clair. À l’heure actuelle, l’InstA s’applique à cinq accords. Mais l’UE va faire pression pour négocier d’autres accords et les subordonner à l’InstA. Troisièmement, les consé- quences pour notre autonomie en matière de politique économique étrangère sont floues si l’UE veut que nous nous soumettions aux règles du marché intérieur européen. Et quatrièmement, en cas de litige, nous devons nous attendre à de longues procédures d’arbitrage.

Un accord qui laisse tant de questions en suspens ne doit pas être signé.

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