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Ce soir on sort, chacun sa fête! Consommation, Dépendances et Bien-être : de la recherche de sens à l élaboration de projet

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Academic year: 2022

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Ce soir on sort, chacun sa fête!

“ Consommation, Dépendances et Bien-être : de la recherche de sens à l’élaboration de projet”

Projet de Promotion de la Santé soutenu par la Direction Générale de la Santé de la Communauté Française.

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Nous remercions nos partenaires :

• Le Centre Local de Promotion de la Santé de Huy

• Le Service Régional de Prévention La Teignouse

• Les membres du comité de lecture

• Le service Univers Santé de l’UCL

• Le département des Sciences de la Santé Publique de l’ULg

• Le service Promes de l’ULB

La structure de ce document est directement inspirée du document ‘‘Paroles d’ados,

paroles d’acteurs de terrain au sujet du tabac’’ réalisé par l’asbl FARES (Fonds des Aff ections respiratoires).

Nous remercions les deux écoles partenaires,

les parents et les jeunes qui ont participé à la réalisation de ce projet.

Nous remercions Créatys pour l'élaboration et la réalisation de ce document.

(3)

Sommaire p3

Sommaire

1 Avant-propos

1.1. Donner la parole aux jeunes : une évidence ! 1.2. Un public

1.3. Une méthodologie

2 Les représentations de l’alcool et la fête ou

comment la consommation d’alcool en situation festive est-elle perçue?

2.1. ‘‘Faire la fête’’ : une réalité diff érente pour chacun?

2.2. Faire la fête et consommation d’alcool sont-ils toujours liés?

3 Le sens de la fête et des consommations d’alcool

3.1. Quel(s) sens les jeunes donnent-ils à la consommation d’alcool pendant la fête?

3.2. Quels sont les divers modes de consommation d’alcool par les jeunes pendant la fête?

3.3. La consommation d’alcool en situation festive présente-t-elle des risques?

4 La surconsommation d’alcool en situation festive : quelle prévention et pour quoi faire?

4.1. Prévenir : c’est-à-dire?

4.2. La prévention basée sur l’information ou la peur : effi cace?

4.3. Quel type de prévention auprès des jeunes?

4.4. Les jeunes : acteurs de prévention?

4.5. Quelques pistes de réfl exions…

5 Le rôle et la place des adultes ou comment se positionner en tant qu’ acteur de prévention?

5.1. Quand la cohérence est une nécessité...

5.2. La prévention, une aff aire de spécialistes?

5.3. Et les professionels alors?

6 Esquisse d’une démarche de promotion de la santé

6.1. La promotion de la santé…en quelques mots...

6.2. Plusieurs questions se posent...

p. 4 p. 4 p. 5

p. 7 p. 8

p. 9 p. 10 p. 11

p. 13 p. 13 p. 14 p. 15 p. 15

p. 17 p. 17 p. 19

p. 20 p. 20

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p4 Avant-propos

1. Avant-propos

De nombreux spécialistes de la santé s’accordent sur le constat suivant : parallèlement aux modes habituels de consommation d’alcool chez les jeunes, de nouvelles tendances se dessinent et inquiètent les adultes.

Il s’agit d’une part du rajeunissement des consommateurs d’alcool, et d’autre part de l’augmentation du ‘‘binge drinking’’ : boire pour boire, dans le but d’atteindre l’ivresse.

Les lieux et les occasions de faire la fête se multiplient, la fête commence parfois dès le vendredi midi. La ‘‘biture express’’ a ses adeptes et amène certains jeunes à adopter une série de conduites à risques.

Fatalité? Phénomène de société? Démission des parents?

Impuissance des autorités? Inconscience des jeunes?

Quel sens les jeunes donnent-ils à ces consommations?

Quelle place prennent-elles dans leur quotidien?

En quoi leur parole peut-elle nous éclairer sur les stratégies de prévention à développer ? C’est en allant à la rencontre des jeunes que nous avons tenté de répondre à ces questions.

1.1. Donner la parole aux jeunes : une évidence !

Les constats des professionnels de la santé sont régulièrement partagés par les adultes que nous côtoyons (parents, professeurs, éducateurs, agents PSE et CPMS,…). Il nous a semblé important, avant toute autre chose, de recueillir la parole des principaux intéressés : les jeunes.

Susciter la parole pourquoi ?

Pour comprendre le sens de ces consommations d’abord, mais aussi pour provoquer un intérêt, une réfl exion, la confrontation des avis et, pourquoi pas, la participation à des projets qui correspondent aux réalités et aux vécus des jeunes.

Ce document n’a pas la prétention d’avoir une valeur scientifi que. Il a pour objectifs d’ouvrir le dialogue, de susciter le débat, de donner un éclairage complémentaire aux documents et ouvrages réalisés par des professionnels de la santé.

1.2. Un public

Ce document fait partie intégrante d’un projet de promotion de la santé intitulé :

‘‘ Ce soir on sort, chacun sa fête ’’ mis en place par la Teignouse suite aux constats partagés par les adultes.

Le public que nous avons choisi de cibler s’apparente à celui que les alcooliers appellent les ‘‘ Teens ’’ 1, c’est-à-dire des jeunes âgés de 15 à 17 ans - ce qui représente, pour de nombreux jeunes, l’âge des premières sorties et le moment où ils se mettent à boire massivement de l’alcool lors de celles-ci.

1. D’après l’étude réalisée par le groupe porteur

‘‘ Jeunes et alcool ’’

d’Univers Santé, Média Animation et le CRIOC : ‘‘ Les publicitaires savent pourquoi : les jeunes, cibles des pub- licités pour l’alcool ’’.

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Avant-propos p5

Ce projet a été proposé aux équipes éducatives de divers établissements secondaires de la région Ourthe-Amblève-Condroz. Deux écoles ont souhaité y prendre part.

Précisons d’emblée que ces écoles présentent des diff érences considérables en raison notamment de leur situation géographique : l’une se situe en milieu semi-rural, à une quinzaine de kilomètres de Liège, et les commerces et débits de boisson y sont nombreux et faciles d’accès. La seconde se situe en milieu rural et se caractérise par l’absence de commerces et débits de boissons dans les environs.

Dans les deux établissements, nous avons sollicité la participation active d’acteurs scolaires, notamment par la création de ‘‘cellules-relais’’, composées de la direction et d’un professeur dans l’un, de la direction, d’un éducateur et d’une infi rmière du CPMS, dans l’autre.

Nous avons rencontré l’intégralité des élèves de troisième et quatrième années de ces deux écoles, toutes sections confondues, afi n de leur présenter le projet. Dans un premier temps, il leur a été proposé de participer à des groupes de parole concernant les sorties et les consommations d’alcool qui y étaient associées.

Les élèves intéressés ont été invités à s’inscrire lors d’un contact téléphonique individuel dans un des trois groupes suivants, en fonction de la fréquence de leurs sorties :

• les fêtards hebdomadaires (au moins 1x par semaine),

• les fêtards occasionnels (1 à 2 x par mois),

• les non-fêtards (rarement ou jamais).

1.3. Une méthodologie

L’intérêt de la répartition en trois groupes était de pouvoir affi ner notre perception ; en eff et il n’existe pas une seule jeunesse, tous les jeunes ne sortent pas à la même fréquence, ne font pas la fête de la même manière, n’ont pas la même attitude face aux consommations.

Cette distinction devait nous permettre d’identifi er les ‘‘eff orts’’ à faire en matière de prévention, mais aussi de diversifi er les approches et d’adapter les stratégies en fonction des diff érents publics et des circonstances dans lesquelles sont délivrés ces messages.

En utilisant la méthode des Focus group (entretiens semi-directifs de groupes), nous avons interrogé et écouté une cinquantaine de jeunes ‘‘volontaires’’. Ils nous ont livré leurs impressions sur la prévention, ont partagé leurs représentations de la fête, des consommations qui y sont souvent liées ainsi que des dangers qu’elle peut engendrer.

Ces entretiens ont été enregistrés et retranscrits intégralement. Un comité de lecture, préalablement constitué et composé d’adultes provenant de divers secteurs (professeurs et éducateurs des écoles partenaires, assistants sociaux, médecin PSE, …) nous a aidés à identifi er les idées principales contenues dans les entretiens.

Ces grandes tendances ont fait l’objet d’une première synthèse, présentée sous forme attractive graphiquement et validée par les jeunes. Ce document leur a été remis ainsi qu’aux diff érents partenaires du projet.

Il nous a ensuite semblé fondamental de donner la parole aux parents, car ceux-ci sont fréquemment mentionnés par les jeunes. Dans un souci de cohérence, nous avons décidé de rencontrer des parents d’élèves de troisième et quatrième années secondaires des deux écoles partenaires.

Les quinze parents ayant accepté de collaborer au projet ont été invités à répondre aux questions suivantes :

• selon moi, quel sens les jeunes donnent-ils à la fête?

• comment est-ce que je vis mon rôle de parent face aux sorties?

• les jeunes prennent-ils des risques à faire la fête? Si oui, lesquels et pourquoi?

• quels sont mes souhaits en matière de prévention?

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p6 Avant-propos

Avant-propos

Les réponses apportées et les échanges d’idées qui ont suivi nous ont permis de confronter les représentations des adultes aux dires des jeunes.

Ce document se veut le refl et fi dèle, mais non exhaustif, des impressions, représentations, peurs, souhaits, idées que toutes les personnes que nous avons rencontrées – jeunes et adultes – ont accepté de partager avec nous.

Il a pour objectif de donner un éclairage, constitué de plusieurs points de vue, sur un phénomène.

Il se veut une base de réfl exion et de débat autour des consommations d’alcool des jeunes en situation festive.

Il ne s’agit pas ici de diaboliser l’alcool, de le stigmatiser, de le prohiber, de viser l’abstinence… ni pour autant de banaliser tant la consommation d’alcool en situation festive que les stratégies commerciales de plus en plus agressives et ciblées.

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Les représentations de l’alcool et la fête ou comment la consommation d’alcool en situation festive est-elle perçue ? p7

2.1. ‘‘Faire la fête’’ : une réalité diff érente pour chacun?

‘‘Faire la fête’’ : cela consiste pour les jeunes intérrogés à se rassembler, à retrouver ses amis, à partager des moments conviviaux dans divers endroits (au cinéma, en rue, dans les fêtes de village, dans les bals, dans les cafés, en ville, dans les discothèques,…) avec ou sans consommation. Mais pour certains jeunes, la fête peut être, de manière systématique, associée à une consommation d’alcool.

Pour la plupart des jeunes interrogés, la fête prend tout son sens en groupe ; l’infl uence des copains est dès lors déterminante dans le choix des lieux de sortie.

Ce qu’en disent les jeunes…

« C’est le soir. Il y a les sorties où on va, on boit, on s’amuse, il y a de la musique, on danse. Puis il y a les sorties cinéma etc…

C’est plutôt en journée.»

« Etre avec des gens avec qui on s’entend bien parce que faire la fête tout seul, qu’on boive ou pas, c’est pas la même chose.»

« Démarrer d’une organisation pour aboutir à quelque chose. La fête c’est un rassemblement qui peut être préparé ou pas.»

« S’amuser, sortir avec les amis, penser à autre chose que l’école, être avec d’autres personnes que ses parents, boire un petit coup, fêter comme il se doit certains événements. »

Ce qu’en disent les parents ou comment les parents perçoivent-ils la fête chez les jeunes?

« Un moment sans les adultes… »

« La fête des ados et la nôtre, il y a beaucoup de points communs, il ne faut pas voir nos ados et nous comme deux mondes. »

« Ce n’est plus un moment privilégié (ça peut être quotidien), ça devient une fête quand ils sont plus de trois ou de quatre, moment de se rencontrer, profi ter au maximum de la vie. »

« De plus en plus d’occasions sont créées depuis quelques années : ils ont vraiment envie de s’éclater un peu dans tous les sens du terme, rompre avec toutes les obligations de la semaine. Ca peut être se rencontrer, pas toujours de façon qu’on pourrait estimer négative mais ça prend parfois des tournures négatives, comme se tester, tester les interdits par rapports aux parents, par rapport à d’autres structures. »

« Donner une défi nition de la fête va varier avec l’âge. L’idée générale est d’être ensemble, l’instinct grégaire est très important pour les jeunes, toutes les occasions sont bonnes. »

Des professionnels en parlent…

« Faire la fête : s’éclater, célébrer, partager, se rencontrer… ! Au risque de la ‘‘mé-fête’’ , de la ‘‘dé-fête’’. [...]

Le mot ‘fête’ a d’abord le sens de ‘‘célébration faite à un jour marqué’’ dans un contexte religieux. Par extension, il désigne une réjouissance qui rompt avec la vie quotidienne (fi n du XIIème siècle), un ensemble de réjouissances organisées (1273), une cause de plaisir (XIIIème siècle),… Il est employé pour ‘‘foire’’ au XIIème siècle et ‘‘tapage’’ au XIIIème siècle et désigne, par extension, toute occasion de débauche, surtout dans la locution ‘‘faire la fête’’ (Le Robert historique de la langue française). Pour Freud, ‘‘La fête est un excès permis, voire ordonné, une violation solennelle des prohibitions’’.

Il s’agit bien, dès lors, d’un espace-temps particulier (traditionnellement de l’ordre du sacré) qui permet de rompre avec le quotidien pour en assurer la continuité. » 2

2. Les représentations de l’alcool et de la fête ou

comment la consommation d’alcool en situation festive est-elle perçue?

2. Henri Patrick Ceusters, Editorial, in Les Cahiers de Prospective Jeunesse, n°35.

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p8 Les représentations de l’alcool et la fête ou comment la consommation d’alcool en situation festive est-elle perçue ?

Les représentations de l’alcool et la fête ou

comment la consommation d’alcool en situation festive est-elle perçue?

2.2. Fête et consommation d’alcool sont-ils toujours liés?

Alors que pour beaucoup de jeunes interrogés, boire de l’alcool semble être un passage obligé lorsque l’on fait la fête, certains sont hésitants, ont peur de perdre le contrôle ou n’en apprécient pas le goût.

Le type d’alcool consommé dépendra aussi du type de fête, de l’endroit, du genre de musique,... mais également des personnes avec lesquelles le jeune se trouve.

Ce qu’en disent les jeunes…

« Moi je ne sais pas m’amuser si j’ai pas bu. Si je ne bois pas, je ne sais pas me mettre dans l’ambiance. »

« Quand on voit l’état de la moitié des gens à la fi n de la soirée, ça ne donne même pas envie d’essayer. »

« Ca dépend des envies, parfois quand je vais dans une soirée je me dis : ‘‘Aujourd’hui j’ai décidé de boire plein de trucs’’ et puis parfois je bois un verre ou deux et je n’ai pas envie de plus. »

« Ca dépend de ce qu’il y a à boire aussi. A partir du moment où ils mettent des bonnes choses… »

« Ca dépend de l’ambiance de la soirée, si on s’ennuie, on boit ou on ne boit pas. Moi personnellement quand je m’ennuie, je ne bois pas et quand je m’amuse, forcément je bois parce que je sais bien qu’en m’amusant, en dansant, j’élimine en même temps. »

Ce qu’en disent les parents…

« Je ne connais pas de fête sans alcool. »

« Pour beaucoup la notion de fête est associée à un produit. »

« Mon fi ls aime les sorties ‘‘boisson’’, ma fi lle aime bien aller au resto avec des copines. »

« S’il n’y avait pas d’alcool, y aurait-il cette soirée? »

Des professionnels en parlent…

« A la fois espace de transgression et de régulation sociale, la fête incite l’individu qui y participe, qui s’y inscrit à un dépassement de soi, à une rupture avec le quotidien, quelque chose de l’ordre de ‘‘l’extra-ordinaire’’, hors des normes habituelles. [ ... ]

En eff et, la nature profonde de la fête est de l’ordre du festin : on y consomme sans compter, sans calcul, sans contrainte, sans penser à demain… dans un espace-temps suspendu, hors normes, relevant d’une autre réalité.

Dans ce contexte, la consommation de diff érents produits dont l’alcool peut s’intégrer dans un cadre relevant du rite

d’appartenance et du partage de valeurs communes, pour permettre que l’état de conscience (modifi ée) corresponde à ce qui est en train d’émerger, de se vivre, de se créer et permettre la réalisation d’une des fonctions de la fête : pratiquer l’oubli temporaire, collectif et programmé du quotidien et de ses règles.

Cet usage de produits vise à renforcer le lien social au sein de la fête, à favoriser la convivialité… bref à ‘‘faire la fête !’’… et con- sommer des psychotropes (par leur eff et ‘‘entactogène’’) peut devenir un rite nécessaire à ‘‘l’entrée en fête’’ en nivelant les niveaux de conscience, en faisant tomber les inhibitions, en permettant de partager des valeurs, de la (re)connaissance, de l’amitié (‘‘Il est des nôtres, il a bu son verre comme les autres !’’).

On se trouve donc bien face à une situation particulière, un contexte spécifi que où la non-consommation peut parfois être considérée comme une déviance, ou pour le moins conduire à une marginalisation dans ce moment

particulier.» 3 3. Henri Patrick Ceusters,

op cit.

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Le sens de la fête et des consommations d’alcool p9

3. Le sens de la fête et des consommations d’alcool

3.1. Quel(s) sens les jeunes donnent-ils à la consommation d’alcool pendant la fête?

Un point commun dans le discours d’une majorité des jeunes concerne l’utilité de la fête ; pour eux, elle permet de décompresser, de s’évader, de se couper du quotidien, de se libérer d’une pression, voire d’un stress, liés à l’école ou à diverses raisons personnelles. Pour certains, consommer de l’alcool est alors un des moyens d’y arriver. On peut dès lors se demander pourquoi ces jeunes ont le sentiment de subir autant de pressions et de la part de qui ils subissent.

La consommation d’alcool durant les sorties répond également à un besoin d’identifi cation, d’intégration au groupe, de ‘‘faire comme les autres’’.

« Le plaisir et l’amusement sont les deux principales motivations conscientes des jeunes.

L’alcool développe des attitudes positives ; ‘‘on est joyeux, communicatif, euphorique, audacieux’’, témoignent-ils, mais pour quelques-uns, l’alcool sert à combattre une situation négative, telle que le stress, la solitude, la peur de l’avenir. Ce modèle n’est pas dominant, mais il est préoccupant.» 4

Ce qu’en disent les jeunes…

« Pour faire comme tout le monde. »

« Après un ou deux verres, on ose plus faire des choses que si on ne boit rien. »

« Je pense qu’on a besoin de savoir par curiosité mais il faut pouvoir se dire, avant d’essayer : ‘‘Après c’est fi ni’’. »

« Voir l’eff et que ça fait. »

« Besoin de décompresser, de s’évader, de se lâcher, de s’amuser, d’évacuer la pression. »

« On peut boire un verre ou deux sans problème, ça fait de mal à personne. A partir du moment où on en boit plus, chacun son problème. On a le droit pour se détendre mais faut pas que ça devienne une habitude ni que ça soit par bouteille. »

Ce qu’en disent les parents…

« Mais qu’est-ce qu’on fait nous? Quand on fait la fête, il y a de l’alcool. »

« L’alcool aide à dépasser les limites. »

« Nos jeunes aiment boire, s’éclater, en tout cas chez les plus grands. »

Des professionnels en parlent…

« Si la fête est une mise entre parenthèses, une suspension des règles (habituelles), nous nous trouvons dans une situation proche de l’anomie. Dans ce cas, les débordements ne concernent pas une violation de la règle car c’est l’existence même d’une règle qui est niée et on assiste à l’eff ondrement du système d’organisation des valeurs. » 5

4. Univers Santé, fi che assuétudes n°16 5. Henri Patrick Ceusters,

op cit

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p10 Le sens de la fête et des consommations d’alcool

Le sens de la fête et des consommations d’alcool

3.2. Quels sont les divers modes de consommation d’alcool par les jeunes pendant la fête?

Chez les jeunes qui consomment de manière ‘‘régulière’’, on peut identifi er deux modes de consommation :

1) La consommation importante d’avant-fête, associée à la préparation de la fête, en groupe de copains(ines)/d’ami(e)s, dont, pour certains, le vendredi après l’école (voire ‘‘brossage’’ le vendredi après-midi), que l’on pourrait appeler la ‘‘biture express’’.

2) La consommation pour maintenir un état favorisant la participation active à la fête. On peut d’ores et déjà opérer la distinction entre d’une part la consommation ‘‘festive’’ (associée à l’envie d’être comme tout le monde, à un état de ‘‘bien-être’’, à un sentiment de contrôle de soi et de gestion des risques, etc.) et d’autre part la consommation ‘‘abusive’’(associée à un dépassement des limites).

On peut faire l’hypothèse que la ‘‘norme’’ en matière de consommation d’alcool lors des sorties correspond à une consommation limitée par le jeune lui-même, tandis que l’abus correspondrait à un état où le jeune veut être ‘‘plus pété que les autres’’, s’en distinguer. Il chercherait à perdre le contrôle de lui-même et la gestion des risques deviendrait quasiment impossible. La recherche de cet état serait la traduction d’un mal-être, et pourrait engendrer une culpabilité rétrospective.

Peut-on dans ce cas encore associer la surconsommation ou la ‘‘biture express’’ à la notion de plaisir?

Chaque groupe possède-t-il son propre mode de consommation? Pourquoi le fait d’être ‘‘pété’’ est-il majoritairement valorisé par les pairs?

La première cuite garde une valeur initiatique, elle représente souvent une condition à l’acceptation et à l’intégration dans un groupe, toujours en lien avec la valorisation de ce type de comportement.

Ce qu’en disent les jeunes…

« On essaye de ‘‘cusser’’ (boire) tout le plus rapidement possible, puis quand on sent qu’on est bien ‘‘pété’’ et que ça ne passe plus bien, on prend la bouteille avec, on va la cacher dans un coin, on sort et on va boire, c’est plus économique en fait. »

« J ’aime mieux de boire une bonne vodka-fraise, ça a un autre goût, c’est des boissons de fi lles entre guillemets mais on est plus vite bourré en buvant trois vodka-fraise qu’en buvant trois bières. Ce qui est dommage c’est que c’est plus cher. »

« Si je retourne chez moi, j’essaye de ne pas boire trop. »

« Si je retourne chez moi, je me saoûle la gueule au début puis à la fi n je me la ‘‘désaoûle’’. »

« Moi faire la fête c’est plus être avec mes amis puis danser, je sais pas mais pas trop d’alcool, peut-être un petit peu mais pas excessivement. »

Ce qu’en disent les parents…

« J e mets en opposition deux notions de la fête : se péter la gueule (la surconsommation, celui qui fait des conneries pour physique- ment se péter la gueule), les festivals où tout est excessif, exceptionnel, formidable (…). L’autre notion : ne pas sortir car sortir c’est consommer, surconsommer. »

« Se faire vomir, ils le font très jeunes, pour pouvoir continuer à boire. »

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Le sens de la fête et des consommations d’alcool p11

Des professionnels en parlent…

« La majorité des jeunes n’apprécie pas le goût de l’alcool, d’où le succès des cocktails fruités, des ‘‘pré-mix’’ ou des ‘‘téquila-paf’’ et autres ‘‘shooters’’ à boire cul-sec. L’alcoolisation existe dans le cercle familial mais elle prend tout son sens dans le groupe d’amis au sein duquel elle permet de créer un état quasi fusionnel. ‘‘L’alcool libère non des autres mais au contraire de ses soucis ou des inhibitions, de tout ce qui est extérieur au groupe en fête. Il permet d’être plus pleinement et plus entièrement avec les autres.’’

Le fait de se sentir dans le même état que ses pairs est primordial.

Malgré une vision magique selon laquelle l’alcool eff ace les barrières et diff érences sociales, les manières de boire et les discours changent, voire s’opposent, selon le milieu social. L’alcool peut avoir pour rôle de faciliter l’ouverture et la communication, de donner du cran pour partir à la ‘‘chasse’’ aux fi lles, d’animer l’esprit de compétition, etc. En distinguant un groupe d’un autre, les manières de boire participent ainsi à la construction et l’affi rmation d’une identité sociale. Les opinions sur l’alcool sont d’ailleurs souvent énoncées sous une forme collective.» 6

3.3. La consommation d’alcool en situation festive présente-t-elle des risques?

Les jeunes paraissent connaître les risques mais ces risques semblent loin d’eux, et de leurs préoccupations. Ils font souvent preuve d’une certaine insouciance. Ils affi rment rarement prendre eux-mêmes des risques, ils parlent d’autres jeunes qui en prennent. Ils disent ne pas penser aux risques lorsqu’ils font la fête.

Pour eux, l’alcool aide à braver les interdits. Ils disent avoir besoin d’adrénaline pour se dépasser.

L’alcool aiderait donc à prendre des risques. Les jeunes ont malgré tout l’impression de prendre moins de risques parce qu’ils consomment de l’alcool le plus souvent en groupe.

Les inquiétudes des parents sont vécues comme exagérées, voire ridicules.

Les jeunes font très peu référence aux risques liés à leur santé, tandis que les parents craignent une dépendance ‘‘d’après-fêtes’’.

Ce qu’en disent les jeunes…

« Au départ tout est dans la tête, notre capacité à dire : ‘‘stop maintenant j’arrête parce que ça devient dangereux’’.»

« Certaines fi lles ont l’alcool un peu chaud et alors elles ne se rendent pas compte de ce qu’elles font puis le lendemain…»

« Y en a qui ont l’alcool méchant.»

« Moi quand je vais à une soirée je fais quand même attention à ce que je bois parce que j’ai envie d’être toujours attentive à ce que je fais quand même.»

« Faire un coma éthylique, puis même se faire embarquer par des types que l’on ne connaît pas parce qu’on est pété.»

« On ne sait pas comment les gens peuvent réagir quand ils sont bourrés. On les connaît quand ils sont sobres, mais bourrés… Ils peuvent réagir assez violemment.»

« On n’y pense pas, enfi n je ne crois pas. On s’amuse puis s’il y a quelque chose bin… Ce sera de notre faute puis c’est tout. On ne se prend pas la tête.»

Ce qu’en disent les parents…

« Bien sûr, elle représente des risques s'ils ont un tempérament exclusivement suiveur.»

« On peut faire la fête sans prendre de risque. C’est le ‘‘pourquoi les jeunes prennent des risques’’ qui m’interpelle. Les enfants sont au courant des risques qu’ils courent. Pourquoi prennent-ils ces risques-là?»

« Quand on est reconnu dans un groupe pour ce qu’on est, on n’est pas obligé de descendre des bières pour se faire accepter.»

« Ce qui tracasse les parents essentiellement je suppose, c’est qu’ils mettent leur vie en danger, ça peut être la route, le lieu de la fête, des rencontres qu’on ne maîtrise pas, je pense que l’alcool aide à dépasser les limites.»

6. Lydie Desplanques,

‘‘ Pas de fête sans alcool pour les jeunes ’’, in SWAPS, n°37.

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p12 Le sens de la fête et des consommations d’alcool

Le sens de la fête et des consommations d’alcool

Des professionnels en parlent…

« Chez les garçons surtout, l’ivresse est connotée positivement, contée comme une aventure héroïque et ‘‘décrite par un langage d’artifi cier ou d’artilleur’’ : être allumé, entamé, laminé, assommé, blindé, raide, torché, déchiré, pété, éclaté, percuté, fracassé, fl ingué, détruit, mort.

Il n’existe pas vraiment d’interdit lié à l’ivresse (au moins dans les discours) en dehors de la conduite automobile. [ ... ]

Ces valeurs contrastent avec celles des parents qui privilégient la mesure et la maîtrise de soi. Les mauvaises expériences éventu- elles (coma éthylique, accident de voiture, etc.) n’incitent pas forcément les jeunes à modérer leur consommation d’alcool. » 7

« L’infl ation de fêtes et par-là même sa banalisation (entre autres parce qu’elle n’est plus de l’ordre de l’exceptionnel mais devient l’habituel) nuit à l’esprit de la fête, en nie le sens. Les règles de la fête n’étant plus (re)connues, elles sont transgressées.

C’est dans ces cas que surviennent les débordements, les ‘‘dérives’’ problématiques, dangereuses de la fête : agressions, sexualité non protégée, violences sexuelles, provocations, défi s,…

Plus banalement, la perte de sens de la fête peut se résumer à la seule consommation d’alcool, ainsi là où certains diront : ‘‘La nuit passée, j’ai fait la fête’’, il faut entendre : ‘‘J’ai bu énormément’’. Ces personnes se cachent derrière l’injonction festive (consommer comme tout le monde, participer au festin) et la fête devient un alibi pour justifi er une consommation abusive et des comportements à risques élevés. » 8

7. Lydie Desplanques, op cit.

8. Henri Patrick Ceusters, op cit..

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La surconsommation d’alcool en situation festive : quelle prévention et pour quoi faire ? p13

4.1. Prévenir : c’est-à-dire ?

La prévention désigne l’ensemble de mesures qui sont appliquées en amont de l’éclosion d’un phénomène afi n d’éviter son apparition ou, s’il existe déjà, de sorte à agir pour en diminuer les conséquences.9

Nous souhaitons envisager l’objet de la prévention - la surconsommation d’alcool par les jeunes en situation festive - non pas de façon négative (maladie, nuisance sociale, …) mais en référence au concept de santé. Nous y reviendrons dans le chapitre 5.

4.2. La prévention basée sur l’information ou la peur : effi cace ?

Lorsqu’il est question de trouver des idées en matière de prévention, ‘‘ montrer les produits ’’ ou

‘‘ faire peur ’’ sont régulièrement cités.

Lors de nos rencontres, certains jeunes eux-mêmes nous ont parlé de campagnes et d’images ‘‘ choc ’’

pour attirer l’attention et faire réagir. Pourtant, lorsqu’on leur demande si une telle stratégie aurait un eff et sur leurs propres comportements, ils reconnaissent que non.

Des expériences ont d’ailleurs prouvé que ces campagnes basées uniquement sur la peur ou l’information objective ne sont pas effi caces.

« Deux chercheurs hollandais, De Haes et Schuurman, ont étudié l’impact de diff érents modèles de prévention sur la consommation des jeunes .10

Ils ont essayé de trouver laquelle des trois approches suivantes était la plus effi cace :

• l’approche axée sur la peur, centrée sur la mise en garde,

• l’approche informative ‘‘ neutre ’’, ‘‘ objective ’’ centrée sur le produit,

• l’approche centrée sur les personnes et leurs problèmes off rant la place au dialogue, à la rencontre.

Leur expérience a été réalisée à Rotterdam, auprès d’environ mille jeunes de 14 à 16 ans, provenant de cinquante écoles diff érentes. Après analyse, les comparaisons avec un groupe contrôle où il n’y a eu aucune intervention montrent que les deux premières approches ont un eff et pervers.

Seule la dernière approche a un eff et positif. D’autres études, eff ectuées par la suite, confortent ces résultats.

Les programmes de prévention qui portent leur attention sur les jeunes (qui ils sont, comment ils vivent, en leur apprenant à surmonter leurs diffi cultés au jour le jour, …) sont effi cients, pas seulement dans la diminution de la consommation de drogues mais aussi dans leurs comportements rebelles, de recherche d’attention. » 11

Nous avons demandé aux jeunes ce qu’ils pensent de la prévention, quels sont leurs souhaits, et qui sont les personnes qui, à leurs yeux, sont les mieux placées pour leur parler de prévention.

4. La surconsommation d’alcool en situation festive : quelle prévention et pour quoi faire ?

9. Henri Patrick Ceusters,

« Drogue et préven- tion : pour une réduc- tion des risques…

de confusion », in Les Cahiers de Prospective Jeunesse, n° 27.

10. De Haes et Schuurman :

‘‘ Results of an evalu- ation study on three drug education models ’’, in Journal of health education, 18, supplement, 1975.

11. Henri Patrick Ceusters,

‘‘ Jeunes et alcool : quand la prévention s’emmêle ’’, in Les Cahiers de Prospective Jeunesse, n°32.

(14)

p14 La surconsommation d’alcool en situation festive : quelle prévention et pour quoi faire ?

La surconsommation d’alcool en situation festive : quelle prévention et pour quoi faire?

4.3. Quel type de prévention auprès des jeunes?

Ce qu’ils en disent…

« Oui en fait il y a tellement de prévention qu’on ne nous laisse même plus voir de nous-mêmes, quoi ! »

« La meilleure prévention c’est une présentation claire, précise, avec un avis objectif, et pas répétitive. Pas genre : tous les ans à la même époque on fait un truc…»

« Et puis aussi on écoute plus une personne qui l’a vécu directement que quelqu’un qui radote tout le temps et dit : ‘‘Non, ne fais pas ça’’. »

« Moi j’ai une grande sœur qui va au bal souvent et elle m’a expliqué. Et je suis sûr que si elle ne m’avait pas dit un peu ce qui se pas- sait dedans ça aurait pu être pire. »

« Faut plutôt que ce soit quelqu’un en qui on a confi ance, quelqu’un qu’on connaît bien. »

« Bin, oui il faut montrer les mauvais côtés parce que l’alcool, quand on boit, on est content, on est joyeux, on oublie tous ses soucis mais après il y a la gueule de bois, tu ne sais pas étudier, tes parents qui te gueulent dessus…»

« Des témoignages…»

« Bin ou mettre des prospectus ou quoi, affi cher des affi ches de prévention. »

Ce qu’en disent les parents…

« Pour ce qui concerne le milieu de vie, un éducateur de rue, un animateur qui peut informer, orienter, écouter. Et pour les électrons libres, des activités avec une certaine prise de risques (comme l’escalade, le rafting). Montrer qu’on peut prendre des risques mais contrôlés. »

« Accès moins facile, moins de boissons alcoolisées, prévoir plus d’endroits réservés aux jeunes. De manière générale, créer, améliorer les conditions de vie des jeunes. »

« On dit que l’exemple vient d’en haut donc on pourrait aussi faire des fêtes sans alcool. Un jour où je faisais la folle, mon fi ls m’a dit :

‘‘T’as bu là?’’… Il pense que parce que je suis extravagante, j’ai bu, mais on sait aussi s’amuser sans boire…»

« Distribuer des alcootests. On en rit sur le coup mais ça peut amener des discussions. »

« Etre à leur écoute, les laisser parler ensemble. Parler entre parents ce n’est pas évident : ça n’existe pas, des lieux où on peut parler.»

« Les organisateurs ont des responsabilités. »

« Nous sommes bien démunis par rapport à la publicité qui est faite pour l’alcool…»

« Pourquoi ne pas imaginer des soirées où les boissons alcoolisées seraient plus chères que les soft? »

Des professionnels en parlent…

Certains jeunes sont parfois complètement ignorants de la réalité des sorties ou des produits et d’autres ont une connaissance très précise de tout ce qui s’y rapporte. Ils ne sont pas égaux face à cela et c’est la raison pour laquelle la prévention doit s’adapter aux écoles, aux types de groupes et à la connaissance des jeunes en la matière.

Les outils de prévention vécus comme ‘moralisateurs’ n’ont plus vraiment d’impact, les jeunes ont le sentiment d’entendre toujours les mêmes discours et certains disent ne plus y prêter attention. Ils préfèrent échanger entre eux sur le sujet, même s’ils estiment bien souvent que des méthodes ‘choc’ sont à appliquer auprès des plus jeunes (photos, fi lms,…), tout en reconnaissant, nous l’avons dit, que ces méthodes ont peu ou pas d’impact sur leur propre consommation.

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La surconsommation d’alcool en situation festive : quelle prévention et pour quoi faire ? p15

Certains pensent qu’ils seront plus touchés par le discours d’autres jeunes, un peu plus âgés qu’eux et qui ont fait des expériences. Par contre, d’autres estiment que le recul des adultes est un atout. Ils ont par ailleurs souligné l’importance du rôle de leurs parents, et nous avons très souvent ressenti leur besoin d’avoir en face d’eux des adultes qui prennent le temps de les écouter.

La plupart des jeunes interviewés se disent prêts à s’investir en matière de prévention mais ne s’imaginent pas tous le faire dans les mêmes lieux (certains préférant s’adresser à des membres de leur famille, d’autres aux autres élèves de l’école par exemple). Le recul que permettrait l’encadrement par des adultes représente pour certains un élément important.

Lorsque l’on interroge les parents, certains considèrent le milieu familial comme un lieu de prévention privilégié et soulignent l’importance de leur rôle d’éducateur, de ‘‘fournisseur de limites’’. D’autres nous ont dit avoir l’impression que lorsque ce sont eux qui délivrent les messages préventifs à leurs enfants, l’impact de ces messages est faible, voire inexistant.

Des parents estiment que les divers lieux de vie des jeunes devraient être davantage investis au niveau de la prévention. Par exemple, une personne de référence dans l’école, qui soit ‘‘du côté des élèves’’, pourrait, selon eux, être un acteur de prévention privilégié.

Ils sont conscients que les moyens investis dans le marketing lié à la vente d’alcool sont nettement plus importants que ceux accordés à la prévention, ce qui peut engendrer un sentiment d’impuissance.

Plusieurs d’entre eux pensent que seul un événement ‘‘marquant’’ lié à ce type de consommation, vécu par un membre de l’entourage proche du jeune, pourrait induire une modifi cation du comportement de leur enfant.

En tant qu’acteurs de prévention, nous pensons qu’il importe de rester modestes : il n’est pas en notre pouvoir de supprimer les risques. Ce que nous visons par contre, c’est la création d’un contexte susceptible de les diminuer. En donnant aux jeunes les informa- tions qui les aideront à poser des choix éclairés, en favorisant l’acquisition de compétences leur permettant d’agir directement sur la santé pour l’améliorer, en les aidant à prendre conscience des impacts de leurs choix personnels sur leur santé ou leur qualité de vie.

Pour atteindre ces objectifs, nos priorités sont d’off rir une place au dialogue, à la rencontre et au renforcement personnel de chaque jeune.

4.4. Les jeunes : acteurs de prévention?

Plusieurs adolescents interviewés se sentent investis d’une mission de protection envers les plus jeunes, notamment dans leurs milieux familiaux. Ils disent souvent ne pas vouloir pour leur petit frère ou leur petite sœur ce qu’ils vivent ou font eux-mêmes.

Lorsqu’on leur demande s’ils pensent qu’il y a des messages à faire passer auprès des adolescents plus jeunes, certains ont des idées bien claires :

« Moi franchement je dirais à mon frère : ‘‘Amuse-toi, fais ta jeunesse, mais n’abuse pas’’, c’est tout ! »

« Peut-être pas leur interdire de faire des conneries mais qu’ils fassent attention aux conséquences. »

« Bien choisir ses amis, ne pas faire quelque chose si on n’en a pas envie, faire ce que nous on a envie de faire, faut bien réfl échir avant de faire quelque chose. »

« Pas faire comme tout le monde. »

« Chacun doit faire ses propres choix. »

« Moi je trouve que ce qu’il faudrait montrer aussi c’est qu’ils ont le droit de ne pas être d’accord avec certaines choses et que c’est pas parce qu’on fait comme tout le monde qu’on est spécialement mieux. Non, justement. »

« Il faut faire ses propres expériences aussi. »

4.5. Quelques pistes de réfl exions …

En matière de prévention, il n’existe pas de solution miracle. Ce que nous souhaitons partager au travers de ce point 5, ce sont des réfl exions qui pourraient être utiles à tout qui souhaite développer un projet de prévention ou, ‘‘tout simplement’’, être acteur de prévention.

Au contact des jeunes (dans le cadre de ce projet mais aussi par notre travail de terrain en tant qu’AMO), nous estimons que la prévention de la surconsommation d’alcool par les jeunes ne peut être séparée de la prévention de ce qui précarise ou détériore les liens et les solidarités sociales : le

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p16 La surconsommation d’alcool en situation festive : quelle prévention et pour quoi faire ?

La surconsommation d’alcool en situation festive : quelle prévention et pour quoi faire?

chômage, le désœuvrement, la pauvreté, le racisme, la violence, … Comme le souligne Alain Morel,

‘‘ la prévention de manifestation de mal être des jeunes se fourvoie lorsqu’elle se focalise sur les adolescents et leurs comportements dits « à risque », car elle alourdit cette période de la vie d’enjeux excessifs et ne prend pas en compte la réalité de leurs diffi cultés ni ce que traduisent ces attitudes de détresse mais aussi de désir de vivre et de créativité. Pour avoir quelques chances d’être reçue positivement, l’éducation à visée préventive doit donc partir des conditions d’existence et des préoccupations de ceux dont elle cherche l’adhésion.’’12

Pouvons-nous affi rmer que nous connaissons les conditions d’existence et, a fortiori, les préoccupations des jeunes que nous côtoyons? L’identifi cation de ces éléments pourrait sans doute être la première étape de notre action auprès des jeunes.

Line Beauchesne, professeur de criminologie de l’Université d’Ottawa, nous propose elle aussi des pistes 13. Elle a mené pendant plusieurs années des recherches sur l’effi cacité des programmes de prévention en matière de psychotropes chez les jeunes en milieu scolaire et a dégagé un certain nombre d’indices à ce sujet. Nous les reprenons ici car nous estimons qu’ils sont tout aussi pertinents pour le phénomène de surconsommation d’alcool par les jeunes en situation festive.

1. Le premier indice est la nécessité d’une stratégie multiple d’interventions qui répondent à la multiplicité des motifs de consommation. En eff et, les jeunes ne consomment pas les produits psychotropes uniquement parce que ces produis sont disponibles, d’où la faiblesse des programmes axés uniquement sur la nécessité d’abstinence ou de ‘‘savoir dire non’’;

ni parce qu’ils sont mal informés, d’où la faiblesse des programmes axés uniquement sur la présentation de produits particuliers et de leur potentiel de toxicité ; ni encore parce qu’ils ont des problèmes, d’où la faiblesse des programmes axés uniquement sur la perception des jeunes consommateurs comme des jeunes à problème.

Tout comme pour la consommation des psychotropes, nous estimons que la consommation d’alcool relève des interactions entre la personne, le produit et l’environnement et que ce rapport s’inscrit dans des modèles socioculturels. Il importe donc, dans l’élaboration d’un projet de prévention pour les jeunes, de présenter les modèles socioculturels de consommation et de discuter de l’ensemble des motivations à consommer.

2. Le deuxième indice est que la démarche en matière de consommations de psychotropes doit s’inscrire dans un discours global de promotion de la santé englobant entre autres le développement d’habiletés qui augmentent l’estime de soi et le goût de vivre, et non pas être isolée dans une problématique à part. Cette conception permet d’intégrer cette approche très tôt dans la vie des jeunes et non après qu’ils aient déjà acquis des habitudes de consommations. Cela permet également de s’inscrire dans une démarche de dialogue avec les jeunes sur ce qui les aide à vivre, sur leur estime de soi et sur leur qualité de vie.

3. Le troisième indice est que ce sont les adultes qui entourent les jeunes qui sont les messagers les plus crédibles de cette prévention. Il importe donc de sensibiliser ces adultes, interlocuteurs habituels des jeunes, à l’importance de ce rôle et de leur donner les moyens de l’assumer.

12. Alain Morel, Prévenir les toxicomanies, éd.

Dunod, Paris, 2004.

13. Citée par Henri Patrick Ceusters,

‘‘ Jeunes et alcool : quand la prévention s’emmêle ‘‘, in Les Cahiers de Prospec- tive Jeunesse, n°32.

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Le rôle et la place des adultes ou comment se positionner en tant qu’acteur de prévention ? p17

5.1. Quand la cohérence est une nécessité …

Si diff érentes études s’accordent pour observer que le premier contact du jeune avec l’alcool s’eff ectue généralement en famille, force est de constater que la relation jeune-alcool va faire l’objet de multiples attentions de la part des adultes (qu’il s’agisse du législateur, des familles, du secteur socio-éducatif, du secteur répressif ou des lobbys alcooliers).

Les intérêts des uns ne concordant pas nécessairement avec les intérêts des autres, des questions fondamentales se posent :

• Comment le jeune va-il se retrouver dans des messages antagonistes?

• Comment assurer une cohérence minimale des adultes face aux stratégies multiples en présence?

• Quelle place pour le dialogue concernant la consommation d’alcool au sein de la famille?

• Faut-il être non-consommateur pour se reconnaître le droit d’aborder la question avec les jeunes?

• Quelle crédibilité le monde des adultes peut-il encore espérer avoir aux yeux des jeunes?

On comprendra par conséquent que faire peser la prévention sur les seules épaules des jeunes serait voué à l’échec au vu, notamment, de la diversité des intérêts en présence.

On peut dès lors affi rmer que tout adulte qui se veut acteur de prévention doit envisager le phénomène dans la globalité et la complexité des modèles socio-culturels de notre société, traversés par des logiques commerciales et sécuritaires.

La question de la cohérence se pose tant en terme de cohérence des diff érents milieux qu’en terme de cohérence personnelle, entre ce que l’on dit et ce que l’on fait. Car parler de l’alcool, c’est, pour la plupart d’entre nous, penser à notre propre rapport à l’alcool. C’est alors à chaque adulte de se poser la question de savoir s’il est à l’aise avec le sujet et si, en étant lui-même consommateur d’alcool, il se reconnaît le droit de délivrer des messages préventifs aux jeunes.

« Se poser en modèle cohérent ne veut pas dire que l’on soit dépourvu de contradictions. Les jeunes n’attendent d’ailleurs pas tellement des adultes qu’ils en soient dépourvus mais bien qu’ils les acceptent. Une fois clarifi ées et reconnues, elles peuvent laisser place à un discours authentique que le jeune peut entendre.» 14

5.2. La prévention, une aff aire de spécialistes?

Si l’on considère la prévention comme un processus d’éducation à long terme au travers du quotidien, commençant bien avant les premières consommations, il apparaît que chaque personne en contact avec le jeune va pouvoir développer des attitudes préventives, quelle que soit sa situation par rapport au jeune : parent, éducateur, enseignant, animateur, commerçant,… Chacun peut, de sa place et à sa place, contribuer à l’éducation et à la prévention en écoutant les jeunes, en étant un point de repère pour eux, en les conseillant, en les informant, etc.

5. Le rôle et la place des adultes ou comment se positionner en tant qu’acteur de prévention?

14. '' Paroles d’ados, paroles d’acteurs de terrain au sujet du tabac. Une base de réfl exion et de débat autour des usages, de la consommation et de la dépendance '', document rédigé par Bérengère Jans- sen et Cécile Plas (FARES) avec la collaboration d’Alain Cherbonnier (Question Santé).

(18)

p18 Le rôle et la place des adultes ou comment se positionner en tant qu’acteur de prévention ?

Le rôle et la place des adultes ou comment se positionner en tant qu’acteur de prévention?

Voici quelques pistes permettant à chacun d’explorer 15

• la question du sens

• les limites, le balisage

• la bienveillance et la confi ance

• la coopération

La question du sens

« On est jeune, c’est pas à trente ans qu’on va pouvoir sortir. »

En eff et, certains jeunes n’ont pas envie de grandir car ils perçoivent le monde adulte comme ennuyant.

Les jeunes s’interrogent sur le sens de leur vie, de celle des adultes… Comment témoigner de ce qui fait sens pour nous dans le quotidien, dans nos métiers, nos familles? Osons-nous leur parler de nos rêves, de nos aspirations, de ce en quoi nous croyons? La tendance au ‘‘jeunisme’’ ambiant fait parfois de nous des adultes désincarnés hésitant à témoigner de leurs valeurs au risque de paraître

‘‘ringards’’.

Alors quelles perspectives, quels ‘‘combats’’ qui donneraient un sens à leur vie les nouvelles générations peuvent-elles s’approprier?

Les limites, le balisage

Nous l’avons vu précédemment, les jeunes attendent de nous des limites, que ce soit pour s’y conformer ou pour les transgresser. Ils en ont besoin pour se construire et sortir de l’anomie. Les limites, les repères font partie intégrante d’un système d’éducation cohérent et respectueux de l’enfant.

Néanmoins, pour diverses raisons, nous n’avons pas toujours envie ou n’osons pas nous opposer à lui. Or non seulement l’enfant, le jeune a besoin de limites, d’interdits, mais en outre la position que nous adoptons et lui communiquons peut avoir un impact réel sur son comportement. Ainsi par exemple, il a été démontré que la désapprobation des parents permettait de reculer l’âge de la première consommation d’alcool chez les jeunes, ce qui est loin d’être négligeable lorsqu’on sait que la plupart du temps la première consommation d’alcool a lieu dans la famille et que plus le comportement est installé tôt, moins il sera facile de s’en défaire.

Nous pouvons par ailleurs éduquer nos enfants à la consommation au sens large et démonter avec eux les mécanismes qui les entraînent vers le ‘‘tout tout de suite’’ et les mirages de l’oubli. Bien sûr, si l’on veut être cohérent, cela nécessitera que les adultes que nous sommes nous interrogions sur nos propres consommations.

La bienveillance et la confi ance

A la question : ‘‘Y a - t-il des choses que vous auriez voulu qu’on vous dise avant que vous ne commenciez à sortir?’’, un jeune a répondu : ‘‘Je te fais confi ance’’.

Loin de l’angélisme ou de la diabolisation, osons la confi ance…

15. ‘‘ Trajets de l’exclusion à l’autonomie des jeunes : des pistes d’action ‘‘, document rédigé par le Centre Liégeois d’Aide aux Jeunes, La Teignouse et Trempoline.

(19)

Elle se construit dès le plus jeune âge ; soyons convaincus que nos jeunes ont des capacités et peuvent

‘‘résister’’ si nous leur fournissons des outils. Construisons avec eux le cadre : sortir oui mais quand, à quelle fréquence, dans quelles conditions et avec quels critères, avec quelles sanctions en cas de non-respect des limites … ‘‘A quoi t’engages-tu?’’

La coopération

Les rôles des adultes doivent s’articuler et se compléter. La prévention dans une soirée n’exclut pas une action répressive sur le chemin du retour. Eduquer nos enfants ne nous exempte pas d’interpeller le législateur en matière de vente d’alcool à des mineurs.

5.3. Et les professionnels alors?

Comme l’a mis en évidence Line Beauchesne, ce sont les adultes qui entourent les jeunes qui sont les

‘‘messagers’’ les plus crédibles de la prévention. Ils pourront également être des relais idéaux pour orienter les jeunes vers les professionnels et les services appropriés.

Quant aux professionnels, ils ne possèdent malheureusement pas de ‘‘baguette magique’’…

Selon nous, le rôle des intervenants spécialisés en prévention est d’apporter aux diff érents adultes précités des outils en matière d’information, de sensibilisation, d’accompagnement et d’écoute. Leur intervention n’étant bien souvent que ponctuelle, nous la concevons davantage comme un soutien que comme la condition sine qua non de l’action. Concrètement, les intervenants pourront aider à construire une démarche, rassemblant les uns et les autres autour de références et de méthodes.

Il est alors fondamental que les professionnels établissent des partenariats avec les organismes qui gravitent autour des jeunes tels que les écoles, les CPMS, les PSE, les maisons de jeunes, les mouvements de jeunesse, les clubs sportifs,… en vue de développer des projets de prévention.

Les professionnels veilleront à garantir la cohérence entre les diff érentes approches mises en œuvre dans les projets développés, à aider les adultes à identifi er les diverses logiques en présence et les enjeux éventuellement sous-jacents.

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p20 Esquisse d’une démarche de promotion de la santé

6.1. La promotion de la santé… en quelques mots

« La promotion de la santé repose sur une conception globale, dynamique et positive de la santé et vise à augmenter chez l’individu et la collectivité le pouvoir d’agir sur leur santé. »16

Elle articule diff érentes actions en faveur de la santé. Elle a pour objectif de l’intégrer dans un processus dynamique caractérisé par trois facteurs :17

• la participation des personnes concernées par la problématique : on considère que les individus et/ou les groupes auxquels ils appartiennent peuvent acquérir peu à peu les compétences leur permettant d’agir directement sur la santé pour l’améliorer ;

• la responsabilisation : la personne, le groupe prennent conscience des impacts de leurs choix personnels et collectifs sur leur santé ou leur qualité de vie ;

• l’approche globale : l’environnement de chacun ou de chaque groupe est pris en compte (contexte social, professionnel, culturel, aff ectif).

6.2. Plusieurs questions se posent…

Par qui doit passer la promotion de la santé?

Vers qui doit-elle être dirigée?

A quel moment?

Comment et par quels moyens?

Nous l’avons dit, la promotion de la santé est caractérisée par la participation et la responsabilisation des personnes concernées. Cependant, en ce qui concerne la surconsommation d’alcool par les jeunes en situation festive, vu l’étendue du phénomène, les enjeux en présence et la nécessité de privilégier une approche globale, il nous paraît fondamental de motiver et de mobiliser l’ensemble des acteurs concernés (intervenants du secteur socio-éducatif mais aussi parents, familles, animateurs de mouvements de jeunesses, animateurs sportifs, etc.) et de ne pas faire peser la prévention uniquement sur les épaules des jeunes.

Ainsi, les actions développées pourront cibler diff érents publics et être réalisées par diff érents acteurs et grâce à diff érents moyens.

Nous pensons qu’il serait opportun de développer des dispositifs de promotion de la santé pour compléter une éducation à long terme favorisant l’estime de soi, le renforcement personnel et mettant l’accent sur l’intérêt de prendre soin de soi.

En eff et, nous avons évoqué ci-dessus l’importance pour les jeunes de se sentir dans le même état que leurs pairs. Par conséquent, il importe que les adultes se demandent comment aider les jeunes à trouver leur place au sein du groupe, à se sentir intégrés, sans devoir passer par la sur consommation d’alcool. Comment les aider à être plus résistants et critiques vis-à-vis de la pression du groupe?

6. Esquisse d’une démarche de promotion de la santé

16. Henri Patrick Ceusters,

‘‘ Jeunes et alcool : quand la prévention s’emmêle ‘‘, in Les Cahiers de Prospec- tive Jeunesse, n°32.

17. ‘‘ Vivre, apprendre, expérimenter la santé à l’école. Des pistes de réfl exion pour l’action ‘‘, document conçu et réalisé par le Centre de Ressources et de Documentation en Promotion Santé de l’Institut Provincial d’Hygiène Sociale de Namur.

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Esquisse d’une démarche de promotion de la santé p21

Certains parents nous disent :

« Travailler le respect de soi-même… C’est quelque chose à travailler dès la petite enfance, mais comment? »

« La prévention ce n’est pas seulement sur les produits, c’est aussi trouver sa personnalité, trouver d’autres façons d’exister. »

On peut donc estimer que l’on se situe déjà dans une démarche préventive lorsqu’on aide les jeunes à développer une vision positive d’eux-mêmes et de leurs comportements. Cela peut passer par un renforcement de leurs aptitudes, par la reconnaissance de leurs compétences, la valorisation de leurs comportements responsables, et par des activités dans lesquelles ils pourront puiser des émotions qui les feront grandir et leur permettront de se sentir vivants.

Parallèlement à ce travail de renforcement personnel du jeune, les dispositifs de promotion de la santé pourraient s’appuyer sur des ‘‘moments clefs’’ identifi és avec les diff érents acteurs (par exemple la fi n des examens, la Saint-Nicolas,…). De tels projets ne sont possibles que si certains partenaires s’impliquent, tels que :

• les organisateurs de soirées

• les parents

• les membres d’équipes éducatives des établissements scolaires

• les CPMS et PSE

• le secteur socio-éducatif et sportif

• les commerçants et cafetiers

• les forces de l’ordre

• les alcooliers

• et bien sûr les jeunes eux-mêmes

Ainsi, il sera utile d’amener les organisateurs de soirées à se poser des questions sur leur activité : l’intérêt fi nancier justifi e-t-il d’exposer les jeunes à certains risques? Pourquoi ne pas réfl échir avec eux à une charte ‘‘éthique’’ par laquelle ils s’engageraient, par exemple, à fi xer un âge minimum d’entrée à la soirée, à limiter la nature et le choix des boissons alcoolisées, à diminuer le prix des boissons non-alcoolisées, à proposer de l’eau gratuitement,…

Il faudra par ailleurs sensibiliser et impliquer les parents et les éducateurs. Savent-ils réellement ce que leur enfant vit en soirée? Osent-ils poser des limites, quitte à aff ronter le jeune qui aimerait pouvoir

‘‘faire comme les autres’’? Quand permettre ou non les sorties, selon quels critères? Comment réagir face à la consommation d’alcool? Faut-il l’interdire? La négocier? Quel sens le jeune donne-t-il à la fête? Quels modèles a-t-il? Comment perçoit-il le monde adulte? (Beaucoup de jeunes voient les adultes comme des gens qui s’ennuient et ne s’amusent plus).

Au niveau des distributeurs, des initiatives telles que ‘‘Cafés Futés’’ et ‘‘Commerces Futés’’

(projets développés dans les cafés et commerces consistant en la distribution d’un label en échange du respect d’une démarche éthique vis-à-vis des mineurs), peuvent progressivement amener des acteurs commerciaux à prendre conscience de leurs responsabilités. A plus long terme, l’objectif est de provoquer des changements d’attitudes et de pratiques de leur part.

Au niveau des jeunes, si l’on veut redonner un sens positif à la fête, des événements de grande ampleur peuvent se révéler très effi caces.

Ainsi, ‘‘l’Aquafi esta’’ est une manifestation organisée depuis trois ans à Aywaille, à la fi n des examens du mois de juin. Cet événement a notamment pour objectif de proposer des alternatives à la consommation massive d’alcool lors de la fi n des examens en off rant aux jeunes diverses activités et animations (death-ride, concerts, stands d’information et de prévention,...).

Puisque, comme nous l’avons relevé antérieurement, la non-consommation d’alcool dans le cadre de la fête peut parfois être considérée comme une déviance, ou pour le moins, conduire à une marginalisation, il nous semble urgent d’inverser la tendance. Nous sommes convaincus que c’est

(22)

p22 Esquisse d’une démarche de promotion de la santé

Esquisse d’une démarche de promotion de la santé

aux adultes d’amorcer ce mouvement, de travailler à normaliser une consommation raisonnable et responsable d’alcool en situation festive.

« Proposer des boissons délicieuses, sans alcool, à petit prix. C’est pas logique de boire une eau ou un coca (souvent chaud et plat) pour le même prix qu’une bière. Si on veut un truc bien frais, il faut prendre une bière. »

Cette réfl exion d’un parent nous a permis, dans le cadre du projet ‘‘Ce soir on sort, chacun sa fête’’- projet présenté dans l’avant-propos - de proposer à une école partenaire d’élargir l’off re de boissons non alcoolisées lors du bal des rhétos. L’idée a séduit la cellule-relais ainsi que les élèves de rhéto ; un bar soft attractif (une fraise géante avec granitas et jus de fruits originaux) a été installé. Le prix de ces boissons ainsi que de l’eau était diminué de 0,50 euro par rapport aux boissons alcoolisées.

Nous avons pu constater que ce type d’initiative rencontre les attentes des équipes éducatives et est positivement accueilli par les jeunes.

Ces diff érents projets nous confortent dans l’idée que la promotion de la santé se conçoit non comme un processus réactif à une problématique, mais comme un système éducatif de promotion, de valorisation de comportements sains développés par une majorité de jeunes. Nous parions sur le fait que ces comportements feront ‘‘pression’’ sur des minorités et non l’inverse.

Nous sommes conscients que les moyens attribués à la prévention sont dérisoires par rapport à ceux que l’industrie de l’alcool consacre à la publicité. Ce constat pourrait engendrer un sentiment de découragement bien légitime… et pourtant… nous ne sommes pas totalement démunis.

Réaliser avec les jeunes des campagnes d’affi chage pour promouvoir la consommation raisonnable et responsable d’alcool peut faire partie des moyens dont nous disposons pour détourner au profi t de la prévention la force de séduction/conviction qui se dégage des stratégies des producteurs de boissons alcoolisées.

Pour aider les jeunes à résister aux pressions dont ils font quotidiennement l’objet, nous pouvons aussi utiliser l’éducation aux médias c’est-à-dire par exemple :

• analyser des messages publicitaires, quel que soit le média utilisé (Quelle est sa fréquence?

Quels sont les arguments utilisés? Quel est le message sous-jacent? A quoi est-on sensible dans cette publicité? Pourquoi?) ;

• aiguiser le sens critique du jeune par rapport aux ‘‘normes’’ que les publicités pour l’alcool tentent d’imposer (exemple : une publicité peut laisser entendre que la virilité dépend de la consommation d’une boisson) ;

• identifi er les stratégies utilisées pour endormir leur vigilance et leur faire prendre conscience que les publicitaires jouent sur leurs besoins, leurs manques, pour susciter une réaction d’achat ; en résumé qu’ils les prennent pour des ‘‘pigeons’’;

• …

Ces démarches doivent cependant pouvoir s’appuyer sur des relais médiatiques et politiques, à l’inverse de ceux qui stigmatisent les ‘‘comportements déviants, les problèmes des jeunes…’’ en cours actuellement.

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Esquisse d’une démarche de promotion de la santé p23

« Si l’on habite une maison au bord de l’océan, plutôt que de bâtir un mur autour de cet océan, ne vaut-il pas mieux apprendre à ses enfants à nager?»

Henri Patrick Ceusters

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